2.4 - Politique monétaire Flashcards
Plan
1. Les mandats et cadres opérationnels des banques centrales continuent d’évoluer
1.1. La cible d’inflation a évolué peu avant le choc inflationniste
1.2. Des évolutions plus structurantes de mandats sont toutefois lointaines, tant sur le plan du niveau de l’objectif d’inflation que de l’introduction de critères de stabilité financière
1.3. La considération du risque climatique et le verdissement de la politique monétaire constituent des priorités
2. L’orientation monétaire doit trouver l’équilibre entre lutte crédible contre l’inflation et maintien de conditions financières soutenables
2.1. Alors que la Réserve fédérale prévoit de maintenir ses taux en territoire restrictif, la réduction de son bilan soulève d’importants enjeux pour la stabilité financière
2.2. La BCE doit trouver le juste équilibre entre normalisation et protection de l’activité
2.3. Les risques de dominance budgétaire invitent les banques centrales à repenser le « partenariat » entre politiques budgétaire et monétaire
3. La mise en oeuvre de nouveaux instruments peut éventuellement améliorer l’efficience de la politique monétaire
3.1. Une politique monétaire plus ciblée constitue une approche pertinente pour la complexifier et la préciser
3.2. La stratégie de contournement du secteur bancaire connue sous le nom de « monnaie hélicoptère » présente des avantages évidents mais génère d’importantes difficultés techniques et comptables
3.3. La mise en place d’une monnaie numérique de banque centrale (MNBC) peut permettre de renforcer les effets de la politique monétaire face aux initiatives privées et alors que l’utilisation du cash est, globalement, en réduction.
Quelle est la principale différence entre la stratégie monétaire de la Réserve fédérale américaine annoncée en 2020 et sa stratégie précédente ? Quel changement la Réserve fédérale a-t-elle apporté à son objectif en matière d’emploi dans sa stratégie de 2020 ?
- La principale différence entre la nouvelle stratégie monétaire de la Réserve fédérale annoncée en 2020 et sa stratégie précédente réside dans l’adoption d’un ciblage flexible de l’inflation moyenne, permettant à la Réserve fédérale de compenser les périodes de faible inflation par des périodes d’inflation plus élevée que l’objectif de 2 %. Auparavant, l’objectif était un ciblage symétrique de l’inflation autour de 2 %, sans ajustement pour les périodes de sous ou de surinflation.
- Dans sa stratégie de 2020, l’objectif en matière d’emploi de la Réserve fédérale est passé en première position et est désormais appréhendé de manière inclusive. Cela ouvre potentiellement la voie au ciblage d’un “racial gap” sur le marché du travail afin de réduire le chômage dans certaines communautés. La banque centrale s’est également engagée à combattre de manière préemptive le recul de l’emploi.
Quels nouveaux éléments la BCE a-t-elle inclus dans sa stratégie révisée pour mesurer l’inflation? Quelles sont les deux analyses interdépendantes sur lesquelles le Conseil des gouverneurs de la BCE se base désormais pour garantir la proportionnalité des décisions de politique monétaire? Comment la BCE compte-t-elle rendre ses décisions de politique monétaire plus accessibles au grand public? Quand la BCE prévoit-elle de conduire la prochaine évaluation de sa stratégie monétaire?
- Dans sa stratégie révisée, la BCE continue de privilégier l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH), tout en admettant l’importance d’inclure les coûts des logements occupés par leur propriétaire pour une meilleure estimation de l’inflation pertinente pour les ménages. Cependant, l’intégration complète de ces coûts prendra plusieurs années.
- Le Conseil des gouverneurs de la BCE se base sur deux analyses interdépendantes pour garantir la proportionnalité des décisions de politique monétaire: une analyse économique et une analyse monétaire et financière. Cette approche reflète la compréhension de la BCE que la stabilité financière est une condition préalable à la stabilité des prix.
- La BCE entend rendre ses décisions de politique monétaire plus accessibles au grand public en adoptant des mesures de communication plus claires et en impliquant une plus grande variété de participants, y compris des académiques, des citoyens et des praticiens, dans ses processus de revue stratégique.
- La BCE prévoit de conduire la prochaine évaluation de sa stratégie monétaire en 2025, ce qui lui permettra d’assurer l’efficacité de sa stratégie et d’apporter des ajustements basés sur l’évolution des conditions économiques et financières.
Quelle cible d’inflation Blanchard recommande-t-il et pour quelles raisons? En quoi une inflation de 4 % est-elle considérée comme bénéfique pour le désendettement? Pourquoi les coûts macroéconomiques d’une inflation de 4 % sont-ils jugés faibles? Pourquoi une cible d’inflation de 4 % est-elle particulièrement adaptée à la zone euro selon Blanchard?
- Blanchard recommande une cible d’inflation de 4 % à moyen terme pour éloigner l’économie du risque de déflation et éviter une situation de trappe à liquidité. Une inflation plus élevée permet à la politique monétaire d’être plus efficace en maintenant le taux d’intérêt réel à un niveau plus bas, favorisant ainsi le retour au plein emploi en cas de retournement de cycle économique.
- Une inflation supérieure de 2 points de pourcentage contribue positivement au désendettement car elle réduit le poids réel de la dette. L’inflation plus élevée diminue la valeur réelle de la dette, rendant ainsi plus facile pour les débiteurs de rembourser leurs obligations.
- Les coûts macroéconomiques associés à une inflation de 4 % sont considérés comme faibles car les études varient considérablement quant au seuil à partir duquel l’inflation deviendrait nuisible pour la croissance économique, et aucune étude ne positionne ce seuil à 4 %. Cela suggère que l’économie peut tolérer une inflation à ce niveau sans subir d’effets négatifs significatifs sur la croissance.
- Selon Blanchard, une cible d’inflation de 4 % est adaptée à la zone euro car elle ne pénaliserait pas les grandes économies européennes. Elle prend en compte l’effet Balassa-Samuelson, selon lequel certains pays en rattrapage économique connaissent naturellement un taux d’inflation plus élevé. Ainsi, une cible plus élevée permettrait un meilleur équilibre inflationniste au sein de la zone euro, sans imposer un objectif trop restrictif pour les pays comme l’Allemagne et la France.
(Blanchard, Dell’aricia et Mauro, Rethinking Macroeconomic policy, 2010)
Quel est le “principe de séparation” mentionné par Schnabel en 2023 ? Pourquoi les macroéconomistes privilégient-ils la politique prudentielle plutôt que la politique monétaire pour traiter de la stabilité financière ? Quelles sont les limites évoquées à l’identification des bulles financières par les autorités monétaires ? Comment la Bank of England a-t-elle respecté le principe de séparation dans son intervention en septembre 2022 ?
- Le “principe de séparation” se réfère à la distinction claire entre la politique monétaire, qui vise prioritairement la stabilité des prix, et la politique prudentielle, qui s’occupe de la stabilité financière. Ce principe souligne l’importance de ne pas mélanger les objectifs et les instruments de ces deux domaines pour préserver l’efficacité et la crédibilité des interventions de la banque centrale (Schnabel, Monetary and financial stability – can they be separated?, 2023).
- Les macroéconomistes privilégient la politique prudentielle pour la stabilité financière car intégrer cette dernière dans les objectifs de la politique monétaire compliquerait les arbitrages déjà difficiles de cette politique, en particulier dans la lutte contre l’inflation et vis-à-vis du cycle d’activité. Cette complexité accrue risquerait d’affaiblir la crédibilité de la banque centrale, allant ainsi à l’encontre du principe de Tinbergen, qui stipule qu’un instrument doit être dédié à un seul objectif.
- Les limites évoquées concernent les difficultés épistémologiques à distinguer si la hausse des prix des actifs est due à des bulles financières ou à des gains de productivité et autres facteurs fondamentaux. Si la hausse est justifiée par les fondamentaux, toute intervention restrictive de la politique monétaire visant à contrer une supposée bulle pourrait nuire inutilement à l’activité économique.
- La Bank of England a respecté le principe de séparation lors de son intervention en septembre 2022, lorsqu’elle a acheté des Gilts en urgence pour stabiliser le marché souverain britannique et protéger le système des fonds de pension anglais face à une hausse soudaine des taux. L’intervention a été conçue pour être suffisamment pénalisante et temporaire, visant uniquement à assurer la stabilité financière sans impacter la politique monétaire générale (Hauser, Looking through a glass onion: lessons from the 2022 LDI intervention, 2023).
Quel est le rôle du Network for Greening the Financial System (NGFS) dans le contexte du défi climatique selon le texte ? Pourquoi la lutte contre le changement climatique n’est-elle pas formellement partie du mandat des banques centrales ?
- Le Network for Greening the Financial System (NGFS) joue un rôle important en promouvant la prise en compte du défi climatique par les institutions financières. Ce réseau de banques centrales et de superviseurs, incluant des entités telles que la BaFin, l’ACPR, la BdF, la Bundesbank, la PBOC, la BOE, et la Banque d’Espagne, s’efforce de couvrir et d’intégrer les enjeux liés au climat dans les pratiques et les politiques financières à travers le monde.
- En dépit de leur prise en compte du défi climatique, la lutte contre le changement climatique ne fait pas formellement partie du mandat des banques centrales principalement parce que leur mission première reste la stabilité financière et le financement de l’économie. Toutefois, l’impact du changement climatique sur la politique monétaire est reconnu et pris en compte dans leurs analyses et leurs actions.
Comment les changements climatiques influencent-ils la politique monétaire selon B. Coeuré ? Quels sont les trois risques inflationnistes liés au réchauffement climatique identifiés par Schnabel ? En quoi consiste l’inflation verte (greenflation) et pourquoi est-elle significative pour la BCE ?
Selon B. Coeuré, les changements climatiques influencent la politique monétaire de plusieurs manières. Les événements climatiques extrêmes, comme les sécheresses, affectent les prix des récoltes, influençant ainsi l’ensemble des prix dans l’économie. De plus, certains chocs climatiques peuvent impacter la demande agrégée, modifiant les conditions économiques auxquelles les banques centrales doivent répondre.
Schnabel identifie trois risques inflationnistes liés au réchauffement climatique :
- L’inflation climatique (climateflation), provoquée par la hausse des événements naturels graves,
- L’inflation fossile (fossilflation), liée au recours continu aux énergies fossiles et à la réduction des investissements dans ce domaine,
- L’inflation verte (greenflation), associée à la demande accrue pour les minerais utiles à la transition énergétique. Cette dernière est particulièrement surveillée par la BCE car elle résulte d’un choc de demande.
L’inflation verte, ou greenflation, se réfère à l’augmentation des prix des minerais et d’autres ressources nécessaires à la transition énergétique vers des sources plus durables. Cette inflation est significative pour la BCE car elle représente un choc de demande spécifique qui peut avoir des implications importantes pour la politique monétaire et la stabilité des prix. La BCE surveille donc attentivement ce phénomène pour ajuster ses mesures en conséquence.
Quels seraient les effets de la transition vers une économie moins dépendante du pétrole sur la volatilité des prix ?
La transition vers une économie moins dépendante du pétrole réduirait significativement la volatilité des prix, principalement parce que cela diminuerait l’impact des fluctuations des prix du pétrole sur l’économie globale. Moins de dépendance signifie moins de sensibilité aux chocs de prix du pétrole, entraînant une stabilité des prix accrue.
Quelles sont les complexités liées au verdissement de la mise en œuvre de la politique monétaire ?
- Le verdissement de la politique monétaire pose deux défis principaux. Premièrement, il y a la question de la hiérarchisation des mandats, comme le souligne l’article 3 du TFUE, qui peut entrer en conflit avec l’intégration des considérations environnementales. De plus, le marché des obligations vertes est considéré comme un obstacle à un programme d’achat d’actifs vert, principalement parce qu’il est encore insuffisamment liquide et profond. Cela signifie qu’il n’y a pas assez de volume ou d’activité sur ce marché pour soutenir un programme d’achats d’actifs de grande envergure sans potentiellement perturber le marché lui-même.
Comment l’Eurosystème a-t-il adapté son cadre de collatéral de politique monétaire pour encourager le financement durable ? Quelles autres actions la BCE a-t-elle entreprises dans le cadre de sa lutte contre le changement climatique ?
- L’Eurosystème a adapté son cadre de collatéral de politique monétaire en rendant éligibles les obligations liées à des objectifs durables. Cela a permis à certaines entreprises d’émettre de tels titres, favorisant ainsi le financement de projets durables. En outre, en 2022, l’Eurosystème a verdoyé son benchmark d’achat de titres dans le cadre du CSPP (Corporate Sector Purchase Programme), encourageant davantage les investissements verts.
- Outre l’évolution de son cadre de collatéral de politique monétaire, la BCE a entrepris plusieurs autres actions dans le cadre de sa lutte contre le changement climatique. Ces actions incluent des évaluations macroéconomiques spécifiques, le développement de bases de données, la gestion des risques financiers liés au climat, et l’accroissement de la transparence autour des impacts financiers du changement climatique. Ces efforts visent à intégrer les considérations climatiques dans l’ensemble des activités de la BCE.
Quels défis la BCE doit-elle relever dans sa politique monétaire selon I. Schnabel ? Pourquoi la BCE est-elle préoccupée par le ratio de sacrifice dans sa lutte contre l’inflation ? Quelles sont les implications d’un taux de change trop faible pour la BCE ?
- Selon I. Schnabel, la BCE doit relever plusieurs défis, dont la fin de la “divine coïncidence”, l’interaction avec les instruments budgétaires pour protéger les ménages et entreprises touchés par la crise énergétique, la prise en compte d’un ratio de sacrifice plus élevé, et la gestion des risques liés à un taux de change trop faible qui peut aggraver l’inflation. Elle doit également veiller à préserver des conditions de financement équitables au sein de la zone euro et à éviter une refragmentation des conditions financières (2020, discours Jackson Hole).
- La BCE est préoccupée par le ratio de sacrifice parce qu’il représente le coût économique des mesures de lutte contre l’inflation, notamment dans une économie moins sensible aux taux d’intérêt. Ce contexte rend les actions de la BCE potentiellement plus coûteuses en termes d’impact sur l’activité économique, d’où la nécessité de calibrer soigneusement sa politique monétaire.
- Un taux de change trop faible peut accentuer les mécanismes inflationnistes en augmentant le coût des importations. La BCE doit donc surveiller de près le taux de change pour éviter que des dépréciations excessives ne contribuent à l’inflation, tout en gérant les interactions complexes avec la politique monétaire et les conditions économiques globales.
Qu’est-ce que la dominance budgétaire ? En quoi la normalisation de la politique monétaire occasionne-t-elle des pertes pour les Banques centrales ? En quoi cela pourrait nécessiter une recapitalisation par les États ? Pourquoi le niveau élevé d’endettement public est un problème pour le non-réinvestissement des titres arrivant à échéance ?
- La dominance budgétaire se produit lorsque la politique monétaire d’une banque centrale est influencée ou limitée par le niveau de la dette publique.
- Dans le contexte actuel, la normalisation des politiques monétaires non conventionnelles occasionne des pertes potentiellement massives pour les banques centrales qui augmentent leurs taux directeurs, étant donné qu’elles rémunèrent les excédents de liquidité à des taux en hausse pour combattre l’inflation.
- Si ces coûts deviennent trop élevés par rapport aux revenus, les banques centrales pourraient se retrouver en situation de déficit, ce qui obligerait potentiellement les États à les recapitaliser pour assurer leur bon fonctionnement, en particulier dans des cas comme la BNB et la DNB où le risque est accentué par l’endettement public élevé.
- Cette dominance est accentuée par le niveau élevé d’endettement public des différents États. Ainsi, la réduction de la taille du bilan – par le non-réinvestissement des titres arrivant à échéance – entraîne une hausse des taux souverains et donc une augmentation de la charge de la dette. Cette hausse augmente les difficultés de financement des États sur le marché obligataire.
Comment Schnabel distingue-t-il la politique monétaire de la BCE de la dominance budgétaire ?
Schnabel argue que la politique monétaire de la BCE ne relève pas de la dominance budgétaire pour trois raisons principales :
- l’absence de répression financière, comme en témoigne la dissociation entre les achats de dette et les émissions souveraines ;
- la continuité de la politique monétaire suivant une règle de Taylor ajustée ;
- et le maintien de la fonction disciplinaire des marchés, illustré par l’évolution des spreads de crédit qui restent sensibles aux risques idiosyncratiques.
(Schnabel, The shadow of fiscal dominance: misconceptions, perceptions and perspectives, 2020).
Quelle solution le FMI propose-t-il pour concilier politique monétaire et budgétaire ? Quelle est la proposition de Monnet pour une gestion optimale des politiques monétaires et budgétaires ?
- Le FMI propose la création de véhicules financiers ad hoc, financés à la fois par des contributions du Trésor (en haut de bilan) et par de la dette et du cash fournis par la banque centrale (au milieu et en bas de bilan). Cette structure, similaire au Main Street Lending Program de la Réserve fédérale, permettrait de fournir de la liquidité ou de racheter des prêts pour soutenir l’économie sans augmenter significativement le déficit public (FMI, Considerations for Designing temporary liquidity support to businesses, 2020).
- Monnet propose la création d’un Conseil européen du crédit, émanant du Parlement européen ou dépendant conjointement de la Commission et du Parlement européen. Ce conseil délibérerait sur la meilleure combinaison entre outils monétaires et budgétaires pour atteindre des objectifs spécifiques, tels que la création d’emplois ou la lutte contre le changement climatique, s’inspirant du modèle du Congressional Budget Office (CBO) aux États-Unis.