Aptitude Flashcards
Vous êtes un psychiatre travaillant dans un hôpital à vocation générale en région métropolitaine.
Vous êtes demandés en consultation pour M. Turgeon, un patient de 45 ans. Vous apprenez en lisant son dossier qu’il a été diagnostiqué il y a 1 mois par un interniste oeuvrant à l’hôpital psychiatrique de votre secteur pour un VIH de novo au stade SIDA avec des CD4 effondrés (CD3-CD4 à 36).
Monsieur est présentement en statut d’ « Observation » à l’urgence avec la médecine interne et la microbiologie en consultation pour investigation et afin d’installer une thérapie antirétrovirale.
Monsieur vit une grande adversité psychosociale : il habite dans un appartement en état d’insalubrité avancé. Il serait sur le point d’être mis à la porte par son propriétaire.
La note de l’interniste suggère une consommation d’alcool et de crack importante, sans en spécifier les quantités consommées.
Un microbiologiste, également en consultation au dossier, a diagnostiqué une candidose buccale. Bien qu’il ait une toux, le rayon X pulmonaire ne démontre aucun foyer de consolidation qui aurait pu indiquer la présence d’une infection opportuniste respiratoire telle que le pneumocystis jiroveci (carinii). La microbiologie est en train de débuter un traitement pour la candidose buccale, et de poursuivre l’investigation compte tenu du diagnostic de VIH. Il a été vu en ophtalmologie, qui a diagnostiqué une endophtalmie avec ulcère oculaire.
La microbiologiste au dossier mentionne dans sa note que sans traitement antirétroviral et antimicrobien, le patient a un pronostic très réservé. Le pronostic serait meilleur s’il acceptait ces traitements.
En lisant le dossier, vous apprenez que M. refuse d’amorcer le traitement antirétroviral. Il refuse également le traitement antibiotique topique pour son infection oculaire, et l’antifongique pour la candidose buccale.
Alors que vous êtes en train de réviser le dossier, l’interniste en consultation vous appelle : elle vous confie qu’elle ne sait pas quoi faire en ce qui a trait à l’orientation des soins du patient. Elle rapporte que « déjà, l’équipe de l’urgence n’en peut plus de ce patient. Il s’agit vraiment d’un patient difficile. Il refuse tout traitement jusqu’à présent. » Elle ajoute qu’elle ne s’ « imagine même pas » hospitaliser ce patient sur son étage et « imposer l’arrogance de M. » au personnel de l’étage. Elle vous rapporte qu’elle ne sait plus quoi faire avec ce patient. Certainement, il bénéficierait d’une hospitalisation pour poursuivre les investigations et débuter un tx, mais il refuse. Elle vous demande si c’est « correct » qu’elle donne congé au patient pour que vous puissiez le prendre en charge, et possiblement l’hospitaliser en psychiatrie. « C’est certain qu’il y a quelque chose de psy », rajoute-t-elle.
1 – Que lui répondez-vous?
Il s’agit d’un jeu de rôle. L’interniste semble anxieuse et dépassée par la situation et elle met de l’avant qu’elle aimerait beaucoup donner congé au patient, si c’est possible. Elle veut toutefois avoir votre avis sur ce qu’elle devrait faire. Elle demeure très respectueuse et à l’écoute au téléphone avec vous.
Éléments essentiels de réponse (donner des indices ou aiguiller le résident vers ces éléments de réponse s’il ne les mentionne pas spontanément)
* Dangerosité imminente
Éviter de recommander un congé de la médecine interne avant que je puisse avoir évalué le patient
o Points bonis si notion d’aptitude aux soins mentionnée (à l’égard de l’hospitalisation et de la prise de rx)
* Expliquer l’ordre des choses : « j’évaluerai le patient, puis je vous reviendrai par la suite pour que je puisse discuter avec vous de la conduite administrative »
o Mots-clés : collaboration, communication entre spécialités
* Points pour empathie / reflet : effectivement, les patients « difficiles » ne sont pas évidents à aborder!
Éléments de réponse pouvant être pertinents :
-La rassurer à savoir que vous ferez votre entrevue et votre examen mental dans le but de vérifier la présence d’un trouble psychiatrique et d’un trouble de la personnalité qui pourrait être associé, et que vous mettrez vos conclusions au clair dans votre note. Lui offrir de la rappeler après avoir vu le patient pour discuter de mes impressions diagnostiques sur le plan psychiatrique, et pour que nous puissions conjointement décider de la conduite administrative des soins.
-Lui expliquer que vous n’avez pas encore rencontré le patient, que vous n’en êtes qu’à lire le dossier. Vous pourriez lui offrir de la rappeler une fois votre évaluation faite.
-Lui dire qu’en premier, vous évalueriez la dangerosité de la situation. En cas d’une « suicidalité » imminente, par exemple, vous mettriez en garde le patient, ce qui permettrait de l’hospitaliser contre son gré.
-Obtenir les informations collatérales, si elles sont disponibles. Obtenir le DA de l’interniste qui l’a vu il y a 1 mois +/- discuter avec lui.
-Rassurer l’interniste en lui expliquant que quoi qu’il arrive, vous demeurerez disponible pour l’accompagner dans les prochains jours.
-Reflet : lui dire que les patients difficiles comme M. Turgeon peuvent être « drainants » pour les équipes traitantes et lui dire qu’effectivement, ça ne doit pas être facile de composer avec la situation pour elle.
-S’assurer que M. n’est pas en sevrage ROH +/- autres substances. Les signes vitaux et l’observation du pt à la recherche de signes de sevrage, ainsi que le fait de préciser la chronologie de la consommation de substances des derniers jours, nous orienteront en ce qui a trait à la possibilité d’un sevrage. Si un sevrage ROH était suspecté, des benzodiazépines (rég + PRN vs PRN seulement, selon l’intensité du sevrage) seraient le tx de choix.
-Thiamine IV avec relais PO, vs PO (selon le niveau de consommation ROH), vu la consommation d’alcool chronique probable.
* Si M. présente une consommation très importante et qu’il comporte un risque élevé d’encéphalopathie de Wernicke/syndrome de Korsakoff, de la thiamine IV pour 3 jours serait privilégiée (ex. 400 mg x3 jours), avec un relai PO par la suite
-Discuter de l’aptitude (cf ci-bas)
- Quelle information importante devez-vous absolument discuter avec le patient?
- Si le résident ne le nomme pas : « Sachant que le patient refuse de prendre la médication proposée, quelle information importante devez-vous absolument discuter avec le patient? »
Vérifier les critères d’aptitude à consentir aux soins.
- Comment vous y prendrez-vous pour évaluer l’aptitude à consentir aux soins?
Critères de la Nouvelle-Écosse
1) Le patient comprend-il la nature de la maladie pour laquelle on lui propose un traitement?
2) Le patient comprend-il la nature et le but du traitement?
3) Le patient comprend-il les risques associés à ce traitement?
4) Le patient comprend-il les risques encourus s’il ne subit pas le traitement?
5) La maladie du patient affecte-t-elle sa capacité à consentir?
Éléments de réponse supplémentaires qui peuvent être ajoutés, mais non nécessaires :
I. Exprimer un choix › Communiquer un choix constant
II. Comprendre l’information › Critères de la Nouvelle-Écosse
III. Apprécier l’information sur un plan personnel › Autocritique; la portée de l’information par rapport à soi
IV. Raisonner sur l’information › Évaluer les pour et les contres › Évaluer le processus, non le choix
Avec l’accord du patient, vous le voyez avec sa sœur, qui est au chevet. Cette dernière dévoile que M. a une moins bonne mémoire depuis 3 ans. Il a été battu dans la rue à 2 reprises ces 3 derniers mois. Elle n’est pas certaine s’il a tendance à se perdre. Il a parfois un manque du mot. Il a de la difficulté avec la temporalité des événements. Par exemple, il lui parle, de façon inappropriée et à répétition, d’un événement où Mme avait pris une cassette à M. lorsqu’ils avaient autour de 10 ans.
Sa sœur mentionne aussi qu’il avait une peur d’être empoisonné cet été, mais que ce n’est plus le cas. Votre examen mental ne suggère actuellement aucun processus psychotique actif.
Le MoCA révèle un score de 18/30. En termes de scolarité, M. a terminé son secondaire.
La soeur révèle aussi que M. consomme régulièrement alcool, cannabis et crack ces dernières années. Il n’y a cependant pas de risque de sevrage actuellement.
- À ce point-ci, quelles sont vos hypothèses diagnostiques?
- Trouble neurocognitif majeur probable
o Si présence de trouble neurocognitif, il faudra différencier entre TNC mineur et majeur surtout sur la base de l’atteinte fonctionnelle.
Dxd :
TNC dû à la consommation
TNC dû au VIH
neuroVIH/neuroSIDA
TNC dû à une infection cérébrale opportuniste (ex. toxoplasmose, neurosyphilis)
TNC dû à lésion(s) cérébrale(s) traumatique(s) - Trouble d’usage de l’alcool, du cannabis et du crack probables
o Au moins, mentionner la consommation de ces substances au long cours et qu’il faut chercher à éliminer un trouble d’usage - TP NS
o Trouble de personnalité de cluster B probable - Concernant les idées délirantes persécutoires de l’été dernier :
o Trouble psychotique induit par les drogues probable
o Idées délirantes dans le cadre d’épisodes d’intoxication sans trouble psychotique induit (moins probable)
o Trouble psychotique dû au VIH/SIDA moins probable
o Trouble appartenant au spectre schizophrénique beaucoup moins probable
- À cette étape, quels seraient les examens paracliniques que vous demanderiez, ou dont vous suggéreriez à la médecine interne ou la microbiologie?
Rappel : la vignette a donné comme information que le dosage des CD4 (36) et un RXP (négatif pour une pneumonie) ont été faits récemment.
Bilan concordant avec une suspicion de TNC et compte tenu de l’infection au VIH, voire du stage SIDA, avec ATCD probable d’utilisation de drogue IV.
Bilan de base (FSC, E+, Créatinine)
Électrolytes élargis (Ca2+, Mg2+, PO43-)
TSH
Tomographie axiale cérébrale comme premier examen d’imagerie cérébrale
Éventuellement, d’autres pourraient s’ajouter (ex. IRM, PL)
Charge virale
Bilan pour autres ITS : Syphilis, hépatite B, hépatite C.
Après discussion avec le patient, vous le jugez inapte de façon temporaire à l’égard de la prise de thérapie antirétrovirale et de l’hospitalisation, sur la base de son incapacité à comprendre les risques s’il ne subit pas le traitement. En effet, M. minimise beaucoup les conséquences potentielles de non-traitement par thérapie antirétrovirale.
- Que recommandez-vous à son équipe traitante de médecine interne concernant le fait que Monsieur soit, pour l’instant, inapte à consentir aux soins ?
-Discuter de la possibilité de mettre M. en garde selon la dangerosité médicale dans le cas où M. aurait congé.
-Discuter de la possibilité de demander une ordonnance de soins. Ici, je ne crois pas qu’il n’y ait de réponse obligatoire, mais le résident doit justifier pourquoi il demande une ordonnance ou non.
- La sœur de M. vous demande, devant lui, pourquoi il est hospitalisé. Elle vous dit qu’il a toujours refusé de lui dire. Que lui répondez-vous?
Vous demandez au patient s’il accepte que vous divulguiez ses diagnostics médicaux, sur la base du respect de la confidentialité. S’il refuse que vous divulguiez ces informations à sa sœur, proposer à monsieur de divulguer à sa sœur les autres diagnostics que son statut VIH (TNC, candidose buccale, TU multiples substances) afin de permettre, si possible, à la sœur de s’impliquer dans la prise en charge globale de M.
S’il refuse que vous donniez ces informations à sa soeur, vous répondez à celle-ci que pour respecter la confidentialité, vous ne pouvez pas lui divulguer ces informations (tout en lui expliquant les bases déontologiques/éthiques).
Concernant l’évolution du patient, ce dernier a finalement signé un refus de traitement et est parti de l’hôpital.
Quelques mois plus tard, on vous demande à nouveau en consultation pour ce même patient, alors qu’il est aux prises avec un neurosida en phase avancée. Monsieur demande alors que vous lui prodiguiez l’aide médicale à mourir (AMM).
- Quelle est votre conduite face à une telle demande d’AMM? De quelles informations auriez-vous besoin pour pouvoir répondre à monsieur?
- Vérifier si la progression du TNC rend le patient inapte à consentir à l’AMM.
- Vérifier si les capacités sont en déclin avancé.
- Vérifier si le patient est en fin de vie (critère selon la loi provinciale, mais non fédérale)
o Afin de statuer à savoir si le patient est en fin de vie, il serait prudent de s’assurer que la microbiologie et/ou autres spécialités évaluent le patient et qu’ils se prononcent sur la question, ce qui impliquerait de les demander en consultation s’ils ne sont pas déjà au dossier.
- (si le résident n’en a pas discuté d’emblée) : Quels sont les critères pour l’aide médicale à mourir selon la loi canadienne (C-14)?
- être admissible à recevoir des services de santé financés par le gouvernement fédéral, une province ou un territoire (ou pendant le délai minimal de résidence dans une province ou territoire, ou de carence d’admissibilité applicable)
- être âgé d’au moins 18 ans et mentalement capable. Cela signifie avoir la capacité de prendre des décisions en matière de soins de santé par vous-même
- avoir un problème de santé grave et irrémédiable
- faire une demande délibérée d’aide médicale à mourir qui ne soit pas le résultat de pressions ou d’influences externes
- donner un consentement éclairé pour recevoir l’aide médicale à mourir
- (si non explicité par le résident) La présence d’une maladie mentale sévère est-elle un critère d’exclusion de l’AMM au sens de la loi fédérale?
Non. Mais il faut s’assurer que la maladie mentale ne rende pas le patient inapte à consentir à l’AMM, ce qui constituerait alors un critère d’exclusion.
- (si non explicité par le résident) Existe-t-il un âge minimal comme critère pour l’AMM au sens de la loi fédérale?
≥ 18 ans
- Combien de fois une personne peut-elle faire la demande de l’AMM au maximum par année?
Réponse : il n’y a pas de maximum. Une personne peut en faire la demande autant de fois qu’elle en juge nécessaire.