Nutrition diabetologie Flashcards
I. Diagnostiquer un diabète chez l’adulte et l’enfant A. Critères diagnostiques du diabète sucré et des états prédiabétiques
A. Critères diagnostiques du diabète sucré et des états prédiabétiques
A Le diabète sucré est un état d’hyperglycémie chronique associé à un risque de complications. Il est défini sur le seuil de glycémie à partir duquel il existe un risque significatif de développer des complications de microangiopathie, spécifiques du diabète, et plus précisément une rétinopathie diabétique (tableau 8.1).
Tableau 8.1 A Critères diagnostiques des différents états de tolérance glucidique chez l’enfant et l’adulte en fonction de la glycémie mesurée sur plasma veineux
Tolérance glucidique normale
GAJ < 1,10 g/L (6,1 mmol/L)
ou GA2h < 1,40 g/L (7,8 mmol/L) Anomalie de la glycémie à jeun et intolérance au glucose
GAJ ≥ 1,10 g/L (6,1 mmol/L) et < 1,26 g/L (7 mmol/L) : anomalie de la glycémie à jeun Ou GA2h ≥ 1,40 g/L (7,8 mmol/L) et < 2 g/L (11,1 mmol/L) : intolérance au glucose Diabète sucré et diabète prégestationnel
GAJ ≥ 1,26 g/L (7,0 mmol/L), à deux reprises ou glycémie à n’importe quel moment de la journée ≥ 2 g/L (11,1 mmol/L) ou GA2h ≥ 2 g/L (11,1 mmol/L)
GA2h : glycémie 2 heures après une hyperglycémie provoquée par voie orale (HGPO) de 75 g de glucose en solution dans 200 mL d’eau ; GAJ : glycémie à jeun après un jeûne nocturne de 8 heures.
Les personnes présentant une anomalie de la glycémie à jeun et/ou une intolérance au glucose sont à haut risque d’évoluer vers un diabète de type 2 (DT2) et sont par conséquent considérées comme présentant un « prédiabète » dans le cadre d’un syndrome métabolique (glycémie à jeun ≥ 1,10 g/L).
- Diabète de type 1 (DT1)
résulte d’une destruction des cellules β des îlots de Langerhans conduisant à un déficit absolu en insuline.
Connaissances
a. Mécanisme auto-immun (classé DT1a) * B Est retrouvé chez environ 10 % des personnes avec un diabète (environ 300 000 personnes en France).
* Représente près de 90 % des diabètes de l’enfant. * Entraîne la destruction auto-immune (lymphocytes CD4) des cellules β des îlots de Langerhans conduisant plus ou moins rapidement à un déficit absolu en insuline.
* Des marqueurs auto-immuns peuvent être retrouvés : auto-anticorps anti-GAD (glutamic acid decarboxylase, GAD65 ; les plus spécifiques), auto-anticorps anti-tyrosine phosphatase IA-2 et auto-anticorps anti-insuline sont les trois principaux recherchés. Un ou plusieurs de ces anticorps sont retrouvés chez 85 à 90 % des individus au moment du diagnostic. Cependant, 3 % des témoins sont porteurs d’anticorps à taux faibles et jusqu’à 8 % des personnes avec un DT2 (alors reclassé en diabète auto-immun lent, type LADA pour latent autoimmune diabetes in adults).
* Il existe une forte association avec les gènes HLA de classe II (les haplotypes DR3 et DR4),
qui ne sont plus recherchés en pratique courante.
* La présence d’un surpoids et/ou d’une obésité n’est pas incompatible avec le diagnostic
(auto-immunité).
* Ces patients ont un risque augmenté (+ 20 % environ) de présenter d’autres maladies auto-immunes telles qu’une maladie de Basedow, une thyroïdite de Hashimoto, une maladie d’Addison, un vitiligo, une maladie coeliaque, une maladie de Biermer.
b. Idiopathique (classé DT1b) * Certaines formes de DT1 (insulinopénie totale avec cétose marquée) n’ont pas d’étiologie connue et ne présentent aucun marqueur d’auto-immunité. Il existe cependant bien une carence absolue en insuline et les personnes atteintes sont sujettes à l’acidocétose et doivent être initialement traitées par l’insuline.
* Ces patients représentent une minorité des DT1 et la plupart d’entre eux sont d’origine
africaine ou asiatique.
* Le besoin d’une insulinothérapie peut être variable dans le temps (sevrage en insuline possible après rééquilibre initial de la glycémie) et ces patients peuvent, par la suite, évoluer vers un DT 2 plus classique traité par antidiabétiques oraux.
Pas fini
Insulinorésistance Le stress oxydant, l’accumulation intracellulaire de dérivés lipidiques et l’inflammation de bas grade le plus souvent rencontrés dans la prise de poids sont des éléments favorisant une résistance à l’action de l’insuline. La captation du glucose, en réponse à la sécrétion d’insuline, par les tissus musculaires et adipeux est amoindrie, participant ainsi à l’hyperglycémie postprandiale. Au niveau hépatique, l’insulinorésistance se traduit par une moindre inhibition de la production hépatique de glucose, favorisant l’hyperglycémie à jeun. Il a également été récemment mis en évidence un rôle de la flore bactérienne colique dans le lien entre l’alimentation hypercalorique et l’inflammation de bas grade. L’organisme réagit à la résistance à l’insuline en augmentant la sécrétion d’insuline, permettant dans un premier temps un maintien temporaire de l’équilibre glycémique (état prédiabétique).
L’insulinorésistance n’est pas spécifique du diabète. Elle est retrouvée dans le syndrome métabolique (aussi appelé syndrome d’insulinorésistance) qui associe au moins trois des facteurs suivants : obésité viscérale, hypertension, hyperglycémie, hypertriglycéridémie, baisse du HDL-C (high-density lipoproteins-cholesterol). La mesure de la résistance à l’insuline n’est pas réalisée en pratique, on recherchera donc cliniquement la présence d’un syndrome métabolique chez un patient pour dire qu’il présente une insulinorésistance (tableau 8.2).
Critères du syndrome métabolique Critères diagnostiques NCEP-ATP III (2005) IDF (2005) Tour de taille ≥ 102 cm (H)
≥ 88 cm (F)
Européens : ≥ 94 cm (H) ≥ 80 cm (F) Asiatiques : ≥ 90 cm (H) ≥ 80 cm (F)
Tension artérielle ≥ 130/85 mmHg* ≥ 130/85 mmHg* Glycémie à jeun ≥ 1 g/L* ≥ 1 g/L* Triglycérides ≥ 1,50 g/L* ≥ 1,50 g/L* HDL-C < 0,40 g/L (H)*
< 0,50 g/L (F)*
Nombre de critères pour le diagnostic de SM
Ou traitement en cours pour cette anomalie.
< 0,40 g/L (H) < 0,50 g/L (F)*
3/5 Tour de taille + 2/4 restants
b. Insulinopénie B Chez les personnes avec un DT2, il existe habituellement des anomalies de la pulsatilité de l’insulinosécrétion associée à une diminution de la phase précoce de sécrétion insulinique après stimulation par le glucose. Progressivement, l’évolution se fait vers un déficit global de l’insulinosécrétion dont l’accentuation progressive au cours de l’évolution de la maladie diabétique explique la tendance à l’accentuation de l’hyperglycémie (maladie chronique et évolutive). La rapidité d’altération de l’insulinosécrétion reste un élément majeur retentissant sur le contrôle glycémique, mais les déterminants de ce phénomène restent mal connus à ce jour. Des facteurs génétiques sont très probablement en cause comme en témoignent les nombreux polymorphismes identifiés sur des gènes impliqués, pour la plupart, dans la morphogenèse et le fonctionnement des cellules β. Cependant, la diminution de l’insulinorésistance par la mise en oeuvre d’un mode de vie « sain » va permettre une relative préservation de la fonction d’insulinosécrétion sur le long terme.
D’autres facteurs métaboliques altèrent la sécrétion d’insuline : la glucotoxicité et la lipotoxicité. Glucotoxicité et lipotoxicité semblent jouer un rôle important dans l’aggravation brutale d’un diabète en favorisant une « paralysie » des cellules β lorsque leur environnement sanguin est très hyperglycémique et/ou hyperlipidique (acides gras circulants).
Enfin, plus récemment, l’accent a été porté sur le rôle d’une réduction de l’effet incrétine dans les défauts de sécrétion d’insuline du DT2. L’effet incrétine est lié à deux hormones issues des cellules neuroendocrines de l’intestin, le GIP (glucose-dependent insulinotropic peptide) et le GLP-1 (glucagon-like peptide-1). Le GLP-1 sécrété en réponse à la prise alimentaire exerce sur la cellule β un effet de stimulation de l’insulinosécrétion glucose-dépendant (c’est-à-dire ne stimulant la sécrétion d’insuline que lorsque la glycémie s’élève, c’est-à-dire en postprandial) et réduit la sécrétion de glucagon. Cet effet incrétine est à la base du développement d’une nouvelle classe de traitement antidiabétique.
Facteurs de risque de diabète de type 2 (important pour le dépistage)
A Ils sont importants à connaître pour identifier les sujets chez qui un dépistage du diabète par mesure de la glycémie sera proposée (prévention du DT2).
Le risque de DT2 augmente avec : * l’âge ;
* la sédentarité ; * l’obésité (en particulier abdominale) ; * chacune des autres composantes du syndrome métabolique : hypertension artérielle (HTA),
dyslipidémie mixte ou HDL-C bas ;
* la stéatose hépatique (nutritionnelle et/ou alcoolique) ; * les antécédents familiaux de DT2 ;
* un antécédent de diabète gestationnel ou de macrosomie ; * le syndrome des ovaires polykystiques.
C. Autres formes de diabète 1. Défaut génétique de la cellule β
a. Diabètes MODY
Ils sont regroupés sous la dénomination de diabète de la maturité chez le jeune (maturityonset diabetes in the young ou MODY), avec un déficit prédominant de l’insulinosécrétion. Ils se caractérisent par une élévation de la glycémie à un âge précoce (et en l’absence de syndrome métabolique le plus souvent).
Plusieurs formes de diabètes MODY sont associées à un déficit monogénique du fonctionnement de la cellule β (MODY 1 à 8). Ils sont transmis de façon autosomique dominante. Ils se traitent par insulinosécréteurs oraux, voire par insulinothérapie si le déficit en insuline est plus marqué.
b. Diabète néonatal Les diabètes diagnostiqués dans les six premiers mois de vie ne sont en règle générale pas des DT1 (pas d’auto-immunité à cet âge).
Ces diabètes néonataux peuvent être transitoires ou permanents en fonction du type de l’atteinte génétique en cause. Ils peuvent le plus souvent être traités par sulfamides hypoglycémiants.c. Diabète mitochondrial Des mutations ponctuelles de l’acide désoxyribonucléique (ADN) mitochondrial entraînent un diabète par altération de la sécrétion d’insuline. De transmission maternelle, ce diabète est volontiers associé à une surdité et parfois à une myopathie mitochondriale.
- Maladies du pancréas exocrine
Tous les processus entraînant une altération diffuse du pancréas peuvent provoquer un diabète. Pancréatite, traumatisme, infection, pancréatectomie partielle ou totale et carcinomes pancréatiques. La première cause de diabète secondaire en France est la pancréatite chronique alcoolique. La mucoviscidose et l’hémochromatose restent des causes fréquentes de diabètes secondaires en France.
- Diabètes secondaires aux endocrinopathies
Ces diabètes résultent d’un excès d’hormones hyperglycémiantes. Ils peuvent être secondaires à une acromégalie, un syndrome de Cushing, un glucagonome, un phéochromocytome ou une hyperthyroïdie. - Diabètes induits par un traitement médicamenteux
Plusieurs traitements médicamenteux interfèrent avec l’action ou la sécrétion d’insuline. Ces traitements n’induisent le plus souvent pas le diabète par eux-mêmes, mais précipitent le diabète chez des individus prédisposés (prédiabétiques). Les traitements les plus communs sont : les glucocorticoïdes (diabète cortico-induit), les neuroleptiques, les γ-interférons, les antiprotéases et certaines immunothérapies anticancéreuses (anti-PD1).
Cas du diabète gestationnel
Le diabète gestationnel (DG ; voir chapitre 5) est défini comme un trouble de la tolérance glucidique conduisant à une hyperglycémie de sévérité variable, débutant ou diagnostiqué pour la première fois pendant la grossesse, quels que soient le traitement nécessaire et l’évolution dans le post-partum (OMS).
Dans un consensus de 2010, la Société francophone du diabète (SFD) et le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) recommandent d’adopter les critères de l’International Association of Diabetes Pregnancy Study Group (IADPSG) pour un dépistage ciblé (à partir des facteurs de risque) et non systématique.
On parle de DG en cas de (tableau 8.3) : * DG «précoce » dépisté dès la première consultation prénatale par la glycémie à jeun (GAJ)
chez les femmes ayant au moins un facteur de risque de DG ;
* DG « tardif » dépisté entre 24 et 28 semaines d’aménorrhée (SA) par la GAJ et l’HGPO chez les femmes ayant au moins un facteur de risque de DG et une GAJ normale au 1 er trimestre ;
* diabète avéré découvert pendant la grossesse. Le DG régresse après l’accouchement (arrêt de l’insuline le lendemain de l’accouchement), mais une surveillance biologique des jeunes mères est nécessaire compte tenu de leur risque élevé de faire un DT2.
B Il faut différencier le DG du diabète prégestationnel qui se définit par la présence d’un diabète antérieur à une grossesse. Ce dernier justifie une optimisation du contrôle glycémique avant le début de la grossesse et une adaptation constante du traitement antidiabétique durant toute la grossesse.Tableau 8.3 A Classification et définition des diabètes gestationnels d’après les recommandations CNGOF-SFD, 2010
Date Exploration DG « précoce » DG « tardif » « Diabète avéré découvert pendant
la grossesse »
1 re consultation prénatale
GAJ ≥ 0,92 g/L
< 1,26 g/L
Entre 24 et 28 SA GAJ HGPO inutile ≥ 0,92 g/L
< 1,26 g/L
GA1h ≥ 1,80 g/L GA2h ≥ 1,53 g/L
< 2 g/L
< 0,92 g/L < 0,92 g/L ≥ 1,26 g/L
≥ 1,26 g/L HGPO inutile
≥ 2 g/L
D. Critères d’orientation diagnostique
A La majorité des diabètes sont soit des DT2, soit des DT1 auto-immuns. C’est le plus souvent la clinique qui permet de trancher entre ces deux types de diabète sans la nécessité d’aucun examen complémentaire. Les principaux critères d’orientation diagnostique sont donnés dans le tableau 8.4. Aucun critère n’est cependant spécifique d’un type de diabète donné ; on peut par exemple diagnostiquer un DT1 chez une personne à l’âge de la maturité et/ou en surpoids.
Tableau 8.4 A Principaux critères d’orientation diagnostique entre diabète de type 1 et diabète de type 2
Diabète de type 1 Diabète de type 2 Âge habituel de découverte Nourrisson, enfant, adolescent, jeune
adulte
Circonstance de découverte Rapide, aigu : syndrome polyuropolydipsique, acidocétose
Hérédité Faible (< 10 % des apparentés au
premier degré atteints)
Adulte
Dépistage, complication vasculaire d’emblée (infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral, etc.)
Forte (> 20 % des apparentés au premier degré)
Histoire pondérale Perte de poids Surpoids/obésité androïde Pathologies associées Maladies auto-immunes (thyroïdite
de Hashimoto, maladie de Biermer, vitiligo, etc.)
Syndrome métabolique complet ou non
Ainsi, les diabètes diagnostiqués chez l’adulte ne sont pas tous des DT2 et il importe d’identifier les autres types de diabète (particulièrement en l’absence d’insulinorésistance), car leur prise en charge est sensiblement différente (moins d’éducation nutritionnelle et escalade thérapeutique plus rapide).
Les principaux diagnostics à évoquer sont : * DT1 d’évolution lente également nommé LADA : recherche d’un taux élevé d’au moins un
auto-anticorps (> 2 × N) ;
* diabète de type MODY (arbre généalogique évocateur d’une transmission monogénique,
absence de syndrome métabolique) : recherche d’un panel de mutations ;
* diabète secondaire (listé précédemment : maladie du pancréas, alcoolisme chronique).
E. Dépistage du diabète chez les personnes asymptomatiques
La prévalence du diabète traité pharmacologiquement a été estimée en 2016 à 4,5 % de la population résidant en France. Le nombre de personnes diabétiques est estimé à environ 3 millions de personnes, soit au moins 300 000 personnes diabétiques de type 1 et au moins 2,5 millions de personnes diabétiques de type 2 traitées pharmacologiquement.
Le nombre de cas de diabètes en France, comme à l’échelle de la planète, augmente rapidement, parallèlement à l’augmentation de la prévalence de l’obésité et au vieillissement de la population (en France, 15 % des sujets de plus de 70 ans sont diabétiques).
La prévalence du diabète, notamment du DT2, ainsi que la gravité de ses complications en font un problème de santé publique justifiant son dépistage dans les populations à risque de façon à mettre en place un traitement et un dépistage des complications précoces, ceci afin d’en prévenir leur évolution et d’en limiter le poids financier sur notre système de santé (fig. 8.1).Les candidats au dépistage du diabète sont les sujets avec : * surpoids ou obésité (IMC > 25 kg/m 2 );
* antécédent de diabète familial au premier degré (père, mère, frères, soeurs) ; * origine non caucasienne ;
* femmes ayant un antécédent de DG ou de naissance d’un enfant pesant plus de 4 kg ; * HTA traitée ou non traitée ;
* dyslipidémie traitée ou non traitée ; * stéatose hépatique ;
* traitement pouvant induire un diabète (antipsychotiques atypiques, corticoïdes, etc.). Pour ce qui concerne le DT1, le dépistage des apparentés du premier degré n’est pas recommandé de façon systématique en l’absence de moyen de prévention reconnu.
II. Décrire les principes de la prise en charge au long cours
A. Prévenir les complications chroniques
Le diabète sucré est une maladie chronique complexe dont la gravité tient pour l’essentiel à ses complications à long terme. Celles-ci se répartissent en deux grands groupes avec, d’une part, les complications macrovasculaires liées à la présence de plaques d’athérome (coronaropathie, accidents vasculaires cérébraux, artériopathie oblitérante des membres inférieurs) et, d’autre part, les complications microvasculaires liées à l’hyperglycémie chronique (rétinopathie, néphropathie, neuropathie). Si les complications microvasculaires sont les complications spécifiques du diabète, ce sont les complications macrovasculaires qui constituent la première cause de morbimortalité de cette maladie.
B. Approche multifactorielle
Le diabète sucré exige des soins médicaux quotidiens et continus avec des stratégies multifactorielles de réduction des risques ne se limitant pas au contrôle glycémique. Le contrôle des principaux facteurs de risque cardiovasculaire, notamment de la pression artérielle et des lipides, tient une place centrale.
C. Objectifs glycémiques
En ce qui concerne les objectifs glycémiques, ceux-ci doivent être fixés par le taux d’HbA1c qui correspond à la fraction d’hémoglobine exposée à la glycation non enzymatique de la partie N-terminale de la chaîne β de l’hémoglobine A. Compte tenu de la durée de vie des érythrocytes (environ 120 jours), le taux d’HbA1c est influencé par les glycémies des trois derniers mois, mais les glycémies des 30 jours précédents sont responsables de 50 % de sa valeur. Elle doit être dosée quatre fois par an. D’une façon générale, la réduction de l’HbA1c en dessous ou autour de 7 % pour le DT1, comme pour le DT2, est associée à une diminution des complications microvasculaires et potentiellement des complications macrovasculaires.
L’HbA1c peut être prise en défaut dans un certain nombre de circonstances. Toute modification de l’érythropoïèse et/ou de la durée de vie des hématies va retentir sur la fiabilité du taux d’HbA1c. Les cibles d’HbA1c pour le DT2 telles que définies par les recommandations de la HAS (2013, revues en 2017) et par la SFD (2019) sont indiquées dans le tableau 8.5.
A Objectifs d’HbA1c selon le profil du patient (HAS et SFD) Profil du patient HbA1c cible Cas général La plupart des patients avec un DT2 ≤ 7 %
DT2 nouvellement diagnostiqué, dont l’espérance de
vie est > 15 ans et sans antécédent cardiovasculaire
Enfants, adolescents DT1
Patients avec antécédents cardiovasculaires
Patients avec insuffisance rénale chronique (IRC) 4
Patientes enceintes ou envisageant de l’être
DT2 : – avec une espérance de vie limitée (< 5 ans) – ou avec une comorbidité sévère
– ou ayant une longue durée d’évolution du
diabète (> 10 ans) et pour lequel la cible de 7 % s’avère difficile à atteindre, car l’intensification thérapeutique provoque des hypoglycémies sévères
La cible peut être augmentée dans certaines situations particulières (adolescent très déséquilibré, petit enfant à risque d’hypoglycémies sévères, perte de la sensation des hypoglycémies)
Personnes âgées 2 Dites « en bonne santé », bien intégrées socialement,
autonomes d’un point de vue décisionnel et
fonctionnel et dont l’espérance de vie est jugée satisfaisante
(diabète préexistant à la grossesse)
Dites « fragiles » à l’état de santé intermédiaire et à risque de basculer dans la catégorie « dépendantes et/ou à la santé très altérée »
Dites « dépendantes et/ou à la santé très altérée » en raison d’une polypathologie chronique évoluée génératrice de handicaps et d’un isolement social
Antécédents de maladie cardiovasculaire considérée comme non évoluée
Antécédents de maladie cardiovasculaire considérée comme évoluée 3
≤ 6,5 % 1
≤8 %
< 7 %
≤7 %
≤ 8,5 %
< 9 % et/ou glycémies capillaires préprandiales entre 1 et 2 g/L
≤7 %
IRC modérée (stades 3A et 3B) ≤ 7 % IRC sévère et terminale (stades 4 et 5) ≤ 8 %
≤ 8 %, éviter toute hypoglycémie
Avant d’envisager la grossesse ≤ 6,5 % Durant la grossesse ≤ 6,5 % et/ou glycémies
< 0,95 g/L à jeun et < 1,20 g/L
en postprandial à 2 h 1 S
L’atteinte des objectifs doit se faire en évitant les complications iatrogènes et notamment les hypoglycémies et la prise de poids. Une HbA1c dans la cible peut néanmoins être le reflet d’un mauvais équilibre par l’alternance d’hypo- et d’hyperglycémies, tout particulièrement dans le DT1. L’autosurveillance continue glycémique permettra de mettre en évidence ce phénomène. Pour les patients traités par insuline, ayant une cible d’HbA1c de 7 %, les cibles glycémiques suivantes semblent raisonnables :
* glycémie au réveil : 1,00 à 1,20 g/L (0,7 à 1,3 g/L chez l’enfant et l’adolescent) ; * glycémie avant les repas : 0,80 à 1,20 g/L (0,7 à 1,3 g/L chez l’enfant et l’adolescent) ; * glycémie 2 heures après les repas : 1,20 à 1,80 g/L (0,9 à 1,8 g/L chez l’enfant et l’adolescent) ; * glycémie au coucher : environ 1,2 g/L ;
* glycémie à 3–4 heures du matin : > 0,80 g/L. Ces cibles doivent être atteintes sans hypoglycémies tant que possible.
D. Surveillance glycémique
Les patients traités par multi-injections d’insuline ou par pompe à insuline doivent impérativement réaliser une autosurveillance glycémique (ASG) en mesurant plusieurs fois par jour leur glycémie capillaire dans le but d’ajuster leur dose d’insuline. Il existe actuellement des appareils pris en charge par la Sécurité sociale qui permettent au patient de suivre son profil glycémique grâce à la mesure continue des taux de glucose au niveau interstitiel du tissu sous-cutané (méthode flash).
Pour les personnes DT2 traitées par une seule injection d’insuline lente, l’ASG peut être plus espacée : glycémie au réveil pour l’adaptation des doses et occasionnellement, en cas de doute sur une hypoglycémie.
L’ASG chez les DT2 non traités par insuline doit avoir une utilisation très ciblée et n’a d’intérêt que si elle est susceptible d’entraîner une modification de la thérapeutique. Elle doit s’inscrire dans une démarche d’éducation du patient sur ses objectifs glycémiques et les décisions à prendre lors d’une dérive glycémique. Elle est utile lorsqu’une insulinothérapie est prévue à court ou moyen terme ou lorsque le traitement médicamenteux comprend un sulfamide ou un glinide. Si l’objectif glycémique n’est pas atteint et que l’adhésion thérapeutique n’est pas satisfaisante, l’ASG peut s’avérer utile pour démontrer au patient l’effet de l’activité physique, de l’alimentation et du traitement médicamenteux. Dans ce cadre, le nombre de bandelettes pris en charge par les caisses d’assurance maladie est limité à 200 par an.
E. Contrôle de la pression artérielle
La pression artérielle (PA) doit être mesurée à chaque visite de routine. La pratique de l’automesure tensionnelle doit être encouragée et le patient formé.
La cible de PA est < 140/85 mmHg en consultation (< 130 mmHg en automesure), en visant en règle 130/80 mmHg. Elle doit être individualisée, notamment chez la personne âgée, suivant l’âge et l’existence de fragilités.
La prise en charge initiale repose sur les modifications thérapeutiques du mode de vie (MTMV) : activité physique, diététique dont sel < 6 g/j et perte de poids si surpoids ou obésité. Le traitement médicamenteux doit privilégier les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) et les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II (ARA II) en première intention.
F. Contrôle du bilan lipidique
Le bilan lipidique chez une personne diabétique doit être réalisé au minimum de façon annuelle en prescrivant une exploration d’une anomalie lipidique (EAL).
Les personnes diabétiques sont à haut risque sur le plan cardiovasculaire avec un risque d’événement fatal à 10 ans multiplié par 2 pour les hommes et par 4 pour les femmes, justifiant un contrôle intensif du bilan lipidique.
Les recommandations HAS de 2017 fixent comme cible de LDL-C (low-density lipoproteinscholesterol) pour toutes les personnes diabétiques de plus de 40 ans une valeur < 1 g/L. Cette valeur est abaissée à 0,70 g/L pour les patients présentant une maladie cardiovasculaire avérée ainsi que pour les patients à risque cardiovasculaire très élevé (de plus de 40 ans avec un ou plusieurs facteurs de risque associés ou une atteinte d’un organe cible).
Les modifications thérapeutiques du mode de vie sont à la base du traitement : réduction des acides gras (AG) saturés, des AG trans, augmentation des apports en AG n-3, consommation de fibres solubles, contrôle du poids et activité physique (voir chapitre 10).
Un traitement par statine devrait être ajouté si la cible de LDL-C n’est pas atteinte à 3 mois ou d’emblée chez les patients à risque très élevé pour qui la cible de LDL-C a été fixée à 0,70 g/L. Un taux de triglycérides < 1,50 g/L et de HDL-C > 0,40 g/L chez l’homme et > 0,50 g/L chez la femme est considéré comme souhaitable. La cible prioritaire doit cependant rester le LDL-C et doit être atteinte à l’aide du traitement par statine éventuellement associée à l’ézétimibe si la cible n’est pas atteinte sous statine de forte intensité.
G. Antiagrégants plaquettaires et arrêt du tabac
A L’acide acétylsalicylique (aspirine) en prévention secondaire (75–160 mg/jour) doit être recommandé.
En prévention primaire, une faible dose d’aspirine (75–160 mg/jour) est envisageable chez les personnes avec un diabète à risque cardiovasculaire très élevé :
* celles ayant une protéinurie, une insuffisance rénale sévère ou une maladie athéromateuse silencieuse documentée (athérome sténosant périphérique ou maladie coronaire silencieuse) ;
* celles ayant un risque cardiovasculaire fatal > 5 % à 10 ans, si un score de risque est utilisé. L’acide acétylsalicylique (aspirine) en prévention primaire ne doit pas être recommandé chez les diabétiques à risque cardiovasculaire modéré ou élevé.
L’arrêt du tabac doit être évoqué à chaque consultation pour les patients concernés. L’utilisation d’un substitut nicotinique pris en charge par la Sécurité sociale peut leur être proposée.
H. Évaluation du risque cardiovasculaire
Le principe de l’évaluation du risque cardiovasculaire est d’identifier les pathologies qui classent d’emblée les patients à risque cardiovasculaire élevé ou très élevé (voir chapitre 10). En fonction de l’âge et de l’existence de facteurs de risque cardiovasculaire associés, les DT1 et DT2 sont à risque cardiovasculaire :
* élevé :– < 40 ans avec au moins un facteur de risque cardiovasculaire ou une atteinte d’organe
cible,
– ≥ 40 ans sans facteurs de risque cardiovasculaire ni atteinte d’organe cible ; * très élevé : ≥ 40 ans avec au moins un facteur de risque cardiovasculaire ou une atteinte
d’organe cible.
Des équations de calcul de risque réalisées chez tous les individus – tables SCORE (Systematic COronary Risk Estimation) – viennent compléter l’évaluation du risque cardiovasculaire et permettent sa gradation en quatre niveaux (voir chapitre 10 et tableau 10.3).
I. Éducation thérapeutique
L’éducation thérapeutique du patient (ETP) et la formation à l’autogestion de la maladie sont essentielles pour prévenir les complications aiguës et réduire le risque de complications à long terme. Elles sont également un élément essentiel pour une qualité de vie optimale du patient. Elles doivent dans ce cadre aborder les questions d’ordre psychologique, le bien-être émotionnel étant un élément important du devenir du diabète.
Il est nécessaire de proposer une ETP ciblée sur les compétences que le patient doit acquérir pour prendre en charge son traitement et s’adapter à sa maladie :
* modifier son alimentation ; * augmenter son activité physique ; * surveiller ses pieds ;
* connaître ses objectifs en matière d’HbA1c et de PA, de LDL-C, d’arrêt du tabac. En cas de « prédiabète », la prévention du diabète repose sur l’éducation nutritionnelle (activité physique et alimentation équilibrée réduite en graisses) et l’obtention du changement durable du comportement.
J. Dépistage et prise en charge des principales complications chroniques
Un dépistage régulier des principales complications chroniques associées au diabète sucré est indispensable afin d’instaurer un traitement précoce et de prévenir leur évolution.
1. Complications macrovasculaires
Les atteintes cardiovasculaires sont plus fréquentes et plus graves en présence d’un diabète : l’infarctus du myocarde (IDM) et l’accident vasculaire cérébral (AVC) sont par exemple plus souvent mortels. Elles touchent tous les territoires (coronaires, artères cérébrales et membres inférieurs) et sont fréquemment présentes dès le début du diabète, voire avant, en relation avec le syndrome métabolique.
En cas de diabète, les femmes perdent leur avantage naturel et ont un risque cardiovasculaire équivalent à celui des hommes, y compris avant la ménopause.
a. Accident vasculaire cérébral B En dehors de sa plus grande incidence et de sa plus grande gravité, l’AVC ne présente pas de spécificité dans sa présentation clinique et dans sa prise en charge.b. Ischémie myocardique B Elle est plus fréquente et plus grave. Elle est plus fréquemment asymptomatique ou paucisymptomatique : on parle d’ischémie myocardique silencieuse. Il faudra savoir y penser en cas de troubles digestifs, douleurs épigastriques, dyspnée d’effort, asthénie, etc.
Une éventuelle nécrose asymptomatique doit être recherchée par un électrocardiogramme (ECG) de repos systématique annuel.
Les personnes diabétiques présentant des symptômes typiques ou atypiques, ou des anomalies à l’ECG doivent bénéficier rapidement d’un avis cardiologique et d’explorations.c. Artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI) B Son dépistage repose sur la palpation des pouls périphériques et la détermination de l’index de pression systolique (IPS : rapport de la pression systolique cheville/bras) ; pour rappel, l’IPS est défini comme normal entre 1 et 1,30 et comme anormal s’il est inférieur à 0,9. La confirmation repose en premier lieu sur l’échographie Doppler artériel.
- Complications microvasculaires et pied diabétique
B Les complications microvasculaires du diabète sont les complications chroniques spécifiques du diabète. Les principales sont la rétinopathie, la néphropathie et la neuropathie diabétique. On en rapproche les complications du pied diabétique et notamment le mal perforant plantaire, qui survient toujours sur un terrain de neuropathie diabétique altérant la sensibilité plantaire. Chez l’enfant, les complications microvasculaires sont recherchées à partir de l’âge de 11 ans (ou à partir du début de la puberté si celle-ci commence avant l’âge de 11 ans) et si le diabète évolue depuis au moins 5 ans.
a. Néphropathie La néphropathie diabétique (tableau 8.6) survient chez 20 à 40 % des personnes diabétiques et représente la principale cause d’insuffisance rénale terminale. Elle doit être recherchée de façon systématique et annuelle par le dosage de la créatininémie, le calcul du débit de filtration glomérulaire (DFG estimé par des formules, en particulier l’équation du Chronic Kidney Disease Epidemiology Collaboration [CKD-EP]) et le dosage de l’albuminurie sur échantillon d’urine avec calcul du rapport albumine/créatinine urinaire.Classification des néphropathies diabétiques
Diabète sucré de type 1 et 2 de l’enfant et de l’adulte 8
Stade 1 Stade 2 Stade 3 Stade 4 Stade 5
Hypertrophie rénale, hyperfiltration
glomérulaire
Albuminurie
Atteinte rénale
Phase silencieuse Néphropathie
incipiens
Néphropathie Insuffisance rénale
Années après diagnostic 2 à 6 7 à 15 15 à 20 20 à 30
Normale Normale Microalbuminurie
(30–300 mg/j ou
20–200 mg/L)
Élevée (de l’ordre de plus de 20 %)
Pression artérielle
Normale Normale Peut être discrètement
augmentée, perte de
la baisse nocturne
Filtration glomérulaire
Élevée à normale Normale ou
discrètement abaissée
Protéinurie (albuminurie > 300 mg/j ou 200 mg/L)
Protéinurie massive à faible lorsque la fonction rénale est
profondément altérée
Souvent élevée Souvent élevée
Connaissances
Baisse de 100 mL/ min/an en l’absence de traitement
Basse à effondréA Les facteurs de risque de la néphropathie diabétique sont : l’équilibre glycémique, l’HTA et le tabagisme.
b. Rétinopathie diabétique et oedème maculaire B La rétinopathie diabétique (RD) est très spécifique du diabète. Elle constitue la cause la plus fréquente de cécité chez l’adulte. La présence d’une prolifération de néovaisseaux rétiniens lui confère un caractère de gravité (tableau 8.7).Tableau 8.7 B Classification de la rétinopathie diabétique
Niveau de gravité Anomalies visibles à l’ophtalmoscope après dilatation Pas de RD apparente Absence d’anomalie
RD non proliférante minime Microanévrismes seuls RD non proliférante modérée Intermédiaire à minime
RD non proliférante sévère Au moins une des anomalies suivantes :
– 20 hémorragies intrarétiniennes ou plus dans les quatre quadrants
– fuites veineuses dans deux quadrants ou plus – AMIR dans un quadrant ou plus, en l’absence de néovaisseaux
RD proliférante Au moins une des anomalies suivantes :
– néovascularisation
– hémorragie prérétinienne ou intravitréenne
AMIR : anomalie microvasculaire intrarétinienne ; RD : rétinopathie diabétique.A Les facteurs de risque associés sont : l’âge, la durée du diabète, l’équilibre glycémique, la néphropathie diabétique, l’HTA, le tabac, un IMC et/ou un tour de taille élevé et une hypertriglycéridémie.
L’amélioration rapide de l’équilibre glycémique (mise sous pompe à insuline, mise en place d’insulinothérapie chez un patient DT2, chirurgie bariatrique) constitue une situation à risque d’aggravation rapide de la rétinopathie. Un contrôle ophtalmologique doit être effectué préalablement.
Les grandes variations glycémiques rapides (exemple : mise à l’insuline des DT1 au diagnostic) s’accompagnent de troubles de la réfraction se traduisant par un flou visuel réversible spontanément en 3 à 6 semaines (ne pas prescrire de verres correcteurs durant cette période). Outre le contrôle intensif de la glycémie dès le diagnostic de la maladie, le contrôle de la PA permet de retarder la survenue ou de ralentir l’évolution d’une RD.
La grossesse et la puberté sont susceptibles d’aggraver la RD (facteurs de croissance humoraux). B À côté de l’examen de la rétine périphérique, un examen attentif de la macula doit être réalisé à la recherche d’un oedème maculaire (tableau 8.8) dont on évaluera l’intensité (tableau 8.9). L’évaluation de l’oedème maculaire repose actuellement sur l’OCT (optical coherence tomography) : coupes de la rétine et mesure de l’épaisseur rétinienne maculaire.
Tableau 8.8 B Absence ou présence d’un oedème maculaire
Niveau de gravité Observation à l’ophtalmoscope après dilatation OEdème maculaire absent Pas d’épaississement rétinien, ni exsudats durs au pôle postérieur OEdème maculaire présent Épaississement rétinien et/ou exsudats durs au pôle postérieur
Tableau 8.9 B Classification de l’oedème maculaire
Niveau de gravité Observation à l’ophtalmoscope après dilatation OEdème maculaire minime Épaississement rétinien et/ou exsudats durs au pôle postérieur, mais à distance
du centre de la macula
OEdème maculaire modéré Épaississement rétinien et/ou exsudats durs au pôle postérieur au voisinage du
centre de la macula, mais respectant celui-ci
OEdème maculaire sévère Épaississement rétinien et/ou exsudats durs au pôle postérieur impliquant le
centre de la maculaUn premier examen ophtalmologique (éventuellement remplacé par des photographies du fond d’oeil avec lecture à distance par un ophtalmologue dans les centres équipés de ce dispositif) doit être effectué au moment du diagnostic de diabète, puis tous les ans. Ce rythme peut être porté à tous les 2 ans en l’absence de signes de rétinopathie.
Neuropathie
B La neuropathie diabétique se présente sous des formes très variées avec de nombreuses manifestations cliniques. Les formes les plus fréquentes sont la polyneuropathie diabétique et la neuropathie autonome.
Les formes distales et symétriques sont les plus fréquentes, représentant 80 % des cas de neuropathie périphérique.
Plus rarement, il s’agit de formes focales (mononeuropathies) ou multifocales (mononeuropathies multiples).
La neuropathie autonome ou dysautonomie diabétique : * touche les petites fibres amyéliniques des systèmes sympathique et parasympathique ; * peut toucher le système cardiovasculaire, le tractus digestif, le système urogénital, le système sudoral :
– la neuropathie autonome cardiovasculaire (NAC) est associée à une augmentation de la mortalité, notamment par la survenue de troubles du rythme et de mort subite. Son expression clinique la plus patente est l’hypotension orthostatique. À un stade plus précoce, elle peut être recherchée en analysant les variations de la fréquence cardiaque au cours d’épreuves standardisées, notamment l’épreuve de respiration profonde pendant une minute ;
– les symptômes digestifs du tractus supérieur reflètent une atteinte oesophagienne (dysphagies, brûlures rétrosternales, symptômes de reflux gastro-oesophagiens) et/ou gastrique (gastroparésie, anorexie, nausées, vomissements, douleurs abdominales, ballonnements, distensions abdominales, sensation de satiété précoce ou de lenteur à la digestion). Les troubles de la motricité colique sont à l’origine de diarrhée ou de constipation ;
– l’atteinte du système urogénital est à l’origine de troubles vésicosphinctériens (neurovessie), d’éjaculations rétrogrades et de troubles de l’érection ;
– l’atteinte du système sudoral est source de dyshidrose (sécheresse ou hypersudation
selon les territoires).
La recherche d’une neuropathie périphérique doit être systématique et annuelle (souvent asymptomatique, mais conférant un risque important d’ulcération des pieds +++) : * recherche de symptômes « positifs » (douleurs, dysesthésies, engourdissements, à prédominance nocturne) et de symptômes déficitaires (perte de perception de la douleur ou impression de ne pas sentir le sol sous ses pieds) ;
* tests cliniques : sensibilité au monofilament de 10 g, réflexes ostéotendineux, sensibilité
vibratoire, sensibilité à la piqûre.
Pour la polyneuropathie, les explorations (électroneuromyographie [EMG], avec mesure des vitesses de conduction et des amplitudes des potentiels d’action) et la demande d’un avis neurologique doivent être réservées aux doutes diagnostiques.
La mise en évidence d’une neuropathie périphérique doit s’accompagner d’une éducation du patient face à la perte de sensibilité de ses pieds et aux risques de lésion du pied. Le traitement de la neuropathie a pour objectif de réduire les douleurs et d’améliorer la qualité de vie.
d. Pied diabétique Les ulcérations du pied diabétique et les amputations sont fréquentes. Elles représentent une cause majeure de morbimortalité et de handicap chez les personnes diabétiques. Elles sont la conséquence avant tout de la neuropathie diabétique, mais également, pour beaucoup d’entre elles, de l’artériopathie périphérique ou des causes infectieuses.
La perte de la sensibilité au monofilament de 10 g et celle de la sensibilité vibratoire sont des facteurs prédictifs d’ulcération du pied. Leur dépistage précoce permet de mettre en place des mesures préventives adaptées.
Les facteurs de risque d’ulcération sont : neuropathie périphérique, déformations des pieds, AOMI, troubles de la vision, néphropathie diabétique (surtout si dialyse), mauvais contrôle glycémique, tabagisme, dermite ocre, pied de Charcot, antécédent d’ulcération du pied ou d’amputation.
Toute personne diabétique doit être informée sur les risques de lésions des pieds et les mesures préventives (éducation thérapeutique).
La prise en charge est conditionnée par l’évaluation du risque et sa gradation : * l’évaluation du risque de lésions du pied est réalisée au moment du diagnostic et annuellement par la recherche :
– d’une neuropathie périphérique, au minimum au moyen du monofilament de 10 g, – d’une artériopathie par la palpation des pouls périphériques et la détermination de l’IPS, – de déformations des pieds ;
* cette évaluation permet la gradation du risque de lésions du pied :
– grade 0 : absence de neuropathie sensitive,
– grade 1 : neuropathie sensitive isolée, – grade 2 : neuropathie sensitive associée à une AOMI et/ou à une déformation du pied, – grade 3 : antécédent d’ulcération du pied ayant évolué pendant plus de 4 semaines et/
ou d’amputation au niveau des membres inférieurs.
La prise en charge du pied diabétique à risque est la suivante : * examiner les pieds et les chaussures à chaque consultation en cas de risque de lésions des
pieds ;
* prescrire des soins podologiques tous les 3 mois en cas de grade 2 et tous les 2 mois en cas
de grade 3 (pris en charge par l’assurance maladie) ;
* la mise en évidence à l’examen des pieds de zones d’hyperappui (érythème, chaleur, hyperkératose) doit conduire à la prescription de chaussures adaptées avec éventuelles orthèses pour la redistribution des pressions, voire de chaussures orthopédiques sur mesure en cas de forte déformation.
La prise en charge d’une plaie du pied est la suivante : * prise en charge immédiate : la survenue d’une plaie du pied chez une personne diabétique à risque est une « urgence » médicale (aucune plaie, aussi minime qu’elle soit, ne doit être négligée). Elle implique la mise en oeuvre des mesures immédiates suivantes :
– rechercher, identifier et supprimer la cause de la plaie : chaussure, ongle, appui, etc., – mettre le pied en décharge totale +++,
– adresser le patient pour avis vers l’équipe multidisciplinaire d’un centre spécialisé le plus rapidement possible, sauf en cas de signes d’infection étendue ou avec signes systématiques qui imposent une hospitalisation immédiate ;
* dans la plupart des cas, il n’y a pas d’indication en urgence à une antibiothérapie ou à une amputation. En cas d’antibiothérapie, s’assurer que tous les prélèvements bactériologiques nécessaires ont bien été réalisés au préalable. Les infections du pied diabétique sont souvent polymicrobiennes, comprenant des cocci à Gram positif, les staphylocoques étant très souvent impliqués ;* la mise en décharge complète jusqu’à fermeture de la plaie est indispensable pour assurer
la guérison.
Le pied de Charcot est une destruction non infectieuse des os et des articulations associée à une neuropathie, cause de déformation extrême des pieds en phase chronique et constituant un facteur de risque majeur d’ulcération. La phase chronique est précédée de phases aiguës se manifestant le plus souvent par un oedème unilatéral d’un pied peu ou pas douloureux avec une augmentation de température locale. Ces signes après élimination des causes classiques (phlébite, infection) doivent faire réaliser en urgence une IRM du pied pour confirmer le diagnostic. En cas de confirmation de ce dernier, une immobilisation par botte plâtrée ou attelle Aircast ® pour une durée minimale de 8 semaines doit être mise en place.
III. Argumenter la prise en charge nutritionnelle A. Diététique
La nutrition fait partie intégrante de la prise en charge et de la prévention du diabète. Elle repose sur une alimentation équilibrée associée à une activité physique régulière détaillée dans les chapitres 1 et 2. Elle a une efficacité importante sur le contrôle de la glycémie et des facteurs de risque cardiovasculaire (lipides, PA, poids). Ces points doivent être abordés dans le cadre de l’ETP en renforçant l’approche motivationnelle.
L’évaluation des habitudes alimentaires du patient, de ses préférences et de ses objectifs métaboliques constitue un préalable à toute prescription diététique.
Les objectifs de la prise en charge nutritionnelle sont de : * atteindre les objectifs glycémiques, de PA et lipidiques ;
* atteindre le contrôle du poids, voire la perte de 5 à 10 % du poids maximal atteint ; * retarder ou prévenir les complications.
- Contrôle pondéral
Une perte de poids de 5 à 10 % du poids corporel peut entraîner une amélioration significative des principaux indicateurs (HbA1c, lipides, PA) chez les personnes DT2 en surpoids ou obèses, notamment au début de la maladie. La perte de poids ne présente pas de spécificité chez la personne diabétique par rapport à la personne non diabétique et repose essentiellement sur la diminution des calories ingérées sans qu’une répartition spécifique entre les différents macronutriments n’ait pu montrer un avantage spécifique par rapport à une autre (on ne doit plus parler de « régime diabétique »).
- Apports glucidiques
La quantité de glucides des aliments est un déterminant important de la glycémie postprandiale. La connaissance du contenu en glucides des aliments est donc un élément majeur. Les études ne permettent cependant pas de conclure à un apport idéal en glucides et celui-ci doit donc être personnalisé en fonction des préférences individuelles.
L’index glycémique définit la capacité d’un aliment à faire monter la glycémie. La notion d’index glycémique n’est valable que pour un aliment ingéré isolément et perd en conséquence de son intérêt au cours des repas. D’une façon générale, on évitera les prises d’aliments à fort index glycémique en dehors des repas et on favorisera les aliments à faible index glycémique durant les repas. Une attention particulière sera portée à la réduction de la consommation de boissons sucrées de type soda ou jus de fruits.En dehors des aliments facilement identifiés par leur goût sucré, les aliments glucidiques sont le pain (50 % de glucides), les céréales, les féculents (20 % de glucides), les fruits, le lait et les yaourts. Les légumes verts ont un contenu assez faible en glucides (5 à 10 %). Les principales équivalences glucidiques de base à connaître sont : 20 g de glucides sont apportés par 40 g de pain ou 100 g de féculents cuits, un fruit moyen, un bol de lait (300 mL) ou un yaourt aux fruits. La consommation de fibres devrait avoisiner 30 g/jour.
Les personnes diabétiques traitées par multi-injections d’insuline ou pompe doivent adapter leurs doses d’insuline rapide à la quantité de glucides ingérés.
Les personnes diabétiques traitées par insulinosécrétagogues (sulfamides hypoglycémiants, glinides) doivent veiller à éviter les hypoglycémies :
* en ayant un apport en glucides minimal à chaque repas ; * en évitant de sauter des repas ;
* en ayant une source de glucides sur elles, notamment en cas d’exercice physique. Chez l’enfant atteint de DT1, il n’y a pas de restriction en glucides et les apports conseillés sont ceux d’une alimentation équilibrée standard de l’enfant (glucides = 50 % des apports caloriques totaux, dont moins de 10 % sous forme de saccharose).
- Apports protéiques
Les apports doivent donc être personnalisés et au même niveau que la population générale. En cas d’atteinte rénale, il faut éviter les apports excessifs en protéines (ne pas dépasser 1 g/ kg/jour). La consommation excessive de viande rouge est bien identifiée comme un facteur de risque de DT2. - Apports en lipides
Le type d’acides gras consommés est plus important que la proportion de lipides dans l’alimentation. Le pourcentage de lipides dans l’alimentation est donc le même que celui de la population générale et doit être personnalisé. En règle, la consommation de graisses saturées doit être réduite. - Consommation d’alcool
La consommation modérée d’alcool, à savoir 20 g d’alcool par jour, n’est pas contre-indiquée. La consommation d’alcool augmente le risque d’hypoglycémie prolongée chez les personnes traitées par insuline ou par insulinosécrétagogue (informer les patients). - Apports sodés
De même que pour la population générale, recommander un apport en sel ne dépassant pas 8 g/jour, réduit à 6 g dans le cas d’HTA.
B. Activité physique
La pratique d’une activité physique régulière est recommandée pour le contrôle de la glycémie et des facteurs de risque cardiovasculaire (lipides, PA, poids), ainsi que pour la prévention des complications du diabète.
Chez les personnes ayant un diabète, il n’existe pas de réelles contre-indications à l’activité physique, mais des restrictions d’activité ou précautions à prendre suivant les complications et/ou comorbidités associées au diabète : antécédents cardiovasculaires et coronariens, HTAnon contrôlée, risque de lésions du pied (chaussage adapté), rétinopathie diabétique proliférante et instable (risque hémorragique et de décollement de rétine contre-indiquant l’activité physique jusqu’au contrôle de la rétinopathie). En cas de maladie coronarienne modérée ou sévère, la mise en place de l’activité physique dans le cadre d’un programme de réadaptation cardiovasculaire est conseillée.
Chez l’enfant, l’activité physique est encouragée sans restriction (à l’exception des sports où la survenue d’une hypoglycémie peut représenter un risque vital).
Pour les patients traités par insuline, l’éducation thérapeutique comporte l’apprentissage et la maîtrise des modalités d’adaptation des doses d’insuline et des apports en glucides avant et après l’activité physique, le repérage de l’hypoglycémie et l’apprentissage des mesures à prendre.
IV. Prescription et surveillance des médicaments du diabète chez l’adulte et chez l’enfant
Connaissances
A. Traitement pharmacologique du diabète de type 1
Le traitement du DT1 repose sur une insulinothérapie injectable à vie, en dehors des rares cas qui à ce jour peuvent bénéficier d’une greffe d’îlots ou du pancréas. Le traitement de référence est constitué par les schémas d’insulinothérapie multi-injections dits « basalbolus » comprenant quatre injections quotidiennes d’insuline (une basale injectée le soir ou le matin et trois rapides pour couvrir les repas) ou par infusion continue sous-cutanée d’insuline rapide (pompe à insuline, pouvant être couplé à des capteurs en continu de glycémie, fig. 8.2).Cela nécessite une éducation thérapeutique permettant d’apprendre à ajuster les doses d’insuline prandiale aux prises alimentaires, notamment au contenu en glucides du repas et à l’activité physique prévue suivant le repas.
L’utilisation d’analogues lents récents et d’analogues rapides de l’insuline permet de limiter le risque hypoglycémique par rapport aux insulines antérieures. Le schéma basal-bolus et le traitement par pompe permettent tous deux de s’adapter aux circonstances de la vie (possibilité de retarder l’heure ou de sauter un repas, grasse matinée, etc.) diminuant ainsi les contraintes liées à la gestion du diabète.
Les doses d’insuline physiologique vont de 0,5 à 1 unité/kg de poids/24 h avec une moyenne à 0,7 unité/kg de poids/24 h (dont environ 1/3 pour la basale ou lente et 2/3 pour les bolus de rapide).
- Formes disponibles d’insuline (tableau 8.10)
* Insuline humaine : issue du génie génétique ; insertion d’un gène codant pour les chaînes A et B de l’insuline humaine dans l’ADN de bactéries (Escherichia coli, Saccharomyces cerevisiae) cultivées à grande échelle.
* Analogues de l’insuline humaine : issus du génie génétique où un ou plusieurs acides aminés de l’insuline humaine sont remplacés (via leur séquence génétique) en vue de modifier la cinétique. Exemple : dans l’insuline lispro, deux acides aminés (lysine et proline) de la chaîne B de l’insuline ont été inversés par rapport à l’insuline humaine accélérant ainsi son absorption sanguine. Les analogues sont beaucoup plus utilisés que l’insuline humaine.
- Principaux effets secondaires de l’insuline
* Hypoglycémies par surdosage en unités injectées et/ou inadéquation par rapport à l’apport
en glucides aux repas et/ou à l’activité physique.
* Prise de poids : l’optimisation du contrôle glycémique (disparition de la glycosurie) a tendance à faire prendre du poids (+ 1 à 2 kg si alimentation maîtrisée).Lipodystrophies si injections répétées au même endroit (généralement résolues par l’arrêt
des injections dans la zone pendant 3 mois).
* Allergies rarissimes. * Lipoatrophies d’origine immunologique rarissimes avec les insulines actuelles.
- Situations particulières et insulinothérapie
En cas d’intolérance gastrique, ne jamais arrêter l’insuline. Lors d’une affection aiguë intercurrente telle que gastroentérite, grippe, etc., les besoins en insuline sont augmentés. Il est nécessaire de rapprocher les contrôles glycémiques et de faire des suppléments d’insuline rapide si nécessaire. Essayer des collations liquides fractionnées. En cas d’intolérance digestive complète, hospitaliser pour l’administration de solutés glucosés par voie intraveineuse. Toujours penser à vérifier la cétonémie (ou la cétonurie), car les troubles digestifs peuvent être révélateurs d’une cétose débutante.
Lorsqu’un examen nécessite d’être à jeun, les patients sous schéma basal-bolus avec analogues lents de l’insuline ou sous pompe à insuline doivent simplement ne pas faire leur injection d’insuline rapide ou leur bolus au moment du repas qui est supprimé. Une intensification des contrôles de glycémies capillaires est recommandée.
En cas de chirurgie avec réalimentation dans les 24 h, assurer des apports glucosés sous forme de perfusion par voie intraveineuse. Maintenir l’insulinothérapie basale et prévoir des suppléments d’insuline ultrarapide sous-cutanée à la demande, en fonction des glycémies capillaires, ou envisager une infusion continue par voie veineuse à la seringue électrique.
B. Traitement pharmacologique du diabète de type 2
La stratégie préconisée dans ce chapitre s’appuie sur la position de la SFD (publiée en 2019), de nombreuses études ayant été publiées depuis les recommandations de la HAS de janvier 2013 sur le thème « stratégie médicamenteuse du contrôle glycémique du diabète de type 2 ». De nouvelles recommandations de la HAS sont d’ailleurs en cours d’écriture et devraient être proches de la position de la SFD.
Si l’objectif glycémique n’est pas atteint malgré la mise en place des modifications thérapeutiques du mode de vie, un traitement médicamenteux sera commencé. Afin de favoriser leur tolérance, les traitements sont démarrés aux doses minimales recommandées qui sont augmentées progressivement jusqu’aux doses maximales tolérées ou jusqu’à l’atteinte de l’objectif.
La réévaluation du traitement est nécessaire après un intervalle de 3 à 6 mois – plus rapidement en cas de signes cliniques liés à l’hyperglycémie ou d’intolérance au traitement (hypoglycémie, prise de poids ou autres effets secondaires) – en portant une attention particulière à l’adhésion thérapeutique parfois difficile chez les personnes avec un DT2. Un traitement ne doit pas être maintenu chez un patient non répondeur ; il sera remplacé par un médicament d’une autre classe thérapeutique recommandée.
Dans tous les cas, il est recommandé d’informer le patient des avantages et inconvénients des traitements proposés et de tenir compte de leur acceptabilité. Lors de l’introduction d’un médicament susceptible d’induire des hypoglycémies, il est important d’apprendre au patient à prévenir, identifier et prendre en charge une hypoglycémie.
- Classes médicamenteuses disponibles
A Les principales classes d’antidiabétiques, hors insuline, actuellement disponibles sur le marché en France ainsi que leur mode d’action sont résumées dans le tableau 8.11.Tableau 8.11 A Principaux antidiabétiques utilisés en France (hors insuline)
Molécules Mécanismes d’action Principaux effets secondaires Metformine* seule avecamm chez enfants Agit sur l’insulinorésistance
Réduit la libération hépatique de glucose en agissant principalement sur la voie de la néoglucogenèse
Sensibilise le tissu adipeux à l’action de l’insuline Neutralité sur le poids ou légère perte de poids
Sulfamides hypoglycémiants à demi-vie longue
Glinides (demi-vie courte)
Inhibiteurs des α-glucosidases
Inhibiteurs des DPP-4 (gliptines)
Agonistes injectables du récepteur au GLP-1 (GLP-1-RA)
Inhibiteurs du SGLT2 (iSGLT2)
Sont des insulinosécréteurs. Ils stimulent la libération de l’insuline par la cellule β quel que soit le niveau de glycémie
Prise de poids (1 à 3 kg)
Sont également des insulinosécréteurs (apparentés aux sulfamides) mais avec une rapidité d’action par rapport aux sulfamides hypoglycémiants
Retardent l’absorption de glucose en réduisant la vitesse de digestion des polysaccharides dans l’intestin proximal
Réduisent ainsi l’hyperglycémie postprandiale
Favorisent le maintien de l’équilibre du glucose, en empêchant la dégradation de l’hormone GLP-1
Non hypoglycémiants, car agissent sur la cellule β uniquement si la glycémie est > 1 g/L
Pas de prise de poids
Ils augmentent de façon glucose-dépendante la sécrétion d’insuline par les cellules β
pancréatiques et inhibent la sécrétion de glucagon
Ralentissent la vidange gastrique et augmentent la sensation de satiété (perte de poids variable : 2 à 6 kg)
Ils agissent en réduisant la réabsorption tubulaire rénale du glucose et du sodium
Abaissent ainsi la glycémie et légèrement la PA (de 2 à 4 mmHg pour la PA systolique)
Ils induisent une perte de poids de 2 à 4 kg
Effets indésirables gastro-intestinaux (diarrhée, douleurs abdominales) chez 10 % Risque d’acidose lactique rare
Contre-indication en cas de DFG < 30 mL/min (diminution de moitié de dose dès 60 mL/min), d’acidose, d’hypoxie, de déshydratation
Risque d’hypoglycémie surtout par dosage inadapté aux besoins
Allergie rare
Risque d’hypoglycémie moindre et de durée plus courte
Absence d’allergie croisée avec les sulfamides
Troubles digestifs : flatulences, diarrhées Nécessite une augmentation progressive de la posologie
Allergie rare (angioedème)
Effets gastro-intestinaux (nausées/ vomissements)
Risque faible de pancréatite aiguë (contre-indication si antécédent de pancréatopathie)
Risque d’infections génitales surtout chez la femme
- Stratégies thérapeutiques (grandes étapes)
La stratégie recommandée pour chaque étape de traitement en fonction de la cible individuelle d’HbA1c (fig. 8.3) est la suivante :
* metformine en monothérapie si non contre-indiquée et supportée sur le plan digestif ; * si l’objectif d’HbA1c n’est pas atteint sous metformine seule :
– l’association metformine + iDPP-4 (inhibiteurs de la dipeptidyl peptidase-4) doit être préférée à une bithérapie metformine + sulfamide (recommandée par la HAS, 2013) enraison d’un haut niveau de preuve en faveur des iDPP-4 sur l’absence de risque hypoglycémique et la sécurité cardiovasculaire,
– le choix de la bithérapie peut aussi se porter sur metformine + agoniste du GLP-1 ou metformine + inhibiteur du SGLT2 (sodium-glucose cotransporter 2), en particulier si IMC ≥ 30 kg/m 2 , sachant que les classes des GLP-1-RA (glucagon-like peptide-1 receptors agonists) et des inhibiteurs du SGLT2 n’exposent pas au risque d’hypoglycémie, favorisent la perte de poids et apportent un bénéfice dans la prévention des événements cardiovasculaires ;
* si l’objectif d’HbA1c n’est pas atteint sous bithérapie metformine + iDPP-4, trois possibilités : – trithérapie orale : metformine + iDPP-4 + sulfamide ou metformine + iDPP-4 + inhibiteurs du SGLT2 ;
– arrêt iDPP-4 et passer à association metformine + GLP1-RA ; – instaurer une insulinothérapie basale en association à la metformine.* Réévaluer les modifications thérapeutiques du mode de vie, d’adhésion et la participation thérapeutique du patient avant toute intensification thérapeutique.
* Toute intensification thérapeutique doit être codécidée avec le patient et couplée à une éducation thérapeutique et à un accompagnement.
* Metformine : dose maximale tolérée.
* Bithérapie d’emblée possible : HbA1c > 9 %. * Insulinothérapie d’emblée indiquée si HbA1c > 0 % et syndrome cardinal/hypercatabolisme/hyperosmolarité ou si cétonurie/cétonémie. * iDPP4 bithérapie préférentielle (absence d’hypoglycémie, neutralité pondérale, sécurité cardiovasculaire, « combos » avec metformine). * GLP-1RA envisageable si IMC ≥ 30 kg/m2 et/ou prévention cardiovasculaire secondaire (liraglutide dans ce cas).
- Cas particuliers lors de la découverte du diabète
En cas de symptômes et de diabète très déséquilibré dès la découverte avec un taux d’HbA1c supérieur à 9 %, une bithérapie peut être instaurée d’emblée. Dans cette situation, lors de la réévaluation du traitement, si le diabète est bien contrôlé, on pourra être amené à passer d’une bithérapie à une monothérapie, voire à l’arrêt du traitement médicamenteux, notamment si l’HbA1c est < 6 % sous monothérapie, parfois observée après changement profond du mode de vie.
En cas de découverte avec cétose significative (cétonurie > 2 croix ou cétonémie > 1 mmol/L) et plusieurs glycémies > 3 g/L, une insulinothérapie mise en place en milieu hospitalier est recommandée avec avis spécialisé sur la poursuite ou non de l’insuline à long terme. Une recherche de cause secondaire au diabète doit être faite.
- Stade de l’insulinothérapie
L’instauration d’une insulinothérapie est l’objet d’une discussion avec le patient (et/ou son entourage) dans le cadre de l’éducation thérapeutique. Elle doit être accompagnée et idéalement précédée d’une autosurveillance glycémique et faire l’objet d’un apprentissage. L’intérêt de maintenir les antidiabétiques non insuliniques doit être évalué en fonction des bénéfices attendus pour chacune des molécules :
* la metformine sera le plus souvent poursuivie avec l’insuline chez le DT2 uniquement ; * les insulinosécréteurs seront interrompus ou diminués (quitte à les réintroduire ensuite) ; * les analogues du GLP-1 seront interrompus sauf s’ils avaient permis une perte de poids cliniquement significative (≥ 5 % du poids initial) ou chez un patient en prévention cardiovasculaire secondaire.
La quadrithérapie ne se justifie pas en général et une mise en place d’un schéma insulinique optimisé (basal-bolus ou prémix) est souvent indispensable à un stade avancé de carence en insuline.
De ce fait, le choix d’un traitement insulinique repose sur une expertise des soignants à transmettre au patient ou à la personne qui prendra en charge ce traitement. Le recours précoce à un diabétologue sera envisagé pour instaurer ou optimiser le schéma insulinique en cas de difficulté à atteindre les objectifs glycémiques fixés.
- Patients ayant un antécédent cardiovasculaire connu
Une attention particulière doit être portée au risque d’hypoglycémies. Ces dernières sont reconnues comme un facteur de risque de troubles du rythme cardiaque, particulièrement chez le sujet âgé : extrasystoles ventriculaires (ESV), tachycardie supraventriculaire (TSV), torsades, etc. Les recommandations de cible d’HbA1c chez les patients avec un antécédent cardiovasculaire récent (moins de 3 à 6 mois) ou instable sur le plan cardiovasculaire peuvent être relevées jusqu’à 8 % afin de limiter le risque lié aux hypoglycémies iatrogènes.B Une coordination entre médecin généraliste, néphrologue et diabétologue est recommandée, en particulier chez les patients avec une clairance de la créatinine < 45 mL/min/1,73 m 2 .
Patiente diabétique enceinte ou envisageant de l’être (le plus souvent DT1)
Il est recommandé de mettre en place un schéma insulinique optimisé le plus précocement possible afin d’atteindre et de respecter les objectifs glycémiques stricts (HbA1c < 6,5 %). L’équilibre optimal du diabète est utile avant la conception afin de minimiser le risque tératogène au moment de la fécondation des gamètes.
Une coordination étroite entre équipe gynéco-obstétricale, équipe diabétologique et médecin généraliste est recommandée. Cette prise en charge doit débuter avant la conception.
- Diabète de type 1 de l’enfant et de l’adolescent
A L’insulinothérapie est prescrite systématiquement selon un schéma basal-bolus dès le diagnostic. Le schéma associe un analogue de l’insuline d’action rapide injecté avant chaque repas et associé à un analogue lent de l’insuline injecté une fois par jour. L’autosurveillance glycémique pluriquotidienne est assurée chez tous les enfants par la mesure pluriquotidienne de la glycémie ou par la mesure intermittente ou de préférence en continu du glucose interstitiel (capteurs de glycémie). L’alimentation est équilibrée et adaptée aux habitudes familiales et évite le grignotage. L’activité physique est encouragée sans restrictions. Le suivi est assuré par une équipe multidisciplinaire dans un centre hospitalier de pédiatrie.
V. Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge
Les complications métaboliques « aiguës » du diabète sont responsables d’un grand nombre d’admissions dans les services d’urgence et de réanimation. La gravité de ces complications rend la connaissance de la bonne conduite de leur traitement indispensable. Elles comprennent l’acidocétose, les états hyperosmolaires, l’acidose lactique et l’hypoglycémie.
A. Décompensations hyperglycémiques du diabète 1. Acidocétose diabétique
Elle reste grave et parfois mortelle. La mortalité est cependant faible (< 1 %) ; plus souvent chez le sujet âgé avec comorbidités, elle est liée à l’acidose sanguine (pH < 7 comme critère de gravité, orientation en réanimation indispensable). Elle s’observe dans 90 % des cas en présence d’un DT1.
b. Manifestations cliniques A Les signes d’hyperglycémie peuvent être présents depuis plusieurs jours, mais les altérations métaboliques de l’acidocétose s’installent rapidement, en moins de 24 h parfois. Les signes en sont :
* un syndrome cardinal (polyuro-polydipsie, amaigrissement, polyphagie) qui peut évoluer
depuis plusieurs jours ou semaines ;
* une altération de l’état général ; * une odeur cétonique de l’haleine (odeur de pomme reinette) ; * des troubles digestifs (nausées, vomissements), voire vraies douleurs abdominales
(pseudochirurgicales).
Devant ces signes, la réalisation d’une glycémie capillaire accompagnée, si elle est élevée, d’une recherche de corps cétoniques dans le sang ou dans les urines à l’aide d’une bandelette permet de poser le diagnostic :
* en cas de DT1 connu, des doses correctives d’insuline doivent être réalisées en urgence (5 à 10 unités selon l’importance de la cétose) et la glycémie ainsi que l’acétone doivent être contrôlées au bout de 4 h. Si la cétose ne cède pas, s’il existe des troubles digestifs empêchant de s’hydrater, l’hospitalisation est nécessaire ;
* en l’absence de diabète connu, une hospitalisation est nécessaire pour l’instauration d’une
insulinothérapie et d’un diagnostic étiologique.
En l’absence d’intervention, les signes progressent pour constituer le tableau clinique d’acidocétose :
* déshydratation globale clinique avec hypotension artérielle ; * tachycardie ;
* fièvre, pouvant être d’origine infectieuse (cause déclenchante) ou seulement liée à la
déshydratation ;
* polypnée superficielle due à la compensation respiratoire de l’acidose métabolique, parfois
véritable dyspnée de Kussmaul en quatre temps ;
* trouble de la conscience d’intensité variable, pouvant aller jusqu’au coma, calme, profond,
sans signe de localisation neurologique, sans signe de Babinski ;
* troubles digestifs, douleurs abdominales, vomissements, diarrhée pouvant égarer le diagnostic et aggraver la déshydratation ; les douleurs abdominales peuvent être liées à la cétose ou à l’acidocétose, mais peuvent aussi être dues à une cause abdominale ayant déclenché la cétose ou l’acidocétose ce qui constitue donc un piège diagnostique.
Examens complémentaires à réaliser devant un tableau d’acidocétose (à réaliser en urgence +++) :
* glycémie capillaire et recherche d’acétone dans le sang ou dans les urines par bandelettes
à réaliser immédiatement ;
* glycémie plasmatique, ionogramme plasmatique avec calcul du trou anionique, urée et
créatinine plasmatique, gaz du sang, numération formule sanguine ;
* ECG (retentissement cardiaque des modifications du potassium cellulaire ou cause
déclenchante) ;
* on trouve en règle générale :– élévation franche de la glycémie, mais qui peut être variable, voire < 2,50 g/L, – hyperleucocytose à 10 000–15 000/mm 3 ne reflétant pas nécessairement une infection (hyperleucocytose de stress) qui sera cependant à considérer systématiquement, surtout si > 25 000/mm 3 ,
– diminution de la réserve alcaline, diminution du pH (par définition inférieur à 7,2 en cas
d’acidose confirmée), hypocapnie sans hypoxie liée à l’hyperventilation,
– kaliémie qui peut être élevée à cause de la sortie du potassium cellulaire du fait de la carence en insuline et de l’acidose ; une kaliémie normale ou basse reflète un déficit sévère en potassium total,
– phosphatémie qui, comme le potassium, peut être augmentée malgré un déficit
constant en phosphates,
– natrémie, également variable selon l’importance des pertes respectives en eau et en sodium, selon le niveau de la glycémie, mais le bilan sodé est toujours négatif. Il faut tenir compte de l’hyperglycémie pour interpréter la natrémie (fausse hyponatrémie liée à la charge osmotique de l’hyperglycémie aiguë),
– trou anionique augmenté : [Na - (Cl + HCO 3 )] (trou anionique normal entre 7 et 9 mEq/L ;
un trou anionique > 10–12 mEq/L reflète une augmentation du trou anionique), – élévation de l’urée et de la créatinine en fonction de la déshydratation (insuffisance
rénale fonctionnelle),
– possible élévation des enzymes pancréatiques au cours de l’acidocétose sans qu’il n’y ait
nécessairement de pancréatite.
c. Traitement B La base du traitement repose sur : * correction de la déshydratation et des troubles électrolytiques : – réhydratation intensive, de l’ordre de 1 L/h, initialement par sérum salé isotonique (sérum physiologique + sérum bicarbonaté isotonique si pH < 7). Ajout de sérum glucosé dès que la glycémie passe en dessous de 2 g/L. La réhydratation doit être plus prudente chez le sujet âgé,
– apport de chlorure de potassium (KCl) +++ (2 à 4 g/L) dès que la kaliémie est < 5 mmol/L
et en fonction de la surveillance ionique et de l’ECG ;
* insulinothérapie par perfusion intraveineuse (seringue électrique) : – insuline rapide par perfusion intraveineuse continue au moyen d’une seringue électrique, – passage à l’insulinothérapie sous-cutanée lorsqu’il n’y a plus d’acétone dans les urines ; * identification des facteurs déclenchants ou aggravants ;
* surveillance rapprochée ; * début ou reprise de l’éducation/prévention des récidives au décours.
- Syndrome hyperosmolaire
A Le coma hyperosmolaire survient surtout chez des personnes âgées, diabétiques de type 2 connus ou ignorés, peu autonomes et incapables d’une réhydratation hydrique spontanée dès le début des troubles. La mortalité y est considérablement plus importante que dans l’acidocétose et peut atteindre 25 % des cas.
b. Manifestations cliniques A Les signes d’hyperglycémie évoluent en règle générale depuis plusieurs jours ou semaines. On trouve :
* syndrome cardinal qui s’installe de façon insidieuse, le plus souvent incomplète, sans polyphagie (polyuro-polydipsie, amaigrissement), et qui peut évoluer depuis plusieurs jours ou semaines ;
* altération de l’état général ; * anorexie ;
* déshydratation globale clinique avec hypotension artérielle ; * tachycardie ;
* état de conscience qui peut aller d’un état normal à une léthargie profonde, voire à un
coma ;
* signes neurologiques parfois : crises convulsives focalisées ou généralisées. Les examens complémentaires à réaliser devant un tableau de syndrome hyperosmolaire sont les mêmes que pour l’acidocétose (à réaliser en urgence +++) :
* glycémie capillaire et recherche d’acétone (généralement négatif, mais faible taux possible)
par bandelettes à réaliser immédiatement ;
* glycémie plasmatique, ionogramme avec calcul du trou anionique, urée et créatinine plasmatique, gaz du sang, numération formule sanguine ;
* ECG (retentissement cardiaque des modifications de la kaliémie ou cause déclenchante),
radiographie thoracique, analyse d’urines, des crachats et hémocultures ;
* on trouve en règle générale : – hyperglycémie considérable : > 6 g/L, HbA1c souvent > 15 % (en dehors d’anémie), – hyperosmolarité plasmatique (> 350 mOsm/L) ; calcul de l’osmolarité : (Na + K) × 2
+ urée en mmol/L + glycémie en mmol/L ;
– natrémie variable (elle est minimisée par l’hyperglycémie : fausse hyponatrémie), mais il existe en fait une déplétion globale en sodium (Na) ; le calcul de la natrémie corrigée : Na mesurée en mmol/L + (glycémie en mmol/L - 5) × 0,3, permet d’apprécier le degré de déshydratation intracellulaire,
– hémoconcentration : augmentation de la protidémie et de l’hématocrite, – insuffisance rénale fonctionnelle avec élévation de la créatinine et de l’urée sanguine.
c. Traitement B La base du traitement est la même que pour l’acidocétose et repose sur : * correction de la déshydratation et des troubles électrolytiques :– réhydratation intraveineuse par sérum physiologique à 9 ‰ pour les premiers litres, puis sérum salé à 4,5 ‰ ultérieurement ; ajout de sérum glucosé lorsque la glycémie passe en dessous de 2,5 g/L, voire 3 g/L,
– comme pour l’acidocétose, elle doit être intensive, mais avec prudence, le sujet étant souvent plus fragile, et la correction trop rapide de l’hyperosmolarité par des solutés hypotoniques entraînant un transfert de l’eau du secteur intravasculaire vers le secteur intracellulaire risque d’aggraver le collapsus et de provoquer une hyperhydratation intracellulaire (oedème cérébral) ;
* correction de l’hyperglycémie : – de préférence, insulinothérapie par infusion intraveineuse continue à la seringue
électrique,
– l’objectif est d’obtenir des glycémies aux alentours de 2,5 g/L pour éviter la survenue d’un oedème cérébral. Passage à l’insuline rapide par voie sous-cutanée toutes les 4 h lorsque la glycémie capillaire revient à 2,5 g/L ;
* identification des facteurs déclenchants ou aggravants ; * surveillance rapprochée.
B. Acidose lactique
A L’acidose lactique est une acidose métabolique organique due à une accumulation d’acide lactique par augmentation de sa production ou diminution de son utilisation. On parle d’acidose lactique en présence d’une acidose métabolique organique associée à une lactatémie supérieure à 5 mmol/L. Le traitement par metformine chez la personne DT2 expose classiquement au risque d’acidose lactique, mais reste exceptionnellement retrouvé comme cause isolée dans la réalité.
- Traitement préventif
B La prévention de l’acidose lactique associée à la metformine repose avant tout sur le respect des contre-indications. Il s’agit de toutes les situations au cours desquelles il existe un risque d’hypoxie tissulaire ou de diminution de la clairance du lactate, voire les deux. Il s’agit classiquement de l’insuffisance rénale et de l’insuffisance hépatique sévère. Pour l’insuffisance rénale, il est cependant actuellement admis que la metformine peut être utilisée jusqu’à des clairances de 30 mL/min à condition de diminuer de moitié les doses à partir de 60 mL/min. En cas d’examen avec administration de produit de contraste iodé, la metformine doit être stoppée le jour de l’examen et pour une durée de 48 h. Le traitement est réintroduit après contrôle de la fonction rénale.
C. Hypoglycémies
A L’hypoglycémie est une complication indissociable du traitement du diabète ; elle est iatrogène et souvent due à des erreurs thérapeutiques chez des patients traités par insuline ou sulfamides hypoglycémiants. Elles sont dites « sévères » lorsqu’elles requièrent l’intervention d’une tierce personne pour le resucrage (troubles de conscience).
Les malaises hypoglycémiques chez le patient avec un DT1 peuvent être fréquents ; le patient doit apprendre à les reconnaître pour se resucrer dès les premiers signes ressentis et après contrôle de la glycémie capillaire. Le bon équilibre est souvent obtenu au prix d’hypoglycémies (deux à trois par semaine au maximum) qui doivent, dans la mesure du possible, être évitées, surtout la nuit.
Chez le patient avec un DT2, les malaises peuvent également être secondaires à la prise de glinides ou de sulfamides hypoglycémiants. Les hypoglycémies dans ce dernier cas peuvent être prolongées et graves sur certains terrains (alcoolisme, insuffisance rénale, insuffisance hépatocellulaire, dénutrition, grand âge).
- Circonstances
L’hypoglycémie sous insuline survient en cas de dose excessive d’insuline, d’inadéquation entre les apports en insuline et en glucides (prise insuffisante de glucides ou excès d’insuline), lors d’une activité physique non programmée ou à distance de celle-ci (hypoglycémie la nuit qui suit une activité intense), ou d’un délai trop long entre l’injection d’insuline rapide et le repas. Les malaises hypoglycémiques sous sulfamides hypoglycémiants surviennent souvent en fin de journée ou milieu de nuit. Ils peuvent être très prolongés ou à rebonds, en raison de la liaison prolongée de ces médicaments à leur récepteur. L’effet des sulfamides peut être potentialisé par l’association à d’autres médicaments liés à l’albumine : salicylés, phénylbutazone, antiinflammatoires non stéroïdiens (AINS), sulfamides antibactériens (cotrimoxazole : Bactrim ® ), anticoagulants coumariniques, antivitamines K (AVK), allopurinol, etc.
L’hypoglycémie sous glinides est plus rare, car ces médicaments ont une durée d’action beaucoup plus courte que les sulfamides et agissent sur la période postprandiale. Mais une hypoglycémie peut survenir en cas de surdosage ou si une prise du traitement n’est pas suivie d’un repas ou bien est suivie d’un repas contenant insuffisamment de glucides.
- Symptômes
Ceux-ci sont de deux types : * symptômes neurovégétatifs liés à la stimulation du système nerveux autonome et survenant pour un seuil glycémique aux alentours de 0,70 g/L : mains moites, sueurs froides, pâleur des extrémités et du visage, tremblements des extrémités, tachycardie avec palpitations, plus rarement troubles du rythme, nausées, voire vomissements. Ces symptômes s’accompagnent d’asthénie et d’une sensation de faim intense parfois mal identifiée par le patient ;
* symptômes neuroglycopéniques liés à la souffrance du système nerveux central, survenant pour un seuil glycémique inférieur à 0,5 g/L : sensation de malaise avec asthénie importante, troubles de la concentration intellectuelle, sensation de dérobement des jambes, paresthésies des extrémités, céphalées, impressions vertigineuses, troubles psychiatriques, multiples et trompeurs (confusion aiguë, agitation, troubles de l’humeur et du comportement, état pseudo-ébrieux, etc.), troubles neurologiques sévères (crises convulsives généralisées ou localisées), troubles moteurs déficitaires, troubles visuels à type de diplopie ou de vision trouble.
En l’absence de resucrage, le coma hypoglycémique peut survenir brutalement. Il s’accompagne d’une tachycardie, d’une respiration calme, de sueurs abondantes, de contractures et d’un syndrome pyramidal avec signe de Babinski bilatéral. Sa profondeur est variable.
- Examens complémentaires
La réalisation d’une glycémie capillaire (de préférence à une glycémie interstitielle provenant d’un capteur) suffit à confirmer le diagnostic chez une personne avec un diabète traité par insuline, sulfamide hypoglycémiant ou glinides. En présence d’un coma chez une personne avec un diabète recevant ces traitements, l’injection de glucosé hypertonique à 30 % (G30 %) en intraveineuse doit être effectuée sans attendre aucun résultat.
- Diagnostic différentiel
Devant un malaise :
* malaise vagal : circonstances déclenchantes différentes, bradycardie, soulagée en position
allongée ;
* crise d’angoisse : circonstances déclenchantes, présence de signes respiratoires (suffocation), de signes digestifs (douleur abdominale en barre, diarrhée, etc.) ;
* angor : circonstances déclenchantes parfois semblables (effort), mais présence de douleur thoracique (mais pas toujours), non calmée par le resucrage. Importance de la glycémie capillaire au moment ou au décours du malaise. Mais devant tout malaise atypique chez un patient diabétique, on doit évoquer une crise d’angor, voire un infarctus du myocarde. Devant un coma :
* épilepsie essentielle ; * AVC.
Le resucrage par voie intraveineuse est un excellent test diagnostique : le retour à une conscience normale est immédiat en cas de coma d’origine hypoglycémique. Attention ! Le coma hypoglycémique peut entraîner un AVC véritable.
- Traitement
a. Chez un patient conscient et capable de déglutir * Arrêt de l’activité physique.
* Apport immédiat avec 15 g de glucides à fort index glycémique (3 ou 4 morceaux de sucre, ou 12,5 cL de jus de fruits ou soda non light, ou 2 cuillers à café de confiture).
* Contrôle de la glycémie capillaire 15 min après. Si la glycémie reste inférieure à 0,6 g/L, cet
apport glucidique doit être répété.
* Si le patient est traité par sulfamides hypoglycémiants : arrêter ou diminuer la posologie de
ce médicament.
b. Chez un patient non conscient et/ou incapable de déglutir Quelle que soit la cause de l’hypoglycémie, une injection intraveineuse directe de 2 à 4 ampoules de G30 % doit entraîner le réveil rapide du patient.
Si et uniquement si l’excès d’insuline est la cause du coma, l’entourage du patient peut injecter une ampoule de glucagon qui entraînera une libération du glucose à partir du glycogène hépatique. Au réveil, l’ingestion de glucides est impérative pour éviter la récidive de l’hypoglycémie. Si les sulfamides hypoglycémiants sont la cause du coma seule l’injection intraveineuse de glucose est permise. Elle sera suivie de la mise en place d’une perfusion de G10 %.
c. Chez l’enfant avec diabète de type 1 * Pas de trouble de conscience = resucrage oral :
– sucre rapide = 1 morceau de sucre (5 g) ou 1/2 verre de jus de fruits ou de soda pour
20 kg de poids ;– puis sucre lent = pain, biscuit – équivalent de 15 à 30 g de glucides, selon les circonstances (activité physique prévue dans les heures qui suivent) et le type de traitement. * Si trouble de conscience = pas de resucrage oral :
– mise en position latérale de sécurité (PLS) ; – en première intention : glucagon (geste réalisable au domicile par la famille, en PLS) : – injection de glucagon par voie intramusculaire ou sous-cutanée (0,5 mg si poids ≤ 25 kg,
1 mg au-delà) ;
– puis, une fois réveillé, resucrage per os si les vomissements sont peu importants. * En deuxième intention : glucosé par voie intraveineuse (si glucagon non disponible et
secours médicalisés) :
– G30 % : 10 mL/20 kg de poids ; ou G10 % : 30 mL/20 kg de poids ; – puis, une fois réveillé, relais par une perfusion de G10 % : 1,5 L/m 2 /jour pour une durée minimale de 1 h (jusqu’au maintien d’une glycémie constante, d’une conscience normale et en l’absence de signes digestifs empêchant l’alimentation ou le resucrage). Au décours d’un épisode d’hypoglycémie sévère, l’éducation thérapeutique doit être réévaluée, autosurveillance glycémique, alimentation et adaptation des doses d’insuline.
- Hospitalisation
Dans tous les cas, une personne diabétique traitée par sulfamides avec coma doit être hospitalisée, car l’hypoglycémie risque de réapparaître quelques heures après le traitement initial en raison de la durée d’action prolongée des sulfamides hypoglycémiants. Il faut donc maintenir une perfusion de glucosé à 10 % pendant 24 à 48 h en milieu hospitalier.
Par contre, la survenue d’un coma hypoglycémique chez une personne avec un DT1 n’entraîne pas automatiquement l’hospitalisation. Elle peut rentrer chez elle à condition de :
* avoir du sucre sur elle ; * ne présenter aucun déficit neurologique et cognitif ; * ne pas vivre seule, ne pas rentrer seule chez elle ;
clés
* être bien éduquée sur la pratique de l’autosurveillance glycémique ; * connaître l’erreur commise à l’origine de ce coma hypoglycémique ; * revoir rapidement son diabétologue.
- Au sein du DT2 coexistent certainement plusieurs formes de diabètes, selon le degré de sévérité de l’insulinopénie, mais pour affirmer le type 2 «classique» la présence d’un syndrome métabolique (ou syndrome d’insulinorésistance) est un élément important.
- L’équilibre glycémique est évalué par l’HbA1c dont la cible est variable en fonction de la fragilité (notamment personnes âgées et/ou avec comorbidités sévères) des patients.
- Les hypoglycémies doivent être recherchées en cas de thérapeutiques à risque (insuline ou sulfamides). De ce fait, on privilégiera les antidiabétiques non hypoglycémiants (gliptines, GLP-1-RA ou inhibiteurs du SGLT2) en bithérapie associés à la metformine.
- En cas d’insulinopénie importante un schéma de type basal-bolus est le plus souvent nécessaire qu’il soit délivré par multi-injections ou par pompe sous-cutanée. C’est uniquement avec ce type de schéma que les capteurs en continu de la glycémie sont remboursés en France.
- Les complications cardiovasculaires rendent compte de l’essentiel de la morbidité chez les diabétiques de type 2, mais également de plus en plus chez les diabétiques de type 1. Les objectifs thérapeutiques à atteindre sont plus exigeants lorsque le risque cardiovasculaire est élevé ou très élevé, notamment en présence d’une atteinte rénale ou athéromateuse.
I. Épidémiologie
L’obésité est une maladie chronique évolutive exposant à un risque de complications somatiques (respiratoires, mécaniques, cardiovasculaires, métaboliques), psychologiques et sociales. L’obésité est fréquente : en France, en 2015, elle touchait environ 17 % des adultes et 3 à 4 % des enfants (étude ESTEBAN, 2015). Environ 50 % des adultes et 16 à 20 % des enfants sont en surpoids ou obèses. Cette prévalence est en augmentation chez l’adulte, stable en pédiatrie, sauf chez les adolescentes où elle a tendance à augmenter, mais évolue différemment selon les régions (les régions du Nord et de l’Est sont les plus touchées ainsi que les départements et régions d’outre-mer).
La prévalence de l’obésité augmente avec l’âge et est plus élevée dans les classes sociales défavorisées.