Endocrinologie Flashcards

1
Q

I Épidémiologie et sémiologie

L’insuffisance surrénale est une pathologie classiquement rare (un cas pour 10 000 habitants), mais potentiellement grave en raison du risque d’insuffisance surrénale aiguë qui peut survenir à tout moment. Cette complication est létale en l’absence d’un traitement rapide et adapté.

L’insuffisance surrénale lente est une pathologie chronique, probablement sous-diagnostiquée, en particulier pour les formes secondaires à une corticothérapie prolongée. Sa prise en charge permet d’assurer au patient une qualité de vie satisfaisante et de le mettre à l’abri d’une décompensation aiguë.

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2
Q

Les signes cliniques et biologiques de l’insuffisance surrénale s’expliquent par le rôle des différentes hormones normalement produites par le cortex surrénalien :

le cortisol, dont la sécrétion est stimulée par l’ACTH hypophysaire et qui exerce un rétrocontrôle négatif sur la sécrétion d’ACTH, a des points d’impact multiples, parmi lesquels :
    la stimulation de la néoglucogenèse, donc un effet hyperglycémiant ;
    la stimulation du catabolisme protidique ;
    la stimulation de la lipogenèse (viscérale et de la région faciotronculaire) ;
    l’inhibition de la sécrétion d’hormone antidiurétique ;
    l’action stimulante sur le système nerveux central ;
    l’effet anti-inflammatoire et antipyrétique ;
    la stimulation du tonus vasculaire ;
    l’effet minéralocorticoïde à forte dose ;

l’aldostérone a une action essentiellement rénale : rétention sodée et excrétion de potassium (effet minéralocorticoïde) ; elle est sous la dépendance prépondérante du système rénine-angiotensine ; sa sécrétion est donc préservée en cas d’insuffisance surrénale haute par déficit en ACTH ;
les androgènes surrénaliens (DHEA surtout) sont stimulés par l’ACTH.La sécrétion de cortisol suit un rythme nycthéméral avec un nadir (minimum) entre minuit et 2 h du matin, et un pic entre 7 h et 9 h.
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3
Q

On distingue parmi les insuffisances surrénales lentes :

l’insuffisance surrénale primaire (de causes surrénaliennes), à laquelle on réserve le nom de maladie d’Addison, caractérisée par un déficit qui touche à la fois le cortisol et l’aldostérone. Les signes cliniques sont marqués, en particulier l’hypotension. Il existe une perte de sel et une tendance à l’hyperkaliémie. La concentration d’ACTH plasmatique est élevée par perte du rétrocontrôle négatif, expliquant la mélanodermie (fig. 1) — l’ACTH et la MSH qui sont produites à partir de leur molécule mère, la pro-opiomélanocortine (POMC), à fortes concentrations se lient et activent les récepteurs cutanés qui stimulent la synthèse de mélanine ;
l’insuffisance surrénale centrale, ou insuffisance corticotrope (causes hypophysaires, hypothalamiques, la plus fréquente étant l’arrêt d’une corticothérapie prolongée +++) : la sécrétion d’aldostérone est préservée, ce qui explique un tableau habituellement moins sévère. En l’absence de perte de sel, le collapsus est plus rare. L’hyponatrémie traduit une rétention hydrique par augmentation de la sécrétion d’ADH. L’ACTH est normale ou basse et le teint est pâle (fig. 1) (cf. Item 265 – Désordres hydroélectrolytiques).
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4
Q

II Signes cliniques

Il faut bien différencier l’insuffisance surrénale liée à une pathologie des glandes surrénales elles-mêmes (insuffisance surrénale primaire), de l’insuffisance corticotrope liée à un manque de production d’ACTH (atteinte hypophysaire ou hypothalamique).

Le tableau 1 résume les différences entre ces deux pathologies.

________________________________________________________________________________

Tableau 1

Manifestations cliniques et biologiques de l’insuffisance surrénale chronique. (Source : CEEDMM, 2021.)
Insuffisance surrénale primaire Insuffisance surrénale secondaire (corticotrope)
État général Fatigue, dépression, anorexie, perte de poids, hypotension, hypotension orthostatique Idem
Peau et muqueuses Hyperpigmentation Pâleur, même sans anémie
Troubles ioniques Hyperkaliémie

Hyponatrémie par perte de sel
Kaliémie normale

Hyponatrémie de dilution
Maladies ou symptômes associés Pathologie auto-immune associée (hypothyroïdie, vitiligo, etc.)

Tuberculose

Tumeurs (cancer pulmonaire, digestif, rénal, mammaire, etc. ; lymphome ; mélanome)

Syndrome des anti-phospholipides
Signes d’insuffisance hypophysaire

Syndrome tumoral : céphalées, troubles visuels

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5
Q

A Insuffisance surrénale primaire

Le tableau peu spécifique et le début insidieux rendent le diagnostic difficile. Seule la mélanodermie est évocatrice mais elle peut être difficile à apprécier.

Parmi les manifestations, on peut trouver :

l’asthénie physique et psychique : elle est constamment présente, augmentée au cours de la journée et à l’effort ; les symptômes de dépression sont fréquents ;
l’amaigrissement, l’anorexie (100 % des cas également), avec toutefois conservation d’une appétence pour le sel ;
l’hypotension artérielle(dans 90 % des cas), se manifestant au début par une hypotension orthostatique et une accélération du pouls, traduisant la déshydratation extracellulaire ;
des nausées très fréquentes : l’apparition de vomissements, de diarrhée et de douleurs abdominales doit faire craindre l’insuffisance surrénale aiguë ;
la mélanodermie (80 % des cas) : pigmentation prédominant sur les zones exposées au soleil, les zones de frottement, les plis palmaires et les ongles ; les mamelons, taches ardoisées sur la muqueuse buccale.

L’hypoglycémie de jeûne est rarement symptomatique chez l’adulte, sauf au cours de l’insuffisance surrénale aiguë. L’hypoglycémie, qui peut se compliquer de convulsions, est beaucoup plus fréquente chez le jeune enfant et le nourrisson.

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6
Q

B Signes biologiques

Le ionogramme peut être normal. Il peut aussi montrer une tendance à l’hyponatrémie et à l’hyperkaliémie qui doivent faire évoquer le diagnostic, ainsi qu’une fuite sodée (natriurèse augmentée).

L’hypoglycémie est rare chez l’adulte, sauf lors de la décompensation.

L’hémogramme peut montrer une anémie modérée, normochrome, normocytaire, une leucopénie et une hyperéosinophilie.

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7
Q

C Particularités de l’insuffisance surrénale centrale (corticotrope)

Il n’y a pas de perte de sel car la sécrétion d’aldostérone est préservée, celle-ci ne dépendant pas de la production d’ACTH.

Les signes cliniques sont souvent moins marqués, en particulier la baisse tensionnelle et les troubles digestifs. L’asthénie peut être la seule manifestation clinique. L’état de choc est rare.

La mélanodermie est remplacée par une pâleur (+++) (cf. fig. 1).

Il peut s’y associer, en fonction de l’étiologie, des signes témoignant du déficit des autres hormones hypophysaires, un syndrome tumoral avec des signes de compression chiasmatique et des céphalées (cf. Item 244 – Adénome hypophysaire).

On peut observer une hyponatrémie (de dilution) mais pas d’hyperkaliémie.

L’hypoglycémie est plus fréquente en cas d’insuffisance antéhypophysaire globale et liée à la carence associée en GH.

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8
Q

III Diagnostic
A Diagnostic positif

Le diagnostic de certitude repose sur les dosages des hormones surrénaliennes et de l’ACTH (fig. 2). Toutefois, il ne faut en aucun cas attendre les résultats pour débuter le traitement lorsque l’on suspecte une insuffisance surrénale. valeur pas a coco
1 Cortisolémie

Elle peut être mesurée vers 8 h du matin, au moment où la concentration est la plus haute de la journée :

le dosage permet de conclure à une insuffisance surrénale si la cortisolémie à 8 h est inférieure à 50 ng/ml [138 nmol/l] ;
au contraire, la fonction corticosurrénalienne peut être considérée comme normale si la cortisolémie de base à 8 h est supérieure à 180 ng/ml [500 nmol/l] ;
dans tous les autres cas, des tests dynamiques sont indispensables.

2 Mesure de l’ACTH

La mesure d’ACTH à 8 h du matin (dans des conditions techniques de prélèvement rigoureuses) est un bon dosage pour rechercher une insuffisance surrénale primaire puisque les taux sont alors invariablement élevés.

En revanche, un taux normal d’ACTH n’élimine pas une insuffisance secondaire (corticotrope).

Si l’insuffisance surrénale est établie, le taux d’ACTH est un excellent moyen de différencier une insuffisance surrénale primaire (ACTH élevée) d’une insuffisance corticotrope (ACTH normale ou basse).3 Aldostérone et rénine 4 SDHEA 5 Test au Synacthène®

Il consiste en une injection IM ou IV d’une ampoule de 0,25 mg de Synacthène® (tétracosactide, analogue synthétique de l’ACTH), suivie d’un dosage de la cortisolémie à 30 minutes et/ou 1 heure.

La réponse est normale si la cortisolémie stimulée dépasse 180 ng/ml [500 nmol/l]. Une réponse normale élimine une insuffisance surrénale quelle que soit son origine.

L’absence de réponse lors du test au Synacthène® est caractéristique de l’insuffisance surrénale primaire (la corticosurrénale étant déjà stimulée de manière maximale par l’ACTH endogène). En revanche, le test explore de manière indirecte la possibilité d’insuffisance corticotrope. Lorsque celle-ci est installée depuis plusieurs mois, elle entraîne une atrophie du cortex surrénalien qui répondra mais de manière insuffisante lors du test (pic < 500 nmol/l). On comprend donc que le test au Synacthène® puisse être faussement normal dans les insuffisances corticotropes récentes ou partielles (10 % des insuffisances corticotropes).

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9
Q

B Diagnostic étiologique
1 Causes d’insuffisance surrénale primaire
Origine auto-immune : rétraction corticale

L’origine auto-immune concerne environ 80 % des cas chez l’adulte en France ; c’est donc, de loin, la cause la plus fréquente. Elle n’explique l’insuffisance surrénale primaire que chez 20 % des enfants et est alors diagnostiquée après 10 ans en général.

Elle est plus fréquente chez la femme que chez l’homme (sex-ratio de 3/1).

On retrouve fréquemment des antécédents familiaux de maladies auto-immunes.

La maladie d’Addison peut être isolée ou associée à d’autres maladies auto-immunes :

thyroïdite de Hashimoto ;
diabète de type 1 ;
insuffisance ovarienne précoce ;
gastrite auto-immune, éventuellement associée à une maladie de Biermer ;
maladie cœliaque ;
vitiligo, etc.
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10
Q

Tuberculose bilatérale des surrénales

Elle concerne environ 10 % des cas d’insuffisance surrénalienne primitive en Europe.

Elle est due à une localisation du BK (bacille de Koch) dans les surrénales suite à une dissémination hématogène. Elle ne devient habituellement parlante que plusieurs années après la première localisation de la tuberculose.

Le scanner montre des surrénales augmentées de taille à la phase initiale (fig. 4A) puis atrophiées et calcifiées dans 50 % des cas (fig. 4B).

La radiographie du thorax et le scanner thoracique montrent des signes de tuberculose, éventuellement au stade de séquelles. Un bilan des différentes localisations de la tuberculose est indispensable (cf. Item 155).Au cours de l’infection par le VIH

Elle survient habituellement à un stade avancé de la maladie. Les mécanismes sont multiples :

localisation surrénalienne d’une infection opportuniste ou d’une pathologie maligne (lymphome, etc.) ;
mécanisme iatrogène ;
l’insuffisance surrénale peut également être due à une atteinte de l’hypophyse par un lymphome ou une infection.
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11
Q

Autres causes surrénaliennes

Ces autres causes sont :

iatrogènes :
    surrénalectomie bilatérale 
    anticortisoliques de synthèse (mitotane, Lysodren® ; kétoconazole, Kétoconazole HRA® ; métyrapone, Métopirone®) ;
    nécrose hémorragique (anticoagulants, etc.) ;

métastases bilatérales : cancer du poumon, du rein, du sein, etc. Le scanner montre deux masses surrénaliennes (fig. 5) : le primitif est le plus souvent facilement retrouvé (scanner thoracoabdominal, fibroscopie bronchique, etc.) ;
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12
Q

etio chez enfant

A

Chez l’enfant

L’insuffisance surrénale est rare et les causes génétiques sont de loin les plus fréquentes.
Bloc enzymatique (hyperplasie congénitale des surrénales) (+++)C’est la cause la plus fréquente d’insuffisance surrénale chez l’enfant. Il s’agit de maladies autosomiques récessives liées à une mutation d’un gène codant une enzyme de la stéroïdogenèse.

Le gène de loin le plus souvent en cause est celui codant la 21-hydroxylase (déficit en 21-hydroxylase). Le cortisol et l’aldostérone ne sont pas synthétisés normalement, d’où l’insuffisance surrénale.

ambuguite sexuelle Adrénoleucodystrophie

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13
Q
A

2 Causes d’insuffisance corticotrope

La cause de loin la plus fréquente est l’interruption d’une corticothérapie prolongée.

Il faut habituellement une dose supraphysiologique (plus de 30 mg d’équivalent hydrocortisone, soit plus de 7 mg de prednisone, par exemple) pendant 3 à 4 semaines — en fait, il existe une grande variabilité individuelle dans la sensibilité de l’axe aux corticoïdes exogènes.

Les antécédents de corticothérapie doivent être recherchés à l’interrogatoire, en sachant que d’autres voies d’administration que la voie orale peuvent être en cause : corticothérapie percutanée, intramusculaire (formes retard +++), intra-articulaire, forme inhalée.

Au cours d’une corticothérapie, l’axe hypophyso-surrénalien est constamment freiné. Une décompensation peut survenir en cas de pathologie intercurrente ou en cas de dose < 5 mg d’équivalent prednisone (correspondant à 20 mg d’hydrocortisone) (tableau 2).Les autres causes sont :

tumeur de la région hypothalamo-hypophysaire ;Dans ces situations, le déficit corticotrope est rarement isolé. Il s’associe le plus souvent à une insuffisance d’autres axes hypothalamo-hypophysaires et/ou à des signes neurologiques (cf.
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14
Q
A

IV Prise en charge thérapeutique

Rappelons que le traitement d’une insuffisance surrénale suspectée doit avoir débuté sans attendre le résultat des dosages hormonaux. Il est du reste parfaitement possible de débuter le traitement et de faire dans un second temps le test au Synacthène® ainsi que le dosage d’ACTH. Compte tenu de la durée de vie très courte de l’hydrocortisone, il suffit de faire les prélèvements avant la prise du matin.

La prise en charge comporte quatre volets :

un traitement substitutif ;
un traitement de la cause s’il y a lieu ;
une éducation thérapeutique du patient ;
une surveillance.
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15
Q
A

A Traitement substitutif

Il associe :

un glucocorticoïde : hydrocortisone (Hydrocortisone Roussel® 10 mg), 15 à 25 mg par jour, en deux à trois prises par jour, la dose la plus élevée étant donnée le matin, la suivante en début d’après-midi (deux prises), ou bien les suivantes le midi et dans l’après-midi (trois prises) ;
avec un minéralocorticoïde: fludrocortisone (Flucortac®), 50 à 150 μg par jour en une prise.

Dans l’insuffisance corticotrope, seule l’hydrocortisone est nécessaire (+++).B Traitement de la cause

S’il y a lieu (tuberculose, métastases, autre infection, sarcoïdose, etc.) : cf. les Items correspondants.

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16
Q
A

C Éducation thérapeutique du patient (+++)

L’éducation du patient, et de son entourage, concerne les points suivants :

avoir sur soi les outils de sécurité (fig .8) :
    une carte d’insuffisance surrénale et, éventuellement, un bracelet ou un collier d’alerte ;
    des comprimés d’hydrocortisone et, en cas de déficit en minéralocorticoïdes, de fludrocortisone ;
    une boîte d’hydrocortisone injectable et le matériel pour l’injection ;
    les recommandations d’urgence (en langue étrangère en cas de voyage) ;
régime normosodé ;
proscrire les laxatifs et diurétiques ;
traitement à vie (+++) — ou jusqu’à la preuve de la récupération de l’axe hypophyso-surrénalien en cas d’insuffisance corticotrope post-corticothérapie ou après l’exérèse d’un adénome cortisolique de la surrénale ou après l’exérèse d’un adénome hypophysaire corticotrope ;
savoir identifier les situations à risque et les symptômes d’insuffisance surrénale aiguë débutante ;
savoir adapter le traitement oral glucocorticoïde ;
savoir administrer l’hydrocortisone par voie sous-cutanée (au-delà de deux vomissements ou de deux diarrhées en moins d’une demi-journée ou en cas de troubles de conscience, faire une injection de 100 mg d’hydrocortisone en sous-cutanée) ;
savoir adapter le traitement aux situations particulières : chaleur, exercice physique, voyages… ;
utiliser de façon pertinente les ressources du système de soins.Il est conseillé d’abandonner la traditionnelle consigne « Doublez ou triplez la dose d’hydrocortisone » au profit d’une consigne personnalisée qui permettra que le patient augmente immédiatement l’hydrocortisone et qu’il en prenne le soir pour le couvrir en hydrocortisone pendant la nuit. Par exemple, pour un patient prenant d’ordinaire 1 comprimé d’hydrocortisone le matin et le midi, la consigne est : « Prendre immédiatement quelle que soit l’heure 2 comprimés, puis prendre 2 comprimés matin, midi et soir pendant 2 à 3 jours. »

_________________________

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17
Q
A

D Surveillance

La surveillance est surtout clinique (+++).

Pour adapter les doses, on se fonde sur la sensation ou non de fatigue (mais non spécifique), sur le poids, la pression artérielle (couché et debout). On recherche des signes de surdosage en hydrocortisone (gonflement et rougeur du visage, prise de poids, HTA, etc.) et de surdosage en fludrocortisone (HTA, etc.), et de sous-dosage (hypotension orthostatique, fatigue, nausées, etc.).Biologiquement, il faut vérifier la normalité du ionogramme sanguin.

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18
Q
A

nsuffisance surrénale aiguë

C‘est une pathologie vitale dont le traitement est urgent même sans certitude diagnostique. Les dosages hormonaux pourront être réalisés secondairement.

I Quand l’évoquer ?
A Clinique

Le tableau clinique est souvent d’emblée très aigu :

déshydratation extracellulaire avec pli cutané,
hypotension pouvant aller jusqu’au collapsus ;
confusion, crises convulsives secondaires à l’hyponatrémie et à l’hypoglycémie, voire coma ;
troubles digestifs : anorexie, nausées, vomissements, douleurs abdominales, diarrhée ;
douleurs diffuses, en particulier douleurs musculaires, céphalées ;
fièvre, à laquelle peut participer une infection ayant précipité la décompensation.

On peut être orienté par une insuffisance surrénale connue préexistante, une mélanodermie ou une anamnèse évocatrice d’insuffisance surrénale lente (asthénie, anorexie et amaigrissement d’aggravation progressive) ou d’hémorragie bilatérale des surrénales (syndrome douloureux abdominal inaugural).

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19
Q
A

B Biologie

Le tableau biologique est le suivant (* : spécifique de l’insuffisance surrénale primitive) :

hémoconcentration*, insuffisance rénale fonctionnelle* (+++) ;
hyponatrémie, hyperkaliémie*(carence en aldostérone) (+++) ;
hypoglycémie ;
acidose métabolique ;
anémie, hyperlymphocytose, hyperéosinophilie ;
natriurèse conservée ;
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20
Q
A

II Comment la confirmer ?
A Diagnostic positif

Si le diagnostic d’insuffisance surrénale n’était pas connu antérieurement, un prélèvement sanguin sera réalisé avant de commencer le traitement pour dosage du cortisol et de l’ACTH sanguins (et dosage de la rénine chez l’enfant) quelle que soit l‘heure, sans en attendre les résultats. Les dosages hormonaux n’ont aucun intérêt si l’insuffisance surrénale est connue.

La cortisolémie sera basse, effondrée, ce qui est anormal puisqu’elle devrait être stimulée chez un patient en état de stress.

L’ACTH sera très élevée dans l’insuffisance surrénale primitive, normale ou basse dans l’insuffisance corticotrope.

________________________________________________________________________________

En aucun cas on n’attendra les résultats pour débuter le traitement. B Diagnostic étiologique

On recherchera la cause de l’insuffisance surrénale, si elle n’est pas déjà connue, ainsi qu’un facteur de décompensation qui peut nécessiter un traitement spécifique.

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21
Q
A

Voici un modèle de flash card basé sur ton paragraphe :

Flash Card : Diagnostic et traitement de l’insuffisance surrénale

Q: Quelles sont les étapes à suivre en cas de suspicion d’insuffisance surrénale ?
A:
1. Réaliser un prélèvement sanguin pour dosage du cortisol et de l’ACTH, et de la rénine chez l’enfant, sans attendre les résultats.
2. Les dosages hormonaux ne sont pas nécessaires si l’insuffisance surrénale est déjà connue.
3. En cas d’insuffisance surrénale, la cortisolémie sera basse (anormale en état de stress) et l’ACTH sera très élevée (primitive) ou normale/basse (corticotrope).
4. Commencer le traitement sans attendre les résultats.

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22
Q
A

III Causes

La cause de très loin la plus fréquente est une insuffisance surrénale chronique (connue ou non) (cf. supra) décompensée spontanément ou à l’occasion d’une pathologie intercurrente.

L’insuffisance surrénale aiguë peut être révélatrice de l’insuffisance surrénalienne en cas de bloc enzymatique surrénalien (21-hydroxylase +++) complet (dans la période néonatale) ou en cas d’hémorragie bilatérale des surrénales ou d’apoplexie hypophysaire.

La cause de la décompensation d’un patient traité peut être n’importe quelle pathologie intercurrente (vomissements, diarrhées, infections, fracture, infarctus du myocarde, intervention chirurgicale, anesthésie, acte diagnostique invasif, effort physique important, stress psychologique intense, etc.).

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23
Q
A

IV Prise en charge

C’est une urgence extrême. Le traitement est débuté dès que le diagnostic est évoqué.
A Au domicile du patient

Administration de 100 mg d’hydrocortisone IV ou IM ou à défaut en SC : un patient dont l’insuffisance surrénale est connue doit avoir avec lui au moins deux boîtes d’Hydrocortisone Upjohn® 100 mg et savoir faire une injection SC d’hydrocortisone.
Transport médicalisé en milieu hospitalier.

B À l’hôpital

Transfert en urgence en réanimation.
Mesures non spécifiques en cas de coma, fièvre, douleurs, hypoxie (cf. Item 331).
Les protocoles et les doses indiqués ci-dessous sont indicatifs et le plus souvent proposés de façon empirique : ils seront adaptés en fonction de la sévérité du tableau clinique et ionique et du terrain en évitant la iatrogénie.
Corriger l’hémodynamique et les troubles hydroélectrolytiques :
    remplissage par NaCl 0,9 % pour compenser la déshydratation ;
    pas de supplémentation potassique, car hyperkaliémie (+++) ;
    administration de glucosé pour compenser l’hypoglycémie.

Hydrocortisone :
    après une dose initiale de 100 mg en IV ou IM (ou, à défaut, en SC) ;
    100 mg par 24 heures en perfusion IV continue par seringue électrique autopousseuse SAP (à défaut 50 mg en IV ou IM toutes les 6 heures).

Traiter le facteur déclenchant (++).
La surveillance concerne les points suivants :
    pression artérielle, fréquence cardiaque, fréquence respiratoire, oxymétrie de pouls, diurèse, température, glycémie capillaire, conscience ;
    refaire un ionogramme de sang après 4 à 6 heures ;
    scope en cas d’hyperkaliémie importante.
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24
Q
A

C Traitement préventif

Il consiste à éduquer le patient à augmenter lui-même ses doses en cas de facteurs de décompensation potentiels.

Il consiste également à informer le médecin traitant pour qu’il sache vérifier que les doses sont augmentées en cas de pathologie intercurrente, et reconnaître une insuffisance surrénale aiguë et en débuter le traitement à domicile avant d’adresser le patient à l’hôpital.

Le médecin urgentiste ou l’anesthésiste recevant un patient insuffisant surrénalien victime d’un accident de la voie publique, d’un infarctus, d’une pneumonie ou dans un contexte d’urgence chirurgicale doit connaître le risque d’insuffisance surrénale aiguë et savoir le prévenir. Lorsque la prise orale du traitement est impossible, l’hydrocortisone peut être administrée en IM ou IV à raison de 25 mg toutes les 6 heures ou 100 mg en IV continue à la SAP.

En cas de chirurgie, on peut proposer :

100 mg IV ou IM initialement ;
puis, en cas de chirurgie majeure, 100 mg/24 heures en IV continue à la SAP (à défaut 25 mg en IV ou IM toutes les 6 heures) à poursuivre à la même posologie jusqu’à la reprise de l’alimentation ;
puis retour au traitement par hydrocortisone per os en triplant la dose habituelle (au minimum 60 mg par 24 heures) et en répartissant le traitement en trois ou quatre prises (dont une prise vespérale), puis diminution progressive en quelques jours pour revenir aux doses habituelles.

Chez les patients avec insuffisance surrénale primaire, reprendre la fludrocortisone lorsque les doses d’hydrocortisone sont inférieures à 50 mg par jour.

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25
Q
A

Arrêt d’une corticothérapie

Compte tenu de sa fréquence, cette situation nous paraît mériter une mention particulière.

L’axe corticosurrénalien est constamment freiné durant une corticothérapie à doses supraphysiologiques. La récupération se fait selon la chronologie suivante : CRH hypothalamique d’abord, ensuite ACTH hypophysaire puis cortisol surrénalien.

L’arrêt d’une corticothérapie expose :

au rebond de la maladie causale (+++) (dont nous ne parlerons pas ici) ;
à l’insuffisance corticotrope (cf. supra), qui nécessite une évaluation et une substitution ;
à un syndrome de sevrage en corticoïdes.

I Signes cliniques

Les signes cliniques d’insuffisance corticotrope (fatigue, douleurs musculaires, troubles digestifs : cf. supra) peuvent être plus difficiles à reconnaître en raison d’une possible confusion avec les signes de rechute de la maladie causale et les séquelles d’un syndrome de Cushing iatrogène. C’est la raison pour laquelle il faudra réaliser une exploration biologique systématique chez les patients candidats à développer une insuffisance corticotrope.

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26
Q
A

II Conduite à tenir

Les patients suivants doivent être considérés comme potentiellement en insuffisance corticotrope lors de la décroissance ou de l’arrêt du traitement glucocorticoïde : risque d’insuffisance corticotrope intermédiaire pour un traitement à dose ≥ 7,5 mg par jour d’équivalent prednisone pendant au moins 3 semaines, mais très élevé pour des doses ≥ 20 mg par jour.

Il faut néanmoins savoir que l’insuffisance corticotrope peut se développer et se décompenser chez des patients prenant une corticothérapie « locale » chronique (asthme, topiques cutanés, etc.).

Tant que la posologie de glucocorticoïde est supérieure à une dose substitutive (5 mg d’équivalent prednisone), il ne doit pas y avoir d’insuffisance surrénalienne clinique et le traitement doit être adapté uniquement en fonction de la pathologie ayant imposé la corticothérapie. En cas de stress majeur cependant, le traitement pourra transitoirement être majoré ou une substitution par hydrocortisone ajoutée, pour avoir une posologie de glucocorticoïde en moyenne équivalente à 40 à 60 mg d’hydrocortisone (10 à 15 mg de prednisone), à adapter en fonction du poids et des données cliniques.

En dessous de 5 mg par jour de prednisone, un traitement substitutif par hydrocortisone est introduit. La posologie est alors de 10 à 15 mg d’hydrocortisone en une ou deux prises, matin et midi. Le patient doit à ce stade être considéré comme étant en insuffisance surrénalienne (traitement et précautions : cf. supra).La démarche diagnostique est la même que pour toute suspicion d’insuffisance surrénale, en prenant la précaution de faire les dosages avant la prise d’hydrocortisone du matin. Un dosage du cortisol à 8 h, suivi éventuellement d’un test au Synacthène®, pourra être de nouveau réalisé tous les 3 à 6 mois pour évaluer la récupération à distance.

La récupération d’un fonctionnement corticotrope normal est variable et peut demander plusieurs mois ou années.

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Q
A

Voici une flash card basée sur le paragraphe que tu as fourni :

Flash Card : Insuffisance Surrénale

Q: Qu’est-ce que l’insuffisance surrénale et ses caractéristiques ?
A:
- Définition : Manque d’hormones surrénaliennes (glucocorticoïdes, minéralocorticoïdes).
- Types :
- Primaire : Atteinte des surrénales.
- Corticotrope : Manque d’ACTH.

Insuffisance surrénale chronique :
- Symptômes progressifs : asthénie, anorexie (sauf sel), amaigrissement, mélanodermie, hypotension, troubles digestifs, hyponatrémie, hyperkaliémie.
- Diagnostic : Prélèvements veineux pour dosages hormonaux ; cortisolémie et ACTH à 8 h, test au Synacthène®.

Causes fréquentes :
- Auto-immune (80 %), tuberculose (10 %), adrénomyéloneuropathie, métastases, corticothérapie pour insuffisance corticotrope.

Traitement :
- Hydrocortisone (glucocorticoïde) et fludrocortisone (minéralocorticoïde si besoin).

Éducation du patient :
- Porter une carte d’insuffisance surrénale, avoir des comprimés d’hydrocortisone et un kit injectable.
- Régime normosodé, éviter certains médicaments et aliments.
- Reconnaître les symptômes d’insuffisance aiguë et adapter le traitement en cas de stress.

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28
Q
A

Voici une flash card basée sur le paragraphe que tu as fourni :

Flash Card : Insuffisance Surrénale Aiguë

Q: Quels sont les signes cliniques et le traitement de l’insuffisance surrénale aiguë ?
A:
- Tableau clinique et biologique :
- Asthénie majeure, douleurs diffuses (céphalées, abdominales), vomissements, diarrhée.
- Déshydratation extracellulaire, hypotension, confusion, hypoglycémie, mélanodermie.
- Hyponatrémie, hyperkaliémie, hémoconcentration, insuffisance rénale fonctionnelle.
- Note : En cas de cause haute, pas de mélanodermie ni perte de sel.

  • Traitement :
    • Traitement d’urgence : hydrocortisone 100 mg IV par 24 heures.
    • Prélever le cortisol si crise inaugurale, sans attendre les résultats.
    • Corriger l’hémodynamique et les troubles hydroélectrolytiques.
    • Identifier et traiter le facteur déclenchant.
    • Bilan étiologique si insuffisance non connue ; rééducation si nécessaire.

Si tu souhaites des ajustements ou des précisions, fais-le moi savoir !

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29
Q
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30
Q

escription et mode d’action des différentes classes de contraception hormonale
A Œstroprogestatifs

1 Composition des œstroprogestatifs

Les œstroprogestatifs (ou contraceptifs oraux combinés ou pilules combinées) contiennent :

*un œstrogène synthétique, l’éthinyl-œstradiol, dont le dosage varie de 15 à 50 ug, ou un dérivé du 17p-œstradiol (œstradiol 1,5 mg ou valérate d’œstradiol à dose variable), administré à dose constante ou à dose variable, d’où le terme de pilule monophasique (un seul dosage), biphasique ou triphasique (fig. 1.1);un progestatif
–soit dérivé de la 19-nortestostérone, dont il existe trois générations1 :
–première génération, dérivé de la testostérone : noréthistérone et lynestrénol, qui ne sont plus disponibles;
–deuxième génération : lévonorgestrel et norgestrel;
–troisième génération : désogestrel, gestodène et norgestimate.
–soit classé comme dérivé d’autres molécules : drospirénone, acétate de chlormadinone, acétate de nomégestrol ou dienogest.
Contrairement aux premiers progestatifs, les progestatifs de deuxième et troisième générations ont une très forte affinité pour le récepteur de la progestérone et une plus faible affinité pour le récepteur des androgènes. Ils ont une activité antigonadotrope majeure, ayant permis de réduire la dose d’éthinyl-œstradiol.

Les autres voies d’administration des œstroprogestatifs sont la voie transdermique (patch, fig. 1.2) et vaginale (anneau, fig. 1.3). Ces formulations par voie extradigestive gardent les mêmes effets indésirables et contre-indications que les voies orales.

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31
Q

Mode d’action
L’effet principal des œstroprogestatifs est d’inhiber l’ovulation, essentiellement par l’effet du progestatif, mais le progestatif joue aussi un rôle important vis-à-vis de la glaire cervicale et de l’endomètre (fig. 1.4). Les œstrogènes régulent les saignements.icroprogestatifs

Les microprogestatifs contiennent un progestatif administré per os en continu.

Ils agissent principalement au niveau utérin (glaire cervicale et endomètre) et diminuent la mobilité des spermatozoïdes. Cependant, certains microprogestatifs, notamment le désogestrel et la drospirénone, ont également une activité antigonadotrope plus ou moins importante qui peut participer à l’action contraceptive.

2 Autres modes d’administration
La mise en place d’implants progestatifs dans le bras permet une administration continue de progestatif. En France, le Nexplanon®, qui est commercialisé comme implant valable pour 3 ans, délivre de l’étonogestrel.

Il existe une contraception injectable par voie intramusculaire (IM) tous les 3 mois utilisant l’acétate de médroxyprogestérone, avec des effets métaboliques majorés.

Enfin, il existe également trois dispositifs intra-utérins (DIU) qui délivrent des doses variables d’un progestatif, le lévonorgestrel, pour une durée de 3 à 5 ans.

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32
Q

Aspects pratiques de la prescription du traitement contraceptif
A Œstroprogestatifs

La première plaquette est commencée le premier jour des règles ou à n’importe quel moment du cycle (quick start); dans ce dernier cas, la femme n’est pas protégée pendant les sept premiers jours de la plaquette.

Les plaquettes suivantes sont reprises après 7 jours d’arrêt entre chaque cycle d’utilisation de 21 jours. Certaines pilules sont conditionnées pour une prise en continu : soit 21 comprimés de pilule plus 7 comprimés placebo, soit, dans le cas de certaines pilules minidosées, 24 comprimés actifs puis 4 comprimés placebo (ou 26 puis 2 pour la pilule au valérate d’œstradiol).

La prise doit être régulière, sans oubli, au même moment de la journée.

En cas d’oubli, il faut prendre le comprimé oublié le plus vite possible et reprendre ensuite le comprimé suivant à l’heure habituelle. S’il reste moins de 7 comprimés sur la plaquette, il faut enchaîner directement avec la plaquette suivante. Si, en revanche, il reste plus de 7 comprimés, on peut respecter la semaine habituelle d’arrêt entre les deux plaquettes.

Avec les pilules œstroprogestatives actuelles, aucun problème ne se pose lorsque l’oubli a duré moins de 12 heures. Au-delà, par prudence, une contraception mécanique est souhaitable pendant au moins 7 jours.

En ce qui concerne les autres voies d’administration, le patch œstroprogestatif se prescrit à raison d’un patch par semaine, 3 semaines sur 4. Enfin, l’anneau vaginal est inséré par la patiente elle-même et laissé en place pendant 3 semaines. Un nouvel anneau sera réinséré après une semaine d’interruption Microprogestatifs
Les microprogestatifs sont administrés en continu. Le retard dans la prise ne doit pas dépasser 3 heures pour le lévonorgestrel, ou 12 heures pour le désogestrel ou la drospirénone.

Au-delà, une contraception mécanique est indispensable pendant au moins une semaine..

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33
Q

Contre-indications des contraceptifs oraux
A Contre-indications aux œstroprogestatifs

1 Contre-indications absolues

Les contre-indications absolues sont les suivantes :

*accidents (ou antécédents d’accidents) thrombo-emboliques artériels ou veineux;
*prédisposition héréditaire ou acquise aux thromboses veineuses ou artérielles;
*alitement prolongé ou situation à risque thrombo-embolique (certaines situations chirurgicales);
*pancréatite ou antécédents de pancréatite associée à une hypertriglycéridémie sévère;
*lupus évolutif, connectivites, porphyries;
*migraine avec aura;
*hypertension artérielle;
*diabète de type 1 compliqué (de micro- ou de macroangiopathie) ou d’une durée de plus de 20 ans;
*diabète de type 2;
*tumeur maligne connue ou suspectée du sein, de l’utérus ou autre tumeur hormono-dépendante;
*affections hépatiques sévères ou récentes;
*hémorragies génitales non diagnostiquées.

A

Contre-indications relatives
Les contre-indications relatives sont les suivantes :

*tabagisme après l’âge de 35 ans;
*diabète de type 1 non compliqué, dyslipidémie;
*obésité;
*tumeurs bénignes du sein ou de l’utérus;
*hyperprolactinémie sans diagnostic étiologique préalable;
*inducteurs enzymatiques – il s’agit ici plus d’une perte d’efficacité (voir plus loin);
*fibrillation auriculaire, arythmie, coronaropathie ou valvulopathie;
*drépanocytose, maladies inflammatoires chroniques intestinales (MICI), syndrome hémolytique et urémique (SHU).
B Contre-indications aux microprogestatifs
Les contre-indications aux microprogestatifs sont représentées par les cancers du sein ou de l’endomètre, l’insuffisance hépatique et les accidents thrombo-emboliques veineux récent

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34
Q

ndications et sélection des utilisatrices
En l’absence de contre-indication absolue aux œstroprogestatifs, de lésion gynécologique et/ou de troubles des règles qui nécessitent une exploration diagnostique préalable, si le choix de la patiente est une contraception hormonale, il est recommandé d’utiliser une pilule œstroprogestative (< 40 µg d’éthinyl-œstradiol) avec un progestatif de deuxième génération. On choisira en premier lieu une pilule monophasique et remboursée par la Sécurité sociale – par exemple : Minidril® ou Optidril® dosées à 30 ug d’éthinyl-œstradiol; ou Lovavulo® ou Optilova® dosées à 20 ug d’éthinyl-œstradiol.

Le choix de la contraception chez une femme à risque vasculaire doit être plus précisément discuté (voir plus loin).

Après l’âge de 35 ans et surtout après 40 ans, compte tenu du risque plus important de certaines pathologies (notamment thrombo-embolique et mammaire), le type de contraception doit être réévalué en fonction du terrain de chaque femme.

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35
Q

Efficacité des différents moyens contraceptifs hormonaux
A Indice de Pearl

L’efficacité d’une méthode contraceptive est évaluée par l’indice de Pearl, qui représente le taux de grossesse pour 100 couples exposés à un mode de contraception sur une durée de 12 mois. Un indice de Pearl à 1 % indique la survenue d’une grossesse parmi les 100 couples exposés à ce type de contraception sur la période de 1 an.

Il n’y a pas de différence notable d’efficacité contraceptive entre les différents œstroprogestatifs. On estime que l’indice de Pearl le plus faible est obtenu pour l’implant puis pour le DIU et les combinaisons œstroprogestatives, entre 0,2 et 0,6 %. Cet indice augmente en revanche très largement en utilisation courante, avec un taux de 2 % pour le DIU et de 6 % à 7 % pour les combinaisons œstroprogestatives.

B Interactions médicamenteuses
Certains médicaments inducteurs enzymatiques (rifampicine, médicaments anticomitiaux, barbituriques, antiviraux, etc.) réduisent l’efficacité des contraceptifs oraux œstroprogestatifs, en particulier faiblement dosés, et des microprogestatifs, en accélérant leur dégradation et en diminuant leur pouvoir contraceptif.

C Cas particulier de l’adolescente
Malgré des campagnes d’information, on note une sous-utilisation ou une mauvaise utilisation de la contraception orale chez les adolescentes. Un travail de prévention sur ce sujet, avec en particulier une information sur la contraception d’urgence (voir plus loin), est indispensable afin de réduire le nombre d’interruptions volontaires de grossesse. Le DIU n’est plus une contre-indication chez la nullipare, tant que l’indication est correctement posée et la surveillance régulière. Enfin, il faut toujours penser à la prévention des infections sexuellement transmissibles (IST), en insistant systématiquement sur l’intérêt du préservatif, qui reste le seul mode de prévention. Rappelons que, depuis la loi de 1975, toute adolescente mineure peut obtenir une consultation anonyme et gratuite de contraception ainsi que la délivrance gratuite de la pilule dans un centre de planification familiale. La loi du 4 juillet 2001 autorise tous les médecins à prescrire une contraception hormonale à une mineure sans le consentement des titulaires de l’autorité parentale (art. L. 5134). L’examen gynécologique n’est réalisé que si la jeune fille le souhaite.

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36
Q

Tolérance des contraceptifs oraux
A Œstroprogestatifs

1 Effets secondaires mineurs

Dans la plupart des cas, la pilule œstroprogestative est bien tolérée. Cependant, compte tenu de la grande variabilité du métabolisme en fonction de chaque individu, certains effets secondaires, tels que des nausées, des vomissements, des jambes lourdes, des mastodynies, une acné, un hirsutisme et des migraines sont parfois observés. En revanche, on ne retrouve pas de prise de poids significative sous pilule.

2 Tolérance métabolique
Une augmentation des triglycérides, une altération possible du métabolisme glucidique et des modifications variables du cholestérol, en fonction du progestatif utilisé et de la dose d’éthinyl-œstradiol, justifient la surveillance métabolique.

3 Hémostase
Les œstroprogestatifs activent la coagulation, mais augmentent la fibrinolyse.

Le risque de thrombose semble surtout lié à un terrain prédisposant qu’il faut dépister (thrombo-philie) par l’interrogatoire, en cherchant des antécédents personnels et familiaux d’accident veineux thrombo-embolique. Au moindre doute, une consultation auprès d’un spécialiste de l’hémostase s’impose.

Cependant, le risque absolu reste très faible : il passe de 1 pour 10 000 par an chez les non-utilisatrices à 3 à 4 pour 10 000 femmes par an chez les utilisatrices de pilule œstroprogestative de deuxième génération, et 6 à 8 pour 10 000 femmes par an lorsque la pilule est de troisième génération (désogestrel ou gestodène), ou contient de la drospirénone ou de l’acétate de cyprotérone. Ce surrisque concerne également les anneaux vaginaux œstroprogestatifs et les patchs contraceptifs.

4 Tolérance vasculaire
Les contraceptifs oraux œstroprogestatifs produisent chez certaines femmes une faible augmentation de la pression artérielle, justifiant sa surveillance régulière.

Une association entre l’utilisation de la contraception orale et la survenue d’accidents vasculaires coronariens ou cérébraux a été notée, mais ce risque est faible et tient essentiellement à un tabagisme associé qui multiplie le risque par 11 et surtout à la présence d’une hypertension artérielle. Le risque artériel sous pilule œstroprogestative est 10 fois plus faible que le risque veineux.

5 Risque carcinologique
Cancer de l’ovaire
Le risque de cancer de l’ovaire est diminué de 50 % chez les femmes utilisant une contraception orale par rapport aux femmes n’en utilisant pas.

Cancer de l’endomètre
Le risque diminue de 50 % avec les pilules combinées.

Cancer du sein
Certaines études semblent indiquer l’association avec une très faible augmentation du risque de cancer du sein.

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37
Q

Microprogestatifs
Les microprogestatifs ont une moins bonne tolérance gynécologique que les œstroprogestatifs. Le principal inconvénient est la survenue de troubles des règles : spotting, irrégularités menstruelles ou aménorrhée. Ils peuvent augmenter légèrement l’acné ou l’hirsutisme.

Un risque de grossesse extra-utérine semble également associé à l’utilisation de microprogestatifs; il faut donc savoir y penser, ce d’autant que le diagnostic est difficile du fait des troubles des règles.

Ils n’ont en revanche pas d’effet secondaire métabolique. Ils peuvent être prescrits chez les femmes à risque vasculaire.

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38
Q

Surveillance de la contraception
Les patientes utilisant des contraceptifs hormonaux sont impliquées dans cette surveillance et doivent être informées :

*des événements pouvant diminuer l’efficacité de leur contraception : traitement concomitant ou autres inducteurs enzymatiques, oubli, épisode de vomissements ou de diarrhée;
*de la conduite à tenir (oubli de pilule);
*des signes évoquant une complication des œstroprogestatifs et de la nécessité de consulter rapidement, notamment : céphalée, déficit sensitivomoteur, douleur et/ou œdème d’un membre inférieur, dyspnée, douleur thoracique;
*des circonstances pouvant augmenter le risque de survenue des complications vasculaires, notamment : tabagisme, surpoids, chirurgie, alitement, voyage en avion prolongé, et prévention par hydratation et mobilisation régulière, etc.Examen clinique
La réalisation d’un test HPV n’est pas utile avant le 25e anniversaire en l’absence de symptômes, et l’examen gynécologique n’est pas systématique chez les femmes très jeunes asymptomatiques.

En revanche, l’examen clinique comporte au minimum et obligatoirement une mesure de la pression artérielle et est ensuite répété à 6 mois, puis tous les 6 à 12 mois, et avant tout renouvellement.

Il s’assure de la bonne tolérance clinique de la contraception orale (examen des seins, prise de la pression artérielle et vérification de la stabilité du poids) par la recherche des signes d’hyper-ou d’hypo-œstrogénie (hyperœstrogénie : tension mammaire; hypo-œstrogénie : sécheresse vaginale) ou d’hyperandrogénie (acné, etc.).

Lorsque la tolérance est médiocre, un changement de type de pilule, mieux adapté, est indiqué.

A
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39
Q

urveillance biologique
1 Patiente sans antécédent vasculaire et/ou métabolique

Dans les cas d’absence d’antécédent personnel ou familial métabolique, de maladie thrombo-embolique ou de tabagisme, et si l’examen clinique est normal, on réalise simplement un dosage de cholestérol total, des triglycérides et de la glycémie à jeun, 3 à 6 mois après le début de la prise de la pilule œstroprogestative, puis tous les 5 ans si ce bilan est normal et en l’absence de fait nouveau. Le bilan biologique préthérapeutique n’est donc pas systématique.

2 Facteurs de risque
Lorsque les femmes présentent des facteurs de risque de dyslipidémie ou de diabète, on pratique le dosage du cholestérol total, des triglycérides et de la glycémie à jeun, avant la prescription de la contraception œstroprogestative, en faisant un contrôle 3 à 6 mois après le début, puis tous les 5 ans si ce bilan est normal et en l’absence de fait nouveau.

C Surveillance gynécologique
Il faut rechercher des métrorragies et des spottings, pouvant apparaître plus particulièrement dans les premiers mois d’utilisation. Ils cèdent généralement spontanément dans les six premiers mois, notamment par la régularisation de la prise de pilule si celle-ci était mal prise, et il n’y a pas lieu, dans ces conditions, d’interrompre le traitement. Si les saignements persistent ou apparaissent après utilisation prolongée, la recherche d’une cause organique s’impose (notamment infection, mais aussi lésion endométriale).

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40
Q

Contraception hormonale chez les femmes à risque
A Femmes diabétiques

La contraception de la femme diabétique pose le problème du risque métabolique et vasculaire, mais une contraception efficace est indispensable, car les grossesses doivent être impérativement planifiées (voir Item 255, chapitre 20).

B Femmes avec dyslipidémie
La pilule œstroprogestative a peu d’effet chez les patientes normolipidémiques, mais elle peut augmenter de façon très significative les lipides chez la femme dyslipidémique.

La pilule peut être prescrite jusqu’à 3 g/l de cholestérolémie totale à condition qu’il n’y ait pas d’autres facteurs de risque vasculaire (tabac), que la femme ait moins de 35 ans et qu’il y ait prescription suivie d’une diététique adaptée (pauvre en graisses saturées).

C Femmes à risque de thrombose veineuse
1 Facteurs prédisposants

Certaines anomalies de l’hémostase, associées à un risque de thrombose veineuse, sont bien connues. Il s’agit soit d’anomalies génétiques (déficit en antithrombine, en protéine C ou protéine S, mutation du facteur V Leiden, mutation du gène de la prothrombine, etc.), soit d’anomalies acquises telles que les anticorps anticoagulants circulants de type lupique.

En dehors de ces anomalies, les antécédents personnels et l’existence d’antécédents familiaux de parents au premier degré avant l’âge de 50 ans de thrombose veineuse représentent également un facteur de risque ainsi que certaines circonstances favorisantes telles que l’obésité, un acte chirurgical (justifiant l’interruption des œstroprogestatifs au moins 1 mois avant) ou l’immobilisation prolongée (alitement, fracture, etc.).

2 Dépistage des femmes à risque
Un interrogatoire orienté doit permettre de sélectionner les patientes dites à risque, en fonction de leurs antécédents personnels et/ou familiaux (tableau 1.1, ANSM, février 2014).Le type de thrombose, notamment son intensité, les récidives, l’âge de survenue (avant ou après 45 ans), la recherche d’un facteur favorisant, l’existence de fausses couches à répétition et les antécédents familiaux de thrombose avant 45 ans conduisent à la recherche d’une pathologie thrombophilique prédisposante. Les examens hématologiques suivants doivent alors être demandés chez les femmes à risque avant la mise sous pilule œstroprogestative (HAS, juillet 2013) :

*temps de Quick, temps de céphaline activée, qui permettent la détection d’un anticoagulant circulant;
*dosage de l’antithrombine, dosage de la protéine C, dosage de la protéine S, test de résistance à la protéine C activée;
*recherche d’une mutation du facteur V (Leiden) et d’une mutation du facteur II (prothrombine). Chez les femmes qui ont un antécédent familial documenté d’anomalie de l’hémostase, cette anomalie est recherchée systématiquement avant la prescription de la pilule œstroprogestative.
3 Prescription
En cas d’antécédent thrombo-embolique ou d’anomalie de l’hémostase, les œstrogènes sont contre-indiqués et le recours à un micro- ou à un macroprogestatif peut être envisagé après avis d’un spécialiste de l’hémostase. Femmes hypertendues
L’utilisation de contraceptifs oraux s’accompagne d’une élévation modérée de la pression artérielle. Moins de 5 % des utilisatrices de contraception orale présentent une hypertension artérielle sous œstroprogestatifs.

L’hypertension artérielle est une contre-indication aux œstroprogestatifs.

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Q

Contraception d’urgence
La contraception d’urgence est définie comme l’utilisation, après un rapport sexuel non protégé, d’une méthode pour empêcher une grossesse éventuelle. Il existe trois possibilités : deux contraceptions d’urgence hormonales (lévonorgestrel et ulipristal acétate) ou la possibilité de pose d’un DIU.

La contraception d’urgence s’utilise en l’absence de contraception, en cas d’oubli de contraception orale ou d’un incident de préservatif, mais son efficacité dépend de la précocité de son utilisation. La contraception d’urgence ne doit pas représenter une contraception régulière et doit obligatoirement conduire à l’instauration d’une contraception fiable et adaptée.

La contraception d’urgence hormonale s’utilise de la façon suivante :

*soit une prise unique de lévonorgestrel, 1 cp à 1,5 mg, dès que possible après le rapport sexuel non protégé et au plus tard 72 heures après, et ce à n’importe quelle période du cycle;
*soit une prise unique d’ulipristal acétate, 1 cp à 30 mg, dès que possible après le rapport sexuel non protégé et au plus tard 120 heures après, et ce à n’importe quelle période du cycle.
Après utilisation de la contraception d’urgence, il est recommandé d’utiliser un moyen contraceptif local au minimum 7 jours, voire jusqu’au retour des règles suivantes.

Il n’existe aucune contre-indication au lévonorgestrel, qui peut être obtenu en pharmacie sans ordonnance conformément à la directive européenne du 31 mars 1992. Il est délivré gratuitement sans ordonnance pour les femmes mineures en pharmacie, dans les centres de planning familial et au lycée par les pharmaciens et les infirmières scolaires.

L’ulipristal acétate a une efficacité légèrement supérieure mais surtout nettement prolongée par rapport au lévonorgestrel. En revanche, son prix est plus élevé que le lévonorgestrel. Il est délivré gratuitement en pharmacie sans ordonnance, ou dans les centres de planning familial.

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42
Q

Points clés

*En dépit d’un vaste choix de contraceptifs, environ 200 000 interruptions de grossesse ont lieu en France chaque année. Il est donc nécessaire d’adapter la contraception à chaque femme et d’éduquer les couples.
*La contraception d’urgence est utile, mais ne doit pas se substituer à une contraception au long cours.
*La recherche d’antécédents de phlébites et d’embolie pulmonaire et la mesure de la pression artérielle sont nécessaires avant toute prescription d’œstroprogestatifs.
*Quelle que soit la voie d’administration des œstroprogestatifs, les contre-indications sont les mêmes.
*Les progestatifs sont utilisés seuls en cas de contre-indication des œstroprogestatifs.

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43
Q
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44
Q

Généralités, définitions, prévalences
On considère un couple hétérosexuel comme infertile en l’absence de grossesse après un an de rapports sexuels non protégés.

Dans la population générale, 70 % des grossesses souhaitées sont obtenues après 6 mois et 90 % après un an. En France, un couple sur six (17 %) consulte pour désir d’enfants. Ce recours augmente avec les années, pour diverses raisons (dont sociétales, environnementales entre autres), ce qui a conduit à l’élaboration d’un plan national contre l’infertilité. En effet, le risque d’infertilité augmente avec l’âge et on estime le risque d’infertilité à 1 couple sur 4 à 30 ans, 1 sur 3 à 35 ans et plus de 1 sur 2 au-delà de 40 ans. On estime qu’un enfant sur 30 est actuellement né par une technique d’assistance médicale à la procréation (AMP).

Le terme de stérilité ne peut être employé que si la situation d’infertilité est définitive (ménopause, castration bilatérale, etc.).

La fertilité d’un couple dépend de la fécondité de l’un et de l’autre partenaire : l’évaluation en parallèle des deux membres du couple est obligatoire (+++).

La fécondabilité de la femme se définit par la probabilité de grossesse en fonction des moments du cycle. Elle est au mieux de 25 % par cycle d’exposition. La fécondité est la capacité à se reproduire.

Dans un couple infertile, l’infécondité est d’origine féminine dans un tiers des cas, masculine dans un tiers des cas; elle est partagée dans le dernier tiers (+++).

L’exploration d’un couple infertile doit donc être menée parallèlement chez les deux partenaires (fig. 2.1), même en cas de cause évidente chez l’un des deux partenaires.

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II Interrogatoire
A Pour le couple

L’interrogatoire porte sur :

*la durée de vie commune, avec/sans contraception;
*La fréquence des rapports sexuels, leur programmation en phase préovulatoire ou non;
*la revue des antécédents médicaux et des traitements antérieurs ou en cours ainsi que des explorations préalablement réalisées.
B Chez la femme
1 Âge au moment de la consultation

L’âge est un élément capital du pronostic (+++) : la fécondité se détériore notablement après 35 ans, la fécondité maximale étant observée à 28 ans. Elle est très faible après 40 ans.

On interrogera sur l’âge de la puberté et des premières règles, le caractère régulier des cycles menstruels (25 à 35 jours, 28 ± 2 jours) ou irrégulier en l’absence de tout traitement.

2 Ancienneté de l’infertilité
L’ancienneté de l’infertilité est recherchée ainsi que son caractère primaire ou secondaire, c’est-à-dire la notion d’une grossesse antérieure ou non, avec le même ou un autre partenaire, y compris la recherche de fausses couches spontanées : interruption de grossesses préalablement documentées par un dosage d’hCG (gonadotrophine chorionique humaine) ou une échographie. On recherchera également des interruptions volontaires de grossesse (IVG) anciennes (+++).

3 Notions d’infections et/ou de curetages (+++)
On recherche des infections génitales (salpingites) et des curetages utérins (post-partum, post-abortum).

4 Antécédents infectieux
Antécédents infectieux, tels que les infections sexuellement transmissibles.

5 Douleurs pelviennes
La présence de douleurs pelviennes au moment des règles ou lors des rapports est évocatrice d’endométriose ou de séquelles infectieuses.

6 Conditions de vie
Le stress, une alimentation sélective avec éviction des lipides, un régime restrictif et/ou une activité sportive intense (compétition, jogging, plus de 6 à 7 heures par semaine) peuvent induire une infertilité (voir aussi « Aménorrhée hypothalamique fonctionnelle », Item 42, chapitre 3). La recherche d’addictions est nécessaire (tabac, alcool, cannabis, etc.).

7 Antécédents iatrogènes ovariens et pelviens

*Radiothérapie pelvienne (+++) ou hypothalamo-hypophysaire.
*Chimiothérapies gonadotoxiques (+++).
*Antécédents de chirurgie pelvienne : ovarienne et/ou utérine, en particulier du col utérin.
C Chez l’homme

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Chez l’homme
1 Troubles de la libido et de l’érection

Entraînant des rapports sexuels peu fréquents ou incomplets, parfois associés à des troubles éjaculatoires (éjaculations précoces, anéjaculations, éjaculations rétrogrades).

2 Antécédents de pathologie testiculaire
Antécédents de cryptorchidie (+++) (voir Item 50, chapitre 4), de traumatisme testiculaire ou d’infection testiculaire bilatérale (orchite ourlienne).

3 Antécédents chirurgicaux pelvien et scrotal
Des antécédents de hernie inguinale bilatérale opérée doivent faire évoquer une lésion chirurgicale des canaux déférents et/ou de la vascularisation testiculaire à l’origine d’une atrophie testiculaire. Des antécédents de chirurgie du col vésical ou, surtout, une paraplégie ou un diabète ancien avec neuropathie végétative peuvent entraîner une éjaculation rétrograde dans la vessie.Antécédents médicaux
Recherche d’antécédents médicaux, tels que les infections sexuellement transmissibles, les sinusites et bronchites à répétition (pouvant faire suspecter une mucoviscidose avec agénésie des canaux déférents).

5 Recherche d’exposition aux toxiques et aux causes iatrogènes
Il s’agit de la prise de toxiques ou d’une éventuelle exposition professionnelle (solvants organiques, pesticides, autres perturbateurs endocriniens), les addictions (alcool, tabac ++, cannabis, héroïne, sport de compétition – dopage à la testostérone et/ou aux autres stéroïdes anabolisants +++). Les traitements passés (chimiothérapie, radiothérapie abdominopelvienne ou hypophysaire +++) ou en cours sont détaillés.

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II Examen clinique
A Chez la femme

L’examen clinique évalue :

*la taille et le poids, avec le calcul de l’IMC;
*les signes éventuels d’hyperandrogénie (hirsutisme, acné, séborrhée);
*l’aspect de la peau (acanthosis nigricans signant une insulinorésistance, voir Item 42, chapitre 3);
*une galactorrhée provoquée (++) évoquant une hyperprolactinémie (voir Item 42, chapitre 3 et Item 244, chapitre 15);
*d’éventuelles bouffées de chaleur (en faveur d’une insuffisance ovarienne prématurée).
Sont également évalués à l’examen gynécologique :

*la trophicité vaginale;
*l’état apparent du col utérin;
*la présence de gros fibromyomes utérins.
B Chez l’homme
Les éléments suivants sont recherchés :

*la taille et le poids pour calculer l’IMC;
*des signes d’hypoandrisme : faible pilosité, faible masse musculaire, adiposité augmentée;
*des cicatrices de gestes chirurgicaux (plis inguinaux, scrotum, cryptorchidie);
*une gynécomastie;
*un aspect gynoïde, eunuchoïde;
*autres signes : hypospadias, infection du méat, autres anomalies de la verge.
Un examen général est aussi effectué avec toucher rectal en cas d’antécédent infectieux récent, pour rechercher une prostatite subaiguë.

Le volume testiculaire (+++) – 80 % du volume des testicules sont constitués par les tubes séminifères – est un élément capital du bilan initial. Il est apprécié au mieux à l’aide d’un orchidomètre de Prader (fig. 2.2) ou, à défaut, mesuré en centimètres avec un mètre ruban. Chez l’adulte, le volume normal est de 15 à 20 ml.La palpation testiculaire permet de préciser la fermeté, l’asymétrie et la sensibilité. La palpation du cordon spermatique permet de rechercher les déférents (impression de corde tendue) et, en position latérale des testicules, les épididymes, avec parfois perception d’un kyste. Cet examen permet aussi la recherche de varicocèle – dont la responsabilité dans l’infertilité est discutée.

En cas d’azoospermie, l’examen clinique doit être toujours complété par une échographie testiculaire

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48
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Examens complémentaires orientés
A Exploration hormonale et morphologique de première intention chez la femme

1 Exploration hormonale (+++)

En cas d’aménorrhée ou d’irrégularités menstruelles, on cherche d’abord à préciser leur mécanisme (voir Item 42, chapitre 3).

Les dosages indispensables dans un premier temps sont ceux de l’œstradiol (ou estradiol, abrégé « E21 »), de LH, de FSH et de prolactine plasmatiques.

Si les cycles sont réguliers, on cherche à préciser leur caractère ovulatoire par un dosage de progestérone plasmatique, à J22-J23 du cycle (22 ou 23 jours après le début des règles) (+++). Les dosages de l’AMH ou de l’inhibine B ont été utilisés pour évaluer la fertilité féminine; néanmoins, aucun de ces dosages n’est un reflet parfait de la réserve ovarienne à lui seul et aucun ne constitue un bon pronostic de la fertilité naturelle.

2 Échographie pelvienne (+++)
C’est un examen non invasif qui occupe une place prépondérante dans l’évaluation d’une femme infertile. Réalisée par voie endovaginale, l’échographie précise la taille et l’aspect des ovaires, et permet d’évaluer le compte des follicules antraux (CFA) – avec les échographies modernes (fig. 2.5), facteur pronostique :

L’échographie permet aussi de mesurer l’épaisseur de la muqueuse utérine et de montrer la présence d’éventuels polypes ou fibromes.

3 Hystérographie
L’hystérographie précise l’intégrité et la perméabilité de l’utérus et des trompes. Elle doit obligatoirement être effectuée en dehors de toute infection génitale évolutive (risque d’endo-métrite ou de salpingite) et après avoir écarté une grossesse.

Elle est réalisée en phase folliculaire moyenne vers le 8e à 10e jour du cycle. Elle permet d’apprécier la cavité utérine, l’état et la perméabilité des trompes ainsi que le passage plus ou moins facile du produit de contraste dans la cavité péritonéale (fig. 2.6).

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ploration de première intention chez l’homme
1 Spermogramme (+++) et spermocytogramme

C’est l’examen fondamental chez l’homme.

Le sperme doit être émis au laboratoire, par masturbation, dans l’idéal après un délai d’abstinence de 3 à 5 jours.

Les trois paramètres pris en compte dans l’analyse sont :

*la concentration (+++);
*la mobilité;
*la morphologie des spermatozoïdes.
Les principales caractéristiques du sperme normal ainsi que les principales anomalies retrouvées chez les hommes infertiles sont indiquées dans le tableau 2.1 (critères de l’OMS 2010).

Tableau 2.1

Valeurs normales du spermogramme selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) (modifiées en 2021).

Paramètre Valeur normale Définition de l’anomalie
Volume > 1,5 ml < 1,5 ml : hypospermie > 6 ml : hyperspermie
pH 7,2-8
Concentration
> 16 millions/ml
> 39 millions/éjaculat
0 : azoospermie
< 15 millions/ml : oligospermie
> 200 millions/ml : polyspermie
Mobilité > 30 % de mobilité progressive (a + b) < 30 % : asthénospermie
Morphologie OMS 1999 : > 30 % de formes typiques (selon la classification David) Tératospermie
OMS 2010 et 2021 : > 4 % de formes typiques (selon la classification Kurger)
Vitalité > 54 % de formes vivantes < 54 % : nécrospermie
Agglutinats Absence
Leucocytes < 1 million/ml > 1 million/ml : leucospermie
Normes établies pour une abstinence sexuelle de 2 à 7 jours.

(Source : OMS, 2010.)

Le spermogramme tient la première place dans le bilan d’une infertilité masculine. Mais cet examen doit être interprété de façon critique, surtout si les anomalies sont modérées. En effet, l’extrême variabilité des paramètres, à la fois inter- et intra-individuelle, rend difficile l’établissement de critères précis de normalité. Les conditions de recueil doivent aussi être soigneusement contrôlées.

Une affection même bénigne et de courte durée, telle qu’un épisode grippal, est susceptible de retentir sur les caractéristiques du sperme émis 2 à 3 mois plus tard, en raison de la durée de 74 jours du cycle de la spermatogenèse.

Lorsqu’il apparaît pathologique, le spermogramme doit être contrôlé 3 mois plus tard. Exploration hormonale (+++)
L’exploration hormonale doit être réalisée systématiquement en cas d’oligospermie ou d’azoospermie. Chez l’homme, l’exploration hormonale simple permet de diagnostiquer un déficit gonadotrope hypothalamo-hypophysaire ou une insuffisance testiculaire primitive par les dosages de testostérone totale, de LH, de FSH. La prolactine doit être mesurée en cas de troubles de la libido avec dysfonction sexuelle ou bien de gynécomastie (voir Item 246, chapitre 17) non expliquée ou devant toute insuffisance gonadotrope.

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tiologie de l’infertilité du couple
A Chez la femme

1 Anovulations (+++) et dysovulations

L’anovulation est une cause très fréquente d’infertilité féminine (près de 20 % des cas d’infécondité du couple). Son diagnostic est le plus souvent évident devant l’existence d’une aménorrhée ou d’irrégularités menstruelles (voir Item 42, chapitre 3), mais des cycles réguliers n’éliminent pas une anovulation.

Les ovulations de mauvaise qualité (dysovulations) peuvent parfois refléter une infertilité; elles sont caractérisées par une phase lutéale courte et/ou défectueuse, avec une sécrétion insuffisante de progestérone. Par fréquence décroissante, il peut s’agir (voir Item 42, chapitre 3) :

*d’un syndrome des ovaires polykystiques (SOPK);
*d’une hyperprolactinémie;
*d’une baisse de la réserve ovarienne, voire d’une insuffisance ovarienne prématurée;
*d’un déficit gonadotrope d’origine hypophysaire (FSH et LH basses);
*d’un déficit gonadotrope de cause hypothalamique, en particulier psychonutritionnelle (stress, activité physique intense, restriction alimentaire et pondérale) ou tumorale.
2 Obstacles mécaniques
Anomalies du col utérin et insuffisance de glaire cervicale
Ces anomalies sont la conséquence de sténoses cervicales apparues après conisation, curetage ou thermocoagulation de l’endocol à l’anse diathermique. Ces lésions peuvent être responsables d’une pathologie de la glaire cervicale et constituent l’indication de choix aux inséminations intra-utérines avec sperme du conjoint (IAC).

Obstacle et anomalies utérines
Il s’agit des malformations utérines avec cloisonnement, ou des synéchies infectieuses ou secondaires à des manœuvres endo-utérines du post-partum ou après une interruption de grossesse. Elles sont visualisées par l’hystérosalpingographie et, de plus en plus, par l’échographie avec produit de contraste. En deuxième intention, la visualisation de la cavité utérine par hystéroscopie permet le diagnostic et parfois le traitement (synéchie de petite taille).

Dans d’autres cas, il peut s’agir de polypes muqueux, de fibromes sous-muqueux ou d’une hyperplasie endométriale.

Le rôle de ces anomalies dans l’infertilité doit être regardé de façon critique car, en dehors d’un volumineux fibrome sous-muqueux, elles ne sont pas toujours en rapport avec l’infertilité.

Obstacle tubaire
Il s’agit d’une cause majeure d’infertilité féminine (+++).

Le plus souvent, l’obstacle tubaire est secondaire à une salpingite (parfois passée inaperçue, Chlamydia +++), un traumatisme chirurgical ou une endométriose.

Le diagnostic repose sur l’hystérosalpingographie qui montre l’obstacle, son caractère uni- ou bilatéral, ou l’existence de diverticules évocateurs d’endométriose.

La cœlioscopie, comprenant une épreuve de perméabilité au bleu, permet de faire au mieux l’inventaire des lésions, donc de mieux préciser le pronostic et de réaliser en outre des gestes thérapeutiques. Elle est également réalisée en cas d’infertilité inexpliquée, permettant parfois de mettre en évidence des foyers d’endométriose.

A

Endométriose
Une endométriose modérée, asymptomatique n’est que rarement la cause de l’infertilité. Des lésions endométriosiques sont retrouvées chez 50 % des femmes consultant pour « infertilité idiopathique ».

Le diagnostic est parfois évoqué devant l’existence de douleurs pelviennes, soit menstruelles, soit coïtales (dyspareunie profonde), ou après réalisation d’une hystérographie qui montre des images plus ou moins typiques – diverticules du segment interstitiel des trompes (images en « boule de gui »), images d’angulation ou de rétention ampullaire –, ou sur des lésions visibles à l’échographie pelvienne. L’IRM pelvienne est l’examen de référence pour réaliser une cartographie précise des lésions d’endométriose, qui peuvent être disséminées dans toute la cavité péritonéale.

L’hystérosalpingographie peut cependant être normale, ce qui justifie la réalisation d’une cœlioscopie chez une femme présentant une infécondité inexpliquée lorsqu’il y a des signes d’appel. Cette dernière montrera des foyers d’endométriose (grains bleutés) plus ou moins nombreux, uni- ou bilatéraux, pouvant être localisés y compris dans le péritoine ou les ovaires (kystes). La cœlioscopie permet de préciser le stade de l’endométriose (en plus de l’IRM pelvienne), d’en découvrir les sites lésionnels et de les traiter.

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51
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Chez l’homme
1 Azoospermies

Trois éléments guident la démarche étiologique : le volume testiculaire, les signes d’hypogonadisme et le taux de FSH.

Il ne faut pas oublier les antécédents de cryptorchidie (+++) (voir Item 50, chapitre 4).

Azoospermies non obstructives
Auparavant appelées azoospermies sécrétoires, elles sont définies par l’absence de production de spermatozoïdes par les testicules.

Diagnostic
L’azoospermie est presque toujours non obstructive lorsque le volume testiculaire est petit (< 10 ml). Le plus souvent, la concentration plasmatique de FSH est élevée en raison d’une atteinte testiculaire, mais il peut, plus rarement, s’agir d’un hypogonadisme hypogonadotrophique.

Dans certains cas, des patients porteurs d’authentiques azoospermies non obstructives peuvent présenter un volume testiculaire et une concentration plasmatique de FSH proches de la normale.

Étiologie
Chez ces patients, le caryotype (+++), obligatoire en première intention, permet souvent le diagnostic de syndrome de Klinefelter (formule caryotypique 47XXY ou mosaïque 46XY/47XXY) qui s’associe quasi constamment avec un volume testiculaire inférieur à 2 ml, voire à 1 ml.Une échographie testiculaire (fig. 2.7) permet d’éliminer un cancer testiculaire, plus fréquent dans ces cas.Les déficits gonadotropes congénitaux ou acquis sont aussi une cause d’azoospermie non obstructive mais, chez ces patients, c’est le tableau d’hypogonadisme qui domine le plus souvent, et le diagnostic est confirmé par les dosages hormonaux (baisse de la testostérone avec des taux de FSH et LH anormalement normaux ou bas). Dans la grande majorité des cas, ces patients consultent pour des troubles de la libido avec dysfonction sexuelle et très rarement pour une infertilité. Il s’agit d’une cause rare (moins de 5 % des cas) mais curable par un traitement médical simple (via l’apport de gonadotrophines exogènes qui favorisent la restauration d’une spermatogenèse normale, avec un rendement souvent conséquent permettant une fertilité normale sans recours aux techniques d’AMP).

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52
Q

Azoospermies obstructives
Auparavant appelées azoospermies excrétoires ou par obstacle, les azoospermies obstructives sont la conséquence d’une obstruction des voies excrétrices du sperme.

Diagnostic
Ce diagnostic est toujours évoqué lorsque le volume gonadique et la concentration plasmatique de FSH sont normaux.

Un examen clinique soigneux de l’appareil excréteur (épididymes, déférents, vésicules séminales et prostate) permet parfois de dépister la cause, mais leur recherche fait toujours appel à une échographie scrotale et des organes génitaux internes.

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53
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Oligo-asthéno-térato-spermies (OAT)
Les OAT représentent une des causes les plus fréquentes d’infécondité masculine.

Diagnostic
Le diagnostic repose sur la réalisation d’au moins deux spermogrammes montrant une diminution du nombre et de la mobilité des spermatozoïdes, associée à une fréquence élevée de formes anormales.

Les OAT constituent un simple symptôme dont les causes sont le plus souvent inconnues, mais dans certains cas génétiques.

L’enquête étiologique chez ces patients est similaire à celle utilisée chez les sujets atteints d’azoospermie. Chez près de 10 % des patients atteints d’OAT extrême (< 5 millions de spermatozoïdes/ml), un caryotype doit être demandé et des microdélétions du bras long du chromosome Y recherchées si le caryotype est normal.

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54
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Conclusion
L’infertilité est un motif fréquent de consultation, puisqu’elle concerne un couple sur six environ. Les causes sont multiples et touchent autant la femme que l’homme. Elles doivent être recherchées par une exploration minutieuse, en parallèle toujours chez les deux membres du couple. L’exploration est orientée toujours lors de la première consultation dont le rôle est fondamental. Elle doit permettre d’évaluer en première ligne : la sexualité du couple, l’âge de la femme, l’état tubaire et utérin, la présence et la qualité de l’ovulation chez la partenaire féminine, et, chez l’homme, la qualité du sperme et l’absence d’hypogonadisme. La détermination des facteurs étiologiques oriente toujours la prise en charge. Celle-ci peut aller de l’abstention thérapeutique (exploration normale, infertilité récente et femme jeune) aux techniques les plus sophistiquées d’aide médicale à la procréation. En cas d’anomalie du caryotype ou génétique, un conseil génétique est impératif.

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55
Q

Points clés

*A On considère un couple comme infertile en l’absence de grossesse après un an de rapports sexuels non protégés.
*La fertilité d’un couple dépend de la fécondité des deux partenaires. L’exploration d’un couple infertile doit donc être menée parallèlement chez les deux partenaires.
*Chez la femme, l’âge est un élément capital du pronostic : la fertilité baisse nettement après 35 ans.
*B Chez la femme, on recherche avant tout une anomalie cervicale, utérine ou des trompes et une anovulation. La prise en charge thérapeutique doit être précédée et orientée par l’enquête étiologique.
*Chez l’homme, après avoir vérifié le volume testiculaire et la sécrétion normale de testostérone, l’examen clé est le spermogramme

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56
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Introduction
L’aménorrhée est un motif fréquent de consultation.

On en distingue deux types :

*l’aménorrhée primaire qui se définit comme une absence de règles après l’âge de 15 ans, avec ou sans développement normal des caractères sexuels secondaires;
*l’aménorrhée secondaire qui correspond à un arrêt des cycles supérieur à 3 mois chez une femme antérieurement réglée.
L’absence de règles est physiologique pendant la grossesse, la lactation et la ménopause.

En dehors de ces périodes, l’existence de cycles menstruels réguliers témoigne du bon fonctionnement global de l’axe gonadotrope, des ovaires et de l’intégrité utérine. Toute interruption du cycle menstruel au-delà d’un mois, même après arrêt d’une contraception orale est anormale et justifie une enquête étiologique (Un traitement œstroprogestatif sans exploration préalable est donc toujours illégitime (+++).

C’est après la recherche d’une cause que sera proposé un traitement étiologique ou, à défaut, une substitution de l’insuffisance hormonale.

L’aménorrhée peut être précédée d’irrégularités menstruelles (oligo-/spanioménorrhée) dont la valeur sémiologique est similaire et l’enquête étiologique identique.

L’exploration d’une aménorrhée conduit nécessairement à la découverte de pathologies qui sont détaillées ailleurs. Seuls les principaux aspects diagnostiques sont évoqués ici.

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57
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Conduite diagnostique
A Aménorrhée primaire

1 Interrogatoire

Devant une aménorrhée primaire, la probabilité d’une cause génétique ou chromosomique est importante (voir fig. 3.1). Il convient donc de rechercher l’existence, dans la famille, d’autres individus atteints de retard pubertaire ou d’aménorrhée, d’hypogonadisme ou d’infertilité.

L’interrogatoire permet aussi de rechercher une carence nutritionnelle liée ou non à une maladie chronique (+++).

2 Examen clinique général et gynécologique, explorations de première ligne
Développement pubertaire
L’examen précise le développement pubertaire complètement absent ou quasi « normal » avec un développement mammaire qui est fonction de la sécrétion ovarienne d’œstradiol. Ce développement s’apprécie selon les stades de Tanner (tableaux 3.1 et 3.2, fig. 3.2).

Tableau 3.1

Développement mammaire (S) selon Tanner.

S1 Absence de développement mammaire
S2 Petit bourgeon mammaire avec élargissement de l’aréole
S3 La glande mammaire dépasse la surface de l’aréole
S4 Développement maximal du sein (apparition d’un sillon sous-mammaire) Saillie de l’aréole et du mamelon sur la glande
S5
Aspect adulte
Disparition de la saillie de l’aréole
(Source : CEEDMM, 2021.)

Tableau 3.2

Pilosité pubienne (P) selon Tanner.

P1 Absence de pilosité
P2 Quelques poils longs sur le pubis
P3 Pilosité pubienne au-dessus de la symphyse
P4 Pilosité pubienne fournie
P5 La pilosité s’étend à la racine de la cuisse et s’allonge vers l’ombilic chez le garçonL’exploration hormonale de première intention comprend le dosage de l’œstradiol et de la FSH. En cas de FSH basse, après avoir éliminé une tumeur hypothalamo-hypophysaire et une dénutrition, on recherche une anosmie et d’autres signes évoquant le syndrome de Kallmann (encadré 3.1).

En cas de gonadotrophines hautes, la petite taille et le syndrome malformatif (inconstant) font évoquer un syndrome de Turner dont le diagnostic est confirmé par la réalisation d’un caryotype (formule 45X ou mosaïque 45X/46XX).

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58
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Causes génétiques d’hypogonadismes hypogonadotrophiques

Les hypogonadismes hypogonadotrophiques congénitaux, dont le syndrome de Kallmann est le plus connu, sont une cause d’aménorrhée primaire avec gonadotrophines basses. Ces maladies se révèlent dans moins de 30 % des cas par une absence complète de développement pubertaire; en revanche, l’aménorrhée primaire est quasi constante.

S’il s’agit d’un syndrome de Kallmann, s’associe à l’hypogonadisme hypogonadotrophique une absence ou une diminution de la perception des odeurs (anosmie/hyposmie). Dans les syndromes de Kallmann, l’hypogonadisme résulte d’une anomalie de la migration des neurones à GnRH de la placode olfactive vers le noyau arqué pendant la vie embryonnaire, qui ne sont pas en position anatomique, permettant une stimulation des gonadotrophines hypophysaires LH et FSH (anomalie de migration due notamment à la mutation du gène KAL1 codant l’anosmine). À l’IRM, les bulbes olfactifs sont absents ou hypoplasiques. De nombreuses autres mutations d’autres gènes ont été décrites et sont responsables d’un hypogonadisme hypogonadotrope isolé ou associé à d’autres anomalies

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59
Q

Examen clinique
L’examen a pour but de visualiser le degré de pilosité. Dans certains cas, il peut évaluer la perméabilité et la trophicité du vagin et du col.

Il est complété par une échographie pelvienne de bonne qualité ou une IRM pelvienne qui précise la présence, la taille et la position des gonades et l’existence ou non d’un utérus (avec la taille et l’aspect pré- ou post-pubère).

L’absence d’utérus, souvent associée à un vagin borgne, oriente vers un syndrome de Rokitanski ou un trouble de l’hormonosynthèse ou de la réceptivité aux androgènes (syndrome d’insensibilité aux androgènes). Dans ce dernier cas, le caryotype révélera une formule 46XY.

Devant une aménorrhée primaire chez une adolescente ayant par ailleurs un développement pubertaire et chez qui l’échographie retrouve un utérus, il peut s’agir d’un hématocolpos, qui correspond à une accumulation des règles en intra-utérin en lien avec une imperforation de l’hymen. En dehors de ce diagnostic, la démarche diagnostique, après avoir vérifié l’absence de grossesse et d’une agénésie utérine, est similaire à celle d’une aménorrhée secondaire

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ménorrhée secondaire
Les aménorrhées secondaires sont le plus souvent le résultat d’une pathologie acquise après la puberté (fig. 3.1).

La mise en route d’un traitement œstroprogestatif, sans enquête étiologique préalable, chez une adolescente ou une femme consultant pour aménorrhée est une erreur, car elle amène à méconnaître des diagnostics parfois graves (+++).

1 Interrogatoire
L’interrogatoire recherche :

*des causes évidentes comme une grossesse +++
*certaines prises médicamenteuses (antidopaminergiques élevant la prolactine, par exemple des antinauséeux, des neuroleptiques; macroprogestatifs, entraînant une aménorrhée par atrophie de l’endomètre), une corticothérapie ou des traitements inhibant la commande hypo-thalamo-hypophysaire (chirurgie de la région hypothalamo-hypophysaire, radiothérapie), des traitements gonadotoxiques (radiothérapie, chimiothérapie +++, chirurgie ovarienne);
*une maladie endocrinienne ou chronique (par exemple maladie cœliaque) pouvant retentir sur l’axe gonadotrope, le fonctionnement ovarien ou l’état nutritionnel;
*l’histoire gynécologique et obstétricale, qui est utile pour dater l’ancienneté de l’aménorrhée;
*des bouffées de chaleur, inconstantes, qui font suspecter une insuffisance ovarienne;
*des douleurs pelviennes cycliques orientant vers une cause utérine, d’autant plus qu’il existe une notion de geste endo-utérin (curetage, IVG).
2 Examen clinique
Devant toute aménorrhée, la mesure du poids et de la taille avec l’établissement de l’indice de masse corporelle ou IMC (poids/taille2) est nécessaire pour dépister une carence nutritionnelle relative (+++). Elle est complétée par une enquête nutritionnelle, évaluant la quantité de lipides ingérés et le degré d’activité physique, surtout si l’IMC est inférieur à 21 kg/m2.

Les signes d’hyperandrogénie (séborrhée, acné, hirsutisme) peuvent accompagner une aménorrhée. Ils orientent vers certaines causes, en particulier le syndrome des ovaires polykystiques ou un déficit en 21-hydroxylase et, plus rarement, un syndrome de Cushing (voir plus loin).

Une galactorrhée doit être recherchée mais, en pratique, ce signe clinique est d’une sensibilité et d’une spécificité insuffisantes : même en son absence, un dosage de prolactine est réalisé.

Les signes de carence œstrogénique sont présents lorsque l’atteinte gonadotrope ou ovarienne est profonde. L’aménorrhée s’accompagne alors d’une sécheresse de la muqueuse vaginale, possiblement responsable d’une dyspareunie.

Le test aux progestatifs est classique, mais n’a pas beaucoup d’intérêt dans la démarche étiologique; il a pour but d’apprécier la sécrétion ovarienne d’œstradiol d’une femme en aménorrhée. Il consiste en l’administration d’un progestatif pendant 10 jours. Ce test, qui rend compte de l’imprégnation par les œstrogènes de l’endomètre, est dit positif si surviennent des règles dans les 5 jours suivant l’arrêt du progestatif. Il est au contraire négatif lorsque la carence œstrogénique est sévère, et cela indépendamment de sa cause. Le test aux progestatifs est négatif en cas de carence œstrogénique profonde et ancienne ou de grossesse.

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Dosages hormonaux de première intention (+++)
Les premiers examens complémentaires ont pour but :

*d’écarter une grossesse méconnue : hCG;
*puis de rechercher les causes les plus fréquentes (fig. 3.4), par dosages de prolactine, d’œstradiol (E2), de FSH, LH ± testostérone total–hyperprolactinémie :
–prolactinémie élevée;
–E2 bas;
–LH basse;
–FSH basse ou « normale »;
–syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) :
–E2 comme dans un début de phase folliculaire; par exemple, E2 entre 30 et 70 pg/ml (valeurs seulement indicatives);
–LH normale ou augmentée;
–FSH un peu basse ou normale;
–testostérone totale normale ou un peu augmentée;
–déficit gonadotrope :
–E2 bas;
–concentrations de LH et de FSH basses ou non élevées (c’est-à-dire « dans les normes » mais non cycliques, inadaptées);
–insuffisance ovarienne :
–E2 bas;
–concentrations élevées de LH et surtout de FSH (FSH » LH).
Ces pathologies reconnaissables par leur profil hormonal représentent la grande majorité des causes d’aménorrhée secondaire (v

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Étiologie des aménorrhées
A Aménorrhées avec carence œstrogénique secondaire à un déficit gonadotrope d’origine organique ou fonctionnelle

Œstradiol bas, gonadotrophines « normales » ou basses.)

Synonymes : hypogonadisme hypogonadotrophique, dénommé aussi hypogonadisme central.

1 Aménorrhée d’origine hypothalamique avec prolactine normale
La cause la plus fréquente d’aménorrhée hypothalamique est l’aménorrhée hypothalamique fonctionnelle secondaire à une restriction calorique associée ou non à une activité physique intense (+++) : incapacité de l’hypothalamus à libérer la GnRH avec une pulsatilité de fréquence et d’amplitude compatibles avec la physiologie de la reproduction. Bien que très souvent classées comme psychogènes, elles semblent très souvent en rapport avec un apport calorique insuffisant et/ou une activité physique excessive, et associées à des perturbations des paramètres reflétant l’état nutritionnel et des troubles du comportement alimentaire (voir Item 71).

Dans les cas extrêmes, des pertes de poids importantes (moins de 66 % du poids idéal ou IMC < 16 kg/m2) sont associées à un déficit gonadotrope profond. C’est le cas de l’anorexie mentale.

Le tableau le plus fréquent d’aménorrhée hypothalamlque fonctionnelle, plus difficile à diagnostiquer, est observé chez des femmes jeunes apparemment de poids normal consultant pour un arrêt des règles, mais dont les apports nutritionnels, en particulier en lipides, sont insuffisants par rapport à leur dépense énergétique. Ces patientes ont une diminution significative de leur masse grasse qui participe probablement à la genèse du déficit gonadotrope fonctionnel.

Une IRM de la région hypothalamo-hypophysaire est utile pour écarter une éventuelle tumeur ou infiltration. Le diagnostic d’aménorrhée hypothalamique fonctionnelle doit être établi après avoir éliminé une cause organique.

2 Atteintes organiques de l’hypothalamus
Ces atteintes dominent les préoccupations diagnostiques et une IRM doit être réalisée devant toute aménorrhée hypothalamique, même en l’absence de stigmates cliniques ou biologiques d’atteinte des autres fonctions antéhypophysaires ou post-hypophysaires.

La radiothérapie encéphalique ou de la base du crâne entraîne également une atteinte hypothalamique.

Les tumeurs en cause sont essentiellement les craniopharyngiomes (+++). Les processus infiltratifs les plus fréquents sont la sarcoïdose, les infundibulo-hypophysites et l’histiocytose.

3 Aménorrhée hypothalamo-hypophysaire secondaire à une hyperprolactinémie (+++)
Cette cause est également traitée dans le chapitre consacré aux adénomes hypophysaires (voir Item 244, chapitre 15).

Sur le plan diagnostique, il faut simplement insister sur le fait que ces atteintes sont responsables de près de 20 % des aménorrhées par déficit gonadotrope; il s’agit donc d’une cause majeure d’aménorrhée, qu’elle soit accompagnée ou non de galactorrhée.

En l’absence de prise de médicaments hyperprolactinémiants, les hyperprolactinémies résultent le plus souvent de l’existence de tumeurs, comme des adénomes à prolactine surtout (fig. 3.5) et des tumeurs de la région hypothalamo-hypophysaire, comme des macroadénomes hypophysaires, des craniopharyngiomes ou des méningiomes qui peuvent induire une hyperprolactinémie de déconnexion.Sur le plan symptomatique, l’hyperprolactinémie peut débuter par des irrégularités menstruelles, puis se compléter par une aménorrhée qui traduit alors simplement une atteinte gonadotrope plus profonde.

4 Aménorrhées par déficits gonadotropes d’origine hypophysaire
Ces déficits d’origine hypophysaire sont plus rares que les atteintes hypothalamiques.

On retrouve les tumeurs hypophysaires à l’origine d’un déficit gonadotrope, et deux situations particulières de la grossesse :

*le très rare syndrome de Sheehan résulte classiquement d’une nécrose hypophysaire du post-partum à la suite d’un accouchement hémorragique avec collapsus vasculaire. Le tableau clinique associe une aménorrhée du post-partum et une absence de montée laiteuse. Les déficits gonadotrope et lactotrope en sont la cause chez ces patientes qui présentent, en majorité, une insuffisance antéhypophysaire globale;
*une grande majorité des aménorrhées par déficit gonadotrope du post-partum est due à une atteinte auto-immune de l’hypophyse. Ces hypophysites lymphocytaires (++) peuvent, comme la nécrose hypophysaire, se révéler par une absence de montée laiteuse et une aménorrhée du post-partum, mais il manque la notion étiologique d’accouchement hémorragique. L’IRM hypophysaire permet de suspecter le diagnostic en montrant une grosse hypophyse en hypersignal spontané, parfois d’allure pseudotumorale (fig. 3.6), ou, inversement, une selle turcique vide. De même, l’existence d’une insuffisance antéhypophysaire dissociée est en faveur de ce diagnostic.

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Insuffisances ovariennes primitives
Les insuffisances ovariennes primitives regroupent différentes affections ovariennes ayant comme dénominateur commun une atteinte de la folliculogenèse. La signature biologique constante est l’élévation de la FSH, ce qui correspond donc à un hypogonadisme hypergonadotrope. Si l’épuisement du capital folliculaire se complète avant l’âge de la puberté, la présentation clinique est celle d’une absence complète de développement mammaire avec une aménorrhée primaire. Lorsque la disparition des follicules ovariens a lieu pendant ou après la puberté, on observe un développement variable des seins avec une aménorrhée primaire, primo-secondaire ou secondaire, avec ou sans bouffées de chaleur, dyspareunie (voir Item 58).

In fine, l’insuffisance ovarienne prématurée est définie par la survenue avant 40 ans d’un trouble du cycle (spanio- ou aménorrhée) associée à une FSH supérieure à 25 UI/l sur deux dosages distincts réalisés à au moins 4 semaines d’intervalle, et à des signes plus ou moins marqués d’hypo-œstrogénie : bouffées de chaleur, sécheresse vaginale, trouble de l’humeur, insomnie, asthénie.

Les étiologies connues les plus fréquentes sont, après élimination, des causes iatrogènes (chirurgie, radiothérapie ou chimiothérapie) : les anomalies du caryotype, notamment le syndrome de Turner, les translocations ou délétions de régions critiques du chromosome X, ainsi que la prémutation du gène FMR1 (fragile X mental retardation), responsable du syndrome de l’X fragile (encadré 3.2), et les polyendocrinopathies auto-immunes. Ainsi, après avoir éliminé une cause iatrogène par l’interrogatoire, un caryotype, une recherche de prémutation de FMR1 et d’auto-immunité doit être systématiquement effectuée chez les patientes présentant une insuffisance ovarienne primitive.

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Spécificités des maladies génétiques, à propos […] d’une maladie d’instabilité : le syndrome de l’X fragile

insuffisance ovarienne prématurée (IOP), prémutation du gène FMR1 et risque de déficience intellectuelle lié au syndrome de l’X fragile

Une cause fréquente et mal connue d’insuffisance ovarienne primitive (IOP) est la prémutation X fragile. Le diagnostic de cette cause d’IOP est essentiel étant donné les risques potentiels pour la descendance, en particulier de sexe masculin.

Rappels

Le syndrome de l’X fragile est la cause la plus fréquente de déficience intellectuelle héréditaire. Sa prévalence est estimée à un cas pour 3 500 chez les hommes et un cas pour 8 000 chez les femmes. Il se transmet selon une hérédité liée au chromosome X, impliquant qu’il n’y a pas de transmission père-fils, mais des mères (conductrices, présymptomatiques ou avec IOP) vers les fils. Cette pathologie a un mode de transmission particulier. L’X fragile est lié à une anomalie du gène FMR1 (fragile X mental retardation 1) situé sur le bras long du chromosome X en Xq27.3 au niveau du locus FRAXA. Le gène FMR1 code la protéine FMRP qui est assez ubiquitaire, mais dont le rôle est encore mal défini. Le premier exon du gène FMR1 contient une répétition de triplets CGG. Un sujet normal a de 3 à 50 triplets CGG (l’allèle le plus fréquent contient 30 répétitions); dans ce cas, leur transmission est stable d’une génération à l’autre. Les anomalies génétiques responsables de la pathologie correspondent le plus souvent à une expansion instable de ces triplets CGG (maladie dite d’instabilité). En fonction du nombre de répétitions et de leur état de méthylation, on parle de prémutation (51 à 199 triplets CGG) ou de mutation complète (200 à plus de 1 000 triplets CGG); la mutation complète s’associe à une hyperméthylation des triplets CGG et a pour conséquence l’absence de transcription du gène FMR1.

Une particularité de l’X fragile réside en son mode de transmission avec augmentation de taille de la répétition du triplet CGG à la génération suivante si la transmission est maternelle et absence de modification de taille des triplets si la transmission est paternelle. Le risque de passage de la prémutation à la mutation complète lors de la transmission est corrélé à la taille de la prémutation maternelle.

Relation entre insuffisance ovarienne prématurée (IOP) et X fragile

Il existe une relation entre la survenue d’une IOP et la présence de la prémutation X fragile. La prévalence de la prémutation est de 1 % à 8 % chez les femmes présentant une IOP sporadique et de 13 % chez celles ayant une forme familiale (+++).

La recherche de prémutation de FMR1 chez toute femme avec IOP de moins de 40 ans doit donc être systématique.

Conseil génétique chez la patiente et sa famille

Chez la patiente avec IOP pour laquelle une prémutation de FMR1 a été mise en évidence, il faut expliquer les conséquences pour elle (risque d’avoir un garçon avec retard mental si elle a une fonction ovarienne résiduelle) et pour sa famille. Il faut donc proposer un dépistage familial dont le but est de dépister les sujets porteurs asymptomatiques de prémutation et de mutation, de calculer chez eux le risque de transmission de la prémutation ou de la mutation. Il faut aussi prévenir les femmes asymptomatiques avec prémutation ainsi détectées du risque d’IOP et de retard mental chez les enfants en cas de grossesse spontanée.

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Aménorrhées secondaires associées à une hyperandrogénie
Dans l’immense majorité des cas, il s’agit d’un syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) (+++).

1 Anovulations chroniques avec signes d’hyperandrogénie : syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) (+++)
Par sa fréquence (5 % à 15 % des femmes en âge de procréer), cette maladie constitue une cause majeure d’anovulation (voir Item 38, chapitre 2).

Sur le plan clinique, l’histoire est caractéristique si elle associe, depuis la puberté, des irrégularités menstruelles suivies d’aménorrhée avec acné et hirsutisme; le surpoids est présent dans près de 50 % des cas. L’insulinorésistance est présente dans environ 50 % des cas. Rarement, il existe un acanthosis nigricans, qui témoigne d’une résistance à l’insuline importante – ce signe clinique est péjoratif sur le plan du pronostic métabolique (risque de diabète gestationnel et de diabète de type 2 : voir Item 247, chapitre 18 et Item 255, chapitre 20).

D’après les critères de Rotterdam, le diagnostic du SOPK repose sur les éléments suivants (+++) :

*deux des éléments sur les trois ci-dessous, suffisants pour établir le diagnostic (+++) :
–hyperandrogénie clinique : hirsutisme, acné et/ou hyperandrogénie biologique (testostérone circulante élevée);
–oligo-/anovulation chronique;
–aspect échographique d’ovaires polykystiques : présence de plus de 20 follicules par ovaire et/ou volume supérieur à 10 ml.
*après exclusion (+++) d’autres causes plus rares d’hyperandrogénie (bloc en 21-hydroxylase modéré dit « non classique » ou « à révélation tardive », tumeur de l’ovaire sécrétant des androgènes, syndrome de Cushing) et d’anovulations secondaires (notamment à une hyperprolactinémie).
Ces critères ont été récemment modifiés par l’European Society of Human Reproduction and Embryology (ESHRE) qui a précisé que l’hirsutisme et l’anovulation chronique étaient des critères majeurs pour retenir le diagnostic de SOPK.

2 Aménorrhées d’origine tumorale ovarienne
Toute hyperandrogénie sévère peut être responsable d’une aménorrhée.

Lorsque l’origine est tumorale, il existe souvent, en plus de l’hirsutisme, des signes de virilisation importants, d’apparition récente : hypertrophie clitoridienne et des masses musculaires, alopécie androgénétique et changement du timbre de la voix qui devient plus grave.

Si la concentration plasmatique de testostérone dépasse 2 à 3 fois la concentration normale, il faut réaliser impérativement une imagerie ovarienne pour détecter une tumeur sécrétant des androgènes.

3 Aménorrhées par pathologie de la surrénale
Le syndrome de Cushing, quelle que soit sa cause, est une étiologie classique d’aménorrhée, qui peut être associée à une hyperandrogénie. Ce diagnostic doit être évoqué devant des signes d’hypercortisolisme (prise de poids, classique obésité faciotronculaire, vergetures pourpres, amyotrophie, etc.) (voir Item 244, chapitre 15).

Les hyperandrogénies surrénaliennes d’origine tumorale responsables d’aménorrhée s’accompagnent très souvent d’une virilisation d’évolution rapide. Une fois évoqué, le diagnostic de tumeur de la surrénale est facilement confirmé par un scanner des surrénales, car ces tumeurs sont dans la majorité des cas volumineuses.

Finalement, un déficit enzymatique de la surrénale en 21-hydroxylase modéré peut se dévoiler par une aménorrhée ou une oligo-/spanioménorrhée accompagnée, comme le SOPK, de signes d’hyperandrogénie.

Les formes à révélation tardive de déficits en 21-hydroxylase sont le principal diagnostic différentiel du SOPK.

Ce diagnostic est envisagé d’autant plus que le taux basai prélevé le matin (à distance d’un traitement par les corticoïdes) de 17-hydroxyprogestérone dans le sérum est supérieur à 10 ng/ml. Le diagnostic est confirmé sur le plan génétique par le séquençage du gène codant la 21-hydroxylase (CYP21A2), ce qui est essentiel pour le conseil génétique de cette maladie.

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ménorrhées par anomalie utérine
Les anomalies congénitales du tractus génital pouvant être responsables d’une aménorrhée primaire ne sont pas exceptionnelles (fig. 3.7); pour rappel : syndrome de Rokitanski, trouble de l’hormonosynthèse ou de la réceptivité aux androgènes (syndrome d’insensibilité aux androgènes), hématocolpos.Les aménorrhées secondaires d’origine utérine sont la conséquence de synéchies utérines secondaires à des gestes traumatiques sur l’utérus (curetages répétés, IVG, chirurgie pour myomes ou césarienne). Plus rarement en France, il peut s’agir d’une tuberculose utérine.

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Points clés

*A L’aménorrhée : un symptôme que tout médecin doit connaître.
*Chez toute femme normale, après la puberté, avant la ménopause et en dehors de la grossesse, les règles doivent être régulières, c’est-à-dire qu’elles doivent survenir tous les 28 jours en moyenne (la normale est entre 25 et 35 jours). Cette régularité indique que l’utérus, les ovaires, l’hypophyse et l’hypothalamus de la femme fonctionnent normalement et sont donc indemnes d’une maladie.
*On appelle aménorrhée une interruption des règles (aménorrhée secondaire) chez une femme préalablement réglée, ou la non-survenue de règles chez une adolescente (aménorrhée primaire).
*En dehors de la grossesse, de la lactation et de la ménopause, l’aménorrhée est toujours pathologique. Elle doit faire consulter un spécialiste du domaine après en avoir discuté avec le médecin traitant.
*Aucune pilule « pour régulariser les règles » ne doit être prescrite avant d’avoir trouvé la cause de l’aménorrhée. En effet, la pilule œstroprogestative ne fait que provoquer des règles artificielles qui vont rassurer à tort les adolescentes et les femmes. De ce fait, la maladie sous-jacente qui a provoqué l’interruption des règles va continuer à évoluer sans traitement.
*Les aménorrhées ou oligo-/spanioménorrhées sont donc le témoin de l’existence d’une maladie de l’utérus, des ovaires, des surrénales ou de la région hypothalamo-hypophysaire.
*Dans la recherche d’une cause d’aménorrhée, certains dosages hormonaux sont essentiels comme les mesures de l’œstradiol et des hormones hypophysaires LH, FSH et la prolactine. On écarte aussi systématiquement une grossesse (+++ : dosage d’hCG dans le sang ou test urinaire de grossesse).
* Les anomalies les plus fréquentes à l’origine d’une aménorrhée ou d’une oligoménorrhée d’origine hypothalamo-hypophysaire sont des tumeurs bénignes ou d’autres lésions de l’hypophyse.
*C’est la raison pour laquelle on est amené, lorsque la LH et FSH sont abaissées, à faire une image de l’hypophyse par IRM. Les adénomes hypophysaires sécrètent souvent de la prolactine qui, lorsqu’elle est à des taux excessifs dans le sang, peut entraîner un écoulement mammaire (galactorrhée), non expliqué par l’allaitement, et s’associe à l’interruption des règles.
*Une autre cause fréquente d’aménorrhée hypothalamique, surtout chez l’adolescente, est une masse grasse insuffi sante, qui s’évalue par l’indice de masse corporelle (IMC) : poids (en kg)/taille2 (en m2); chez ces femmes, l’IMC est inférieur à 21 kg/m2. Cette situation est le plus souvent liée à une restriction alimentaire inappropriée (surtout en matières grasses), fréquemment associée à une activité physique excessive.
*Au niveau ovarien, la plus fréquente des maladies responsables d’oligoou d’aménorrhée est le syndrome des ovaires micropolykystiques. C’est une maladie très fréquente qui touche 5 % à 15 % des femmes. Cette aff ection chronique commence souvent à l’âge de la puberté par l’association très typique que sont l’espacement ou l’interruption des règles avec assez souvent des signes évoquant une secretion excessive d’androgènes par l’ovaire (testostérone) : acné, séborrhée (peau et cheveux gras), hirsutisme.
*Un autre diagnostic de maladie de l’ovaire à poser devant une aménorrhée est l’insuffi sance ovarienne prématurée, dont le diagnostic hormonal est en général très facile (élévation de l’hormone FSH plasmatique).
*Enfi n, citons les causes utérines plus rares qui peuvent être la conséquence de lésions de l’utérus infectieuses et surtout traumatiques (IVG ou manoeuvres chirurgicales après un accouchement diffi cile).

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Définition
La cryptorchidie désigne la localisation anormale du testicule, qui est censé migrer dans les bourses en fin de grossesse. Les chirurgiens parlent maintenant de testicules non descendus. Le testicule peut être non palpable, sus-scrotal, à la racine de la bourse ou parfois dans une position anormale prépubienne, prisonnier d’adhérences qui l’empêchent de descendre. L’association avec une hernie n’est pas rare. On appelle testicule « ascenseur » ou « oscillant » un testicule très mobile, palpé de façon intermittente entre la bourse et la région inguinale.

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Clinique
L’examen clinique recherche des éléments associés à la cryptorchidie :

*micropénis (verge < 2 cm chez un nouveau-né à terme);
*hypospadias;
*autres anomalies : de la ligne médiane, cardiaques, rénales. Des antécédents familiaux seront recherchés.
IV Explorations
Une exploration hormonale/endocrinienne est essentielle, que la cryptorchidie soit uni- ou bilatérale, pour rechercher une étiologie et évaluer le retentissement testiculaire.

En cas de cryptorchidie bilatérale, l’urgence est d’éliminer une variation du développement génital (VDG) à caryotype 46,XX, dont la plus fréquente est représentée par le bloc enzymatique en 21-hydroxylase.

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Traitement chirurgical
L’abaissement chirurgical avec orchidopexie est à réaliser vers l’âge de 2 ans, en sachant que, dans deux tiers des cas, la descente testiculaire se fait spontanément dans la première année de vie.

Au-delà de 2 ans, l’abaissement chirurgical est indispensable, car la position intra-abdominale du testicule perturbe la spermatogenèse avec risque d’hypofertilité ou d’infertilité à l’âge adulte, et augmente le risque de cancer.

VII Suivi pédiatrique
Même si le bilan étiologique initial est négatif, il est impératif de surveiller attentivement l’âge de l’apparition de la puberté chez tous les enfants cryptorchides opérés, et de réévaluer la fonction testiculaire et gonadotrope à ce moment, en ayant à l’esprit la possibilité de révélation tardive d’un hypogonadisme hypogonadotrope partiel ou d’une insuffisance testiculaire (voir Item 38, chapitre 2).

La surveillance a aussi l’intérêt de dépister précocement un cancer germinal testiculaire, dont la cryptorchidie est le principal facteur de risque (risque multiplié par 30

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Cryptorchidie à l’âge adulte

IRisques
IICirconstances de découverte et examen clinique
IIIExamens complémentaires
I Risques
Les conséquences potentielles d’une cryptorchidie de l’adulte sont : l’hypogonadisme, l’infertilité et le cancer du testicule.

II Circonstances de découverte et examen clinique
La cryptorchidie peut être découverte par l’examen systématique scrotal ou des orifices inguinaux, lors de l’exploration pour une infertilité ou devant des signes d’hypogonadisme. L’examen scrotal note le caractère uni- ou bilatéral de la cryptorchidie, le volume testiculaire à l’aide de l’orchidomètre, l’absence de masse tumorale suspecte dans la bourse.

Des signes endocriniens doivent être recherchés : gynécomastie (voir Item 246, chapitre 17), signes d’hypogonadisme (voir Item 124, chapitre 5 et Item 126, chapitre 6).

III Examens complémentaires
Devant une cryptorchidie, l’exploration hormonale recherche un hypogonadisme : FSH, LH, testostérone totale.

Le dosage d’hCG est indiqué devant une tumeur testiculaire révélée par la palpation ou bien l’échographie.

L’échographie scrotale permet la localisation du ou des testicules ectopique(s), précise le volume des testicules et recherche des calcifications (fig. 4.1) ou une tumeur. Le spermogramme recherche une azoospermie ou une oligospermie.Points clés

  • Toute cryptorchidie nécessite une exploration endocrinienne précoce, à la recherche notamment d’une hyperplasie congénitale des surrénales (bloc en 21-hydroxylase) quand la cryptorchidie est bilatérale.
  • La chirurgie est indiquée avant 12 à 18 mois.
    *Les patients opérés de cryptorchidie doivent être suivis et revus à la puberté afin d’évaluer le retentissement sur les fonctions gonadiques.
    *Toute cryptorchidie peut être associée à une infertilité, un hypogonadisme, un risque secondaire de cancer testiculaire à l’âge adulte.
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Définition et diagnostic
A Définition

La ménopause est un phénomène naturel défini par la disparition des règles (aménorrhée) depuis au moins un an. Elle est associée dans 50 % à 70 % des cas à un syndrome climatérique (bouffées vasomotrices, sécheresse vaginale, douleurs articulaires, etc.). La majorité des symptômes sont liés à une carence œstrogénique qui est secondaire à l’épuisement du capital folliculaire ovarien.

La ménopause survient en moyenne vers l’âge de 51 ans, et en moyenne un an plus tôt chez les femmes fumeuses. Elle est précédée d’une phase dite de préménopause (encadré 5.1) qui est caractérisée par une irrégularité des cycles, d’abord raccourcis puis allongés, une dysovula-tion puis une anovulation, qui s’installe environ 5 ans avant l’interruption définitive des règles, et parfois déjà quelques bouffées de chaleur.

Biologiquement, la ménopause se caractérise par une diminution de l’œstradiol plasmatique, associée à une élévation des gonadotrophines, en particulier de la FSH (follicle stimulating hormone), par perte du rétrocontrôle négatif de l’œstradiol sur l’axe hypothalamo-hypophysaire.

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La préménopause

Il s’agit d’un état transitoire chez la femme de 40 à 50 ans, où la fonction exocrine de l’ovaire diminue progressivement, avec raréfaction des ovulations précédant leur disparition totale, tandis que persiste de façon incomplète et dissociée sa fonction endocrine. La préménopause peut elle-même être divisée en trois phases.

Encadré 5.1 Suite.
Première phase dite de « phase folliculaire courte »

Cette phase s’installe vers l’âge de 41 à 43 ans. Le premier signe clinique de l’installation de la préménopause est un raccourcissement de la durée des cycles par raccourcissement de la phase folliculaire. Les taux plasmatiques de FSH commencent à s’élever, alors que les taux plasmatiques d’œstradiol (E2) et de LH, le pic ovulatoire de gonadotrophines et la sécrétion de progestérone sont encore normaux. Cette période correspond à une nette réduction de la fertilité.

Deuxième phase dite de « corps jaune inadéquat »

Cette phase est caractérisée par l’appauvrissement progressif du capital folliculaire en nombre et en qualité, et par l’inefficacité croissante de la FSH. Les cycles sont longs, les ovulations tardives, la phase lutéale raccourcie et le taux de progestérone diminué. Il existe souvent une hyperœstrogénie relative. Le déséquilibre, aux dépens de la progestérone, favorise œdème (syndrome prémenstruel) et hyperplasie. L’irrégularité des cycles peut être corrigée par l’administration séquentielle d’un progestatif à titre substitutif, du 16e au 25e jour du cycle.

Troisième phase

Cette phase se traduit par une anovulation. Elle est le témoin de l’épuisement folliculaire. Les concentrations plasmatiques de FSH approchent des valeurs observées après la ménopause. Les fluctuations imprévisibles du taux d’œstradiol aboutissent à des hémorragies de privation irrégulières et espacées. L’administration d’un progestatif 10 jours par mois permet de régulariser les « règles ».

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Diagnostic
Le diagnostic est clinique : aménorrhée (avec bouffées de chaleur) de plus d’un an chez une femme de plus de 50 ans. Aucune exploration biologique ne doit être réalisée pour affirmer le diagnostic, sauf en cas d’hystérectomie, où la femme est obligatoirement aménorrhéique – il faut alors doser simultanément l’œstradiolémie (< 20 pg/ml) et la FSH (élevée, > 40 Ul/l).

Pour faire le diagnostic sans attendre systématiquement un an d’aménorrhée, on peut proposer un traitement par progestatif, administré seul, sans œstrogène, 10 jours par mois pendant 3 mois consécutifs ; l’absence de saignement à l’arrêt du progestatif signe dans ce contexte l’hypo-œstrogénie et donc la ménopause.

Avant l’âge de 45 ans de façon systématique et entre 45 et 50 ans en l’absence de présentation clinique typique, le dosage de FSH chez une femme en aménorrhée est systématique pour ne pas méconnaître une autre étiologie de l’aménorrhée.

La survenue de l’aménorrhée avec un taux de FSH élevé avant l’âge de 40 ans est pathologique et rentre dans le cadre d’une insuffisance ovarienne prématurée (IOP), nécessitant des explorations spécialisées (voir Item 42, chapitre 3).

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onséquences de la ménopause
Les conséquences de la ménopause sont résumées dans le tableau 5.1.

Tableau 5.1

Conséquences de l’hypo-œstrogénie de la ménopause.

À court terme À long terme
–Bouffées de chaleur
–Asthénie, dépression
–Sécheresse cutanéomuqueuse
–Troubles fonctionnels urinaires
–Douleurs ostéoarticulaires
–Augmentation du risque cardiovasculaire
–Déminéralisation osseuse, risque de fractures
(Source : CEEDMM, 2021.)

A À court terme
La carence œstrogénique explique le syndrome climatérique, qui associe :

*des manifestations vasomotrices, souvent au premier plan, telles que bouffées de chaleur, crises sudorales, en particulier nocturnes, parfois très gênantes, entraînant ou majorant des troubles du sommeil;
*des troubles du sommeil et de l’humeur, qui sont inconstants, à type d’irritabilité, d’anxiété, d’insomnie et parfois à l’origine d’une authentique dépression;
*une atrophie de la muqueuse vulvovaginale et une diminution des sécrétions vaginales qui peuvent entraîner une dyspareunie (rapports sexuels douloureux);
*des altérations de l’état cutané, avec en particulier un amincissement et une perte de l’élasticité de la peau par raréfaction des fibres élastiques et du collagène;
*une tachycardie.
La durée de ces symptômes (en particulier des bouffées de chaleur) après le début de la ménopause est très variable d’une femme à l’autre mais, le plus souvent, les bouffées de chaleur s’atténuent spontanément après quelques années d’évolution. Parmi les femmes ménopausées, 20 % des femmes ne souffrent jamais de bouffées de chaleur et 20 % les trouvent supportables.

B À moyen terme
La ménopause s’accompagne de douleurs ostéoarticulaires fréquentes (environ 40 %), en particulier au niveau des poignets, qui sont liées à la diminution des œstrogènes.

Au niveau du squelette, le déficit œstrogénique aboutit à une accélération rapide de la perte osseuse, qui peut atteindre 4 % par an après la ménopause.

Le degré d’ostéopénie, voire d’ostéoporose, constaté après la ménopause dépend de facteurs de risque associés :

*antécédent d’IOP spontanée ou iatrogène;
*antécédents de fractures non traumatiques à l’âge adulte chez la femme ou chez un parent au premier degré;
*masse adipeuse faible, antécédent d’anorexie;
*prise de certains médicaments (glucocorticoïdes de synthèse);
*consommation de tabac et d’alcool;
*déficit en calcium et en vitamine D;
*certaines affections potentiellement inductrices d’ostéoporose (hypogonadisme quelle qu’en soit l’étiologie, hyperthyroïdie, hyperparathyroïdie).
La perte osseuse au cours de la ménopause se surajoute à la perte physiologique de la masse osseuse liée au vieillissement. L’ostéoporose post-ménopausique, liée à la carence œstrogénique, touche surtout l’os trabéculaire, spongieux (vertèbres et poignets), alors que I ‘ostéoporose sénile atteint surtout l’os cortical (os longs). Lostéodensitométrie est l’examen de référence pour évaluer le risque fracturaire (pour ses indications et ses modalités de remboursement, voir Item 128, chapitre 7).

C À long terme
1 Risque cardiovasculaire et ménopause

L’incidence des accidents cardiovasculaires, infarctus ou accident vasculaire cérébral, augmente chez les femmes après la ménopause. Ce risque chez la femme ménopausée rejoint celui observé chez l’homme. Cette protection cardiovasculaire en préménopause chez la femme semble liée aux œstrogènes plutôt qu’à un effet de l’âge, puisque l’ovariectomie chez une femme jeune est associée à une augmentation du risque cardiovasculaire.

2 Ménopause et système nerveux central
Certains troubles liés au climatère, tels que la baisse de la libido, les troubles de l’humeur, l’irritabilité, le syndrome dépressif, semblent en rapport avec une hypo-œstrogénie au niveau du système nerveux central. Cependant, il n’existe pas actuellement de preuves formelles liant carence œstrogénique et troubles cognitifs ou prévalence de maladie d’Alzheimer.

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Traitement hormonal de la ménopause, bénéfices et risques
Le traitement hormonal de la ménopause (THM) consiste à administrer des œstrogènes chez une femme ménopausée dans le but de contrebalancer les effets de la carence œstrogénique. Il doit être distingué du traitement hormonal substitutif (THS) donné chez une femme jeune pour compenser un déficit œstrogénique (hypogonadismes, qu’ils soient hypergonado-trophiques ou hypogonadotrophiques) et ramener aux taux physiologiques par rapport à une femme de même âge, son taux d’œstradiol.

Un traitement progestatif est associé à l’œstrogénothérapie pour contrecarrer l’effet prolifé-ratif des œstrogènes au niveau endométrial et éviter la survenue d’un cancer de l’endomètre.

L’association de progestérone ou d’un progestatif avec les œstrogènes est impérative chez les femmes non hystérectomisées.

A Bénéfices du traitement hormonal de la ménopause
Les bénéfices du THM sont résumés dans le tableau 5.2.

Tableau 5.2

Bénéfice du traitement de la ménopause.

Dans l’immédiat À moyen terme À long terme
–Suppression des bouffées de chaleur
–Sensation de confort physique et psychique
–Amélioration de la vie sexuelle
Protection contre l’atrophie cutanéomuqueuse
–Protection contre l’ostéoporose
–Effet cardiovasculaire et neurologique ?
(Source : CEEDMM, 2021.)

1 Bénéfices à court terme
Les effets du THM sur les bouffées de chaleur, l’atrophie de la muqueuse vaginale et la sexualité sont bien démontrés. À plus long terme, l’effet bénéfique des œstrogènes sur le tractus urogénital pourrait jouer un rôle dans la prévention de l’apparition de prolapsus et/ou d’incontinence chez la femme ménopausée.

Les effets du THM sur la qualité de vie ont été pendant longtemps un argument majeur de prescription. Les effets du traitement sur la qualité de vie sont en fait surtout nets chez les femmes qui sont très gênées par leurs bouffées de chaleur, c’est-à-dire surtout dans les 5 à 10 ans suivant la ménopause.

2 Bénéfices à long terme
Prévention de l’ostéoporose
Les œstrogènes entraînent :

*une diminution de la résorption osseuse : de nombreuses études ont montré une moindre diminution de la perte osseuse chez les femmes ménopausées traitées par les œstrogènes (augmentation de 2 % à 5 % de la densité minérale osseuse dans les premières années de traitement);
*une diminution de l’incidence des fractures ostéoporotiques (diminution de 40 % des fractures du rachis, du poignet et du col fémoral après 5 ans de traitement).
Cependant, cet effet protecteur au niveau de l’os ne dure que pendant l’utilisation du THM; dans les années qui suivent son interruption, une dégradation rapide de la masse osseuse se produit.

Prévention du cancer du côlon
Certaines études, y compris les études prospectives, ont montré une réduction de 20 % à 30 % de l’incidence du cancer du côlon chez les femmes sous THM par rapport aux femmes sous placebo.

Prévention cardiovasculaire
Un objectif longtemps revendiqué du THM était la prévention des événements cardiovasculaires, mais il n’est pas formellement démontré à ce jour.

Prévention des troubles cognitifs
L’effet bénéfique du THM n’est pas démontré sur la fonction cognitive chez les femmes de plus de 65 ans.

Prévention du diabète de type 2
Il a été montré récemment que le THM était capable de réduire de 30 % le risque de développer un diabète de type 2 parmi les patientes ménopausées. Il réduirait l’insulinorésistance induite par les modifications corporelles en lien avec l’hypo-œstrogénie.

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Risques du traitement hormonal de la ménopause
1 Cancer du sein

Son risque de survenue est corrélé à la durée du traitement et à la dose :

*il augmente après 5 ans de traitement;
*il est d’autant plus important que les femmes sont âgées;
*il est en moyenne augmenté de 20 % à 30 % par le THM après 10 ans d’utilisation.
En chiffres absolus, à l’échelon individuel, le risque de cancer du sein reste minime. Sur 10 000 femmes sans traitement de ménopause, 450 présenteront un cancer du sein entre 50 et 70 ans, alors que sous THM pendant 5 ans, le nombre de cas supplémentaires pour 10 000 femmes est de 8. Ce risque n’est présent que chez les utilisatrices en cours de traitement. ll disparaît après l’arrêt du THM, en 2 ans. Le risque de cancer du sein est légèrement supérieur chez les femmes prenant une association d’œstrogènes et de progestatifs que chez celles prenant des œstrogènes seuls.

2 Accidents veineux thrombo-emboliques (AVTE)
Le risque d’AVTE (phlébite et/ou embolie pulmonaire) est multiplié par deux sous THM. En chiffres absolus, le risque reste néanmoins minime; ainsi, sur 5 ans et pour 1 000 femmes non traitées par THM, 3 feront un AVTE entre 50 et 59 ans et 11 en feront un entre 60 et 69 ans; si elles sont traitées par THM, ces chiffres passent à 7 chez les femmes de 50 à 59 ans (4 AVTE en plus) et à 20 (9 AVTE en plus) chez les femmes de 60 à 69 ans.

Lorsque les œstrogènes sont administrés par voie transcutanée, ils ne semblent pas être associés à un risque supérieur d’AVTE.

3 Accidents vasculaires cérébraux (AVC)
Le risque d’AVC pourrait être augmenté de 30 % dans certaines études. Il s’agit d’une augmentation du risque des AVC ischémiques, mais non des accidents hémorragiques, possiblement en rapport avec l’effet prothrombotique des œstrogènes oraux.

4 Lithiases biliaires
Le risque des lithiases biliaires serait augmenté de 50 % environ par le THM.

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Moyens thérapeutiques
A Œstrogènes

En France, l’œstrogène utilisé est surtout l’œstrogène naturel, appelé 17β-œstradiol. Il peut être administré par voie orale, par voie percutanée (gel) ou par voie transdermique (patch).

Les œstrogènes administrés par voie percutanée ou transdermique ont l’avantage d’éviter le premier passage hépatique. Cette voie limite l’augmentation des facteurs de la coagulation, ce qui explique peut-être l’absence de surrisque d’accidents veineux thrombo-emboliques, alors que la voie orale est associée à un excès de risque. Les gels sont appliqués sur les cuisses et/ou le ventre mais jamais les seins. La dose quotidienne de 17p-œstradiol permettant une prévention de l’ostéoporose est de 1 à 2 mg per os ou de 50 à 100 ug par voie transdermique.

Le 17β-œstradiol est habituellement administré au minimum 25 jours par mois, généralement associé à de la progestérone ou à un progestatif, au moins les 12 derniers jours, parfois en continu (tableau 5.3). Le traitement continu permet de ne pas induire de saignements de privation. En l’absence d’utérus (hystérectomie), le traitement œstrogénique peut être administré seul. Au contraire, en présence d’un utérus, l’association avec de la progestérone ou un progestatif est obligatoire afin d’éviter le risque d’hyperplasie de l’endomètre et donc de cancer de l’endomètre.

Tableau 5.3

Schémas de traitement.

Traitement séquentiel Traitement combiné discontinu Traitement combiné continu*
–Œstradiol de J1 à J25 du mois
–Progestérone ou progestatif de J14 à J25 du mois
Œstradiol et progestérone
ou progestatif de J1 à J25 du mois
Œstradiol et progestérone avec un progestatif tous les jours sans interruption
« Traitement sans saignements de privation ».

(Source : CEEDMM, 2021.)

L’adaptation de la dose d’œstrogène se fait sur la clinique et non sur des dosages hormonaux. Les signes de sous-dosages ou de surdosages sont mentionnés dans le tableau 5.4. Les signes de sous-dosage en œstrogène sont essentiellement la persistance des bouffées de chaleur; les signes de surdosage sont la tension mammaire.

Tableau 5.4

Comment apprécier le dosage d’œstrogènes ?

Signχes de surdosage en œstrogènes Signes de sous-dosage en œstrogènes
–Tension douloureuse des seins
–Prise de poids
–Gonflement abdominal
–Nervosité, irritabilité
–Persistance ou réapparition des bouffées de chaleur
–Fatigue
–Céphalées
–Manque de tonus, état dépressif
–Douleurs articulaires
–Troubles urinaires
–Sécheresse vaginale
(Source : CEEDMM, 2021.)

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B Progestérone ou progestatifs
Leur prescription est obligatoire chez toute femme n’ayant pas été hystérectomisée et recevant une thérapeutique par les œstrogènes, au moins 12 jours par mois. Les produits utilisés sont habituellement la progestérone naturelle ou la rétroprogestérone. Les progestatifs dérivés de la 19-nortestostérone doivent être évités compte tenu de leur effet androgénique délétère sur les paramètres métaboliques.

Ils peuvent être administrés per os, ou plus rarement par voie vaginale.

Une hémorragie de privation survient lors de la période d’interruption du THM chez environ 20 % des femmes traitées. Ce saignement est fonctionnel et ne justifie donc pas d’exploration. Si les saignements surviennent pendant la période des 25 jours de traitement, ils doivent être considérés comme possiblement organiques et déclencher des explorations (échographie pelvienne, hystéroscopie) à la recherche d’une cause comme un polype ou un cancer endométrial.

Si la patiente ne souhaite pas de saignements, il est possible de lui proposer un traitement continu. Cependant, des saignements intercurrents peuvent survenir dans 40 % à 70 % des cas, posant alors le problème de leur organicité possible

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Contre-indications et indications du traitement hormonal de la ménopause
A Contre-indications

1 Cancer du sein et de l’endomètre

Le cancer du sein est un cancer hormonodépendant dont la prolifération est favorisée par les œstrogènes. Il contre-indique formellement l’utilisation d’une œstrogénothérapie.

Un cancer du sein doit être systématiquement éliminé avant toute prescription d’œstrogènes par l’examen clinique et la réalisation d’une mammographie.

Le dépistage du cancer du sein est, par ailleurs, un élément essentiel de la surveillance du traitement hormonal de la ménopause. Les antécédents familiaux de cancer du sein, en particulier parmi les apparentées au premier degré (mère, sœur), peuvent constituer une contre-indication relative.

Il existe également d’autres tumeurs œstrogénodépendantes connues ou suspectées, par exemple le cancer de l’endomètre, qui représentent autant de contre-indications au THM.

2 Antécédents thrombo-emboliques
Artériels
Le traitement hormonal est contre-indiqué en cas d’antécédent artériel ischémique, qu’il soit coronarien ou cérébral, en cas de cardiopathie emboligène, et doit être arrêté en cas de survenue d’événement de ce type.

Veineux
Le traitement hormonal, surtout utilisé par voie orale, est formellement contre-indiqué en cas d’accidents thrombo-emboliques veineux survenus sous contraception œstroprogestative ou dans le post-partum, d’antécédents de phlébite ou d’embolie pulmonaire.

3 Autres
Les autres contre-indications du THM sont :

*une hémorragie génitale sans diagnostic établi;
*une affection hépatique aiguë ou chronique.
L’existence d’un méningiome contre-indique par ailleurs l’emploi des progestatifs.

La présence de facteurs de risque coronarien (diabète, tabagisme, hypertension artérielle) doit amener à bien évaluer le rapport bénéfice/risque avant de prescrire un THM.

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Indications et mise en route du traitement hormonal de la ménopause
1 Interrogatoire et examen clinique rigoureux (tableau 5.5)

L’interrogatoire :

Tableau 5.5

Bilan avant la prescription d’un traitement hormonal de la ménopause.

Interrogatoire Examen physique Mammographie Bilan sanguin
–Antécédents personnels et familiaux :
*de cancer
*métaboliques
*vasculaires
–Signes de carence œstrogénique
–Poids, pression artérielle
–Palpation des seins
–Examen gynécologique
–Frottis cervicovaginal
Systématique
–Cholestérol
–Triglycérides
–Glycémie
(Source : CEEDMM, 2021.)

*confirme la réalité de la ménopause et apprécie l’importance des signes de carence œstrogénique;
*recherche les facteurs de risque cardiovasculaire et les antécédents thrombo-emboliques veineux ou artériels;
*recherche les antécédents personnels et familiaux de cancer du sein ou de l’endomètre.
La patiente est informée des risques à court, à moyen et à long termes pouvant être induits par le THM (+++).

L’examen clinique comprend : la mesure du poids, la prise de la pression artérielle, un examen gynécologique et une palpation des seins.

Dans les examens complémentaires avant la mise sous THM, la mammographie est nécessaire. La réalisation d’une échographie pelvienne, non obligatoire, est utile pour visualiser l’endomètre et la présence d’éventuels myomes sous-muqueux (pouvant être à l’origine de saignements sous THM). Il est utile de faire un dosage du cholestérol et des triglycérides, ainsi qu’une glycémie veineuse à jeun. Le test HPV doit être à jou

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2 En pratique
Haute autorité de santé (juillet 2014)

La HAS propose un maintien des remboursements des traitements de ménopause, mais recommande des doses minimales et une durée limitée. La HAS rappelle que les risques connus de ces traitements se confirment, et recommande un traitement aux doses les plus ajustées et le plus court possible, réévalué au moins chaque année.

En présence de troubles fonctionnels
Lorsque des troubles fonctionnels liés à la carence œstrogénique sont gênants ou considérés comme tels, un THM peut être instauré en première intention, si la patiente le souhaite, à la dose minimale efficace et tant que durent les symptômes. Dans cette indication, le bénéfice/ risque du THM reste favorable à court terme (moins de 5 ans).

En présence de risques élevés d’ostéoporose
Chez les femmes ménopausées ayant un risque élevé de fractures ostéoporotiques et éventuellement après mesure de la densité minérale osseuse (DMO), un THM peut être administré en deuxième intention en cas d’intolérance ou de contre-indications aux autres traitements indiqués dans l’ostéoporose (voir Item 128, chapitre 7).

Le THM doit être instauré à la ménopause, le plus précocement possible.

En l’absence de trouble fonctionnel
Chez les femmes ne présentant ni trouble fonctionnel, ni facteur de risque d’ostéoporose, le THM ne doit pas être prescrit de manière systématique. Il doit être décidé au cas par cas, en fonction de la situation et des souhaits de la femme, en l’informant de l’ensemble des bénéfices attendus et des risques potentiels.

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I Surveillance et durée du traitement
A Après quelques mois de traitement

Une nouvelle consultation est nécessaire à 3-6 mois, pour évaluer la tolérance et l’efficacité du traitement, pour vérifier le bon dosage de l’œstrogénothérapie (voir tableau 5.4) :

*une dose insuffisante d’œstrogènes se traduit par une persistance des bouffées de chaleur, éventuellement d’autres symptômes du climatère et une sécheresse vaginale;
*le surdosage en œstrogènes est très souvent accompagné de l’apparition de tension et de douleurs mammaires (mastodynies); dans ce cas, la dose d’œstrogènes doit être diminuée.
B À moyen terme
La surveillance comprend, outre l’examen clinique tous les 6 à 12 mois, une mammographie tous les 2 ans. L’échographie pelvienne voire l’hystéroscopie sont réalisées en cas de saignements utérins anormaux.

À l’heure actuelle, la durée recommandée de traitement est de 5 ans, avec réévaluation tous les ans du rapport bénéfice/risque. L’arrêt du traitement est mieux supporté quand il est progressivement dégressif.

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VII Alternatives thérapeutiques au traitement hormonal
Ces alternatives sont utiles en cas de contre-indications au THM classique.

A Modulateurs spécifiques du récepteur des œstrogènes (SERM)
Il s’agit de molécules capables de se comporter comme des anti-œstrogènes dans certains tissus cibles et comme des œstrogènes dans d’autres tissus. Un exemple est le raloxifène qui possède les effets bénéfiques de l’œstradiol au niveau de l’os et du système cardiovasculaire, alors qu’il se comporte comme un anti-œstrogène au niveau de l’endomètre et du sein. Parmi les inconvénients, sous raloxifène, les bouffées de chaleur persistent, voire sont augmentées, et il existe des effets prothrombotiques (risque relatif [RR] = 3) proches du THM. Ce produit n’est pas pris en charge par la Sécurité sociale.

B Autres molécules
La tibolone est un progestatif qui a une activité triple : œstrogénique, progestative et androgénique. Il diminue les bouffées de chaleur, améliore la trophicité vaginale et la DMO. Toutefois, il a les contre-indications des œstrogènes sur le cancer du sein, les effets métaboliques délétères des nor-stéroïdes et un effet prothrombotique. Ce produit n’est pas pris en charge par la Sécurité sociale.

Lorsque les bouffées de chaleur sont très symptomatiques, en cas de contre-indication aux œstrogènes, plusieurs molécules peuvent être proposées. Certains proposent des traitements par bêta-alanine ou par des inhibiteurs spécifiques de la recapture de la sérotonine à faible dose qui ont fait la preuve de leur efficacité contre placebo chez des femmes ayant une contre-indication au THM. Les dérivés de soja contenant des phyto-œstrogènes n’ont pas fait la preuve de leur efficacité et de leur innocuité.

En cas d’ostéoporose, outre une thérapeutique vitaminocalcique, un traitement par les bisphosphonates peut être proposé (voir Item 128, chapitre 7).

À ne pas oublier

Chez toutes les femmes ménopausées, surtout celles ayant une contre-indication ou une non-indication aux œstrogènes, il est possible de proposer un traitement local par œstrogènes (ovules ou crèmes) afin de préserver une bonne trophicité du tractus urogénital.

À l’instauration du THM, il est nécessaire :

*de réaliser le dépistage et la prise en charge des différents facteurs de risque cardiovasculaire, de façon à limiter la survenue d’événements cardiovasculaires indésirables, favorisés par la carence œstrogénique chronique; l’arrêt du tabac doit être envisagé;
*de promouvoir un exercice physique régulier, une alimentation riche en calcium et un régime supplé-menté en vitamine D, afin de limiter les autres facteurs de risque d’ostéopénie et d’ostéoporose.

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Conclusion
Le THM a été préconisé très largement dans les années 1980-1990 à beaucoup de femmes ménopausées. La publication d’études prospectives randomisées versus placebo a permis ces 20 dernières années de confirmer l’efficacité de ce traitement sur la prévention du risque fracturaire lié à l’ostéoporose ménopausique, mais elle a fait apparaître un surrisque vasculaire avec des œstrogènes par voie orale, surtout chez des femmes à risque vasculaire, ainsi qu’une augmentation du risque de cancer du sein chez les femmes traitées.

L’efficacité du traitement sur les manifestations climatériques est supérieure à toute autre thérapeutique. Ainsi, la prescription du THM est à envisager chez toute femme symptomatique qui le souhaite, à condition qu’elle ne présente pas de contre-indication, que la nécessité du traitement soit régulièrement évaluée et que la patiente soit clairement informée des bénéfices et risques du traitement.

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oints clés

  • La ménopause est un processus physiologique, survenant vers l’âge de 51 ans, défini par la disparition des règles depuis au moins un an, associé à un syndrome climatérique (bouffées de chaleur). Biologiquement, l’œstradiol est bas, les gonadotrophines (FSH ++) élevées, en rapport avec la perte du capital folliculaire.
    *Le diagnostic est cependant clinique et ne nécessite pas de dosages hormonaux, sauf en cas d’antécédent d’hystérectomie.
    *Les conséquences de la carence œstrogénique sont : un syndrome climatérique associant bouffées de chaleur, sueurs nocturnes, sécheresse vaginale, troubles du sommeil et de l’humeur; une perte osseuse favorisant les fractures ostéoporotiques; un risque cardiovasculaire plus important.
  • Les eff ets du THM ont été récemment réévalués par de nombreuses études anglo-saxonnes : il améliore notablement le syndrome climatérique et donc la qualité de vie; il diminue la résorption osseuse et prévient les fractures (mais l’eff et protecteur est limité à la période d’utilisation).
    *Dans les études anglo-saxonnes randomisées, réalisées chez des femmes de plus de 60 ans recevant des oestrogènes oraux et un progestatif de synthèse peu utilisé en France, il n’a été observé ni eff et protecteur sur la survenue des événements cardiovasculaires (coronariens ou vasculaires cérébraux), tant en prévention primaire que secondaire, ni eff et démontré sur la fonction cognitive.
    *Le traitement hormonal est associé à une augmentation de 20 % à 30 % de l’incidence du cancer du sein et, en cas de traitement oestrogénique oral, à un doublement du risque d’accident veineux thrombo-embolique.
    *Le rapport bénéfi ce/risque du THM doit donc être discuté de façon individuelle, et si l’indication est retenue (après vérifi cation des contre-indications), on recommande maintenant de proposer le THM pour une période limitée et de renforcer par ailleurs les conseils hygiéno-diététiques (exercice, apport vitaminocalcique, arrêt du tabac).
    *On utilise le 17β-oestradiol par voie percutanée ou orale, 20 jours par mois, associé à la progestérone naturelle ou à un dérivé non androgénique, au minimum 12 jours par mois.
    *La réévaluation du traitement et de son indication doit être au moins annuelle et la surveillance mammaire attentive (examen clinique tous les 6 mois, mammographie tous les 2 ans).
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Andropause

Le terme « andropause » est couramment utilisé pour désigner la baisse de la testostérone circulante à partir de l’âge de 40 ans chez l’homme. Un autre terme en vogue est celui d’« hypogonadisme » de l’homme âgé ou de déficit androgénique partiel du sujet âgé – connu sous le sigle anglais de PADAM (partial androgen deficiency in aged maie) ou DALA (déficit androgénique lié à l’âge) en français.

Des études transversales et longitudinales ont en fait montré que, chez la majorité des hommes mûrs ou âgés, la baisse de la testostérone circulante est inconstante ou relativement modérée lorsqu’ils sont en bonne santé et non obèses. De plus, pour une tranche d’âge donnée, il existe une importante variabilité des valeurs des concentrations de testostérone chez les hommes normaux (fig. 5.1). L’obésité et des comorbidités associées, en particulier vasculaires, peuvent entraîner une diminution de la testostérone.Le mécanisme de la baisse de la testostérone chez l’homme âgé n’est pas connu avec précision, mais il semble qu’il comprenne à la fois une atteinte de la commande hypophysaire et une altération directe des fonctions testiculaires intervenant dans la sécrétion de testostérone.

Une baisse cliniquement significative de la testostérone totale circulante ne semble concerner qu’une minorité d’hommes (4,1 % dans l’étude EMAS, European Male Aging Study). Mais la prévalence augmente avec l’âge : 0,6 % entre 50 et 59 ans, 3,2 % entre 60 et 69 ans et 5,1 % entre 70 et 79 ans.

Le rôle du médecin est d’identifier les situations où la baisse de la testostérone est cliniquement significative, c’est-à-dire qu’elle altère la qualité de vie de façon spécifique et/ou révèle un hypogonadisme réel. Dans ces cas s’impose toujours une enquête étiologique, et les symptômes peuvent être améliorés par une androgénothérapie (fig. 5.2).

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Symptômes conduisant à une consultation médicale
Les symptômes révélant un hypogonadisme chez l’homme sont variables. Certains, par leur spécificité, sont évocateurs, comme la diminution de la libido et de l’activité sexuelle.

D’autres, bien qu’orientant vers la recherche d’un hypogonadisme, sont moins spécifiques, comme les troubles de l’érection. Ces derniers peuvent en effet survenir très souvent chez des sujets eugonadiques (avec testostérone plasmatique normale), mais avec des comorbidités.

Enfin, des symptômes très peu spécifiques comme le manque d’entrain, la diminution de la force et de l’activité physiques ainsi que la dépression ont été associés à l’« andropause », mais leur valeur sémiologique est remise en cause.

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Affirmer l’hypogonadisme
Pour démontrer l’existence d’un hypogonadisme, il faut mettre en évidence une baisse significative de la testostérone circulante (fig. 5.3).vec le recours de plus en plus fréquent aux méthodes de dosage par spectrométrie de masse, le dosage de la testostérone totale est suffisant dans la plupart des cas. Le dosage de la testostérone biodisponible ne doit donc pas être réalisé en pratique courante.

En cas de doute dans l’interprétation du dosage (en particulier en situation d’obésité), le dosage de la SHBG (sex-hormone binding globulin) avec calcul de la fraction libre de testostérone peut s’avérer utile.

Les seuils diagnostiques ont été beaucoup discutés dans la littérature médicale au cours de ces 30 dernières années. Il existe à l’heure actuelle des consensus des sociétés savantes internationales (endocrinologie, urologie) :

*le diagnostic d’hypogonadisme pourrait être raisonnablement suspecté en dessous d’une testostérone totale de 3,2 ng/ml (11 nmol/l);
*pour certains experts, une valeur inférieure à 2,3 ng/ml (8 nmol/l) serait associée de façon significative à des signes cliniques évoquant un déficit en testostérone et aurait une très bonne spécificité.

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Différencier un hypogonadisme hypogonadotrope d’une insuffisance testiculaire primitive
Une fois que le diagnostic positif d’hypogonadisme réel est établi, la deuxième étape est d’en déterminer le cadre étiologique, c’est-à-dire de préciser s’il s’agit d’une atteinte testiculaire primitive ou d’un déficit hypophysaire en gonadotrophines.

Cette étape fait appel à la mesure des gonadotrophines hypophysaires FSH et LH :

*en présence d’une baisse de la testostérone totale, lorsque la concentration de ces deux hormones hypophysaires est élevée, il s’agit d’une insuffisance testiculaire primitive, ou hypogonadisme hypergonadotrope (le plus souvent avec une FSH > LH);
*si la testostérone totale est basse et si LH et/ou FSH sont dans les valeurs normales (inappropriées) ou basses, on est en face d’un hypogonadisme hypogonadotrope (central).
Dans cette dernière éventualité, il est obligatoire d’évaluer l’ensemble des fonctions antéhypophysaires pour ne pas méconnaître une insuffisance hypophysaire et tout particulièrement une insuffisance corticotrope par déficit en ACTH qui pourrait exposer le patient à une décompensation aiguë (voir Item 245, chapitre 16). Une autre priorité est de dépister une hyperprolactinémie (voir Item 244, chapitre 15). Dans ce contexte, une imagerie par IRM de la région hypothalamo-hypophysaire doit être réalisée pour dépister un processus expansif de la région hypothalamo-hypophysaire (+++).

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Diagnostic différentiel
Devant un profil hormonal d’insuffisance testiculaire primitive, il faut, à l’aide de l’interrogatoire et de l’examen clinique, rechercher des arguments en faveur des étiologies indiquées dans le tableau 5.6. Des antécédents de traumatisme de la région scrotale seront recherchés ainsi que des traitements gonadotoxiques (chimiothérapie ± radiothérapie) ou des infections. La palpation du volume testiculaire est systématique à la recherche d’une hypotrophie. Lorsque le volume testiculaire est très diminué (< 4 ml), il est utile de demander un caryotype pour dépister une maladie chromosomique ayant pu passer inaperçue (voir fig. 5.2).

Tableau 5.6

Étiologie des insuffisances testiculaires primitives pouvant être découvertes à l’âge adulte.

Causes lésionnelles
–Toxiques et traumatiques (les plus fréquentes) :
*chimiothérapie anticancéreuse (+++) (chez l’enfant ou l’adulte)
*radiations ionisantes (+++) (chez l’enfant ou l’adulte)
*alcoolisme chronique (+++)
*perturbateurs endocriniens
*traumatisme testiculaire bilatéral
–Castration chirurgicale bilatérale
–Torsion testiculaire bilatérale
–Orchites ourliennes
–Autres : gonococcie, sarcoïdose, polyendocrinopathies auto-immunes
Malformations, dysgénésies
–Cryptorchidie bilatérale
Causes chromosomiques
–Syndrome de Klinefelter (+++) (caryotype 47, XXY dans plus de 90 % des cas)
–Anomalies des gonosomes plus rares (47,XYY, 48,XXYY, etc.)
–Hommes 46,XX avec translocation d’une portion du chromosome Y contenant la séquence de détermination testiculaire SRY
–Anomalies des autosomes (délétions, translocations)
Insuffisance testiculaire liée à la sénescence Avec déficit de l’axe hypothalamo-hypophysaire, appelé aussi déficit androgénique partiel des hommes âgés ou « andropause »
Causes génétiques Exceptionnellement révélées à l’âge adulte

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Hypogonadismes hypogonadotrophiques acquis à l’âge adulte
Les hypogonadismes hypogonadotrophiques acquis à l’âge adulte (HHA) ont pour causes les plus fréquentes les adénomes hypophysaires (voir Item 244, chapitre 15), en particulier les pro-lactinomes, ainsi que d’autres processus tumoraux de la région comme les craniopharyngiomes, les méningiomes, etc.

Cependant, il ne faut pas oublier que d’autres étiologies peuvent être en cause, comme les processus infiltratifs ou les surcharges (respectivement les hypophysites ou l’hémochromatose). À côté des classiques lésions chirurgicales et radiothérapiques de la région sellaire, une origine post-traumatique est de plus en plus recherchée (accident de la voie publique avec traumatisme crânien). Certains traitements médicamenteux peuvent aussi provoquer des HHA; citons les corticoïdes, les analogues de la GnRH utilisés dans le traitement du cancer de la prostate, ou les stéroïdes anabolisants utilisés en automédication, dans le cadre du dopage ou pour améliorer les « performances sexuelles ».

Les causes les plus importantes d’HHA sont résumées dans le tableau 5.7.

Tableau 5.7

Étiologie des hypogonadismes hypogonadotrophiques acquis.

Tumeurs de la région hypothalamo-hypophysaire
–Craniopharyngiome
–Adénomes hypophysaires de tous types
–Dysgerminomes, gliomes
–Métastase hypophysaire (avec diabète insipide)
Processus infiltratifs hypothalamo-hypophysaires
–Hémochromatose (surtout par mutation d’HFE, à révélation tardive)
–Sarcoïdose
–Hypophysite lymphocytaire ou infundibulite
–Histiocytose
Causes iatrogéniques et traumatiques
–Chirurgie de la région hypothalamo-hypophysaire
–Radiothérapie hypophysaire ou encéphalique
–Traumatisme crânien (prévalence peut-être sous-estimée)
Causes fonctionnelles
–Hyperprolactinémie
–Carence nutritionnelle (anorexie mentale, maladies chroniques, activité physique excessive avec malnutrition relative)
–Hypercortisolisme (Cushing), quelle qu’en soit l’étiologie
–Tumeurs testiculaires ou surrénaliennes sécrétant des œstrogènes (gynécomastie associée)
–Médicamenteuses : androgènes ou anabolisants (dopage), œstroprogestatifs agonistes de la GnRH (pour traitement de cancer de la prostate), corticoïdes à forte dose
(Source : CEEDMM, 2021.)

Les manifestations cliniques de l’HHA dépendent de la profondeur et de la durée du déficit gonadotrope. Un des meilleurs signes cliniques est la perte de la libido.

Cette baisse de la libido s’accompagne parfois de troubles de l’érection ou est confondue avec ceux-ci.

L’examen clinique peut être sans particularité quand l’HHA est récent.

La diminution de la pilosité et du volume testiculaire tout comme la diminution des masses musculaires n’interviennent que lorsque le déficit en gonadotrophines hypophysaires est ancien et profond, comme dans certains cas d’adénomes hypophysaires.

L’exploration hormonale montre habituellement une baisse importante de la testostérone totale sérique associée à une baisse des gonadotrophines, mais ces dernières peuvent demeurer dans l’intervalle des valeurs de référence pour l’âge.

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Conséquences à court, moyen et long terme d’un déficit androgénique lié à l’âge non traité
Les principaux effets du déficit androgénique lié à l’âge non traité sont résumés dans le tableau 5.8. Ils ne sont pas limités à la seule fonction de reproduction (diminution de la sexualité et de la libido, moindre rendement de la gamétogenèse).

Tableau 5.8

Signes cliniques le plus fréquemment observés en cas d’hypogonadisme masculin lié à l’âge.

Symptômes les plus spécifiques Symptômes plus généraux
–Diminution du désir sexuel et de l’activité sexuelle
–Diminution des érections spontanées
–Dysfonction érectile
–Bouffées de chaleur, hypersudation
–Diminution du volume testiculaire
–Dépilation pubienne, diminution de la fréquence de rasage
–Augmentation de l’IMC, majoration de l’adiposité viscérale
–Perte de taille, fractures à basse cinétique, diminution de la densité minérale osseuse
–Perte d’élan vital, manque d’initiative et de motivation
–Ejaculation retardée
–Diminution de la masse musculaire et de la force musculaire
–Diminution des performances physiques
–Anémie modérée (normochrome, normocytaire)
–Humeur dépressive, irritabilité
–Difficultés de concentration, troubles mnésiques
–Somnolence, troubles du sommeil
Il existe des modifications de la composition corporelle avec diminution de la masse maigre, augmentation de la masse grasse et diminution de la force musculaire.

Il existe un risque accru de chutes, indépendamment des indices de performance physique et de fragilité. La prévalence de l’ostéoporose est plus élevée chez les hommes ayant des taux bas de testostérone, avec notamment une augmentation du risque de fractures non vertébrales (voir Item 128, chapitre 7).

La plupart des études ont conclu à un effet du déficit androgénique sur l’aggravation du déclin cognitif et une augmentation des symptômes dépressifs.

Il existe une intrication forte entre l’hypogonadisme masculin lié à l’âge et l’existence d’un syndrome métabolique avec augmentation de l’insulinorésistance et du risque de diabète de type 2 incident.

Enfin, il a été montré dans de nombreuses études que des taux bas de testostérone étaient significativement corrélés à la survenue d’infarctus du myocarde, d’AVC ou d’autres atteintes vasculaires fatales ou non fatales, avec un surrisque de mortalité cardiovasculaire chez les patients dont les taux de testostérone sont inférieurs à 8 nmol/l [230 ng/dl] : ×2,3 de manière globale et ×3,2 chez les patients symptomatiques. Pour autant, il est probable que le déficit androgénique soit plus un marqueur de risque cardiovasculaire qu’un facteur de risque cardiovasculaire en lui-même.

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Chez la majorité des hommes mûrs ou âgés, la baisse de la testostérone est inconstante ou modérée lorsqu’ils sont en bonne santé et non obèses.
*L’obésité et les comorbidités sont un facteur fréquent de baisse de la testostérone.
*La majorité des symptômes associés à l’« andropause » sont non spécifiques et peu influencés par l’administration de testostérone.
*Les signes plus spécifiques d’hypogonadisme sont les troubles de l’érection avec diminution de l’érection matinale et diminution des pensées sexuelles.
*La mise en évidence d’une baisse de la testostérone totale circulante impose la recherche d’une cause avant toute androgénothérapie.
*L’hypogonadisme lié à l’âge est associé à un surrisque d’ostéoporose, de syndrome métabolique et d’événements cardiovasculaires.

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Physiologie
L’érection est un processus neuro-tissulo-vasculaire qui survient lors d’un stimulus sensoriel érotique parvenant à l’hypothalamus ou de manière réflexe. Il induit une inhibition du tonus sympathique et une libération de monoxyde d’azote (NO) à partir des terminaisons nerveuses et de l’endothélium érectile. Cette relaxation des muscles lisses permet le remplissage des sinusoïdes caverneux et le développement de l’érection. L’inhibition du drainage veineux est un phénomène passif lié à la compression des plexus veineux par les sinusoïdes caverneux dilatés et qui contribue au maintien de l’érection. Ainsi, le processus complexe de l’érection nécessite une dilatation artérielle et une relaxation des muscles lisses (voir plus loin). En résumé, l’érection nécessite :

*un réseau vasculaire fonctionnel (le trouble de l’érection est un marqueur vasculaire clinique);
*un appareil musculaire lisse fonctionnel;
*une réduction suffisante du retour veineux;
*un signal nerveux fonctionnel;
*un environnement hormonal adéquat;
*un psychisme adéquat.

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Définition
Le trouble de l’érection, ou dysfonction érectile, est défini comme une incapacité persistante à obtenir ou à maintenir une érection permettant un rapport sexuel satisfaisant.

Il résulte souvent de facteurs multiples et intriqués.

L’âge est un facteur de risque majeur, dont l’influence s’explique par :

*des déficits neurosensoriels d’installation progressive;
*une baisse progressive, physiologique, du taux de testostérone;
*l’apparition de comorbidités associées : maladies cardiovasculaires, hypertension artérielle (HTA), diabète, dyslipidémies et prise médicamenteuse (usage d’antihypertenseurs notamment).
L’insuffisance rénale, la dialyse rénale, les troubles mictionnels, la chirurgie ou les traumatismes pelviens, la consommation d’alcool et de tabac, les états anxiodépressifs sont aussi des facteurs de risque de trouble de l’érection, qui peut être alors le seul indicateur d’une comorbidité.

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Conduite diagnostique devant un trouble de l’érection
La conduite diagnostique est schématisée dans la figure 6.1.

Ses objectifs sont :

*de préciser l’importance du trouble et son retentissement sur la qualité de vie dans tous ses paramètres (psychoaffectif, conjugal et socioprofessionnel);
*de rechercher des éléments anamnestiques, cliniques et médicamenteux en faveur de l’étiologie de la dysfonction érectile;
*d’identifier ou de dépister des facteurs de risque d’un trouble de l’érection par l’interrogatoire et les examens paracliniques ou biologiques.
A Bilan initial
Ces investigations sont résumées par le « bilan initial » (voir fig. 6.1). La synthèse de ces éléments permet d’établir le profil du patient ainsi que la stratégie thérapeutique envisagée.

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Critères diagnostiques et pronostiques d’un trouble de l’érection
Diagnostic positif : le trouble de l’érection est d’abord un diagnostic d’interrogatoire, qui permet de confirmer la plainte du patient sur le manque de rigidité de son érection.

Il importe d’emblée de distinguer le trouble de l’érection d’autres troubles sexuels :

*perte du désir sexuel (en posant au patient la question de son intérêt pour la sexualité);
*troubles de l’éjaculation (trop rapide, retardée voire absente ?);
*douleurs lors des rapports (pendant l’érection, l’éjaculation ?);
*anomalies morphologiques ressenties par le patient (dysmorphophobie) ou réelles (petite verge, déformation, asymétrie des corps caverneux ou maladie de La Peyronie, à vérifier lors de l’examen clinique).
2 Caractérisation du trouble érectile
Le trouble de l’érection confirmé, d’autres critères diagnostiques et pronostiques sont alors recherchés :

*le caractère primaire (existant depuis le début de la vie sexuelle) ou secondaire (acquis après une vie sexuelle satisfaisante) du trouble érectile;
*le caractère brutal (qui impose de rechercher une circonstance déclenchante), qui est en faveur d’une cause psychologique prédominante, ou progressif, qui oriente davantage vers une cause organique;
*le caractère permanent ou situationnel (selon le lieu, la partenaire);
*la persistance d’érections nocturnes et/ou matinales spontanées en dehors de toute stimulation sexuelle, qui est en faveur d’une intégrité neuro-tissulo-vasculaire : l’interrogatoire recherchera un trouble psychogène à l’origine de la dysfonction;
*la sévérité du trouble érectile, qui s’apprécie par :
–le délai entre l’apparition du trouble et la consultation (la difficulté de la prise en charge semble corrélée à la longueur de ce délai);
–l’existence ou non d’une capacité érectile résiduelle (avec une rigidité suffisante pour la pénétration), évaluable par les scores EHS (Erection Hardness Score) et IIEF (International Index of Erectile Function) ;
–la capacité d’érections provoquées (masturbation).
3 Recherche des pathologies et facteurs pouvant favoriser ou aggraver un trouble érectile
La recommandation actuelle est la recherche systématique d’antécédents et/ou de symptômes qui évoquent autant une pathologie organique que psychologique. Des difficultés psychologiques peuvent à elles seules déclencher ou aggraver un trouble érectile et bénéficier de traitements spécifiques. L’interrogatoire recherche :

*un trouble psychogène personnel (anxiété, croyances erronées, antécédent de violences sexuelles);
*l’existence de complexes identitaires (identité de genre);
*un trouble relationnel (conjugopathie, timidité envers la partenaire, anxiété de performance);
*une anomalie génitale réelle (malformative) ou supposée (syndrome du « petit pénis », dysmorphophobie);
*des antécédents abdominopelviens (chirurgie, irradiation, traumatisme);
*un diabète (l’état de son équilibre et l’existence de complications);
*tous les facteurs de risque cardiovasculaire (HTA, syndrome métabolique, surcharge pondérale, dyslipidémie, tabagisme, sédentarité);
*une pathologie cardiovasculaire (angor, insuffisance cardiaque), le trouble érectile pouvant être un signe avant-coureur d’une coronaropathie ignorée;
*des maladies neurologiques (maladie de Parkinson, sclérose en plaques), des séquelles de traumatisme médullaire;
*l’existence de troubles mictionnels, en rapport le plus souvent avec une hypertrophie bénigne de la prostate;
*des signes évocateurs de déficit androgénique, notamment une perte ou une diminution du désir sexuel, une diminution de la pilosité, une diminution de la qualité et du nombre des érections spontanées matinales et nocturnes – les autres signes (fatigabilité, troubles de l’humeur) étant moins spécifiques et se retrouvant dans bon nombre de maladies chroniques;
*une endocrinopathie, liée de façon plus rare à un trouble de l’érection (hypo- ou hyperthyroïdie, insuffisance surrénale lente);
*des troubles du sommeil (+++) : apnées du sommeil, insomnie;
*la liste des traitements, dont certains ont des effets secondaires néfastes sur la sexualité;
*un syndrome dépressif;
*l’existence de troubles addictifs : toxicomanie, alcool, addiction sexuelle;
*enfin, tous les éléments du contexte psychoaffectif et relationnel entourant le patient et qui précèdent l’apparition du trouble de l’érection.
4 Examen clinique

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Examen clinique
L’examen clinique est recommandé chez tous les patients consultant pour un trouble de l’érection.

L’examen urogénital apprécie les caractères sexuels secondaires (recherche d’une gynécomastie, d’un hypoandrisme, de petits testicules) et recherche d’éventuelles anomalies du pénis, en particulier l’existence de plaques péniennes traduisant une maladie de La Peyronie. Un toucher rectal après 50 ans est systématiquement pratiqué.

L’examen cardiovasculaire recherche en particulier des signes vasculaires (HTA, pouls, souffle artériel), notamment la disparition des pouls, orientant vers une cause vasculaire.

L’examen neurologique recherche des signes de neuropathie (sensibilité du périnée et des membres inférieurs).

Outre les signes évoqués plus haut, d’autres signes endocriniens sont explorés (anomalie du champ visuel évocatrice d’une tumeur hypophysaire).

5 Bilan biologique
Le bilan minimal recommandé dans le cadre du bilan initial est essentiellement biologique :

*glycémie à jeun;
*bilan lipidique;
*NFS, ionogramme, créatinémie;
*bilan hépatique;
*recherche d’un déficit androgénique en cas de facteurs de risque ou de signes cliniques évocateurs (baisse du désir sexuel, des érections nocturnes et matinales), avec un dosage initial de la testostéronémie totale le matin (voir Item 124, chapitre 5).
Les autres examens sont orientés selon les données de l’interrogatoire et de l’examen clinique (recherche d’une endocrinopathie dont les dysthyroïdies et l’hyperprolactinémie; évaluation de l’état cardiovasculaire, etc.) (voir fig. 6.1).

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Étiologie des dysfonctions érectiles.

Causes vasculaires
–Cardiopathie ischémique, artérite des membres inférieurs
–Facteurs de risque : hypertension artérielle (+++), dyslipidémie, tabac, obésité, sédentarité
Causes endocriniennes
–Diabète
–Hypogonadisme
–Hyperprolactinémie
–Hyper- ou hypothyroïdie
–Insuffisance surrénale lente
Causes génitopelviennes
–Hyperplasie bénigne de la prostate
–Fibrose des corps caverneux (maladie de La Peyronie)
–Chirurgie pelvienne (prostatectomie +++)
–Irradiation pelvienne
Causes traumatiques
–Traumatisme crânien, médullaire (+++)
–Traumatisme pénien
–Fracture du bassin
Causes neuropsychiatriques
–Affections dégénératives, inflammatoires, tumeurs du système nerveux central, ischémie cérébrale, atteinte des cordons de la moelle
–Neuropathie autonome
–Anxiété, dépression, psychose, etc.
Maladies chroniques
–Insuffisance rénale
–Insuffisance cardiaque
–Cancer
–Maladies inflammatoires chroniques
Causes iatrogènes
–Antihypertenseurs (+++) (bêta-bloquants, diurétiques thiazidiques, spironolactone, méthyldopa, clonidine)
–Hypolipidémiants (fibrates)
–Psychotropes (benzodiazépines, antipsychotiques, inhibiteurs de la recapture de la sérotonine)
–Opioïdes, héroïne, cocaïne, alcool
–Hormones (antiandrogènes, stéroïdes anabolisants, kétoconazole)
Facteurs de risque non médicaux
–Âge (+++)
–Environnement (stress)
–Facteurs socio-économiques
Causes psychogènes

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Prise en charge d’un trouble endocrinien
Un hypogonadisme biologiquement prouvé (baisse de la libido associée au trouble de l’érection et à une testostéronémie basse < 3,2 ng/ml) est substitué par des androgènes administrés par voie intramusculaire ou transdermique.

Le niveau de preuve de l’efficacité d’un traitement androgénique pour un trouble de l’érection isolé sans hypogonadisme avéré reste faible. Le traitement androgénique est contre-indiqué en cas de nodule prostatique palpable, de PSA > 3 ng/ml ou de signes compressifs urologiques, et sa mise en place nécessite une surveillance clinique régulière du volume prostatique et du PSA. Une surveillance du bilan hépatique et de l’hématocrite doit aussi être réalisée.

L’hypogonadisme secondaire à une hyperprolactinémie est corrigé le plus souvent grâce au traitement par agoniste dopaminergique (quinagolide, cabergoline).

B Traitements pharmacologiques d’un trouble de l’érection
Le traitement pharmacologique de première intention est le traitement oral par les IPDE5). Ces molécules bloquent la dégradation enzymatique du GMPc dans les corps caverneux et induisent une relaxation des fibres musculaires lisses ainsi qu’une vasodilatation pénienne. Elles ont prouvé leur efficacité dans l’amélioration des troubles de l’érection chez le non-diabétique comme chez le diabétique à la condition d’une nécessaire stimulation sexuelle préalable. Leurs caractéristiques sont résumées dans leLes études cliniques n’ont pas montré d’aggravation d’une coronaropathie par les IPDE5, mais l’usage d’un dérivé nitré par un patient porteur d’un trouble de l’érection contre-indique formellement les IPDE5 (risque d’hypotension artérielle majeure).

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102
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oints clés

  • Les troubles de l’érection s’associent souvent à des facteurs de risque multiples et intriqués, tels que l’âge, les comorbidités (affections cardiovasculaires, diabète, HTA, dyslipidémies), les états anxiodépressifs, le tabac et l’alcool.
    *L’anamnèse du trouble de l’érection, l’interrogatoire précisant l’histoire médicale, sexuelle, psychologique et relationnelle du patient ainsi qu’un examen clinique soigneux permettent d’évaluer la sévérité du trouble de l’érection et d’orienter la thérapeutique en fonction d’une cause psychogène, vasculaire, neurologique ou endocrinienne du trouble de l’érection.
    *Le bilan initial évalue les paramètres métaboliques et hormonaux, le bilan secondaire la composante psycho-sexologique individuelle et de couple, le risque cardiovasculaire et les capacités érectiles par une injection intracaverneuse.
  • Le diabète et l’hypogonadisme constituent les principales causes endocriniennes d’un trouble de l’érection et doivent être recherchés systématiquement après 50 ans.
    *Le traitement pharmacologique de première ligne utilise les inhibiteurs des phosphodiestérases de type 5 par voie orale et, en cas d’échec, les substances vasoactives par voie intracaverneuse.
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103
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Définition
L’ostéoporose est définie comme une fragilité excessive du squelette liée à une diminution du contenu minéral osseux et/ou à des altérations de la microarchitecture osseuse qui augmentent le risque de fracture.

La relation établie entre la baisse de la densité minérale osseuse (DMO) et l’augmentation du risque de fracture a conduit, en 1994, à une définition « densitométrique » de l’ostéoporose, sur la base d’un T-score inférieur à –2,5 écarts types de la valeur moyenne de l’adulte jeune. Il faut remarquer que cette définition n’est valable que pour les femmes ménopausés et par analogie à l’homme et pour une mesure de densité osseuse réalisée par absorptiométrie biphotonique à rayons X, ou DXA (dual energy X-ray absorptiometry), sur les sites osseux axiaux (vertèbres, extrémité supérieure du fémur, col du fémur) (fig. 7.1 et 7.2). Pour les femmes non ménopausées, la référence au Z-score est privilégiée, particulièrement avant l’âge de 40 ans, en sachant que, lorsque le Z-score est inférieur à –2, on parle de déminéralisation significative, le terme d’ostéoporose étant alors réservé aux situations fracturaires.

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Classification
L’ostéoporose est une pathologie à prépondérance féminine, mais n’épargne pas les hommes, chez lesquels elle représente un problème relativement commun. Les ostéoporoses sont divisées en deux catégories. On distingue l’ostéoporose primitive « commune », dite ostéoporose post-ménopausique, qui est la forme la plus commune, des ostéoporoses dites secondaires. Ces dernières peuvent relever d’étiologies multiples (tableau 7.1). Les principales endocrinopathies entraînant un risque accru d’ostéoporose sont d’abord celles qui exposent à une diminution de la production des stéroïdes sexuels (hypogonadisme). D’autres hormones sont impliquées dans la régulation du remodelage osseux ou, de façon plus globale, dans l’homéo-stasie du calcium. Des anomalies de leur production peuvent favoriser le développement d’une ostéoporose. C’est le cas des hyperthyroïdies, de l’hypercortisolisme, de l’hyperparathyroïdie, qui constituent les causes endocriniennes les plus fréquentes des ostéoporoses secondaires. Des données récentes objectivent une augmentation du risque fracturaire chez les patients atteints d’un diabète de type 1, de même que chez ceux porteurs d’un diabète de type 2.

Tableau 7.1

Ostéoporoses secondaires.

Pathologies endocrines
–Hypogonadisme
–Syndrome de Cushing
–Hyperthyroïdie
–Hyperparathyroïdie
–Diabète de type 1 et de type 2
Pathologies digestives
–Malabsorption (maladie cœliaque)
–Entérocolopathie inflammatoire chronique
–Cirrhose biliaire primitive
–Chirurgie bariatrique
Pathologies générales
–Arthrite rhumatoïde
–Polyarthrite ankylosante
–Lupus érythémateux disséminé
–Myélome multiple
–Mastocytose
–Insuffisance rénale, hémodialyse chronique
Causes génétiques
–Ostéogenèse imparfaite
–Mutations du récepteur aux œstrogènes*
–Mutations du gène de l’aromatase*
–Homocystinurie
Causes médicamenteuses
–Corticothérapie
–Hormones thyroïdiennes (doses freinatrices)
–Agonistes de la GnRH
–Inhibiteurs de l’aromatase
–Anticonvulsivants
–Anticalcineurines (ciclosporine A, tacrolimus)
–Chimiothérapie
–Héparines non fractionnées
–Antirétroviraux
Autres causes
–Alcoolisme, tabagisme
–Tubulopathie rénale avec hypercalciurie
–Immobilisation
–VIH

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III Étiologie
A Hypogonadismes

La carence œstrogénique provoque une augmentation de l’ostéoclastogenèse et l’activation des ostéoclastes, qui augmentent la résorption osseuse et donc la perte osseuse.

La gravité de l’atteinte osseuse dépend de l’intensité et de la durée de l’hypogonadisme.

1 Anorexie mentale
Il s’agit d’une ostéoporose à bas niveau de remodelage osseux. Les marqueurs biochimiques de la formation osseuse (isoenzyme des phosphatases alcalines, ostéocalcine, P1NP) sont le plus souvent diminués. Les marqueurs de la résorption (CTx, NTx) ne sont pas toujours infor-matifs dans cette indication et sont plus le reflet de l’impact de la carence œstrogénique que de l’atteinte nutritionnellL’origine de l’ostéoporose est multifactorielle, même si la carence œstrogénique reste le principal facteur de perte osseuse, en particulier sur le site vertébral.

Les troubles nutritionnels à l’origine d’une diminution de l’IGF-1 (insulin-like growth factor 1), de carences calciques et d’une hypoprotidémie jouent un rôle aggravant. Un hypercortisolisme est également souvent retrouvé, malgré l’absence d’apparence cushingoïde en l’absence de substrat graisseux disponibleLe traitement repose sur la prise en charge multidisciplinaire de l’anorexie mentale proprement dite. La substitution œstrogénique doit être la règle, le plus rapidement possible et lorsque le diagnostic est établi. Elle repose le plus souvent sur l’utilisation d’une pilule œstroprogestative, bien que les données les plus récentes témoignent d’un bénéfice osseux plus marqué avec l’œstradiol administré par voie cutanée. Elle n’a qu’un effet limité sur la DMO, mais permet de limiter la perte osseuse, en particulier chez les jeunes filles les plus maigres. Le gain pondéral n’est associé à une amélioration de la DMO que s’il permet un retour des cycles menstruels spontanés.ctivité physique intensive
Les femmes sportives soumises à une activité physique trop intense peuvent développer une hypo-œstrogénie d’origine hypothalamique (voir Item 42, chapitre 3).

Les facteurs conditionnant l’atteinte osseuse sont :

*le type et l’importance de l’activité sportive : marathon, danse classique (jusqu’à 60 % d’aménorrhée), demi-fond, triathlon, gymnastique, cyclisme;
*l’importance et la fréquence des troubles du cycle menstruel;
*des apports alimentaires réduits ou insuffisants.
L’atteinte osseuse est de répartition inégale. Les contraintes mécaniques stimulent l’ostéo-formation sur des sites porteurs; à l’inverse, l’hypo-œstrogénie est responsable d’une résorption osseuse généralisée, bien qu’à prédominance rachidienne. Il existe également une plus grande fréquence des fractures de fatigue, qui sont favorisées par la diminution de la DMO.

L’ostéoporose est réversible avec le retour à la reprise spontanée des cycles menstruels, souvent lors de la réduction de l’activité physique.

En l’absence de possibilité de diminution de l’activité physique, la mise en route d’une substitution hormonale (contraception œstroprogestative ou traitement hormonal substitutif selon la nécessité ou non d’une contraception efficace) est nécessaire.

3 Pathologies hypophysaires

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3 Pathologies hypophysaires
Toute lésion hypophysaire (tumorale, infiltrante, iatrogène, traumatique, etc.) provoquant une atteinte (réversible ou irréversible) de la fonction gonadotrope peut avoir des conséquences osseuses.

En dehors de leur impact sur l’axe gonadotrope, les atteintes hypophysaires n’ont pas d’impact propre sur le remodelage osseux, à l’exception des adénomes corticotropes dont l’impact osseux est secondaire à l’hypercortisolisme.

4 Hypogonadismes iatrogènes
Tous les traitements diminuant la production des œstrogènes (ou des androgènes chez l’homme) constituent des facteurs potentiels d’augmentation du risque fracturaire. C’est le cas des agonistes de la GnRH, utilisés dans le cadre de pathologies utérines (endométriose, fibromes) ou prostatiques, et des inhibiteurs de l’aromatase dans le cancer du sein. Une mesure de la DMO est préconisée avant ces traitements, la perte osseuse pouvant être rapide, pour permettre une prévention adaptée en fonction du niveau de risque.

À l’arrêt du traitement par les agonistes de la GnRH, on peut observer une réversibilité de la perte osseuse d’autant plus complète qu’il s’agit de femmes jeunes avec initialement une DMO normale et que le traitement n’a pas été prolongé plus de 6 mois.

5 Dysgénésies gonadiques
Le syndrome de Turner est la dysgénésie gonadique féminine la plus fréquente (voir Item 42, chapitre 3).

Une diminution de la DMO est fréquente dans le syndrome de Turner, bien qu’elle puisse être liée en partie à la petite taille des pièces osseuses.

Au cours de l’adolescence, le déficit osseux apparaît s’accentuer du fait de l’hypogonadisme, avec une augmentation du remodelage osseux secondaire à la carence œstrogénique. Chez l’adulte non traité, l’insuffisance ovarienne accentue la perte osseuse et il existe une augmentation du risque de fracture.

Le traitement est avant tout fondé sur la correction de l’hypogonadisme; l’œstrogénisation est proposée dès que le diagnostic est posé, actuellement le plus souvent en association avec un traitement à l’hormone de croissance de manière à améliorer le pronostic statural. À l’âge adulte, la poursuite d’un traitement œstroprogestatif permet la prévention de la perte osseuse. La DMO vertébrale chez ces patientes bien traitées n’apparaît pas significativement différente de celle des sujets contrôles après ajustement pour la taille staturale.

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Hyperthyroïdies et traitements par hormones thyroïdiennes
L’hyperthyroïdie constitue une cause classique d’ostéoporose secondaire, même si la prise en charge actuelle fait que les signes osseux sont exceptionnellement révélateurs ou au premier plan. Cela justifie le dosage systématique de la TSH dans la recherche étiologique d’une ostéoporose secondaire.

Les hormones thyroïdiennes augmentent le remodelage osseux (fig. 7.5) du fait d’une augmentation du recrutement des unités élémentaires de remodelage et de leur fréquence d’activation. Il existe une balance négative entre résorption et formation osseuse qui prédomine sur l’os cortical.Une diminution de la DMO de 10 % à 20 % par rapport à des sujets de même âge et de même sexe a été rapportée dans beaucoup d’études chez les sujets hyperthyroïdiens. La prévalence des fractures attribuables à l’hyperthyroïdie reste mal appréciée, bien qu’un antécédent d’hyperthyroïdie soit un facteur de risque classique de la fracture du col du fémur chez le sujet âgé.

En l’absence d’hyperthyroïdie biologique, le risque osseux du traitement par hormones thyroïdiennes chez le patient hypothyroïdien n’a jamais été prouvé. L’administration de doses élevées d’hormones thyroïdiennes, telle qu’elle est réalisée dans le traitement du cancer thyroïdien différencié hormonodépendant, est en revanche susceptible d’augmenter le risque d’ostéoporose et doit conduire à une évaluation régulière de la DMO.

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Hypercortisolisme et corticothérapie
L’ostéoporose vertébrale est une des complications classiques d’un excès de corticoïdes, surtout chez la femme. Elle est souvent silencieuse, avant l’apparition de tassements vertébraux « en salve », et doit faire l’objet d’une prévention systématique.

Les effets osseux des glucocorticoïdes sont complexes, résultant d’effets directs sur le tissu osseux et d’effets indirects sur l’homéostasie calcique et la production des stéroïdes sexuels (fig. 7.6). Au niveau du tissu osseux, les corticoïdes inhibent la fonction ostéo-blastique et favorisent leur apoptose comme celle des ostéocytes, qui ont un rôle important dans la qualité de l’os. Ils favorisent par ailleurs l’activité ostéoclastique et donc la résorption osseuse par différents mécanismes, tels qu’une augmentation de la production du RANKL (facteur de l’ostéoclastogenèse) et une diminution de l’ostéoprotégérine (OPGR), inhibiteur de l’ostéoclastogenèse. La réduction de l’absorption intestinale du calcium et l’augmentation des pertes urinaires de calcium induites par l’excès de glucocorticoïdes favorisent par ailleurs un hyperparathyroïdisme secondaire, dont les conséquences osseuses sont encore amplifiées par l’augmentation de la sensibilité des cellules osseuses à la PTH. Enfin, un taux excessif de glucocorticoïdes favorise un hypogonadisme et peut, dans certaines causes, diminuer également la production des androgènes surrénaliens.L’ostéoporose induite par l’hypercortisolisme est essentiellement une ostéoporose à bas niveau de remodelage, mais avec tendance à l’hyperrésorption.

La diminution du volume osseux s’accompagne d’altérations de la microarchitecture trabéculaire, qui joue un rôle majeur dans la fragilité osseuse. On peut ainsi observer des fractures à DMO normale.

La diminution de la masse osseuse intéresse surtout les sites trabéculaires (corps vertébraux, côtes, radius) et apparaît de façon rapide, dans la première année de l’exposition aux corticoïdes. L’intensité de la perte osseuse reste difficile à prévoir sur le plan individuel. Les fractures vertébrales sont fréquentes chez les sujets exposés à un excès de glucocorticoïdes et sont présentes chez 20 % à près de 80 % des sujets atteints d’un syndrome de Cushing, quelle que soit sa causPlusieurs études cas-témoins ont permis d’objectiver une augmentation du risque de fractures, surtout vertébrales, mais aussi non vertébrales, chez les sujets ayant reçu une corticothérapie à partir d’une dose supérieure à 7,5 mg de prednisolone par jour pendant plus de 3 mois. La réversibilité de l’atteinte osseuse, après correction de l’hypercortisolisme ou arrêt de la corticothérapie, reste encore un sujet débattu en l’absence de données longitudinales suffisantes.

Chez les sujets devant débuter une corticothérapie, la prévention de l’ostéoporose justifie, avant le traitement, une évaluation précise du statut osseux (mesure de la DMO vertébrale et fémorale par DXA) et une recherche de tous les facteurs de risque (statut nutritionnel et vitaminocalcique, activité physique, tabagisme, hypogonadisme, etc.) pouvant être corrigés. La dose de corticoïdes est la plus faible possible, en donnant la préférence, chaque fois que possible, aux voies non orales et aux molécules à durée de vie courte.

Il faut proposer systématiquement une supplémentation vitaminocalcique. Les doses de calcium prescrites dépendent des apports alimentaires et, dans le syndrome de Cushing, de la calciurie, souvent élevée.

Les bisphosphonates tout comme le tériparatide ont une autorisation de mise sur le marché (AMM) pour le traitement de l’ostéoporose cortico-induite.

Un traitement de l’ostéoporose est préconisé en cas de corticothérapie de plus de 3 mois avec des doses d’équivalent prednisone supérieures à 7,5 mg par jour si le T-score est inférieur ou égal à –1,5 sur au moins un site.

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Hyperparathyroïdie primitive
(Voir Item 268, chapitre 22.)

L’hyperparathyroïdie est responsable d’ostéoporose, même lorsqu’elle est asymptomatique, et serait présente, en fonction du site osseux mesuré, chez 12 % à 52 % des patients.

La production continue de PTH stimule l’ostéoclastogenèse et donc la résorption osseuse, en augmentant, d’une part, la différenciation des ostéoclastes à partir de leurs précurseurs hématopoïétiques et, d’autre part, l’activité des ostéoclastes matures. Cet effet est indirect et passe par l’ostéoblaste, qui joue un rôle pivot tant dans les actions cataboliques que dans les actions anaboliques de la PTH sur l’os. Cette action prédomine au niveau de l’os cortical (tiers proximal du radius, fémur), l’os trabéculaire (vertèbres) étant en principe conservé. Une atteinte vertébrale est néanmoins souvent présente, notamment chez la femme en début de ménopause, car l’hyperparathyroïdie primitive est l’endocrinopathie la plus fréquente de la femme ménopausée (prévalence de l’ordre de 1 %) (fig. 7.10).La diminution de la masse osseuse reste souvent limitée, de l’ordre de 10 % par rapport aux valeurs normales pour l’âge, avec une évolution sur le plan individuel qui reste difficile à prédire. L’évolution de la masse osseuse après traitement est le plus souvent favorable, et son importance est fonction du type d’os (plus importante au niveau vertébral que périphérique), de la gravité de l’hyperparathyroïdie (taux de PTH et des phosphatases alcalines) et du niveau d’atteinte initiale.

L’augmentation du risque fracturaire chez les patients ayant une hyperparathyroïdie primitive reste un sujet débattu en l’absence de données concluantes. Les fractures intéressent le plus souvent les vertèbres et l’extrémité inférieure du radius, les métacarpes, mais rarement le col du fémur.

L’atteinte osseuse constitue un des éléments essentiels de décision de la conduite à tenir lorsque l’hyperparathyroïdie primitive est asymptomatique : la constatation d’un T-score inférieur à –2,5 est considérée comme une indication au traitement chirurgical.

Lorsque le traitement chirurgical n’est pas possible (pour différentes raisons), l’utilisation d’un agent antiostéoclastique (œstrogènes, raloxifène, bisphosphonates) ou de calcimimé-tique (cinacalcet) peut être discutée en fonction de la situation clinique, si le risque de fracture est avéré ou s’il existe déjà des fractures. En cas de non-indication du traitement chirurgical, une simple surveillance de l’état osseux et une réévaluation périodique (1 ou 2 ans) du risque fracturaire sont conseillées.

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Caractéristiques des ostéoporoses chez l’homme
A Au niveau de la définition

Il n’existe pas de valeur de T-score reconnue pour définir l’ostéoporose masculine. Des données transversales suggèrent que des valeurs absolues de la DMO seraient associées au même niveau de risque fracturaire dans les deux sexes. Par assimilation, la définition de l’ostéoporose chez l’homme correspond à un T-score inférieur ou égal à –2,5.

B Au niveau épidémiologique
Parmi les fractures de l’extrémité supérieure du fémur, 25 % à 30 % surviennent chez l’homme, et la prévalence des fractures vertébrales découvertes radiologiquement est similaire dans les deux sexes, affectant 10 % à 12 % des individus. En revanche, la fracture du radius distal (de type Pouteau-Colles) est beaucoup plus rare chez l’homme que chez la femme, ce qui s’explique avant tout par une taille des pièces osseuses plus importante chez les hommes que chez les femmes.

C Au niveau étiologique
Les ostéoporoses secondaires sont, en revanche, plus fréquentes chez l’homme que chez la femme (30 % à 70 % des cas). Les causes principales sont :

*l’hypercortisolisme;
*l’hypogonadisme (congénital ou acquis dont iatrogène avec, en particulier, le traitement du cancer de la prostate par castration chimique par analogue de la GnRH ou chirurgicale);
*l’alcoolisme.
D Au niveau thérapeutique
Les bisphosphonates et le tériparatide disposent d’une AMM dans le traitement de l’ostéoporose masculine.

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Points clés

  • Les pathologies endocriniennes représentent Ittiologie principale des ostéoporoses secondaires de la femme.
    *Toutes les situations entraînant un hypogonadisme prolongé exposent à un risque accru d’ostéoporose.
  • La carence œstrogénique provoque une augmentation du remodelage osseux au bénéfice de la résorption osseuse.
    *Un traitement par hormones thyroïdiennes à doses suppressives de la sécrétion de la TSH augmente la perte osseuse corticale et accroît le risque d’ostéoporose fémorale.
    *Les traitements par hormones thyroïdiennes à doses substitutives n’augmentent pas le risque d’ostéoporose.
    *L’atteinte osseuse de l’hypercortisolisme est précoce et prédomine sur l’os trabéculaire (tassements vertébraux).
  • L’évaluation du risque fracturaire est nécessaire chez tout sujet atteint de syndrome de Cushing ou d’hypercortisolisme.
  • Dans une hyperparathyroïdie primitive asymptomatique, l’existence d’une ostéoporose (T-score < –2,5) fait partie des critères de l’indication chirurgicale.
  • L’ostéoporose doit être recherchée systématiquement chez l’homme, au même titre que chez la femme, en cas d’hypogonadisme ou d’hypercortisolisme.
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Définition
L’hémochromatose primitive ou héréditaire est une maladie génétique conduisant à une surcharge en fer. Il s’agit de la maladie génétique la plus fréquente dans la population blanche. Sa prévalence est de 3 à 5 pour 1 000 personnes, mais la pénétrance de la mutation principale touchant le gène HFE (C282Y) est faible et variable.

Non traitée, elle s’accompagne fréquemment d’une atteinte endocrinienne, notamment d’un diabète, liée à la cytotoxicité du fer stocké en excès. La morbidité de la mutation n’est pas réellement évaluée sur le plan épidémiologique, mais les formes sévères peuvent conduire à une cirrhose et à une augmentation de la mortalité.

L’hémochromatose primitive doit être distinguée des nombreuses autres causes de surcharge en fer (tableau 8.1).auses de surcharge en fer.

Hémochromatoses génétiques ou primitives
–Mutations d’HFE (> 95 %)
–Mutations d’autres gènes (plus rares)
Surcharges en fer secondaires
–Transfusionnelles :
*thalassémie
*anémie sidéroblastique
–Surcharge alimentaire
–Maladie hépatique chronique :
*hépatite B ou C
*hépatopathie alcoolique
*porphyrie cutanée tardive
*stéatose hépatique
Causes diverses
–Hémosidérose africaine (alimentaire)
–Acéruléoplasminémie
–Atransferrinémie congénitale

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Le stock normal de fer est de 35 à 45 mg/kg chez l’homme, un peu inférieur chez la femme avant la ménopause (environ 35 mg/kg). La majorité du fer est incorporée dans l’hémoglobine (60 %), tandis que 10 % à 15 % sont retrouvés dans la myoglobine musculaire et les cyto-chromes (10 %). Le fer circulant, lié à la transferrine, ne représente qu’une faible proportion (1 %). Le foie (1 000 mg) et les macrophages du tissu réticulo-endothélial constituent les principaux sites de stockage du fer.

1 Dans les conditions physiologiques
De 1 à 2 mg de fer sont éliminés chaque jour par la transpiration et la desquamation des cellules cutanées et intestinales ou, chez la femme, pendant les règles. Cette perte est compensée par l’apport alimentaire. L’absorption intestinale du fer s’effectue au niveau du duodénum. Le fer alimentaire, réduit à l’état ferreux, est capté au pôle apical de l’entérocyte, puis internalisé grâce au transporteur membranaire DMT1 (divalent metal transporter 1). Il peut alors être stocké dans l’entérocyte sous forme de ferritine ou être relargué dans la circulation au pôle basolatéral grâce à la ferroportine (fig. 8.1A). Dans le sang, le fer circule lié à la transferrine. Le complexe est capté par les cellules utilisatrices, en particulier l’hépatocyte, grâce aux récepteurs de la transferrine (TfR1 et TfR2) et s’accumule dans les cellules sous forme de ferritine. Les macrophages récupèrent le fer ferrique des érythrocytes vieillissants et le refixent sur la transferrine pour une distribution aux tissus.Il n’y a pas de régulation de l’élimination du fer; c’est donc son absorption intestinale qui conditionne le stockage du fer dans l’organisme et explique qu’une dysrégulation de l’absorption puisse conduire à une surcharge en fer.

L’expression des transporteurs (DMT1 et ferroportine) dépend donc des stocks de fer intracellulaire. L’hepcidine, peptide de 25 acides aminés synthétisé par le foie, est l’hormone de régulation de l’absorption du fer. Elle agit sur la ferroportine pour inhiber le transport du fer, entraînant une diminution de son absorption et une augmentation de sa rétention dans les macrophages et les cellules de Kupffer (macrophages résidents du foie). La synthèse de l’hepcidine diminue lorsque les besoins en fer augmentenDans l’hémochromatose primitive
L’expression des transporteurs DMT1 et ferroportine est augmentée de manière inappropriée, ce qui conduit à une absorption de fer supérieure aux pertes journalières et à son accumulation progressive dans l’organisme (fig. 8.1B).

L’hepcidine est effondrée, d’où une majoration du transport en fer; le mécanisme par lequel les protéines impliquées dans la survenue d’une hémochromatose régulent l’expression de l’hepcidine est mal connu.

En cas d’inflammation, la synthèse de l’hepcidine est augmentée. De ce fait, dans les anémies inflammatoires, il existe une diminution de l’absorption du fer et une rétention élevée dans le système macrophagique.

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Aspects génétiques
L’hémochromatose primitive, représentant plus de 95 % des cas, est liée au gène HFE. Il code une protéine du complexe majeur d’histocompatibilité de classe I, HLA3. Deux mutations ponctuelles, C282Y et H63D, ont été identifiées.

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Manifestations cliniques
Le fer s’accumule progressivement dans le foie, le cœur et les tissus endocrines. Les premiers symptômes sont observés entre 40 et 50 ans chez l’homme. Chez la femme, l’accumulation du fer est retardée par les menstruations et la maladie ne devient généralement patente qu’après la ménopause. Les facteurs de variabilité de l’expression de la maladie sont, outre le sexe, les facteurs génétiques, qui conditionnent le degré de surcharge en fer, et les facteurs d’environnement (rôle aggravant d’une hépatopathie préexistante ou d’un alcoolisme chronique associé). La pénétrance clinique de l’homozygotie C282Y étant très faible, un pourcentage élevé de patients n’aura aucune expression phénotypique de la maladie. En pratique, il est impossible de prédire quels sujets homozygotes pour la mutation C282Y évolueront vers une hémochromatose symptomatique.

Dans sa forme historique, symptomatique, le tableau clinique de l’hémochromatose associe une mélanodermie diffuse (fig. 8.2), un diabète sucré, une hépatomégalie (ou « cirrhose bronzée » avec diabète), une cardiomyopathie, des arthralgies et d’autres endocrinopathies (tableau 8.2).À l’heure actuelle, le diagnostic est le plus souvent effectué à un stade plus précoce voire pré-symptomatique; l’enjeu est alors d’éviter la survenue des complications. En effet, en l’absence de cirrhose ou de diabète, la maladie n’entraîne pas de réduction significative de l’espérance de vie. La fréquence respective des signes et symptômes présents au moment du diagnostic clinique est donnée dans le tableau 8.2. L’association d’une asthénie inexpliquée, d’arthralgies et d’une élévation des aminotransférases ALAT est considérée comme évocatrice – c’est la règle des trois « A ».

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Atteinte hépatique
Une élévation modérée des enzymes hépatiques, prédominant sur les ALAT, et/ou une hépato-mégalle sont observées chez 95 % des patients symptomatiques. L’évolution vers une cirrhose et ses complications explique 90 % des décès dus à l’hémochromatose. Les patients cirrho-tiques porteurs d’une hémochromatose ont un risque de carcinome hépatocellulaire de 5 % par an.

B Atteinte cardiaque
L’hémochromatose s’accompagne d’un risque de cardiopathie dilatée.Atteinte endocrinienne
1 Diabète (+++)

L’hémochromatose peut être responsable d’un diabète. Le risque de diabète est d’autant plus important que le patient a déjà une atteinte hépatique. Le mécanisme principal est une accumulation pancréatique du fer, conduisant à des phénomènes oxydatifs et favorisant la survenue d’une apoptose des cellules p des îlots de Langerhans, les cellules a responsables de la sécrétion de glucagon restant normales, comme la sécrétion exocrine. Il s’agit donc essentiellement d’un diabète lié à une insulinopénie ; mais la surcharge en fer pourrait également être responsable d’une insulinorésistance. Une fois déclaré, le diabète évolue en effet pour son propre compte; il n’y a généralement pas de régression avec la déplétion martiale.

2 Hypogonadisme hypogonadotrope (+++)
C’est la cause la plus fréquente d’endocrinopathie au cours de l’hémochromatose, en dehors du diabète. L’hypogonadisme peut se révéler par une impuissance chez l’homme, une aménorrhée chez la femme, une perte de la libido ou une ostéoporose. Il s’agit d’une insuffisance gonadotrope liée à une accumulation de fer dans l’hypophyse touchant préférentiellement les cellules gonadotropes. Les saignées ne permettent pas d’obtenir une récupération.

D Atteinte articulaire
L’arthropathie est fréquente, survenant chez un tiers à deux tiers des patients. L’atteinte la plus caractéristique est une arthrite chronique touchant les deuxième et troisième métacarpo-phalangiennes, responsable d’une « poignée de main douloureuse ». Les interphalangiennes proximales, les poignets, les genoux, les chevilles, les épaules et les hanches peuvent aussi être affectés. Le mécanisme en est mal connu.

L’hémochromatose est une cause importante de chondrocalcinose (+++).

E Atteinte cutanée
La mélanodermie (voir fig. 8.2) survient tardivement au cours de l’évolution, conduisant à une coloration grisâtre ou brune des téguments, parfois limitée aux zones découvertes (visage, cou, dos des mains, avant-bras, partie inférieure des jambes) et aux parties génitales. Elle est souvent visible sur la muqueuse buccale.

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Diagnostic de l’hémochromatose
La découverte du gène HFE a profondément modifié la stratégie diagnostique. Il faut cependant se rappeler que la mutation C282Y à l’état homozygote n’est pas suffisante pour produire la maladie. On doit différencier deux situations :

*la suspicion d’hémochromatose devant des manifestations cliniques ou paracliniques;
*le dépistage familial chez un patient asymptomatique apparenté au premier degré à un sujet génétiquement atteint.
A Suspicion d’hémochromatose
La stratégie diagnostique est schématisée sur la figure 8.3.Première étape
La première étape consiste à affirmer biochimiquement l’anomalie du métabolisme du fer. Il faut mesurer le coefficient de saturation de la transferrine (CS-Tf), qui constitue le marqueur le plus sensible et spécifique de la maladie (+++) pour un seuil fixé à 45 %.

Le dosage de la concentration plasmatique de la ferritine permet d’estimer les réserves en fer de l’organisme. Une valeur supérieure à 300 µg/l chez l’homme et à 200 µg/l chez la femme est en faveur d’une surcharge en fer, mais de fausses augmentations sont observées au cours des pathologies inflammatoires. Par ailleurs, au cours de l’hémochromatose, la ferritinémie n’augmente que tardivement lorsque survient la surcharge hépatique en fer. Son dosage permet d’apprécier le stade évolutif de la maladie (+++).

CS-Tf supérieur à 45 %
À cette condition, la suspicion d’hémochromatose primitive est forte. L’élévation de la ferritinémie renforce cette présomption, mais sa normalité n’élimine pas le diagnostic (+++).

CS-Tf inférieur à 45 %
À cette condition, l’hémochromatose primitive peut être éliminée. La constatation fréquente d’une ferritinémie élevée associée à un CS-Tf bas doit faire évoquer une autre cause de surcharge en fer (voir tableau 8.1), en particulier l’hépatosidérose dysmétabolique, ou MASH (metabolic dysfunction-associated steatohepatitis), observée au cours des syndromes d’insulinorésistance, associant une élévation des ALAT, des yGT et de la ferritinémie à un foie stéatosique à l’échographie. Il s’agit d’une cause fréquente de surcharge en fer, susceptible d’évolution vers la fibrose et la cirrhose hépatiques.

Les autres causes sont exceptionnelles, représentées par l’acéruléoplasminémie héréditaire, associant diabète, surcharge hépatique en fer et signes neurologiques (syndrome extrapyramidal, ataxie, démence).

2 Deuxième étape
La deuxième étape consiste à rechercher une mutation C282Y ou H63D du gène HFE, par analyse génétique, après consentement écrit du patient.

Patient homozygote C282Y ou hétérozygote compositeLorsque la ferritinémie est élevée, il existe un risque de retentissement viscéral et métabolique.

Il est indispensable de pratiquer des examens complémentaires : glycémie à jeun, dosage des transaminases, échographie abdominale, ECG et, en fonction du contexte clinique, radiographies articulaires, échographie cardiaque, bilan hormonal avec dosage de testostérone chez l’homme, ostéodensitométrie osseuse s’il existe des cofacteurs d’ostéoporose.

En fonction des résultats, il est nécessaire de confier le patient à un spécialiste. Le recours au spécialiste est systématique si la ferritine est supérieure à 1 000 µg/l, pour discuter la réalisation d’examens complémentaires (mesure de la surcharge hépatique en fer par IRM quantitative). La ponction-biopsie hépatique (voir encadré) n’est pratiquée qu’en cas de suspicion de fibrose et pour rechercher des signes de gravité (cirrhose, carcinome hépatocellulaire).

Patient hétérozygote simplex ou absence de mutation
Si la recherche de mutation est négative ou si le patient est hétérozygote simplex pour C282Y ou H63D, il faut être très critique vis-à-vis du diagnostic d’hémochromatose.

Il faut se souvenir qu’une élévation du CS-Tf n’est pas totalement spécifique de l’hémochromatose (tableau 8.4). Il faut donc toujours confronter les données clinicobiologiques.

Tableau 8.4

Causes d’élévation du coefficient de saturation de la transferrine (CS-Tf).

–hemochromatoses génétiques ou primitives
–Supplémentations martiales excessives
–Anémies hémolytiques
–Dysérythropoïèses
–Cytolyses majeures (hépatite C)
–Insuffisances hépatocellulaires
–Surcharges en fer secondaires
(Source : CEEDMM, 2021.)

Si le contexte est très évocateur et qu’il existe une élévation persistante de la ferritinémie, on évoquera une autre forme d’hémochromatose héréditaire (hémochromatose juvénile, mutation du gène du récepteur de la transferrine; voir tableau 8.2), à rechercher par des tests génétiques de seconde intention. En pareil cas, on propose le plus souvent une ponction-biopsie hépatique qui peut donner des arguments en faveur d’une probable hémochromatose héréditaire (index de surcharge ferrique, distribution hépatocytaire du fer).

Place de la biopsie hépatique

La biopsie hépatique, autrefois couramment utilisée pour le diagnostic, n’est donc utilisée actuellement que :

*soit à visée diagnostique, en cas d’anomalie ferrique avec enquête génétique négative;
*soit à visée pronostique, en cas de suspicion d’atteinte hépatique sévère.Prise en charge thérapeutique
La prise en charge est conditionnée par le stade de la maladie (voir tableau 8.5). Ses objectifs sont à la fois d’éliminer l’excès de fer (traitement d’induction ou d’attaque) et d’éviter la reconstitution des stocks de fer (traitement d’entretien) (tableau 8.6).Moyens thérapeutiques
1 Saignées

Les saignées constituent le traitement de référence. Elles ont démontré leur efficacité sur la survie des patients et la régression d’un certain nombre de complications liées à la surcharge martiale (tableau 8.7). De plus, elles permettent d’éviter l’installation de complications irréversibles, si l’observance est satisfaisante.

Tableau 8.7

Bénéfices attendus des saignées.

Asthénie Amélioration importante
Mélanodermie Disparition
Perturbations du bilan hépatique Normalisation
Hépatomégalie Résolution habituelle
Hépatalgies Disparition, sauf pathologie hépatobiliaire
Cirrhose Irréversible
Cardiomyopathie Amélioration partielle, non certaine
Arthralgies Amélioration partielle
Hypogonadisme Peu réversible
Diabète En général irréversibleLes contre-indications permanentes à la réalisation des saignées sont l’anémie sidéroblastique, la thalassémie majeure et les cardiopathies sévères non liées à l’hémochromatose.

Les contre-indications temporaires sont :

*l’hypotension artérielle (PAS < 100 mmHg);
*une concentration d’hémoglobine < 11 g/dl;
*la grossesse;
*une artériopathie sévère des membres inférieurs;
*une fréquence cardiaque < 50/min ou > 100/min.
Lorsque le réseau veineux insuffisant ne permet pas la réalisation des saignées, on peut avoir recours à l’érythraphérèse ou au traitement chélateur.

2 Autres traitements
Érythraphérèse
L’érythraphérèse permet, à l’aide d’un séparateur de cellules, de soustraire en une seule fois un volume plus important d’hématies que les saignées.Mesures associées
L’approche thérapeutique doit également comporter :

*des conseils diététiques visant à supprimer les boissons alcoolisées, notamment tant que la désaturation n’est pas obtenue, et à éviter l’apport en vitamine C qui favorise l’absorption du fer; en revanche, un régime pauvre en fer n’est pas indiqué;
*le traitement symptomatique des complications viscérales et métaboliques, lorsqu’elles sont présentes. Leur prise en charge n’est pas différente de celle des mêmes pathologies survenant chez des patients ne présentant pas d’hémochromatose.
En cas de diabète, la surveillance sur le taux de l’hémoglobine glyquée est faussée du fait des saignées (+++).Traitement d’induction
Au cours du traitement d’induction, le rythme des saignées est hebdomadaire; il peut être adapté au niveau de la ferritinémie et à la tolérance du patient. Le traitement d’induction doit être poursuivi jusqu’à ce que la ferritinémie soit inférieure à 50 µg/l. Le volume de sang prélevé varie avec le poids du sujet et ne doit pas dépasser 550 ml. La surveillance régulière vise surtout à contrôler l’évolution de la réduction de la surcharge martiale et à éviter la survenue d’une anémie.

2 Traitement d’entretien
Lorsque la ferritinémie est inférieure à 50 µg/l, on passe au traitement d’entretien, dont l’objectif est de maintenir la ferritine au même taux, en espaçant les saignées tous les 2 à 4 mois en fonction des patients.

C Résultats
La déplétion martiale entraîne une amélioration de l’état général, en 3 à 6 mois, avec atténuation de la mélanodermie, régression de l’hépatomégalie en l’absence de cirrhose et amélioration de l’état myocardique, mais elle entraîne peu de changement de l’état articulaire (voir tableau 8.7).

En cas de cirrhose évoluée, une transplantation hépatique peut être envisagée, mais le résultat de la transplantation est moins bon dans cette indication, du fait notamment des complications cardiaques.

Le diabète ne disparaît pas avec la déplétion martiale, qui facilite cependant son équilibration.

On observe une mauvaise réponse de l’insuffisance gonadique, qui doit être compensée par un traitement hormonal substitutif en l’absence de contre-indication.

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Points clés

  • La physiopathologie de l’hémochromatose a été éclaircie par la découverte de l’hepcidine, nouveau régulateur du métabolisme du fer. Néanmoins, de nombreuses inconnues persistent encore.
  • La suspicion diagnostique existe dès que le coefficient de saturation de la transferrine (CS-Tf) est inférieur à 45 %.
  • La forme génétique la plus fréquente est due à la mutation homozygote C282Y du gène HFE.
    *La recherche de complications est systématique dès que la ferritine est élevée.
    *Le traitement par saignées dès que la ferritine est élevée a pour but d’éviter les complications.
    *Les principales complications sont le diabète, la cirrhose et le cancer du foie, l’hypogonadisme, les atteintes articulaires.
    *Le dépistage génétique a radicalement modifié la stratégie diagnostique.
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Définitions
A Notion de facteur de risque

II s’agit d’une situation associée à une majoration du risque de survenue de complications cardiovasculaires ischémiques. Il peut s’agir :

*d’un état physiologique (vieillissement, ménopause);
*d’un état pathologique (hypertension artérielle [HTA], diabète, obésité abdominale);
*d’une habitude de vie (tabagisme, sédentarité).
S’il existe un lien de causalité directe entre l’agent et la maladie, il s’agit d’un authentique « facteur de risque ».

Pour que le facteur de risque soit cliniquement pertinent, il doit satisfaire plusieurs conditions :

*intensité de la relation;
*gradient de risque élevé pour chaque écart type de variation du facteur;
*relation dose-effet : le risque de développer la maladie augmente proportionnellement selon le niveau d’exposition au facteur de risque;
*indépendance : l’association entre le facteur de risque et la maladie persiste quel que soit le niveau des autres facteurs de risque – la relation persiste en analyse multivariée;
*concordance : association établie par plusieurs études épidémiologiques convergentes;
*séquence temporelle : l’exposition au facteur de risque précède la maladie;
*cohérence physiopathologique : caractère plausible de l’association sur des données expérimentales;
*réversibilité : la correction du facteur de risque lors d’études contrôlées permet de prévenir la maladie ou d’en réduire l’incidence; cette démonstration essentielle établit formellement la preuve de la causalité.

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Prévention primaire et secondaire
1 Prévention primaire

La prévention primaire consiste à éviter la survenue ultérieure d’un événement cardiovasculaire en corrigeant les facteurs de risque identifiés chez des patients indemnes de tout événement cardiovasculaire.

2 Prévention secondaire
La prévention secondaire consiste à éviter la survenue d’un événement cardiovasculaire chez des patients ayant déjà présenté un événement cardiovasculaire en corrigeant les facteurs de risque identifiés et en agissant sur la maladie cardiovasculaire constituée.

La notion de prévention secondaire et primaire est complétée par le classement des patients en fonction du risque cardiovasculaire (voir plus loin).

Les patients en prévention secondaire sont par définition à haut risque cardiovasculaire ou à très haut risque dans les nouvelles recommandations européennes. Il existe des situations où les patients sont à haut risque, mais en prévention primaire; c’est le cas par exemple des patients qui ont une sténose de la carotide supérieure à 50 % ou un cumul de facteur de risque exceptionnel.

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Facteurs de risque à prendre en compte
Les facteurs de risque cardiovasculaire modifiables et non modifiables sont représentés dans la figure 9.1 (Afssaps, 2005).Facteurs de risque non modifiables
Ces facteurs doivent être pris en considération car ils déterminent puissamment le niveau de risque absolu et donc l’amplitude du bénéfice absolu après une intervention :

*homme âgé de 50 ans ou plus;
*femme âgée de 60 ans ou plus ou ménopausée;
*antécédents familiaux de maladie coronarienne précoce :
–infarctus du myocarde ou mort subite avant l’âge de 55 ans chez le père ou le frère;
–infarctus du myocarde ou mort subite avant l’âge de 65 ans chez la mère ou la sœur.
B Facteurs de risque modifiables
Leur identification participe à l’estimation du risque et ce sont eux qui constituent la cible des actions de prévention :

*tabagisme (actuel dès 1 cigarette par jour ou sevré depuis moins de 3 ans);
*hypercholestérolémie avec LDL-cholestérol (LDL-c) élevé;
*HDL-cholestérol (HDLc) inférieur à 0,40 g/l (1 mmol/l), quel que soit le sexe;
*HTA;
*diabète, traité ou non, et syndrome métabolique (voir plus loin);
*insuffisance rénale chronique.
À l’inverse, le HDLc supérieur ou égal à 0,60 g/l (1,5 mmol/l) constitue un facteur de protection : soustraire alors « un risque » à la somme des facteurs de risque cardiovasculaire.

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Méthodes d’estimation du risque vasculaire individuel
1 Concept

L’estimation du risque vasculaire d’un sujet consiste à recenser l’ensemble des facteurs de risque cardiovasculaire – ils ont un caractère multiplicatif – et à déduire ainsi la probabilité de survenue d’une complication ischémique. Les facteurs de risque ont un effet synergique sur le niveau de risque.

L’estimation du risque peut être quantitative, exprimée en probabilité de présenter une complication ischémique en 10 ans, en employant des équations multifactorielles. Le principe de ces équations est d’éliminer les facteurs redondants. De nombreuses équations sont utilisables. L’équation la plus connue est celle tirée de l’étude de Framingham (États-Unis), pour laquelle des modèles récents ont été proposés. Cette équation a tendance à surestimer le risque dans les pays à bas risque.

Les équations européennes SCORE2 (Systematic COronary Risk Evaluation 2 ; valable de 40 à 69 ans) et SCORE2-OP (SCORE-Old People ; valable à partir de 70 ans) évaluent le risque de survenue à 10 ans d’une ischémie coronarienne ou d’un accident vasculaire cérébral (AVC), mortels ou non mortels, en prévention primaire cardiovasculaire (fig. 9.2). Elles prennent en compte le niveau de risque cardiovasculaire du pays concerné. Ce sont ces équations qui ont été retenues en France pour classifier le risque cardiovasculaire.

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2 Estimation du risque en pratique
Interrogatoire
L’interrogatoire consiste à :

*recueillir des antécédents familiaux cardiovasculaires;
*rechercher des antécédents personnels ischémiques ou des signes fonctionnels évocateurs tels qu’angor, artériopathie des membres inférieurs (AOMI), accident ischémique transitoire (AIT);
*recueillir des facteurs de risque cardiovasculaire.
Examen
L’examen consiste à :

*rechercher un athérome asymptomatique : pouls périphérique, souffles vasculaires;
*rechercher un athérome infraclinique :
–ECG basal : recherche de troubles de repolarisation, de séquelles de nécrose, d’hypertrophie ventriculaire gauche électrique;
–échographie de la carotide : la mesure de l’épaisseur intima-média de la carotide et la recherche systématique de plaques ne sont pas recommandées en pratique courante dans la stratification du risque.
3 Estimation du risque absolu (défini par la probabilité de présenter la maladie dans un laps de temps donné)
L’estimation repose sur l’utilisation d’équations ou de tables, ou la simple sommation des facteurs de risque cardiovasculaire :

*un risque d’événement voisin de 10 % à un horizon de 10 ans est considéré comme faible;
*un risque supérieur à 20 % est considéré comme important – c’est le niveau de risque coronarien observé dans les suites d’un infarctus du myocarde;
*un risque entre 10 % et 20 % est considéré comme intermédiaire;
*un risque supérieur à 30 % est un risque majeur.
Lors de l’estimation du risque, il faut prendre en compte le risque coronarien et le risque d’AVC (un tiers du risque coronaire), le poids relatif de ce dernier s’accentuant avec le vieillissement.

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II Tabac
A Prévalence du tabagisme en France

En 2021, 24,5 % des adultes âgés de 18 à 75 ans fument quotidiennement. La prévalence diminue avec le niveau d’étude et le niveau de revenus. Chez les femmes enceintes, 18 % fument toujours au troisième trimestre de grossesse.

B Risque cardiovasculaire et tabac
Parmi les fumeurs ayant débuté à l’adolescence et poursuivant leur intoxication, 50 % mourront du fait de complications directement liées au tabagisme. La relation dose-effet (complications ischémiques) est continue et se manifeste dès la première cigarette quotidienne dans les études épidémiologiques puissantes. Même le tabagisme passif accroît le risque de complication vasculaire ischémique.

La diminution du risque ischémique après sevrage est rapide : abaissement des deux tiers du surcroît de risque à l’issue de la première année et retour presque au risque de base après la troisième année de sevrage. Le tabagisme agit surtout par son mécanisme prothrombotique, ce qui explique l’effet nocif précoce et le bénéfice rapide lors du sevrage.

Le tabac prédispose plus particulièrement au risque de maladie coronarienne et d’AOMI :

*risque relatif (RR) = 3 de maladie coronarienne chez les fumeurs (> 20 cigarettes par jour) par rapport aux non-fumeurs;
*RR = 5 d’infarctus du myocarde et de mort subite chez les grands fumeurs inhalant la fumée;
*RR = 2 à 7 d’AOMI selon les études et l’intensité de la consommation;
*RR = 1,5 à 2 d’AVC.
La poursuite du tabagisme après l’apparition de la maladie aggrave fortement le pronostic : dans le cas de la maladie coronarienne avérée, le risque de décès ou la nécessité d’une intervention itérative sont multipliés par un facteur 1,5 à 2,5 en cas de tabagisme persistant.

L’association tabagisme et contraception œstroprogestative comporte une nocivité particulière par majoration du risque thrombo-embolique.

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Hyperlipidémies
A Rappel succinct sur le métabolisme lipidique

On décrit plusieurs lipoprotéines, qui sont des particules en charge du transport des lipides dans le plasma :

*les chylomicrons, synthétisés dans la cellule intestinale, qui transportent les lipides d’origine alimentaire;
*les VLDL (very low density lipoproteins), synthétisées dans le foie, contenant du cholestérol et des triglycérides; ceux-ci sont hydrolysés dans la circulation en IDL (intermediate density lipoproteins) puis en LDL (low density lipoproteins) ;
*les LDL sont captées au niveau des cellules périphériques et hépatiques par un récepteur spécifique, le LDL-récepteur qui est, entre autres, sous le contrôle de la proprotéine convertase subtilisine/kexine de type 9 (PCSK9);
*les HDL (high density lipoproteins), produites par le foie, qui jouent un rôle essentiel dans la captation du cholestérol dans les tissus périphériques pour le rapporter au foie en vue de sa dégradation (voie de retour du cholestérol).
Parmi, les enzymes clés du métabolisme lipidique, citons la lipoprotéine lipase, qui est en charge de la dégradation des triglycérides au sein des chylomicrons et des VLDL.

B Relations
La morbimortalité cardiovasculaire est associée à :

*une augmentation du LDL-cholestérol (LDLc);
*une augmentation des triglycérides (TG);
*une diminution du HDL-cholestérol (HDLc).
L’hypertriglycéridémie constitue un facteur de risque cardiovasculaire moins puissant que l’augmentation du LDLc. L’hypertriglycéridémie alliée à un taux de HDLc diminué est associée à une augmentation du risque cardiovasculaire (dans le cadre du syndrome métabolique).

La diminution du HDLc est un marqueur de risque indépendant puissant; en revanche, des données récentes suggèrent que ce ne serait pas un facteur de risque indépendant. On insiste de plus en plus sur la fonctionnalité des HDL, qui peut être altérée dans certaines situations cliniques (diabète par exemple). Le dosage du HDLc demeure utile en prédiction cardiovasculaire; en revanche, normaliser sa concentration ne constitue plus une cible.

Les facteurs de risque cardiovasculaire favorisent l’athérosclérose, dont les conséquences sont la sténose artérielle ischémique chronique (angor d’effort, claudication intermittente, etc.) et les pathologies vasculaires aiguës par rupture de la plaque d’athérome (syndrome coronaire aigu, AVC ischémique, ischémie aiguë d’un membre inférieur, etc.) (voir Item 218). La physiopathologie de l’athérosclérose est complexe et ne rentre pas dans le cadre de ce chapitre. En résumé, HTA, tabagisme, diabète et dyslipidémies induisent des dysfonctions endothéliales et le dépôt des lipoprotéines athérogènes (principalement les LDL). Le temps de séjour allongé et l’environnement inflammatoire local provoquent l’oxydation des LDL dans la paroi artérielle, qui ne sont alors plus reconnues par le récepteur LDL-R. L’hypothèse physiopathologique majeure implique le recrutement de macrophages (entre autres types cellulaires) au niveau de la plaque naissante, qui, via des récepteurs de type SR-A, internalisent les LDL oxydées et se transforment en cellules spumeuses (chargées de gouttelettes cytoplasmiques d’esters de cholestérol), marqueur histologique des plaques d’athérome

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C Diagnostic positif d’une hyperlipidémie
1 Signes évocateurs

Hypercholestérolémies
Parfois, des dépôts lipidiques banals sont observés :

*arc cornéen (valeur sémiologique avant 60 ans);
*xanthélasma (valeur sémiologique avant 60 ans)Plus rarement, des xanthomes sont retrouvés :

xanthomes tendineux :
extenseurs des doigts (fig. 9.4)tendons calcanéens (fig. 9.5);
xanthomes plans cutanés, xanthomes tubéreux (uniquement les formes homozygotes) (fig. 9.6).Hypertriglycéridémies
Exceptionnellement, un syndrome hyperchylomicronémique peut être observé : hépatomégalie stéatosique, douleurs abdominales, xanthomatose éruptive, lipémie rétinienne (fig. 9.7).

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2 Complications des hyperlipidémies
Hypercholestérolémies
Complications athéromateuses parfois révélatrices de l’hyperlipidémie : insuffisance coronaire (infarctus du myocarde), artériopathie des membres inférieurs, AVC.

Hypertriglycéridémies
Rarement, une pancréatite aiguë peut être observée, surtout lors des hyperchylomicronémies. Le risque est majoré selon la triglycéridémie : on considère classiquement que le risque se manifeste pour des triglycérides inférieurs à 10 g/l. Il dépend principalement des antécédents personnels et de l’intensité maximale des pics de triglycéridémie.

3 Bilan lipidique
Ce bilan est orienté dans le cadre :

*d’une enquête familiale devant une dyslipidémie chez un apparenté;
*d’une pathologie associée ou d’une prescription induisant une dyslipidémie secondaire;
*de la présence d’un ou de plusieurs facteurs de risque coexistants (estimation du risque cardiovasculaire absolu).
Ses modalités de réalisation sont les suivantes :

*il doit être effectué après 12 heures de jeûne;
*étant prescrit devant un facteur de risque cardiovasculaire ou une complication, il se doit d’être complet pour mieux stratifier le risque et il doit être répété en cas d’anomalies pour confirmation;
*si les anomalies lipidiques ne sont pas suffisamment importantes pour justifier un traitement, le bilan lipidique doit alors être contrôlé tous les 3 ans, sauf pour les diabétiques de type 2 chez qui il doit être vérifié annuellement;
*comme l’âge est un facteur de risque, il est logique que le bilan lipidique soit contrôlé systématiquement vers la cinquantaine chez les hommes et la soixantaine chez les femmes.
L’exploration d’une anomalie lipidique (EAL) comporte :

*une mention de l’aspect du sérum (les hypertriglycéridémies comportent systématiquement un aspect trouble du sérum);
*le dosage du cholestérol total, des triglycérides et du HDLc;
*le calcul du LDLc avec la formule de Friedewald (avec Ct correspondant au cholestérol total) :
–LDLc = Ct – HDLc – TG/5 (g/l) (formule utilisable si TG < 3,4 g/l);
–LDLc = Ct – HDLc – TG/2,19 (mmol/l) (formule utilisable si TG < 3,9 mmol/l).
Le calcul du LDLc est indispensable pour affirmer le caractère athérogène d’une hyperlipidémie. En cas de triglycérides supérieurs à 3,4 g/l (3,9 mmol/l), la formule de Friedewald n’est plus valide pour calculer le LDLc; il faut alors réaliser un dosage direct du LDLc.

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Diagnostic étiologique d’une hyperlipidémie
1 Hyperlipidémies secondaires

Les hyperlipidémies secondaires s’améliorent avec un traitement à visée étiologique, sans employer d’hypolipémiants, ici inutiles voire dangereux dans certaines situations – par exemple risque d’effet secondaire musculaire sous statine lors de l’hypothyroïdie. Une hyperlipidémie peut se rencontrer dans les situations suivantes.

Endocrinopathies
Hypothyroïdie
C’est l’une des principales causes d’hyperlipidémie secondaire. Elle est caractérisée par une hypercholestérolémie avec augmentation du LDLc et aussi du HDLc.

Hypercortisolisme
L’hypercortisolisme s’accompagne d’une augmentation des triglycérides et d’une diminution du HDLc.

Maladies rénales
Insuffisance rénale
L’insuffisance rénale s’accompagne d’une augmentation des triglycérides.

Syndrome néphrotique
Ce syndrome est à l’origine d’une augmentation du cholestérol et des triglycérides.

Atteinte hépatique
Cholestase
Il est observé, lors d’une cholestase, une augmentation du cholestérol qui peut être importante.

Médicaments
Plusieurs médicaments peuvent occasionner des hyperlipidémies :

*la ciclosporine (hypercholestérolémie prépondérante avec interaction médicamenteuse prévisible sous statine);
*les corticoïdes (augmentation des triglycérides, effet sur le cholestérol variable);
*les œstrogènes par voie orale (éthinyl-œstradiol à dose contraceptive, hypertriglycéridémie avec HDLc conservé);
*les rétinoïdes (essentiellement sur un terrain prédisposé à une hyperlipidémie combinée familiale);
*l’interféron alpha;
*certains antirétroviraux : ils peuvent générer des hypertriglycéridémies majeures, le plus souvent chez des malades prédisposés;
*les neuroleptiques : certains de troisième génération (hypertriglycéridémie prépondérante);
*les diurétiques thiazidiques, les bêta-bloquants non sélectifs sans activité sympathomimé-tique intrinsèque (hypertriglycéridémie discrète);
*certains traitements anticancéreux : inhibiteurs mTOR qui peuvent entraîner une augmentation du cholestérol (LDLc) et des triglycérides.

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ilan minimal d’identification d’une dyslipidémie secondaire
Les examens sont guidés par le contexte et la clinique : TSH, créatininémie, protéinurie, bandelette urinaire ± phosphatases alcalines.

À part, l’hyperlipidémie associée au diabète de type 2 et au syndrome métabolique

Il ne s’agit pas précisément d’une hyperlipidémie secondaire dans la mesure où la dyslipidémie observée au cours du diabète de type 2 ne régresse pas après normalisation de la glycémie. Cette dyslipidémie fréquente est associée à l’état d’insulinorésistance notée au cours du syndrome métabolique et du diabète de type 2.

Le syndrome métabolique, avec ou sans diabète de type 2, est très fréquent, observé dans 10 % à 25 % de la population adulte et témoigne d’un état d’insulinorésistance. Son diagnostic est retenu en cas de présence d’au moins trois des cinq facteurs suivants (critères NCEP/ ATP III) (tableau 9.1) :

Tableau 9.1

Définition du syndrome métabolique (critères NCEP III).

Facteur de risque Niveau seuil
Obésité abdominale
–Homme
–Femme
Tour de taille (+++)
>102 cm
> 88 cm
Triglycérides ≥ 1,5 g/l
HDL-cholestérol
–Homme
–Femme
< 0,4 g/l
< 0,5 g/l
Pression artérielle ≥ 130/85 mmHg
Glycémie à jeun ≥ 1,10 g/l
Le surpoids et l’obésité sont associés à l’insulinorésistance et au syndrome métabolique ; cependant, l’obésité androïde est mieux corrélée au syndrome métabolique que l’indice de masse corporelle (IMC) : la mesure du tour de taille est recommandée pour identifier le syndrome métabolique.

(Source : CEEDMM, 2021.)

*obésité androide : périmètre abdominal > 102 cm chez l’homme et > 88 cm chez la femme;
*triglycérides > 1,5 g/l;
*HDLc bas : < 0,40 g/l chez l’homme, < 0,50 g/l chez la femme;
*pression artérielle > 130/85 mmHg (ou HTA traitée);
*glycémie à jeun > 1,10 g/l.
Le syndrome métabolique est associé à un risque cardiovasculaire augmenté.

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Hyperlipidémies primaires
Les hyperlipidémies primaires sont classifiées en :

*hypercholestérolémies isolées;
*hypertriglycéridémies isolées;
*hyperlipidémies mixtes.
Il existe, par ailleurs, une classification historique, la classification de Fredrickson, fondée sur le phénotype lipidique (fig. 9.8). Les classifications des hyperlipidémies primaires sont présentées sur le tableau 9.2.

Tableau 9.2

Classification des hyperlipoprotéinémies.

Classification simplifiée Classification de Fredrickson
Hypercholestérolémie pure
Hypercholestérolémie pure familiale (IIa)
Hypercholestérolémie pure polygénique (IIa)
Hypertriglycéridémie pure
Hyperchylomicronémie (I)
Hypertriglycéridémie familiale (IV)
Hyperlipidémie de type V (I + IV)
Hyperlipidémie mixte
Hyperlipidémie familiale combinée (IIb ou IIa ou IV)
Dysbêtalipoprotéinémie (III)Il faut savoir que, pour plusieurs hyperlipidémies, un même génotype peut, selon le contexte environnemental, correspondre à plusieurs phénotypes lipidiques. Le phénotype lipidique correspond donc à une situation instantanée qui ne permet pas nécessairement de préjuger du mécanisme physiopathologique sous-jacent.

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132
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Hypercholestérolémie isolée
Hypercholestérolémie pure familiale (type IIa)
Il s’agit d’une maladie familiale liée à une mutation monogénique. Il peut s’agir d’une mutation :

*du gène du récepteur des LDL (environ 80 %; mutation inactivatrice à transmission autosomique dominante);
*du gène de l’ApoB100 (5 % à 10 %; mutation inactivatrice);
*du gène PCSK9 (< 5 %; mutation gain de fonction).
L’hypercholestérolémie familiale peut se présenter sous la forme homozygote ou sous la forme hétérozygote.

Forme homozygote

Cette forme est rare : sa fréquence est de l’ordre d’un cas pour 500 000 (doubles hétérozygotes, homozygotes lorsque consanguinité). Caractéristiques inhérentes à cette forme :

*LDLc > 4 g/l (6 à 10 g/l);
*dépôts lipidiques dès l’enfance : xanthomatose cutanéotendineuse (xanthomes plans, tubéreux et tendineux majeurs);
*complications cardiovasculaires ischémiques dès la première décennie; en l’absence de traitement : décès vers l’âge de 20 ans;
*fréquence (+++) des rétrécissements aortiques athéromateux supravalvulaires.
Forme hétérozygote

Sous cette forme, 50 % des récepteurs sont fonctionnels; la prévalence atteint 0,2 % dans la population générale et 3 % parmi les individus ayant un infarctus du myocarde. Caractéristiques liées à la forme hétérozygote du gène du récepteur des LDL :

*LDLc compris entre 2 et 4 g/l (phénotype IIa);
*xanthomes tendineux présents dans 30 % des cas seulement;
*complications cardiovasculaires ischémiques précoces en l’absence d’hypocholestérolémiant efficace :
–chez l’homme : vers 40 à 50 ans;
–chez la femme : vers 50 à 60 ans.
En cas d’hypercholestérolémie familiale, il est important de faire un dépistage d’une hypercholestérolémie chez les apparentés au premier degré.

Hypercholestérolémies polygéniques (type IIa)
Caractéristiques de ces hypercholestérolémies :

*absence d’hérédité familiale mendélienne;
*physiopathologie inconnue;
*fréquence élevée : elle représente la majorité des hypercholestérolémies modérées;
*facteurs favorisants ou aggravants, tels que les erreurs de régime (riche en cholestérol et en graisses saturées);
*complications cardiovasculaires plus tardives que dans l’hypercholestérolémie familiale, puisque l’installation de l’hypercholestérolémie est survenue seulement vers la quarantaine.
Hypertriglycéridémie isolée
Hyperchylomicronémies primitives familiales
Les formes avec hyperchylomicronémie exclusive (type I) sont exceptionnelles. Cette hyperchylomicronémie est secondaire à une anomalie génétique responsable d’un déficit d’activité de la lipoprotéine lipase (enzyme responsable de la dégradation des chylomicrons et des VLDL).

Hypertriglycéridémie familiale
Les caractéristiques de ce type d’hyperlipidémie sont les suivantes :

*fréquence rare;
*transmission autosomique dominante;
*accumulation de VLDL endogène (type IV);
*dépendance au surpoids;
*pas de xanthomes;
*risque de décompensation sur un mode de syndrome hyperchylomicronémique (type V = type I (chylomicrons) + type IV [VLDL]);
*caractère athérogène débattu.
Hyperlipidémies combinées familiales
Ce sont les dyslipidémies les plus fréquentes : 1 % à 2 %> de la population générale; elles affectent 10 % des sujets présentant un infarctus avant 60 ans. Caractéristiques de ces hyperlipidémies :

*transmission héréditaire non mendélienne oligogénique;
*jamais de xanthomes;
*intrication avec un syndrome métabolique;
*révélation tardive à l’âge adulte, mais d’autant plus précocement qu’il existe une obésité;
*phénotypes lipidiques variables dans la même famille et fluctuant chez un même individu au fil du temps, type IIb principalement (augmentation du LDLc et des triglycérides), mais aussi type IIa (augmentation isolée du LDLc) ou type IV (augmentation isolée des triglycérides);
*derrière cette hétérogénéité phénotypique, un trait commun des hyperlipidémies combinées est l’augmentation d’une sous-classe particulière de LDL, dites LDL petites et denses (small dense LDL) ; leur synthèse est favorisée par l’hypertriglycéridémie et leur pouvoir athérogène est élevé; les LDL petites et denses sont retrouvées également dans le syndrome métabolique et le diabète de type 2 et rendraient compte, pour partie, de l’augmentation du risque cardiovasculaire associé à ces deux pathologies; l’analyse des sous-classes de LDL n’est toutefois pas encore possible en pratique courante;
*complications cardiovasculaires fonction de l’intensité de la dyslipidémie.
Les différents phénotypes lipidiques peuvent être rencontrés chez un même sujet au fil du temps et, simultanément, chez au moins un apparenté au premier degré.

Dysbêtalipoprotéinémie (type III)
Hyperlipidémie combinée rare, caractérisée par une élévation harmonieuse de la cholestérolémie et de la triglycéridémie.

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Hypertension artérielle et risque cardiovasculaire
A Définition

Pression artérielle systolique ≥ 140 mmHg et/ou pression artérielle diastolique > 90 mmHg confirmée au minimum par deux mesures lors de trois consultations successives sur une période de 3 à 6 mois.

Les techniques de mesure sont, d’une part, l’automesure tensionnelle et, d’autre part, la MAPA (mesure automatisée de la pression artérielle). Sa valeur pronostique apparaît supérieure à celle de la mesure effectuée au cabinet médical. Elle permet de s’affranchir de l’HTA « blouse blanche ». Les seuils sont décalés :

*de 5 mmHg en automesures isolées : 135/85 mmHg ;
*de 10 mmHg en MAPA moyennée sur 24 heures : 130/80 mmHg.
B Prévalence et risque cardiovasculaire
L’HTA affecte 40 % de la population adulte. Sa probabilité de survenue est d’autant plus élevée qu’il existe un syndrome métabolique sous-jacent (voir tableau 9.2).

Le lien entre niveau tensionnel et risque cardiovasculaire est continu : il n’y a pas de seuil individualisé en dessous duquel le risque peut être considéré comme nul. La relation entre pression artérielle et risque cérébral est beaucoup plus étroite que la relation entre pression artérielle et risque coronarien. À niveau tensionnel égal, l’HTA est grevée d’un pronostic d’autant plus péjoratif qu’elle s’associe à :

*une hypertrophie ventriculaire gauche (électrique, échographique);
*une glomérulopathie, attestée par une élévation de la microalbuminurie avant le stade de l’insuffisance rénale chronique (IRC).
C Bilan diagnostique étiologique et évolutif face à une HTA
(Voir Item 224, chapitre 10.)

*Un examen clinique, avec recherche de facteurs provoquant ou aggravant une HTA.
*Un bilan biologique comportant ionogramme sanguin, créatininémie avec débit de filtration glomérulaire estimé, glycémie à jeun, bilan lipidique et protéinurie – la recherche de la microalbuminurie n’est recommandée que chez le sujet diabétique.
*Un électrocardiogramme de repos.

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VI Diabète et risque cardiovasculaire
Le risque relatif de complications coronariennes ischémiques est plus élevé chez la femme (RR = 3-4) que chez l’homme (RR = 2-3).

Le risque relatif d’AOMI (avec des formes généralement infrapoplitées) est particulièrement élevé lors du diabète : RR = 5.

L’augmentation du risque relatif d’AVC (RR = 2-3) correspond en grande partie à une fréquence accrue de lacunes (atteintes des petites artères perforantes) en lien étroit avec l’HTA.

Dans le diabète de type 1, le risque n’apparaît qu’après 15 à 20 ans d’évolution et essentiellement lorsqu’il existe une atteinte rénale concomitante avec protéinurie.

Dans le diabète de type 2, la maladie coronarienne peut précéder fréquemment l’émergence du diabète proprement dit, du fait du long passé de syndrome métabolique.

L’ancienneté du diabète favorise la survenue de manifestations coronariennes ischémiques, dont certaines cliniquement silencieuses. Puisque l’insuffisance coronarienne est plus souvent silencieuse chez les sujets diabétiques (RR de coronaropathie sans douleur typique 2 fois plus élevé), les sujets diabétiques à très haut risque cardiovasculaire sont soumis à des tests de dépistage (+++). Ce dépistage n’est pas systématique, car il n’a pas été établi qu’il débouchait sur un bénéfice cardiovasculaire; il est réalisé seulement chez les malades ayant une très forte probabilité de lésion coronaire.

L’intensité du risque demeure fonction du nombre de facteurs de risque surajoutés, de leur ancienneté et de leur intensité. Ainsi, le niveau de risque cardiovasculaire est moins prononcé s’il n’y a pas de syndrome métabolique associé. La survenue d’une néphropathie avérée avec IRC évoluée ou protéinurie correspond à un risque cardiovasculaire élevé.

Il n’existe pas de valeur seuil de la glycémie conditionnant le risque de complications macrovas-culaires. L’hyperglycémie en elle-même est un facteur de risque cardiovasculaire de complication macrovasculaire bien moins puissant que pour le risque de complication microvasculaire. Il est établi qu’un contrôle glycémique strict permet de réduire le risque cardiovasculaire dans le diabète de type 1; la preuve est moins formelle dans le diabète de type 2. En revanche, l’HTA majore puissamment le risque d’AVC

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135
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ise en charge du risque cardiovasculaire
A Principes généraux

1 Concepts

On ne traite pas un bilan lipidique ou des mesures manométriques, mais une personne ayant un risque de complication ischémique.

L’efficience du traitement est donc fonction du niveau de risque absolu de chaque individu. Une maladie métabolique chronique implique un traitement chronique, d’autant plus que le risque cardiovasculaire s’accroît en vieillissant.

La découverte d’une pathologie métabolique majorant le risque cardiovasculaire, telle que le diabète ou une dyslipidémie, justifie un dépistage familial (+++).

La mise en route d’un traitement de prévention cardiovasculaire au long cours doit comporter un temps d’information permettant une prise de conscience des enjeux, de la rentabilité du traitement et de la balance bénéfices/risques.

En situation de risque intermédiaire et d’hésitation sur la mise en route d’un traitement au long cours, il peut être utile de s’appuyer alors sur une recherche d’athérome infraclinique prématuré.

Certains médicaments sont pourvoyeurs d’effets secondaires dont certains potentiellement dangereux (par exemple un risque hémorragique sous antiagrégants); le rapport bénéfice/ risque et le coût doivent être pris en compte et pas seulement le bénéfice potentiel.

2 Stratégie
Les mesures diététiques sont systématiques en prévention secondaire et primaire.

L’obtention d’un sevrage du tabac est une mesure majeure.

La mise en œuvre des mesures non médicamenteuses ne doit pas retarder l’initiation d’un traitement pharmacologique chez les patients dont le risque cardiovasculaire est élevé.

L’efficacité, la tolérance et l’observance des traitements doivent être surveillées. Le rapport bénéfice/risque doit être réévalué au décours de l’évolution au long cours du malade.

B Sevrage du tabac
En dehors d’épisodes de dépression caractérisée, lors desquels le sevrage du tabac ne doit être envisagé qu’après stabilisation de l’état neuropsychique, le conseil minimal d’aide à l’arrêt du tabac s’adresse à tous les patients. La dépendance à la nicotine doit être évaluée lors d’un projet de sevrage; une aide au sevrage par substituts nicotiniques est recommandée.

C Activité physique
L’activité physique exerce des effets métaboliques sur :

*le développement de la masse musculaire et la réduction de la masse grasse, induisant :
–une réduction de l’insulinorésistance;
–une diminution particulière de la triglycéridémie et une augmentation du HDLc;
*le système cardiovasculaire avec :
–une diminution de la pression artérielle au repos;
–un allongement du périmètre de marche pour les AOMI;
–un meilleur pronostic des complications coronariennes ischémiques, probablement via des mécanismes de préconditionnement.
Sa préconisation est systématiquement associée aux mesures diététiques, car elle potentialise l’efficacité de ces dernières.

La prescription doit être adaptée à chaque individu et à ses capacités; en cas de très haut risque, il est prudent de vérifier auparavant l’épreuve d’effort.

Il faut préconiser, dans la mesure du possible, une activité régulière sous forme de cinq séances hebdomadaires de 30 minutes, d’intensité modérée à élevée (50 % à 70 % de la VO2 maximale – consommation d’oxygène). Si cet optimum ne peut pas être obtenu, une activité physique moindre est néanmoins justifiée.

D Diététique
1 Mesures lipidiques globales

La liste des mesures préconisées est la suivante :

*avoir un apport quotidien en graisses alimentaires < 35 % de l’apport calorique total;
*réduire les acides gras saturés (< 8-10 %) et maintenir les apports d’acide gras trans aussi bas que possible;
*privilégier l’apport des graisses mono-insaturées (15 %);
*encourager la consommation d’acides gras n-3 à longues chaînes (poissons gras, noix, aliments enrichis en oméga 3);
*limiter la dose quotidienne de cholestérol (< 300 mg par jour);
*la consommation de fruits et légumes sera encouragée (en raison de leur effet antioxydant).
2 Mesures non lipidiques
Ces mesures, qui portent également sur l’HTA, sont les suivantes :

*favoriser l’apport de fruits et légumes (riches en antioxydants et en fibres);
*la consommation régulière de noix, noisettes, amandes a montré un bénéfice cardiovasculaire lors d’un essai d’intervention randomisé;
*modérer l’apport sodé (< 5 g par jour) : éviter les excès de charcuterie, conserves, plats préparés, poissons fumés, fruits de mer; ne pas resaler les plats;
*limiter la consommation d’alcool à moins de trois équivalents verres de vin par jour et ne pas la proscrire, sauf en cas de dépendance;
*modérer les apports en sucres simples, en particulier le fructose;
*encourager une réduction pondérale, même limitée, en réduisant l’apport calorique de 20 % en cas de surpoids ou de syndrome métabolique.

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136
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Mesures diététiques propres aux hypertriglycéridémies
Hypertriglycéridémies modérées

Insister sur la réduction du surpoids, avec apports caloriques équilibrés modérément hypo-caloriques (– 20 %) (+++) et la majoration concomitante de l’activité physique. Procéder à un test d’éviction de l’alcool et des sucres simples, selon la règle suivante :

*suspension de la consommation d’alcool pendant une semaine;
*réduction des apports glucidiques :
–< 45 % du total calorique;
–en particulier des sucres simples (fructose et monosaccharide particulièrement hypertriglycéridémiants).
Hypertriglycéridémies majeures (hyperchylomicronémies)
Dans ces formes rares, une prise en charge par une équipe spécialisée est recommandée. En complément des mesures diététiques habituelles des hypertriglycéridémies (voir plus loin), on mettra en place un régime hypolipidique à moins de 20 g de graisses par jour. On peut utiliser des huiles constituées de triglycérides à chaîne moyennes (absorbées directement, sans passer par la voie des chylomicrons).

En situation de décompensation avec une triglycéridémie à plus de 30 g/l, il s’agit d’une urgence nutritionnelle avec mise en place d’une diète hydrique transitoire jusqu’à normalisation ou stabilisation de la triglycéridémie.

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137
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Médicaments hypolipidémiants
Les différentes classes de ces médicaments et leurs principales caractéristiques sont présentées dans le tableau 9.3, ainsi que leurs mécanismes d’action, leur efficacité, leurs indications, les effets indésirables et les contre-indications.

Tableau 9.3

Médicaments hypolipidémiants (sauf les anti-PCSK9).

Statines (+++)	Ézétimibe	Résines	Fibrates	Acides gras oméga 3 DCI (nom commercial)	 –Simvastatine (Zocor®, Lodales®) –Pravastatine (Elisor®, Vasten®) –Fluvastatine (Lescol®, Fractal®) –Atorvastatine (Tahor®) –Rosuvastatine (Crestor®) Ézétimibe (Ezetrol®)	Colestyramine (Questran®)	 –Fénofibrate (Lipanthyl®) –Gemfibrozil (Lipur®) –Bézafibrate (Befizal®) –Ciprofibrate (Lipanor®) \+ Génériques Acides gras n-3 polyinsaturés (Maxepa®, Omacor®) Mode d'action	 ↓ Synthèse de cholestérol hépatocytaire ↑ Récepteurs LDL ↓ Absorption du cholestérol par l'entérocyte ↑ Récepteurs LDL ↓ Réabsorption des sels biliaires ↑ Expression des récepteurs LDL Activateurs des PPARa : ↓ Production des VLDL ↑ Clairance plasmatique des TG ↑ Production des HDL ↓ Production des VLDL ↑ Clairance plasmatique des TG Effets lipidiques	 ↓ LDLc (25 à 45 %) ↓ TG (5 à 20 %) ↓ HDLc (0 à 5 %) i LDLc (20 %)	 ↓ LDLc (20 %) ↑ TG ↓ TG (20 à 40 %) ↓ LDLc (0 à 10 %) ↑ HDLc (5 à 25 %) ↓ TG (10 à 30 %) Principaux effets secondaires	 –Myalgies –↑ CPK (rhabdomyolyse rare) Changer de molécule Titrer la posologie –↑ Transaminases (cas rares d'hépatite) –Surrisque de diabète de type 2 (RR = 1,10) –Myalgies –Troubles digestifs dyspeptiques –Digestifs : *constipation *météorisme *nausées *gastralgies –Doses progressives pour limiter les effets digestifs –Diminue l'absorption des vitamines liposolubles –Myalgies –↑ CPK (rhabdomyolyse rare) –↑ Transaminases (cas rares d'hépatite) –Pancréatites –↑ Créatininémie –↑ Homocystéinémie –Lithiases biliaires si traitement prolongé Digestifs : –nausées –éructations Principales contre-indications	 –Hypersensibilité à l'un des composants –Grossesse –Allaitement –Hypersensibilité à l'un des composants –Grossesse –Allaitement –Obstacle biliaire complet –Constipation –Phénylcétonurie –Grossesse –Allaitement –Insuffisance rénale –Insuffisance hépatique
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138
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Les interactions médicamenteuses, les associations possibles avec les autres agents hypolipidémiants et le niveau de preuve de leur efficacité cardiovasculaire sont indiqués pour chaque classe d’agent hypocholestérolémiant dans le tableau 9.4 (sauf les anti-PCSK9, encadré 9.1).

Tableau 9.4

Médicaments hypocholestérolémiants (sauf les anti-PCSK9) : interactions médicamenteuses, associations possibles avec les autres agents hypolipidémiants et niveau de preuve cardiovasculaire.

Statines (+++)	Ézétimibe	Résines	Fibrates	Acides gras oméga 3 Interactions	 –Risque d'interactions médicamenteuses avec des molécules métabolisées par CYP3A4 (sauf avec pravastatine et rosuvastatine) –Perturbation de la pharmacocinétique des immunosuppresseurs (moindre avec pravastatine et rosuvastatine) Ciclosporine	 –↓ Absorption intestinale de nombreux médicaments si prise simultanée –À prendre 1 h 30 avant ou 3 h après tout autre médicament (+++) –Antivitamines K : ↑ leur action Nécessité de i la posologie de 25 à 30 % –Gemfibrozil : interférences (+++) avec la pharmacocinétique de nombreuses molécules

Association possible
–Proposées avec : ézétimibe, colestyramine
–Rosuvastatine 20 mg ne peut être associée aux fibrate
–Contre-indiqué avec gemfibrozil
–Statines
–Colestyramine
–Synergique avec tous les hypocholestérolémiants
–Gemfibrozil contre-indiqué avec les statines
Synergique
Niveau de preuve cardiovasculaire +++ ++ + Plusieurs essais dont les résultats sont contradictoire

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139
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Inhibiteurs de la PCSK9

La PCSK9 est la proprotéine convertase subtili-sine/kexine de type 9. Ses inhibiteurs sont de nouveaux agents hypocholestérolémiants puissants. Ils réduisent le taux de LDL-cholestérol de 60 % ou plus. Ils réduisent par ailleurs le taux plasmatique de Lp(a). Les deux molécules disponibles en France sont l’aliro-cumab (Praluent®) et l’évolocumab (Repatha®). Ce sont des traitements injectables (par voie sous-cutanée) administrés toutes les 2 semaines. Indications limitées :

*aux formes d’hypercholestérolémies très sévères : hypercholestérolémie familiale homozygote, hypercholestérolémies familiales pour lesquelles une LDL-aphérèse est indiquée – LDL-aphérèse : technique d’épuration sanguine extracorporelle permettant d’extraire le LDL-cholestérol;
*aux patients ayant une maladie cardiovasculaire athéroscléreuse établie par un antécédent d’infarctus du myocarde, d’accident vasculaire cérébral non hémorragique et/ou d’artériopathie oblitérante des membres inférieurs symptomatique (prévention secondaire) et qui ne sont pas contrôlés (LDL-cholestérol > 0,70 g/l) malgré un traitement hypolipémiant optimisé : en association avec un traitement hypolipémiant optimisé, ou en monothérapie en cas de contre-indication ou d’intolérance avérée à la fois aux statines et à l’ézétimibe (évolocumab).
Traitement commencé seulement par un spécialiste (endocrinologue, médecine interne, cardiologue, neurologue).

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Principes du traitement médicamenteux des hypercholestérolémies isolées
1 Introduction du traitement

  • En prévention primaire, si le LDL-cholestérol reste élevé (au-dessus de l’objectif) après 3 à 6 mois au minimum de diététique bien conduite.
    *En prévention secondaire, avec prise médicamenteuse d’emblée, après une complication ischémique ou en cas de risque équivalent.
    2 Objectifs lipidiques
    Les objectifs thérapeutiques pour la population générale, en termes de LDLc, dépendent du profil de risque cardiovasculaire du patient (consensus SFE-SFD-NSFA, 2016). L’estimation du niveau de risque cardiovasculaire se fait à l’aide des équations SCORE2 et SCORE2-OP ou par la sommation des facteurs de risques cardiovasculaires traditionnels.

Les équations SCORE2 ne peuvent pas être utilisées en cas d’IRC, d’hypercholestérolémie familiale et de pathologie athéromateuse connue.

Une équation spécifique au diabète de type 2, dénommée SCORE2-D/abeies a récemment été développée. Le niveau de risque cardiovasculaire au cours du diabète (de type 1 et de type 2) peut également être évalué en fonction de la présence de critères spécifiques, détaillés dans la figure 9.9 (consensus SFC/SFD2021).

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141
Q

cteurs de risque cardiovasculaire principaux à considérer en cas de dyslipidémie (consensus SFE-SFD-NSFA, 2016).

Âge (≥ 50 ans chez l’homme, ≥ 60 ans chez la femme)

Antécédents familiaux d’accident cardiovasculaire ischémique (≤ 55 ans chez le père ou un parent du premier degré, ≤ 60 ans chez la mère ou une parente du premier degré)

Tabagisme (actuel ou arrêté depuis moins de 3 ans)

Hypertension artérielle

HDLc ≤ 0,4 g/l (≤ 1,0 mmol/l)

Diabète de type 2 (ou diabète de type 1 de plus de 15 ans ou chez un patient de plus de 40 ans)

Insuffisance rénale (DFG < 45 ml/min, < 60 ml/min chez l’adulte jeune)

(Source : CEEDMM, 2021.)

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142
Q

n prévention primaire
Les objectifs de LDL-cholestérol sont :

*< 1,00 g/l (2,6 mmol/l) en cas de risque cardiovasculaire intermédiaire;
*< 0,70 g/l (1,8 mmol/l) en cas de risque cardiovasculaire élevé;
*< 0,55 g/l (1,4 mmol/l) en cas de risque cardiovasculaire très élevé.
En cas de risque cardiovasculaire faible, l’objectif de LDLc est moins clair. Un objectif < 1,16 g/l (3 mmol/l) peut être envisagé selon les recommandations européennes de 2019, alors que les recommandations françaises fixent une valeur < 1,90 g/l (4,9 mmol/l).

En prévention secondaire
L’objectif de LDL est < 0,55 g/l (1,4 mmol/l).

À part, l’hypercholestérolémie familiale
La situation est différente; en effet, le risque vasculaire élevé de cette pathologie et la précocité de l’hypercholestérolémie justifient un traitement plus précoce. L’objectif se situe à :

*LDLc < 1,35 g/l (3,5 mmol/l) chez les enfants (souvent 1,6 g/l jusqu’à la puberté);
*LDLc < 1,00 g/l (2,6 mmol/l) chez les adultes traités précocement sans facteurs de risque cardiovasculaire additionnels;
*LDLc < 0,70 g/l (1,8 mmol/l) chez les adultes traités tardivement avec facteurs de risque cardiovasculaire additionnels;
*LDLc < 0,55 g/l (1,4 mmol/l), en prévention secondaire (niveau de preuve limité dans l’hypercholestérolémie familiale hétérozygote).
3 Traitement médicamenteux

*On commencera un traitement par statine, en première intention.
Le choix de la statine est fait en fonction du taux de LDLc initial et de l’objectif visé. L’intensité des différentes statines est indiquée dans le tableau 9.7.Si l’objectif est non atteint sous statines à dose maximale tolérée, associer de l’ézétimibe.
*En cas d’intolérance aux statines : utiliser l’ézétimibe.
*Anti-PCSK9 : dans les hypercholestérolémies familiales sévères (avis spécialisé). Uniquement en prévention secondaire, si le LDLc n’est pas à l’objectif sous statine à la dose maximale tolérée et ézétimibe, ou en cas d’intolérance avérée aux statines et/ou à l’ézétimibe.Valeur de triglycérides considérée comme normale : < 1,5 g/l (1,7 mmol/l).
*Importance des mesures diététiques : limiter aliments et boissons sucrés; limiter ou arrêter l’alcool; consommation de poissons gras riches en oméga 3.
*En cas d’hypertriglycéridémie sévère (> 5 g/l [5,6 mmol/l]) :
–l’objectif est de réduire les triglycérides < 5 g/l pour diminuer le risque de pancréatite;
–commencer un traitement par fibrate;
–si le taux de triglycérides reste élevé sous fibrates, on peut y associer des acides gras oméga 3.

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143
Q

Hyperlipidémie mixte (voir fig. 9.10)

*Dans la dyslipémie mixte, l’objectif sur le LDLc reste prioritaire (dans la mesure où les triglycérides sont en règle < 5 g/l [5,6 mmol/l]).
*On aura donc recours aux statines pour atteindre l’objectif de LDL-cholestérol (éventuellement statines + ézétimibe si nécessaire).
*Une fois l’objectif de LDLc atteint, il peut être proposé d’ajouter un traitement par fibrate (fénofibrate préférentiellement; jamais par le gemfibrozil) chez les patients à haut risque cardiovasculaire dont le taux de triglycérides et supérieur ou égal à 2,0 g/l et dont le HDLc est bas (< 0,40 g/l chez l’homme, < 0,50 g/l chez la femme; voir fig. 9.10).
Principes d’adaptation du traitement
L’habitude est de commencer les hypolipémiants à faible posologie et de l’augmenter ultérieurement en fonction de l’efficacité et de la tolérance, jusqu’à l’obtention d’un taux de LDL inférieur à la valeur cible.

L’utilisation de fortes doses voire d’une association d’hypolipémiants est à envisager au cas par cas, après avis spécialisé, en veillant à la tolérance et à l’observance du traitement.

Surveillance de l’efficacité du traitement hypolipidémiant

*Pratiquer un bilan lipidique 2 à 3 mois après la mise en route du traitement afin de vérifier que les objectifs lipidiques sont atteints.
*Informer le patient de ces objectifs.
*Si les objectifs thérapeutiques sont atteints, le bilan lipidique est réalisé 1 fois par an.
*Si les objectifs thérapeutiques ne sont pas atteints, modification de la thérapeutique et bilan lipidique de contrôle 2 à 3 mois plus tard, jusqu’à l’obtention des objectifs thérapeutiques.
Surveillance de la tolérance du traitement hypolipidémiant

*Tolérance clinique : douleurs musculaires en particulier.
*Tolérance biologique :
–dosage des transaminases, avant, dans les 3 mois qui suivent l’instauration du traitement et une dernière fois après 1 an;
–dosage des CPK, seulement en cas de myalgies et/ou de situation à risque majoré (associations médicamenteuses, comorbidités, antécédent d’intolérance).

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144
Q

Médicaments antihypertenseurs
La HAS a publié un algorithme de prise en charge de l’HTA essentielle de l’adulte (hors grossesse) en 2016 (fig. 9.11). Pour le détail de la stratégie thérapeutique et le choix des traitements hypertenseurs, nous renvoyons l’étudiant à l’Item 221 traité dans l’ouvrage du Collège national des enseignants de cardiologie et de la Société française de cardiologie (CNEC-SFC) dans la même collection.

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145
Q

ntiagrégants plaquettaires
1 Prévention secondaire

Indication systématique, sauf contre-indications absolues.

L’association clopidogrel-aspirine doit être systématique pendant le mois suivant la mise en place d’un stent et pendant l’année suivant l’implantation d’un stent actif. Il existe un risque important d’accident thrombotique dans les 10 jours suivant la suspension de la double association. L’association aspirine-clopidogrel ne doit pas être interrompue sans concertation multi-disciplinaire préalable.

L’association aspirine-clopidogrel n’a pas montré de supériorité par rapport au clopidogrel seul en prévention secondaire des AVC.

Le prasugrel et le ticagrelor ont montré une supériorité face au clopidogrel lors des syndromes coronariens aigus.

2 Prévention primaire
Chez le diabétique ou chez l’hypertendu, l’utilisation systématique des antiagrégants en prévention primaire est l’objet de controverses. Le rapport risque/bénéfice de l’aspirine à faible dose n’a pas été formellement établi dans ces situations.

Par rapport à l’aspirine, le clopidogrel comporte une moindre toxicité gastrique et un risque hémorragique similaire.

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146
Q

Points clés

*Les principaux facteurs de risque cardiovasculaire modifiables sont le tabagisme, le LDLc élevé, l’hypertension artérielle (HTA) et le diabète, auxquels on peut rajouter le HDLc bas (marqueur de risque).
*Le risque global peut être calculé par des équations de risque, comme celles de Framingham ou SCORE2. L’évaluation du risque peut également se faire par le décompte des facteurs de risque.
*La relation entre tabac et risque cardiovasculaire est continue et existe aussi dans le tabagisme passif. Le risque est majoré en association avec la contraception œstroprogestative.
*La démarche diagnostique dans l’hyperlipidémie, l’HTA et le diabète comprend plusieurs étapes : le diagnostic positif (exploration d’une anomalie lipidique dans les dyslipidémies, valeur de l’automesure tensionnelle dans l’HTA), le diagnostic des formes secondaires (savoir les identifier) et l’identification du niveau de risque cardiovasculaire du patient. Cette identification conditionne la thérapeutique.
*La prise en charge du risque vasculaire comprend le sevrage tabagique (les patchs à la nicotine peuvent être utilisés en prévention secondaire), les conseils d’activité physique, les mesures diététiques et le traitement adapté de chaque facteur de risque.
*Dans les hyperLDLémies, le traitement de première intention est une statine. La cible de LDLc est de 0,55 g/l en prévention secondaire. En prévention primaire, elle varie selon le niveau de risque cardiovasculaire. Dans le diabète de type 2, le traitement de choix pour débuter est la metformine. Dans l’HTA, une des cinq classes d’antihypertenseurs peut être utilisée en première intention, sauf cas particulier (par exemple en post-infarctus : utilisation des bêta-bloquants); en bithérapie de l’HTA, il faut associer un médicament du groupe bêta-bloquant/ARA II/IEC avec un des médicaments du groupe diurétiques thiazidiques/inhibiteur calcique.

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147
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ntroduction
L’hypertension artérielle (HTA) est définie par une moyenne de pression artérielle (PA) ≥ 140/90 mmHg (systolique/diastolique) à partir de mesures cliniques répétées, réalisées au cabinet médical. La Haute autorité de santé (HAS) autorise également son diagnostic sur une moyenne diurne ≥ 135/85 mmHg obtenue en automesure ambulatoire ou en mesure ambulatoire automatisée (MAPA).

Le bilan de l’HTA vise à vérifier sa permanence, à préciser par l’interrogatoire et l’examen la situation vasculaire (prévention primaire ou secondaire) et le retentissement de l’HTA (dont l’hypertrophie ventriculaire gauche ou d’autres anomalies de l’ECG), à identifier les autres facteurs de risque cardiovasculaire, ainsi qu’à dépister des éléments d’orientation vers une HTA secondaire. Les deux principaux intérêts de l’identification des causes endocriniennes d’HTA sont, d’une part, que le traitement de l’affection causale peut guérir l’HTA et, d’autre part, que ces maladies sont à l’origine d’autres comorbidités qui peuvent être reconnues et traitées.

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148
Q

Principes du dépistage de l’hypertension artérielle d’origine endocrinienne
Les examens paracliniques minimaux recommandés par l’HAS qui doivent, idéalement, être réalisés avant la prescription d’un traitement antihypertenseur sont indiqués dans le tableau 10.1. Les causes d’hypertension artérielle d’origine endocrinienne sont listées dans le tableau 10.2. Nous ne détaillerons pas ici les causes apparentées d’origine iatrogène.

Tableau 10.1

Bilan initial de l’HTA.

Tests et procédures
Mesure à jeun du potassium (K+) Si possible sans garrot pour éviter une hémolyse et ne pas méconnaître une hypokaliémie
Mesure à jeun de la créatinine Le débit de filtration glomérulaire est estimé par les formules MDRD ou CKD-EPI
Mesure à jeun du glucose
Mesure à jeun du cholestérol total, du HDL-cholestérol et des triglycérides Le LDL-cholestérol est calculé à partir de ces fractions lipidiques
Recherche par bandelette réactive d’hématurie et de protéinurie À quantifier sur 24 heures si le test est positif
Électrocardiogramme (12 dérivations)
(Source : CEEDMM, 2021.)

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149
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Étiologie de l’HTA d’origine endocrinienne.

Type Sous-types
Hyperminéralocorticismes primaires Hyperaldostéronisme primaire par maladie bilatérale des surrénales (hyperplasie bilatérale) ou adénome de Conn
HTA endocrines iatrogènes
Contraception œstroprogestative Corticoïdes
Réglisse et apparentés
Tumeurs sécrétant des catécholamines Phéochromocytomes Paragangliomes
Syndrome de Cushing ACTH-dépendant ou ACTH-indépendant
Acromégalie
Hyperthyroïdie
Hyperparathyroïdie
(Source : CEEDMM, 2021.)

Les causes d’HTA d’origine endocrinienne sont présentes chez une minorité de patients hypertendus. Leur prévalence est d’au moins 8 % pour l’hyperaldostéronisme primaire et moins de 1 % pour les phéochromocytomes et autres tumeurs chromaffines sécrétant des catécholamines (paragangliomes). On conçoit donc qu’il n’est pas envisageable de réaliser un dépistage systématique de l’HTA d’origine endocrinienne à l’aide d’outils biologiques. Le seul bilan systématique à visée endocrinienne recommandé est la mesure de la kaliémie à jeun, du fait de la fréquence de l’hyperaldostéronisme primaire. En revanche, il est recommandé de rechercher une cause endocrinienne (au même titre que d’autres causes d’HTA secondaires) dans les situations suivantes, où leur prévalence est plus élevée :

*HTA sévère de grade 3 (PA systolique ≥ 180 mmHg ou PA diastolique ≥ 110 mmHg);
*HTA résistante (HTA non contrôlée malgré les règles hygiéno-diététiques et au moins trois médicaments antihypertenseurs à doses optimales);
*HTA avec hypokaliémie (kaliémie ≤ 3,7 mmol/l) qui évoque un hyperaldostéronisme primaire avec fuite urinaire de potassium (kaliurèse inappropriée) éventuellement après arrêt d’un traitement diurétique;
*sujet jeune (moins de 30 ans);
*HTA avec tumeur surrénalienne de découverte fortuite (incidentalome surrénalien);
*retentissement vasculaire disproportionné par rapport à l’intensité de l’hypertension, qui évoque un hyperaldostéronisme primaire du fait des effets propres de l’aldostérone sur les vaisseaux;
*antécédent familial d’HTA précoce ou de complications cardiovasculaires avant 40 ans;
*antécédent familial au premier degré d’HTA d’origine endocrinienne;
*signes cliniques associés évoquant une endocrinopathie.

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Hyperaldostéronisme primaire
A Dépistage de l’hyperaldostéronisme primaire

L’hyperaldostéronisme primaire est la cause la plus fréquemment responsable d’HTA endocrinienne, avec une prévalence sous-estimée, mais d’au moins 8 %. Il correspond à deux grandes entités : l’adénome de Conn, tumeur bénigne du cortex surrénalien représentant une maladie surrénalienne unilatérale, et l’hyperaldostéronisme primaire d’origine bilatérale dans laquelle la production excessive et non contrôlée d’aldostérone dépend des deux glandes surrénales (classiquement appelée hyperplasie bilatérale, même si sa physiopathologie est plus complexe). Le dépistage de l’hyperaldostéronisme primaire repose sur la mesure couplée des concentrations d’aldostérone et de rénine plasmatiques.

Il est important de rappeler que de nombreuses conditions sont susceptibles d’influencer l’activité du système rénine-angiotensine et de perturber ce bilan, à la fois chez des patients hypertendus essentiels et chez des patients présentant un hyperaldostéronisme primaire, et donc d’être responsables de faux positifs et surtout de faux négatifs du dépistage.

Ainsi, la production d’aldostérone et l’activité du système rénine-angiotensine sont influencées par la posture, les apports sodés et le tonus sympathique tout comme par de nombreux médicaments antihypertenseurs (voir plus loin).

Il est important de réaliser le dépistage dans des conditions standardisées concernant les apports en sodium et l’absence de médicaments interférant avec le tonus sympathique, avec la production de rénine ou d’aldostérone ainsi qu’avec la liaison de cette dernière à son récepteur.

Par ailleurs, une kaliémie basse freine la sécrétion d’aldostérone et peut être à l’origine de faux négatifs du dépistage.

Cela implique les précautions pré-analytiques suivantes :

*demander que les patients ne fassent pas de régime désodé préalable et s’assurer que la natriurèse, qui reflète les apports sodés, est supérieure à 75 mmol/24 heures;
*une kaliémie supérieure à 3 mmol/l est donc souhaitable et peut justifier une supplémentation orale avant le prélèvement;
*les conditions de recueil recommandées sont un prélèvement matinal (non nécessairement au réveil), idéalement en position assise depuis au moins 15 minutes.
Idéalement, le traitement doit être mené en l’absence de tout traitement antihypertenseur : les bêta-bloquants diminuent la sécrétion de rénine; les IEC et ARA II augmentent la sécrétion de rénine; les diurétiques augmentent la sécrétion de rénine; les inhibiteurs calciques dihydro-pyridines augmentent la production de rénine suite à la baisse de la tension artérielle et diminuent celle d’aldostérone par défaut de synthèse dont les étapes sont calcium-dépendantes; les antihypertenseurs centraux baissent la sécrétion de rénine et d’aldostérone.

La sévérité de l’hypertension conduit parfois à prescrire un antihypertenseur sans attendre que l’analyse biologique soit faite, ou bien le diagnostic peut être évoqué chez un patient déjà traité. Si le niveau tensionnel justifie un traitement hypertenseur, il est recommandé d’utiliser des inhibiteurs calciques non dihydropyridiniques et des vasodilatateurs alpha-bloquants. Un traitement par bêta-bloquants peut être maintenu si son arrêt est jugé dangereux chez un patient coronarien, en sachant qu’il expose au risque de faux positif (diminution de la sécrétion de rénine).

Notons par ailleurs que l’insuffisance rénale diminue la sécrétion de rénine du fait de la réduction néphronique et de la rétention en eau et en sel. Enfin, citons les anti-inflammatoires non stéroïdiens qui induisent une rétention hydrosodée, la contraception orale contenant de l’éthinyl-œstradiol qui augmente la synthèse hépatique de l’angiotensinogène.

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Diagnostic positif de l’hyperaldostéronisme primaire
La signature biologique de l’hyperaldostéronisme primaire est une concentration d’aldostérone plasmatique élevée en présence d’une concentration de rénine plasmatique basse, résultant en une élévation du rapport aldostérone/rénine.

Lorsque le rapport aldostérone/rénine est augmenté, du fait à la fois d’une diminution de la concentration de rénine et d’une augmentation de la concentration plasmatique d’aldostérone, le diagnostic positif hyperaldostéronisme primaire est très vraisemblable et sera confirmé par une deuxième mesure. En revanche, le rapport aldostérone/rénine, s’il possède une bonne sensibilité, expose au risque de faux positif, notamment du fait d’une baisse de la concentration de rénine sans élévation de la concentration plasmatique d’aldostérone (HTA à rénine basse).

Dans ce cas, il est nécessaire de réaliser des tests de confirmation de l’hyperaldostéronisme primaire. Ceux-ci sont réalisés en milieu spécialisé; ils cherchent à démontrer une autonomie de la sécrétion d’aldostérone. Les conditions de réalisation de ces tests sont les mêmes que pour la mesure du rapport aldostérone/rénine. Parmi les tests possibles, la Société française d’endocrinologie recommande le test de charge sodée intraveineuse, réalisant une expansion volumique par un apport de sel aigu par voie veineuse. L’expansion volumique doit physiologiquement entraîner une réduction de la production d’aldostérone après quelques heures; l’absence de freination caractérise hyperaldostéronisme primaire. L’alternative, notamment en cas de contre-indication, est le test au captopril, qui entraîne un blocage aigu de l’enzyme de conversion de l’angiotensine et doit physiologiquement entraîner une baisse de la concentration d’aldostérone plasmatique. L’absence de freination de la sécrétion d’aldostérone caractérise sa sécrétion autonomisée.

Par ailleurs, la mesure du rapport aldostérone/rénine permet d’éliminer d’autres causes d’HTA secondaires perturbant ce rapport, tels que :

*hyperaldostéronisme secondaire, caractérisé par une modification du rapport avec augmentation de la sécrétion d’aldostérone et augmentation de la concentration de rénine; dans ce cas de figure, la production d’aldostérone est secondaire à la sécrétion non régulée de rénine;
*autres cas d’hyperminéralocorticisme (engendré par un autre stéroïde que l’aldostérone), pour lesquels la concentration d’aldostérone et la concentration de rénine sont toutes les deux diminuées; c’est le cas de figure engendré par une consommation excessive de réglisse qui contient de l’acide glycyrrhizique, certaines tumeurs surrénaliennes secrétant d’autres minéralocorticoïdes, etc.

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Diagnostic étiologique et principes thérapeutiques dans l’hyperaldostéronisme primaire
Le traitement de l’hyperaldostéronisme primaire est conditionné par son étiologie, notamment la production unilatérale ou bilatérale d’aldostérone par le cortex surrénalien.

Sécrétion unilatérale d’aldostérone
En cas de sécrétion unilatérale, il s’agit généralement d’un adénome de Conn, tumeur bénigne du cortex surrénalien qui peut faire l’objet d’une exérèse chirurgicale (surrénalectomie unilatérale).

Celle-ci permet la guérison complète de l’HTA et de l’hypokaliémie chez environ 50 % des patients. Chez les autres patients, on observe généralement une diminution de l’intensité de l’HTA et la disparition de l’hypokaliémie.

Les causes d’échecs relatifs de la chirurgie sont notamment liées à un âge avancé du patient, une ancienneté de l’HTA et à la présence d’une insuffisance rénale. Il est donc possible dans ces cas de discuter un traitement médical plutôt que chirurgical.

Sécrétion bilatérale d’aldostérone
Dans la sécrétion bilatérale, un traitement médical est recommandé. La molécule de première intention est la spironolactone, diurétique épargneur de potassium, qui se lie au récepteur minéralocorticoïde et empêche l’aldostérone d’activer son récepteur.

Cette molécule se lie également aux récepteurs des androgènes et de la progestérone et peut donc être responsable d’effets secondaires à type de gynécomastie, d’hypogonadisme masculin, de troubles menstruels chez la femme. En cas d’effets secondaires, on peut proposer en deuxième intention de l’éplérénone qui possède une activité antagoniste minéralocorticoïde plus sélective et donc moins d’effets secondaires.

Outils diagnostiques
Les outils principaux qui peuvent être utilisés pour faire le diagnostic de maladie surrénalienne uni- ou bilatérale sont le scanner surrénalien et le cathétérisme des veines surrénaliennes. Le scanner est l’examen le plus simple à réaliser, mais les adénomes de Conn sont souvent de petite taille et un scanner normal n’élimine pas l’adénome de Conn. A contrario, les glandes surrénales des sujets de plus de 50 ans sont souvent le siège de nodules aspécifiques qui peuvent être un leurre. Le cathétérisme des veines surrénaliennes vise à doser dans l’effluent surrénalien la concentration d’aldostérone et à la comparer entre côté droit et côté gauche, une sortie unilatérale étant le témoin d’une maladie potentiellement curable par la chirurgie. Il s’agit néanmoins d’un examen invasif très spécialisé avec des difficultés de cathétérisme, notamment de la veine surrénalienne droite. L’examen est particulièrement utile, en cas de scanner douteux, chez un sujet pour lequel l’indication opératoire pourrait être portée en cas de maladie unilatérale. Chez un sujet jeune (< 40 ans) avec un hyperaldostéronisme primaire et un nodule surrénalien strictement unilatéral, il est possible de surseoir au cathétérisme.

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153
Q

Phéochromocytome
Ces tumeurs synthétisent des catécholamines telles que l’adrénaline et la noradrénaline ainsi que leurs métabolites : les métanéphrines. L’adrénaline et la noradrénaline exercent un effet cardiovasculaire vasoconstricteur et tachycardisant; elles élèvent la PA par la stimulation des récepteurs vasculaires α-adrénergiques et par la stimulation du système rénine-angiotensine; elles accélèrent le cœur par l’effet cardiaque β-adrénergique. Les phéochromocytomes dérivent de la médullosurrénale.

Les tumeurs sécrétantes qui dérivent de ganglions sympathiques sont appelées paragangliomes et siègent du pelvis à la base du crâne. Ceux-ci sécrètent plus rarement des catécholamines et n’entraînent que rarement une HTA. Présentation clinique
L’expression la plus fréquente de ces tumeurs est l’HTA, particulière par sa variabilité. La triade caractéristique de Ménard a une forte spécificité. Elle associe céphalées, souvent pulsatiles, sueurs et palpitations liées à une tachycardie associée à une HTA. Elle manque en revanche de sensibilité puisque seulement un tiers environ des patients porteurs de phéochromocytome présentent cette triade.

Une HTA sévère, intermittente et notamment caractérisée par l’alternance de phases d’hypertension et d’hypotension est évocatrice. Les phéochromocytomes sont néanmoins responsables d’HTA d’intensité variable voire minime et peuvent ainsi être découverts de manière fortuite, devant un incidentalome surrénalien chez un patient chez qui on avait au préalable diagnostiqué une HTA essentielle banale.

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154
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Diagnostic positif
Le diagnostic repose sur la mesure des métoxyamines (encore appelées métanéphrines) dans le plasma ou les urines de 24 heures. Les catécholamines (adrénaline, noradrénaline) sont produites de façon intermittente par le phéochromocytome, et le stress les élève de façon non spécifique, si bien que la mesure des catécholamines a une moindre valeur diagnostique. De plus, du fait de leur demi-vie, leur concentration plasmatique peut être normale en cas de sécrétion intermittente. Les métanéphrines ont, au contraire, une demi-vie longue et sont produites en permanence par les phéochromocytomes.

Un stress aigu majeur tel que la phase aiguë d’un infarctus du myocarde ou une insuffisance rénale peuvent entraîner une élévation des métanéphrines responsable de faux positifs. Des valeurs modérément élevées peuvent également être observées dans l’HTA essentielle.

C Imagerie
L’imagerie précise le nombre, le siège et les rapports de la (ou des) tumeur(s), et détecte d’éventuelles métastases.

Les phéochromocytomes de l’adulte sont bénins, uniques dans la majorité des cas et de grande taille, donc faciles à localiser par scanner ou IRM.

Les paragangliomes, les tumeurs multiples et les phéochromocytomes malins associés à des métastases sont généralement dépistés par TDM thoraco-abdomino-pelvien. Divers outils d’imagerie fonctionnelle peuvent également être proposés avec divers traceurs.

L’imagerie fonctionnelle classique qu’est la scintigraphie à la méta-iodobenzylguanidine (MIBG) est de moins en moins utilisée et a été supplantée par la tomographie par émission de positons (TEP) au fluorodésoxyglucose (FDG) – dont la positivité n’est pas synonyme de malignité dans les phéochromocytomes –, et par la TEP à la F-DOPA et la TEP-DOTATOC ou TEP-DOTANOC – visualisant les récepteurs de la somatostatine.En cas de phéochromocytome de statut mutationnel non connu, l’examen d’imagerie fonctionnelle de choix est la TEP à la F-DOPA ou la TEP-DOTATOC en cas de paragangliome abdominal.

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155
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Enquête génétique
Environ 40 % des phéochromocytomes sont secondaires à une anomalie génétique germinale susceptible d’être transmise au sein des familles. Celle-ci peut s’intégrer dans un contexte syndromique (neurofibromatose de type 1, maladie de von Hippel-Lindau, néoplasie endocrinienne multiple de type 1, etc.) ou non, mais une anomalie génétique est retrouvée dans au moins 20 % des formes apparemment sporadiques.

De fait, il est recommandé de systématiquement dépister une maladie génétique devant un phéochromocytome ou un paragangliome, même en l’absence d’antécédent familial évident.Parmi les autres causes génétiques, citons les mutations du gène RET, qui sont responsables de néoplasies endocriniennes multiples de type 2 (carcinome médullaire thyroïdien, hyperparathyroïdie primaire).

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156
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Traitement
Le traitement du phéochromocytome est l’exérèse chirurgicale.l est donc indispensable de réaliser un bilan préopératoire du retentissement vasculaire, de préparer les patients en essayant de normaliser tant que se peut la PA avant la chirurgie grâce à des alpha-bloquants seuls ou associés à d’autres antihypertenseursIl est donc essentiel de réaliser un suivi très prolongé (au moins 10 ans) de tout patient opéré d’un phéochromocytome, même en cas de rémission complète.

Celui-ci est réalisé grâce à la clinique et au dosage des métanéphrines

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158
Q

Autres causes rares d’hypertension artérielle endocrine
Acromégalie
L’HTA est fréquente dans l’acromégalie et peut être améliorée par la correction de l’hypersécrétion de l’hormone de croissance (voir Item 244, chapitre 15). Dans ces conditions, le dépistage biologique repose sur le dosage de l’IGF-1.

Syndrome de Cushing
Le syndrome de Cushing, indépendamment de son étiologie, peut également entraîner une HTA (voir Item 244, chapitre 15). Dans ce cas, le dépistage repose, selon les conditions, sur un seul des tests suivants : recueil des urines de 24 heures pour mesure du cortisol libre urinaire et de la créatininurie, test de freinage minute avec 1 mg de dexaméthasone, ou dosage du cortisol salivaire après un recueil au coucher à partir de 22 heures, lorsque ce dosage est disponible.

Autres
L’HTA peut également être rencontrée dans l’hyperthyroïdie et l’hyperparathyroïdie primaire.

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159
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Points clés

*L’enquête initiale pour une HTA (interrogatoire, examen clinique, dosage de la kaliémie) a pour but de ne pas méconnaître une HTA secondaire potentiellement curable, parmi lesquelles les HTA endocrines.
*Les causes surrénaliennes d’HTA sont les hyperaldostéronismes primaires (HAP), les phéochromocytomes et les syndromes de Cushing.
Hyperaldostéronismes primaires

*L’HAP est la cause d’HTA endocrine la plus fréquente et potentiellement curable par la chirurgie.
*L’HAP est associé à un surrisque cardiovasculaire et rénal par rapport à l’HTA essentielle.
*L’HAP doit être dépisté systématiquement par la mesure de la kaliémie et recherché en cas d’HTA résistant au traitement, chez un sujet jeune, avec un retentissement vasculaire disproportionné par rapport à la sévérité de l’HTA.
* Le dépistage de l’HAP repose sur la mesure en position assise du rapport aldostérone/rénine plasmatique qui est élevé. Celui-ci doit idéalement être réalisé avant la mise sous traitement antihypertenseur ou après un wash-out des substances interférant avec le système rénine-angiotensine. On ne conservera que les calcibloqueurs et les alpha-bloqueurs. La contraception orale et un régime désodé strict peuvent également perturber la biologie du système rénine-angiotensine.
*La différenciation entre production unilatérale (adénome) ou bilatérale d’aldostérone conditionne les indications thérapeutiques (bilatérale : traitement médical par antagoniste du récepteur minéralocorticoïde; unilatérale : possible surrénalectomie unilatérale), mais est difficile; elle ne repose pas sur le seul scanner et doit être réalisée en milieu très spécialisé.
Phéochromocytome

  • Le phéochromocytome est une cause rare d’HTA d’intensité variable, parfois très sévère, mais parfois aussi d’allure banale.
  • Le diagnostic de phéochromocytome repose sur le dosage des métanéphrines plasmatiques ou urinaires.
    *Le traitement du phéochromocytome est chirurgical, par une équipe anesthésique entraînée, après préparation tensionnelle par des alpha-bloquants.
    *Le phéochromocytome est la tumeur endocrine répondant le plus fréquemment à un déterminisme génétique et doit donc bénéfi cier d’une enquête génétique systématique.
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Q

Le diagnostic d’une hypoglycémie est généralement aisé dans le contexte du diabète traité par insuline (voir Item 247, chapitre 18), sulfonylurées (sulfamides hypoglycémiants) ou glinides. Les hypoglycémies postprandiales immédiates, réactives, après chirurgie du pylore ou surtout après chirurgie de restriction de l’estomac sont également de diagnostic facile.

En dehors de ce contexte, le diagnostic d’hypoglycémie organique peut être difficile. Il est souvent porté par excès, en particulier chez des patients qui viennent en consultation avec la ferme conviction d’avoir des « hypoglycémies ». Cela peut conduire à la réalisation d’examens inutiles, coûteux et non dépourvus de risques. Ainsi, les « hypoglycémies » dites fonctionnelles – manifestations neurovégétatives en l’absence d’hypoglycémie, éventuellement rythmées par la prise alimentaire – restent un diagnostic incertain, qu’on ne devrait pas évoquer en l’absence d’hypoglycémie veineuse documentée.

La démarche diagnostique devant une symptomatologie évocatrice d’hypoglycémie chez un sujet non diabétique demande par conséquent beaucoup de rigueur tant à l’étape du diagnostic positif de l’hypoglycémie qu’à celle du diagnostic étiologique. L’étape du diagnostic étiologique est dominée par la recherche d’un insulinome, cause la plus fréquente des hypoglycémies organiques de l’adulte.

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éfinition
Le diagnostic d’hypoglycémie repose sur la constatation simultanée de signes de neuroglucopénie et d’une glycémie veineuse (et pas seulement capillaire) basse, ainsi que sur la correction des symptômes lors de la normalisation de la glycémie : c’est la triade de Whipple. Dans cette définition, deux points méritent l’attention :

*les symptômes et la glycémie basse doivent être simultanés. Ainsi, une glycémie basse isolée ne suffit pas à porter le diagnostic. En effet, la glycémie veineuse normale d’un sujet sain après 72 heures de jeûne peut atteindre chez certains sujets 0,40 g/l (essentiellement chez des jeunes femmes minces). Il faut cependant noter que, chez certains patients présentant des hypoglycémies à répétition dans le cadre d’hypoglycémies organiques, des mécanismes d’adaptation se mettent en place et des valeurs basses pathologiques de glycémie peuvent ne pas s’accompagner des signes cliniques habituels;
*les symptômes spécifiques de neuroglucopénie doivent être différenciés de ceux, peu spécifiques et inconstants, de la réaction adrénergique qui précèdent et accompagnent l’hypoglycémie.
Le niveau seuil de glycémie habituellement retenu pour le diagnostic d’une hypoglycémie en dehors du diabète est de 0,50 g/l (2,75 mmol/l).

Chez le diabétique, la valeur retenue est de 0,70 g/l (3,9 mmol/l).

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Physiopathologie
Plusieurs systèmes hormonaux participent au maintien de la glycémie entre 0,60 et 0,90 g/l (3,3 à 5,0 mmol/l) à jeun et 1,20 à 1,30 g/l (6,7 à 7,2 mmol/l) après les repas. Lors d’un jeûne prolongé, la glycémie baisse et le cerveau utilise d’autres substrats, essentiellement les corps cétoniques.

Les principales hormones qui ont un effet significatif sur la glycémie sont :

*l’insuline, principal facteur hypoglycémiant, dont la concentration s’élève après le repas et diminue pendant le jeûne;
*les facteurs de croissance apparentés à l’insuline, IGF-1 et IGF-2, dont l’effet hypoglycémiant n’est significatif que pour des concentrations très fortes, pharmacologiques ou tumorales;
*les hormones dites de contre-régulation, qui ont un effet hyperglycémiant :
–le glucagon;
–l’hormone de croissance (GH);
–les catécholamines;
–le cortisol;
–beaucoup plus accessoirement, la somatostatine.
Lors de la baisse de la glycémie induite par une injection d’insuline chez des témoins, on observe une graduation selon la profondeur de l’hypoglycémie :

*le glucagon, l’adrénaline et l’hormone de croissance sont d’abord sécrétés, puis le cortisol;
*les symptômes apparaissent lorsque la glycémie baisse en dessous de 0,55 g/l (3 mmol/l) et les troubles cognitifs en dessous de 0,35 g/l (2 mmol/l).
Lors de la répétition des épisodes d’hypoglycémie, en particulier chez le diabétique traité par insuline, les seuils de sécrétion des hormones de contre-régulation s’abaissent et les symptômes neurovégétatifs s’atténuent ou sont retardés, de sorte que les symptômes de dysfonction cérébrale sont au premier plan. Une hypoglycémie chez l’adulte peut être la conséquence :

*d’une sécrétion inappropriée d’insuline;
*ou, plus rarement :
–d’un défaut de sécrétion d’une des hormones de contre-régulation, en particulier le cortisol (insuffisance surrénalienne d’origine centrale ou périphérique);
–d’un déficit de néoglucogenèse (insuffisance hépatique ou rénale sévère);
–d’un défaut de substrat (cachexie).

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Symptômes d’hypoglycémie
L’interrogatoire du patient en cas de malaise atypique est primordial pour bien rechercher et différencier les deux types de symptômes.

A Signes adrénergiques
Ce sont les signes de la réaction adrénergique (neurovégétative) à l’hypoglycémie :

*anxiété, tremblements, sensation de chaleur;
*nausées;
*sueurs;
*pâleur;
*tachycardie, palpitations.
Ces symptômes ne sont pas spécifiques et peuvent être présents également en cas de malaise vagal par exemple.

B Signes de neuroglucopénie
Ces signes sont la manifestation d’une dysfonction focale ou généralisée du système nerveux. Ils sont multiples, mais généralement similaires d’un épisode à l’autre chez un même patient :

*troubles de concentration, fatigue, troubles de l’élocution, du comportement, ou symptômes psychiatriques francs;
*troubles moteurs, hyperactivité, troubles de la coordination des mouvements, tremblements, hémiparésie, diplopie, paralysie faciale, etc.;
*troubles sensitifs, paresthésies d’un membre, paresthésies péribuccales;
*troubles visuels;
*convulsions focales ou généralisées;
*confusion.
Ces symptômes neuroglucopéniques témoignent d’une cause organique à l’hypoglycémie. En effet, les « hypoglycémies fonctionnelles » n’entraînent classiquement pas de signes neuroglucopéniques.

C Coma hypoglycémique
Au maximum, le coma hypoglycémique présente souvent les caractéristiques suivantes :

*de profondeur variable, pouvant aller jusqu’à des comas très profonds;
*de survenue rapide, précédé des signes classiques d’hypoglycémie;
*souvent agité, tonique;
*avec parfois des signes d’irritation pyramidale et une hypothermie;
*chez un patient pâle et couvert de sueurs.
Chez tout patient présentant des troubles de conscience de quelque profondeur que ce soit, il est de règle de mesurer immédiatement la glycémie (capillaire et/ou veineuse).

Ces symptômes sont souvent favorisés par le jeûne et l’exercice physique; le coma est fréquemment précédé de symptômes mineurs.

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Étiologies des hypoglycémies organiques
A Hypoglycémies chez le diabétique

Les hypoglycémies les plus fréquentes surviennent chez les diabétiques traités par de l’insuline et des hypoglycémiants oraux (insulino-sécrétagogues). Ces causes sont traitées dans l’Item 247, chapitre 18.

B InsulinomesClinique
L’insulinome entraîne des épisodes d’hypoglycémie, parfois très épisodiques, chez des adultes souvent jeunes et bien portants. La symptomatologie est souvent dominée par les manifestations adrénergiques. Les signes de neuroglucopénie sont rarement au premier plan et souvent mal rapportés par le patient. Un interrogatoire rigoureux doit impérativement les rechercher. Le diagnostic est ainsi souvent retardé, même chez des patients ayant de fréquents épisodes hypoglycémiques; certains patients reçoivent pendant plusieurs années des diagnostics neurologiques ou psychiatriques divers. Les épisodes d’hypoglycémie surviennent plus volontiers à jeun ou à l’effort. Les malaises nocturnes sont également évocateurs. La répétition des épisodes peut s’accompagner d’une prise de poids, souvent modérée, chez 30 % des patients.

2 Diagnostic
Les étapes du diagnostic sont représentées dans la figure 11.1.Diagnostic positif
Le diagnostic positif d’insulinome (tableau 11.1) repose sur la mise en évidence d’une sécrétion inappropriée d’insuline et de peptide C (et donc de leur précurseur, la pro-insuline) en présence d’une glycémie veineuse basse, dans le cas d’une hypoglycémie spontanée ou, lorsque le prélèvement lors d’une hypoglycémie spontanée n’a pas été possible, lors d’une épreuve de jeûne. L’épreuve de jeûne de 72 heures doit impérativement être réalisée en hospitalisation sous surveillance médicale et paramédicale stricte en raison du risque élevé d’hypoglycémies graves. Lors d’une hypoglycémie veineuse inférieure à 0,45 g/l, une concentration d’insuline, de peptide C et de pro-insuline mesurable et donc inappropriée permet d’affirmer le diagnostic de sécrétion inappropriée d’insuline. Lors de l’hypoglycémie, on observe parallèlement, au cours du jeûne, chez ces patients avec une sécrétion inappropriée d’insuline, des niveaux bas de β-hydroxybutyrates plasmatiques en raison de l’action puissamment anticétogène de l’insuline. L’encadré 11.1 présente les paramètres biologiques d’une épreuve de jeûne mettant en évidence une sécrétion inappropriée d’insuline chez une patiente présentant un insulinome.Différents diagnostics différentiels sont à évoquer en fonction du bilan hormonal réalisé au moment de l’hypoglycémie.

En premier lieu, il faut penser à une prise cachée d’insuline ou de sulfonylurées. Ces hypoglycémies « factices » sont souvent le fait de patients proches du milieu médical ou proches d’un diabétique, ayant souvent des antécédents psychiatriques. Exceptionnellement, l’administration cachée est le fait d’un tiers, dans un but criminel ou dans le cadre d’un syndrome de Münchhausen « par procuration ».

Chez les patients qui ont des prises cachées d’insuline lors de l’épreuve de jeûne, le plus souvent le tableau biologique est le suivant : hypoglycémie avec une insuline dosable voire très augmentée, alors que le peptide C et la pro-insuline sont indosables. Toutefois, certains analogues de l’insuline utilisés dans le traitement du diabète rendent parfois le diagnostic d’hypoglycémies factices plus difficile, car l’insuline injectée n’est pas reconnue par le dosage utilisé. On aura alors une hypoglycémie avec insulinémie, peptide C et pro-insulinémie indosables.

Chez les patients qui ont des prises cachées de sulfonylurées ou de glinides, le tableau biologique est le suivant : hypoglycémie avec une insuline et un peptide C dosables, similaire au tableau de l’insulinome. Il est par conséquent indispensable de doser les sulfonylurées et les glinides lors de l’hypoglycémie à la moindre suspicion.

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Traitement
Le traitement de l’insulinome repose sur l’exérèse chirurgicale de la tumeur.

En attendant la chirurgie, des traitements médicamenteux peuvent permettre de normaliser la glycémie. Le médicament le plus prescrit en première intention dans cette indication est le diazoxide (sulfamide hypoglycémiant) après avoir vérifié l’absence d’allergie connue aux sulfamides. Ce médicament bloque la sécrétion d’insuline via l’ouverture des canaux potassiques des cellules p pancréatiques. Il peut entraîner une rétention hydrosodée et, chez la femme, un hirsutisme en cas d’utilisation prolongée. Les analogues de la somatostatine de première génération peuvent également être utilisés avec une efficacité chez environ 50 % des patients; le pasiréotide, analogue de la somatostatine capable de lier plusieurs types de récepteurs, a été utilisé dans certaines formes d’insulinome réfractaire, avec de bons résultats. Dans tous les cas, un fractionnement des repas ainsi qu’une contre-indication relative à la conduite automobile doivent être discutés avec le patient.

Recommandation de la Société française d’endocrinologie portant sur le diagnostic des hypoglycémies organiques (2013)

Chez un patient ayant présenté une triade de Whipple, une glycémie veineuse < 0,45 g/l associée à une insulinémie ≥ 3 mUI/l et à un peptide C ≥ 0,6 ng/ml avec absence de prise de sulfamide ou de glinide permet d’affirmer le diagnostic d’hypoglycémie par sécrétion inappropriée d’insuline.

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Points clés

  • Évoquer une hypoglycémie organique est parfois difficile en raison du caractère non spécifique des symptômes.
    *Le diagnostic positif d’une hypoglycémie repose sur la constatation simultanée de signes cliniques évocateurs (interrogatoire rigoureux) et d’une glycémie veineuse < 0,45 g/l.
    *Le diagnostic positif d’une sécrétion inappropriée d’insuline repose sur la mise en évidence d’une glycémie veineuse basse associée à une sécrétion inadaptée d’insuline et de peptide C (sans prise de sulfamides hypoglycémiants ou de glinides).
    *Devant une sécrétion inappropriée d’insuline, l’insulinome est le diagnostic étiologique le plus fréquent.
  • On éliminera une insuffisance surrénale ou corticotrope avant toute épreuve de jeûne.
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Définition
On parle de goitre devant une augmentation du volume thyroïdien diffuse ou localisée (goitre nodulaire). Le volume thyroïdien normal varie suivant l’âge et la surface corporelle.

Les critères échographiques sont un volume thyroïdien > 16 ml chez l’adolescent, > 18 ml chez la femme et > 20 ml chez l’homme.

En pratique clinique, on convient de parler de goitre lorsqu’à la palpation la surface de chacun des lobes excède celle de la dernière phalange du pouce (définition OMS). L’existence d’un goitre ne préjuge pas du fonctionnement thyroïdien.

II Épidémiologie

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Épidémiologie
Il s’agit d’une pathologie rencontrée chez plus de 10 % de la population, touchant 3 fois plus souvent les femmes que les hommes et dont la prévalence augmente avec l’âge (f

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Facteurs favorisants
La déficience iodée, même relative, constitue le principal facteur goitrigène. Elle augmente, en effet, la sensibilité du parenchyme thyroïdien à l’effet trophique de la TSH et favorise aussi la production intrathyroïdienne de facteurs de croissance tissulaire. L’apport iodé optimal est de 100 à 150 µg par jour chez l’adulte. Chez la femme enceinte, il est de 200 à 250 µg par jour.

En France, l’apport iodé journalier, longtemps insuffisant, a été optimisé grâce à l’instauration d’une supplémentation en iode du sel de table (qui ne concerne pas la cuisine de collectivité : cantines, restaurants, plats cuisinés, etc.) et à la diversification alimentaire.

Les apports journaliers en iode restent insuffisants chez la femme enceinte.

Une prédisposition familiale est souvent retrouvée. Plusieurs gènes de prédisposition ont été identifiés, mais il s’agit d’une affection multigénique qui ne justifie pas de dépistage.

Les follicules thyroïdiens ont des récepteurs pour les œstrogènes : les goitres apparaissent en général à la puberté, augmentent pendant la grossesse et en cas de multiparité, surtout en cas de carence iodée.

Le tabac, qui contient notamment des thiocyanates, est goitrigène, mais n’augmente pas le risque de cancer thyroïdien.

Le lithium, qui se comporte comme un antithyroïdien de synthèse, peut favoriser la survenue d’un goitre.

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Les goitres peuvent être découverts par le patient, l’entourage, le médecin lors d’une consultation ou fortuitement lors d’un examen d’imagerie (échographie ou scanner). La démarche diagnostique doit permettre d’évaluer les caractéristiques du goitre, de rechercher d’éventuelles complications et d’éliminer une authentique pathologie thyroïdienne dont le goitre peut être la première manifestation.

A Interrogatoire
L’interrogatoire précise les antécédents familiaux de maladie thyroïdienne, l’existence d’une gêne fonctionnelle (déglutition, respiratoire) ou d’éventuels symptômes de dysthyroïdie.

B Examen clinique
La palpation cervicale retrouve l’hypertrophie thyroïdienne ascensionnant à la déglutition, apprécie l’importance du goitre, son caractère homogène ou non, la présence éventuelle d’adénopathies. Il faut rechercher le caractère plongeant du goitre, que l’on suspecte lorsque le pôle inférieur des lobes n’est pas perçu lors de la déglutition. On recherche des signes de dysthyroïdie (hyperthyroïdie ou hypothyroïdie).

C Biologie

*En première intention : dosage de la TSH.
*En deuxième intention, si la TSH est anormale, dosage de T4 pour quantifier l’importance de la dysfonction hormonale :
–si TSH augmentée, le dosage des anticorps antithyroperoxydases ou antithyroglobine (en cas de négativité des anticorps anti-TPO) peut être envisagé à la recherche d’une thyroïdite auto-immune de Hashimoto;
–si TSH basse, suivant le contexte :
–goitre diffus, sujet jeune : dosage des anticorps antirécepteurs de la TSH dans l’hypothèse d’une maladie de Basedow;
–goitre plurinodulaire : scintigraphie thyroïdienne à la recherche d’un goitre multinodulaire toxique.
D Échographie thyroïdienne
Surtout utile lorsque le goitre est irrégulier, à la recherche de nodules, l’échographie thyroïdienne permet aussi d’apprécier l’aspect du parenchyme à la recherche d’une thyroïdite (aspect hypoéchogène), de mesurer le volume du goitre et de suivre son évolution. Il s’agit d’un examen opérateur-dépendant.

V Diagnostic étiologique
Dans l’immense majorité des cas, il s’agit d’un goitre simple ayant évolué vers une forme multinodulaire. Ce terme désigne les hypertrophies de la thyroïde normofonctionnelles (sans hyperthyroïdie ni hypothyroïdie), non inflammatoires (pas de thyroïdite), débutant généralement à l’adolescence, mais pouvant être diagnostiquées plus tardivement.

Initialement, l’hypertrophie est diffuse et homogène (fig. 12.3), le plus souvent modérée. Le parenchyme est souple, régulier. La TSH est normale et les anticorps antithyroïdiens négatifs permettent d’exclure une thyroïdite auto-immunitaire ou une maladie de Basedow.Au fil des années et des décennies, le goitre se remanie et certaines cellules acquièrent des mutations activatrices ou oncogéniques conduisant à l’apparition de nodules fonctionnels et de nodules non fonctionnels (fig. 12.4). C’est au stade de goitre plurinodulaire (fig. 12.5) qu’apparaît le risque de complications liées principalement au volume du goitre (risque de compression), au risque d’autonomisation progressive due aux nodules hyperfonctionnels (hyperthyroïdie), de survenue d’un cancer (nodules non fonctionnels).

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Principaux risques évolutifs d’un goitre
1 Hyperthyroïdie

En raison de l’augmentation progressive de volume des nodules hyperfonctionnels, le goitre peut s’autonomiser avec survenue d’une hyperthyroïdie qui reste longtemps fruste (TSH basse, dosages de T4 et T3 normaux), puis évolue vers la thyrotoxicose avec risque de complications cardiaques. La scintigraphie retrouve une alternance de plages fixantes et hypofixantes confirmant le goitre multinodulaire toxique. Il s’agit de la première cause d’hyperthyroïdie chez le sujet âgé. Le passage en hyperthyroïdie peut être déclenché par une surcharge en iode, par exemple à la suite d’une injection iodée lors d’un scanner par exemple. Un trouble du rythme à type de fibrillation auriculaire doit conduire à un dosage de TSH, dans l’hypothèse d’une hyperthyroïdie pouvant être en lien avec un goitre autonomisé méconnu (voir Item 242, chapitre 13).

2 Compression des organes de voisinage
Cette atteinte se marque par des troubles de la déglutition, une gêne respiratoire, plus rarement des signes de compression veineuse (turgescence jugulaire, circulation collatérale). À l’échographie, la partie basse du goitre n’est pas visualisée, en cas de goitre plongeant. De manière historique, la radiographie du thorax retrouvait un élargissement du médiastin supérieur et une déviation trachéale (fig. 12.6), mais actuellement des informations plus précises sont données par le scanner (fig. 12.7) qui sera toujours demandé par le chirurgien en préopératoire, en cas de goitre plongeant dans le médiastin à l’échographie cervicaleCancer thyroïdien
Un cancer thyroïdien est présent dans 4 % à 5 % des goitres/thyroïdes plurinodulaires. Les nodules suspects supérieurs à 10 mm à l’échographie doivent bénéficier d’une cytoponction systématiquement (voir plus loin, section « Nodules thyroïdiens »)..

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Principales causes de goitre
1 Maladie de Basedow

Le diagnostic est le plus souvent évoqué chez une femme jeune, présentant un goitre diffus, une hyperthyroïdie, associée à d’éventuels signes extrathyroïdiens (orbitopathie). Le dosage des anticorps antirécepteurs de la TSH confirme le diagnostic.

2 Thyroïdite subaiguë de De Quervain
Le début est brutal, le goitre est douloureux, très ferme, souvent irrégulier, avec des signes biologiques d’inflammation (augmentation de la protéine C réactive). Une hyperthyroïdie transitoire est possible par lyse cellulaire (relargage des hormones thyroïdiennes préformées, stockées dans la colloïde).

3 Thyroïdite auto-immunitaire de Hashimoto
Cette atteinte est caractérisée par l’association d’un goitre, d’une hypothyroïdie et d’anticorps antithyroïdiens à un titre élevé : anticorps antiperoxydase (TPO) et/ou anti-thyroglobuline (Tg).

4 Autres causes
Les autres causes sont exceptionnelles :

*trouble de l’hormonosynthèse en relation avec diverses anomalies moléculaires;
*sécrétion inappropriée de TSH : adénome thyréotrope ou syndrome de résistance aux hormones thyroïdiennes (voir Item 242, chapitre 13).

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Prise en charge thérapeutique
Le meilleur traitement (fig. 12.8) est la prévention par apport iodé suffisant pendant l’adolescence et la grossesse. L’intérêt d’un traitement par lévothyroxine au stade de goitre simple ou pendant la grossesse est discuté dans le but d’éviter l’augmentation du volume du goitre et/ou l’apparition de nodules thyroïdiens. Au stade de goitre nodulaire, les lésions sont irréversibles et les traitements thyroxiniques sont inefficaces pour limiter la progression du volume du goitre et/ou des nodules.Les goitres multinodulaires euthyroïdiens, non compressifs, sans suspicion de malignité peuvent bénéficier d’une surveillance. Dès que les goitres deviennent symptomatiques (gêne cervicale) ou en cas d’évolution vers une hyperthyroïdie, il faut envisager un traitement soit par chirurgie, soit par iode radioactif. En présence d’un nodule thyroïdien suspect, il faut envisager un traitement chirurgical. Avant toute décision thérapeutique, les diverses possibilités de prise en charge thérapeutique ou de surveillance sont présentées au patient et discutées au cas par cas.

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oints clés

  • Les goitres diffus homogènes s’organisent au fil des décennies en goitres plurinodulaires.
    *Au stade plurinodulaire, les goitres peuvent poser trois problèmes : compression locale, évolution vers une hyperthyroïdie, présence d’un cancer thyroïdien.
    *Le dosage de la TSH est l’examen de première intention.
    *Beaucoup des goitres simples de l’adulte peuvent bénéficier de la seule surveillance. La chirurgie ou l’iode radioactif, selon les cas, sont indiqués pour les goitres symptomatiques, hyperfonctionnels ou morphologiquement suspects.
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Nodules thyroïdiens

I Définition, contexte
On désigne sous le nom de nodule une hypertrophie localisée de la glande thyroïde, de forme généralement arrondie ou ovalaire. La majorité des nodules thyroïdiens sont bénins. Un certain nombre d’entre eux (de l’ordre de 5 %) sont des cancers, généralement de très bon pronostic; 10 % des nodules sont hyperfonctionnels à risque d’hyperthyroïdie. Pour la pathologie nodulaire thyroïdienne, on considère que les nodules sont soit bénins, soit malins, et que la transformation d’un nodule bénin en nodule malin n’est pas possible (ou excessivement rare). Cette notion et le faible risque de faux négatif d’une cytologie bénigne justifient la possibilité de suivi des nodules considérés comme bénins par la stratégie d’exploration actuellement proposée.

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Épidémiologie
Il s’agit d’une pathologie très fréquente, touchant 3 à 4 fois plus souvent les femmes que les hommes.

La prévalence clinique (nodules palpables) est d’environ 5 % chez la femme et de 1 % à 2 % chez l’homme. La prévalence échographique est plus élevée. La prévalence des nodules augmente avec l’âge.

III Mode de découverte
Le nodule peut être découvert à la palpation cervicale par le patient ou son médecin (40 % à 50 % des cas) mais, de plus en plus souvent (30 % à 40 % des cas), il s’agit d’une découverte fortuite lors d’un examen d’imagerie (échographie, scanner, scintigraphie, TEP) et cette proportion est en constante augmentation. Une dysthyroïdie est révélatrice dans 10 % à 15 % des cas.

IV Enjeux du diagnostic et de la prise en charge
On observe dans tous les pays industrialisés une augmentation de l’incidence des cancers thyroïdiens qui a été multipliée par six au cours des 30 dernières années aux dépens des petits cancers (≤ 10 mm), sans changement de la mortalité. L’enjeu est de ne pas « surdiagnostiquer » ces microcancers (≤ 10 mm), car il n’y a pas de bénéfice pour les patients. Ces constatations se rapprochent de ce qui est décrit pour les cancers de la prostate.

Ces éléments ont conduit en 2017 à la mise en place d’une task force internationale qui déconseille les échographies thyroïdiennes systématiques, demande de ne pas explorer les micronodules systématiquement (< 10 mm) et de bien peser la balance bénéfice-risque avant chirurgie pour limiter le surdiagnostic et les conséquences des chirurgies inutiles : santé (complications opératoires), qualité de vie (diagnostic de cancer, traitement substitutif), coûts.

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Stratégie diagnostique
L’objectif est de dépister un nodule hyperfonctionnel à risque d’hyperthyroïdie et de ne pas passer à côté d’un cancer à risque d’extension locorégionale ou à distance et/ou de décès (fig. 12.9). Il n’est pas utile d’explorer systématiquement les nodules de moins de 1 cm de diamètre.Évaluation initiale
1 Interrogatoire

L’interrogatoire précise les antécédents personnels (notamment irradiation cervicale dans l’enfance), familiaux (cancers thyroïdiens médullaires notamment), d’éventuels symptômes d’hyperthyroïdie.

2 Palpation cervicale
La palpation précise les caractéristiques du nodule : isolé ou non, consistance, volume, évolutivité et recherche des adénopathies. Le caractère très ferme ou dur, irrégulier, la présence de signes compressifs ou d’adénopathies sont suspects mais inconstants et, la plupart du temps, les nodules cancéreux ne diffèrent pas à l’examen clinique des nodules bénins. L’évolutivité et la taille ne sont pas synonymes de malignité. Il faut se méfier des nodules qui augmentent rapidement de volume (plus de 20 % en un an).

3 Bilan initial
Le bilan initial repose sur :l’échographie thyroïdienne (fig–plus sensible que la palpation :
–on doit disposer d’une échographie dédiée, réalisée par un opérateur entraîné (avec examen des aires ganglionnaires systématique) qui réalisera un schéma pour numéroter les nodules, ce qui permet d’assurer le suivi. Les résultats de l’échographie sont cotés pour chaque nodule selon un score (actuellement l’Eu-TIRADS, acronyme signifiant European Thyroid Reporting Imaging And Data System) qui donne une estimation du risque de malignité et varie, à titre indicatif, de 0 % à 87 % entre les scores Eu-TIRADS 2 à 5.
Les principaux facteurs pris en compte pour l’estimation du score sont l’échogénicité des nodules, la présence de microcalcifications, l’aspect des contours du nodule ou sa forme (ovalaire ou non ovalaire);
–A les nodules purement kystiques sont bénins;
*le dosage de TSH à la recherche d’une dysthyroïdie;
*le dosage de la calcitonine (CT) dans le but de dépister précocement un cancer médullaire de la thyroïde (CMT). L’intérêt d’un dosage systématique de calcitonine devant tout nodule est controversé en raison de la faible fréquence des CMT et de la possibilité de faux positifs. Les recommandations actuelles sont de le pratiquer systématiquement dans un contexte héréditaire connu de CMT, en cas de suspicion de malignité à la cytoponction et, de principe, avant toute intervention pour goitre ou nodule.

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Évaluation secondaire
La TSH est basse

Il s’agit probablement d’un adénome fonctionnel (10 % des nodules). Ces nodules peuvent évoluer vers une hyperthyroïdie (adénome toxique, voir fig. 13.4) et sont a priori bénins (d’où l’absence de nécessité de réaliser une cytoponction). On dose la T4L pour apprécier I ‘importance de l’hyperthyroïdie et on réalise une scintigraphie thyroïdienne (technétium 99 ou iode 123) qui montre le caractère hyperfonctionnel du nodule. Le nodule est dit extinctif lorsqu’il apparaît seul fixant, le tissu sain étant freiné (fi

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a TSH est normale ou élevée
La question de la nature du nodule est alors à déterminer : s’agit-il d’un cancer thyroïdien ?

L’examen utile est la cytoponction à l’aiguille fine du ou des nodules suspects (moins invasive qu’une biopsie). Elle est actuellement réalisée le plus souvent sous échographie.

L’indication est dictée par les résultats de l’échographie.

Une cytoponction est nécessaire en cas de nodule échographiquement suspect (selon la classification fondée sur les quatre critères de suspicion : forte hypoéchogénicité, microcalcifications, contours irréguliers (spiculés ou lobulés), forme non ovalaire), mesurant plus d’un centimètre de diamètre et comportant une composante solide; d’autant plus s’il existe un contexte à risque : antécédent familial de cancer médullaire de la thyroïde, antécédents de radiothérapie dans l’enfance (risque de cancer thyroïdien multiplié par 7) ou lorsque la présentation clinique est suspecte (adénopathies, métastases).

Les nodules découverts fortuitement lors d’une TEP-FDG doivent également bénéficier d’une cytoponction, car ils sont malins dans 30 % à 40 % des cas. Pour les nodules faiblement ou non suspects, la ponction n’est réalisée que s’ils mesurent plus de 15 à 20 mm.

Les résultats de la cytoponction reposent sur la classification de Bethesda, qui permet d’évaluer le risque de malignité et ainsi de proposer une conduite à tenir pour chacune des six catégories (voir fig. 12.9).

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Prise en charge
Les nodules hyperfonctionnels responsables d’une hyperthyroïdie sont traités par irathéra-pie ou chirurgie (lobectomie unilatérale possible s’il n’y a pas de nodule sur l’autre lobe (voir Item 242, chapitre 13).

Les nodules non fonctionnels sont surveillés ou opérés. Les nodules bénins (Bethesda 2) sont surveillés cliniquement et échographiquement, initialement de façon annuelle, puis espacée tous les 3 à 5 ans. La chirurgie peut se discuter lorsque le nodule bénin est volumineux (> 40 mm) et responsable d’une gêne fonctionnelle. Dans ces situations se développent actuellement des alternatives telles que la radiofréquence. Une chirurgie est nécessaire pour les nodules suspects ou malins (Bethesda 5 ou 6). En cas de nodule dit indéterminé (Bethesda 3 ou 4), la chirurgie n’est pas systématique et la prise en charge relève du spécialiste. Elle sera discutée avec le patient au cas par cas suivant le contexte.

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Les nodules thyroïdiens ont une forte prévalence, sont de découverte souvent incidentale et le plus souvent bénins (95 %).
*Ne pas dépister ni explorer systématiquement les micronodules (< 1 cm).
*Les nodules hyperfonctionnels sont à risque d’évolution vers une hyperthyroïdie et ne sont pratiquement jamais malins.
*Stratégie diagnostique bien codifiée à respecter pour éviter des chirurgies inutiles. Examens de première intention : TSH et échographie :
–si TSH basse : scintigraphie thyroïdienne à la recherche d’un nodule toxique;
–si TSH normale ou élevée : cytoponction échoguidée en cas de nodule à risque à l’échographie.
*Dosage de la calcitonine systématique avant chirurgie.
*Indications thérapeutiques dictées par le résultat des explorations, notamment classification cytologique de Bethesda.

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Cancers thyroïdiens

Le cancer de la thyroïde est le plus fréquent des cancers endocriniens. Le pronostic d’ensemble est bon.

I Mode de découverte
Le plus souvent, le diagnostic est évoqué devant un nodule thyroïdien mis en évidence par l’examen clinique ou, de plus en plus fréquemment, de découverte fortuite à l’occasion d’un examen d’imagerie.

Les caractéristiques du nodule peuvent faire suspecter un cancer s’il est dur, irrégulier, adhérent, rapidement progressif et parfois associé à des adénopathies mais, le plus souvent, il s’agit d’un nodule isolé d’allure banale.

Plus rarement, le cancer thyroïdien est révélé par :

*une adénopathie cervicale;
*des signes de compression : paralysie récurrentielle;
*des flushes et/ou une diarrhée en lien avec un cancer médullaire (calcitonine) : rare, signant une forme évoluée déjà métastatique;
*des symptômes en lien avec une localisation métastatique pulmonaire ou osseuse (fracture pathologique); si on suspecte une origine thyroïdienne, on recherche si la métastase sécrète de la thyroglobuline (cancer de souche vésiculaire) ou calcitonine (cancer médullaire de la thyroïde). La thyroglobuline ne doit pas être dosée en dehors de ce cas particulier (suspicion de métastase à distance d’un cancer de la thyroïde). La thyroglobuline ne permet pas de faire le diagnostic de cancer de la thyroïde, car elle est sécrétée aussi bien par la cellule thyroïdienne normale que tumorale.

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I Anatomie pathologique
On distingue schématiquement cinq grands types histologiques (tableau 12.1) :

Tableau 12.1

Présentation simplifiée de l’histologie des cancers thyroïdiens.

Sujets jeunes Cancer différencié le plus souvent
Presque toujours carcinome papillaire d’excellent pronostic (marqueur de suivi : la thyroglobuline)
Rarement : carcinome médullaire développé aux dépens des cellules C (marqueur diagnostique et de suivi : la calcitonine), familiaux dans 25 % des cas (NEM2)
Sujets âgés Possibilité de cancers peu différenciés ou indifférenciés (anaplasiques) de très mauvais pronostic
(Source : CEEDMM, 2021.)

*les carcinomes d’origine vésiculaire (développés aux dépens des cellules folliculaires thyroïdiennes, d’origine épithéliale); ils représentent 90 % à 95 % des cas de cancers thyroïdiens. La thyroglobuline, protéine d’origine exclusivement thyroïdienne, est utilisée comme marqueur de suivi. Ce groupe comprend :
–les carcinomes papillaires différenciés : 85 % des cas, d’excellent pronostic (95 % de survie à 10 ans), qui se caractérisent par la fréquence des atteintes ganglionnaires. Le diagnostic cytologique et histologique repose sur la présence d’anomalies caractéristiques des noyaux;
–les carcinomes vésiculaires différenciés : 5 %, qui ont un tropisme ganglionnaire moindre et peuvent avoir une dissémination hématogène. Le diagnostic de certitude est uniquement histologique; il repose sur la mise évidence d’une invasion vasculaire et/ou de la capsule de la tumeur;
–les carcinomes peu différenciés et oncocytaires : 2 % à 5 %, de pronostic plus défavorable;
–les carcinomes anaplasiques : ils sont rares (1 %), survenant surtout chez le sujet âgé. Leur pronostic est très péjoratif (survie relative à 1 an de 15 %) et ils nécessitent une prise en charge en urgence. Ils sont responsables des trois quarts des décès par cancer thyroïdien.
*les carcinomes médullaires, développés aux dépens des cellules C : ils représentent 5 % des cas; ce sont des tumeurs neuroendocrines dont le marqueur est la calcitonine, qui expriment aussi l’antigène carcinoembryonnaire (ACE). Leur pronostic dépend du stade au diagnostic. Ils ont la particularité de s’intégrer, dans 25 % des cas, à des syndromes de prédisposition familiale, les néoplasies endocriniennes multiples de type 2 (NEM2) liées à différentes mutations activatrices de l’oncogène RET qui prédispose aux formes familiales de cancer médullaire de la thyroïde ou à la NEM2A. La NEM2A peut associer chez un même patient un carcinome médullaire de la thyroïde, un phéochromocytome et une hyperparathyroïdie primaire.
*autres cancers : rares (1 %); il peut s’agir de lymphomes ou de métastases thyroïdiennes d’un autre cancer (notamment cancer du rein à cellules claires).

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Points clés

Les cancers thyroïdiens ont un bon pronostic d’ensemble.
* Il s’agit le plus souvent de cancers bien différenciés de type papillaire.
*Les cancers anaplasiques sont rares mais de très mauvais pronostic.
*Les cancers médullaires sont familiaux dans 25 % des cas, pouvant s’intégrer dans une NEM2.

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Définition
L’hyperthyroïdie constitue l’ensemble des troubles liés à l’hyperfonctionnement de la glande thyroïde.

Le syndrome de thyrotoxicose correspond aux conséquences de l’excès d’hormones thyroïdiennes au niveau des tissus cibles, quelle que soit sa cause (par exemple un excès d’hormones thyroïdiennes exogènes).

La prévalence de l’hyperthyroïdie est élevée mais variable selon les pays (0,2 % à 1,9 % toutes causes confondues). Le sex-ratio femme/homme est d’environ 7.

II Syndrome de thyrotoxicose
A Manifestations cliniques

L’intensité des manifestations cliniques dépend du degré de la thyrotoxicose, de sa durée et du terrain.

C’est l’association de plusieurs troubles qui fait évoquer le diagnostic. Ceux-ci sont présentés par ordre de fréquence dans le tableau 13.1.

Tableau 13.1

Principaux signes et symptômes associés à la thyrotoxicose chez l’adulte.

Symptômes et signes cliniques Fréquence
Tachycardie de repos 96 %
Nervosité 93 %
Asthénie 88 %
Palpitations 86 %
Amaigrissement avec polyphagie 83 %
Thermophobie 82 %
Hypersudation 80 %
Tremblement 73 %
Dyspnée d’effort 73 %
Fatigabilité musculaire, amyotrophie 70 %
Polyexonération 35 %
Prurit 18 %
Œdème des membres inférieurs 13 %
Fibrillation auriculaire 10 %

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Troubles cardiovasculaires
Ces troubles se caractérisent par :

*une tachycardie régulière, sinusale, persistant au repos, avec palpitations et parfois dyspnée d’effort;
*une augmentation de l’intensité des bruits du cœur (éréthisme), avec parfois un souffle systolique de débit;
*un pouls vibrant;
*et parfois une élévation de la PA systolique.
2 Troubles neuropsychiques
Ces troubles sont caractérisés par :

*une nervosité excessive, une agitation psychomotrice et une labilité de l’humeur;
*un tremblement fin et régulier des extrémités;
*une fatigue générale;
*des troubles du sommeil.
3 Thermophobie
La thermophobie est accompagnée d’une hypersudation, avec les mains chaudes et moites.

4 Amaigrissement
L’amaigrissement est :

*rapide et souvent important;
*contrastant avec un appétit conservé ou augmenté (polyphagie).
5 Autres manifestations fréquentes

*Polydipsie : conséquence de l’augmentation de la production de chaleur.
*Amyotrophie : prédominant aux racines et accompagnée d’une diminution de la force musculaire (signe « du tabouret »).
*Augmentation de la fréquence des selles par accélération du transit.
6 Manifestations rares
Rarement, gynécomastie chez l’homme (par augmentation de la protéine porteuse des stéroïdes sexuels SHBG; voir Item 246, chapitre 17) et troubles des règles (de tous types) chez la femme; mais la fertilité est conservée.

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Diagnostic
1 Confirmation de la thyrotoxicose

  • La TSH est l’examen de première intention (recommandations de la SFE 2016).
    *Lorsque la TSH est basse, on dose en deuxième intention la T4L pour apprécier l’importance de la thyrotoxicose.
    *Lorsque l’hyperthyroïdie est cliniquement évidente, il est possible de demander en première intention la TSH et la T4L pour ne pas retarder la prise en charge.
    *Le dosage de T3L n’est nécessaire que si la T4L est normale, afin de rechercher une hyperthyroïdie à T3.
    La TSH est constamment effondrée en cas d’hyperthyroïdie, en dehors de deux pathologies extrêmement rares, s’accompagnant de TSH inappropriée (TSH normale ou augmentée avec T4L et/ou T3L augmentée) : adénome hypophysaire à TSH et résistance aux hormones thyroïdiennes (liée à une mutation du récepteur p aux hormones thyroïdiennes). Le profil hormonal très inhabituel doit faire évoquer ces deux étiologies.

2 Signes biologiques non spécifiques
Perturbations inconstantes, mais pouvant révéler la maladie :

*diminution du cholestérol et des triglycérides (fonction des chiffres antérieurs);
*discrète hyperglycémie (parfois) et, surtout, aggravation d’un diabète associé;
*élévation des enzymes hépatiques;
*leuconeutropénie avec lymphocytose relative.

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Complications de la thyrotoxicose
1 Complications cardiaques (cardiothyréose)

Ces complications peuvent être graves et révélatrices, notamment chez le sujet âgé ou les sujets fragiles présentant une pathologie cardiaque associée :

*troubles du rythme cardiaque : il s’agit principalement de troubles du rythme supraventri-culaires à type de fibrillation auriculaire (FA). Ils sont rares avant 40 ans;
*insuffisance cardiaque : elle est associée généralement à une FA;
*aggravation ou révélation d’une insuffisance coronaire : l’hyperthyroïdie ne crée pas la maladie, mais peut l’aggraver du fait de l’augmentation du débit cardiaque.
2 Crise aiguë thyrotoxique
Cette crise est exceptionnelle, survenant surtout après thyroïdectomie en l’absence de préparation médicale. Il s’agit d’une exacerbation des symptômes de l’hyperthyroïdie, avec fièvre, déshydratation, troubles cardiovasculaires et neuropsychiques pouvant mettre en jeu le pronostic vital.

3 Ostéoporose

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Étiologie des hyperthyroïdies
Une fois le diagnostic de thyrotoxicose établi, se pose la question de son origine, car les causes sont nombreuses. Parfois, le diagnostic est évident cliniquement (présence d’une orbitopathie, par exemple, évocatrice d’une maladie de Basedow); dans d’autres cas, le diagnostic s’appuie sur des examens complémentaires. En Europe, les causes les plus fréquentes sont (par ordre décroissant) :

*la maladie de Basedow;
*le goitre multinodulaire toxique;
*l’adénome toxique.
A Hyperthyroïdies d’origine auto-immune
1 Maladie de Basedow (Graves’ disease)

Il s’agit de la cause la plus fréquente d’hyperthyroïdie chez la femme jeune.

Elle atteint 1,9 % des femmes et 0,4 % des hommes (soit 1 % de la population).

Les caractéristiques de cette maladie sont les suivantes :

*c’est une maladie auto-immune due à des anticorps stimulant le récepteur de la TSH;
*elle est parfois associée à d’autres maladies auto-immunes, chez le patient ou dans sa famille;
*elle évolue soit sous forme d’un épisode unique (40 °% à 50 °% des cas) soit récidivant (50 % à 60 % des cas).
Particularités cliniques
Aux signes de thyrotoxicose, présents à des degrés divers, s’associent dans les formes typiques :

un goitre (fig. 13.1) d’importance variable, diffus, homogène, élastique, vasculaire (présence d’un souffle à l’auscultation de la thyroïde ou d’un thrill à la palpation);des manifestations oculaires (voir paragraphe VI).
Diagnostic
Lorsqu’il existe des manifestations oculaires spécifiques, le diagnostic de maladie de Basedow est certain. En ce cas, la mesure des anticorps antirécepteurs de la TSH (TRAK) n’est pas indispensable pour le diagnostic, mais utile pour apprécier l’importance du phénomène auto-immun. En l’absence de manifestations orbitaires, le diagnostic repose en première intention sur la mesure des TRAK : un titre élevé permet d’affirmer la maladie de Basedow.

En revanche :

*il est n’est pas indiqué d’en suivre l’évolution en cours de traitement;
*en fin de traitement médicamenteux par antithyroïdien de synthèse, un titre élevé d’anticorps antirécepteurs de TSH est un facteur prédisposant à la rechute, tandis que leur disparition ne permet pas d’affirmer la guérison.
Lorsque le titre des anticorps antirécepteurs de TSH est en dessous du seuil de positivité, la scintigraphie est indiquée pour faire le diagnostic étiologique (sauf en cas de grossesse ou allaitement qui la contre-indique). Elle montre une hyperfixation diffuse et homogène de l’isotope (fig. 13.2).L’écho-Doppler thyroïdien peut constituer une alternative, notamment en cas de grossesse. Il retrouve une glande globalement hypoéchogène et très vascularisée.

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Autres hyperthyroïdies auto-immunes
Thyroïdite du post-partum
La thyroïdite du post-partum touche environ 5 % à 10 % des femmes dans les semaines suivant l’accouchement, mais passe souvent inaperçue. Elle peut récidiver après chaque grossesse. Elle se manifeste par une hyperthyroïdie transitoire (avec scintigraphie « blanche » – en raison de la lyse de certains thyréocytes qui provoque un relargage dans la circulation des hormones thyroïdiennes préformées qui freinent la TSH), suivie d’une hypothyroïdie le plus souvent transitoire. Elle s’accompagne d’anticorps antithyroperoxydase très positifs sans anticorps antirécepteurs de la TSH.

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Nodules thyroïdiens hypersécrétants
Ces nodules (voir Item 241, chapitre 12) constituent la première cause d’hyperthyroïdie chez le sujet âgé. Ils se traduisent par un syndrome de thyrotoxicose pur, sans atteinte oculaire. Les nodules hypersécrétants peuvent être révélés par une complication cardiaque.

1 Goitre multinodulaire toxique
Le goitre multinodulaire toxique (fig. 13.3) constitue l’évolution naturelle des goitres multinodulaires anciens.Ses caractéristiques sont les suivantes :

*l’hyperthyroïdie peut être déclenchée par un apport massif d’iode (examen avec produit de contraste iodé, médicament);
*l’examen clinique montre un goitre multinodulaire, confirmé par l’échographie;
*la scintigraphie, si elle est pratiquée, montre une alternance de plages chaudes (en regard des nodules autonomes, hyperfonctionnels) et froides (en regard du parenchyme thyroïdien sain adjacent aux nodules) (dénome toxique
Les caractéristiques de l’adénome toxique sont les suivantes :

*l’examen clinique peut permettre de palper un nodule unique, tissulaire ou partiellement kystique à l’échographie;
*la scintigraphie est nécessaire au diagnostic (voir fig. 13.3 et fig. 12.11) : hyperfixation de l’isotope au niveau du nodule, tandis que le reste du parenchyme est hypofixant ou froid (ou « éteint »), en raison de la diminution de la TSH.

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Hyperthyroïdies iatrogènes
1 Iode

Les produits de contraste iodés et surtout un médicament antiarythmique, l’amiodarone (Cordarone®, à 75 mg d’iode/cp), peuvent être responsables d’une thyrotoxicose. Leur gravité est liée au terrain (patients fragiles sur le plan cardiaque).

L’amiodarone induit une saturation en iode de la thyroïde, très prolongée (plusieurs mois), et une dysthyroïdie chez 10 % des patients traités.

Deux mécanismes sont possibles :

*effet de l’apport important d’iode sur une pathologie thyroïdienne préexistante entraînant une hyperthyroïdie dans les semaines ou mois qui suivent l’introduction du traitement en général; dans ce cas, il existera une fixation de l’iode à la scintigraphie en fonction de la pathologie thyroïdienne sous-jacente. Cette forme est appelée type I, ou forme fonctionnelle (excès de synthèse);
*effet toxique de l’iode sur les thyréocytes entraînant une lyse des cellules thyroïdiennes et une thyroïdite apparaissant généralement 2 à 3 ans après le début du traitement; dans ce cas, la scintigraphie est blanche (fig. 13.4); cette forme est appelée type II, ou forme lésionnelle (relargage des hormones thyroïdiennes préformées stockées dans la colloïde).À noter

Les hyperthyroïdies à l’amiodarone ne doivent pas être confondues avec le profil hormonal habituel sous ce traitement : T4 libre élevée (par inhibition de la désiodation de la T4) mais T3 libre normale et TSH normale. Un bilan thyroïdien est indispensable avant le début de traitement par amiodarone (+++).

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Immunomodulateurs
L’interféron et surtout, actuellement, les immunothérapies, de plus en plus utilisées dans le traitement des cancers, peuvent induire des thyroidites se manifestant souvent par une phase d’hyperthyroïdie suivie d’hypothyroïdie. L’évolution est le plus souvent rapidement favorable.

3 Hormones thyroïdiennes
La thyrotoxicose dite « factice » est due à une prise d’hormones thyroïdiennes par le patient dans un but d’amaigrissement, ou cachée au médecin dans un contexte psychiatrique. Il n’y a pas de goitre. La scintigraphie est blanche et le dosage de la thyroglobuline, effondrée, traduit le freinage de la glande.

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Thyroïdite subaiguë de De Quervain
La thyroïdite subaiguë est une affection d’origine virale, atteignant généralement toute la glande, mais pouvant aussi être localisée, et qui se traduit par un état inflammatoire initial dans un contexte grippal, avec goitre dur et douloureux, fièvre, augmentation importante de la CRP. Elle peut s’accompagner d’une phase initiale d’hyperthyroïdie (par lyse des cellules), suivie d’une phase d’hypothyroïdie, puis récupération en 2 ou 3 mois.

Le diagnostic est essentiellement clinique (palpation du goitre dur et douloureux), mais peut être aidé par la scintigraphie dans les cas difficiles (absence de fixation) voire par l’échographie (aspect hypoéchogène).

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hyrotoxicose gestationnelle transitoire
II s’agit d’une situation fréquente : 2 % des grossesses. Elle est due à l’effet stimulant de l’hCG sur le récepteur de la TSH. Elle se manifeste au premier trimestre de la grossesse (en rapport avec le pic de sécrétion d’hCG qui survient vers 10 semaines d’aménorrhée [SA]) par :

*une tachycardie;
*l’absence de prise de poids.
Elle s’accompagne dans les formes sévères de vomissements (hyperemesis gravidarium) et régresse spontanément en seconde partie de gestation.

Elle passe souvent inaperçue et relève d’un traitement symptomatique (repos, réhydratation). Elle est à distinguer d’une maladie de Basedow (absence d’anticorps antirécepteurs de la TSH).

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Formes cliniques des thyrotoxicoses selon le terrain
A Chez l’enfant

Il s’agit généralement d’une maladie de Basedow. Les manifestations sont, en général, une avance staturale et de la maturation osseuse avec manifestations d’hyperactivité invalidantes pour la scolarité.

B Chez la femme enceinte
Il s’agit d’une situation non exceptionnelle : thyrotoxicose gestationnelle (2 % des grossesses) ou maladie de Basedow (0,2 % des grossesses).

En cas de maladie de Basedow chez la femme enceinte, deux problèmes peuvent se poser :

*le passage transplacentaire d’anticorps antirécepteurs de TSH peut créer une hyperthyroïdie fœtale, dès que la thyroïde fœtale sera fonctionnelle et néonatale; ces anticorps peuvent persister après traitement radical préalable de la mère par chirurgie ou iode 131I et doivent être recherchés même si la maladie est apparemment guérie;
*le passage transplacentaire des antithyroïdiens de synthèse peut créer un goitre et/ou une hypothyroïdie chez le fœtus : s’ils doivent être utilisés chez une femme enceinte, c’est à la posologie la plus faible possible et en évitant au premier trimestre certains antithyroïdiens de synthèse potentiellement tératogènes (méthimazole et apparentés; voir plus loin).
L’hyperthyroïdie de la femme enceinte n’est pas une cause d’interruption thérapeutique de grossesse, mais il est préférable d’éviter cette situation par une contraception efficace chez la jeune femme atteinte de maladie de Basedow. Si la grossesse se produit chez une femme hyperthyroïdienne et/ou avec titre des anticorps (Ac) antirécepteurs de la TSH très élevés, le suivi doit être organisé en milieu spécialisé (prise en charge maternelle spécifique, repérage des manifestations de dysthyroïdie chez le fœtus et recherche d’un goitre à l’échographie).

C Chez la personne âgée
La thyrotoxicose peut évoluer à bas bruit et se manifester uniquement par une altération massive de l’état général, avec fonte musculaire sévère, cachexie et insuffisance cardiaque (forme apathique).

Une thyrotoxicose, même minime et peu symptomatique, peut suffire à déclencher des troubles du rythme et/ou une insuffisance cardiaque. Il faut donc penser à cette affection dans ces situations. Il s’agit le plus souvent d’un goitre multinodulaire toxique ou d’un adénome toxique dont la décompensation brutale en cardiothyréose après injection d’un produit de contraste iodé (scanner) est fréquente.

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Traitement des thyrotoxicoses
Les thyrotoxicoses sont habituellement traitées en ambulatoire, mais il faut identifier les situations urgentes nécessitant une prise en charge immédiate, voire une hospitalisation.

Les situations urgentes sont :

*une crise aiguë thyrotoxique, exceptionnelle;
*une cardiothyréose chez une personne âgée ou atteinte de maladie cardiaque;
*une orbitopathie maligne;
*une forme cachectisante du vieillard.
A Moyens thérapeutiques
1 Non spécifiques

Les moyens non spécifiques sont :

*le repos (arrêt de travail éventuel en fonction du retentissement de la maladie);
*les bêta-bloquants, avec respect des contre-indications habituelles : ils agissent rapidement et permettent d’attendre l’effet des traitements spécifiques; le propranolol (Avlocardyl®) est souvent choisi car il est non cardiosélectif – il réduit la tachycardie, mais aussi les tremblements;
*une contraception efficace chez la femme en âge de procréer.
2 Spécifiques
Antithyroïdiens de synthèse (ATS)

*Méthimazole et apparentés :
–carbimazole (Néomercazole®);
–méthimazole (Thyrozol®).
*Thio-uraciles :
–propylthio-uracile (Propylex®);
–benzylthio-uracile (Basdène®).
Leur effet est purement suspensif, en inhibant la synthèse des hormones thyroïdiennes. Les posologies dépendent de l’intensité clinique et biologique de l’hyperthyroïdie.

Leur mécanisme d’action repose sur le blocage de la thyroperoxydase (TPO). Les ATS n’empêchent pas la sécrétion des hormones thyroïdiennes déjà synthétisées et stockées dans les vésicules colloïdes. Un délai de 10 à 15 jours est donc nécessaire pour voir apparaître le bénéfice clinique.

Le principe du traitement est de prescrire initialement de fortes doses, en tenant compte de la sévérité de l’hyperthyroïdie, pendant 4 à 6 semaines en moyenne, suivies de doses dégressives (méthode de titration). Il est possible, dans certains cas, aussi de maintenir la dose d’ATS inchangée en ajoutant de la L-T4 pour obtenir l’euthyroïdie (méthode « block and replace »). Ces méthodes sont équivalentes en termes d’efficacité et de résultats à long terme.

Les effets secondaires sont résumés dans le tableau 13.2. On distingue des effets indésirables mineurs, notamment des allergies cutanées pouvant conduire à un changement de molécule et ne contre-indiquant pas la poursuite des ATS (éventuellement sous antihistaminique), et les effets indésirables graves avec surtout l’agranulocytose (encadré 13.1), de survenue brutale (phénomène immunoallergique), rare (0,1 % de tous les traitements), contre-indiquant par la suite tous les ATS.

Tableau 13.2

Effets indésirables des antithyroïdiens de synthèse (ATS).

Communs (5-15 %)
–Rashs cutanés et urticaire
–Arthralgie
–Leuconeutropénie transitoire
–Alopécie
–Perturbations mineures des fonctions hépatiques, n’imposant pas l’arrêt de l’ATS
Rares et sévères (< 1 %)
–Agranulocytose aiguë (0,2-0,5 %)
–Hypoplasie médullaire
–Hépatite cytolytique (dérivés thio-uraciles)
–Hépatite cholestatique (imidazolés)
–Vascularites allergiques liées aux ANCA
–Pancréatite
–Hypoglycémies par anticorps anti-insuline
(Source : CEEDMM, 2021.)

La surveillance recommandée consiste :

*pour s’assurer d’un retour à l’euthyroïdie, à doser la T4 libre à la 3e ou 4e semaine (la TSH peut rester basse longtemps par inertie thyréotrope); une fois l’euthyroïdie obtenue, la surveillance repose sur le dosage de la TSH tous les 3 mois pendant la durée du traitement médical;
*à avertir le patient du risque d’agranulocytose et mentionner sur l’ordonnance d’arrêter le traitement et de faire une NFS en urgence en cas de fièvre et de signes infectieux (angine).
Encadré 13.1Agranulocytose aux antithyroïdiens de synthèse

N.B. : Une neutropénie modérée (< 1,5 G/l) peut accompagner une hyperthyroïdie (NFS de référence). Compte tenu de la physiopathologie de cet effet indésirable (effet immuno-allergique de survenue brutal), il n’y a pas d’argument pour ou contre une surveillance de la NFS systématique sous traitement.

Il est obligatoire de remettre au patient une ordonnance de NFS à faire en urgence en cas de fièvre ou de signes pharyngés (angine) sous antithyroïdiens de synthèse.

*Conduite à tenir : neutrophiles < 0,8 G/l (consensus de la SFE, 2016) :
–arrêt des ATS;
–suivi.
*Neutrophile < 0,5 G/l → agranulocytose avec risque infectieux majeur :
–hospitalisation urgente en milieu protégé si fièvre;
–arrêt définitif des ATS;
–antibiothérapie large;
–facteur de croissance hématopoïétique, G-CSF (granulocyte-colony stimulating factor), non obligatoire;
–suivi de la récupération.

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Traitement chirurgical

*Thyroïdectomie totale en cas de maladie de Basedow après une préparation médicale par ATS ayant permis d’obtenir l’euthyroïdie pour éviter une crise toxique postopératoire. Le risque de lésion définitive des parathyroïdes et des nerfs récurrents est faible avec un chirurgien entraîné à cette chirurgie, mais n’est pas nul (1 % à 4 %). En avertir le patient.
*Thyroïdectomie totale en cas de goitre multinodulaire toxique après une préparation médicale courte si nécessaire (pas de risque de crise toxique); même risque parathyroïdien et récurrentiel.
*Lobectomie du côté de la lésion en cas d’adénome toxique, après une préparation médicale courte si nécessaire.
Traitement par radio-iode (131I)
Ce traitement a pour but de détruire la thyroïde ou les zones hyperactives par irradiation interne ciblée. Il s’agit d’un traitement très efficace, non invasif, sans danger (pas de risque génétique ou de cancérisation secondaire démontré). Il est contre-indiqué chez la femme enceinte (faire un dosage d’hCG avant l’administration). Une contraception efficace est ensuite préconisée pendant 6 mois chez la femme jeune. Le traitement peut être effectué en ambulatoire – la législation française l’autorise pour des activités d’131I < 20 mCi ou 740 Mbq –, mais des consignes de radioprotection sont données pour éviter une irradiation de l’entourage. Un délai de 1 à 3 mois est nécessaire à son action. Il conduit fréquemment à une hypothyroïdie définitive, mais dépendant de l’étiologie de l’hyperthyroïdie. En cas de maladie de Basedow, il fait courir le risque d’aggravation de l’orbitopathie (par lyse des cellules thyroïdiennes et libération d’antigènes) ainsi que de majoration du titre des anticorps antirécepteurs de la TSH, qui limite son utilisation en cas de projet de grossesse à court terme (< 2 ans).

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Indications
Les indications sont fonction de l’étiologie.

1 Maladie de Basedow
La première étape est toujours de restaurer l’euthyroïdie par un traitement antithyroïdien de synthèse. L’indication thérapeutique (traitement médical pendant 12 à 18 mois ou traitement radical par chirurgie ou iode radioactif) doit ensuite être discutée avec le patient, en lui expliquant les avantages et inconvénients des différentes solutions thérapeutiques.

Aucun traitement de la maladie de Basedow n’est parfait, puisqu’aucun n’agit sur la cause de la maladie.

Le traitement médical est souvent proposé en cas de première poussée de maladie de Basedow. Il doit être poursuivi 12 à 18 mois. Chez l’enfant et l’adolescent, le risque de récidive est plus important, ce qui nécessite des traitements prolongés de 2 à 4 ans.

En dehors de la grossesse, l’ATS recommandé est le carbimazole ou son apparenté le méthimazole. Après traitement médical bien conduit par ATS, une rechute survient dans 40 % à 50 % des cas.

51 une rechute survient, on peut discuter avec le patient de trois stratégies : la thyroïdectomie ou le traitement par iode radioactif; ces deux derniers entraîneront une hypothyroïdie définitive ou la poursuite du traitement par ATS au long cours.

2 Adénome toxique et goitre multinodulaire toxique

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2 Adénome toxique et goitre multinodulaire toxique
Le traitement médical seul ne permet pas d’obtenir la guérison (pas de rémission spontanée). Les traitements possibles sont (voir Item 241, chapitre 12) :

*la chirurgie en cas de goitre important ou de nodule suspect;
*l’iode 131I.
3 Hyperthyroïdies induites par l’amiodarone
Le choix du traitement selon le mécanisme (type I : ATS; type II : corticoïdes) doit être discuté en milieu spécialisé.

L’arrêt de l’amiodarone ne corrige pas l’hyperthyroïdie car l’accumulation dans les tissus persiste 9 à 12 mois après l’arrêt du traitement.

4 Thyroïdite subaiguë
Le traitement de la maladie est généralement symptomatique (antalgiques, antipyrétiques). Le traitement anti-inflammatoire non stéroïdien ou corticoïde est utilisé dans les formes importantes.

5 Hyperthyroïdie chez la femme enceinte
Il est nécessaire de différencier la thyrotoxicose gestationnelle transitoire de la maladie de Basedow. Le dosage des TRAK et l’échographie thyroïdienne sont deux examens clés pour le diagnostic différentiel. La thyrotoxicose gestationnelle transitoire, étant liée à l’effet TSH-lke de l’hCG, se manifeste essentiellement au premier trimestre et s’améliore par la suite spontanément. Elle nécessite le repos au calme et, éventuellement, des bêta-bloquants en attendant la résolution spontanée.

Une maladie de Basedow pendant la grossesse nécessite une prise en charge pluridisciplinaire avec un suivi obstétrical et endocrinologique rapproché et en alternance.

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Orbitopathie dysthyroïdienne
A Généralités

Le mot « orbitopathie » est plus juste que le mot « ophtalmopathie » car il s’agit d’une atteinte de l’orbite (muscles oculomoteurs et graisse orbitaire). Dans la très grande majorité des cas, l’orbitopathie complique une maladie de Basedow (appelée maladie de Grave ou

Grave’s disease dans les pays anglo-saxons). L’atteinte de l’orbite peut aussi s’inscrire, plus rarement, dans le cadre d’une thyroïdite auto-immune de Hashimoto.

Les anticorps antirécepteur de la thyroid stimulating hormone (TSH), qui stimulent la thyroïde, agissent également sur les muscles oculomoteurs et la graisse orbitaire, augmentant ainsi leurs volumes.

L’atteinte orbitaire survient chez 25 % des patients qui ont une maladie de Basedow; en d’autres termes, 75 % des patients atteints d’une maladie de Basedow n’auront jamais d’orbitopathie. L’orbitopathie est bilatérale dans 75 % des cas. Elle survient quasi en même temps que l’hyperthyroïdie dans 80 % des cas. Dans 10 % des cas, l’atteinte orbitaire la précède, et dans 10 % des cas, elle apparaît plus tard, alors que le patient est déjà traité pour sa maladie thyroïdienne. Il est donc important d’informer ces patients des premiers symptômes oculaires afin que leur éventuelle apparition les conduise à consulter rapidement.

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Manifestations ophtalmologiques
1 Signes orbitaires

L’exophtalmie est le signe le plus classique dans l’orbitopathie dysthyroïdienne. Cette exophtalmie est bilatérale chez 75 % des patients (fig. 13.6). Elle est symétrique ou asymétrique. Classiquement, en l’absence d’activité inflammatoire, elle est axile, non pulsatile, réductible et indolore. Elle est secondaire à l’hypertrophie des muscles oculomoteurs et/ou de la graisse orbitaire. Elle est mesurée par l’ophtalmométrie. On utilise en général l’ophtalmomètre de Hertel (fig. 13.7). En cas d’exophtalmie, l’ophtalmométrie est supérieure à 21 mm.Signes palpébraux
Les signes palpébraux sont les suivants :

la rétraction des paupières (fig. 13.8), qu’il s’agisse de la paupière supérieure et/ou de la paupière inférieure avec asynergie oculopalpébrale vers le bas, c’est-à-dire que la paupière supérieure ne descend pas correctement dans le regard vers le bas;œdème inflammatoire des paupières (fig. 13.9)*diminution de la fréquence du clignement;
*lagophtalmie, c’est-à-dire impossibilité à fermer la paupière complètement, ce qui peut entraîner une kératite par sécheresse de la cornée (fig. 13.10).Troubles oculomoteurs
Il s’agit d’une myosite. Lors de la phase inflammatoire, le muscle est inflammatoire. Une douleur lors de la mobilisation du globe est classique. Lors de la phase séquellaire, le muscle est fibrosé et se rétracte. L’atteinte musculaire se manifeste par la survenue d’une diplopie binoculaire (fig. 13.11) avec une déviation oculaire (strabisme).Autres
L’hypertonie oculaire est fréquente. Elle est estimée entre 5 % et 15 % des patients ayant une orbitopathie dysthyroïdienne. Cette hypertonie n’est pas synonyme de glaucome. La rougeur de la conjonctive et l’inflammation de la conjonctive (chémosis) signent l’activité inflammatoire de la maladie.

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Complications
Quand les complications sont majeures, on parle d’orthopathie maligne. L’atteinte cornéenne est une complication liée le plus souvent à l’exophtalmie et à la rétraction de la paupière supérieure avec insuffisance de fermeture (lagophtalmie; voir fig. 13.10). Elle peut être minime à type de kératite (fig. 13.12) et peut également aboutir à une perforation cornéenne dans les cas les plus graves.COUF, 2021.)
L’orbitopathie dysthyroïdienne peut se compliquer d’une neuropathie optique compressive. Cette neuropathie peut être secondaire à une compression directe des muscles de l’apex (fig. 13.13).Ces deux complications (atteinte de la cornée et neuropathie optique) justifient un traitement par bolus de méthylprednisolone à forte dose et/ou une chirurgie à type de décompression orbitaire.

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Examens complémentaires
L’imagerie est essentielle pour mieux comprendre le mécanisme de l’orbitopathie. Le scanner et l’IRM sont complémentaires. Ils peuvent conforter le diagnostic d’exophtalmie, et objectiver les rapports entre les nerfs optiques et les muscles à l’apex orbitaire en cas de neuropathie optique.

L’appréciation de la neuropathie optique se fait par l’examen des pupilles (recherche d’un déficit pupillaire afférent), du champ visuel, de la vision des couleurs, de la tomographie par cohérence optique et des potentiels évoqués visuels.

E Traitement de l’orbitopathie
1 Traitement médical

Le traitement antithyroïdien n’a aucun effet direct sur l’orbitopathie, qui n’est pas due à la thyrotoxicose, mais l’obtention de l’euthyroïdie en évitant le passage en hypothyroïdie peut améliorer l’état orbitaire. L’arrêt du tabac est indispensable. Il est essentiel car il est fortement impliqué dans la physiopathogénie de cette maladie et l’aggrave.

Les traitements oculaires locaux consistent à améliorer la symptomatologie de ces patients, qui se plaignent de troubles de la surface oculaire (picotements, brûlures) secondaires à la rétraction de la paupière supérieure, de l’exophtalmie et d’un moindre clignement. Un traitement par des substituts lacrymaux (larmes, gels, etc.) est donc très utile chez ces patients. Le traitement par sélénium peut être utile aussi dans les formes modérées.

En cas de diplopie avec un trouble oculomoteur modéré, on propose des prismes et/ou une chirurgie.

2 Quand proposer un traitement anti-inflammatoire ?
Un traitement anti-inflammatoire est indiqué quand il y a une inflammation. Après avis spécialisé, un traitement anti-inflammatoire, idéalement par bolus de méthylprednisone pendant plusieurs semaines, est indiqué quand il y a une inflammation et doit être débuté le plus rapidement possible.

La radiothérapie externe peut également être proposée dans les cas corticorésistants. Son effet est moins rapide que la corticothérapie.

3 Traitement chirurgical
Le traitement chirurgical est de trois types :

*une chirurgie de décompression orbitaire afin d’augmenter le volume orbitaire – cette décompression peut être uniquement osseuse ou peut également enlever de la graisse (lipectomie);
*la chirurgie des muscles oculomoteurs quand la diplopie ne peut pas être appareillée par les prismes;
*la chirurgie des paupières : chirurgie de la rétraction des paupières et/ou blépharoplastie, c’est-à-dire ablation du tissu cutané et graisseux excessif.

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Le premier examen devant une clinique évocatrice de thyrotoxicose est le dosage de TSH suivi de T4L.
* Les examens à visée étiologique sont prescrits en fonction de la clinique.
* Les complications notamment cardiaques peuvent être au premier plan, parfois même révélatrices, surtout chez le sujet âgé.
* La grossesse nécessite une prise en charge pluridisciplinaire.
* C’est souvent le terrain (sujet âgé, femme enceinte, enfant, pathologie préexistante) qui détermine la gravité de l’hyperthyroïdie.
* L’orbitopathie basedowienne nécessite une prise en charge pluridisciplinaire.
* L’orbitopathie dysthyroïdienne recouvre différentes atteintes cliniques. Si l’exophtalmie en est la manifestation la plus classique, d’autres signes sont fréquents, comme les troubles oculomoteurs et les signes inflammatoires.
* L’examen de l’orbitopathie doit prendre en considération tous les signes possibles; c’est donc un examen ophtalmologique systématique qui recherche les différentes atteintes citées afin de permettre une classification de cette orbitopathie. Des complications graves, en particulier la neuropathie optique, peuvent émailler l’évolution et nécessitent un suivi régulier, notamment du champ visuel, de l’exophtalmo-métrie et de l’oculomotricité.
* Le traitement des orbitopathies dysthyroïdiennes est d’abord un traitement médical visant à stabiliser l’hyperthyroïdie et améliorer l’état oculaire des patients. Dans les formes sévères d’orbitopathie – associant des signes œdémateux importants, une exophtalmie importante, des troubles oculomoteurs sévères –, des traitements médicaux par voie générale, principalement une corticothérapie ou d’autres traitements (radiothérapie ou chirurgie), peuvent être utilisés.
* L’orbitopathie maligne se définit par les complications majeures cornéennes et de neuropathie, et nécessite une prise en charge et un traitement urgent pluridisciplinaires.

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Définition et prévalence de l’hypothyroïdie
A Définition

L’hypothyroïdie se définit par une insuffisance de sécrétion des hormones thyroïdiennes qui peut être due à

  1. Une atteinte de la glande thyroïde elle-même, appelée insuffisance thyroïdienne primitive ou hypothyroïdie primaire ou hypothyroïdie périphérique :

*le diagnostic d’atteinte primaire de la glande thyroïde repose sur une augmentation de la TSH (par levée du rétrocontrôle négatif des hormones thyroïdiennes sur les cellules thyréotropes);
*dans un second temps, si la TSH est élevée, afin de mesurer la sévérité du déficit sécré-toire, on dose la thyroxine libre (T4L ou fT4; plutôt que la T4 totale, qui est sujette à de multiples variations) :
–si la T4L est normale, il s’agit d’une hypothyroïdie primaire fruste (ou hypothyroïdie infraclinique); dans ce cas, la TSH est peu élevée, le plus souvent entre 4 et 10 mUI/l;
–si la T4L est basse, il s’agit d’une hypothyroïdie primaire patente; la TSH est alors plus élevée, supérieure à 10 mUI/l.
2. Une atteinte hypothalamo-hypophysaire appelée insuffisance thyréotrope ou hypothyroïdie secondaire ou hypothyroïdie centrale :

*il est conseillé d’utiliser de préférence le terme d’insuffisance thyréotrope pour ne pas engendrer de confusion dans la prise en charge des patients, en particulier thérapeutique;
*le diagnostic d’atteinte hypothalamo-hypophysaire repose sur le couple T4L/TSH :
–la T4L est toujours basse (inférieure au seuil bas de la normalité);
–la TSH est inadaptée au niveau de T4L :
–soit basse ou normale, ce qui témoigne logiquement de l’origine hypophysaire;
–soit légèrement élevée, mais inférieure à 10-12 mUI/l : cela peut sembler illogique pour une origine haute, mais cela s’explique par le fait que la TSH est immunoréac-tive (donc dosable) mais biologiquement inactive; elle contraste avec une T4L franchement basse. Ce tableau biologique évoque plutôt une atteinte hypothalamique.
Une TSH faiblement élevée (4 à 10 mUI/l) peut donc faire faussement conclure à une hypothyroïdie primaire fruste si la T4L n’est pas dosée – en cas d’insuffisance thyréotrope, la T4L sera basse, alors qu’en cas d’hypothyroïdie fruste ou infraclinique, la T4L sera normale. Une TSH normale ne permet pas d’éliminer une insuffisance thyréotrope.

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Prévalence
1 Hypothyroïdie primaire

L’hypothyroïdie primaire est la plus fréquente, mais la forme patente est devenue rare (< 2 %). La prévalence de l’hypothyroïdie fruste est plus importante chez les femmes (7,5 % des femmes contre 3 % des hommes, soit 1 femme sur 13 versus 1 homme sur 30), chez les sujets âgés (10 %), en cas de syndrome de Turner ou de trisomie 21, ou en association avec le diabète de type 1 dans le cadre d’une polyendocrinopathie auto-immune.

Actuellement, par la généralisation du dosage de TSH (bilan systématique ou devant une asthénie), le diagnostic est le plus souvent précoce, porté au stade d’hypothyroïdie fruste où seule la TSH est augmentée.

La prévalence de l’hypothyroïdie fruste peut être surestimée car :

*la TSH augmente avec l’âge et il n’existe pas de seuils consensuels;
*la TSH peut s’élever en situation d’obésité (élévation fonctionnelle et qui se normalise avec la perte de poids).
Le diagnostic d’hypothyroïdie périphérique se fait sur une augmentation de la TSH. Lorsque la TSH est élevée, on dose la T4L.

On retient le diagnostic d’hypothyroïdie franche si la TSH est élevée (> 10 mU/l) avec une T4L basse. On retient le diagnostic d’hypothyroïdie fruste ou infraclinique si la TSH est peu élevée (entre 4 et 10 mU/l) avec une T4L normale.

Un seul dosage de TSH modérément augmenté sans bilan étiologique n’est pas suffisant pour porter le diagnostic d’hypothyroïdie primaire et donc justifier un traitement.

2 Insuffisance thyréotrope
L’insuffisance thyréotrope est beaucoup plus rare que l’hypothyroïdie primaire. Elle constitue moins de 1 % des hypothyroïdies.

Elle s’inscrit souvent dans un contexte de pathologie hypophysaire (voir plus loin « Étiologie ») ou cérébrale évocatrice qui aide au diagnostic. C’est une situation rarement observée en pratique médicale courante.

Le diagnostic repose sur le dosage sanguin de la T4L (toujours basse) et de la TSH (normale ou basse, inadaptée à la valeur basse de la TSH)

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Séméiologie de l’hypothyroïdie
A Symptômes généraux de l’hypothyroïdie primaire

La séméiologie de l’hypothyroïdie est fonction de sa profondeur, de son ancienneté et de son origine (périphérique ou centrale), et est très peu spécifique.

L’hypothyroïdie fruste est la forme la plus fréquente de nos jours. Les symptômes sont modestes ou absents.

La sémiologie de l’hypothyroïdie profonde, rarement rencontrée de nos jours, comporte :

*un syndrome d’hypométabolisme : asthénie physique et psycho-intellectuelle, somnolence, hypothermie, frilosité acquise, constipation acquise (à différencier de symptômes anciens), bradycardie, prise de poids modeste contrastant parfois avec une perte d’appétit;
une atteinte cutanée et des phanères (fig. 14.1) : la peau est pâle ou jaunâtre (carotino-dermie par baisse de transformation du carotène en vitamine A), sèche et squameuse, dépilée (axillaire, pubienne, queue des sourcils), la transpiration est diminuée, les cheveux sont secs et cassants, les lèvres peuvent être cyanosées;un myxœdème cutanéomuqueux : la peau est infiltrée et épaissie, en particulier au niveau
–de la face dorsale des mains (syndrome du canal carpien) et des pieds, des paupières (le matin au réveil surtout) et de l’ensemble du visage, pouvant donner un aspect de « faciès lunaire »;
–laryngé (voix rauque), de la trompe d’Eustache (hypoacousie), de la langue (macro-glossie et ronflements).
*une atteinte neuromusculaire :
–un enraidissement, des crampes et myalgies;
–plus rarement : tendinites, arthralgies, neuropathies périphériques, syndrome cérébelleux.
*un retentissement endocrinien :
–une galactorrhée, rare (hyperprolactinémie possible en cas d’hypothyroïdie primaire profonde par inhibition du tonus dopaminergique, dès lors que la TSH est supérieure à 50 mUI/l (en fait très rare de nos jours);
–des troubles des cycles responsables d’oligoménorrhée, ménorragies ou anovulation chez la femme;
–une dysfonction érectile chez l’homme;
–une infertilité ou des troubles de la libido chez l’homme et la femme.Symptômes généraux de l’insuffisance thyréotrope
Les symptômes sont superposables, en dehors des symptômes de myxœdème présents uniquement en situation d’hypothyroïdie primair

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Complications
Les formes compliquées sont rares, le diagnostic étant maintenant souvent fait précocement lors d’un dosage systématique de TSH.

1 Formes cardiovasculaires
Il peut s’agir :

*d’une atteinte fonctionnelle :
–modification de l’activité et du métabolisme du muscle cardiaque : bradycardie sinusale, diminution de la force contractile (baisse de l’action chronotrope et inotrope positive);
–insuffisance cardiaque et troubles du rythme ventriculaire (rarement).
*d’une infiltration (dans l’hypoparathyroïdie primaire) : épanchement péricardique (bruits du cœur assourdis à l’auscultation, cardiomégalie sur la radiographie thoracique, microvoltage et troubles diffus de la repolarisation sur l’ECG); l’échographie cardiaque permet de confirmer le diagnostic; l’épanchement péricardique s’accompagne d’un épanchement pleural ou péritonéal (ascite);
*d’une coronaropathie : l’hypothyroïdie favorise l’athérome coronarien, entre autres par l’hypercholestérolémie induite (élévation du LDL-cholestérol); les symptômes d’insuffisance coronarienne peuvent se démasquer lors de l’institution du traitement substitutif, qui sera donc prudent chez le sujet fragilisé.
2 Formes neuromusculaires et neuropsychiques
Il peut être observé :

*un état dépressif, un syndrome confusionnel ou une démence, plus fréquents chez le sujet âgé;
*une myopathie proximale (CPK élevées);
*des apnées du sommeil.
3 Formes digestives
Un ralentissement prononcé du transit peut entraîner des manifestations occlusives avec iléus paralytique ou mégacôlon, particulièrement chez le sujet âgé.

4 Coma myxœdémateuxPalpation de la glande thyroïde
Les caractéristiques cliniques de la palpation de la glande thyroïde dépendent de l’étiologie de l’hypothyroïdie.

La thyroïde est souvent ferme et hétérogène, pseudonodulaire en cas de maladie auto-immune thyroïdienne.

Elle peut être augmentée de volume en cas de maladie de Hashimoto.

Elle peut être de taille normale ou diminuée pour les autres thyroïdites auto-immunes.

Elle peut être à peine palpable en cas de thyroïdite atrophique ou en insuffisance thyréotrope.

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Cas particulier : hypothyroïdie durant la grossesse
1 Complications maternelles Complications fœtales
Au premier trimestre de la grossesse, la thyroïde fœtale n’est pas fonctionnelle; le développement du système nerveux fœtal est donc dépendant des hormones maternelles durant cette période. Ainsi, l’hypothyroïdie maternelle peut engendrer des troubles du développement neuro-intellectuel de l’enfant (même en cas d’hypothyroïdie maternelle fruste); une hypo-trophie est également possible.

3 Particularités biologiques de la femme enceinte
Au premier trimestre d’une grossesse normale, la TSH est abaissée (en raison de l’action « TSH-like » de l’hCG) et la T4L souvent à la limite supérieure de la normale. Dans un second temps, alors que la TSH se normalise, la T4L peut baisser et rester basse durant toute la durée de la grossesse. Ce profil biologique (TSH normale et T4L basse) peut faire conclure à tort à une insuffisance thyréotrope. Comme toujours et surtout pendant la grossesse, le diagnostic d’hypothyroïdie primaire repose sur une élévation de la TSH.

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Anomalies biologiques non spécifiques
1 Anomalies hématologiques

L’hypothyroïdie peut être associée à une anémie normocytaire et normochrome, plus rarement macrocytaire. Lorsqu’elle est macrocytaire, l’anémie peut être le fait d’une maladie de Biermer associée, dans le cadre d’une polyendocrinopathie auto-immune. Une maladie de Biermer doit être suspectée si la macrocytose ne régresse pas avec le traitement de l’hypothyroïdie. En cas de carence martiale, il faut penser à une maladie cœliaque associée.

Des anomalies de l’hémostase primaire (adhésion, activation ou agrégation plaquettaires) ou de l’hémostase secondaire (phase de coagulation) et des troubles de la fibrinolyse peuvent également être observés, mais de manière plus exceptionnelle.

2 Anomalies ioniques et métaboliques
Il s’agit :

*d’une hyponatrémie est possible en cas d’hypothyroïdie patente; elle entre dans le cadre nosologique des hyponatrémies hypo-osmolaires normovolémiques par sécrétion appropriée (réactionnelle) d’ADH et, dans les formes sévères, d’une hyponatrémie par dilution;
*d’une hypercholestérolémie (élévation du LDL-cholestérol), qui est quasi constante en cas d’hypothyroïdie patente
*d’une hypertriglycéridémie (VLDL), plus rare, par diminution de la dégradation des lipoprotéines;
*d’une augmentation des enzymes musculaires (CPK), par infiltration des fibres musculaires, avec parfois augmentation des ASAT et de la LDH.

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Étiologie des hypothyroïdies
A Étiologie de l’hypothyroïdie primaire

(Voir tableau 14.1.)

Tableau 14.1

Étiologie des hypothyroïdies.

Étiologie des hypothyroïdies primaires Étiologie des insuffisances thyréotropes
–Thyroïdites lymphocytaires :
*thyroïdite atrophique
*thyroïdite de Hashimoto
*thyroïdite du post-partum
–latrogènes :
*ablation chirurgicale de la thyroïde
*post-iode radioactif
*post-radiothérapie externe
*traitement médicamenteux : surcharge en iode, immunothérapie (anti-PD1/anti-PDL1 ++)
*défaut d’adaptation des antithyroïdiens de synthèse
–Congénitale :
*ectopie et athyréose
*anomalie de l’hormonosynthèse
–Thyroïdite de Riedel (exceptionnel)
–Séquelles de thyroïdite de De Quervain
–Carence en iode
–lnfiltration métastatique ou autre (hémochromatose)
–Tumeurs compressives de la région hypothalamo-hypophysaire ou maladies infiltratives (granulomatoses)
–Atteinte lésionnelle : traumatisme crânien, méningite, hémorragie méningée
–latrogènes : radiothérapie de la région hypothalamo-hypophysaire, immunothérapie (anti-CTLA4), bexarotène (traitement du lymphome cutané)
–Congénitales (le plus souvent déficit hypophysaire combiné)

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Thyroidites auto-immunes, ou thyroïdites chroniques lymphocytaires (+++)
Thyroïdite de Hashimoto
Définition, clinique
La thyroïdite de Hashimoto se caractérise par un goitre ferme et irrégulier et la présence d’anticorps anti-thyroperoxydase (anti-TPO) circulants, à des taux qui peuvent être très élevés. Plus rarement, en cas de négativité des anticorps anti-TPO, la présence d’anticorps antithyroglobuline (anti-Tg) permet d’affirmer le diagnostic.

Le mécanisme physiopathologique est lié à une infiltration lymphocytaire du parenchyme thyroïdien secondaire à une réaction auto-immune survenant sur un terrain génétique particulier et qui est probablement favorisée par des facteurs environnementaux (mal connus). Elle peut être isolée ou s’intégrer dans le contexte d’une polyendocrinopathie auto-immune, de type 2 (fréquemment associée au diabète et/ou au vitiligo et/ou à la maladie de Biermer) bien plus souvent que de type 1 (dont les principales maladies sont l’hypoparathyroïdie et l’insuffisance surrénale lente).

Initialement euthyroïdienne et asymptomatique (TSH normale), la thyroïdite évolue au cours du temps vers l’hypothyroïdie par destruction progressive des thyréocytes (élévation progressive de la TSH). Au décours de l’évolution d’une thyroïdite, la croissance rapide du goitre ou d’une zone pseudonodulaire doit faire évoquer un lymphome – qui ne complique toutefois que moins de 1 % des thyroïdites auto-immunes.

Examens complémentaires
L’échographie thyroïdienne permet d’avoir des arguments étiologiques et de repérer d’éventuelles anomalies nodulaires. L’aspect échographique habituel des thyroïdites est globalement hypoéchogène et hétérogène avec des zones hyperplasiques pseudonodulaires hyperéchogènes (fig. 14.2). La vascularisation est hétérogène, souvent un peu augmentée en début d’évolution.
La scintigraphie thyroïdienne ne doit pas être réalisée.

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Thyroïdite auto-immune du post-partum
Cette atteinte présente les mêmes mécanismes auto-immuns, avec souvent un petit goitre.

Elle se traduit par une phase de thyrotoxicose initiale transitoire (vers les 2 mois post-partum), qui peut passer inaperçue, puis l’évolution se fait vers l’hypothyroïdie (3e au 6e mois post-partum). L’hypothyroïdie est habituellement transitoire et résolutive dans l’année, mais peut être définitive. La thyroïdite du post-partum est souvent non diagnostiquée, les symptômes qu’elle occasionne étant attribués aux conséquences de la grossesse et au manque de sommeil. Elle concerne 5 % des grossesses et est plus fréquente chez les patientes ayant une auto-immunité thyroïdienne sous-jacente.

2 Thyroïdites iatrogènes
Les thyroïdites iatrogènes sont souvent « silencieuses », mais peuvent être douloureuses.

Elles sont secondaires à une réaction inflammatoire induite par la radiothérapie cervicale ou, plus fréquemment, la prise de certains médicaments comme :

*les traitements des cancers par antityrosine kinase ou par immunothérapies et check-point inhibiteurs;
*les traitements iodés : amiodarone, produits de contraste iodés, iode radioactif : une thyroïdite peut survenir plusieurs années après le traitement d’une hyperthyroïdie ou d’un goitre, d’où la nécessité d’un dosage annuel de TSH;
*les interférons : hépatites virales (+++), sclérose en plaques, etc. (actuellement moins utilisés);
*le lithium : il entraîne rarement une hypothyroï’die mais fréquemment un goitre.
En cas de radiothérapie cervicale pour cancer du larynx ou lymphome, etc., une thyroïdite peut survenir plusieurs années après, d’où la nécessité d’un dosage annuel de TSH.

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utres causes d’hypothyroïdie primaire

*La carence iodée sévère est une étiologie fréquente en zone endémique : elle occasionne une hypothyroïdie sévère et profonde associée à un retentissement neurocognitif majeur (« crétinisme goitreux ») et un goitre, parfois monstrueux.
*Hypothyroïdie congénitale (encadré 14.1).

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Démarche diagnostique devant une hypothyroïdie primaire
La démarche diagnostique est résumée dans la figure 14.3.

A

Facteurs de risque de l’hypothyroïdie primaire
Les facteurs de risque peuvent se décliner en miroir des étiologies. Ils aident au diagnostic étiologique en cas de découverte d’une hypothyroïdie ou à penser au dépistage :

*sexe féminin (après 50 ans);
*carence alimentaire en iode;
*grossesse ou période du post-partum;
*terrain d’auto-immunité familial ou personnel déjà connu ou terrain prédisposant à l’auto-immunité (syndrome de Turner, déficits immunitaires combinés, etc.);
*antécédents personnels ou familiaux de maladies thyroïdiennes;
*antécédent de chirurgie thyroïdenne;
*exposition à un agent physique ou médicamenteux connu pour altérer la fonction thyroïdienne : radiothérapie cervicale (cancers ORL, lymphomes), médicament iodé (amiodarone), antithyroïdiens de synthèse, iode radioactif, immunothérapie;
*atteinte du parenchyme thyroïdien par une thyroïdite lytique (avec thyrotoxicose initiale) : de De Quervain, thyroïdites iodées, etc.

219
Q

Étiologie et facteurs de risque de l’insuffisance thyréotrope
(Voir tableau 14.1.)

Les principales causes de l’insuffisance thyréotrope sont les suivantes :

*compression de la région hypothalamo-hypophysaire par une tumeur : adénome hypophysaire le plus souvent, mais aussi craniopharyngiome, méningiome, etc. (voir Item 244, chapitre 15);
*infiltration de la région hypothalamo-hypophysaire : granulomatoses, lymphomes, etc.;
*iatrogènes : séquelles post-chirurgicales ou post-radiothérapie de tumeurs de la région hypothalamo-hypophysaire, traitement du lymphome cutané (bexarotène), immunothérapie (anti-CTLA4);
*séquelles de méningite, de traumatisme crânien, d’hémorragie méningée, d’apoplexie hypophysaire, de nécrose hémorragique hypophysaire du post-partum (syndrome de Sheehan), d’hypophysite lymphocytaire (souvent dans le post-partum);
*génétiques.
Le diagnostic étiologique est orienté par l’IRM, qui est à réaliser systématiquement.

En fait, l’insuffisance thyréotrope est rarement isolée et c’est souvent devant un syndrome tumoral de la région sellaire, après traitement d’une maladie hypothalamo-hypophysaire ou devant des symptômes évocateurs d’hypopituitarisme, qu’est découverte une insuffisance thyréotrope. Ces différentes pathologies constituent les facteurs ou plutôt les situations à risque de l’insuffisance thyréotrope; il faut y penser devant les atteintes méningées et les traumatismes crâniens, situations moins spontanément évocatrices d’insuffisance hypophysaire.

A
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Q

Traitement
A Moyens et objectifs thérapeutiques

Le traitement repose sur l’hormonothérapie substitutive par l’emploi de thyroxine T4, commercialisée sous forme de lévothyroxine (L-T4) : Lévothyrox®, Euthyrox®, L-Thyroxin® Henning, Thyrofix® ou TCaps®, comprimés à 13, 25, 37,5, 50, 62,5, 75, 88, 100, 112, 125, 137 150, 175, 200 µg (*selon les laboratoires).

Dans les formes pédiatriques, il est possible d’employer la L-Thyroxine® solution buvable (1 goutte = 5 µg) ou TSoludose® qui permettent une administration facilitée et une adaptation fine des doses. Ces formes sont très rarement utilisées (et nécessaires) chez l’adulte.

Il existe également une solution injectable (ampoule de 200 µg) utilisée en cas de coma myxœdémateux ou d’impossibilité à avaler.

La T4 peut être associée à la T3 dans l’Euthyral® et la T3 peut être utilisée seule (Cynomel®), mais les indications sont devenues rares et discutées.

Les besoins en hormones thyroïdiennes sont en moyenne de 1 à 1,5 µg/kg par jour, mais ils sont fonction de la profondeur de l’hypothyroïdie.

1 Hypothyroïdie primaire
Le bon équilibre thérapeutique d’une hypothyroïdie primaire s’apprécie sur la TSH, seule. La valeur normale de TSH est inférieure à 4 mUI/l. Toutefois, la TSH se situe plutôt entre 0,4 et 2,5 mUI/l chez la majorité des personnes (95es percentiles des sujets témoins sans goitre visible ni antécédents de pathologie thyroïdienne, sans anticorps antithyroïdiens détectables et sans médicaments pouvant interférer avec la fonction thyroïdienne). Ainsi, les objectifs sont les suivants :

*en situation standard et pour une parfaite euthyroïdie : TSH entre 0,5 et 2,5 mUI/l;
*en cas de coronaropathie non contrôlée, chez les personnes très âgées : ne pas normaliser la TSH, mais la stabiliser entre 4 et 10 mUI/l, selon la tolérance; en pratique, chez les coronariens, on traite d’abord la coronaropathie, puis on normalise la TSH;
*chez la femme enceinte : la TSH doit être entre 0,5 et 2,5 mUI/l.
Dans tous les cas, le surdosage chronique en lévothyroxine doit être évité du fait des risques osseux et cardiovasculaires de la thyrotoxicose.

La TSH est contrôlée 6 à 8 semaines après le début du traitement (ou 6 à 8 semaines après avoir atteint la posologie théoriquement efficace en cas de traitement progressif). La contrôler trop tôt amènerait à des augmentations trop rapides des posologies de lévothyroxine et donc à un risque de surdosage. Une fois l’objectif de TSH obtenu, elle est contrôlée à 6 mois, puis annuellement (encadré 14.2).

A
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Q

Modification de la prise en charge des examens du bilan thyroïdien

L’Union nationale des caisses d’assurance maladie a modifié, en mai 2024, la prescription et les conditions de remboursements des examens en lien avec le bilan thyroïdien (TSH, T4L, T3L, anticorps anti-thyroglobuline, anticorps antithyroperoxydase et anticorps antirécepteurs de la TSH) en instaurant de nombreuses références médicales opposables contraignantes. Ces modifications de prise en charge sont en lien avec les recommandations publiées par la HAS concernant la prise en charge des hypothyroïdies et des hyperthyroïdies en population générale.

Principes généraux

1.En première intention de diagnostic, seul le dosage de la TSH doit être demandé. Il peut être suivi, uniquement en cascade (c’est-à-dire dans un second temps), de dosages de T4L ± T3L en fonction du résultat de la TSH.
2.Le contrôle de TSH est uniquement réalisé à au moins 6 semaines d’intervalle.
3.Le dosage de T4L n’est pas recommandé dans le suivi d’une hypothyroïdie en dehors d’une discordance clinicobiologique pour rechercher une mauvaise observance au traitement par lévothyroxine ou une malabsorption. Dans le cadre du suivi initial des patients traités par antithyroïdiens de synthèse (traitement mentionné sur la prescription), la fréquence minimale entre deux dosages pour le suivi du traitement est de B semaines.
4.Le dosage de TBL est un examen de troisième intention. Les prescriptions TBL isolée ou TSH + TBL ne sont plus prises en charge.
5.Le dosage TBL + T4L est pris en charge pour le suivi initial des patients traités par antithyroïdiens de synthèse (traitement mentionné sur la prescription) avec une T4L et une TBL anormales à l’initiation du traitement, et ce jusqu’à normalisation de la T4L et de la TBL, ainsi que pour le suivi des patients présentant une hypothyroïdie d’origine hypothalamo-hypophysaire (le dosage de TSH est non informatif pour ce suivi).
6.Le dosage TSH + T4L est pris en charge pour le diagnostic d’une hyperthyroïdie ou d’une hypothyroïdie. L’acte est réalisé le plus souvent en deuxième intention (dosage « en cascade ») ou d’emblée dans de plus rares indications justifiées et figurant sur la prescription (signes avérés d’hyperthyroïdie, suspicion d’hypothyroïdie ou d’hyperthyroïdie d’origine centrale ou de syndrome de résistance aux hormones thyroïdiennes, suspicion de déséquilibre thérapeutique des patients traités par lévothyroxine).
7.Le dosage TSH + T4L + T3L n’a lieu d’être réalisé qu’en cascade, aucune indication ne justifiant de réaliser ces dosages de façon associée d’emblée. Il n’est pris en charge que dans les conditions définies par la HAS, le plus souvent en troisième intention : pour le diagnostic d’une hyperthyroïdie à T3L (rare) en cas de TSH basse ou indétectable et de T4L dans l’intervalle de référence du laboratoire; pour la surveillance des patients ayant une hyperthyroïdie fruste non traitée, en cas de TSH basse persistante et de T4L dans l’intervalle de référence du laboratoire; pour le suivi des patients traités par amiodarone (traitement mentionné sur la prescription) en cas de TSH basse; pour diagnostiquer un syndrome de basse T3 (T3L basse isolée) en cas de TSH et de T4L dans l’intervalle de référence; la suspicion de syndrome de basse T3 doit alors explicitement être notée sur la prescription.
8.Le dosage des anticorps antithyroperoxydase est réalisé essentiellement pour le diagnostic d’une hypothyroïdie en troisième intention (c’est-à-dire après dosage de TSH et de T4L) et pour la prise en charge de certaines femmes enceintes ou ayant un désir de grossesse. En cas de positivité, cet examen n’est pas à répéter.
9.La recherche d’autoanticorps antithyroglobuline ne doit pas être réalisée de façon systématique, mais en cas de recherche d’une auto-immunité thyroïdienne après le diagnostic initial d’une hypothyroïdie malgré l’absence d’autoanticorps anti-thyroperoxydase, ou pour valider un dosage de thyroglobuline circulante chez un sujet atteint de carcinome thyroïdien ou en cas de suspicion de thyrotoxicose factice.
10.Le dosage des autoanticorps antirécepteurs de TSH est indiqué pour confirmer le diagnostic de la maladie de Basedow hors tableau clinique typique et/ou choix du traitement initial de cette maladie (facteur prédictif de rémission), ainsi que chez des patients atteints de maladie de Basedow traités par antithyroïdiens de synthèse, avant décision d’arrêt du traitement (qu’il s’agisse d’un traitement initial, prolongé, ou d’une réintroduction de traitement en cas de récidive). Le dosage n’est pas à répéter en cours d’un traitement.
En pratique

Toute prescription autre que TSH devra désormais s’accompagner de mention sur l’ordonnance indiquant :

*l’indication ou le contexte clinique justifiant la prescription et la prise en charge des examens prescrits;
*le traitement éventuel justifiant la prescription.
En l’absence des renseignements cliniques, l’accord du patient sera nécessaire pour la réalisation des dosages hors nomenclature, puisque les dosages ne seront pas pris en charge par l’assurance maladie.

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Insuffisance thyréotrope
Les modalités thérapeutiques sont identiques, mais la surveillance biologique différente. La TSH ne doit pas être utilisée pour surveiller et adapter le traitement. En effet, en cas d’insuffisance thyréotrope, la TSH est souvent effondrée, mais elle peut être aussi normale, ce qui peut induire en erreur.

La surveillance et l’adaptation du traitement reposent donc ici seulement sur le dosage de la T4L, qui peut être contrôlée après 15 à 21 jours de traitement, mais à jeun sans avoir pris la L-thyroxine (pic plasmatique post-prise).

Pour que l’insuffisance thyréotrope soit bien substituée, la T4L doit être dans le milieu ou dans le tiers supérieur de la normale, chez un patient sans antécédent coronarien ou de moins de 70 ans sans facteur de risque cardiovasculaire. Il n’y a pas de consensus chez les patients âgés.

3 Précautions de substitution (spécificités thérapeutiques)
Chez un patient très âgé, coronarien ou susceptible de l’être, la posologie initiale de lévothyroxine est de 12,5 µg par jour à 25 µg par jour; elle est progressivement augmentée par paliers de 12,5 à 25 µg toutes les 1 à 2 semaines jusqu’à l’obtention de la dose théoriquement efficace.

Le risque de démasquer une coronaropathie est d’autant plus important que l’hypothyroïdie est profonde et ancienne. La surveillance doit donc être adaptée à la situation :

*prévenir le patient âgé ou le coronarien contrôlé qu’il doit consulter en cas de douleurs thoraciques;
*chez le coronarien grave, faire pratiquer un ECG hebdomadaire si possible;
*le coronarien non contrôlé est éventuellement hospitalisé pour surveillance clinique et électrographique quotidienne lors de l’institution du traitement.
Les bêta-bloquants peuvent parfois être utiles associés à la lévothyroxine.

B Situations cliniques
1 Hypothyroïdie fruste (« infraclinique »)En cas d’hypothyroïdie fruste, les besoins en hormones thyroïdiennes sont inférieurs et se situent entre 25 et 75 µg par jour.

Dans le cas de la grossesse, le traitement par lévothyroxine est justifié dès lors que la TSH est ≥ 3 mUI/l. L’objectif est de maintenir la TSH entre 0,5 et 2,5 mUI/l.

2 Survenue d’une grossesse chez une femme hypothyroïdienne connue
Au cours du premier trimestre de la grossesse, les besoins en lévothyroxine augmentent d’environ 25 % à 50 %. Les posologies doivent donc être augmentées dès le diagnostic de grossesse, puis la TSH doit être surveillée tous les mois pour la maintenir entre 0,5 et 2,5.

3 Traitements intercurrents ou pathologies nécessitant d’augmenter la lévothyroxine
L’utilisation de certains médicaments nécessite une augmentation des doses de lévothyroxine, afin de maintenir la TSH dans les objectifs. Trois mécanismes peuvent être en cause :

*interférences avec l’absorption intestinale de la T4 :
–sulfate de fer (attention chez la femme enceinte);
–carbonate de calcium;
–inhibiteurs de la pompe à proton;
–magnésium;
*pathologies induisant une malabsorption : maladie cœliaque (y penser en cas de thyroïdite auto-immune difficile à équilibrer), gastrite a Helicobacter pylori, gastrite atrophique (acidité gastrique nécessaire à l’absorption), chirurgie bariatrique, etc.;
*augmentation de la clairance de la T4;
*augmentation de la liaison des hormones thyroïdiennes à leur protéine porteuse (TBG), qui diminue la fraction des hormones circulantes libres : traitement œstrogénique (attention lors de l’instauration ou de l’arrêt d’un traitement hormonal de la ménopause).
4 Hypothyroïdie néonatale
La prise en charge repose sur la prescription quotidienne substitutive à vie de L-thyroxine, initialement à une posologie supérieure ou égale à 10 µg/kg par jour.

La mise en route précoce du traitement (avant 12-15 jours) et à posologie adéquate (> 10 µg/kg par jour) a transformé le pronostic de cette affection : il n’y a plus de retard mental et la croissance est normale.

Faut-il dépister l’hypothyroïdie acquise ?

Des recommandations ont été émises par l’HAS et la Société française d’endocrinologie en 2007, mises à jour en 2022.

Recommandations pour le dépistage de l’hypothyroïdie fruste.

Adulte

Recommandé d’évaluer la fonction thyroïdienne dans les situations suivantes :

*en présence de symptômes évocateurs d’hypothyroïdie
*survenue d’une dépression inexpliquée
*découverte d’une hypercholestérolémie inexpliquée
*traitement par du lithium ou de l’amiodarone
*antécédents personnels ou familiaux de maladie thyroïdienne
*chirurgie thyroïdienne antérieure
*antécédents de traitement par iode radioactif ou irradiation cervicale externe
*antécédents personnels ou familiaux de maladie auto-immune (diabète de type 1)
*trisomie 21 ou syndrome de Turner

Femme enceinte ou souhaitant une grossesse

Dosage ciblé de la TSH recommandé en période préconceptionnelle ou lors de la première consultation après le diagnostic de grossesse en cas de facteurs de risque :

*antécédent personnel de dysthyroïdie
*antécédent personnel de diabète de type 1 ou de maladie auto-immune
*positivité des anticorps anti-TPO connue
*goitre
*antécédent de radiothérapie cervicale ou de chirurgie thyroïdienne
*antécédent familial de dysthyroïdie (1er degré)
*âge de plus de 35 ans
*IMC ≥ 40 kg/m2
*traitement par amiodarone, lithium
*antécédents d’accouchement prématuré
*antécédents de fausses couches, infertilité
D’après : Hypothyroïdies frustes chez l’adulte : diagnostic et prise en charge. HAS-SFE, avril 2007, mise à jour décembre 2022.

Population générale

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oints clés

*Le diagnostic d’hypothyroïdie primaire est posé sur l’élévation de la TSH. Sa prévalence est environ de 2 % de la population générale. L’hypothyroïdie primaire est plus fréquente chez la femme que chez l’homme. Sa prévalence augmente avec l’âge, surtout au-delà de 65 ans. Le coma myxœdémateux est exceptionnel.
*L’insuffisance thyréotrope, beaucoup plus rare (moins de 1 % des hypothyroïdies, prévalence estimée à 0,005 %) est diagnostiquée par une T4L basse avec TSH inadaptée.
*Les signes cliniques de l’hypothyroïdie sont nombreux, variés, non spécifiques et inconstants; il faut donc penser à l’hypothyroïdie primaire facilement et demander le dosage de la TSH. Les examens demandés en seconde intention sont utiles au diagnostic étiologique : anticorps anti-TPO (et anti-Tg si les anti-TPO sont négatifs) et échographie.
*L’hypothyroïdie est le plus souvent due à une thyroïdite auto-immune (54 %), à une cause médicamenteuse (15 %), en particulier au décours d’une surcharge en iode (surtout chez les patients ayant un apport iodé suffisant).
*Dans la thyroïdite de Hashimoto, les taux d’anticorps anti-TPO sont souvent très élevés et on retrouve un goitre ferme, nodulaire. La présence d’autres maladies auto-immunes est à rechercher dans la famille et chez le patient.
*La thyroïdite atrophique, après 50 ans, est une étiologie fréquente, d’évolution lente, avec présence fréquente d’anticorps anti-TPO à des taux modérés.
*L’existence de thyroidites iatrogènes par surcharge iodée (injection de produits de contraste iodés, traitement par amiodarone, etc.), après traitement radiométabolique par l’iode 131 ou radiothérapie externe cervicale, justifie le contrôle annuel de la TSH.
*Le traitement repose sur la lévothyroxine (L-T4) à visée substitutive, avec un suivi :
–de la TSH à 4-8 semaines jusqu’à obtention de l’euthyroïdie, puis un suivi annuel;
–ou de la T4L en cas d’insuffisance thyréotrope.
*La prise en charge thérapeutique de l’hypothyroïdie infraclinique a deux objectifs principaux : éviter les conséquences néonatales chez la femme enceinte (démontré) et éviter les risques cardiovasculaires à long terme (discuté).

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Introduction
L’antéhypophyse est constituée de diverses populations cellulaires dont chacune produit de manière spécifique une hormone : les cellules lactotropes produisent la prolactine (PRL), les cellules somatotropes l’hormone de croissance (growth hormone [GH]), les cellules cor-ticotropes l’adrénocorticotropine (ACTH), les cellules gonadotropes l’hormone lutéinisante (LH) et la folliculostimuline (FSH), les cellules thyréotropes la thyréostimuline (TSH). Les hormones hypothalamiques (libérines et statines) qui régulent la sécrétion des hormones hypophysaires parviennent à l’antéhypophyse par le système porte hypothalamo-hypophysaire (fig. 15.1).Les adénomes hypophysaires sont des tumeurs bénignes développées aux dépens de l’hypophyse et qui, en fonction de leur taille et de leur caractère fonctionnel, sécrétant ou non, peuvent être responsables de trois grands types de signes :

*un syndrome tumoral hypophysaire, révélé par des troubles visuels (liés à la compression du chiasma optique situé quelques millimètres au-dessus de l’hypophyse) ou des céphalées, par un syndrome caverneux ou, plus fortuitement, à l’occasion d’une imagerie de la région hypothalamo-hypophysaire faite pour une raison indépendante (incidentalome hypophysaire);
*des syndromes d’hypersécrétion hormonale :
–hyperprolactinémie;
–acromégalie secondaire à une hypersécrétion d’hormone de croissance;
–hypercortisolisme (syndrome de Cushing) secondaire à une hypersécrétion d’ACTH stimulant la production surrénalienne de cortisol;
–ou, plus rarement, hyperthyroïdie secondaire à une hypersécrétion de TSH par un adénome thyréotrope.
*enfin, un syndrome d’insuffisance antéhypophysaire, portant généralement sur toutes les hormones hypophysaires (panhypopituitarisme).
En revanche, les adénomes hypophysaires ne s’accompagnent pas de diabète insipide.

Bien évidemment, ces trois grands cadres pathologiques ne s’excluent pas; ils sont même souvent associés.

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Découverte de l’adénome hypophysaire devant un syndrome tumoral
A Syndrome tumoral hypophysaire clinique

Ce syndrome tient à la localisation de l’hypophyse et à ses rapports anatomiques, schématisés sur la figure 15.2. Céphalées
Les céphalées sont typiquement rétro-orbitaires et localisées.

2 Troubles visuels
Il s’agit de troubles visuels par compression des voies optiques. Ils sont responsables d’une « gêne » visuelle, d’une impression de voile devant les yeux, d’une difficulté à fixer un point ou d’une sensation qu’il manque un mot à la lecture. L’acuité visuelle est le plus souvent normale du fait de l’absence d’atteinte du champ visuel central; parfois, elle est diminuée en cas de lésion très volumineuse, négligée. L’examen du fond d’œil est normal le plus souvent.

C’est l’atteinte du champ visuel, bien individualisée par l’étude du champ visuel à l’appareil de Goldman ou à la périmétrie automatisée, qui évoque le diagnostic devant une quadranopsie temporale supérieure ou, à un stade plus tardif, devant une hémianopsie bitemporale caractéristiques de la compression du chiasma optique (fig. 15.3). Tableau d’apoplexie hypophysaire
Plus rarement, on observe un tableau d’apoplexie hypophysaire à début brutal : céphalées violentes, photophobie (pseudosyndrome méningé), fréquemment paralysie oculomotrice (par compression des nerfs crâniens passant dans le sinus caverneux) avec ptosis et diplopie (fig. 15.4), syndrome confusionnel, voire coma, troubles visuels par compression chiasmatique aiguë. S’y associent des signes d’insuffisance hypophysaire, notamment corticotrope aigus. L’apoplexie peut révéler un adénome méconnu et le tableau évoque une urgence neurochirurgicale. L’imagerie faite en urgence permet le diagnostic en montrant un adénome en voie de nécrose ou d’hémorragie.

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Imagerie tumorale hypophysaire : IRM
C’est maintenant l’imagerie par résonance magnétique (IRM) qui est l’examen de référence de la région hypothalamo-hypophysaire. L’aspect normal de l’hypophyse est indiqué sur la figure 15.2. Le scanner de la région hypophysaire n’est utilisé qu’en cas de contre-indication à l’IRM.

1 Microadénomes
Les microadénomes, définis par leur taille inférieure à 10 mm de diamètre, apparaissent sous la forme d’une image arrondie, homogène (fig. 15.5). Macroadénomes
Les macroadénomes sont définis par leur taille supérieure à 10 mm de diamètre.On étudie l’expansion suprasellaire éventuelle en haut vers la citerne optochiasmatique – contact éventuel avec le chiasma optique qui peut être comprimé, refoulé (voir fig. 15.6) voire laminé, ou avec les bandelettes optiques, voire les nerfs optiques – et celle éventuelle vers le troisième ventricule. On analyse l’extension inférieure vers le sinus sphénoïdal et l’expansion latérale voire l’invasion du sinus caverneux (voir fig. 15.6). Diagnostic différentiel en imagerie
Craniopharyngiome intrasellaireMéningiome intrasellaire
Une condensation anormale de l’os en regard de la lésion est bien visible au scanner. La prise de contraste est intense en IRM (fig. 15.8). La dure-mère voisine de la tumeur est souvent épaissie et prend de façon très intense le contraste. L’aspect spiculé de la dure-mère accolée à la lésion est caractéristiqueGrosse hypophyse de la femme jeune
Chez l’adolescente ou la femme jeune, à l’occasion généralement d’une IRM faite pour une autre raison, on découvre parfois de manière fortuite une hypophyse un peu bombée vers le haut, qui peut en imposer pour un adénome à expansion suprasellaire, d’autant plus que la selle turcique est peu profondeutres tumeurs ou infiltrations
Métastases (fig. 15.10), sarcoïdose, histiocytose, tuberculose, hypophysite auto-immune (fig. 15.11), etc.Contrairement aux adénomes hypophysaires, toutes ces lésions peuvent être responsables d’un diabète insipide central défini par une polyurie (3 litres par 24 heures) d’urines hypo-toniques (osmolarité urinaire < 300 mOsm/l) accompagnée d’une polydipsie équivalente à la diurèse, de manière à maintenir une osmolalité plasmatique normale. En présence d’un syndrome polyuro-polydipsique, la notion d’une lésion hypothalamo-hypophysaire à l’IRM rend inutile la réalisation d’un test de restriction hydrique : le diagnostic de diabète insipide central par carence en ADH (ou arginine-vasopressine) est évident.

On rappelle que le test de restriction hydrique, qui doit être fait en milieu hospitalier car il est dangereux, n’est indiqué qu’en cas d’absence de lésion hypothalamo-hypophysaire, pour différencier un diabète insipide central idiopathique (souvent séquellaire d’une neuro-infundibulite passée inaperçue) d’une polydipsie primaire par trouble primitif de la soif.

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Découverte de l’adénome hypophysaire devant un syndrome d’hypersécrétion
A Hyperprolactinémie

L’hyperprolactinémie est une pathologie fréquente (1 % à 1,5 % des adultes). La découverte d’une hyperprolactinémie fait chercher (et parfois trouver) un adénome hypophysaire – qu’il s’agisse d’un adénome à prolactine ou qu’il s’agisse d’un adénome d’une autre nature, responsable d’une hyperprolactinémie dite de déconnexion.

Mais n’oublions pas que, dans la majorité des cas, l’hyperprolactinémie est d’origine médicamenteuse.

1 Signes amenant à chercher une hyperprolactinémie
Chez la femme
Galactorrhée
La galactorrhée est spontanée ou plus souvent uniquement provoquée (dans 80 % des cas). Elle n’est significative que si elle est faite de liquide lactescent et qu’elle survient à distance du post-partum. La découverte d’une galactorrhée n’est pas synonyme d’hyperprolactinémie : la grande majorité des femmes consultant pour une galactorrhée ont même une prolactinémie normale. Toutefois, toute galactorrhée impose un dosage de prolactine (10 % des femmes hyperprolactinémiques ont une galactorrhée isolée sans troubles des règles).

Perturbations du cycle menstruel ou infertilité
L’aménorrhée est le signe le plus fréquent : près de 90 % des femmes ayant une hyperprolactinémie ont une absence totale de règles (aménorrhée) ou une oligoménorrhée (moins de quatre cycles par an) et, dans la moitié des cas, des irrégularités menstruelles ou un allongement progressif des cycles (spanioménorrhée) avaient été notés dans les mois ou les années précédents.

L’hyperprolactinémie inhibe la sécrétion pulsatile de GnRH hypothalamique et, par voie de conséquence, la sécrétion de LH et de FSH (hypogonadisme hypogonadotrope), et perturbe l’ovulation et le développement du corps jaune. On note souvent une baisse de la libido et parfois une dyspareunie liée à la sécheresse vaginale qui indique un effondrement de l’œstradiol.

Parfois, les règles sont bien régulières et le tableau clinique se limite à une anovulation (5 % des cas environ) avec une courbe de température plate, une absence de sécrétion de progestérone et une infertilité (20 % des infertilités d’origine hormonale sont liées à une pathologie de la prolactine). Tout trouble des règles à type d’aménorrhée ou d’oligoaménorrhée, toute infertilité justifient donc un dosage plasmatique de la prolactine (voir Item 38, chapitre 2 et Item 42, chapitre 3).

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Chez l’homme
L’hyperprolactinémie peut, rarement, provoquer une galactorrhée ou une gynécomastie – la glande mammaire a besoin d’œstrogènes pour se développer. Plus fréquemment, elle est à l’origine de troubles sexuels : baisse de la libido, voire troubles de l’érection. En fait, ces signes sont souvent inavoués ou négligés par le patient ou son médecin et, si c’est une tumeur volumineuse qui est à l’origine de l’hyperprolactinémie, ce sont plus souvent un syndrome tumoral (troubles visuels par compression du chiasma optique, céphalées, etc.) ou encore un panhypopituitarisme qui amènent à suspecter le diagnostic. Quoi qu’il en soit, l’exploration d’un hypogonadisme chez l’homme impose un dosage de prolactine (+++).

Dans les deux sexes
À long terme, la persistance d’une hyperprolactinémie, du fait des conséquences de l’hypogonadisme, est responsable d’une déminéralisation osseuse et d’un risque d’ostéoporose.

2 Stratégie diagnostique devant une hyperprolactinémie
L’hyperprolactinémie, lorsqu’elle dépasse 20 ng/ml chez l’homme comme chez la femme, impose une stratégie diagnostique assez stéréotypée, résumée dans la figure 15.12.re étape – Vérifier la réalité de l’hyperprolactinémie
Un contrôle de la prolactinémie dans un laboratoire d’hormonologie spécialisé est indispensable. En effet, des fausses hyperprolactinémies sont souvent observées, liées aux kits de dosage utilisés dans certains laboratoires non spécialisés.e étape – Éliminer les hyperprolactinémies de causes générales et médicamenteuses
La grossesse (marqueur hCG), l’hypothyroïdie périphérique (marqueur TSH, cause classique mais très rare d’hyperprolactinémie) et l’insuffisance rénale chronique sont facilement écartées. Un interrogatoire soigneux permet enfin de s’assurer de l’absence de prise médicamenteuse susceptible d’élever la prolactinémie (fig. 15.13, tableau 15.1).Principales causes médicamenteuses d’hyperprolactinémie.

–Neuroleptiques (phénothiazines, halopéridol, sulpiride)
–Antidépresseurs (tricycliques et IMAO)
–Métoclopramide, dompéridone
–Œstrogènes
–Morphiniques
–Vérapamil
–MéthyldopaFait essentiel, l’hyperprolactinémie secondaire est généralement inférieure à 150 ng/ml et n’atteint des valeurs très élevées (200 voire 350 ng/ml) qu’en cas de traitement par neuroleptiques et antiémétiques (dompéridone, sulpiride).

3e étape – Trouver la lésion hypothalamo-hypophysaire responsable
Lorsque les causes médicamenteuses ou générales sont éliminées, il faut envisager la possibilité d’une tumeur de la région hypothalamo-hypophysaire. Pour cela, une IRM est indiquée pour identifier des lésions tumorales, de taille très variable (voir plus haut). Lorsque l’IRM n’est pas disponible ou contre-indiquée, on peut se contenter d’un scanner hypophysaire. Il peut s’agir d’un microadénome intrasellaire (diamètre < 10 mm) souvent intra-hypophysaire; la prolactinémie est alors modérément augmentée, entre 30 et 100 ng/ml.

À l’opposé, l’examen neuroradiologique peut révéler une volumineuse tumeur de la région hypophysaire, comprimant parfois le chiasma optique (et imposant alors la réalisation urgente d’un examen du champ visuel et la mesure de l’acuité visuelle). Cette volumineuse tumeur peut correspondre à :

*un macroadénome à prolactine, ou macroprolactinome;
*une tumeur d’une autre origine, non prolactinique (à point de départ hypophysaire ou hypothalamique), associée à une hyperprolactinémie de déconnexion hypothalamo-hypophysaire (voir fig. 15.13).
La distinction entre ces deux étiologies est difficile.

En cas de tumeur non prolactinique avec hyperprolactinémie de déconnexion, la prolactinémie est très rarement supérieure à 150-200 ng/ml.

En cas de prolactinome, la prolactine est fonction de la masse tumorale – si elle est > 150-200 ng/ ml, il s’agit quasi obligatoirement d’un prolactinome; mais si elle est < 150-200 ng/ml, ce peut être un prolactinome peu sécrétant, mais c’est plus généralement une tumeur non prolactinique.L’évaluation des autres fonctions hypophysaires est indispensable en cas de lésion hypophysaire tumorale (voir plus loin).

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Acromégalie (excès d’hormone de croissance, GH)
1 Syndrome dysmorphique et diagnostic

Le syndrome dysmorphique de l’acromégalie peut amener à évoquer le diagnostic (fig. 15.14).Les extrémités (mains, pieds) sont élargies, les doigts sont élargis, épaissis, boudinés et la peau de la paume des mains et de la plante des pieds est épaissie. Le patient a dû faire élargir bague ou alliance et a changé de pointure. Le visage est caractéristique : le nez est élargi, épaissi. Les pommettes sont saillantes, le front bombé, les lèvres épaisses, les rides sont marquées. Il existe une tendance au prognathisme. La comparaison avec des photographies antérieures met en évidence la transformation lente, insidieuse sur plusieurs années (à l’anamnèse, les premiers troubles de la maladie remontent généralement à 5 à 10 ans auparavant), ce qui explique que l’entourage ou le médecin traitant n’aient rien remarqué.

Si l’acromégalie est ancienne, les déformations peuvent aussi toucher le reste du squelette : cyphose dorsale, sternum projeté en avant, voire aspect exceptionnel du polichinelle.

2 Signes fonctionnels et généraux
Au syndrome dysmorphique s’associent des signes fonctionnels et généraux, tels que :

*sueurs, surtout nocturnes, malodorantes;
*céphalées (que l’adénome hypophysaire en cause soit volumineux ou non);
*paresthésies des mains, voire authentique syndrome du canal carpien;
*douleurs articulaires pouvant conduire à consulter;
*asthénie fréquente; parfois syndrome dépressif;
*une HTA, trouvée chez près d’un acromégale sur deux.
Le patient (ou surtout son entourage) se plaint parfois d’un ronflement nocturne et l’interrogatoire de l’entourage amène parfois à évoquer un authentique syndrome d’apnées du sommeil, avec pauses respiratoires nocturnes et endormissement diurne, qu’il faut authentifier par une polysomnographie.

Ces symptômes sont non spécifiques et leur progression lente explique le retard au diagnostic classique. Il faut donc envisager le diagnostic et faire un dépistage biologique lorsqu’un patient présente au moins deux comorbidités telles qu’asthénie, prise pondérale, sueurs, ronflement (syndrome d’apnées du sommeil), syndrome du canal carpien, diabète de type 2, arthralgies diffuses.

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Complications de l’acromégalie
Les complications de l’acromégalie peuvent révéler la maladie et doivent être recherchées.

Complications cardiovasculaires
Observation fréquente d’une hypertrophie myocardique (septum et paroi postérieure du ventricule gauche) à l’échographie, avec parfois un simple dysfonctionnement diastolique (trouble de la compliance) et un débit cardiaque basal augmenté (syndrome hyperkinétique). Si l’atteinte cardiaque évolue, un tableau d’insuffisance cardiaque congestive se constitue, responsable de signes fonctionnels survenant d’abord à l’effort, puis permanents.

Arthropathie acromégalique périphérique
L’arthropathie acromégalique périphérique touche typiquement les grosses articulations : genoux, épaules, mains, poignets et hanche. Les arthralgies sont de rythme mécanique, mais aussi parfois inflammatoire. À la radiographie, les interlignes articulaires sont élargis; on note la présence d’ostéophytes exubérants, d’ossifications des insertions tendineuses.

Le rhumatisme acromégalique touche surtout le rachis : lombalgies de type mécanique le plus souvent.Diabète ou intolérance au glucose
Le diabète ou l’intolérance au glucose sont fréquents.

Syndrome d’apnées du sommeil
Ce syndrome est présent chez plus des deux tiers des malades. Les apnées sont obstructives ou mixtes.

Autres
Organomégalie (hépatomégalie, splénomégalie, etc.). Les goitres, souvent multinodulaires, sont fréquents.

Des polypes du côlon sont trouvés de façon plus fréquente (coloscopie régulière).

4 Diagnostic biologique de l’acromégalie

  • Le test de dépistage qui permet le diagnostic en cas de suspicion clinique est le dosage d’IGF-1. Il doit être interprété en fonction de l’âge.
    *Le dosage isolé de la GH :
    –il n’a pas de valeur diagnostique car la sécrétion de GH chez le sujet normal est variable dans le nycthémère;Le diagnostic :
    –repose donc sur la mise en évidence d’une absence de freinage de la GH lors de l’hyperglycémie provoquée par voie orale (HGPO); Nécessité du triple bilan
    Une fois le diagnostic établi, un triple bilan est nécessaire :

*un bilan tumoral, afin de mettre en évidence si l’adénome responsable de l’hypersécrétion est un microadénome ou un macroadénome (voir plus haut);
*un bilan du retentissement fonctionnel hypophysaire de la tumeur, afin de vérifier si, en plus de l’hypersécrétion de GH, l’adénome n’est pas responsable d’une altération des autres fonctions hypophysaires (voir plus loin) et d’une cosécrétion fréquente de prolactine;
*un bilan du retentissement de l’acromégalie, à la recherche des complications de la maladie.

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Hypercortisolisme (ou syndrome de Cushing)
Le syndrome de Cushing est l’ensemble des manifestations cliniques et biologiques engendrées par un excès chronique de glucocorticoïdes. En dehors des causes iatrogènes (corticothérapie), les adénomes hypophysaires corticotropes (maladie de Cushing) sont la cause la plus fréquente du syndrome de Cushing.

1 Tableau clinique et diagnostic
Le tableau clinique fait évoquer le diagnostic (pour exemple : fig. 15.15; voir aussi Item 224, chapitre 10).Anomalies morphologiques
Ces anomalies sont acquises (comparaison avec des photographies antérieures).

Signes spécifiques
Les signes spécifiques sont les signes secondaires à l’effet catabolique et antianabolique des glucocorticoïdes sur le métabolisme protidique. L’amyotrophie prédomine au niveau des ceintures et de l’abdomen et peut être responsable d’une fatigabilité à la marche. Elle est parfois

discrète (manœuvre du tabouret). L’atrophie cutanée et sous-cutanée est responsable d’une lenteur à la cicatrisation.

La peau (dos des mains) est amincie (en « feuille de papier à cigarette »). Des ecchymoses surviennent au moindre choc. Les vergetures cutanées sont larges (> 1 cm), pourpres, orientées horizontalement sur les flancs et à la racine des membres, ou à disposition radiaire dans la région mammaire et péri-ombilicale. La peau du visage est érythrosique, congestive avec varicosités et télangiectasies.

Signes moins spécifiques
La prise pondérale est modérée, généralement d’une dizaine de kilogrammes, et présente une topographie particulière, faciotronculaire (modification de la répartition des graisses), respectant les extrémités. Le visage devient arrondi, bouffi, avec une hypertrophie des boules de Bichat. On note un comblement des creux sus-claviculaires et un aspect en « bosse de bison » au niveau de la nuque, ainsi qu’une augmentation du rapport taille/hanche. Enfin, cette obésité contraste avec une amyotrophie des membres.

Autres anomalies morphologiques
Ces anomalies sont moins spécifiques :

les symptômes d’hyperandrogénie :
–ils se limitent généralement à un hirsutisme modéré (duvet de la lèvre supérieure, poils fins parsemés au niveau du menton, ébauche de favoris) et à une séborrhée du visage et du cuir chevelu avec des lésions acnéiques;
des œdèmes des membres inférieurs sont parfois notés

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Autres manifestations cliniques
D’autres manifestations cliniques peuvent être associées aux anomalies morphologiques :

*l’ostéoporose, le plus souvent asymptomatique (ostéodensitométrie), mais parfois responsable de fractures pathologiques, volontiers costales ou vertébrales (voir Item 128, chapitre 7);
*des troubles gonadiques par déficit gonadotrope :
–spanioménorrhée, voire aménorrhée secondaire, sans bouffées de chaleur chez la femme;
–baisse de la libido et impuissance chez l’homme.
*l’hypertension artérielle, généralement modérée;
*des troubles psychiatriques de nature variable :
–irritabilité;
–anxiété;
–insomnie nocturne;
–tendance dépressive;
–exceptionnellement, tableau psychiatrique aigu, à type de psychose hallucinatoire et tendance suicidaire, qui se voit surtout lors des hypercortisolismes intenses.
3 Anomalies biologiques non spécifiques
L’intolérance aux glucides est fréquente; le diabète sucré est retrouvé chez un tiers des patients lorsque l’on fait une HGPO.

4 Diagnostic biologique
Le diagnostic biologique permet d’affirmer l’hypercortisolisme.

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Mise en évidence de la sécrétion excessive de cortisol
Le dosage plasmatique du cortisol matinal n’a pas d’intérêt diagnostique (chevauchement des valeurs normales et de celles rencontrées dans le syndrome de Cushing) : une cortisolémie normale le matin n’élimine pas le diagnostic (+++) et, à l’inverse, en conditions de stress, la cortisolémie est souvent élevée, pouvant faussement faire évoquer un syndrome de Cushing. De plus, la contraception œstroprogestative augmente artificiellement la cortisolémie, source d’erreur diagnostique.

La mesure du cortisol libre urinaire (CLU) permet d’apprécier indirectement la quantité de cortisol produite sur l’ensemble du nycthémère (mesure réalisée sur plusieurs jours consécutifs, car la sécrétion peut être fluctuante d’un jour à l’autre). Elle nécessite d’être bien expliquée au patient – jeter les premières urines de la miction du matin au lever le premier jour et commencer le recueil à partir de ce moment, et ce jusqu’au lendemain matin en y intégrant les urines de la première miction du matin. Réalisée dans de bonnes conditions, elle est très pertinente. Malheureusement, c’est rarement le cas et elle peut s’avérer faussement normale ou faussement élevée.

Rupture du rythme circadien de sécrétion du cortisolPerte de rétrocontrôle
On observe la perte de rétrocontrôle des glucocorticoïdes exogènes sur la sécrétion d’ACTH hypophysaire (et donc de cortisol) suite à une absence de freinage.

Plusieurs modalités de « freinage » surrénalien peuvent être proposées. Elles utilisent un glucocorticoïde de synthèse très puissant, la dexaméthasone, qui n’est pas reconnue lorsque l’on dose le cortisol dans le sang ou dans les urines.Test de freinage « minute » (+++)
Le test de freinage minute est le plus simple et peut être réalisé en ambulatoire.

La cortisolémie est mesurée le matin entre 6 et 8 heures, après la prise orale de 1 mg de dexaméthasone la veille à 23 heures.

Ce test permet de dépister la très grande majorité des syndromes de Cushing (grande sensibilité), mais sa spécificité est moins satisfaisante.Test de freinage « faible »
Ce test est également appelé freinage « standard ».

Une dose de 0,5 mg de dexaméthasone est administrée toutes les 6 heures (soit 2 mg par jour) pendant 2 jours. Les critères de jugement sont les mêmes que précédemment.

Stratégie d’exploration paraclinique
En dehors des cas cliniquement évidents, le diagnostic doit s’effectuer en deux phases (fig. 15.16) : tests de première intention, puis tests de deuxième intention.En première intention, en cas de suspicion de syndrome de Cushing, un test doit être réalisé parmi les trois tests suivants : freinage minute par 1 mg de dexaméthasone, cortisol salivaire à minuit, cortisol libre urinaire des 24 heures.

On préfère : le cortisol libre urinaire des 24 heures en cas de syndrome de Cushing cliniquement évident voire sévère; le freinage minute en cas de forme moins évidente en raison de sa très bonne sensibilité; le cortisol libre urinaire des 24 heures ou le cortisol salivaire à minuit en cas de prise d’œstroprogestatifs.

Lorsqu’un test de première intention est normal, la réalisation immédiate ou à distance d’un second test de première intention est discuté en fonction du degré de suspicion clinique. Lorsqu’un test de première intention est anormal, la réalisation immédiate d’un second test de première intention est recommandée

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Diagnostic étiologique
Ce diagnostic permet d’affirmer l’origine hypophysaire de l’hypercortisolisme (voir fig. 15.16).

L’hypercortisolisme étant établi (absence de freinage, absence de rythme nycthéméral du cortisol plasmatique et/ou CLU élevé), la première étape de l’enquête étiologique consiste à établir si l’hypercortisolisme dépend ou non de l’ACTH. Cette étape repose sur le dosage de l’ACTH plasmatique :

*une concentration d’ACTH effondrée est en effet évocatrice d’un syndrome de Cushing d’origine surrénalienne (adénome ou corticosurrénalome malin); elle impose alors la réalisation d’un scanner des surrénales;
*des concentrations d’ACTH dans les valeurs normales (non effondrées, c’est-à-dire inappropriées en présence d’un hypercortisolisme) ou élevées sont en faveur d’un syndrome de Cushing ACTH-dépendant.

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Éliminer les « pseudo-Cushing » par hypercortisolisme fonctionnel
Le principal diagnostic différentiel des syndromes de Cushing ACTH-dépendants est constitué par les « pseudo-Cushing » par hypercortisolisme fonctionnel ACTH-dépendant modéré.

Ce sont le stress intense, les dépressions sévères, les psychoses et l’alcoolisme qui activent l’axe corticotrope et qui s’accompagnent d’une résistance relative et réversible aux glucocorticoïdes.

Ces « pseudo-Cushing » sont marqués cliniquement par un syndrome de Cushing modéré, avec des signes cliniques cataboliques (cutanés, musculaires, osseux) faibles ou absents. Biologiquement, les patients présentent :

*des anomalies modérées aux tests de première ligne (cortisol libre urinaire, freinage minute par 1 mg de dexaméthasone);L’épreuve du temps et la réévaluation clinique et biologique des patients à distance, éventuellement après mise en route d’un traitement psychotrope adapté ou après sevrage alcoolique, permettent souvent de trancher.

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Découverte de l’adénome hypophysaire devant un tableau d’insuffisance antéhypophysaire
La présence d’un adénome hypophysaire peut être à l’origine d’une insuffisance antéhypophysaire. Le diagnostic est rendu difficile par le fait que son début est souvent insidieux.

Attention !

Un adénome hypophysaire ne s’accompagne jamais d’un diabète insipide (sauf en postopératoire ou à l’occasion d’une apoplexie hypophysaire). La présence d’un diabète insipide chez un patient porteur d’une lésion hypothalamo-hypophysaire doit donc impérativement faire rechercher une autre étiologie que l’adénome hypophysaire (voir plus haut le diagnostic différentiel des adénomes en imagerie) (+++).

A Aspect clinique caractéristique du panhypopituitarisme chez l’adulte
Le faciès est pâle, un peu « vieillot ». La dépigmentation des aréoles mammaires et des organes génitaux externes est constante. La peau est mince, froide, sèche. Les rides au niveau du front et de la partie externe des orbites sont fines. Les cheveux sont fins et soyeux. La dépilation est complète au niveau des aisselles et du pubis (signe intéressant chez les sujets de moins de 60 ans), consécutive à l’absence d’androgènes surrénaliens et gonadiques (fig. 15.17). Signes liés aux déficits des fonctions hypophysaires
1 Signes liés à l’insuffisance gonadotrope

Chez l’homme
l’interrogatoire, on note une disparition de la libido, responsable parfois de troubles de l’érection. À l’examen, la pilosité du visage est raréfiée, les testicules sont petits et mous à la palpation. Le patient est généralement infertile.

Chez la femme
L’aménorrhée, précédée parfois d’irrégularités menstruelles classiquement sans bouffées de chaleur, est un signe extrêmement fréquent. La patiente est généralement infertile. La carence en œstradiol est à l’origine d’une atrophie des muqueuses vaginales et vulvaires, responsable d’une dyspareunie.

Dans les deux sexes
L’hypogonadisme prolongé provoque une déminéralisation osseuse et une ostéoporose.

Autres signes
Lorsque le déficit est apparu avant la puberté, au tableau clinique précédent s’associe la présence d’un impubérisme (absence de puberté) ou d’un retard pubertaire, voire d’un retard de croissance si le déficit est associé à un déficit en GH.

2 Signes liés au déficit corticotrope
Ce déficit est responsable d’une asthénie importante et d’une tendance à l’hypotension. Un amaigrissement est souvent noté, associé à une anorexie. Il expose à un risque d’hypoglycémie de jeûne et d’hyponatrémie.

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Signes liés au déficit thyréotrope
Ce déficit entraîne une carence en hormones thyroïdiennes d’intensité variable, mais très souvent moins sévère que celle observée au cours des hypothyroïdies périphériques. Les signes d’hypothyroïdie sont par conséquent d’intensité modérée.

4 Signes liés au déficit somatotrope
Chez l’adulte
L’absence de sécrétion de GH n’a pas de conséquence clinique évidente, sauf une diminution de la masse et de la force musculaires, une tendance à l’adiposité abdominale, une fatigue et une diminution de la qualité de vie.

Chez l’enfant (+++)
Le déficit en GH est responsable d’un retard de croissance1. Les accidents hypoglycémiques chez l’enfant, conséquence des déficits somatotrope et corticotrope, sont très fréquents et souvent révélateurs.

C Bilan hypophysaire fonctionnel

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Bilan hypophysaire fonctionnel
Ce bilan permet de confirmer le diagnostic clinique d’insuffisance antéhypophysaire.

1 Déficit corticotrope
Le test de référence pour la mise en évidence d’un déficit corticotrope est l’hypoglycémie insulinique.

Hypoglycémie insulinique
En cas d’insuffisance corticotrope, le cortisol ne s’élève pas au-delà de 185 ng/ml (500 nmol/l), à condition que la glycémie au cours de l’hypoglycémie insulinique se soit abaissée à moins de 2,2 mmol/l (0,40 g/l) – mais une hypoglycémie est parfois difficile à obtenir chez l’obèse. Elle est contre-indiquée en cas d’insuffisance coronarienne et de comitialité.

Autres tests
Compte tenu des inconvénients de l’hypoglycémie insulinique, d’autres tests plus simples sont parfois utilisés.

Simple dosage de la cortisolémie
Les performances de ce dosage seul sont médiocres, ce qui explique qu’un test dynamique soit indispensable dans la majorité des cas. Néanmoins, une cortisolémie du matin inférieure à 50 ng/ml (140 nmol/l) affirme l’insuffisance corticotrope et une cortisolémie au-dessus de 135 ng/ml (365 nmol/l) l’élimine.est au Synacthène® immédiat 0,250 mg
Le seul critère de réponse normale (affirmant l’intégrité corticotrope) est un seuil de cortisolémie après Synacthène® immédiat > 180 ng/ml (500 nmol/l) – le seuil est adapté à la méthode de dosage.Déficit thyréotrope
Le déficit en TSH ne peut pas être mis en évidence par un dosage de TSH – concentrations de TSH le plus souvent normales chez les patients présentant une authentique hypothyroïdie secondaire ou déficit thyréotrope.

Le seul dosage permettant réellement de faire le diagnostic d’hypothyroïdie d’origine hypothalamo-hypophysaire est donc la mise en évidence d’une diminution de la concentration plasmatique de T4 libre, sans élévation de celle de TSH. La mesure de la T3 libre est moins utile, car elle est fréquemment normaleDéficit gonadotrope
Chez la femme
Avant la ménopause
Le diagnostic d’une insuffisance gonadotrope est essentiellement clinique; il est établi sur l’existence d’une aménorrhée ou d’une oligoménorrhée associées à des signes de déprivation œstrogénique (baisse de la libido, sécheresse vaginale, dyspareunie, etc.). Typiquement, l’œstradiol plasmatique est bas, alors que les gonadotrophines, en particulier la FSH, ne sont pas élevées (parfois basses ou dans les valeurs « normales »).Après la ménopause
Le diagnostic est établi sur le dosage basal des gonadotrophines : elles sont basses ou dans les valeurs correspondant aux femmes jeunes, alors qu’on les attend élevées chez la femme ménopausée.hez l’homme
Le diagnostic d’hypogonadisme hypogonadotrophique est établi sur la présence de troubles sexuels (baisse de la libido) associés à une concentration basse de testostérone, sans élévation des gonadotrophines (en particulier de FSH) qui sont basses ou dans les valeurs « normales ».l faut aussi savoir que l’hyperprolactinémie peut, en soi, être responsable d’un déficit gonadotrope fonctionnel (voir plus haut). Dans ce cas, la correction de l’hyperprolactinémie permet de restaurer une fonction gonadotrope et donc gonadique normale.Déficit somatotrope
Déficit en hormone de croissance chez l’enfant (+++)
Le diagnostic est établi devant un retard de croissance et une absence de réponse adéquate à la stimulation de la GH par différents tests, en particulier celui de l’hypoglycémie insulinique

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Diabète insipide
Le diabète insipide central peut survenir après chirurgie d’un adénome hypophysaire ou bien en cas de lésion non adénomateuse de la région hypothalamo-hypophysaire. Il est caractérisé par une polyurie hypotonique supérieure à 3 litres par 24 heures chez l’adulte. Sa présence avant une chirurgie hypophysaire élimine le diagnostic d’adénome hypophysaire et fait plutôt évoquer les diagnostics différentiels évoqués plus haut.

A

Un interrogatoire minutieux doit rechercher :

*la persistance nocturne de la polyurie, bon signe d’organicité;
*le début et l’ancienneté des troubles;
*la présence de réveils nocturnes;
*la notion de prise médicamenteuse;
*le caractère éventuellement familial du trouble.
L’examen clinique nécessite la mesure du poids, de la pression artérielle et, surtout, la quantification nycthémérale des boissons et de la diurèse. Des signes de déshydratation, un éventuel globe vésical, des signes d’hypersécrétion ou d’hyposécrétion hormonale hypophysaire, un syndrome tumoral, des signes de granulomatose ou de cancer doivent être recherchés. Dans les formes sévères, le diagnostic de diabète insipide est porté sur la clinique et des dosages biologiques de base (osmolalité urinaire < 200 mOsmol/kg H2O et natrémie > 145 mmol/l), le plus souvent en association avec un test thérapeutique à la desmopressine et une IRM hypophysaire.

Dans les formes partielles (osmolalité urinaire comprise entre 300 et 800 mOsmol/kg H2O), le test de restriction hydrique garde un intérêt, couplé au dosage de la vasopressine ou de la copeptine. Ces examens doivent être faits en milieu spécialisé.

Le diabète insipide central par déficit en vasopressine doit être différencié des diabètes insipides néphrogéniques par résistance rénale à la vasopressine (syndrome polyuro-polydipsique à vasopressine élevé). Les diabètes insipides néphrogéniques sont parfois familiaux et génétiquement déterminés, mais le souvent plus acquis et secondaires à :

*une affection rénale;
*une hypercalcémie;
*une hypokaliémie;
*une cause iatrogène : lithium (+++), 12 % à 40 % des cas.
L’IRM hypophysaire recherche, d’une part, un hypersignal spontané de la post-hypophyse signant la présence de vasopressine, d’autre part, une anomalie de l’hypophyse ou de la tige hypophysaire.

Un diabète insipide central acquis de révélation brutale doit évoquer un craniopharyngiome ou un germinome avant 30 ans et une métastase après 50 ans. Les traumatismes crâniens se compliquent dans 15 % à 20 % des cas d’hypopituitarisme, dont 2 % de diabète insipide.

Les principales causes de diabète insipide sont résumées dans le tableau 15.2.Le traitement des diabètes insipides centraux repose sur l’apport d’un substitut de la vasopressine, la desmopressine. En son absence, il est impératif que le patient boive autant qu’il le souhaite (souvent plusieurs litres par jour afin d’éviter une déshydratation sévère caractérisée biologiquement par une hypernatrémie).

E Imagerie
La mise en évidence d’un déficit hypophysaire isolé ou multiple impose la réalisation d’une IRM à la recherche d’une lésion hypothalamo-hypophysair

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Points clés

*Un adénome hypophysaire avec expansion suprasellaire peut comprimer le chiasma optique et donner des troubles visuels à type d’hémianopsie bitemporale.
*L’IRM est l’examen de référence et met en évidence soit un microadénome (< 10 mm de diamètre), soit un macroadénome (> 10 mm).
* L’hyperprolactinémie est souvent secondaire à un adénome à prolactine, mais elle peut aussi être consécutive à la prise de médicaments (+++) ou à la présence d’une tumeur non prolactinique comprimant la tige pituitaire (hyperprolactinémie de déconnexion).
*Le diagnostic d’acromégalie, suspecté cliniquement, repose sur la mise en évidence d’une augmentation de la concentration d’IGF-1 et, éventuellement, sur l’absence de freinage de la GH à moins de 0,4 ng/ml après HGPO.
*La découverte d’un hypercortisolisme (syndrome de Cushing) est prouvée par au moins deux anomalies biologiques telles que l’augmentation du cortisol libre urinaire, la présence d’un cortisol salivaire vespéral élevé et/ou le freinage à la dexaméthasone (freinage minute) anormal. Elle impose un diagnostic étiologique reposant sur l’ACTH : si l’ACTH est élevée ou normale (non effondrée), il peut s’agir d’un adénome hypophysaire à ACTH (maladie de Cushing) ou d’une sécrétion ectopique d’ACTH.
* Une insuffisance antéhypophysaire doit être recherchée chez tout patient porteur d’un adénome hypophysaire. Sur le plan hormonal, le diagnostic repose sur une absence de réponse satisfaisante du cortisol et de la GH aux tests de stimulation, et sur une baisse de la T4 libre et des stéroïdes sexuels (testostérone chez l’homme, œstradiol chez la femme), respectivement sans élévation de la TSH ou des gonadotrophines.
*Un adénome hypophysaire ne s’accompagne jamais d’un diabète insipide (sauf en postopératoire ou à l’occasion d’une apoplexie hypophysaire). La présence d’un diabète insipide chez un patient porteur d’une lésion hypothalamo-hypophysaire doit donc impérativement faire rechercher une autre étiologie que l’adénome hypophysaire (+++).

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La gynécomastie est une hyperplasie du tissu glandulaire mammaire, fréquente, qui peut être uni- ou bilatérale. Elle est parfois découverte de façon fortuite, plus souvent à l’occasion d’une gêne sensible de la région péri-aréolaire, voire d’une augmentation visible et indolore du sein chez l’homme. Il s’agit d’un symptôme fréquent, répondant à de nombreuses étiologies dont la caractéristique commune est d’augmenter le rapport œstradiol/testostérone.

II Physiopathologie
Le tissu mammaire dispose, dans les deux sexes, des mêmes potentialités de développement. Chez l’homme, son absence de développement est liée à l’absence de stimulation par les œstrogènes, normalement produits en faible quantité, et surtout à l’effet antagoniste de la testostérone sur la croissance du tissu mammaire.

Dès qu’apparaît un déséquilibre entre la quantité circulante d’œstrogènes (augmentation) et/ou celle de la testostérone (diminution), le tissu mammaire est stimulé, conduisant à l’apparition d’une gynécomastie.

En situation physiologique, chez l’homme, 80 % des œstrogènes sont produits par conversion périphérique, en particulier dans le tissu adipeux, de la Δ4-androstènedione et de la testostérone sous l’influence d’une aromatase.

Plus que le rapport des hormones totales, c’est le rapport de la testostérone libre à l’œstradiol libre qui conditionne la survenue d’une gynécomastie. Comme les deux hormones (testostérone et œstradiol) circulent en partie sous forme libre et en partie sous forme liée à la TeBG (testosterone-estradiol binding globulin, ou SHBG, sex hormone binding globulin), les variations des concentrations de TeBG sont aussi susceptibles d’influencer le rapport testostérone libre sur œstradiol libre et donc de favoriser une gynécomastie – la TeBG ayant une affinité supérieure pour la testostérone que pour l’œstradiol, son augmentation provoque une diminution de la testostérone libre plus importante que celle de l’œstradiol libre.

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S’agit-il d’une gynécomastie ou d’une adipomastie ?
De nombreux patients venant consulter pour gynécomastie ont, en fait, une adipomastie sans prolifération glandulaire.

1 Clinique
Cliniquement, le patient est examiné en position allongée, en pressant le sein entre le pouce et l’index et en rapprochant les doigts progressivement autour du mamelon. L’examen est complété par les aires ganglionnaires et surtout la palpation testiculaire.

En cas de gynécomastie (fig. 17.2), on palpe un tissu ferme ou rugueux, mobile, arrondi, centré par le mamelon. Elle peut être aussi bien unilatérale que bilatérale sans que cela ait la moindre importance diagnostique ou pronostiqueEn cas d’adipomastie, on ne palpe rien. Mais le diagnostic différentiel est parfois difficile, justifiant alors, sans hésiter, le recours à une mammographie ou à une échographie mammaire.

La pression concentrique et l’expression du mamelon recherchent aussi une galactorrhée, évocatrice d’une pathologie de la prolactine (bien qu’extrêmement rare dans le sexe masculin).

2 Mammographie et échographie mammaire
Mammographie et échographie mammaire affirment le diagnostic en cas de doute diagnostique à l’examen clinique.

Elles permettent en outre d’éliminer un rare cancer du sein (< 1 %) chez l’homme, que l’on aurait pu suspecter sur une gynécomastie excentrée, dure, fixée aux plans profonds et parfois associée à une déformation du mamelon, voire à un écoulement sanglant.

En cas de gynécomastie simple, la mammographie montre une opacité nodulaire ou triangulaire, étoilée (fig. 17.3), alors qu’elle ne trouve aucun tissu en cas d’adipomastie. Quelle est l’étiologie de cette gynécomastie ?
S’il est facile de reconnaître une gynécomastie, son diagnostic étiologique l’est beaucoup moins. Après avoir écarté les situations évidentes s’accompagnant d’une gynécomastie, le diagnostic impose la réalisation de quelques examens hormonaux simples et une échographie testiculaire.

1 Situations évidentes associées à une gynécomastie
Insuffisance rénale chronique
La gynécomastie peut être multifactorielle : liée à l’augmentation de la TeBG, à l’hypogonadisme secondaire à l’hyperprolactinémie en cas d’insuffisance rénale sévère.

Cirrhose
La cirrhose peut représenter dans certaines séries 8 % des étiologies de gynécomasties. La gynécomastie est fréquente (40 % des cas). Elle est souvent associée à des signes d’hypogonadisme.

Le mécanisme de cette gynécomastie peut être double : baisse de la production d’androgènes et augmentation des concentrations d’œstradiol libre par activation de la synthèse hépatique de la TeBG. La toxicité de l’alcool est également en cause. La renutrition d’un patient dénutri s’accompagne aussi parfois d’une gynécomastie par un mécanisme prroche de celui de la cirrhose.

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Médicaments
Les médicaments sont à l’origine de 10 % à 25 % des gynécomasties selon les séries.

La liste des médicaments ou des substances stupéfiantes susceptibles de s’accompagner d’une gynécomastie est indiquée dans le tableau 17.1.

Tableau 17.1

Médicaments responsables d’une gynécomastie (niveau de preuve élevé).

Hormones et anti-hormones
–Œstrogènes
–Androgenes et anabolisants stéroïdiens
-Gonadotrophines chorioniques
–Antiandrogenes : acétate de cyprotérone (Androcur®), flutamide (Eulexine®)
–Agonistes de la GnRH (médicaments utilisés dans le traitement du cancer de la prostate)
–Inhibiteurs de la 5α-réductase dont finastéride (Chibroprocar®)
–Spironolactone (Aldactone®) : inhibiteur du récepteur de l’aldostérone et des androgènes
Médicaments psychoactifs
–Neuroleptiques : rispéridone (Risperdal®), halopéridol (Haldol®), amisulpride (Solian®), olanzapine (Zyprexa®)
–Phénothiazines : chlorpromazine (Largactil®)
–Antidépresseurs tricycliques : amitriptyline (Largatil®), imipramine (Tofranil®), clomipramine (Anafranil®)
Chimiothérapie anticancéreuse Agents alkylants
Antibiotiques et antirétroviraux
–Isoniazide (Rimifon®)
–Kétoconazole (Nizoral®)
–Antirétroviraux : didanosine (Videx®), éfavirenz (Sustiva®), indinavir (Crixivan®), névirapine (Viramune®)
Anti-ulcéreux et antiacide
–Cimétidine (Tagamet®)
–Oméprazole (Mopral®, Zoltum®)
–Ranitidine (Azantac®, Raniplex®)
(Source : CEEDMM, 2021.)

Le mécanisme de ces gynécomasties iatrogènes est très variable : prise des hormones elles-mêmes ou de produits œstrogéno-mimétiques, de produits bloquant la sécrétion d’androgènes ou empêchant leur action.

Les médicaments le plus souvent en cause (niveau de preuve élevé) sont la spironolactone (Aldactone®), les antiandrogènes, le kétoconazole (Nizoral®), les neuroleptiques (par leur effet sur la prolactine et donc la baisse de la testostérone), certains antibiotiques, antirétroviraux et anti-ulcéreux dont les mécanismes d’action ne sont pas connus.

Dans les autres cas, les mécanismes d’action sont mal documentés et les niveaux de preuve faibles.

Si aucune de ces situations évidentes associées à une gynécomastie n’est trouvée à l’interrogatoire, à l’examen clinique ou en cas d’anomalie du volume testiculaire, une exploration hormonale est de toute manière nécessaire.

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Exploration hormonale minimale indispensable
Cette exploration comporte les dosages sanguins de T4 libre, TSH, hCG, testostérone totale, LH, FSH, prolactine et œstradiol.

Cette exploration hormonale est complétée par la réalisation d’une échographie testiculaire qui permet d’éliminer une tumeur testiculaire sécrétante, qui peut ne pas être palpable à l’examen clinique.

3 Étiologie endocrinienne des gynécomasties
Dysthyroïdie
Au cours de l’hyperthyroïdie, la gynécomastie est liée à la stimulation par les hormones thyroïdiennes de la synthèse de TeBG (ou SHBG) par le foie.

Au cours de l’hypothyroïdie, lorsque celle-ci est profonde (TSH > 50 mUI/l, T4L effondrée), il peut exister une gynécomastie par stimulation de la sécrétion de prolactine via l’augmentation réflexe de la TRH. Cette situation est devenue exceptionnelle de nos jours.

Insuffisance testiculaire, ou hypogonadisme périphérique
Cette atteinte est responsable de 8 % des gynécomasties.

Lorsque la concentration de testostérone plasmatique est basse et s’accompagne d’une élévation de celle de FSH et de LH (hypogonadisme par lésion testiculaire), la gynécomastie est fréquente.

Généralement (mais ce n’est pas toujours le cas), il existe aussi des signes d’insuffisance gonadique et la palpation des testicules trouve une diminution de volume des gonades.

Parfois, la gynécomastie est le premier signe d’un hypogonadisme périphérique, ne s’accompagnant pas encore ni de troubles sexuels, ni d’une baisse de la concentration de testostérone (qui reste normale) : le diagnostic ne repose alors que sur l’élévation des gonadotrophines.

Le syndrome de Klinefelter (caryotype 47XXY) en est l’étiologie la plus fréquente (40 % des patients porteurs d’un syndrome de Klinefelter ont une gynécomastie). Le diagnostic est fait par le caryotype.

D’autres étiologies plus rares sont retrouvées à l’interrogatoire (antécédents d’orchite ou de traumatisme génital, parfois très ancien, histoire de torsion testiculaire, chimiothérapie anticancéreuse ou irradiation, etc.).

Hypogonadisme d’origine hypothalamique ou hypophysaire
C’est la découverte d’une concentration de testostérone basse associée à une non-élévation de celle des gonadotrophines (FSH et LH abaissées ou normales) qui en permet le diagnostic. Une imagerie de la région hypophysaire par scanner ou IRM est alors indispensable, de même qu’un dosage de prolactine.

L’hyperprolactinémie freine la sécrétion des gonadotrophines et donc de la testosterone, et stimule le développement mammaire.

Les autres causes sont généralement tumorales, par exemple adénome de l’hypophyse non fonctionnel, tumeur hypothalamique ou hypogonadisme non tumoral.

Tumeur sécrétant des œstrogènes
La présence d’une concentration élevée (> 40 pg/ml) d’œstradiol, associée ou non à une testostéronémie basse, doit faire penser à une tumeur productrice d’œstrogènes, testiculaire le plus souvent (leydigome) ou surrénalienne, exceptionnelle.

L’échographie testiculaire constitue l’examen clé. Elle permet même parfois de visualiser des tumeurs non palpables.

Si la source d’œstrogènes n’est pas testiculaire, on s’oriente vers une origine surrénalienne : le scanner abdominal révèle le plus souvent une tumeur d’aspect malin (corticosurrénalome).

Tumeurs sécrétant de l’hCG
Un dosage d’hCG est indispensable. En cas d’élévation, cela justifie la réalisation d’abord d’une échographie testiculaire à la recherche d’une tumeur maligne germinale (choriocarcinome testiculaire) et d’une IRM cérébrale (germinome hypothalamique, souvent responsable également d’un diabète insipide).

Ces tumeurs sécrétant de l’hCG ne sont pas nécessairement trophoblastiques et peuvent intéresser les bronches, le foie. Elles sont alors à l’origine d’une authentique sécrétion ectopique d’hCG. Un scanner est toujours indiqué lors du bilan d’extension de ces tumeurs malignes.

Le traitement repose le plus souvent sur une chimiothérapie en première intention après conservation de sperme.

Gynécomastie idiopathique
Fréquemment, aucune cause n’est trouvée; il s’agit alors d’une gynécomastie idiopathique. Elle disparaît d’elle-même ou persiste, justifiant une exérèse chirurgicale. Elle est plus fréquente à certaines périodes de la vie.

Gynécomastie du nouveau-né
La gynécomastie se développe chez plus de deux tiers des nouveau-nés. Elle est liée à un passage transplacentaire des œstrogènes maternels.

Gynécomastie pubertaire
La gynécomastie peut se voir dès l’âge de 10 ans. C’est surtout vers 13 ou 14 ans que l’on observe une gynécomastie, puis elle diminue avec l’âge, mais elle peut durer jusqu’à 18 à 20 ans (30 % à 70 % des garçons de 10 à 17 ans ont une gynécomastie).

Elle est liée à l’augmentation progressive de la production d’androgènes pendant cette période dont l’aromatisation aboutit à un taux transitoirement accru d’œstrogènes. Elle rétrocède habituellement après la puberté de façon spontanée. La palpation testiculaire est néanmoins indispensable, à la recherche d’une atrophie testiculaire ou d’une tumeur (+++).

En cas de persistance d’une gynécomastie après l’âge de 20 ans, il est légitime d’explorer ces patients à la recherche d’une pathologie (voir plus haut).

Gynécomastie du sujet âgé
La gynécomastie est également fréquente après l’âge de 65 ans, jusqu’à 50 % des hommes sur des séries autopsiques en étant porteurs. Elle est en rapport avec la diminution de la fonction testiculaire habituelle à cet âge et à l’augmentation de la transformation des androgènes en œstrogènes (aromatisation) en périphérie (augmentation relative de la masse grasse). Néanmoins, malgré sa fréquence, chez un patient consultant pour ce problème, même en cas de palpation testiculaire normale, il est légitime de l’explorer à la recherche d’une pathologie.

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Traitement
Le traitement doit viser autant que possible à traiter la cause de la gynécomastie. Il est le plus souvent efficace.

A Traitement des gynécomasties pubertaires
Il faut ne rien faire. La gynécomastie disparaîtra d’elle-même. Il faut rassurer les parents et l’enfant. Si la gynécomastie persiste après l’âge de 18 ans et qu’aucune étiologie n’a été trouvée, en cas de gêne ou de préjudice esthétique, l’exérèse du tissu glandulaire au prix d’une minime cicatrice aréolaire est possible.

B Traitement des gynécomasties idiopathiques de l’adulte
Si un traitement hormonal est entrepris, il doit, pour avoir les meilleures chances de succès, être débuté tôt, pendant la phase active, proliférative de la gynécomastie. En effet, au bout de 12 mois, le tissu glandulaire se transforme en un tissu fibreux qui a peu de chances de répondre au traitement. Celui-ci fait appel aux androgènes non aromatisables (androstanolone, Andractim®) par voie percutanée en application sur la gynécomastie (actuellement non disponible à la vente).

En l’absence d’amélioration au bout de 3 mois, la chirurgie plastique peut être indiquée. Il en est de même des gynécomasties secondaires si le facteur étiologique a été traité et qu’une gynécomastie, devenue fibreuse, persiste.

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La mammographie est le meilleur examen permettant de confirmer le diagnostic de gynécomastie et d’éliminer les diagnostics différentiels les plus fréquents (adipomastie, cancer du sein).
*En dehors des causes évidentes, sous réserve d’un examen clinique normal, il convient de poursuivre les investigations par une exploration hormonale minimale (T4 libre, TSH, hCG, testostérone totale, LH, FSH, prolactine, œstradiol) et par une échographie testiculaire.
* Selon les séries, les causes les plus fréquentes sont : médicamenteuses (10 % à 25 %), idiopathique (25 %), une cirrhose (8 %), une insuffisance testiculaire (8 %) ou gonadotrope et, plus rarement, les causes tumorales (leydigomes et tumeur à hCG).
*Le traitement est d’abord étiologique.
*En cas de gynécomastie idiopathique, le traitement par androgènes percutanés est souvent efficace sur les douleurs.
*Une chirurgie en cas de gêne esthétique est parfois nécessaire si le traitement, même étiologique, a été tardif, car la gynécomastie peut évoluer vers la fibrose.

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Définitions
Les tumeurs neuroendocrines duodénopancréatiques (TNE-DP) sont des tumeurs rares développées aux dépens des cellules endocrines du pancréas et du duodénum.

Les TNE sont des tumeurs souvent peu symptomatiques, lentement évolutives, avec plusieurs traitements possibles, à l’inverse des adénocarcinomes pancréatiques qui sont des cancers agressifs associés à un mauvais pronostic (voir polycopié de gastro-entérologie).

L’incidence est de deux nouveaux cas/an/100 000 personnes. Les TNE représentent seulement 1 % à 2 % des tumeurs malignes pancréatiques.

Le diagnostic est histologique (aspect lobulaire ou trabéculaire dans les formes bien différenciées), mais nécessite une confirmation immunohistochimique (expression de la synaptophysine et la chromogranine A).

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I Grades histopronostiques
Le stade tumoral et la classification anatomopathologique OMS 2017 des TNE-DP avec le Ki-67 (ou Mib 1), reflet de l’activité mitotique (tableau 23.1, fig. 23.1), sont les deux principaux facteurs pronostiques. Il faut séparer les TNE (bien différenciées), qui sont les plus nombreuses et sont associées à une survie prolongée même en l’absence de traitement, des carcinomes neuroendocrines (peu différenciés) dont le pronostic est très sombre.

Tableau 23.1

Classification anatomopathologique OMS 2017 des néoplasmes neuroendocrines pancréatiques.

Morphologie (différenciation)	Grade (% Ki-67) Tumeur neuroendocrine de grade 1 (TNE G1)	Bien différenciée	G1 (< 3 %) Tumeur neuroendocrine de grade 2 (TNE G2)	Bien différenciée	G2 (3-20 %) Tumeur neuroendocrine de grade 3 (TNE G3)	Bien différenciée	G3 (> 20 %) Carcinome neuroendocrine (CNE)	Peu différenciée (petites ou grandes cellules)	G3 (> 20 %) Néoplasie mixte neuroendocrine/non neuroendocrine (MiNEN)	Association d'un contingent neuroendocrine et d'un contingent non neuroendocrine	Tous grades
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Présentation clinique et biologique
Les TNE-DP sont non fonctionnelles dans 80 % des cas et sont alors découvertes fortuitement lors d’une endoscopie, un scanner ou d’une IRM abdominale.

Au diagnostic initial, la moitié des TNE sont métastatiques, notamment au niveau hépatique. Dans ces cas-là, elles peuvent être révélées par des douleurs abdominales ou une gêne abdominale évoluant depuis plusieurs mois.

Dans 20 % des cas, les TNE-DP sont révélées par des symptômes en rapport avec une sécrétion hormonale (tableau 23.2).

Tableau 23.2

Caractéristiques des principales TNE-DP fonctionnelles.

Sécrétion dominante Nom Présentation clinique : principaux signes Marqueur biologique
Insuline Insulinome* Hypoglycémie organique* Insuline inadaptée en regard d’une glycémie veineuse basse
Gastrine Gastrinome Ulcères œso-gastro-duodénaux récidivants, diarrhées résolutives sous IPP Gastrine élevée
ACTH Cushing paranéoplasique Signes de Cushing sévères (apparition rapide, formes cataboliques, HTA, hypokaliémie, diabète sucré de type 2)
Cortisolémies généralement très élevées (0 h mais aussi le reste du temps)
Cortisol urinaire des 24 heures élevé
ACTH circulante inadaptée (« normale » ou souvent très augmentée)
Tests dynamiques**
Glucagon Glucagonome Diabète, érythème migrateur, diarrhée, amaigrissement, thromboses Diabète, glucagon circulant élevé
VIP VIPome Diarrhée hydroélectrolytique profuse, hypokaliémie VIP élevé
GHRH Acromégalie (exceptionnelle) GHRH, GH, IGF-1 élevés
Sérotonine Syndrome carcinoïde (flushs, diarrhées, ± cardiopathie) 5-HIAA urinaires élevésSur le plan biologique, en dehors des syndromes sécrétoires cliniques, il n’y a pas de marqueur biologique diagnostique reconnu. Le dosage de la chromogranine A peut être utile chez certains patients, mais avec de nombreuses limites (sensibilité limitée, notamment dans les formes localisées non métastatiques et nombreux faux positifs, comme en cas de traitement concomitant par inhibiteurs de la pompe à protons par exemple).

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Imagerie conventionnelle et fonctionnelle
Une TNE-DP est diagnostiquée par l’endoscopie (fig. 23.2A). Le scanner thoraco-abdominopelvien injecté (temps artériel et veineux) est l’examen de première intention pour dépister une TNE-DP et en faire le bilan d’extension; il est caractéristique par l’intense vascularisation de la tumeur à la phase artérielle précoce (fig. 23.2B). Il peut être complété par une IRM abdominale pour mieux visualiser les métastases hépatiques et parfois par une écho-endoscopie pour faire le bilan d’extension locorégional en cas de discussion de chirurgie (évaluation de la distance avec le canal de Wirsung) et pour affirmer/confirmer le diagnostic histologique par une ponction pancréatique (fig. 23.3).La place de l’imagerie fonctionnelle (imagerie ciblant les récepteurs de la somatostatine comme l’Octréoscan®, la TEP DOTA-TOC ou DOTA-NOC, et imagerie par TEP-FDG; fig. 23.4) est fondamentale. Elle permet :de réaliser le bilan d’extension de la TNE-DP en détectant parfois des petites lésions à distance, non vues au scanner;
*de donner des indications sur le pronostic : une tumeur fixant intensément sur une imagerie des récepteurs de la somatostatine, sans fixation au TEP-FDG, est de bon pronostic; inversement, une lésion avec Octréoscan® négatif et TEP-FDG positif est de mauvais pronostic;
*d’établir l’éligibilité à un traitement par radiothérapie interne vectorisée par analogues de la somatostatine radiomarqués, comme la lutathérapie (Lutathera®) par exemple.

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Formes familiales et syndromes de prédisposition génétique aux TNE-DP
Les TNE pancréatiques ou duodénopancréatiques peuvent parfois s’intégrer à un syndrome de prédisposition génétique comme la néoplasie endocrinienne multiple de type 1 (NEM1) ou, plus rarement, la maladie de Von Hippel-Lindau ou la neurofibromatose de type 1 (NF1). Il est important d’éliminer une forme syndromique de TNE pour choisir le traitement et le suivi de la TNE, mais aussi pour le dépistage des apparentés.

Une NEM1 est à rechercher en cas de :

*TNE exclusivement duodénopancréatiques non fonctionnelles multiples, quel que soit l’âge, ou TNE-DP unique chez un patient de moins de 50 ans;
*gastrinome (syndrome de Zollinger-Ellison), insulinome, VIPome ou glucagonome;
*TNE-DP associée à un adénome hypophysaire et/ou à une hyperparathyroïdie primaire chez le patient et/ou chez un apparenté au 1er ou 2e degré et/ou en cas de NEM1 connue chez un apparenté.
Une maladie de Von Hippel-Lindau est à rechercher en cas de :

*TNE pancréatique associée à des hémangioblastomes de la rétine ou du système nerveux central et/ou à des cancers du rein/kystes multiples rénaux et/ou à un phéochromocytome ou un paragangliome chez le patient ou chez un apparenté au 1er degré;
*TNE pancréatique isolée chez un patient de moins de 50 ans

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Points clés

*Les tumeurs neuroendocrines duodénopancréatique (TNE-DP) sont rares.
*Elles se dévoilent parfois par des symptômes endocrines comme les hypoglycémies organiques, un syndrome de Zollinger-Ellison ou un syndrome de Cushing paranéoplasique.
* Le diagnostic est souvent posé par le contexte clinicobiologique couplé à l’imagerie conventionnelle et fonctionnelle (principalement celle ciblant les récepteurs de la somatostatine comme le TEP-DOTATOC/DOTANOC ou l’Octréoscan®).
* Rarement, elles peuvent s’intégrer dans un syndrome de prédisposition génétique de type NEM1.

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Rappels physiologiques
La calcémie est étroitement régulée par deux hormones calciotropes : la parathormone (PTH), hormone principale de régulation de la calcémie et la forme active de la vitamine D, le calcitriol (1,25-[OH]2-vitamine D), produite par le rein (qui exprime l’enzyme 1-alpha hydroxylase).

La PTH joue plusieurs rôles (fig. 22.1) :elle stimule la 1α-hydroxylase dans le tubule proximal du rein et augmente par conséquent la production du calcitriol, qui à son tour augmente l’absorption intestinale du calcium et du phosphore;
*elle augmente la résorption osseuse et donc mobilise le calcium et le phosphore de l’os;
*elle inhibe la réabsorption rénale du phosphore au niveau du tubule proximal et stimule la réabsorption rénale du calcium au niveau du tubule distal. Cet effet dissocié au niveau du rein permet d’augmenter la calcémie et de diminuer la phosphatémie, sans modifier le produit phosphocalcique.
La sécrétion de la parathormone par la cellule parathyroïdienne est finement régulée par le récepteur sensible au calcium (calcium-sensing receptor [CaSR]) : l’augmentation de la concentration plasmatique du calcium ionisé inhibe, par l’intermédiaire de ce récepteur membranaire, la sécrétion de la PTH.

Le CaSR est présent :

*sur les cellules parathyroïdlennes;
*sur les cellules tubulalres rénales, permettant directement d’augmenter la calciurie en cas d’hypercalcémie.
L’augmentation du calcium ionisé plasmatique inhibe la réabsorption rénale du calcium et augmente ainsi la calciurie (voir fig. 22.1).

Principaux mécanismes de l’hypercalcémie. L’hypercalcémie est le résultat d’une dérégulation entre les flux entrants et sortants du calcium dans le compartiment sanguin. Elle est due :

*soit à l’augmentation de l’absorption calcique digestive;
*soit à une résorption osseuse accrue avec perte osseuse de calcium;
*soit à une diminution de l’excrétion rénale du calcium.
Ces mécanismes sont souvent associés.

Certaines causes d’hypercalcémie associent plusieurs mécanismes (exemple de l’hypercalcémie osseuse et digestive au cours de l’hyperparathyroïdie primaire).

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Définition biologique
Le diagnostic de l’hypercalcémie est biologique et repose sur le dosage de la calcémie totale. La limite supérieure de la calcémie au-delà de laquelle on définit l’hypercalcémie doit se référer aux normes de chaque laboratoire. Des calcémies totales supérieures à 2,60 mmol/l (104 mg/l) sont pathologiques.

La calcémie totale mesurée représente la somme du calcium lié (53 % du calcium total) et du calcium libre ou ionisé (47 %) (fig. 22.2). Le calcium lié comprend le calcium lié aux protéines (40 % du calcium total), en particulier à l’albumine, et le calcium complexé à des anions (13 %) sous forme de bicarbonate, phosphate, sulfate ou citrate.Les valeurs physiologiques du calcium ionisé à jeun sont comprises entre 1,15 et 1,32 mmol/l (43 à 52 mg/l); il y a donc hypercalcémie lorsque le calcium ionisé dépasse 1,30 mmol/l. Cependant, la détermination du calcium ionisé est complexe, car très dépendante des conditions de prélèvement et de la rapidité du dosage. Ce dosage est privilégié comme la meilleure interprétation de la calcémie dans des conditions rares, au cours du myélome, chez les sujets dénutris et hypoprotidémiques, etc.

En pratique courante, le dosage de la calcémie totale est suffisant dans la grande majorité des cas pour le diagnostic d’une hypercalcémie. Puis, en présence d’une hypercalcémie totale, elle sera confirmée par le dosage de la calcémie ionisée et/ou le calcul de la calcémie totale corrigée.

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Clinique
La symptomatologie clinique classique de l’hypercalcémie est résumée dans le tableau 22.1. Ces signes sont peu spécifiques et le diagnostic n’est évoqué que lorsque plusieurs de ces signes sont associés, ce qui est le cas lorsque la calcémie est supérieure à 3 mmol/l (120 mg/l). La majorité des hypercalcémies modérées, comprises entre 2,63 et 3 mmol/l (105 à 120 mg/l), sont peu ou totalement asymptomatiques. Dans une majorité de cas – jusqu’à 80 % des cas ! –, le diagnostic d’hypercalcémie se fait de façon fortuite à l’occasion d’un dosage systématique de la calcémie. Les signes habituels peuvent être :

Tableau 22.1

Signes cliniques communs aux hypercalcémies.

Signes généraux Asthénie générale et musculaire
Signes rénaux
–Polyuro-polydipsie
–Lithiases rénales (récidivantes, bilatérales)
Signes digestifs -Anorexie
–Constipation
–Nausées, vomissements si hypercalcémie aiguë
Signes neuropsychiques
–Apathie
–Somnolence
–Altération de la conscience (confusion, psychose, coma)
Signes cardiovasculaires
–Hypertension artérielle
–Raccourcissement du segment QT et anomalies de repolarisation non spécifiques à l’ECG (fig. 22.3)
(Source : CEEDMM, 2021.)

*digestifs : anorexie, nausées, vomissements et rares poussées de pancréatite aiguë;
*neuropsychiques : asthénie, déficits cognitifs et troubles de l’humeur, confusion, épisodes hallucinatoires ou psychotiques, coma en cas d’hypercalcémie sévère;
*rénaux : syndrome polyuro-polydipsique par diabète insipide néphrogénique (baisse de la sensibilité à l’ADH), déshydratation extracellulaire par perte de NaCl, parfois compliquée d’insuffisance rénale fonctionnelle;
*cardiologiques : raccourcissement du segment QT à l’ECG; troubles du rythme avec risque de tachycardie ventriculaire ou bradycardie sévère en cas d’hypercalcémie sévère.

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Hypercalcémie maligne

Il s’agit d’une situation d’urgence. La calcémie est en général supérieure à 3,7 mmol/l (> 150 mg/l). La déshydratation, toujours présente, entretient l’élévation de la calcémie. Elle est induite par la polyurie et/ou par les vomissements et est responsable d’une insuffisance rénale fonctionnelle qui aggrave l’hypercalcémie en réduisant la clairance calcique. Le tableau clinique est compliqué par l’altération de la conscience (syndrome confusionnel voire coma) et les troubles cardiologiques (troubles du rythme avec risque de tachycardie ventriculaire ou bradycardie sévère).

Les signes ECG d’hypercalcémie sont souvent discrets (anomalies de repolarisation non spécifiques), voire absents.

Les principales anomalies électriques retrouvés sont :

le raccourcissement du segment QT (fig. 22.3);la tachycardie sinusale;
*les troubles de la repolarisation (sous-décalage du segment ST);
*les troubles du rythme ventriculaire avec un risque de survenue de tachycardie ventriculaire et/ou de bradycardie avec asystolie.
Les digitaliques favorisent ces complications et sont formellement contre-indiqués en cas d’hypercalcémie.

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Diagnostic étiologique
Les principales causes d’hypercalcémie sont présentées dans la figure 22.4.

Elles dépendent du mécanisme de l’hypercalcémie. Schématiquement, les causes d’hypercalcémie peuvent être divisées en deux grands groupes :

*hypercalcémies secondaires à une augmentation par les cellules parathyroïdiennes de la sécrétion de la PTH dont les concentrations plasmatiques sont normales ou hautes;
*hypercalcémies malgré une suppression parathyroïdienne, donc avec des concentrations de PTH effondrées.
La démarche diagnostique initiale d’une hypercalcémie repose ainsi en premier lieu sur la mesure de la PTH.

Les dosages de la phosphatémie, de la calciurie des 24 heures, du 25-OH-cholécalciférol et très exceptionnellement du calcitriol permettront ensuite de mieux préciser le diagnostic.

Deux étiologies sont largement majoritaires, puisqu’elles représentent à elles seules près de 90 % des hypercalcémies : en premier lieu, l’hyperparathyroïdie primaire, puis les hypercalcémies liées aux cancers.

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Hypercalcémies PTH-dépendantes
1 Hyperparathyroïdie primaire

Dans l’hyperparathyroïdie (HPT) primaire, une pathologie primitive d’une ou de plusieurs parathyroïdes est responsable d’une sécrétion excessive autonome de la PTH. Elle a pour conséquences des altérations du métabolisme phosphocalcique et des retentissements tissulaires de sévérité très variables.

L’HPT primaire est une maladie fréquente, atteignant classiquement un individu sur 1 000. L’HPT primaire constitue ainsi plus de la moitié des causes d’hypercalcémie. Les formes asymptomatiques et modérées de l’HPT primaire sont encore plus fréquentes chez la femme au-delà de l’âge de la ménopause. Cette augmentation de la prévalence d’HPT primaire, notamment de ses formes asymptomatiques, est surtout le fait de l’exploration systématique en routine du métabolisme phosphocalcique.Signes cliniques
Présentation clinique « classique »
Les signes cliniques de l’HPT primaire sont d’abord ceux de l’hypercalcémie en général (voir tableau 22.1). Les patients avec HPT primaire peuvent se plaindre d’asthénie, d’un manque d’entrain, d’une fatigue musculaire à laquelle contribue aussi l’hypophosphorémie.

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Les signes osseux sont le reflet d’un déséquilibre du remodelage osseux au profit de la résorption ostéoclastique. L’expression clinique la plus traditionnelle constitue la classique « ostéite fibrokystique », en réalité maintenant exceptionnelle (voir fig. 22.5).

Elle détermine des douleurs osseuses très vives et des fractures pathologiques.

Des tuméfactions osseuses sont désignées sous le nom de « tumeurs brunes », correspondant histologiquement à une prolifération d’ostéoclastes (ostéoclastomes). Les signes radiologiques classiques de cette résorption accentuée s’observent typiquement au niveau des phalanges des mains. Un amincissement et un aspect fibrillaire des corticales, une disparition des houppes phalangiennes et, surtout, des érosions sous-périostées « en coup d’ongle » très spécifiques sont observés.

Même si ces aspects n’ont pas complètement disparu, beaucoup plus banalement l’HPT primaire constitue maintenant plutôt une cause d’ostéopénie ou d’ostéoporose. La raréfaction osseuse prédomine sur l’os cortical, dont le meilleur reflet à l’ostéodensitométrie est la densité du tiers distal du radius. Elle respecte relativement l’os trabéculaire et apparaît de ce fait moins évidente au niveau rachidien. Cependant, dans 20 % des cas, l’atteinte rachidienne prédomine. L’étude de la densité osseuse fait donc partie des éléments décisionnels pour l’orientation thérapeutique des HPT primaires.

L’HPT primaire est une cause de lithiases rénales. Ce sont typiquement des lithiases bilatérales, récidivantes, radio-opaques et parlantes : responsables de colique néphrétique, d’hématurie, d’infection urinaire (en raison de l’alcalinité des urines). Les calculs sont ordinairement constitués d’oxalate de calcium; ils sont très reconnaissables par leur caractère spiculé, hérissé. La néphrocalcinose est aussi possible.

L’exploration rénale doit comporter une mesure de la créatinine plasmatique et un scanner rénal non injecté à basse irradiation – plus précis pour rechercher une lithiase ou une néphrocalcinose que l’échographie rénale. Un syndrome polyuro-polydipsique modéré (de l’ordre de 3 à 4 litres par jour) fait partie du tableau clinique. Il s’explique par une réduction de la sensibilité du tubule rénal à l’action de la vasopressine en raison de l’hypercalcémie. Il s’accompagne d’un défaut d’acidification des urines qui contribue au risque d’infection urinaire et de lithiases.

Des crises « pseudo-goutteuses » sont possibles, liées à la chondrocalcinose (par dépôt de cristaux de pyrophosphate de calcium). Elles surviennent volontiers au niveau des poignets, des coudes et des genoux.

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Formes asymptomatiques
Les formes asymptomatiques sont de loin les plus fréquentes et constituent 80 % à 90 % des HPT primaires actuellement diagnostiquées. Elles sont cliniquement non expressives et n’ont déterminé aucune évidence d’atteinte rénale, articulaire ou digestive. Un élément très important de l’évaluation de ces situations est l’appréciation de la masse osseuse en ostéodensitométrie.

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Biologie
Le diagnostic biologique de l’HPT primaire est défini par l’association hypercalcémie et PTH plasmatique élevée ou « normale », donc inadaptée à l’hypercalcémie.

La première étape consiste donc à répéter les dosages de la calcémie pour confirmer l’existence de l’hypercalcémie.

Une hypovitaminose D, une hypoalbuminémie ou une acidose peuvent masquer l’hypercalcémie d’une HPT.

Le déficit en vitamine D doit être substitué pour évaluer l’importance d’une hypercalcémie. En cas d’hypoalbuminémie ou d’acidose, la mesure du calcium ionisé plasmatique peut être effectuée. Lorsque cette mesure n’est pas possible, on peut calculer une calcémie corrigée (voir fig. 22.2).

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Il faut impérativement interpréter les chiffres de la PTH en fonction de la calcémie et ne pas oublier qu’une hyperparathormonémie est d’abord un mécanisme physiologique d’adaptation à une baisse de la calcémie, caractérisant l’HPT secondaire (voir plus haut).

L’HPT augmente la clairance du phosphate en diminuant sa réabsorption tubulaire. Cependant, la phosphorémie varie de façon importante en fonction de l’apport nutritionnel et de la fonction rénale. L’hypophosphorémie n’est en fait observée que dans 50 % des cas.

La calciurie est accrue dans l’HPT primaire du fait de l’augmentation de la charge filtrée du calcium (élévation de la calcémie) et l’effet inhibiteur de l’hypercalcémie sur la réabsorption tubulaire rénale du calcium via le CaSR au niveau de l’anse de Henlé. Cependant, les variations physiologiques de la calciurie sont importantes et la calciurie peut aussi être dans les limites de la normale. Ce paramètre est surtout utile pour faire un diagnostic différentiel entre une forme fruste d’HPT primaire et le syndrome hypercalcémie-hypocalciurie familiale (avec une calciurie typiquement effondrée).

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Contrairement aux HPT primaires sporadiques (qui surviennent préférentiellement chez les sujets de plus de 50 ans), les HPT primaires génétiquement déterminées surviennent dans une population jeune. Toute HPT primaire chez le sujet de moins de 45 ans (environ 10 % de formes génétiques), ainsi que l’HPT primaire avec une présentation syndromique (associée à des lésions typiques de la NEM1, la NEM2 ou des tumeurs de la mâchoire) ou avec une présentation familiale est donc suspecte d’appartenir à une HPT primaire génétiquement transmissible et requiert des analyses génétiques des gènes de prédisposition.

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Hypercalcémie-hypocalciurie familiale
Ce syndrome constitue un piège diagnostique classique avec l’HPT primaire. Il associe une hypercalcémie en règle générale bien tolérée, une hypophosphorémie, une discrète hypermagnésémie, une calciurie (très) basse (mais pas de façon constante) et des valeurs plasmatiques de PTH normales ou supérieures à la normale, mais inadaptées à l’hypercalcémie. C’est donc un tableau biologique d’HPT primaire, hormis l’hypocalciurie.

Dans ses formes typiques, le rapport des clairances du calcium et de la créatinine est inférieur à 0,01, c’est-à-dire que l’excrétion fractionnelle du calcium est inférieure à 1 %.

L’hypercalcémie-hypocalciurie familiale est généralement asymptomatique. Très rarement, l’hypersécrétion discrète de la PTH a pu avoir pour conséquence une tendance à l’ostéopénie voire l’ostéoporose.

Il s’agit d’une affection héréditaire transmise sur le mode autosomique dominant. L’hypercalcémie-hypocalciurie familiale est due aux mutations inactivatrices du gène du récepteur sensible au calcium (CaSR) ou à des mutations inactivatrices des gènes GNA11 et AP2S1.

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Lithium
Le lithium entraîne une hypercalcémie chez 10 % des patients traités; celle-ci régresse à l’arrêt du traitement. L’hypercalcémie induite par le lithium est due à une action directe de celui-ci sur la cellule parathyroïdienne qui, sous l’effet du lithium, est stimulée par des concentrations plus élevées de calcium circulant. De plus, le lithium augmente la réabsorption tubulaire du calcium. Le tableau biologique des hypercalcémies induites par le lithium est donc superposable à celui des HPT primaires.

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B Hypercalcémies PTH-indépendantes ou à PTH basse
1 Hypercalcémie des affections malignes

L’hypercalcémie des affections malignes est responsable de 30 % des hypercalcémies. Elle constitue donc, après l’HPT primaire, la deuxième cause d’hypercalcémie. Elle se différencie commodément des HPT primaires par les valeurs effondrées de la PTH plasmatique (voir fig. 22.4). Une hypercalcémie est constatée dans 10 % à 30 % des cancers et représente généralement un facteur de mauvais pronostic. L’hypercalcémie est souvent sévère, cliniquement parlante et d’apparition rapide.

L’hypercalcémie survient au cours des affections malignes par deux principaux mécanismes :

*l’hypercalcémie humorale maligne est liée à la production paranéoplasique par la tumeur d’un peptide mimant presque tous les effets biologiques de la PTH, le PTHrp (PTH-related peptide) ; le PTHrp, comme la PTH, augmente la résorption osseuse ostéoclastique, qui est reflétée par l’hypercalcémie et l’augmentation de la calciurie. Les dosages immunométriques spécifiques de certains fragments du PTHrp permettent de détecter des valeurs élevées de PTHrp. Le PTHrp est surtout secrété par des cancers épidermoïdes (poumon, œsophage, peau, col utérin), mais aussi le cancer du rein, de l’endomètre, le lymphome à cellules T de l’adulte dû au rétrovirus HTLV-I. L’absence de métastases osseuses et l’hypophosphatémie chez un patient cancéreux avec hypercalcémie doivent faire évoquer une sécrétion paranéoplasique du PTHrp;
*l’hypercalcémie liée aux métastases osseuses est probablement plus fréquente que l’hypercalcémie humorale maligne. Les métastases ostéolytiques compliquent particulièrement l’évolution des cancers du sein, des bronches, du rein et de la thyroïde. Les localisations osseuses du myélome, des lymphomes et autres hémopathies malignes sont également responsables de ce type d’hypercalcémie. Les processus d’ostéolyse résultent de l’activité de facteurs stimulant l’activité ostéoclastique produits par les cellules tumorales, tels que le TGF-β, les interleukines 1 et 6. L’hypercalcémie est typiquement associée à une hyperphosphatémie et à la présence de lésions ostéolytiques sur les radiographies du squelette.

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Autres hypercalcémies avec PTH effondrée
Granulomatoses
L’hypercalcémie se rencontre dans 10 % à 20 % des sarcoïdoses évolutives.

La pathogénie de cette hypercalcémie est la production non régulée de la 1,25-(OH)2-vitamine D par le tissu granulomateux. Outre le fait que l’hypercalcémie survient dans un contexte pathologique souvent évident, le diagnostic différentiel avec l’HPT primaire repose sur l’hyperphosphorémie et sur les valeurs basses de PTH.

Hypercalcémies iatrogènes
Vitamine D et dérivés
L’apport de vitamine D ou de ses dérivés métaboliques actifs – 1-(OH)-vitamine D ou 1,25-(OH)2-vitamine D – est responsable d’hypercalcémie en cas de surdosage.

Le tableau biologique associe hypercalcémie, hyperphosphorémie, PTH basse et 1,25– (OH)2-vitamine D augmentée.

Autres causes
Les autres causes sont l’intoxication par la vitamine A, le traitement par diurétiques thiazidiques et la consommation excessive de lait/alcalins.

Vitamine A ou acide rétinoïqueDiurétiques thiazidiques
Les diurétiques thiazidiques augmentent la calcémie par diminution de l’excrétion urinaire du calcium associée à l’hémoconcentration. L’hypercalcémie est associée à une hypocalciurie. En pratique, le diagnostic repose sur l’analyse de la composition des traitements antihypertenseurs. Après l’arrêt du thiazidique, si l’hypercalcémie persiste, il est nécessaire de rechercher une autre étiologie.uveurs de lait
Les hypercalcémies des buveurs de lait et d’alcalins sont devenues rares depuis les traitements modernes des ulcères gastroduodénaux. Ce syndrome, dont la physiopathologie reste à déterminer, peut encore être observé dans de rares circonstances : automédication par de fortes doses d’antiacides, traitements par de fortes doses de carbonate de calcium.

Immobilisation prolongée
Quelle que soit sa cause, mais surtout s’il s’agit de pathologies neurologiques ou orthopédiques chez l’enfant, chez l’adolescent ou l’adulte jeune, l’immobilisation entraîne une diminution de l’ostéosynthèse qui se traduit habituellement par une augmentation de la calciurie et, plus rarement, d’une hypercalcémie. L’ensemble des anomalies biologiques régressent 6 mois environ après la reprise de l’activité.

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Hypercalcémie des endocrinopathies (hors hyperparathyroïdie)
Les trois grandes causes sont l’hyperthyroïdie, l’insuffisance surrénale aiguë et le phéochromocytome.

Hyperthyroïdie
L’hyperthyroïdie induit une accélération du renouvellement osseux. L’hypercalcémie est le fait des thyrotoxicoses sévères du sujet âgé pouvant s’accompagner d’ostéoporose. L’hypercalcémie au cours d’une thyrotoxicose s’associe à une hyperphosphorémie, une hypercalciurie, des valeurs de PTH et de calcitriol effondrées et les marqueurs du remodelage osseux élevés.

Insuffisance surrénale aiguë
L’insuffisance surrénale aiguë peut s’accompagner d’une hypercalcémie modérée due à l’hémoconcentration et à l’insuffisance rénale fonctionnelle. L’hormonothérapie substitutive normalise rapidement la calcémiePhéochromocytome.

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Examens complémentaires en présence d’une hypercalcémie

  • En première intention :
    –calcémie totale, calcémie ionisée, albuminémie pour le calcul de la calcémie corrigée (diagnostic positif d’hypercalcémie);
    –PTH, phosphatémie, calcitriol, calciurie des 24 heures (pour le diagnostic mécanistique).
    *Examen à réaliser pour évaluer le retentissement :
    –Créatininémie + calcul du DFG (retentissement rénal);
    –ECG (retentissement cardiaque).
    *Examens complémentaires à visée étiologique (en deuxième intention et à l’issue du diagnostic mécanistique) :
    –formes parathyroïdiennes : échographie parathyroïdienne et scintigraphie parathyroïdienne au MIBI-Tc;
    –formes extraparathyroïdiennes :
    –en cas d’hypercalcitriolémie : enzyme de conversion de l’angiotensine (ECA, produite par les granulomes sarcoïdosiques), vitesse de sédimentation (VS), CRP, radiographie de thorax en première intention (et en deuxième intention fibroscopie bronchique avec lavage bronchoalvéolaire, voire TEP-TDM), rechercher des infections avec granulome, lymphome, etc.;
    –en l’absence d’hypercalcitriolémie : EPP, immunofixation, dosage de vitamine A, bilan thyroïdien, CPK, scanner TAP, scintigraphie osseuse voire TEP-TDM, immunophénotypage lymphocytaire, etc. Le dosage de PTHrp est demandé uniquement en cas d’hypophosphatémie associée.
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I Traitement
La nécessité de traiter une hypercalcémie dépend de l’étiologie et du niveau de l’hypercalcémie. Dans tous les cas où une cause curable a été identifiée, et en dehors d’une hypercalcémie maligne, le traitement se résume au traitement de la maladie responsable de l’hypercalcémie. C’est tout particulièrement le cas pour l’HPT primaire, qui peut être guérie par la chirurgie. Dans les cas où le traitement de la maladie responsable ne peut pas être envisagé à moyen ou long terme, la mise en route d’un traitement médical est à visée symptomatique.

A Traitement de l’hyperparathyroïdie primaire
Seule l’ablation de la ou des lésions parathyroïdiennes responsables de l’HPT primaire peut guérir la maladie.Les imageries parathyroïdiennes sont à envisager seulement si est retenue une indication opératoire. Elles ont pour intérêt de repérer la (ou les) parathyroïde(s) hyperfonctionnelle(s) responsable(s) de l’HPT primaire pour permettre d’envisager une intervention localisée à l’occasion d’une courte cervicotomie. La négativité de l’enquête morphologique ne remet pas en cause l’opportunité de l’intervention chirurgicale si celle-ci est fondée. À l’inverse, une imagerie positive ne doit pas influencer un diagnostic litigieux sur le plan biologique.

Les plus couramment utilisées et les plus performantes sont l’échographie et la scintigraphie au Sestamibi. Des exemples d’échographie et de scintigraphie parathyroïdienne sont fournis dans la figure 22.6. La scintigraphie parathyroïdienne permet aussi d’identifier les adénomes parathyroïdiens ectopiques dans le médiastin (dans le thymus par exemple; voir fig. 22.6).

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Traitement médical de l’hypercalcémie
1 Bisphosphonates

Les bisphosphonates sont hypocalcémiants parce qu’ils sont de puissants inhibiteurs de la résorption osseuse. Ils ont considérablement simplifié l’approche thérapeutique de l’hypercalcémie non accessible à un traitement étiologique (essentiellement les hypercalcémies paranéoplasiques).

2 Calcimimétiques
Ces molécules agissent comme modulateurs allostériques du récepteur sensible au calcium CaSR (présent aussi au niveau des cellules parathyroïdiennes adénomateuses ou néoplasiques; voir fig. 22.1) et freinent la sécrétion de la parathormone. Ce traitement (cinacalcet, Mimpara®) est actuellement utilisé pour les hypercalcémies des rares carcinomes parathyroïdiens, des HPT primaires non accessibles à un traitement chirurgical et dans les HPT secondaires de l’insuffisance rénale chronique. Mais il doit encore être évalué sur de grandes séries d’HPT primaire par adénomes parathyroïdiens avant de constituer une alternative à la chirurgie, chez le sujet âgé et asymptomatique, s’il démontre son efficacité à long terme.

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Traitement d’une hypercalcémie maligne
Une hypercalcémie supérieure à 3,7 mmol/l [150 mg/l] constitue une urgence médicale du fait du risque de coma, de collapsus ou d’arrêt cardiaque.

Le traitement repose sur une réhydratation idéalement par voie orale si l’état du patient l’autorise (5 à 6 litres de boissons) ou par voie intraveineuse : 200 à 500 ml/h de sérum physiologique (soluté salé isotonique 9 ‰), en fonction de l’état cardiovasculaire.

La diurèse forcée par du furosémide n’est plus recommandée.

L’administration en perfusion lente de bisphosphonate (4 mg de zolendronate si la fonction rénale est normale, ou 60 ou 90 mg de pamidronate en cas d’insuffisance rénale) permet de corriger la calcémie dans 80 % des cas, mais la durée de son effet varie de quelques jours à quelques semaines.

Une corticothérapie par voie IV est efficace dans les hypercalcémies des myélomes, des hémopathies et dans la sarcoïdose.

Enfin, une dialyse (avec bain pauvre en calcium) permet en urgence d’abaisser rapidement une hypercalcémie maligne et d’attendre le relais par les autres traitements.

Les traitements inducteurs (calcium et vitamine D, thiazidiques, lithium, digitaliques) sont arrêtés.

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Points clés

*Affirmer une hypercalcémie est facile en répétant le simple dosage de la calcémie totale.
*L’interprétation de la calcémie doit tenir compte de la fonction rénale, de la protidémie et de l’acidose.
*Les étiologies des hypercalcémies sont multiples, mais la plus fréquente est l’hyperparathyroïdie (HPT) primaire.
*Le diagnostic étiologique peut être orienté par le contexte clinique et la biologie (tumeurs malignes).
*L’analyse des résultats de la calcémie et de la PTH1-84 doit permettre de faire le diagnostic de l’HPT primaire ou d’orienter vers d’autres causes.
*L’HPT primaire chez le sujet jeune ou avec une présentation syndromique ou dans un contexte familial doit déclencher une enquête génétique.
*Une hypercalcémie supérieure à 3,7 mmol/l (150 mg/l) constitue une urgence médicale; son traitement repose dans un premier temps sur une réhydratation.

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Hypocalcémie
Le diagnostic d’hypocalcémie repose sur le dosage de la calcémie totale associé à celui de la protidémie ou de l’albuminémie, en particulier en cas d’altération de l’état général. En effet, une hypoprotidémie entraîne une fausse hypocalcémie, car le calcium circule lié à l’albumine dans le sang.

L’hypocalcémie est habituellement définie par un seuil < 2,20 mmol/l (88 mg/l). Ce seuil peut toutefois varier en fonction de la limite inférieure de la calcémie pour les normes du laboratoire.

Chez l’adulte, la calcémie est déterminée par un état d’équilibre entre l’absorption intestinale, la résorption osseuse et l’excrétion rénale; pendant l’enfance, s’y ajoute l’accrétion osseuse liée à la croissance. Les flux de calcium sont finement régulés par deux hormones calciotropes : la PTH et le calcitriol

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Diagnostic clinique
Les manifestations cliniques d’hypocalcémie sont variables, et dépendent de son intensité et de sa rapidité d’installation. Pour une même valeur de calcémie, l’hypocalcémie aiguë sera moins bien tolérée et s’accompagnera d’un tableau clinique plus « bruyant » que l’hypocalcémie d’installation progressive.

L’hypocalcémie sévère (calcémie totale < 1,8 mmol/l [70 mg/l]) ou soudaine entraîne une hyperexcitabilité neuromusculaire et myocardique pouvant engager le pronostic vital (tableau 21.1).

Tableau 21.1

Signes cliniques d’hypocalcémie.

Signes d’hyperexcitabilité neuromusculaire Crises tétaniques :
–Annoncées par paresthésies + malaise général
–Puis contractures des extrémités :
*« main d’accoucheur »
*bouche en « museau de carpe » ou « de tanche »
*spasme carpopédal : hyperextension des jambes et des pieds, parfois du dos (opisthotonos)
–Résolution spontanée ou en quelques minutes ; spectaculairement hâtée par le calcium IV Signes généraux :
–parfois laryngospasme, bronchospasme, spasme phrénique : risque d’arrêt cardiorespiratoire
–Fréquents : asthénie, douleurs, crampes, fatigabilité à l’effort
–Troubles de l’attention ou anxiodépressifs
–Comitialité (enfants)
Signes de tétanie latente :
–Signe de Chvostek
–Hyperréflectivité ostéotendineuse
–Signe de Trousseau (fig. 21.1A)
Troubles trophiques (hypocalcémie chronique)
–Peau sèche et squameuse
–Ongles striés et cassants
–Cheveux secs et fragiles
–Altérations de l’émail dentaire, caries
–Cataracte de type endocrinien (sous-capsulaire)
–Syndrome de Fahr : calcification des noyaux gris centraux, exposant aux syndromes extrapyramidaux (fig. 21.1B)
Signes ECG
–Allongement du QT (> 440 ms chez l’homme, > 460 ms chez la femme) (fig. 21.1C)
–Troubles de l’excitabilité ou de la conduction cardiaque (tachycardies ventriculaires)
–Insuffisance cardiaque
(Source : CEEDMM, 2021.)

Ces manifestations sont spontanées ou déclenchées par l’effort physique, car l’hyperventilation (parfois également d’origine psychogène) entraîne une alcalose métabolique et une baisse de la calcémie.

Deux manœuvres peuvent révéler une tétanie latente :

*le signe de Trousseau : ce signe est induit pas une ischémie locale sous l’effet de la compression du bras par un brassard huméral gonflé à 20 mmHg au-dessus de la pression artérielle systolique pendant 2 minutes; l’hypocalcémie est responsable d’une contracture de la main, les trois premiers doigts en extension et le pouce en opposition réalisant « la main d’accoucheur » (fig. 21.1A);le signe de Chvostek correspond à une contraction de la commissure des lèvres provoquée par une percussion de la joue à mi-distance entre l’oreille et la commissure; ce signe est peu spécifique.
Dans l’enfance, les manifestations cliniques d’hypocalcémie sont souvent musculaires (trémulations et mouvements anormaux chez les nouveau-nés, crampes chez l’enfant), neurologiques (convulsions, lenteur, diminution des performances scolaires, calcifications des noyaux gris centraux) et cardiaques.

II Examens complémentaires à réaliser devan

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Examens complémentaires à réaliser devant une hypocalcémie
Une suspicion clinique d’hypocalcémie doit être confirmée par des examens :

*biologiques de routine, pour affirmer le diagnostic;
*hormono-biologiques, pour orienter le diagnostic étiologique;
*paracliniques, pour évaluer le retentissement.
Dosages biologiques de routine

*Calcémie (hypocalcémie).
*Phosphatémie (hyperphosphatémie).
*Créatininémie.
* Calciurie (hypocalciurie < 100 mg/24 heures).
*Taux de réabsorption du phosphore (accru) calculé selon la formule : TRP = 100 × (1– [phosphaturie × créatininémie/phosphatémie × créatininurie])
Créatinine en mg/dl et phosphate en mmol/l

Dosages hormonaux biologiques

  • Parathormone (PTH) basse ou non accrue – et donc inadaptée dans les hypocalcémies par hypoparathyroïdie.
    *25-hydroxycholécalciférol (25-[OH]-vitamine D3) – sa carence stimule la production de PTH.
    Bilan de retentissement
    Neuromusculaire
  • ECG : allongement de l’espace QT, troubles de l’excitabilité ou de la conduction cardiaque (tachycardies ventriculaires) +++.
    *EMG : doublets, triplets, parfois révélés par la pose d’un garrot _ examen non indispensable.
    *EEG : signes irritatifs _ examen non indispensable.
    Osseux

*Baisse des marqueurs du remodelage osseux.
*DMO (absorptiométrie biphotonique) : augmentation de la densité osseuse.

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Causes de l’hypocalcémie
La découverte d’une hypocalcémie doit déclencher une enquête étiologique (fig. 21.2). Les principales causes d’hypocalcémie sont présentées dans le tableau 21.2.

Tableau 21.2

Principales causes d’hypocalcémie (liste non exhaustive).

Hypoparathyroïdies
–Post-chirurgicales (+++)
–Auto-immune (anticorps anti-CaSR)
–Congénitales :
*syndrome de DiGeorge
*APECED
*autres causes génétiques plus rares
–Hypomagnésémie sévère
Exceptionnellement :
–post-irradiation
–infiltrative (maladie de Wilson, hémochromatose secondaire, métastases)
Pseudo-hypoparathyroïdies (résistance à la PTH) : hypocalcémie et PTH accrue
Anomalie de la vitamine D
–Carence
–Malabsorption
–Insuffisance rénale chronique (défaut d’activation de la 25(OH)vitamine D par la 1α-hydroxylase rénale déficitaire)
–Insuffisance hépatocellulaire (défaut d’activation de la vitamine D par la 25α-hydroxylase hépatique)
–Déficit héréditaire de 1α-hydroxylase ou mutation du récepteur de la vitamine D (rachitisme pseudo-carentiel)
Autres causes
–latrogènes :
*anticonvulsivants (interférence avec la 25α-hydroxylase hépatique)
*bisphosphonates, dénosumab (anti-RANKL)
–Transfusion massive (citrate)
–Métastases ostéoblastiques
–Hungry bone syndrome : hypocalcémie avec hypocalciurie après cure chirurgicale d’une hyperparathyroïdie
–Pancréatite aiguë
–Choc septique

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Hypoparathyroïdie
Le diagnostic d’hypoparathyroïdie repose sur l’association d’une hypocalcémie avec PTH basse (ou normale dans les formes compensées) et d’une phosphatémie normale ou haute. La cause la plus fréquente est l’hypoparathyroïdie post-chirurgicale, consécutive à une parathyroïdectomie ou à une chirurgie thyroïdienne (thyroïdectomie totale pour maladie de Basedow ou cancer thyroïdien).

Parfois, l’hypoparathyroïdie post-chirurgicale n’est que transitoire, durant quelques semaines voire quelques mois suivant la chirurgie, car le fragment du tissu parathyroïdien laissé en place peut reprendre progressivement sa fonction sécrétoire.

Parmi les nombreuses causes génétiques, la plus fréquente est le syndrome de DiGeorge (délétion de la région 22q11), ainsi que le syndrome APECED ou polyendocrinopathie auto-immune de type 1 (onychomycose, hypoparathyroïdie, insuffisance surrénale ± autres pathologies auto-immunes), maladie autosomique récessive par mutation du gène AIRE.

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Pseudo-hypoparathyroïdie
Il s’agit de maladies génétiques, caractérisées par une résistance des organes cibles à l’action de la PTH. En conséquence, l’hypocalcémie s’accompagne d’une PTH élevée. Cette résistance est liée à différents mécanismes, dont des mutations du gène GNAS, responsables de l’ostéodystrophie héréditaire d’Albright. Ce phénotype est caractérisé par une brachymétacarpie, brachymétatarsie, surtout au niveau des 4e et 5e métacarpiens ou métatarsiens, un retard statural, une obésité, des ossifications ectopiques cutanées et des anomalies cognitives.

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Déficit en vitamine D
Une hypocalcémie peut être due à un déficit en vitamine D ou à une diminution de la synthèse de son métabolite actif, la 1,25-(OH)2-vitamine D. La vitamine D est fournie par l’alimentation, mais surtout par la synthèse cutanée sous l’effet des UV. Pour être active, la vitamine D nécessite une hydroxylation en 25 au niveau hépatique, puis en 1 au niveau rénal.

La carence en vitamine D est plus fréquente dans les régions à ensoleillement faible, en cas de peau foncée, de port de vêtements couvrants, de faible activité extérieure.

La carence en vitamine D reste la première cause d’hypocalcémie chez le nourrisson. Elle peut être responsable d’un rachitisme carentiel (défaut de minéralisation du squelette).

Chez l’adulte, le déficit en vitamine D est très fréquent, particulièrement chez le sujet âgé, mais ne conduit pas, la plupart de temps, à une hypocalcémie. En effet, la baisse de la concentration de la vitamine D s’accompagnera d’une élévation compensatoire de la PTH (hyperparathyroïdie secondaire) qui a pour but de maintenir une calcémie normale, notamment par mobilisation du calcium du compartiment osseux. C’est en cas de déficit prolongé et profond qu’apparaît une hypocalcémie, associée à une ostéomalacie.

Mis à part la carence d’apport alimentaire, le déficit en vitamine D peut être dû :

*à une malabsorption digestive, qui aggravera le déficit d’absorption du calcium;
*à une insuffisance rénale chronique;
*à une cirrhose.

A
283
Q

Traitement de l’hypocalcémie
A Hypocalcémie aiguë symptomatique

Le traitement de l’hypocalcémie symptomatique est une urgence, dont le traitement est résumé dans l’encadré.

Traitement d’urgence de l’hypocalcémie symptomatique

*Administration de calcium :
–par voie intraveineuse sur une voie périphérique;
–injection lente de 100 à 200 mg de Ca-élément en 5 à 10 minutes, soit 1 à 2 ampoules de 10 ml de gluconate de calcium à 10 %);
–puis perfusion de 0,5 à 2 mg/kg par heure de Ca-élément, soit environ 6 ampoules dans 500 ml de G5 % à passer à la vitesse de 50 ml par heure (ou environ 6 ampoules sur 12 heures);
–sous surveillance clinique, biologique et ECG.
*Supplémentation en magnésium en cas d’hypomagnésémie.
*Suspension de tout traitement prolongeant le QT (digitaliques, etc.)
*Il existe un risque de veinite et il ne faut pas administrer conjointement de bicarbonates ou de phosphates en raison du risque de formation des sels insolubles.

A

Hypocalcémie chronique
Le traitement de l’hypocalcémie chronique consiste en l’apport de vitamine D et de calcium per os.

284
Q

Points clés

*Le diagnostic de l’hypocalcémie nécessite un dosage de calcémie, de PTH et de vitamine D (25-(OH)-vitamine D3) et de créatinine.
*Les causes les plus fréquentes d’hypocalcémie sont la carence en vitamine D et l’hypoparathyroïdie, souvent post-chirurgicale.
*La chirurgie cervicale doit toujours être adressée à un chirurgien expert pour limiter le risque d’hypoparathyroïdie secondaire.
*Le traitement de l’hypocalcémie aiguë est une urgence médicale.

A
285
Q

Hyperkaliémie, hypokaliémie : causes endocriniennes
Les dyskaliémies

Le potassium est le cation le plus abondant de l’organisme et le principal cation cellulaire. La kaliémie normale se situe entre 3,5 et 4,5 mmol/l sous réserve d’un dosage fait dans de bonnes conditions. Toutefois, une kaliémie < 3,8 mmol/l peut déjà être considérée comme une hypokaliémie. Les dyskaliémies (essentiellement < 3 mmol/l ou > 5,5 mmol/l) peuvent avoir des conséquences vitales du fait de leur retentissement cardiaque, en particulier si elles sont d’installation rapide.

Le diagnostic étiologique des dyskaliémies permet de mettre en place un traitement adapté. Les causes endocriniennes ou mises en jeu dans des pathologies endocriniennes sont en italique dans les tableaux et commentées dans le texte.

A
286
Q

Hyperkaliémie
L’étiologie endocrinienne des hyperkaliémies est indiquée dans le tableau 21.3.

Tableau 21.3

Principales causes d’hyperkaliémie.

Augmentation de la sortie cellulaire du potassium
–Acidose
–Insulinopénie
–Catabolisme cellulaire
–latrogènes (surdosage digitalique, transfusion, etc.)
–Hypothermie
–Paralysie périodique hyperkaliémique (maladie de Gamstorp)
–Pseudohyperkaliémie (hyperkaliémie in vitro à basse température liée à une anomalie génétique du transporteur potassique de la membrane du globule rouge)
Diminution de l’excrétion urinaire
–lnsuffisance rénale
–Hypoaldostéronisme
–Défaut d’action de l’aldostérone = pseudo-aldostéronismes (résistance à l’aldostérone)
–Hypovolémie efficace
–Urétérojéjunostomie
Les causes endocriniennes ou mises en jeu dans des pathologies endocriniennes sont en italique et commentées dans ce chapitre.

A
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Q

Acidose et insulinopénie
Ces deux mécanismes sont mis en jeu dans la cétoacidose diabétique (voir Item 247, chapitre 18).

L’acidose tend à faire sortir le potassium de la cellule et l’insulinopénie en réduit l’entrée. Dans un premier temps, la sortie du potassium des cellules est accrue en raison de l’acidose et de l’insulinopénie. La phase hyperkaliémique est suivie d’une normokaliémie, car la diurèse osmotique due à l’hyperglycémie entraîne une augmentation de l’excrétion rénale du potassium. Le traitement par insuline permet au potassium de rentrer dans les cellules au prix d’un risque d’hypokaliémie.

Il est impératif d’apporter du potassium lors de l’instauration de l’insulinothérapie dans une cétoacidose diabétique dès que la kaliémie est normalisée, pour éviter le risque d’hypokaliémie et de torsades de pointe, lié au fait que l’insuline fait rentrer le potassium dans la cellule, démasquant la déplétion potassique souvent profonde qui s’est installée à la phase initiale de la cétoacidose.

A
288
Q

Hypoaldostéronisme
1 Insuffisance surrénale périphérique (comprenant hypocorticisme et hypoaldostéronisme)

Voir Item 245, chapitre 16.

2 Hypoaldostéronisme secondaire ou hyporéninisme-hypoaldostéronisme
Le tableau est celui d’une hyperkaliémie chronique isolée. On l’observe chez les sujets âgés (plus de 65 ans), parfois dans les suites d’exérèse d’adénomes de Conn, et chez les diabétiques. Il est la manifestation d’une neuropathie autonome avec diminution de la sécrétion de rénine stimulée physiologiquement par le système sympathique innervant le rein.

Parfois, en cas d’IRC, c’est le caractère disproportionné de l’hyperkaliémie face à une insuffisance rénale légère ou modérée qui va faire évoquer le diagnostic.

Des causes iatrogènes (anti-inflammatoires non stéroïdiens [AINS], triméthoprime, bétabloquant, ciclosporine, lithotripsie) peuvent générer un hyporéninisme-hypoaldostéronisme, tandis que les anticortisoliques de synthèse, antifongiques imidazolés (kétoconazole, etc.), les inhibiteurs de l’enzyme de conversion, les antagoniste du récepteur de l’angiotensine II, l’héparine (non fractionnée et de bas poids moléculaire) peuvent entraîner des hyperréninismes-hypo-aldostéronismes.

C Pseudo-hypoaldostéronisme
Il s’agit d’une résistance à l’aldostérone génétique (mutation inactivatrice du récepteur de l’aldostérone ou de sa voie de signalisation) ou acquise entraînant une acidose tubulaire de type 4 associée à une fuite sodée digestive (colectomie totale + iléostomie, etc.) ou urinaire (iatrogène ou infectieuse, etc.).

A
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Q

Hypokaliémie
L’étiologie endocrinienne des hypokaliémies (fig. 21.3) est indiquée dans le tableau 21.4.

Tableau 21.4

Principales causes d’hypokaliémies.

Diminution des apports
–Dénutrition sévère, anorexie
Augmentation de l’entrée intracellulaire
–Insulinothérapie
– Augmentation de l’activité β-adrénergique
–Alcalose
–Paralysie périodique familiale (maladie de Westphal)
–latrogènes : chloroquine
Pertes digestives
–Vomissements, diarrhées
–Abus de laxatifs
Pertes urinaires
–Diurétiques
–Hyperaldostéronisme
– Hypercortisolisme
– Polyuries
– Hypomagnésémie
–Tubulopathies de Bartter, de Gitelman
–latrogènes (corticoïdes, amphotéricine B)
–Bloc de la 11β-hydroxystéroïde déshydrogénase (glycyrrhizine de la réglisse)
Pertes cutanées
–Sudations profuses, etc.
Les causes endocriniennes ou mises en jeu dans des pathologies endocriniennes sont en italique et commentées dans ce chapitre. (Source : CEEDMM, 2021.)

A
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Dénutrition sévère
(Voir Item 250 – Dénutrition chez l’adulte et l’enfant.)

L’hypokaliémie de l’anorexique est bien connue, chronique et, de ce fait, bien supportée; mais elle ne doit pas être négligée dans le traitement de ces patients. Elle est susceptible de s’aggraver dramatiquement si elle n’est pas prévenue lors de la renutrition.

Une dénutrition sévère est parfois observée chez les patients obèses opérés d’une chirurgie bariatrique et qui ne sont pas suivis. Un suivi nutritionnel est indispensable chez ces patients.

B Insulinothérapie et troubles digestifs
Lors de la cétoacidose (voir Item 247, chapitre 18), si les troubles digestifs, surtout à type de vomissements, sont majeurs, le patient peut être en hypokaliémie au diagnostic. Cette hypokaliémie est donc extrêmement sévère puisqu’en partie masquée par l’acidose. L’insuline facilite l’entrée couplée du glucose et du potassium dans de nombreuses cellules.

Pour que la kaliémie reflète le pool potassique, enlever 1 mmol/l par 0,1 point de pH en dessous de 7,4.

En pratique

*Au cours d’une cétoacidose diabétique, on attend une hyperkaliémie. Les apports potassiques ne sont pas nécessaires avant la 6e heure de perfusion de glucose et d’insuline si cette hyperkaliémie est présente à l’entrée, témoignant d’une faible déplétion potassique.
*Si la kaliémie est normale en acidose, le déficit potassique est déjà présent et il faut apporter du potassium dès la 2e ou 3e heure de perfusion de glucose et d’insuline.
*Si la kaliémie est basse en acidose, l’administration de potassium précédera celle de l’insulinothérapie, comme indiqué ci-dessous.

Les recommandations actuelles des sociétés savantes sont de ne jamais commencer l’insulinothérapie sans avoir obtenu le résultat de la kaliémie – que l’on a très rapidement sur les gaz du sang – et de ne commencer l’insulinothérapie qu’une fois l’hypokaliémie corrigée – on ne met alors en place que l’hydratation sans insuline et une seringue électrique de potassium. Le risque en insulinant trop précocement est le trouble du rythme avec arrêt cardiocirculatoire. Dans cette situation, il ne faut jamais prescrire de bicarbonate de sodium qui, en alcalinisant, aggrave l’hypokaliémie.

A
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Q

Hyperaldostéronisme et hypercortisolisme
L’aldostérone a un rôle majeur dans la régulation de l’excrétion rénale du potassium. Environ 700 mmol de potassium sont filtrés par le glomérule. La réabsorption s’effectue pour 60 % dans le tube contourné proximal et 20 % à 30 % dans l’anse de Henlé. L’adaptation ultime des sorties se fait sur les 10 % du potassium qui atteignent le tube contourné distal. L’aldostérone est active à la partie terminale du tube distal et au tube collecteur cortical.

L’excès de cortisol qui caractérise les syndromes de Cushing (voir Item 224, chapitre 10) conduit à un dépassement du catabolisme intrarénal du cortisol en cortisone inactive par la 11β-hydroxystéroïde déshydrogénase. Le cortisol en excès se fixe sur les récepteurs de l’aldostérone, d’où l’effet « aldostérone-like ».

Hyperaldostéronisme et hypercortisolisme doivent être évoqués devant une hypertension avec hypokaliémie et kaliurèse augmentée (> 20 mmol/24 heures).

La quantité de potassium sécrétée dépend de la quantité de sodium disponible dans le tube distal, pour l’échange Na+/K+ et/ou H+. La kaliurèse diminue lors d’un régime restrictif en sel : les dosages ioniques et hormonaux doivent donc être réalisés en régime normosodé (natriurèse > 100 mmol par 24 heures).

L’hypokaliémie elle-même inhibe partiellement la synthèse d’aldostérone : les dosages de rénine-aldostérone doivent donc être réalisés en normokaliémie obtenue par substitution potassique.

Les médicaments interférant avec le SRAA doivent être arrêtés pour effectuer les dosages de rénine et d’aldostérone.

L’hypertension n’est pas constante et son absence ne doit pas faire éliminer ces diagnostics, notamment celui d’hyperaldostéronisme primaire.

A
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Q

Polyuries
(Voir Item 244, chapitre 15, et Item 247, chapitre 18.)

La kaliurèse augmente en cas de forte diurèse, surtout les diurèses osmotiques : une hyperglycémie élevée, dépassant le Tm de réabsorption, entraîne une polyurie accompagnée d’une perte ionique dont le potassium.

On observe parfois des hypokaliémies dans les polyuries majeures non osmotiques des diabètes insipides, surtout néphrogéniques.

E Hypomagnésémies
L’hypomagnésémie d’origine digestive malabsorptive ou urinaire (acquises ou secondaires à des tubulopathies de Bartter ou de Gitelman) est à l’origine d’une fuite rénale de potassium parfois associée à une hypocalcémie par hypoparathyroïdie fonctionnelle.

F Blocage de la 11β-hydroxystéroïde déshydrogénase
Cette enzyme transforme le cortisol actif en cortisone inactive sur les récepteurs minéralocorticoïdes. Son blocage entraîne le même tableau qu’un hyperaldostéronisme primaire, mais avec une aldostérone basse, d’où le nom d’« excès apparent de minéralocorticoïdes ».

Devant une HTA avec hypokaliémie, le patient doit être systématiquement interrogé sur la prise de réglisse ou de pastis sans alcool contenant de la glycyrrhizine, principe actif inhibiteur de l’enzyme.

En cas de survenue dans l’enfance, un bloc génétique doit être suspecté.

A

Points clés

*La principale cause endocrine d’hyperkaliémie est l’insuffisance surrénale primitive.
*La principale cause endocrine d’hypokaliémie est l’hyperaldostéronisme primaire (syndrome de Conn), suivi des syndromes de Cushing sévères.

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Hyponatrémies d’origine endocrinienne, syndrome d’antidiurèse (SIAD)

I Définition
L’hyponatrémie, définie par une natrémie inférieure à 135 mmol/l, correspond à l’anomalie électrolytique la plus commune chez les patients hospitalisés (15 % à 20 %), dont elle augmente la morbimortalité. Le diagnostic d’une hyponatrémie nécessite le dosage ou le calcul de l’osmolalité plasmatique (ou à défaut la mesure de la glycémie et des triglycérides), d’une part, et l’évaluation clinique de la volémie, d’autre part (fig. 21.4).

A
294
Q

L’osmolalité plasmatique peut être mesurée en mOsm/kg H2O, ou, à défaut, estimée par le calcul de l’osmolarité (en mOsm/litre) selon la formule suivante :

Osmolarité calculée = 2 × (natrémie + kaliémie) + glycémie + urée (toutes les valeurs étant exprimées en mmol/l).

Une dissociation entre la natrémie et l’osmolarité signifie en pratique qu’il existe une hyperglycémie (hyponatrémie hyperosmolaire), facile à mesurer sur un prélèvement capillaire, ou une hypertriglycéridémie (hyponatrémie normo-osmolaire), facile à évaluer – si le dosage n’est pas disponible en urgence – en laissant un tube de 5 ml de sang à décanter à température ambiante : si le sérum est trouble après formation du caillot, cette lactescence est l’indice d’une hypertriglycéridémie significative (> 5 g/l).

Les hyponatrémies « vraies » sont des hyponatrémies hypo-osmolaires.

Ces hyponatrémies hypo-osmolaires sont elles-mêmes classées selon la volémie en trois groupes :

*hyponatrémies hypovolémiques (avec pli cutané, correspondant à une déshydratation, parfois encore appelées hyponatrémies de déplétion);
*hyponatrémies hypervolémiques (avec œdèmes, encore appelées hyponatrémie par hypovolémie efficace);
*hyponatrémies normovolémiques, correspondant au syndrome de sécrétion inappropriée d’hormone antidiurétique (SIAD), ou syndrome de Schwartz-Bartter, ou plus récemment syndrome d’antidiurèse inappropriée.

Le SIADH correspond donc à une hyponatrémie hypo-osmolaire normovolémique.

A
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Q

I Physiopathologie de l’hormone antidiurétique, ou vasopressine
L’hormone antidiurétique (antidiuretic hormone [ADH]), aussi appelée vasopressine, est un peptide de neuf acides aminés synthétisé dans les noyaux supra-optique et paraventriculaire hypothalamiques. Elle migre dans des granules le long des axones neuronaux à travers la tige hypophysaire jusqu’à la post-hypophyse où elle est sécrétée en fonction de stimuli principalement osmotiques et volémiques (hypotension, etc.), mais aussi non osmotiques, tels que les nausées, la douleur, le stress, l’hypoglycémie, l’hypoxie.es deux dénominations de l’ADH (hormone antidiurétique et vasopressine) rappellent les deux principales actions de l’hormone : retenir l’eau en diminuant la diurèse et contracter les fibres musculaires lisses des vaisseaux, afin de maintenir une volémie efficace. La vasopressine est une hormone difficile à doser et le SIAD est plus souvent dénommé aujourd’hui syndrome d’antidiurèse, traduisant une rétention d’eau libre, qu’il existe ou non une ascension de la vasopressine. En effet, certains syndromes d’antidiurèse sont liés à une hypersensibilité à la vasopressine du fait de variants de son récepteur.

A
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Diagnostic positif du SIAD (ou syndrome d’antidiurèse)
A Diagnostic clinique

Le syndrome d’antidiurèse (SIAD) s’accompagne d’une pression artérielle et d’une fréquence cardiaque normales. Il n’y a pas de pli cutané et pas d’œdème. Les manifestations cliniques du SIAD, insidieuses et peu spécifiques, sont les suivantes.

Natrémie > 125 mmol/l

*Asymptomatique.
*Ou : anorexie, nausées, vomissements et/ou troubles de l’attention et de la marche.
120 mmol/l < natrémie < 125 mmol/l

*Confusion, crampes, céphalées, troubles de l’équilibre et troubles cognitifs.
*Le risque de chute et de fracture est accru en raison d’une ostéoporose et d’une rhabdomyolyse (augmentation des CPK) favorisées par l’hyponatrémie chronique.
115 mmol/l < natrémie < 120 mmol/l

*Stupeur, troubles psychiatriques.
Natrémie < 115 mmol/l

*Convulsions, coma.
Une hyponatrémie est d’autant plus symptomatique qu’elle est profonde, mais surtout d’installation rapide.

A
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Q

Diagnostic biologique
Le SIAD, ou hyponatrémie hypo-osmolaire normovolémique, associe principalement :

*une hyponatrémie < 135 mmol/l et une osmolalité plasmatique basse < 275 mOsm/kg H2O;
*l’absence de pli cutané ou d’œdème;
*une natriurèse conservée > 30 mmol/l en régime normosodé;
*l’absence d’insuffisance rénale, surrénale, thyroïdienne et d’utilisation récente de diurétiques.
En pratique

Il faut retenir qu’un SIAD correspond à une hyponatrémie hypo-osmolaire avec urée basse sans pli cutané ni œdème avec cortisol de 8 heures, T4L et TSH normales.

Il faut toujours écarter une insuffisance surrénale d’origine centrale (hypopituitarisme, insuffisance corticotrope post-corticothérapie) ou périphérique (insuffisance surrénale) devant une hyponatrémie.

A
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Q

Diagnostic différentiel d’une hyponatrémie
Les différents éléments du diagnostic d’une hyponatrémie sont synthétisés dans la figure 21.4 et reposent sur la détermination de l’osmolalité plasmatique et de la volémie.

A Hyponatrémies normo-osmolaire et hyperosmolaire
Une hyponatrémie normo-osmolaire correspond en général à une hypertriglycéridémie, encore dénommée pseudo-hyponatrémie, tandis qu’une hyponatrémie hyperosmolaire s’associe le plus souvent à une hyperglycémie majeure.

B Hyponatrémie hypo-osmolaire hypovolémique
Quand l’osmolalité urinaire est élevée et qu’il existe une hypovolémie, il s’agit d’une perte de sel avec déshydratation extracellulaire marquée par un pli cutané. La perte de sel est d’origine :

*digestive (diarrhées, vomissements, pancréatite, aspirations, etc.);
*rénale (diurétiques, insuffisance surrénale aiguë, néphropathie interstitielle);
*l’insuffisance surrénale aiguë associe une perte de sel d’origine rénale par déficit en minéralocorticoïdes entraînant une déshydratation extracellulaire et une hyperhydratation intracellulaire par hypervasopressinisme;
*plus rarement cérébrale (hémorragies sous-arachnoïdiennes) ou cutanée (sudations profuses, brûlures, causes génétiques).
Le traitement repose sur une perfusion intraveineuse de sérum salé isotonique.

C Hyponatrémie hypo-osmolaire hypervolémique
Une hyponatrémie hypo-osmolaire avec volémie augmentée se rencontre dans les situations d’œdèmes, qu’ils soient liés à une cirrhose décompensée, un syndrome néphrotique ou une insuffisance cardiaque. La volémie efficace est alors diminuée, expliquant la sécrétion d’ADH adaptée à la volémie réelle, même si elle est inappropriée à l’osmolalité plasmatique.

D Hyponatrémie hypo-osmolaire normovolémique
Le SIAD correspond à une hyponatrémie hypo-osmolaire normovolémique et doit d’abord faire écarter une insuffisance corticotrope et une hypothyroïdie :

  • l’insuffisance corticotrope est diagnostiquée par une mesure de la cortisolémie et de l’ACTH à 8 heures ou en urgence. En insuffisance corticotrope, l’hyponatrémie est liée à une sécrétion accrue d’ADH favorisée par la tendance hypoglycémique et l’hypotension artérielle, associée à la levée du frein physiologiquement exercé par le cortisol sur la sécrétion d’ADH et à une diminution de la filtration glomérulaire;
    *l’hypothyroïdie protothyroïdienne ne s’accompagne d’hyponatrémie que dans les formes sévères, en général caractérisées par un myxœdème. Le diagnostic repose sur le dosage de la TSH, qui est franchement accrue. L’hyponatrémie est liée à une diminution de la filtration glomérulaire et une tendance hypovolémique entraînant une ascension de l’ADH;
    *l’hypopituitarisme antérieur, qui associe insuffisance corticotrope et insuffisance thyréotrope, peut se révéler par une hyponatrémie, raison pour laquelle il faut doser non seulement la cortisolémie et la TSH, mais également la T4L. Ces hypopituitarismes révélés par une hyponatrémie sont parfois découverts dans un bilan de chute du sujet âgé.Le traitement de ces différentes causes d’hyponatrémies liées à des déficits hormonaux repose sur l’hormonothérapie substitutive.
A
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Diagnostic étiologique d’un SIAD
L’insuffisance en glucocorticoïdes et/ou hormones thyroïdiennes écartée, les quatre causes de SIAD les plus classiques sont les causes pneumologiques, neurologiques, tumorales et médicamenteuses (tableau 21.5).

Tableau 21.5

Causes des syndromes de sécrétion inappropriée d’hormone antidiurétique (SIAD).

Toujours éliminer une insuffisance surrénale primitive ou hypophysaire (+++)
Affections pulmonaires Toutes, en particulier Pneumopathie
Tumeurs Surtout cancer bronchique à petites cellules
Affections cérébrales Toutes
Médicaments
–Surdosage en desmopressine, ocytocine
–Surtout psychotropes
Divers
–Douleur
–Nausées
–Hypoglycémie
–Hypotension
–Effort musculaire intense
–Causes génétiques

A
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Q

Causes iatrogènes
Les causes iatrogènes doivent toujours être évoquées compte tenu de leur fréquence et de la simplicité de leur traitement. Les médicaments le plus souvent en cause sont les neuroleptiques, les antidépresseurs, notamment les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine, les chimiothérapies, certains anticonvulsivants (carbamazépine, lacosamide, etc.) et, bien sûr, l’administration de desmopressine (analogue synthétique de la vasopressine) ou de ses analogues. Les diurétiques engendrent initialement une hyponatrémie hypovolémique qui va secondairement induire un hypervasopressinisme compensateur, en particulier lorsque les diurétiques sont associés aux bloqueurs du système rénine-angiotensine-aldostérone. Ces derniers interdisent en effet le développement d’un hyperaldostéronisme compensateur.

B Causes neurologiques
Pratiquement toutes les affections neurologiques sont susceptibles, en altérant les osmorécepteurs, d’induire un SIAD.

C Affections pulmonaires
De même, les affections pulmonaires sont capables de stimuler la sécrétion de vasopressine ou d’entraîner une levée du tonus inhibiteur exercé par le nerf vague.

D Tumeurs malignes
Parmi les tumeurs malignes, le cancer bronchique à petites cellules est la cause la plus fréquente. Le SIAD peut précéder la découverte du néoplasme.

E Cas particulier de l’intoxication aiguë par l’eau
L’intoxication aiguë par l’eau correspond à un épisode hyponatrémique sévère (< 115 mmol/l) à la suite de l’ingestion massive de boissons hypotoniques, fréquemment dans un contexte de psychose chronique. Le syndrome des buveurs de bière en est une variante, la bière étant une boisson très hypotonique.

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Traitement de l’hyponatrémie
A Traitement d’urgence de l’hyponatrémie sévère

Toute hyponatrémie menaçante, c’est-à-dire inférieure à 115 mmol/l et/ou s’accompagnant de signes neurologiques à type de délire, coma ou convulsions, nécessite un traitement urgent qui repose sur du sérum salé hypertonique à 20 %, administré en seringue autopulsée par voie intraveineuse à raison de 50 ml sur 12 heures, sous surveillance étroite du ionogramme sanguin toutes les 6 heures.

Cette infusion de sérum salé hypertonique est interrompue dès que la natrémie atteint 120 mmol/l. Au-delà de 120 mmol/l, la correction de la natrémie est obtenue plus progressivement par restriction hydrique.

La vitesse de correction ne doit pas dépasser 0,5 mmol par heure afin d’éviter la myélinolyse centropontine, qui donne un tableau d’accident vasculaire cérébral pseudobulbaire.

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Moyens thérapeutiques devant un SIAD
Le traitement repose sur la limitation des apports hydriques ou l’augmentation de l’excrétion hydrique par le biais d’une diurèse osmotique (glycosurie, azoturie) ou d’une action directe plus ou moins spécifique sur le tubule rénal (déméclocycline et surtout tolvaptan).

1 Restriction hydrique
La restriction hydrique (qui commence par l’arrêt des perfusions, etc.) reste un traitement peu coûteux, peu toxique, mais dont l’efficacité dépend de la rigueur de la restriction, souvent mal tolérée par les malades, surtout au long cours.

À titre indicatif, une natrémie inférieure à 120 mmol/l doit conduire à une restriction hydrique à 100 cm3/24 heures; entre 120 et 125 mmol/l, la restriction est de 300 cm3; entre 125 et 130, de 500 cm3; entre 130 et 135, de 700 cm3; entre 135 à 138, de 1 litre; au-delà, boissons libres. La restriction dans les situations aiguës doit être réévaluée quotidiennement en fonction du ionogramme sanguin.

2 Aquarétiques
Les aquarétiques, ou antagonistes non peptidiques des récepteurs V2 de la vasopressine, s’administrent par voie orale et ont une autorisation de mise sur le marché (AMM) européenne dans les hyponatrémies euvolémiques (SIAD). Leur chef de file, le tolvaptan, n’est plus disponible, même en pharmacie hospitalière en France, bien qu’il reste disponible chez les patients antérieurement traités et bien équilibrés par ce médicament. Les complications potentielles du traitement sont la myélinolyse centropontine par correction trop rapide de l’hyponatrémie et l’hypotension, notamment si l’hyponatrémie comporte une composante hypovolémique. Il est en pratique très efficace et bien toléré.

3 Déméclocycline
Cette tétracycline récemment recommercialisée, d’une demi-vie de 12 heures, induit un diabète insipide néphrogénique (indépendant de prise d’eau) par effet post-récepteur. Il n’existe pas d’étude randomisée versus placebo ou d’alternative thérapeutique dans le SIAD. La réponse est variable et lente, avec un traitement d’attaque sur 10 jours de 2 à 3 gélules de 150 mg per os trois fois par jour, associé à une restriction hydrique modérée, puis un traitement d’entretien de 600 mg/jour sans restriction hydrique. Les principaux effets secondaires sont une néphrotoxicité et une photosensibilisation lors de la prescription au long cours.

4 Urée
L’urée (30 à 60 g par jour per os ou en sonde gastrique) ne nécessite pas de restriction hydrique. C’est un traitement peu coûteux, mais qui n’est pas commercialisé. Il est en revanche disponible au niveau des pharmacies centrales des hôpitaux. Le traitement a très mauvais goût. Un régime enrichi en protides peut également améliorer la natrémie en favorisant l’uréogenèse et une diurèse osmotique.

5 Inhibiteurs de SGLT2
Les inhibiteurs de SGLT2 pourraient favoriser une ascension modeste de la natrémie, par le biais d’une diurèse osmotique liée à la glycosurie.

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Q

Indications thérapeutiques dans le SIAD
En cas de symptômes cliniques sévères ou récents (moins de 48 heures), tels que coma, convulsions, détresse respiratoire, le premier traitement reste le sérum salé hypertonique à 20 %.

La correction d’une hyponatrémie profonde doit toujours être progressive avec une surveillance clinique et ionique étroite, en particulier au début. Il importe de corriger tous les facteurs en cause, l’étiologie étant souvent multifactorielle.

En cas de SIAD chronique après bilan étiologique rigoureux, il n’existe pas de consensus thérapeutique, malgré les études sur les effets neurocognitifs délétères d’une hyponatrémie même modeste. Le tolvaptan (7,5 mg/j) est efficace et bien toléré, mais n’est plus disponible en instauration en France, malgré une AMM européenne. La restriction hydrique et un régime hyperprotidique sont de prescription aisée. L’urée ou la déméclocycline permettent d’améliorer la natrémie, sans bénéfice démontré sur la mortalité.

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Points clés

*Toute situation d’hyponatrémie nécessite une anamnèse, un examen clinique soigneux à la recherche de signes de déshydratation ou d’œdèmes, et l’analyse du traitement en cours.
*Le diagnostic positif repose sur l’osmolalité plasmatique mesurée ou calculée et l’évaluation clinique de la volémie (pli cutané, œdèmes).
*Une insuffisance surrénale doit impérativement être écartée.
*Toutes les hyponatrémies ne sont pas des SIAD.
*Le SIAD correspond à une hyponatrémie hypo-osmolaire normovolémique.
*Les causes iatrogènes des SIAD sont les plus fréquentes, mais il importe d’écarter une néoplasie, notamment pulmonaire, éventuellement par des imageries répétées.
*Les SIAD inexpliqués restent assez rares, les hyponatrémies étant souvent d’origine multifactorielle.
*Le sérum salé hypertonique dans les cas les plus sévères est un traitement efficace s’il est bien surveillé pour éviter une correction trop rapide de l’hyponatrémie et son risque de myélinolyse centropontine.

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Diagnostic d’un diabète sucré
Le diabète (sucré) est une pathologie caractérisée par une hyperglycémie chronique, quelle qu’en soit la cause. Le seuil de glycémie qui définit le diabète est celui qui est associé à l’apparition du risque de rétinopathie diabétique.

I Diagnostic
Diagnostic lors d’un dépistage

Le diagnostic de diabète est souvent porté chez un patient asymptomatique, dans le contexte d’un dépistage en raison des facteurs de risque par exemple.

Glycémie veineuse à jeun

*D’après les recommandations de l’OMS, la glycémie veineuse à jeun est normale lorsqu’elle est < 1,10 g/l (6 mmol/l).
*On parle d’hyperglycémie modérée à jeun si la glycémie veineuse est ≥ 1,10 g/l et < 1,26 g/l (6 à 7 mmol/l).
*On parle de diabète sucré si la glycémie veineuse à jeun est ≥ 1,26 g/l (7 mmol/l) à deux reprises.
Hyperglycémie provoquée par voie orale (HGPO, 75 g de glucose en 10 minutes)

*Les experts recommandent de ne pas effectuer en général d’HGPO en dehors de la grossesse (voir Item 255, chapitre 20).
*En dehors de la grossesse, une HGPO n’est indiquée que dans le cas d’une anomalie modérée de la glycémie à jeun, entre 1,10 et 1,26 g/l (6 à 7 mmol/l) :
–le diagnostic de diabète est porté si la glycémie 2 heures après charge orale est ≥ 2 g/l (11 mmol/l);
–si la glycémie à 2 heures est entre 1,40 et 2,0 g/l (7,8 à 11 mmol/l), on parle d’intolérance au glucose.
Diagnostic dans un contexte d’urgence

Le diagnostic de diabète est aussi porté dans un contexte d’urgence chez un patient symptomatique :

*chez un patient qui a des symptômes de l’hyperglycémie (soif et polyurie), le diagnostic est immédiat si la glycémie est ≥ 2 g/l (11 mmol/l) à n’importe quel moment de la journée;
*il convient alors, en présence de signes de carence en insuline (signes d’hyperglycémie + amaigrissement contrastant avec un appétit conservé : c’est le syndrome cardinal), de rechercher immédiatement la présence de corps cétoniques (sanguins ou urinaires).

Le diagnostic du diabète par dosage de l’HbA1c avec une valeur seuil de 6,5 % (et le diagnostic de prédiabète pour une HbA1c entre 5,7 et 6,5 %), proposé par l’OMS en 2011, n’est pas recommandé en France : si cela intègre mieux les fluctuations glycémiques sur le nycthémère, cette stratégie est jugée trop coûteuse.

Les conditions de diagnostic du diabète au cours de la grossesse (diabète gestationnel) sont particulières (voir Item 255, chapitre 20).

Le diagnostic du diabète doit s’accompagner d’une annonce au patient. Il ne convient pas de banaliser la situation d’« hyperglycémie modérée à jeun » car elle constitue un facteur de risque de diabète et de pathologie cardiovasculaire.

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Classification nosologique
Le diabète est un syndrome et la découverte de cette anomalie doit être suivie de l’identification de sa cause chaque fois que cela est possible. La différenciation des diabètes de type 1 et de type 2 selon leurs caractéristiques propres est résumée dans le tableau 18.1. Si ces deux formes rendent compte de plus de 90 % des cas de diabète, il existe de nombreuses autres causes de diabète résumées dans le tableau 18.2. Une enquête étiologique est nécessaire, car certaines étiologies ont des pronostics et/ou des traitements spécifiques.

Tableau 18.1

Caractéristiques respectives des diabètes de type 1 et de type 2.

Type 1	Type 2 Antécédents familiaux du même type	10 % pour les frères et sœurs	Fréquents Âge de survenue	Plutôt avant 35 ans	Plutôt après 35 ans Début	Souvent rapide ou explosif	Généralement lent et insidieux Facteur déclenchant	Souvent	Rarement Symptomatologie	Bruyante	Pauvre ou absente Poids	Normal ou bas (ou amaigrissement)	Obésité ou surcharge adipeuse abdominale Hyperglycémie au diagnostic	Majeure, > 3 g/l	Souvent < 2 g/l Cétose	Souvent présente	Le plus souvent absente Complications dégénératives au moment du diagnostic	Absentes	Présentes dans 50 % des cas Cause principale de mortalité	Insuffisance rénale	Maladie cardiovasculaire
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Les principales formes de diabète (d’après l’American Diabetes Association ; Diabetes Care, 2014).

Diabète de type 1
(environ 10 % des diabètes)
Diabète de type 1 auto-immun (classique et type 1 lent : LADA)
Diabète de type 2
(plus de 80 % des diabètes)
Variante : diabète de type 2 cétosique (ou diabète du sujet d’origine africaine)
Anomalies génétiques
de la fonction de la cellule β
(environ 1 % des diabètes)
Diabète MODY (maturity onset diabetes of the youth) dont les principales formes sont :
–MODY-2 (mutation de la glucokinase)
–MODY-3 (mutation de HNF-1α)
–Etc.
Maladies du pancréas exocrine
(quelques % de tous les diabètes)
–Pancréatite chronique (en général calcifiée au stade de diabète)
–Pancréatite aiguë (hyperglycémie transitoire ou persistante)
–Néoplasie
–Traumatisme/pancréatectomie
–Mucoviscidose
–Hémochromatose
–Etc.
Maladies endocrines
(quelques % des diabètes)
–Hypercortisolisme
–Acromégalie
–Phéochromocytome
–Hyperthyroïdie
Médicaments et toxiques
–Corticoïdes et stéroïdes sexuels
–Neuroleptiques (surtout neuroleptiques atypiques)
–Immunosuppresseurs et immunomodulateurs anticancéreux
–Etc.
Formes rares de diabète auto-immun
–Polyendocrinopathie auto-immune de type 2 (dysthyroïdie, maladie de Biermer, vitiligo, etc.)
–Etc.
Syndromes génétiques complexes pouvant comporter un diabète
–Trisomie 21
–Syndrome de Klinefelter
–Syndrome de Turner
–Etc.

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Physiopathologie
Dans sa forme classique, le diabète de type 1 est caractérisé par une carence absolue en insuline, due à la destruction spécifique des cellules β pancréatiques qui sécrètent l’insuline, sans atteinte des autres cellules endocrines du pancréas, en particulier les cellules α, qui sécrètent le glucagon. Le mécanisme le plus plausible de cette destruction est une réaction auto-immune spécifique d’organe à médiation cellulaire; en est le témoin la présence au diagnostic chez 95 % des sujets d’autoanticorps spécifiques (les plus souvent recherchés sont les autoanticorps anti-insuline chez l’enfant, les anti-GAD, anti-IA2 et anti-ZnT8; voir plus loin). Ces autoanticorps qui servent de marqueurs de la maladie auto-immune n’ont cependant pas de rôle pathogène propre.

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Prédisposition génétique
Une prédisposition génétique est impliquée (tableau 18.3), même si, dans 85 % des cas, il n’existe pas d’antécédents familiaux de diabète de type 1.

Tableau 18.3

Risques de diabète de type 1 en France.

Risque dans la population générale 0,4 %
Apparenté de 1er degré 10 %
Jumeaux monozygotes 30 à 70 %
(Source : CEEDMM, 2021.)

Les principaux gènes de prédisposition et de protection appartiennent au complexe majeur d’histocompatibilité (CMH) de classe II, appelés HLA (human leukocytes antigens).

B Facteurs environnementaux
Leur existence est suggérée par le fait que 50 % des paires de jumeaux monozygotes sont non concordantes pour le diabète de type 1 et que l’incidence du diabète de type 1, notamment en Europe, augmente à une vitesse plus rapide que celle d’une pathologie qui serait causée par une éventuelle sélection génique. Pour simplifier les choses, on dira juste qu’on ne sait pas aujourd’hui quel est ou quels sont les facteurs environnementaux; on a évoqué le rôle de virus (Coxsackie notamment), la modification de la flore intestinale, l’alimentation « industrielle » (lait de vache, introduction précoce du gluten, entre autres), etc. Aucun facteur clair ne se dégage à ce jour.

C Processus auto-immuns
Les principales cibles antigéniques reconnues de la réponse immune sont :

*l’insuline et la pro-insuline;
*la GAD (décarboxylase de l’acide glutamique);
*l’antigène IA2 (islet antigen number 2, apparenté à une tyrosine phosphatase).
Au moins l’un des autoanticorps témoins circulants suivants est détectable dans 97 % des cas au diagnostic (+++) :

*les anticorps anti-GAD;
*les anticorps anti-IA2;
*les anticorps anti-insuline (chez l’enfant);
*les anticorps anti-ZnT8 (transporteur du zinc de la cellule β, chez l’adulte).
Tous ces autoanticorps paraissent être des témoins de la réponse immune plutôt que les agents responsables de la destruction des cellules β. Les mécanismes cellulaires sont vraisemblablement prédominants.

La lésion pancréatique caractéristique est l’insulite (inflammation avec infiltration cellulaire de l’îlot de Langerhans), siège de la destruction des cellules β par les lymphocytes T (au phénotype CD8 essentiellement chez l’homme), mais aussi vraisemblablement par des cytokines macrophagiques.

La destruction des cellules β est un processus étalé dans le temps, avant et après l’apparition du diabète (voir plus loin).

La fréquence des autres maladies auto-immunes associées (10 % à 15 %) et/ou des anticorps spécifiques d’organes (30 %) fait entrer le diabète de type 1 dans le cadre des syndromes polyendocriniens auto-immuns (de type 2). Les maladies auto-immunes spécifiques d’organe associées au diabète de type 1 sont essentiellement des thyroïdopathies (maladie de Basedow et thyroïdite de Hashimoto), l’insuffisance surrénale lente par rétraction corticale, l’atrophie gastrique qui ne se résume pas qu’à la maladie de Biermer, la maladie cœliaque et le vitiligo.

La fréquence des associations avec d’autres maladies auto-immunes incite à informer les patients des risques qu’ils ont de développer ces affections. Un dépistage systématique des autoanticorps doit être proposé au moins une fois, en particulier ceux des thyroïdites et de la gastrite atrophique.

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Signes cliniques
A Présentation clinique initiale habituelle

La tableau clinique typique est celui d’un enfant ou adolescent de poids normal et sans antécédent.

Les signes cliniques initiaux habituellement rencontrés sont les suivants :

*début rapide ou explosif (quelques semaines) : « le coup de tonnerre dans un ciel calme »;
*syndrome cardinal (polyuro-polydipsie, amaigrissement, polyphagie) :
–polyurie et polydipsie sont des signes d’hyperglycémie franche (= nettement et durablement supérieure au seuil de réabsorption rénale du glucose, qui est environ 1,8 g/l); ils sont communs à toutes les formes de diabète en situation de déséquilibre glycémique;
–amaigrissement contrastant avec un appétit conservé sont des signes de carence en insuline; leur présence doit, outre le dosage immédiat de la glycémie, faire rechercher immédiatement la présence de corps cétoniques, ce qui peut se faire en quelques secondes sur une goutte de sang au bout du doigt (ou dans les urines);
–chez l’enfant, la manifestation d’alerte peut être une énurésie secondaire, une cassure de la courbe staturopondérale;
*troubles visuels transitoires (anomalies de la réfraction, constatées surtout dans les jours qui suivent la normalisation glycémique après introduction de l’insuline);
*examen clinique pauvre : fonte musculaire (quadriceps), recherche de signes d’acidose (dyspnée de Kussmaul, odeur acétonique de l’haleine) et de déshydratation globale.
Devant ce tableau de syndrome polyuropolydipsique, le diagnostic est rapidement fait par mesure de la glycémie veineuse (souvent franchement élevée). Comme rappelé en introduction, en présence d’un syndrome cardinal, il n’est pas nécessaire de vérifier la glycémie à jeun pour poser le diagnostic lorsque la glycémie dépasse 2 g/l.

L’hyperglycémie peut se compliquer d’acidocétose inaugurale qui est le mode d’entrée dans la maladie chez 80 % des enfants, avec un délai moyen de 3 semaines entre les premiers symptômes et l’hospitalisation pour acidocétose. Chez l’adulte, l’installation des symptômes est en général plus lente; chez l’adulte, le diagnostic est donc en général fait avant l’acidocétose.

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Formes du diabète de type 1
1 Formes particulières selon le mode de révélation
Diabète de type 1 lent, ou LADA (latent autoimmune diabetes in the adult)
Le début est tardif et progressif, voisin de celui du type 2, mais avec certaines atypies (poids normal, peu d’antécédents familiaux). Les anticorps sont positifs (anti-GAD surtout) et le recours à l’insulinothérapie va s’avérer nécessaire en 2 à 10 ans en général. Le LADA représenterait jusqu’à 10 % des diabètes apparemment de type 2.

Diabète à tendance cétosique du sujet noir d’origine africaine

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e diagnostic (fig. 18.1) peut être clinique si l’hyperglycémie est associée à la triade classique « amaigrissement-cétose-âge < 35 ans ».Évolution
A Histoire naturelle du diabète de type 1

L’histoire naturelle reconstruite d’après l’étude des modèles animaux et des études de familles est illustrée par la figure 18.2 – schéma dit de G. Eisenbarth. Il fait se succéder les phases suivantes :*une phase préclinique où les mécanismes auto-immuns détruisent les cellules β; maintenant appelée stade 1;
*un diagnostic clinique correspondant à la destruction de plus de 85 % de la masse des cellules β; maintenant appelée stade 3, le stade 2 correspondant à une période marquée par des anomalies métaboliques minimes, et précède le diabète clinique;
*une phase clinique séquellaire où les quelques cellules restantes seraient appelées à disparaître plus ou moins complètement.

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Maladie chronique
Le diabète de type 1 est une maladie chronique nécessitant un engagement permanent du patient pour la gestion du traitement et sa participation active pour les soins quotidiens (+++). L’acceptation – même si cela revient à accepter l’ « inacceptable » – de la maladie est absolument nécessaire pour que le patient assume les grands principes du traitement et de sa surveillance, garants de l’obtention d’un contrôle glycémique permettant d’éviter ou de retarder les complications.

Il existe aussi d’autres freins à une bonne adhésion du patient à son traitement. Nous citerons :

*la peur des hypoglycémies (surtout nocturnes) (++);
*la peur de prendre du poids;
*la non-acceptation (pseudo-acceptation) de la maladie;
*le refus des contraintes (autosurveillance, régime, injection), en particulier au moment de l’adolescence.
Ces différents freins peuvent aboutir à un mauvais contrôle et/ou une instabilité glycémique et nécessitent une prise en charge multidisciplinaire dans un centre expert en diabétologie (diabétologue, infirmière d’éducation thérapeutique, diététicienne, psychologue, etc.).

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Prise en charge thérapeutique
A Principes généraux

Le traitement du diabète de type 1 demande beaucoup au patient lui-même, puisqu’il doit assurer les contrôles glycémiques, effectuer les injections d’insuline, prévenir les complications métaboliques, adapter son traitement aux activités quotidiennes, contrôler son alimentation et adopter un mode de vie évitant le développement des complications dégénératives à long terme.

L’éducation thérapeutique, visant à l’autonomisation maximale du patient, est en conséquence absolument nécessaire.

Il s’agit d’un acte reconnu officiellement, inscrit dans la loi HPST (Hôpital, patients, santé et territoires) et éventuellement financé sous certaines conditions. Il doit comporter :

*diagnostic éducatif ou bilan éducatif partagé : identification des besoins éducatifs;
*transfert des connaissances par l’enseignement collectif ou individualisé;
*vérification des comportements;
*importance des consultations infirmières et diététiques;
*promotion de comportements sains (tabac, activité physique, etc.);
*éventuellement participation de patients dits « experts » ou « ressources » comme soutien.
Il est aussi souvent nécessaire d’éduquer les membres de la famille sur des sujets particuliers (par exemple reconnaître l’hypoglycémie et savoir y remédier : resucrage oral ou administration de glucagon).

Les objectifs du traitement du diabète de type 1 (tableau 18.4) sont un compromis entre le fait d’assurer la vie la plus libre possible et la prévention des complications aiguës ou chroniques de la maladie.

Tableau 18.4

Objectifs glycémiques idéaux chez les sujets diabétiques de type 1 non âgés (+++).

Le matin à jeun 0,9-1,20 g/l
Avant les repas 0,8-1,2 g/l
2 heures après les repas 1,2-1,8 g/l
Au coucher 1,2 g/l
À 3 heures du matin > 0,8 g/l
HbA1c < 7 %
Hypoglycémies modérées Rares
Hypoglycémies « sévères » 0
Nombre d’autocontrôles 4-6 par jour
Nombre d’injections 3-5 par jour ou pompe
Paramètres de mesure continue du glucose
Nombre de jours de port du capteur pour une analyse fiable des données ≥ 14 jours
% de données capturées pour une analyse fiable des données ≥ 70 %
TIR (time in range – temps dans la cible ; 70-180 mg/dl) ≥ 70 %
TBR ≤ 70 (time below range – temps en hypoglycémie ≤ 70 mg/dl) ≤ 4 %
TBR ≤ 54 (time below range – temps en hypoglycémie ≤ 54 mg/dl) ≤ 1 %
CV (coefficient de variation) ≤ 36 %
GMI (glucose management index ou index de gestion du glucose) ≥ 7 %
(Source : CEEDMM, 2021.)

Une insulinothérapie intensifiée réduit l’hémoglobine glyquée, retarde et réduit la gravité des complications micro- et macroangiopathiques. L’insulinothérapie intensifiée augmente cependant le risque d’hypoglycémie sévère.

L’objectif métabolique, la valeur cible de l’HbA1c, est en conséquence une cote mal taillée entre ces deux risques :

*l’objectif raisonnable recommandé par l’American Diabetes Association est ainsi une HbA1c < 7 % (certains tolèrent « autour de 7 % » sans dépasser 7,5 %) pour un sujet adulte (hors grossesse);
*pour les enfants, un objectif moins strict (entre 7,5 % et 8,5 % pour les enfants de moins de 6 ans, < 8 % pour les enfants prépubères et < 7,5 % pour les adolescents de 13 à 19 ans) est envisageable compte tenu du risque supposé de retentissement des hypoglycémies sévères sur le développement cérébral.
Ces objectifs généraux doivent être personnalisés à la situation de chaque patient en respectant un compromis entre l’équilibre glycémique, la survenue des hypoglycémies et la qualité de vie.

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Autosurveillance glycémique
Pour le patient, les buts de l’autosurveillance glycémique sont :

*de suivre son diabète;
*d’adapter ses doses d’insuline;
*d’avoir une idée de l’équilibre glycémique moyen;
*de gérer les situations d’urgence.
1 Glycémies capillaires
L’autosurveillance glycémique a longtemps reposé sur des mesures de glycémie sur sang capillaire, obtenue par piqûre au doigt, au moins 4 fois par jour. Ce sont les contraintes de cette surveillance qui génèrent le plus de lassitude chez les patients.

2 Capteurs de glucose interstitiel
La mise à disposition, avec remboursement, des capteurs de glucose qui mesurent le taux de glucose en continu a révolutionné récemment la surveillance du diabète insulino-traité. Ces capteurs sont également appelés MCG (mesure continue du glucose) ou CGM en anglais (continuous glucose monitoring).

Ils ont un double intérêt :

*un bénéfice thérapeutique pour le patient grâce au biofeedback en temps réel qui s’associe souvent à une amélioration métabolique (augmentation du temps passé dans la cible glycémique, réduction du temps passé en hypoglycémie);
*une facilitation du suivi pour les professionnels du diabète grâce à de nouveaux marqueurs de suivi : le temps dans la cible 70-180 mg/dl (TIR ou time in range), le temps en hypoglycémie ≤ 70 mg/dl (TBR≤70 ou time below range), le temps en hypoglycémie ≤ 54 mg/dl (TBR≤54), le temps en hyperglycémie ≥ 180 mg/dl (TAR≥180 ou time above range), le temps en hyperglycémie ≥ 250 mg/dl (TAR≥250), le coefficient de variation (CV) et le GMI (glucose management indicator), qui correspond à une estimation de l’HbA1c à partir d’un calcul avec le glucose moyen du capteur. Un diabète est considéré comme bien équilibré si : TIR ≥ 70 %; TBR≤70 ≤ 4 %; TBR≤54 ≤ 1 %; CV ≤ 36 %; GMI ≤ 7 %.
En plus de ces paramètres chiffrés, présentés sur un histogramme coloré pour le TAR, le TIR et le TBR (histogramme en haut à gauche de la fig. 18.3), les logiciels d’analyse des CGM génèrent une représentation graphique et statistique des données du capteur appelée AGP (ambulatory glucose profile) qui compile les données historiques du capteur sur une journée type : la médiane (ligne foncée), l’interquartile range (« vague » foncée) et l’intervalle 5-95es percentiles (« vague » claire) (voir fig. 18.3). Mesure des corps cétoniques
En présence d’une hyperglycémie inexpliquée et prolongée, ± associée à des symptômes digestifs (nausées, vomissements), les patients sont éduqués à rechercher la présence de corps cétoniques, dans les urines (bandelette réactive avec code couleur) ou dans le sang sur prélèvement capillaire (avec un lecteur de cétonémie), afin de dépister précocement une décompensation cétosique.

C Surveillance
1 Hémoglobine glyquée
Il existe une fixation non enzymatique et irréversible du glucose sur toutes les hémoglobines. La fraction la plus spécifique d’hémoglobine glyquée est l’HbA1c. Le résultat d’HbA1c est habituellement exprimé en pourcentages de l’hémoglobine A1, et maintenant en mmol HbA1c/mol d’Hb. Les saignements et hémolyses chroniques, en augmentant le turn-over des globules rouges, réduisent le temps de la glycation : la valeur mesurée d’HbA1c est plus basse que celle attendue au vu de la moyenne des glycémies.

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Autres éléments de surveillance
Le diabète de type 1 doit être suivi par un diabétologue ou un pédiatre endocrinologue lors de consultations spécialisées au moins 3 à 4 fois par an et avec la surveillance des éléments suivants :

*examen clinique annuel incluant une évaluation neurologique et la détermination du risque de plaie du pied (grade lésionnel);
*profil lipidique, créatinine, microalbuminurie, ECG (une fois par an);
*examen ophtalmologique (fond d’œil ou rétinographie par caméra non mydriatique) au moins une fois par an pour ce qui est du dépistage; dès qu’il y a des lésions de rétinopathie diabétique, la surveillance doit être plus rapprochée selon le niveau de sévérité et l’évolution de l’HbA1c, à l’appréciation de l’ophtalmologiste. La rétinographie par caméra non mydriatique reste un examen de dépistage qui n’a plus sa place dans le suivi dès lors que des lésions rétiniennes sont observées.
*consultation de cardiologie annuelle chez les patients symptomatiques, âgés ou de longue durée d’évolution ou compliqués;
*consultation annuelle chez le dentiste.

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Traitement insulinique
Le traitement du diabète de type 1 est encore aujourd’hui un traitement palliatif de remplacement hormonal pour la vie entière.

1 Variétés d’insuline
Insuline humaine recombinante
L’insuline humaine recombinante est strictement identique à l’insuline humaine. Les insulines disponibles se nomment : Actrapid®, Umuline rapide® ou Insuman®. Elles peuvent être administrées par voie IV, IM ou SC. Injectées par voie SC, leur temps de latence est d’environ 30 à 45 minutes, leur pic d’activité maximale survient à 2-3 heures et leur durée totale d’action est de 7 à 8 heures. En France, elles sont devenues bien moins utilisées que les analogues rapides, dont la plus courte durée d’action réduit le risque d’hypoglycémie à distance des repas.

Analogues rapides de l’insuline
Les analogues rapides de l’insuline sont des molécules à activité insulinique (haute affinité pour le récepteur de l’insuline), structurellement modifiés pour obtenir des propriétés pharmacodynamiques intéressantes quand ils sont injectés par voie SC (raccourcissement du temps de latence, diminution de la durée d’activité), notamment en période prandiale. Les analogues rapides ont l’avantage d’être rapidement actifs (délai de 15 minutes environ, pic vers 30-90 minutes, durée totale d’action de 4-6 heures) au moment de la prise alimentaire et de ne pas persister pendant la phase interprandiale. Ils sont injectés juste avant de manger. Ils sont aussi utiles pour des corrections d’hyperglycémie. Les analogues rapides disponibles sont lispro (Humalog®), aspart (Novorapid®, Asparte®) et glulisine (Apidra®). Ils peuvent être utilisés par voie IV, IM et SC.

Ils constituent l’insuline de choix pour les pompes à insuline.

Des formes dont l’excipient a été modifié sont en cours de commercialisation; elles ont un délai d’action et une durée d’action encore plus brefs. L’insuline Fiasp® (principe actif analogue aspart) et l’insuline Lyumjev® (principe actif lispro) sont des formes légèrement plus rapides que Novorapid® et Humalog®, respectivement.

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Formes lentes d’insuline humaine (et mélanges avec des analogues rapides)
Classiquement, le passage de l’insuline humaine du tissu sous-cutané vers le sang peut être ralenti par divers procédés : adjonction de protamine ou excès de zinc. Les insulines NPH (neutral protamine Hagedorn) sont des insulines d’action intermédiaire (9 à 16 heures).

Il existe aussi des formes proposant des mélanges préconditionnés d’analogue rapide et d’insuline NPH à 25, 30, 50 ou 70 % d’analogue rapide, appelées formes « prémix ». Ces formes ne peuvent être administrées que par voie SC. Ce sont non pas des solutions d’insuline mais des suspensions; elles exigent donc une remise en suspension soigneuse avant l’injection. La place des insulines prémélangées dans le traitement de diabète de type 1 est marginale, car elles ne permettent pas l’ajustement indépendant de la dose de l’insuline prandiale aux apports alimentaires.

Analogues lents de l’insuline
Les analogues lents sont obtenus par différentes modifications biochimiques. Les analogues lents disponibles sont la glargine U100 (Lantus® ou Abasaglar®), la glargine U300 (Toujéo®, formulation concentrée de la glargine, avec une action encore plus prolongée, > 24 heures), la détémir (Levemir®, d’action intermédiaire nécessitant en général deux injections quotidiennes) et la degludec (Tresiba®, d’action prolongée, > 24 heures). Ils ne peuvent être administrés que par voie SC. Il s’agit de solutions limpides ne nécessitant pas de remise en suspension.

Pour toutes ces insulines, on évitera le développement des lipodystrophies, susceptibles de modifier la pharmacocinétique de l’insuline, en variant les points d’injection. Un analogue ultralent, hebdomadaire, de l’insuline devrait être commercialisé prochainement. Il sera notamment intéressant pour les patients diabétiques de type 2 non autonomes dans la gestion de leur maladie.

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Vecteurs
Les vecteurs sont de deux types :

*les stylos à insuline réutilisables (utilisation de cartouches) ou jetables (stylos préremplis) pour toutes les insulines;
*les pompes portables pour l’administration continue, modulée et sous-cutanée d’analogue rapide de l’insuline. Le traitement par pompe à insuline est plus efficace, plus flexible, mais plus cher que le traitement basal-bolus par injections multiples. Les pompes à insuline peuvent être couplées à un capteur de glucose en continu, via un algorithme de contrôle, réalisant un dispositif de délivrance automatisée de l’insuline, également appelé « boucle fermée hybride » (le terme hybride signifie que ces systèmes ne sont pas totalement automatisés, l’annonce des repas et de l’activité physique restant à la charge des patients). Ces systèmes sont maintenant largement disponibles et sont en passe de devenir le traitement de référence du diabète de type 1, permettant une amélioration métabolique, mais aussi une réduction du fardeau du diabète grâce à l’automatisation partielle des ajustements thérapeutiques. Les systèmes de boucle fermée hybride nécessitent d’être initiés et suivis par un centre expert dans l’utilisation de ces nouvelles technologies.

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Q

Schémas
Ces schémas, représentés dans la figure 18.4, sont à choisir suivant l’acceptation, l’autonomisation du patient et les objectifs thérapeutiques. Ils visent à se substituer à la production physiologique d’insuline : une faible production permanente, à laquelle vient s’ajouter une production rapide, puissante et transitoire lors de la prise alimentaire de glucides. Cette insulinothérapie intensifiée peut être réalisée grâce à une injection d’insuline lente et plusieurs injections d’insuline rapide chaque jour, ou bien grâce à l’utilisation de la pompe à insuline.

A
321
Q

Doses
En général, la dose est de 0,5 ou 0,6 U/kg de poids par jour, auto-adaptée en fonction de l’analyse des glycémies (rétrospective, instantanée), de l’activité physique et de l’alimentation prévues.

Une méthode personnalisée dite « insulinothérapie fonctionnelle » est développée dans de nombreux centres. Elle vise à éduquer le patient diabétique pour qu’il puisse adapter son insulinothérapie à son mode de vie. Cette méthode nécessite en outre une éducation nutritionnelle pour le calcul des quantités de glucides des rations alimentaires.

5 Effets secondaires de l’insulinothérapie
Les principaux effets secondaires sont les suivants :

*hypoglycémies (voir « Hypoglycémies » à la fin de ce chapitre et également l’Item 240, chapitre 11);
*lipohypertrophies si les piqûres reviennent trop souvent au même endroit, avec des aiguilles utilisées plusieurs fois.Traitement non insuliniqueAccompagnement et soutien psychologique, comme pour toute maladie chronique.
*Alimentation variée et sans interdits, mais qui respecte autant que possible les principes du Programme national nutrition santé (PNNS, https://www.mangerbouger.fr/ressources-pros/le-programme-national-nutrition-sante-pnns). Les horaires et les apports glucidiques seront réguliers pour les patients ne pratiquant pas l’« insulinothérapie fonctionnelle ». Pour les autres, ils adapteront leur dose d’insuline rapide à la quantité de glucides qu’ils comptent ingérer.
*Exercice physique (plutôt en aérobiose) à recommander en prenant en compte le risque d’hypoglycémie parfois différée de plusieurs heures dans le cas d’efforts prolongés (voir plus loin). Un bilan clinique est nécessaire quand il s’agit d’une reprise d’activité après une longue période d’arrêt.
*Utilité des associations de patients (Fédération française des diabétiques [FFD]; Aide aux jeunes diabétiques [AJD]; Association française des diabétiques [AFD]) pour le soutien psychologique et comme sources d’information, d’activités de groupe, de défense des intérêts communs auprès des pouvoirs publics, d’accès à des tarifs préférentiels de compagnies d’assurances, de conseils juridiques, etc.

A
322
Q

Cas particuliers
A Diabète de l’enfant et de l’adolescent

  • La fréquence des acidocétoses doit être signalée pour inciter à mettre en place des mesures de prévention (éducation des médecins généralistes et scolaires, des patients et de leur famille).
    *Hypoglycémie : l’innocuité cérébrale des hypoglycémies sévères chez l’enfant de moins de 6 ans n’est pas prouvée. Les objectifs thérapeutiques sont pour cette raison un peu plus lâches que chez l’adulte (voir plus haut).
    *Diabète difficile à équilibrer (augmentation des besoins en insuline pendant la puberté d’environ 50 %) et mal accepté psychologiquement pendant l’adolescence.
    *Intérêt de la pompe chez le très petit enfant.
    *Il convient aussi d’envisager chez l’enfant un projet d’accueil individualisé (PAI) pour lui assurer une scolarité sereine, faisant intervenir les familles, le médecin traitant, les enseignants, l’infirmière et le médecin scolaire.
    *Noter la fréquence croissante de la part du diabète de type 2 chez l’adolescent.
A
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Q

Diabète au féminin
1 Diabète gestationnelContraception
Le choix du mode de contraception est discuté entre le diabétologue et le gynécologue. Les pilules œstroprogestatives peuvent être utilisées chez des femmes jeunes, sans complication, non fumeuses et dont le diabète est relativement bien équilibré. Les dispositifs intra-utérins sont aussi une possibilité, même chez la nullipare si les œstroprogestatifs sont mal supportés ou relativement contre-indiqués par l’existence de complications métaboliques (hypertriglycéridémie) ou vasculaires. Chez certaines femmes, des contraceptions progestatives soit microdosées, soit macrodosées peuvent être proposées.

3 Grossesse
La prise en charge de la grossesse survenant chez une femme souffrant de diabète de type 1 est développée dans le chapitre 20 (Item 255).

Une prise en charge spécialisée diabéto-obstétricale est indispensable, idéalement en période préconceptionnelle.

Le pronostic est quasi normal si l’équilibre est parfait dès la conception (grossesse programmée), et ce jusqu’à l’accouchement, et si le diabète n’est pas compliqué. En cas de désir de grossesse, utiliser des analogues de l’insuline, qui ont reçu l’agrément pour leur utilisation chez la femme enceinte. Se souvenir que la grossesse peut retentir sur le diabète :

*risque majoré de variabilité glycémique et d’hypoglycémie au premier trimestre de la grossesse;
*augmentation des besoins en insuline au troisième trimestre de la grossesse (résistance physiologique à l’insuline; l’augmentation des besoins porte en général sur les besoins prandiaux, mais le risque d’hypoglycémie à distance des repas est augmenté, ce qui conduit à fractionner l’alimentation) et retour aux besoins d’avant la grossesse dès l’accouchement;
*risque d’aggravation de la rétinopathie (+++) et de la néphropathie si celles-ci ne sont pas parfaitement stabilisées auparavant. Une surveillance étroite de la rétine s’impose, au minimum trimestrielle, en particulier lorsque le diabète est ancien, lorsqu’une rétinopathie préexiste avant la grossesse et n’a pas fait l’objet d’une photocoagulation par laser avant la grossesse.
Les objectifs glycémiques sont très stricts (HbA1c < 6,5 %, glycémies à jeun < 0,9 g/l, en postprandial < 1,20 g/l), l’autosurveillance est répétée, l’insulinothérapie optimisée et le suivi diabéto-obstétrical au moins mensuel. L’hospitalisation peut devenir nécessaire en cas de déséquilibre.

4 Ménopause
Lors de la ménopause, l’hormonothérapie substitutive par voie percutanée n’est envisagée que si elle s’avère médicalement indiquée et en l’absence de complications du diabète.

C Diabète en situation de jeûne
En cas d’intolérance gastrique, ne jamais arrêter l’insuline basale (lente, intermédiaire). Essayer des collations liquides fractionnées, sinon hospitaliser pour l’administration de solutés glucosés IV. Mais avant tout, toujours penser à vérifier la cétonurie ou la cétonémie, car les troubles digestifs sont les signes révélateurs d’une cétose débutante.

Lorsqu’un examen ou un soin nécessite d’être à jeun peu de temps (quelques heures), il suffit en général d’omettre l’insuline prandiale en maintenant l’insuline basale et de surveiller la glycémie capillaire.

A
324
Q

Points clés

  • Le diabète de type 1 est lié à une carence absolue en insuline par destruction auto-immune des cellules β pancréatiques. Il s’agit d’une maladie auto-immune spécifique d’organe où dominent les processus cellulaires.
  • Il survient habituellement avant 35 ans (pic à l’adolescence), mais peut survenir à tout âge.
    *Le diagnostic peut être clinique devant la triade classique « maigreur ou amaigrissement + cétose + âge < 35 ans ».
    *Si un de ces critères manque, valeur diagnostique des autoanticorps anti-GAD, anti-IA2 et anti-insuline.
    *Le diabète de type 1 est une maladie chronique qui demande une participation active du patient pour les soins quotidiens.
    *Une insulinothérapie intensifiée dès le diagnostic réduit l’hémoglobine glyquée, retarde et réduit la gravité des complications microangiopathiques et macroangiopathiques.
    *Les systèmes de délivrance automatisée de l’insuline (boucles fermées hybrides) représentent aujourd’hui le gold standard du traitement du diabète de type 1.
    *Les autres facteurs de risque vasculaire doivent être aussi contrôlés.
    *L’éducation thérapeutique du patient (ETP) à la maîtrise de l’insulinothérapie en fonction des aléas de la vie pour éviter les conséquences aiguës et chroniques de la maladie fait partie intégrante de l’acte thérapeutique.
A
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Q

Les personnes à risque sont les personnes en situation d’obésité, sédentaires, présentant une anomalie du métabolisme glucidique (hyperglycémie modérée à jeun ou intolérance au glucose [fig. 18.5], antécédent de diabète gestationnel pour les femmes), ayant des antécédents familiaux de diabète de type 2. Certaines ethnies sont plus touchées, en particulier les sujets originaires de certaines régions d’Afrique (incluant le Maghreb), du Moyen-Orient, d’Inde. En France, les populations des DROM (Antilles et Réunion) sont particulièrement concernées.

A
326
Q

hysiopathologie
La Physiopathologie de la forme commune du diabète de type 2 est représentée dans la figure 18.6. On retient deux mécanismes majeurs : altération des capacités d’insulinosécrétion et insulinorésistance. Le premier est plutôt de déterminisme génétique, mais auto-aggravé par l’hyperglycémie elle-même (glucotoxicité); le second est plutôt expliqué par l’environnement (sédentarité, alimentation excessive et de mauvaise qualité nutritionnelle).L’insulinorésistance se caractérise par la nécessité d’une plus forte concentration d’insuline pour obtenir une réponse au niveau de ses organes cibles :

*muscles (diminution de la capture, de l’utilisation et du stockage du glucose);
*foie (perte de l’inhibition de la production hépatique de glucose, à l’origine de l’hyperglycémie à jeun);
*adipocytes (lipolyse excessive avec élévation des acides gras libres circulants).
Il n’y a cependant pas d’hyperglycémie sans anomalie de la sécrétion d’insuline : tous les diabètes sont dus à l’incapacité de produire assez d’insuline pour subvenir aux besoins de l’organisme, que ceux-ci soient normaux (comme dans le diabète de type 1) ou élevés (chez les sujets résistants à l’action de l’insuline). La sensibilité à l’insuline diminue progressivement avec l’âge et peut favoriser la survenue d’un diabète si la production d’insuline n’arrive pas à compenser l’augmentation des besoins. La résistance à l’action de l’insuline n’est cependant pas un paramètre fixe : elle peut être améliorée par l’obtention d’un amaigrissement, par augmentation de l’activité physique, mais également par la réduction de différents types de stress physiques (par exemple le traitement de pathologies intercurrentes) ou psychiques.

A
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Q

Facteurs génétiques
Le diabète de type 2 est fortement héréditaire (transmission familiale, tableau 18.6), mais la composante génétique est moins importante que dans le diabète de type 1. L’hérédité comprend en effet une grande part liée aux comportements favorisant le diabète de type 2 (alimentation et mode de vie font partie de la culture partiellement transmise d’une génération à l’autre).

A
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Q

Glucotoxicité
L’hyperglycémie elle-même peut aggraver la résistance à l’action de l’insuline et les anomalies de sa sécrétion : c’est la glucotoxicité (voir plus loin). Cette aggravation des mécanismes physiopathologiques du diabète de type 2 est en partie réversible par un contrôle glycémique strict prolongé.

C Lipotoxicité
L’insulinopénie et l’insulinorésistance au niveau des adipocytes favorisent la lipolyse, ce qui entraîne une augmentation des acides gras libres circulants. Cette augmentation de la concentration plasmatique en acides gras libres aggrave les anomalies de l’insulinosécrétion, stimule la production hépatique de glucose et inhibe la captation de glucose par les muscles. Ce phénomène physiopathologique est connu sous le terme de lipotoxicité.

Ce que le patient doit savoir

Physiopathologie du diabète de type 2

Définie comme une réponse diminuée à l’administration d’insuline exogène, l’insulinorésistance (fig. 18.7) est favorisée par l’obésité androïde, l’âge et la sédentarité.Dans le cas du syndrome métabolique, l’obésité androïde et l’insulinorésistance s’accompagnent d’au moins deux des anomalies suivantes :

–une hypertriglycéridémie;
–un taux bas de HDL-cholestérol;
–une hypertension artérielle (HTA);
–une hyperglycémie à jeun ou un diabète.
Au-delà de l’hyperglycémie définissant le diabète, ces anomalies associées à l’insulinorésistance (HTA, dyslipidémie, etc.) contribuent à majorer le risque cardiovasculaire des sujets diabétiques de type 2.

La présence d’une inflammation chronique de bas grade est aujourd’hui considérée comme une autre composante de la physiopathologie du diabète de type 2. Elle est caractérisée par l’infiltration de cellules inflammatoires dans plusieurs tissus, en particulier le tissu adipeux. Les cytokines inflammatoires sécrétées par les macrophages et autres cellules inflammatoires et les adipokines sécrétées par les adipocytes sont des médiateurs des désordres métaboliques, y compris à distance, et pourraient participer aux défauts de sécrétion d’insuline. Au niveau du foie, la présence d’une stéatose est quasi constante, plus fréquemment associée à des lésions inflammatoires (stéato-hépatite) dans le diabète de type 2, contribuant directement à l’insulinorésistance hépatique. Les îlots de Langerhans pourraient aussi être le siège d’une inflammation de bas grade.

A
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Q

Signes cliniques et dépistage
A Signes cliniques

Les signes cliniques sont principalement secondaires à l’hyperglycémie. Cependant, le diabète de type 2 passe souvent inaperçu, car l’hyperglycémie se développe graduellement et peut rester longtemps asymptomatique (la glucosurie, responsable de la polyurie et de la polydipsie, ne survient que lorsque la glycémie dépasse le seuil de réabsorption rénale, de l’ordre de 1,80 g/l). L’absence de signe clinique peut entraîner un retard diagnostique chez des sujets exposés au risque de développer des complications micro- et macrovasculaires.

La découverte du diabète sur un mode de décompensation sévère peut s’expliquer par un simple retard diagnostique, une pathologie intercurrente ou la prescription d’un traitement hyperglycémiant (corticothérapie), et peut se révéler par les symptômes suivants :

*polyurie;
*polydipsie (soif);
*amaigrissement;
*prurit vulvaire chez la femme et balanite chez l’homme (mycoses génitales);
*infections récidivantes ou traînantes.
Une complication de l’hyperglycémie chronique peut également révéler la maladie : neuropathie douloureuse, mal perforant plantaire et autres lésions du pied, rétinopathie ou atteintes cardiovasculaires.

B Dépistage par la glycémie veineuse à jeun
Quand doit-il être réalisé ?

La situation de dépistage (sujet asymptomatique) doit bien être distinguée de la situation de suspicion diagnostique (sujet avec symptôme). Une recommandation ANAES de 2003 reste active pour fixer le cadre du dépistage par la seule glycémie à jeun chez les sujets concernés :

*tous les sujets présentant des signes cliniques évocateurs de diabète;
*tous les sujets âgés de plus de 45 ans : à répéter tous les 3 ans en l’absence de facteur de risque de diabète, plus précocement en cas d’apparition d’un facteur de risque, le risque de développer un diabète de type 2 augmentant avec l’âge;
*les patients qui présentent un ou plusieurs facteurs de risque (à répéter tous les ans en cas de bilan normal).
Le dépistage est proposé dans les cas suivants :

*origine non caucasienne et/ou migrant;
*situation de précarité;
*marqueurs du syndrome métabolique :
–excès pondéral mesuré à partir de l’IMC, défini comme > 28 kg/m2;
–hypertension artérielle (PAS ≥ 140 mmHg et/ou PAD ≥ 90 mmHg et/ou HTA traitée);
–HDL-cholestérol < 0,35 g/l (0,9 mmol/l) et/ou triglycérides > 2 g/l (2,3 mmol/l) et/ou dyslipidémie traitée;
*antécédents de :
–diabète familial (du premier degré);
–diabète gestationnel ou enfant de poids de naissance de plus de 4 kg;
–diabète temporairement induit;
–maladie vasculaire ou rénale.

A
330
Q

Diabète de type 1 lent (LADA)
Ce diabète est généralement caractérisé par l’absence de surpoids, l’absence d’antécédents familiaux de diabète de type 2 et par la présence d’autoanticorps anti-IA2 et/ou anti-GAD.Diabètes secondaires
Il s’agit des diabètes secondaires à des pancréatopathies (pancréatite chronique calcifiante notamment), à l’hémochromatose et à la mucoviscidose, aux causes médicamenteuses et aux endocrinopathies (voir tableau 18.2).

A
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Q

Évolution
L’insulinopénie tend à s’aggraver avec le temps, pouvant justifier le recours à un traitement par insuline. Cette dégradation est souvent accentuée par les mécanismes de glucotoxicité et lipotoxicité (comme décrit dans la fig. 18.8).lorsque le diabète est mal contrôlé. (Source : CEEDMM, 2021.)
Le pronostic de la maladie dépend de la survenue de complications, elles-mêmes favorisées par un équilibre glycémique insuffisant, mais également par l’existence de facteurs de risque cardiovasculaire non contrôlés (HTA, dyslipidémie). Les différentes complications font l’objet d’une section spécifique (voir plus loin).

A
332
Q

Traitement
A Principes généraux (+++)

Les objectifs du traitement sont :

*le contrôle glycémique optimal impliquant de fixer un objectif d’HbA1c individualisé (personnalisation des objectifs glycémiques);
*l’amélioration de la sensibilité à l’insuline en limitant en particulier la glucotoxicité et la lipotoxicité;
*la prise en charge globale des facteurs de risque cardiovasculaire (tabac, HTA, dyslipidémie).
Les moyens de traitement sont :

*l’activité physique;
*l’équilibre nutritionnel : limiter les sucres d’absorption rapide et les aliments à index glycémique élevé, contrôler les apports lipidiques et la consommation de boissons alcoolisées;
*la réduction des apports caloriques en cas de surcharge pondérale;
*les traitements oraux (tableau 18.7, fig. 18.9);
Tableau 18.7

Caractéristiques, intérêts et effets métaboliques des antidiabétiques oraux.

Metformine	Sulfamides	Glinides	Inhibiteurs de la DPP-4 (gliptines)	Inhibiteurs de l'α-glucosidase	Inhibiteurs de SGLT2 Intérêt	 –Efficacité sur l'insulinorésistance –Absence de prise de poids –Médicament de première intention en l'absence de contre-indications Efficacité sur l'insulinosécrétion	 –Efficacité sur l'insulinosécrétion –Utilisable chez le sujet âgé jusqu'à 75 ans –Pas de contre-indication rénale (extension d'AMM dans l'insuffisance rénale même sévère) –Durée d'action courte : absence de prise du cp si pas de prise alimentaire –Absence d'hypoglycémie –Utilisable chez le sujet âgé –Amélioration des glycémies postprandiales –Absence de prise de poids –Utilisables dans l'insuffisance rénale –Utilisable chez le sujet âgé –Utilisable en cas d'insuffisance rénale (clairance > 25 ml/min) –Utilisable en cas d'insuffisance hépatique –Protection cardiaque et rénale (intérêt majeur chez le patient avec cardiopathie, en particulier insuffisance cardiaque et/ou néphropathie) –Perte de poids –Effet diurétique Effets métaboliques attendus (baisse HbA1c)	0,5-1 % HbA1c	0,5-1 % HbA1c	0,5-1 % HbA1c	0,5-1 % HbA1c	0,5-1 % HbA1c	0,5-1 % HbA1c Principal mode d'action	Réduction de l'insulinorésistance, surtout au niveau hépatique	Stimulent l'insulinosécrétion	 –Stimulent l'insulinosécrétion –Durée d'action courte qui « couvre le repas » –Inhibition de l'activité de la DPP-4, enzyme détruisant le GLP-1 –Augmentation de l'insulinosécrétion en fonction de la glycémie –Diminution des glycémies postprandiales –Empêchent l'hydrolyse des glucides complexes (amidon) –Retardent l'absorption du glucose –Atténuent le pic postprandial (20 %) –Glucosurie (80 g par jour chez les sujets sains) par inhibition de la réabsorption tubulaire rénale du glucose et du sodium –Natriurèse –Favorisent la cétogenèse Effets secondaires	 –Digestifs : douleurs abdominales, diarrhée ; fréquents et souvent transitoires ; à prendre au milieu ou en fin de repas –Pas de risque d'hypoglycémie, sauf si alcool –Acidose lactique : risque nul si respect des contre-indications –Risque d'hypoglycémie surtout par dosage inadapté aux besoins et interaction médicamenteuse –Allergie –Risque d'hypoglycémie moindre et durée plus courte qu'avec les sulfamides –Absence d'allergie croisée avec les sulfamides –Infection ORL –Allergie Troubles digestifs : flatulences, diarrhées augmentation progressive de la posologie	 –Acidocétose rare –Infections génitales –Risque de déshydratation et d'hypovolémie –Gangrène de Fournier, rare mais grave –Possible effet défavorable en situation d'ischémie critique des membres inférieurs (rares amputations distales) Contre-indications	 –Pathologie aiguë –Insuffisance rénale (demi-dose pour DFG entre 30 et 60 ml/min, arrêt si DFG < 30 ml/min) –Insuffisance hépatique –Hypoxie tissulaire, insuffisance cardiaque (mais cette restriction tend à disparaître elle aussi) –Insuffisance respiratoire –Grossesse et allaitement –Insuffisance hépatique sévère –Insuffisance rénale sévère –Allergie aux sulfamides –Association avec le myconazole –Grossesse –Allaitement –Insuffisance hépatique –Insuffisance rénale sévère ou modérée –Insuffisance hépatique (taux d'ASAT ou ALAT 3 fois la normale) : surveillance tous les 3 mois la 1re année –Insuffisance cardiaque Maladies digestives	 –Insuffisance rénale sévère * (DFG < 25 ml/min) –Insuffisance hépatique sévère Bénéfices démontrés au-delà du contrôle de la glycémie						 –Réduction du risque d'événements cardiovasculaires majeurs chez les patients en prévention secondaire ou à haut risque cardiovasculaire –Réduction du risque d'hospitalisation pour insuffisance cardiaque –Ralentissement de la progression de la maladie rénale chroniqueles agonistes du récepteur du GLP-1 (glucagon-like peptide-1) (tableau 18.8); Tableau 18.8

Agonistes du récepteur du GLP-1 (ou analogues du GLP-1)*.

Administration Par voie sous-cutanée (excepté forme orale du sémaglutide)
Mode d’action
–Augmentation de la sécrétion d’insuline liée à l’hyperglycémie
–Réduction de la sécrétion de glucagon
–Ralentissement de la vidange gastrique (variable en fonction des molécules)
–Renforcement de la satiété, diminution des prises alimentaires (variable en fonction des molécules)
Intérêt
–Amélioration des glycémies pré- et postprandiales
–Absence d’hypoglycémie
–Perte de poids
–Amélioration des dyslipidémies, de l’HTA et de la stéatose
–Bénéfice cardiovasculaire démontré chez les patients en prévention secondaire ou à haut risque cardiovasculaire
Effets secondaires
–Digestifs : nausées, vomissements, diarrhées
–Rares cas d’insuffisance rénale
Contre-indications
–Gastroparésie
–Antécédents de pancréatopathie
–Absence d’expérience chez l’enfant
Effets métaboliques attendus
–Diminution de 1 % à 1,5 % de l’HbA1*les futurs double (GLP-1 et GIP) et triple agonistes (GLP-1, GIP, glucagon) injectables ayant une action similaire aux agonistes du GLP1, mais avec des amplitudes d’effets glycémique et pondéral bien plus importantes (diminution de 2 % à 2,5 % d’HbA1c et perte de 10 % à 15 % du poids corporel)
*l’insuline.On notera aussi la publication au 1er juin 2024 du document de la HAS intitulé « Stratégie thérapeutique du patient vivant avec un diabète de type 2 », qui fixe les situations suivantes :

*le repérage, le diagnostic et la prise en charge initiale;
*la prescription et les conseils d’une activité physique adaptée;
*la prescription et les conseils diététiques adaptés;
*l’initiation d’un traitement par insuline;
*la découverte d’une complication;
*le dépistage et la prise en charge du diabète gestationnel.

A
333
Q

Surveillance glycémique
1 Surveillance de l’HbA1cLes objectifs d’HbA1c sont modulés selon le profil clinique du patient tenant en particulier compte de l’âge (et du niveau de fragilité), de la durée du diabète, des événements cardiovasculares et du degré de fonction rénale (tableau 18.9; HAS, 2024).

Tableau 18.9

Personnalisation de l’objectif d’HbA1c des sujets diabétiques de type 2 (HAS, 2024)

Profil du patient HbA1c cible
Cas général La plupart des patients avec diabète de type 2 ≤ 7 %
Diabète de type 2 nouvellement diagnostiqué, dont l’espérance de vie est > 15 ans et sans antécédent cardiovasculaire
≤ 6,5 %
À condition que cet objectif soit atteignable grâce aux modifications thérapeutiques du mode de vie et/ou à des traitements ne provoquant pas d’hypoglycémie
Diabète de type 2 :
–avec comorbidité grave avérée et/ou une espérance de vie limitée (< 5 ans)
–ou avec des complications macrovasculaires évoluées
–ou ayant une longue durée d’évolution du diabète (> 10 ans) et pour lesquels la cible de 7 % s’avère difficile à atteindre car l’intensification médicamenteuse provoque des hypoglycémies sévères
≤ 8 %
En restant au-dessus de 7 % en cas de traitement par sulfamide hypoglycémiant, glinide ou insuline
Personnes âgées Dites « vigoureuses » dont l’espérance de vie est jugée satisfaisante ≤ 7 %
Dites « fragiles », à l’état de santé intermédiaire et à risque de basculer dans la catégorie des malades
≤ 8 %
En restant au-dessus de 7 %, en cas de traitement par SU, glinide ou insuline
Dites « malades », dépendantes, en mauvais état de santé en raison d’une polypathologie chronique évoluée génératrice de handicaps et d’un isolement social
< 9 % et/ou glycémies capillaires préprandiales entre 1 et 2 g/l
En restant au-dessus de 7,5 % avec des glycémies préprandiales > 1,40 g/l en cas de traitement par SU, glinide ou insuline
Patients avec antécédents cardiovasculaires Patients avec antécédents de complication macrovasculaire considérée comme non évoluée ≤ 7 %
Patients avec antécédents de complication macrovasculaire considérée comme évoluée :
–infarctus du myocarde avec insuffisance cardiaque
–atteinte coronarienne sévère (tronc commun ou atteinte tritronculaire ou atteinte de l’interventriculaire antérieur proximale)
–atteinte polyartérielle (au moins deux territoires artériels symptomatiques)
–artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI) symptomatique
–accident vasculaire cérébral récent (< 6 mois)
≤ 8 %
En restant au-dessus de 7 %, en cas de traitement par SU, glinide ou insuline
Patients avec insuffisance rénale chronique IRC modérée (stades 3A et 3B) ≤ 7 %
IRC sévère ou terminale (stades 4 et 5)*
≤ 8 %
En restant au-dessus de 7 %, en cas de traitement par SU, glinide ou insuline
Patientes enceintes ou envisageant de l’être Avant d’envisager la grossesse ≤ 6,5 %
Durant la grossesse ≤ 6,5 % et glycémies < 0,95 g/l à jeun et < 1,20 g/l en postprandial à 2 heures

A
334
Q

Autosurveillance glycémique
Traitement oral
L’autosurveillance glycémique n’est pas systématique : elle est nécessaire en cas de pathologie déséquilibrant le diabète ou de modification du traitement du diabète.

L’assurance maladie a introduit la notion de 200 bandelettes réactives remboursées par an pour les sujets diabétiques qui ne reçoivent pas d’insuline, avec une possibilité de dépasser ce nombre pour les sujets recevant des traitements susceptibles de provoquer des hypoglycémies.

L’autosurveillance glycémique est un outil précieux d’éducation :

*pour sensibiliser le patient à l’intérêt de la diététique et de l’exercice physique régulier;
*pour déterminer la posologie d’un sulfamide hypoglycémiant au début ou lors d’un changement d’hypoglycémiant, ou après ajout d’un traitement pouvant modifier l’insulinosécrétion ou l’insulinosensibilité (inhibiteur de l’enzyme de conversion, par exemple);
*lors d’une maladie intercurrente ou de la prescription d’un médicament diabétogène.
Le protocole d’autosurveillance glycémique est le plus souvent d’une à trois glycémies hebdomadaires selon un rythme qui pourrait être, par exemple, à jeun au réveil, à 12 heures avant le déjeuner et à 17 heures, en cas de traitement par sulfamides hypoglycémiants.

Diabète insulino-traité
L’autosurveillance glycémique est nécessaire pour l’adaptation des doses d’insuline. Il faut au minimum autant de contrôles capillaires que d’injections. Pour le diabète de type 2, l’utilisation d’un dispositif de mesure continue du glucose est réservée aux patients traités par insuline (insuline basale, multi-injections ou pompe à insuline).

Ce que le patient doit savoir

La surveillance glycémique

–HbA1c : fraction de l’hémoglobine susceptible de se glyquer de façon stable; elle permet d’estimer l’équilibre glycémique des 2 à 3 mois précédant le prélèvement.
–Dosage à faire tous les 3 à 4 mois.
–Objectif d’HbA1c défini pour chaque patient : objectif dont le patient doit être informé.
–L’absence d’hypoglycémie est également un critère d’équilibre du diabète.
–Comme pour les patients atteints de DT1, le suivi des patients atteints de DT2 et équipés d’un capteur peut faire appel aux critères CGM en complément de l’HbA1c.

A
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Q

Prise en charge thérapeutique (+++)
Première étape – règles hygiéno-diététiques
Activité physique
L’activité physique peut nécessiter au préalable une évaluation cardiologique et podologique. Un référentiel de la Société francophone du diabète (SFD) publié en 2013 fait le point sur cette question de façon exhaustive.

Intérêt de l’exercice physique régulier

Les intérêts sont nombreux :

*diminution de l’incidence du diabète de type 2 dans une population à risque;
*amélioration de la sensibilité à l’insuline et des paramètres métaboliques (durée d’action brève, de 24 à 30 heures);
*amélioration des chiffres tensionnels à l’effort;
*augmentation de la masse maigre et diminution de la masse grasse, sans modification pondérale notable en l’absence de contrôle alimentaire associé.
Type d’exercice physique

On conseille de combiner des exercices d’endurance (marche, vélo ou natation) et des exercices de résistance (renforcement musculaire).

Les exercices d’endurance sont assez simples à mettre en œuvre. Leur intensité doit être adaptée :

*exercice d’intensité modérée (40 à 60 % VO2max ou 3 à 6 MET) et de longue durée (≥ 30 minutes);
*exercice intense (> 60 % VO2max ou > 6 MET, le patient transpire et a une accélération franche de la fréquence respiratoire). Ces séances peuvent être ajoutées à l’exercice modéré avec des durées plus courtes (3 sessions de 20 minutes à forte intensité au lieu de 5 sessions de 30 minutes d’intensité modérée).
Un début progressif peut bénéficier de l’aide de professionnels de sport et santé.

Il est important de profiter des actes de la vie courante, incluant les périodes de loisirs et d’activité professionnelle, pour majorer le niveau global d’activité physique.

A

Durée de l’exercice physique

Au moins 30 minutes par jour, par tranches d’au moins 10 minutes. Insister sur la lutte contre les comportements sédentaires et favoriser les déplacements à pied ou à vélo; la montée des escaliers peut constituer une activité physique urbaine.

L’objectif est d’obtenir au minimum 150 minutes par semaine (3 à 5 sessions) et au moins 3 séances par semaine et pas plus de 2 jours sans activité physique.

Contre-indications

Les contre-indications sont les suivantes :

*insuffisance coronarienne non stabilisée;
*rétinopathie diabétique proliférante non stabilisée; une rétinopathie stable ne doit pas conduire à l’éviction de l’activité.
Surveillance

En cas de risque d’hypoglycémie iatrogène, l’autosurveillance glycémique doit être instaurée ou renforcée, avec des mesures avant et après l’activité consignées sur un carnet de surveillance, en particulier dans la période de reprise d’activité, ou à l’occasion de séances d’intensité ou de durée inhabituelles. Le bénéfice glycémique de l’activité, notamment d’endurance, est marqué notamment en période postprandiale.

Il faut également surveiller l’état des pieds, avant et après exercice, et s’assurer que l’équipement est adapté (notamment le chaussage).

La prescription de l’exercice physique est un acte médical nécessitant une évaluation des risques du patient et de ses capacités.

Ce que le patient doit connaître

Activité physique

– L’effet bénéfique de l’exercice physique.

–L’amélioration de la masse musculaire.
–L’intérêt des activités quotidiennes : ménage, bricolage, jardinage, économiser sa voiture, monter les escaliers à pied, etc.
–La progression de la durée et de l’intensité des séances d’activité physique qui doivent être adaptées aux caractéristiques de chaque individu, selon l’avis médical

336
Q

limentation
On rappellera ici les éléments issus du référentiel 2014 de la SFD consacré à la nutrition : régime diabétique hypocalorique (si excès pondéral), équilibré, sans sucres d’absorption rapide. Les objectifs sont la perte de 5 % à 10 % du poids au diagnostic de la maladie en cas de surcharge pondérale, et la correction, avant tout, des désordres nutritionnels et des troubles du comportement alimentaire (grignotages).

Prescription diététique

La prescription diététique doit tenir compte :

*du poids du sujet;
*de son activité physique;
*de ses habitudes alimentaires;
*de ses interdits éventuels (+);
*de ses coutumes ethniques (+);
*de ses contraintes professionnelles (+).
Principes généraux

Apport calorique adapté au poids et au niveau d’activité physique.

La répartition est la suivante, à raison de trois repas journaliers :

*glucides : 50 % à 55 % (moins en cas d’hypertriglycéridémie ou d’obésité morbide);
*lipides : 30 % à 35 %;
*protides : 15 % à 20 %, représentant 1 g/kg de poids corporel par jour.
Particularités des glucides

Il s’agit de limiter les sucres purs, mais sans les « diaboliser » : sucre, bonbons, miel, confiture, boissons sucrées.

Les glucides doivent être pris au sein d’un repas mixte (la consommation de légumes et de féculents permet une meilleure absorption des glucides et abaisse le pic glycémique postprandial) et les aliments à index glycémique bas seront privilégiés (pâtes, légumes secs, céréales, pain complet, etc.).

À titre d’exemple, 100 g de féculents cuits (soit 20 g de glucides) sont l’équivalent de :

–100 g de pommes de terre, pâtes, riz, semoule cuits;
–60 g de légumes secs (lentilles, haricots blancs);
–40 g de pain;
–30 g de farine ou de céréales.
Autre exemple, un fruit de 150 g (soit 15 g de glucides) correspond à :

–1 pomme, orange, poire, pêche ou brugnon;
–½ pamplemousse;
–2 clémentines;
–3 abricots;
–4 prunes;
–½ banane;
–250 g de fraises, framboises ou groseilles;
–100 g de raisins;
–12 cerises.

A
337
Q

ommeil
La quantité de sommeil (de 6 à 8 heures par nuit), ainsi que sa qualité (perturbée par exemple chez les sujets présentant un syndrome d’apnée du sommeil) sont des éléments associés à l’équilibre glycémique et font partie intégrante des mesures d’hygiène de vie à travailler avec le patient. De plus, le chronotype du patient est également un paramètre d’intérêt, les sujets « night owl » (se couchant tard le soir) étant plus à risque d’inactivité physique et de moins bon contrôle métabolique que les sujets « early bird » (se levant tôt le matin).

A
338
Q

Deuxième étape – Règles hygiéno-diététiques associées au traitement médicamenteux
Antidiabétiques oraux
Leurs principales caractéristiques sont regroupées dans le tableau 18.7. Leurs spécificités et leur positionnement dans la stratégie de prise en charge médicamenteuse du diabète de type 2 sont abordés de façon plus détaillée dans la prise de position de la SFD (2023), dont on reprend ici les points essentiels (HAS, 2024) (Figure 18.10).Lorsque l’HbA1c est > 10 % au diagnostic, si les arguments cliniques sont en faveur d’un diabète de type 2 (en particulier absence de cétose), une insulinothérapie peut être proposée d’emblée, éventuellement transitoire.

Lorsque l’objectif d’HbA1c n’est pas atteint malgré les modifications du mode de vie, on proposera en première intention un traitement par metformine, à doses progressives jusqu’à la dose maximale tolérée, fractionnée en deux ou trois prises.

Lorsque l’objectif d’HbA1c n’est pas atteint sous metformine chez un patient diabétique de type 2, l’ensemble des autres classes pharmacologiques (SU, iDDP4, iSGLT2, agonistes des récepteurs au GLP1 [AR GLP-1] ou double AR GLP1/GIP) sont possibles. Le choix doit se faire en fonction du profil des patients et des bénéfices et risques de chaque traitement. Les critères à prendre en compte dans ce choix vont être notamment le risque hypoglycémique, le niveau d’HbA1c, l’IMC, le risque cardiovasculaire et l’atteinte rénale. Certaines situations préférentielles de choix de deuxième ligne sont détaillées ci-dessous.

Situation commune

Chez les patients en situation dite « commune » (c’est-à-dire âgés de moins de 75 ans, ne présentant ni maladie athéromateuse avérée, ni insuffisance cardiaque, ni maladie rénale chronique), lorsque l’objectif d’HbA1c n’est pas atteint sous metformine en monothérapie, trois options préférentielles se dégagent et seront discutées avec le patient dans le cadre de la décision médicale partagée : l’ajout d’un iSGLT2; l’ajout d’un AR GLP-1 ou d’un AR GIP/GLP-1* (* le premier représentant de cette classe est le tirzépatide, non commercialisé en France à ce jour); l’ajout d’un iDPP4. Chez un patient en situation « commune », la bithérapie metformine + SU est possible mais n’est pas un choix privilégié à ce stade (risque d’hypoglycémie et de prise de poids, sécurité cardiovasculaire moins bien établie que celle des iDPP4, iSGLT2 et AR GLP-1), etc.

Sujet en situation de surpoids ou d’obésité

Chez les patients en surpoids ou, a fortiori, une obésité, le choix se porte plus volontiers vers un iSGLT2, un AR GLP-1 ou un AR GIP/GLP-1* compte tenu de l’efficacité de ces classes thérapeutiques (par ordre croissant de puissance) sur la perte de poids; lorsque le taux d’HbA1c est éloigné de l’objectif individualisé (au-delà de 1 % de la cible), le choix se porte plus volontiers vers un AR GLP-1 ou un AR GIP/GLP-1* compte tenu de la supériorité de ces deux classes thérapeutiques sur l’équilibre glycémique versus iSGLT2 et iDPP4.

Sujet âgé

Chez le sujet âgé, il est nécessaire de limiter le risque de iatrogénie et particulièrement le risque hypoglycémique. Les classes à privilégiées sont dans ce cas les iDPP4 et les iSGLT2 au vu de leur bonne tolérance. Les AR GLP1 sont à éviter chez les sujets âgés à risque de dénutrition. Cependant, le choix va être modulé selon le profil du patient, notamment de son niveau de fragilité.

Maladie athéromateuse avérée, maladie rénale chronique, insuffisance cardiaque

Le choix d’un iSGLT2 ou d’un AR GLP-1 s’impose chez les patients présentant une maladie cardiovasculaire avérée, une insuffisance cardiaque et/ou une maladie rénale chronique, en choisissant alors une molécule ayant fait la preuve de son bénéfice. L’AR GLP1 est privilégié en cas de maladie athéromateuse avérée et l’iSGLT2 chez le patient avec insuffisance cardiaque ou maladie rénale chronique.

Le choix thérapeutique au-delà de la bithérapie relève d’une discussion avec le spécialiste. Il peut être fait appel à l’un des médicaments non prescrits en bithérapie ou à un traitement par insuline, alors généralement débuté sans arrêt des antidiabétiques oraux sous la forme d’une injection quotidienne unique.

A
339
Q

Insulinothérapie
Quand ?

Plusieurs éléments entrent en jeu pour déterminer la mise en place d’une insulinothérapie :

*signes de carence en insuline (amaigrissement, asthénie, amyotrophie, cétose éventuelle) qui s’associent généralement au syndrome polyuro-polydipsique;
*après avoir vérifié l’observance thérapeutique du patient et l’absence de facteurs de décompensation glycémique transitoire (corticothérapie, etc.);
*lorsque l’HbA1c reste supérieure aux objectifs fixés avec le patient, notamment sous antidiabétiques oraux ou sous antidiabétiques oraux associés à un agoniste du récepteur du GLP-1;
*contre-indications ou intolérance aux antidiabétiques oraux ou aux agonistes du récepteur du GLP-1;
*dans certaines situations transitoires telles que des affections intercurrentes (plaie de pied, chirurgie, après un accident coronarien, grossesse, etc.).
Comment ?

Insulinothérapie combinée avec des hypoglycémiants oraux

Initialement, cette insulinothérapie consiste le plus souvent en une injection d’insuline intermédiaire ou lente combinée avec des hypoglycémiants oraux. Ce schéma d’insulinothérapie est en général proposé lorsque l’insulinopénie n’est encore que partielle.

La metformine doit être systématiquement maintenue, dans le respect de ses contre-indications, la poursuite des autres antidiabétiques oraux n’étant pas obligatoire et donc discutée en fonction du profil clinique.

La procédure est la suivante :

*commencer par une injection d’analogue lent (insulines glargine, détémir, dégludec);
*débuter par 0,2 U/kg de poids par jour, en adaptant progressivement la dose selon la glycémie capillaire à jeun (dose moyenne de 40 U par jour ou 0,45 U/kg et objectif glycémique habituel au réveil < 1,10 g/l, à adapter au profil du patient).
Les intérêts d’une insulinothérapie basale combinée avec un traitement oral sont les suivants :

*simplicité de l’adaptation de la dose d’insuline sur la glycémie du matin au réveil;
*nécessité d’une insulinosécrétion résiduelle (ne convient bien sûr pas au diabète de type 1, par exemple).
Insulinothérapie exclusive

A
340
Q

Chirurgie bariatrique
Un patient présentant un diabète de type 2 dans un contexte d’obésité peut être éligible à la chirurgie bariatrique si son IMC est supérieur à 35 kg/m2.

Bien que ces procédures chirurgicales comportent plus de risques chez les diabétiques, la réduction pondérale – et, au-delà de celle-ci, probablement des mécanismes additionnels liés à des modifications des sécrétions endocrines du tube digestif et du microbiote intestinal – s’accompagne souvent d’une amélioration rapide voire d’une rémission du diabète de type 2, mais la réapparition du diabète est fréquente à distance de la chirurgie. D’autres facteurs de risque cardiovasculaire peuvent aussi s’améliorer, comme la dyslipidémie et l’hypertension, ainsi que le syndrome d’apnées du sommeil. Cependant, le rapport bénéfice/risque à long terme est toujours en cours d’évaluation. Plus encore qu’en l’absence de diabète, cette option thérapeutique doit faire l’objet d’une évaluation préopératoire multidisciplinaire rigoureuse et d’un suivi prolongé.

Concernant les patients vivant avec un diabète de type 2 en situation d’obésité de grade 1 (IMC 30,0-34,9 kg/m2), la HAS a publié en octobre 2022 un rapport d’évaluation intitulé « Chirurgie métabolique : traitement chirurgical du diabète de type 2 » et propose la chirurgie bariatrique, dénommée dans ce cas précis chirurgie métabolique, « aux patients porteurs d’un diabète de type 2 qui présentent une obésité de grade 1 lorsque les objectifs glycémiques individualisés ne sont pas atteints, malgré une prise en charge médicale notamment diabétologique et nutritionnelle, incluant aussi une activité physique adaptée, bien conduite, selon les recommandations de bonne pratique actuelles, pendant au moins 12 mois, la décision est prise avec le patient et après discussion en réunion de concertation pluridisciplinaire avec un diabétologue ». Aucune étude randomisée dédiée à ces patients n’ayant été réalisée à ce jour, cet avis repose sur l’analyse en sous-groupes de cinq études qui ne concerne que 80 personnes. Par conséquent, ni le bénéfice sur les complications micro- et macrovasculaires, ni les risques à moyen et long terme de la chirurgie métabolique n’ont été analysés chez les sujets avec obésité de grade 1. Le recours à la chirurgie métabolique doit donc être discuté au cas par cas après échec d’une prise en charge médicale bien conduite d’au moins 12 mois, avec avis diabétologique et optimisation des traitements, notamment par analogue du GLP-1 ou double agoniste GIP/GLP-1.

A
341
Q

Ce que le patient doit connaître

Traitement du diabète de type 2

La prise en charge est multifactorielle.

Le patient doit connaître ses objectifs thérapeutiques personnalisés :

–pondéral;
–glycémiques (HbA1c);
–lipidiques;
–tensionnels.
Il doit connaître les moyens utilisés :

–sevrage tabagique;
–activité physique;
–intervention nutritionnelle;
–traitement médicamenteux;
–nécessité d’une bonne observance thérapeutique.
Il peut être informé de la nécessité éventuelle d’utiliser de l’insuline au cours de l’évolution naturelle de la maladie, en fonction de l’évolution progressive de l’insulinopénie.

A
342
Q

Points clés

*Le diabète de type 2 représente la cause la plus fréquente d’hyperglycémie chronique.
* La physiopathologie associe des anomalies de l’insulinosécrétion et de l’insulinosensibilité.
* Les objectifs thérapeutiques concernent le contrôle glycémique (HbA1c < 6,5 % au début de la maladie puis 7 %, à personnaliser) mais également le contrôle tensionnel, lipidique et pondéral (objectifs individualisés à communiquer au patient); le diabète de type 2 nécessite une prise en charge globale de la pathologie et de ses complications.
*À long terme, l’objectif est de limiter la survenue et la progression des complications qui représentent l’enjeu de cette pathologie chronique.
*Le traitement repose sur un trépied thérapeutique : changements alimentaires, activité physique régulière et intervention médicamenteuse (antidiabétiques oraux, agonistes du récepteur du GLP-1 et/ou insuline).
*L’évolution naturelle de la maladie peut se faire vers une insulinopénie marquée, qui nécessitera à moyen ou long terme le recours à une insulinothérapie.

A
343
Q

Complications chroniques et aiguës du diabète
L’atteinte vasculaire au cours du diabète concerne l’intégralité des vaisseaux de l’organisme, quels que soient leur taille et les tissus qu’ils irriguent. Cette souffrance a parfois une traduction clinique. On distingue classiquement :

*les complications microangiopathiques : rein, œil, et nerf;
*les complications macroangiopathiques : atteinte athéromateuse accélérée des gros vaisseaux (coronaires, artères carotides ou intracérébrales et artères périphériques des membres inférieurs) non spécifique du diabète, mais qui présentent certaines spécificités chez le sujet diabétique. La présence d’un diabète augmente considérablement plus le risque d’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (augmentation de 6 à 10 fois), que celui de coronaropathie (augmentation de 2 à 4 fois) ou d’accident vasculaire cérébral ischémique (2 fois).
L’hyperglycémie chronique est la force motrice de ces complications, de façon majeure pour les complications microangiopathiques et de façon importante, au même titre que l’HTA, la dyslipidémie ou le tabagisme, pour les complications macroangiopathiques (+++).

La prévention et la prise en charge des complications du diabète de type 2 intéressent les médecins généralistes en premier lieu, mais il faut rappeler que l’avis du diabétologue est recommandé en cas de complications du diabète (« Guide Parcours de soins », HAS, 2024).

A
344
Q

Rétinopathie diabétique
La rétinopathie diabétique (RD) est essentiellement spécifique du diabète : la définition du diabète repose sur la mesure du risque de voir apparaître une rétinopathie à long terme. C’est une complication chronique de l’hyperglycémie; elle n’est jamais présente au début du diabète de type 1. Sa présence au moment du diagnostic du diabète de type 2 est le témoin du retard au diagnostic de diabète, marqué par des années d’hyperglycémie modérée et ignorée. C’est la complication dont on peut éviter les conséquences cliniques graves (cécité) dans presque tous les cas :

*examen ophtalmologique au diagnostic et surveillance annuelle dans le cas général;
*optimisation du contrôle glycémique et lutte contre l’HTA;
*traitement par laser (photocoagulation) si rétinopathie proliférante ou préproliférante sévère;
*laser et/ou injections intravitréennes d’anti-VEGF dans la maculopathie œdémateuse.

A
345
Q

Facteurs de risque de rétinopathie.

Facteurs modifiables Facteurs non modifiables Situations à risque
–Contrôle glycémique (+++)
–Pression artérielle (++)
–Tabac
–Dyslipidémie
–Protéinurie
–Durée de diabète (+++)
–Âge
–Prédisposition génétique
–Puberté
–Grossesse
–Amélioration rapide des glycémies après une longue période de mauvais contrôle Physiopathologie
L’atteinte de la microcirculation rétinienne peut prendre deux formes différentes (fig. 18.13) :*une voie va conduire à l’occlusion des capillaires rétiniens avec, en conséquence, une ischémie de la rétine et la sécrétion de facteurs proangiogéniques, au premier rang desquels le VEGF, avec développement anarchique de néovaisseaux prérétiniens;
*une seconde voie, plus fréquemment dans le diabète de type 2, consiste en une altération de la perméabilité des capillaires, qui aboutit à un œdème de la rétine, dangereux lorsqu’il se situe au niveau de la macula, siège de la vision fine.

A
346
Q

C Dépistage et surveillance
1 Dépistage
Le dépistage de la RD doit concerner tous les diabétiques. Un large consensus existe pour recommander une surveillance annuelle du fond d’œil de tout patient diabétique, de préférence par photographie du fond d’œil, à défaut par l’examen du fond d’œil au biomicroscope (lampe à fente) après dilatation pupillaire. Il faut noter que les rétinophotographies peuvent maintenant être analysées par l’intelligence artificielle avec une sensibilité et une spécificité proches de 100 %. Les examens peuvent être espacés tous les 2 ans en l’absence de RD, chez les patients non insulino-traités, équilibrés pour l’HbA1c et la pression artérielle.

Chez un diabétique de type 1, le début du diabète est connu avec précision. La RD ne survient en général pas avant 5 ans d’évolution pour un diabète apparu chez l’enfant, et pas avant 3 ans d’évolution pour un diabète découvert à l’âge adulte. Un examen du fond d’œil par photographies du fond d’œil est cependant réalisé à la découverte du diabète – il servira d’examen de référence –, puis de façon annuelle. Chez les enfants, il n’est pas nécessaire que le premier examen ophtalmologique soit réalisé avant l’âge de 10 ans.

Chez un diabétique de type 2, le dépistage de la RD doit être réalisé dès la découverte du diabète. Une RD est présente dans 20 % des cas dès la découverte du diabète de type 2.

A
347
Q

Situations à risque d’évolution rapide
La surveillance doit être renforcée, quel que soit le stade de la rétinopathie, même minime, lorsqu’il existe un risque d’évolution rapide de la RD dans les situations suivantes :

*au cours de la puberté et de l’adolescence : c’est une période à haut risque d’évolution, particulièrement entre 16 et 20 ans, surtout si le diabète est instable;
*lors de la grossesse, qui est une situation à risque d’aggravation de la rétinopathie, avec parfois des rétinopathies proliférantes florides nécessitant un traitement par laser en urgence. La surveillance est nécessaire avant la grossesse et une fois celle-ci débutée, tous les 3 mois;
*lors de l’amélioration rapide d’une HbA1c particulièrement élevée (> 10 %), à la faveur de l’initiation d’un traitement par système de boucle fermée hybride par exemple. Il reste cependant démontré qu’à long terme un meilleur équilibre glycémique est associé à une réduction des complications micro-angiopathiques.

A
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Q

Classification de la rétinopathie.

Classification Signes au fond d’œil Risque de progression vers RDP à 5 ans Rythme de surveillance Traitement par laser
Pas de rétinopathie
RD non proliférante RDNP minime Microanévrismes 15 % 1-2 ans selon HbA1c et PA Non
RDNP modérée Exsudats, hémorragies 33 % Annuel Non
RDNP sévère (préproliférante) Modifications veineuses, hémorragies étendues 60 % 3-4 mois Oui
RD proliférante RDP minime Néovaisseaux 3 mois Oui
RDP modérée Oui
RDP sévère 2-3 mois Oui
RDP compliquée Hémorragie intravitréenne Décollement rétinien Glaucome néovasculaire Laser, chirurgie
Maculopathie diabétique Exsudats
Œdème maculaire non cystoïde
Œdème maculaire cystoïde
Maculopathie ischémique On distingue souvent l’atteinte de la rétine périphérique responsable de lésion de type ischémique et celle de la rétine centrale (macula) responsable de lésions œdémateuses (fig. 18.15). Causes de baisse de l’acuité visuelle liées à la rétinopathie :*développement anarchique de néovaisseaux pouvant conduire brutalement à :
–une hémorragie « intravitréenne » (appelée également prérétinienne);
–un décollement de rétine (décollement tractionnel);
–un glaucome néovasculaire;
–un œdème maculaire responsable d’une maculopathie diabétique (baisse de l’acuité visuelle lente, à la différence des causes ci-dessus).

A
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Q

Traitement
Il existe plusieurs modalités de traitement.

1 Équilibre glycémique et tensionnel (+++)
Panphotocoagulation rétinienne
Le laser réduit de plus de 50 % le risque de cécité et entraîne une régression de la néovascularisation dans 70 % à 90 % des cas.

La panphotocoagulation rétinienne est réalisée en ambulatoire, progressivement. Elle fixe la rétine et fait régresser la néovascularisation en périphérie des zones ischémiquesDans les formes sévères, florides, ou lorsque les saignements persistent, les traitements par injection intraoculaire d’inhibiteurs du VEGF ont connu un développement rapide et sont associés à une amélioration du pronostic visuel.

L’œdème maculaire pose des problèmes thérapeutiques mal résolus :

*l’équilibre de la pression artérielle est essentiel;
*les traitements par anti-VEGF sont bénéfiques chez 50 % des patients, mais leur effet est transitoire, nécessitant la répétition des injections;
*les injections intravitréennes de corticoïdes ont vu leur champ d’application se réduire avec la mise en place de protocole de traitement par anti-VEGF.

A
350
Q

Ce que le patient doit connaître

Rétinopathie

Le diabète est la première cause de cécité dans les pays industrialisés avant l’âge de 50 ans.

Rôle péjoratif :

–du mauvais équilibre glycémique;
–de l’ancienneté du diabète;
–de l’existence d’une HTA mal contrôlée.
Le diabétique doit connaître les points suivants :

–un examen ophtalmologique doit être effectué tous les ans ou tous les 2 ans, dès le diagnostic du diabète;
–une acuité visuelle normale n’élimine pas une rétinopathie.
Par ailleurs, il doit savoir que les signes suivants, baisse de l’acuité visuelle, troubles de la vision des couleurs, déformations des images et sensation de voile, sont des signes beaucoup trop tardifs.

Les troubles de la réfraction sont fréquents quand la glycémie varie rapidement de façon importante et ne doivent pas conduire à la prescription intempestive de nouvelles lunettes. Autres complications oculaires
Les autres complications oculaires rencontrées peuvent être :

*la cataracte, plus fréquente et plus précoce chez les diabétiques (+++);
*les paralysies oculomotrices, qui peuvent concerner les nerfs oculomoteurs III, IV ou VI, régressant spontanément en quelques mois; il s’agit d’une manifestation de mononeuropathie diabétique.

A
351
Q

Facteurs de risque de néphropathie :

*ancienneté du diabète (dans le diabète de type 1, jamais avant 10 ans d’évolution, rarement avant 15 ans), début du diabète dans l’enfance;
*mauvais équilibre glycémique (et tensionnel) chronique;
*cas familiaux d’insuffisance rénale, surtout si liée au diabète;
*origine : africaine subsaharienne, Antilles, île Maurice, Inde, Madagascar et Réunion, îles du Pacifique, Amérique du Sud;
*tout signe d’insulinorésistance (obésité abdominale, hypertriglycéridémie, forts besoins en insuline, etc.);
*tabagisme.

A
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Q

Dépistage (+++)
Les recommandations officielles concernant le dépistage et l’évaluation de la néphropathie diabétique sont celles de la maladie rénale chronique (MRC; HAS, 2023). Le dépistage et l’évaluation de la MRC reposent sur deux dosages biologiques simples qui doivent être réalisés au moins une fois par an chez tous les diabétiques :

*dosage de la créatininémie avec estimation du débit de filtration glomérulaire (DFG) avec l’équation CKD-EPI (HAS, 2024);
*excrétion urinaire d’albumine évaluée par le rapport albuminurie/créatininurie (RAC) sur échantillon d’urine recueilli à tout moment de la journée. Le résultat transmis précise trois possibilités :
–A1 : résultat normal (< 30 mg/g (3 mg/mmol);
–A2 : albuminurie modérément augmentée ou microalbuminurie (entre 30 et 300 mg/g ou entre 3 et 30 mg/mmol);
–A3 : albuminurie augmentée ou macroalbuminurie (> 300 mg/g ou > 30 mg/mmol).
Le résultat est considéré comme pathologique s’il est confirmé à deux reprises (un dépistage, deux confirmations). En cas de résultats pathologiques, il faut vérifier à 6 mois que le RAC régresse ou se stabilise (HAS, 2011).

Ces recommandations s’appliquent aux sujets diabétiques quel que soit le type.

Il faut garder à l’esprit les conditions favorisant un résultat faussement positif de la recherche d’albuminurie (tableau 18.12).

Tableau 18.12

Conditions physiologiques ou pathologiques augmentant le risque de faux positifs du dépistage de la microalbuminurie.

–Orthostatisme prolongé
–Activité physique intense
–Variation marquée de la pression artérielle
-Tabagisme
–Fièvre
–Poussée d’insuffisance cardiaque
–Hyperglycémie marquée
–Infection urinaire (faire une bandelette urinaire)
(Source : CEEDMM, 2021.)

Les valeurs de DFG estimé et de RAC permettent d’évaluer le stade et surtout d’évaluer le risque de progression de la MRC (tableau 18.13).

A
353
Q

Diagnostic
1 Signes cliniques
Les signes cliniques sont tardifs : HTA habituelle quand l’albuminurie est sévère (A3), œdèmes accompagnant la protéinurie quand elle est abondante, notamment dans le cadre d’un syndrome néphrotique) et quand l’insuffisance rénale s’installe (voir Items 258 et 261).

2 Signes associés
Une rétinopathie est en général présente au diagnostic de néphropathie, surtout chez le diabétique de type 1, mais cela n’est pas constant.

Chez le diabétique de type 2, qui cumule souvent les facteurs de risque, on doit facilement suspecter une sténose des artères rénales (10 % à 50 % dans le type 2, selon les séries), qui peut se manifester par une HTA résistante aux traitements et/ou une dégradation rapide de la fonction rénale, spontanément ou lors de l’introduction de bloqueurs du système rénine-angiotensine.

L’hyperkaliémie est plus fréquente chez les diabétiques, et ce à des stades plus précoces d’insuffisance rénale qu’en l’absence de diabète. Elle est favorisée par les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) et les sartans préconisés dans la néphropathie. Elle justifie des mesures de vigilance (attention à la déshydratation), des mesures diététiques et une surveillance régulière adaptée. Parfois, des chélateurs du potassium sont nécessaires

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Q

Prévention primaire
La prévention primaire (éviter l’apparition d’une albuminurie excessive et d’un déclin de la fonction rénale) repose sur l’équilibre glycémique et la maîtrise des facteurs de risque associés, en particulier de l’HTA et du tabagisme (voir Item 222, chapitre 9 et Item 224, chapitre 10).

2 Prévention dès le stade de microalbuminurie (A2)
L’essentiel repose sur :

*le contrôle de la glycémie : HbA1c < 7 % et plus bas si possible sans risque d’hypoglycémie (HAS, 2024);
*le contrôle de la pression artérielle : < 140/90 mmHg (HAS, 2023); le recours à l’automesure et à l’enregistrement ambulatoire de la pression artérielle est recommandé;
*l’utilisation d’IEC ou d’antagonistes des récepteurs de type 1 de l’angiotensine II (sartans) quel que soit le niveau tensionnel. Il faut souligner que l’association IEC + sartan a un rapport bénéfices/risques défavorable;
*les iSGLT2 en association avec les IEC ou ARA2 ont récemment démontré leur efficacité à ralentir la progression de la néphropathie diabétique dès le stade de la microalbuminurie indépendamment de leur effet glycémique. Ils sont donc indiqués en association avec les IEC ou ARA2 comme un traitement néphroprotecteur quel que soit le niveau d’HbA1c.
*la prise en charge de tous les facteurs de risque associés, dont le tabac;
*la prescription de statine, qui est systématique au vu du risque cardiovasculaire majeur associé à la MRC (HAS, 2023);
*le régime hypoprotidique : 0,8 g/kg par jour;
*des apports en sel modérés, de l’ordre de 6 g par jour.
3 Au stade de macroalbuminurie (A3)
La priorité absolue est le contrôle tensionnel : objectif général < 140/90 mmHg. On associe souvent aux bloqueurs du système rénine-angiotensine (IEC ou sartan, voir plus haut) et à l’iSGLT2 un diurétique thiazidique et également un inhibiteur calcique.

Un objectif important est de ramener le débit de protéinurie en dessous de 0,5 g par 24 heures. Vérifier à 6 mois que la microalbuminurie ou la protéinurie régresse ou se stabilise (HAS, 2024).

4 Au stade d’insuffisance rénale
Les mêmes principes s’appliquent, selon les recommandations de la HAS (2024) :

*l’objectif d’HbA1c est < 8 % si la filtration estimée est < 30 ml/min/1,73 m2;
*pour un DFG entre 30 et 60 ml/min/1,73 m2, adapter les posologies, en particulier pour la metformine qui doit être réduite à demi-dose (elle n’a pas de toxicité rénale, mais est à élimination rénale) et porter une attention particulière aux interactions médicamenteuses (adapté de l’HAS, 2024);
*à partir du stade 4 (DFG < 30 ml/min/1,73 m2), les seules classes antidiabétiques autorisées (AMM) sont l’insuline, le répaglinide, les inhibiteurs des α-glucosidases, les inhibiteurs de la DPP-4 à posologie adaptée (HAS, 2024) et certains agonistes du agonistes du récepteur du GLP-1. Les hypoglycémies sont plus fréquentes quand le stade est 3B ou plus sévère (sous insuline ou sulfamide);
*surveillance de l’équilibre glycémique par l’HbA1c : l’HbA1c est souvent un marqueur moins fiable en cas d’IRC; elle est en particulier faussement élevée en cas d’acidose, faussement diminuée en cas d’hémolyse, de carence martiale et sous traitement par érythropoïétine (EPO) (HAS, 2012);
*l’objectif cible de la pression artérielle systolique est ramené à moins de 130 mmHg pour éviter la progression des complications (HAS, 2024), toujours dans la mesure de la tolérance d’un objectif aussi bas.
Il faut aussi prendre en charge les anomalies phosphocalciques, l’anémie arégénérative (traitement par EPO) et la préparation de la suppléance rénale qui, en pratique, est nécessaire à un niveau moyen de filtration glomérulaire supérieur chez les diabétiques (vaccination VHB, fistule ou, le plus souvent possible, dialyse péritonéale) – adresser au néphrologue. La transplantation est à envisager systématiquement.

À tous les stades, mais d’autant plus que la filtration est abaissée, il faut éviter les situations à risque d’accélération de la progression de la néphropathie :

*éviter les AINS; si une cure courte d’AINS nécessaire, ne pas associer aux lEC/sartan et éviter toute déshydratation;
*limiter au strict nécessaire les injections de produits de contraste iodés, hydrater abondamment, éventuellement par voie IV en cas d’insuffisance rénale

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Recours au néphrologue

Le recours au néphrologue est conseillé dès qu’il existe un doute diagnostique sur l’origine diabétique de l’atteinte rénale, dès que le DFG est inférieur à 45 ml/min/1,73 m2 (stade 3B d’IRC), indispensable en cas d’apparition brutale d’une protéinurie chez un patient qui en était indemne jusque-là (HAS, 2024).

IEC et sartans

Se méfier d’une sténose des artères rénales : doser kaliémie et créatininémie dans la semaine qui suit l’introduction. Une baisse limitée (de l’ordre de 10 % de la filtration glomérulaire estimée) est cependant un effet normal de ces classes thérapeutiques.

L’introduction des IEC et sartans peut être à posologie croissante, mais la dose à atteindre dans la limite de la tolérance est la pleine dose (pas d’efficacité sur les critères durs dans les essais des « petites doses »).

Ce que le patient doit connaître

Néphropathie

Le diabète est la première cause d’insuffisance rénale dans les pays industrialisés.

Rôle péjoratif :

–du mauvais équilibre glycémique;
–de l’ancienneté du diabète;
–de l’existence d’une HTA;
–du tabagisme.
Le diabétique doit savoir :

–qu’un examen des urines doit être effectué tous les ans, dès le diagnostic du diabète, et que si son médecin ne le prescrit pas, il doit le lui rappeler;
–que l’atteinte rénale du diabète ne fait pas mal et qu’on urine normalement;
–qu’il n’y a pas de signe d’alerte, sauf l’analyse des urines.

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Q

Autres complications rénales, infections urinaires
Leur fréquence est multipliée par 3 à 4; 90 % des infections urinaires basses sont asymptomatiques.

*Dépistage : sur signes d’appel principalement. La bandelette urinaire peut avoir un intérêt une fois par an.
*Conséquences :
–le risque est essentiellement la contamination du haut appareil urinaire, avec :
–la pyélonéphrite, elle-même compliquée chez le diabétique;
–la nécrose papillaire (à soupçonner si l’évolution sous antibiotiques n’est pas favorable; aspect échographique évocateur);
–risque à moyen terme d’aggravation d’une néphropathie glomérulaire débutante ou avancée.
*Traitement :
–oui, selon les mêmes modalités que chez les autres patients, si l’infection urinaire est symptomatique;
–si l’infection est asymptomatique, le dogme du traitement systématique chez le diabétique est remis en question, la stérilisation des urines étant de courte durée et la fréquence ultérieure des infections, symptomatiques cette fois, n’étant pas modifiée. Il n’y a donc pas de consensus actuel.
Les récidives sont fréquentes : 70 % des cas.

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Neuropathie diabétique
On distingue :

*la polynévrite axonale ascendante, qui atteint les fibres nerveuses en fonction de leur longueur, progressant des extrémités vers les racines des membres. Elle atteint bien plus communément les sensibilités (tous modes) que la motricité;
*la neuropathie autonome, qui touche les fibres neurovégétatives;
*les atteintes monoradiculaires, touchant parfois plusieurs racines simultanément, réalisant alors une multinévrite.
Leur expression clinique et leur délai d’apparition sont différents.

A Épidémiologie
La neuropathie autonome diabétique est une complication plutôt tardive. Il est rare qu’elle précède la rétinopathie dans le diabète de type 1.

Mais la neuropathie périphérique est une complication multifactorielle (glycémie, lipides, alcool, carence en vitamine B12, en particulier chez les patients traités par metformine, etc.) et donc potentiellement précoce dans le diabète de type 2.À exposition identique à l’hyperglycémie, la présence et l’expression de la neuropathie périphérique sont très variables. Des facteurs favorisants ont été identifiés, parmi lesquels :

*une grande taille (sans doute en raison de la plus grande longueur des fibres);
*le tabagisme;
*l’âge (la fréquence est très grande au-delà de 65 ans);
*la présence d’une artériopathie des membres inférieurs;
*des carences nutritionnelles, vitaminiques;
*l’alcool;
*l’insuffisance rénale.Dépistage
Le dépistage de la neuropathie périphérique sensorimotrice repose uniquement sur l’examen clinique et l’interrogatoire. Il n’y a pas de place pour l’électromyogramme, sauf en cas d’atypie. Il faut rechercher à l’examen les déficits sensitifs et à l’interrogatoire les caractéristiques typiques de la douleur neuropathique.

Le dépistage de la neuropathie autonome repose sur l’examen clinique et l’interrogatoire; le diagnostic doit être confirmé par des examens complémentaires.

D’autres atteintes neurologiques peuvent se voir chez le patient diabétique, mais elles sont plus rares.

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Classification
La classification des neuropathies diabétiques est représentée dans le tableau 18.14.

Tableau 18.14

Classification de la neuropathie diabétique.

Neuropathie sensorimotrice
–Polynévrite sensitive distale symétrique = polynévrite
–Mononévrite (par exemple paralysie oculomotrice)
–Polyradiculopathie thoracique
Neuropathie autonome
–Neuropathie cardiaque autonome
–Neuropathie vasomotrice
–Dysrégulation de la sudation, de la commande des glandes sébacées, en général par atteinte des contingents sympathiques et parasympathiques au cours de la polynévrite
–Neuropathie autonome gastro-intestinale
*gastroparésie
*alternance diarrhée/constipation
*incontinence fécale
–Neuropathie autonome génito-urinaire
*dysfonction vésicale, le plus souvent une vessie rétentionnelle, dilatée avec mictions par rengorgement, plus rarement par une vessie intolérante au remplissage avec mictions fréquentes
*éjaculation rétrograde, dysfonction sexuelle, troubles de l’érection

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Diagnostic, présentation clinique
Plusieurs présentations sont possibles et peuvent coexister. Quoi qu’il en soit, la neuropathie débutante est souvent silencieuse et doit être recherchée activement. En particulier, l’examen des pieds est aussi important et systématique en consultation de diabétologie que l’auscultation cardiaque en cardiologie (+++). Il faut souligner qu’une amélioration très rapide d’une HbA1c très élevée peut faire apparaître une polynévrite symétrique distale douloureuse.

Toute consultation chez un patient diabétique doit comporter l’examen des pieds.

1 Neuropathie sensorimotrice
Les fibres les plus longues sont altérées les premières : les symptômes ont une topographie ascendante avec le temps, dite en « chaussettes » – et beaucoup plus tardivement ensuite au niveau des membres supérieurs, en « gants »; l’atteinte des mains s’observe lorsque l’atteinte des membres inférieurs est au-dessus des genoux.

Il existe deux types de fibres :

*les fibres les plus petites concernent les sensations thermiques, algiques et du toucher fin (tact épicritique); la souffrance des petites fibres peut se traduire aussi par des sensations douloureuses (impression de pieds glacés ou brûlants, décharges électriques, allodynie assez caractéristique : c’est la perception comme douloureux de stimulus qui ne le sont pas, par exemple, souvent rapportées par les patients, les sensations douloureuses du poids des draps sur les pieds, etc.);
*les fibres les plus grosses concernent les sensations de position des articulations (proprioception), la sensibilité vibratoire, la sensibilité à la pression explorée par le monofilament, éventuellement la force motrice.
L’examen clé du diagnostic est l’examen clinique pour la perte de sensibilité, qui n’est pas consciente, et l’interrogatoire pour les sensations douloureuses.

L’électromyogramme (EMG) est inutile le plus souvent et n’est prescrit que lorsqu’il existe un doute quant à l’étiologie des signes neurologiques. Il n’explore que les grosses fibres et peut donc être normal alors qu’il existe une authentique neuropathie des petites fibres.

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Polynévrite symétrique distale
Cette forme de neuropathie diabétique, la plus fréquente, concerne plus de 40 % des diabétiques de plus de 25 ans d’évolution. Elle est chronique et progressive; la régression est rare, même après normalisation glycémique prolongée. Elle se manifeste par :

*une hypoesthésie à la pression et/ou au tact et/ou thermique et/ou proprioceptive, totalement ignorée du patient, qui se recherche à l’examen clinique des pieds et des jambes;
*parfois associée à des paresthésies distales, initialement aux orteils et plantes des pieds, puis plus proximales (fourmillements, sensation de cuisson, de peau cartonnée, de douleurs « électriques », de crampes);
parfois des douleurs, pouvant être atroces, sensation d’« arc électrique », sensation d’écrasement, de brûlure; ces sensations douloureuses peuvent cohabiter avec un examen clinique normal, mais doivent faire évoquer une neuropathie douloureuse des petites fibres; le diagnostic est confirmé par le questionnaire DN4 (fig. 18.20);des réflexes achilléens abolis, ainsi que plus tardivement les rotuliens;
*tardivement, des déformations de la voûte plantaire qui se creuse, le déplacement antérieur des coussinets normalement situés sous les têtes des métatarsiens, des orteils en griffes, le maintien de positions vicieuses, l’acquisition de points d’appui anormaux.
Une complication de la neuropathie est la neuroarthropathie, qui se manifeste par des microfractures passant inaperçues et qui, non traitées, peuvent conduire à un effondrement de la voûte plantaire avec une dislocation des os du tarse, dénommé le pied « cubique » de Charcot.

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Neuropathie autonome diabétique
C’est une complication d’un diabète ancien et mal équilibré, où les nerfs vague et du système sympathique ont été lésés. La régression est rare, même après normalisation glycémique prolongée.

Neuropathie autonome cardiovasculaire
Cette atteinte se manifeste par l’un ou l’autre des signes suivants :

*une tachycardie sinusale quasi permanente, dont la fréquence, de l’ordre de 110/min, ne varie que très peu pendant l’effort; elle participe à l’intolérance à l’effort;
*rarement, une bradycardie permanente;
*un allongement du QT à l’ECG, participant au surrisque de mort subite chez les diabétiques.
Elle est peut-être la cause de l’absence de douleur angineuse à l’occasion d’une ischémie myocardique : l’ischémie silencieuse – en réalité l’ischémie est bien plus souvent silencieuse pour d’autres raisons (absence d’activité physique, par exemple) qu’à cause d’une neuropathie autonome.

Neuropathie autonome vasomotrice
Cette atteinte se manifeste par les signes suivants :

*hypotension orthostatique, sans accélération du pouls. L’hypotension orthostatique se définit par une baisse de plus de 20 mmHg de la PA systolique ou 10 mmHg de la diastolique 3 minutes après le lever chez un patient au préalable allongé depuis plus de 5 minutes (consensus 2017); elle peut aussi être iatrogène chez des patients souvent polymédicamentés (antihypertenseurs);
*troubles de la sudation.
Neuropathie digestive gastro-intestinale
Cette atteinte peut se manifester par les signes suivants :

*gastroparésie fréquente : satiété rapide, pesanteur abdominale, régurgitations ou vomissements alimentaires; elle est cause d’une instabilité glycémique (+++);
*diarrhée d’allure banale ou diarrhée motrice, mais toujours d’évolution capricieuse;
*constipation, alternant ou non avec la diarrhée;
*incontinence fécale, rare, à la fois due aux troubles du transit cités et à une baisse du tonus sphinctérien.
Neuropathie vésicale
La neuropathie vésicale est caractérisée par un défaut de perception de la plénitude vésicale et par une hypoactivité du détrusor, mais elle est aussi favorisée par la polyurie de l’hyperglycémie.

Parfois, c’est l’inverse qui est observé : vessie intolérante au remplissage, cause de pollakiurie. De nombreux médicaments peuvent aggraver la symptomatologie.

Dysfonction érectile
La dysfonction érectile est caractérisée par une difficulté à initier l’érection, à la maintenir, également par une anéjaculation ou une éjaculation rétrograde, ces deux derniers symptômes bien plus caractéristiques de la neuropathie que la dysérection, qui admet de multiples causes, au premier rang desquelles des causes psychogènes. Il peut s’agir de l’un des premiers signes de neuropathie autonome, à rechercher à l’interrogatoire systématiquement.

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Examens diagnostiques utiles
Le seul examen impératif est clinique :

*interrogatoire (signes d’hypotension orthostatique, diarrhée, etc.);
*inspection des pieds; recherche des réflexes ostéotendineux, abolis au même niveau que la symptomatologie sensitive (par exemple les achilléens sont abolis dans la polynévrite en « chaussettes »);
un test global simple et standardisé est validé, le monofilament : il s’agit d’un fil de nylon rigide (10 G) que l’on applique en appuyant doucement jusqu’à ce qu’il se plie sur la face plantaire des pieds (fig. 18.21). Ce test est plus pronostique du risque de plaie du pied que diagnostique de la neuropathie. On cote le résultat en fonction du nombre d’applications détectées. Mais ce test ne détecte qu’une atteinte des grosses fibres. Il laisse passer 30 % des neuropathies périphériques. En cas de doute, il faut rechercher d’autres atteintes sensitives et des douleurs typiques à l’interrogatoire (DN4);test de la sensibilité épicritique (pique-touche, sans blesser les pieds, etc.), thermoalgique, vibratoire (diapason), proprioceptive.
De plus, un ECG est réalisé annuellement au minimum chez tout diabétique.

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Diagnostic différentiel de la neuropathie chronique sensitive
Il faut toujours analyser la situation avec précaution et se poser la question d’une autre étiologie que le diabète. En effet, les traitements spécifiques existent parfois et peuvent transformer le tableau clinique.

F Traitement
Le seul traitement réellement efficace à ce jour est préventif : l’équilibre glycémique. Il convient également d’éviter les autres facteurs favorisants, tels que :

*l’alcool;
*le tabac;
*l’insuffisance rénale;
*les carences en vitamines du groupe B (en particulier la carence en vitamine B12 chez les patients traités au long cours par metformine; le risque est dépendant de la dose totale cumulée);
*les effets secondaires de certains médicaments.
Une fois la neuropathie installée, on ne peut guère plus que la stabiliser, à nouveau par l’équilibre glycémique. L’enjeu est alors la prévention des complications de la neuropathie, avec en premier le mal perforant plantaire (voir plus loin) (+++). Le reste du traitement est symptomatique en cas de neuropathie douloureuse :

*antalgiques, dont les antalgiques banals, mais surtout certains antiépileptiques (gabapentine, Neurontin®; prégabaline, Lyrica®), certains antidépresseurs (tricycliques; venlafaxine, Effexor®; duloxétine, Cymbalta®);
*hydratation des tissus cutanés (crème, pommade).
En cas de résistance aux traitements antalgiques, il peut être proposé, après avis spécialisé, le recours à l’implantation d’un neurostimulateur médullaire.

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Épidémiologie
La prévention cardiovasculaire est le problème majeur des sujets diabétiques de type 2 : les trois quarts d’entre eux mourront d’une cause cardiovasculaire, la moitié d’un infarctus du myocarde. Le risque cardiovasculaire est multiplié par 2 à 3 par le diabète – par 3 à 4 chez la femme, le diabète réduisant considérablement le bénéfice du genre féminin face au risque cardiovasculaire –, indépendamment des autres facteurs de risque fréquemment associés comme l’HTA.

Le surrisque associé au diabète varie selon le lit artériel :

*risque coronarien multiplié par 2 à 3;
*risque d’accident vasculaire ischémique multiplié par 1,5 à 2;
*risque d’artériopathie oblitérante des membres inférieurs multiplié par 5 à 10.
Les données nationales les plus récentes rapportent : en 2013, en France, parmi les 3 millions de personnes traitées pharmacologiquement pour un diabète, 11 737 ont été hospitalisées pour un infarctus du myocarde (2,2 fois plus que dans la population non diabétique), 17 148 pour un accident vasculaire cérébral ou AVC (1,6 fois plus), 7 749 pour une amputation d’un membre inférieur (7 fois plus). Les hommes étaient davantage touchés que les femmes par l’ensemble de ces complications. La mortalité des AVC et des infarctus du myocarde est supérieure en cas de diabète (risque de décès multiplié par deux environ).

B Dépistage et évaluation du risque
Le risque est évalué selon une approche globale, comme détaillé précédemment (voir Items 222 et 223, chapitre 9) ou dans les recommandations de la HAS.

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étape – Identifier les facteurs de risque, évaluer le risque estimé de coronaropathie
Cela repose sur la démarche exposée dans le chapitre 13.

Recommandations HAS

De façon abrégée, voici la recommandation reprise par le guide de la HAS.

Les diabétiques à risque cardiovasculaire élevé sont (grade B) :

*ceux ayant une atteinte d’organes cibles : rétinopathie, néphropathie et neuropathie. L’association entre complications microangiopathiques et risque cardiovasculaire est particulièrement forte et bien démontrée pour la néphropathie, notamment l’albuminurie qui est marqueur majeur de risque cardiovasculaire;
*ceux ayant au moins deux facteurs de risque parmi les suivants : âge > 50 ans pour les hommes et > 60 ans pour les femmes ou durée de diabète > 10 ans dans les deux sexes, HTA, tabagisme, dyslipidémie, antécédents familiaux de maladie cardiovasculaire précoce;
*ceux ayant un risque cardiovasculaire fatal > 5 % à 10 ans, si un score de risque est utilisé. Le risque cardiovasculaire peut être calculé chez les diabétiques de type 2 en prévention primaire par le SCORE2-Diabetes, un calculateur de risque d’événement cardiovasculaire à 10 ans, spécifiquement élaboré par l’European Society of Cardiology pour les sujets atteints de diabète. Ce calculateur est disponible gratuitement sur Internet. Le nombre de diabétiques de type 1 inclus dans les études de prévention cardiovasculaire est toujours très faible. On peut considérer que leur risque cardiovasculaire est élevé lorsque la durée du diabète dépasse 15 ans ou que les mêmes facteurs d’aggravation du risque que chez les diabétiques de type 2 sont présents.e étape – Mettre en évidence une atteinte artérielle patente
Coronaropathie

  • Interrogatoire ciblé, à la recherche d’angor (douleurs thoraciques constrictives), mais aussi de signes moins flagrants, car la présentation clinique peut être atypique (voire, bien que ce soit moins fréquent que par le passé, silencieuse, ce qui par définition échappe à l’interrogatoire) :
    –troubles digestifs inexpliqués, parfois douleurs épigastriques;
    –asthénie, en particulier à l’effort;
    –troubles du rythme cardiaque, embolie;
    –et parfois simple déséquilibre inexpliqué du diabète (de façon générale, tout signe clinique ou déséquilibre glycémique inexpliqué chez un diabétique doit conduire à la réalisation systématique d’un ECG);
    –ou baisse de la pression artérielle.
    *ECG de repos annuel systématique.
    Quand faut-il recourir à des tests fonctionnels (épreuve d’effort, échocardiographie de stress, scintigraphie myocardique couplée à une épreuve d’effort ou à un stress pharmacologique) en prévention primaire ?

*en cas de symptômes cliniques ou de signes à l’ECG, quand la coronarographie n’est pas indiquée d’emblée;
*chez le patient asymptomatique, le dépistage systématique n’est pas recommandé. Il peut se discuter au cas par cas selon le niveau de risque cardiovasculaire, mais il n’y a pas de preuve, malgré plusieurs essais, que le dépistage de l’ischémie myocardique silencieuse aboutisse à un bénéfice pour le patient, si l’on a déjà mis en pratique les recommandations de contrôle des facteurs de risque.
Atteinte carotidienne

*Auscultation des carotides à chaque consultation, recherche de signes déficitaires et d’épisodes compatibles avec un accident ischémique transitoire (AIT).
*Effectuer une échographie-Doppler des carotides en cas de symptomatologie évocatrice d’AIT à l’interrogatoire.
Artériopathie des membres inférieurs
On effectuera les examens suivants :

*inspection soigneuse des pieds (peau fine, dépilation, pâleur);
*recherche des pouls, auscultation des trajets artériels à chaque consultation;
*recherche d’une symptomatologie de claudication;
*mesure de l’indice de pression systolique (IPS) cheville/bras (rapport entre la pression artérielle systolique mesurée au bras et celle mesurée à la cheville, avec une sonde Doppler pour mesurer la pression occlusive);
*échographie-Doppler des artères des membres inférieurs (à partir de l’aorte abdominale) seulement si une anomalie clinique patente est observée (comme une claudication ou un trouble trophique; pas d’échographie-Doppler systématique).
Des examens plus invasifs (angio-TDM, angio-IRM ou artériographie) ne sont demandés que si une revascularisation est envisagée.

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Traitement
La prévention est essentielle, primaire ou secondaire. La HAS recommande un traitement médicamenteux au-delà du contrôle glycémique et des modifications du mode de vie.

Évaluer le risque cardiovasculaire global du patient et prescrire :

*en prévention cardiovasculaire secondaire : une statine, un antiagrégant plaquettaire (acide acétylsalicylique), un IEC (ou ARA II) et un agonistes du GLP1 ou un iSGLT2 (chez le diabétique de type 2);
*en prévention primaire : une statine chez les patients ayant un risque cardiovasculaire élevé et un IEC (ou ARA II) en cas d’HTA et/ou d’albuminurie confirmée.
En prévention primaire, la prescription d’un antiagrégant plaquettaire est beaucoup moins largement recommandée qu’auparavant. En résumé, elle n’est recommandée que quand le risque cardiovasculaire est très élevé et le risque de saignement limité (voir plus loin).

1 Contrôle glycémique
L’association entre contrôle glycémique et risque de macroangiopathie est nette, mais on peine à identifier un seuil d’HbA1c en dessous duquel le risque est réduit à celui des non-diabétiques.

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Activité physique
L’activité physique est systématiquement recommandée, à un niveau adapté au patient. Cette partie n’est pas différente, en dehors de la rééducation après coronaropathie patente (qui est très importante), des recommandations rappelées dans la section consacrée aux règles hygiéno-diététiques de prise en charge du diabète de type 2.

3 Contrôle lipidique (+++)
Se reporter au chapitre 9 sur les facteurs de risque cardiovasculaire et les objectifs de concentration du LDL-cholestérol.

4 Contrôle de la pression artérielle
L’objectif tensionnel général est inférieur à 140/90 mmHg. L’objectif est à adapter suivant les patients, suivant le risque d’hypotension orthostatique chez la personne âgée, chez les personnes atteintes de neuropathie cardiaque autonome et suivant les traitements associés. Comme mentionné ci-dessus, on peut être plus ambitieux (PAS < 130 mmHg) chez des patients jeunes ou susceptibles de tirer un bénéfice particulier de la baisse de la pression artérielle (antécédent d’atteinte rénale ou d’AVC).

5 Prévention du risque thrombotique
Les antiagrégants plaquettaires n’ont plus de place en prévention cardiovasculaire primaire, leur bénéfice dans cette situation semblant outrepassé par les risques hémorragiques. Ils sont en revanche indiqués en prévention secondaire des pathologies cardiovasculaires.

6 Contrôle du poids
Les objectifs sont une réduction pondérale de 5 % à 10 % sur un an chez les individus en surpoids ou obèses; une perte plus marquée favorise le yoyo pondéral, lui-même associé à un risque cardiovasculaire accru. L’enjeu est le maintien du bénéfice obtenu les premiers mois – la reprise de poids à un an est extrêmement fréquente. L’application de mesures hygiéno-diététiques est systématique, avec soutien motivationnel. Au-delà d’un éventuel contrôle des apports caloriques de l’alimentation, la composition équilibrée est recommandée. Le régime méditerranéen, riche en noix et en huile d’olive notamment, et pauvre en protéines et graisses d’origine animale est recommandé, mais il faut bien sûr tenir compte des habitudes culturelles.

7 Sevrage tabagique
Arrêt du tabac, associé si besoin à un accompagnement du sevrage tabagique. Une prise en charge spécialisée est recommandée chez les personnes fortement dépendantes ou souffrant de co-addictions multiples ou présentant un terrain anxiodépressif. Il est nécessaire d’anticiper les risques de déséquilibre du diabète par la polyphagie réactionnelle et la modification transitoire de la sensibilité à l’insuline.

8 Revascularisation

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I Pied diabétique
(Voir également Item 156 – Infections ostéoarticulaires.)Physiopathologie
La neuropathie et l’artériopathie sont le terrain de l’apparition des plaies podologiques, seules ou en combinaison. L’éventail des plaies va du mal perforant plantaire (neuropathie pure) à la plaie ischémique d’orteil ou de membre (artériopathie pure). L’infection peut survenir sur l’un ou l’autre de ces processus et constitue un facteur aggravant. La plaie est presque toujours d’origine mécanique (kératose, chaussure, agression externe).

B Dépistage
Les patients à risque de faire une plaie chronique sont dits « à risque podologique ». Ce risque concerne :

*les patients diabétiques artéritiques : claudication, pouls abolis ou faibles, IPS anormal;
*les patients diabétiques ayant une neuropathie compliquée d’un trouble de la statique du pied et de façon générale les déformations du pied;
*les patients diabétiques ayant des troubles de la sensibilité algique, vibratoire, thermique et profonde;
*tout patient diabétique ayant des antécédents d’ulcération au niveau des pieds.
La classification internationale du risque de plaie podologique chez le diabétique indique les grades suivants :

*grade 0 : absence de neuropathie sensitive et d’artériopathie;
*grade 1 : présence d’une neuropathie sensitive isolée;
*grade 2 : association de la neuropathie avec l’artériopathie ou des déformations des pieds;
*grade 3 : antécédents d’ulcération ou d’amputation.
À chaque grade correspondent des mesures de prévention. Cette classification n’est pas une gradation de la neuropathie distale; la neuropathie distale doit être caractérisée par le type des sensibilités concernées et le niveau proximal de cette atteinte (pied, cheville, mollet, genou, etc.).

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Prévention
La prévention (+++) repose en premier lieu sur le patient, qui doit être formé (c’est un des objectifs majeurs de l’éducation thérapeutique dans le diabète) : autosurveillance des pieds et précautions pour le chaussage et l’hygiène (voir plus loin, « Ce que le patient doit savoir »). Un suivi par pédicure-podologue est conseillé si le patient et son entourage ont des difficultés à assurer eux-mêmes ces missions. Si le risque podologique est de grade 2, 5 consultations par an sont prises en charge par la CPAM; si le risque est de grade 3, 8 consultations par an. Une ordonnance doit être remise avec ces indications (niveau de risque et nombre de consultations). Des semelles et chaussures sur-mesure pour décharge des zones d’appui anormal peuvent être prescrites et sont remboursées.

La prévention repose aussi sur la surveillance par les soignants : à chaque consultation des patients à risque et chez tous annuellement au moins, déchaussage systématique pour examen clinique – état cutané (sécheresse, sueurs et macération aux plis, infections fongiques, zones d’hyperkératose, cors, déformation, froideur cutanée, infection fongique, neuropathie avec test au monofilament, statut vasculaire).

La prévention est aussi celle de l’aggravation : devant toute plaie nouvellement apparue, le patient et ses soignants doivent prendre un avis d’expert (équipe pluridisciplinaire idéalement) sans délai.

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Mal perforant plantaire, ou plaie neuropathique
Les points d’appui du pied normal sont au nombre de sept, dont :

*les cinq têtes des métatarsiens;
*la styloïde du 5e métatarsien au bord latéral du pied;
*le talon.
La neuropathie entraîne une hypoesthésie et favorise les déformations ostéoarticulaires; elle altère la fonction des glandes sudoripares et sébacées (pieds secs, hyperkératose, crevasses qui font le lit de l’infection). C’est au niveau de ces points d’appui que se développent les durillons (hyperkératose) qui feront le lit des maux perforants plantaires (fig. 18.22). C’est en effet le durillon qui creuse la plaie.

Après ces déformations, les points d’appui anormaux subissent une pression permanente excessive. La réaction de l’organisme, favorisée par la sécheresse cutanée, est l’hyperkératose. Elle peut être majeure et constituer un durillon, équivalent de corps étranger. C’est l’absence de douleur (c’est-à-dire de signe d’alerte) qui va être responsable de la deuxième étape : à chaque pas, à chaque appui, le durillon s’appuie dans les tissus mous sous-jacents. Cette pression répétée mille fois par jour va conduire à une dilacération des tissus mous et à la formation de collections stériles sous la corne. Le durillon peut se fissurer en créant une porte d’entrée pour les germes cutanés vers la collection, milieu de culture idéal. À cette étape peut se former une collection infectée, c’est-à-dire un abcès sous le durillon, qui peut évoluer vers la dermohypodermite et, après quelques semaines d’évolution, vers l’ostéite.

Le mal perforant (fig. 18.23) peut donc se révéler par l’une des manifestations suivantes :*du pus va sourdre par l’une des fissures du durillon, tachant la chaussette;
*un érysipèle (dermohypodermite bactérienne aiguë non nécrosante), le mal perforant constituant une porte d’entrée bactérienne;
*une infection plus sévère de type cellulite avec fonte purulente localisée des tissus adipeux et musculaires est une révélation bruyante, parfois avec signes systémiques (fièvre, frissons, syndrome inflammatoire biologique et hyperleucocytose).

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Ischémie ou nécrose
Si une AOMI est présente, la physiopathologie est généralement une oblitération ou une sténose des artères de moyen à petit calibre, distales, par prolifération, fibrose, puis calcification de l’intima et de la media (médiacalcose), caractéristique du diabète et du vieillissement, à la différence des plaques d’athéromes proximales chez les sujets tabagiques. La peau est froide, fine, dépilée, le temps de recoloration cutanée est supérieur à 3 secondes.

Si une plaie survient, les besoins de flux sanguin local pour lutter contre la micro-infection locale et pour cicatriser sont décuplés, alors que le flux sanguin était déjà à son maximum. La moindre plaie (lésion de la peau lors du coupage des ongles, couture un peu saillante dans la chaussure, fissure au fond d’un banal intertrigo candidosique) va déséquilibrer la situation et cette petite zone va être en ischémie relative et noircir. Le processus est alors engagé et peut aller très vite (quelques heures à quelques jours) : l’organisme devrait fournir encore plus d’oxygène pour cette zone et, comme il ne peut pas le faire, cette boucle vicieuse se répète jusqu’à ce que l’orteil entier, l’avant-pied ou le pied entier soit noir. L’urgence est de revasculariser, pas d’amputer : la plaie post-amputation ne cicatriserait pas.

F Lésions complexes
Très souvent, la neuropathie et l’artériopathie coexistent. Le mal perforant peut alors se compliquer de nécrose. La priorité est la revascularisation. L’infection nécessite une antibiothérapie, mais l’antibiotique ne peut parvenir là où il est utile que si la perfusion sanguine est suffisante; c’est dire l’importance d’assurer une perfusion suffisante.

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G Dermohypodermite nécrosante
Survenant dans de très rares cas, il s’agit d’une urgence infectieuse vitale. Le tableau septique est au premier plan, le teint est gris, l’hémodynamique altérée, l’odeur de la plaie fétide. Il faut débrider la plaie en urgence au bloc, initier des antibiotiques et normaliser les glycémies, en particulier en situation de cétose.

Un cas particulier est la très rare gangrène gazeuse, dont le germe responsable est en général Clostridium perfringens. La présence de gaz dans les chairs se manifeste par des crépitations à la palpation (crissement de la marche dans la neige) et des clartés (taches de 1 mm environ) dans les parties molles à la radiographie standard. Il s’agit d’une urgence vitale; l’amputation est nécessaire dans les heures qui suivent, ainsi qu’une réanimation comprenant une antibiothérapie parentérale par pénicilline et un contrôle optimal des glycémies.

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Prise en charge d’une plaie de pied diabétique
Prise en charge d’une plaie de pied diabétique

Devant toute plaie du pied diabétique, il est nécessaire d’évaluer sa sévérité et de rechercher des signes d’infection et d’artériopathie qui vont modifier la prise en charge. Il est donc nécessaire :

*de recueillir les données de l’interrogatoire et de l’examen permettant de dater l’apparition de la lésion du pied et de qualifier celle-ci de neuropathique (antécédents podologiques, sensibilité atténuée du pied controlatéral, hyperkératose, déformations) et/ou d’artériopathique (facteurs de risque et antécédents cardiovasculaires, pouls distaux abolis, souffles vasculaires)
*de localiser la plaie : plutôt en regard d’un point d’appui très sollicité, d’un durillon, neuropathique;
*de rechercher des signes locaux d’infection : rougeur, chaleur, douleur, tuméfaction, écoulement purulent, lymphangite, œdème, fusée plantaire, érysipèle, adénopathie, etc. Le diagnostic d’infection est en effet clinique;
*de vérifier les signes généraux, présents (fièvre, frissons, teint gris) ou non;
*de rechercher des signes d’ostéite par la recherche d’un contact osseux avec un stylet à pointe mousse;
*d’évaluer l’état vasculaire : recherche d’une nécrose, évaluation du temps de recoloration cutanée, mesure de l’IPS : un IPS < 0,9 signe l’artériopathie, < 0,5 une ischémie critique;
*d’évaluer la douleur.;
Au terme de cette approche seront précisés :

*le terrain : neuropathie et/ou artériopathie;
*la présence d’une complication : infection, ischémie;
*la sévérité : urgence vitale (gangrène, tableau de septicémie) ou non.
Les examens complémentaires à prescrire vont dépendre de l’évaluation de la plaie :

*en cas d’infection clinique seulement : NFS, ionogramme sanguin avec créatininémie, CRP, hémocultures s’il y a lieu (signes généraux, frissons, fièvre);
*radiographie des pieds, centrée sur la zone atteinte, bilatérale pour comparaison, à la recherche d’une ostéite (voir plus loin), de fractures pathologiques, de corps étrangers, de gaz dans les tissus mous;
*évaluation vasculaire (écho-Doppler artériel, angio-TDM, artériographie) en cas de suspicion d’artériopathie sur les données cliniques.
La prise en charge va dépendre des complications associées et du terrain. Elle repose sur quelques principes :

*la mise en décharge (suppression totale de l’appui sur la plaie), qui est systématique; si le patient est traité en ambulatoire, il doit repartir avec une ordonnance de « chaussure de décharge » et un arrêt de travail;
*soins locaux avec excision de l’hyperkératose et détersion de la fibrine par une infirmière à domicile (ne pas oublier de prescrire des sets de détersion avec bistouris);
*antibiothérapie probabiliste en cas d’infection clinique, notamment de dermohypodermite. Elle doit couvrir les cocci à Gram positif et les anaérobies. Pour exemple, citons l’amoxicilline-acide clavulanique (per os ou IV, selon la situation). L’antibiothérapie n’est pas systématique : une plaie avec de la fibrine n’est pas systématiquement septique;
*parage et drainage chirurgical de la plaie si nécessaire (abcès, fasciite nécrosante, nécrose humide);
*revascularisation artérielle à discuter selon données cliniques et résultats des explorations vasculaires;
*anticoagulation à dose préventive uniquement en cas d’hospitalisation et d’alitement;
*traitement antalgique s’il y a lieu (les plaies sont souvent peu ou non douloureuses du fait de la neuropathie);
*réhydratation en fonction de l’état hémodynamique;
*contrôle de la glycémie;
*mise à jour de la vaccination antitétanique (l’oublier expose à des déconvenues majeures lors de l’EDN…);
*il n’y a pas de recommandation consensuelle de pansements spéciaux ou de topiques de type facteurs de croissance tissulaire; cependant, quelques pansements ont démontré leur efficacité dans certaines situations dans des essais randomisés.
En cas de suspicion d’infection ostéoarticulaire, on se doit d’avoir une preuve bactériologique; celle-ci sera obtenue après la fin du traitement de la dermohypodermite et une fenêtre thérapeutique. Traiter une infection osseuse n’est pas une urgence.

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stéite
C’est une complication grave, mais ce n’est pas une urgence médicale. Le diagnostic repose le plus souvent sur la radiographie standard, qu’il faut savoir répéter car les signes sont retardés. Une radiographie typique en regard de la plaie avec un contact osseux positif recherché à l’aide d’une pointe mousse a une très bonne valeur prédictive positive

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Ce que le patient doit connaître

Pied diabétique

Patient diabétique sans risque (grade 0)

Il doit savoir comment le rester :

–avec un bon équilibre glycémique;
–avec une prise en charge des facteurs de risque cardiovasculaire, en particulier l’arrêt de l’intoxication tabagique.
Patient à risque, dit de grade 1, 2 ou 3

Il doit savoir comment protéger ses pieds :

–éviter les situations qui mettent le pied en danger :
–ne pas marcher pieds nus, par exemple à la plage;
–ne pas couper les ongles, mais plutôt les limer;
–ne pas enlever les cors ou les callosités avec des instruments tranchants, mais les poncer;
–ne pas utiliser de substances corrosives telles que des coricides;
–ne pas utiliser de bouillotte ou de coussin électrique pour se réchauffer les pieds.
–favoriser les méthodes qui protègent le pied :
–inspecter les pieds chaque jour, avec l’aide d’un miroir si nécessaire;
–vérifier en y passant la main ou en les secouant l’absence de corps étranger dans les chaussures avant de les enfiler;
–laver les pieds chaque jour à l’eau tempérée et les sécher soigneusement, surtout entre les orteils;
–hydrater les pieds quotidiennement en cas de sécheresse de la peau (crème hydratante);
–recourir régulièrement à des soins de pédicurie auprès d’un professionnel ayant l’habitude de suivre les patients diabétiques (si le risque podologique est de grade 2, 5 consultations par an sont prises en charge par la CPAM; si le risque est de grade 3, 8 consultations par an). Une ordonnance doit être remise avec ces indications (niveau de risque et nombre de consultations);
–porter des chaussures adaptées en cuir, larges, avec des semelles souples, sans brides ou lanières, sans coutures intérieures et fermées; le fait que la chaussure soit confortable n’est pas une garantie de qualité;
–changer de paire de chaussures dans la journée; ne porter les nouvelles chaussures que durant une heure les premiers jours et inspecter les éventuels points de frottement;
–porter des chaussettes de coton, de laine ou de soie, si possible; les changer tous les jours;
–éviter les élastiques qui serrent le mollet.

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Autres complications
A Peau et diabète

1 Nécrobiose lipoïdique

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Dermopathie diabétique
La dermopathie diabétique est fréquente : elle pourrait concerner jusqu’à 50 % des diabétiques, mais elle est aussi très fréquente dans la population générale. Elle s’associe aux autres complications spécifiques du diabète. Elle réalise des cicatrices atrophiques brunâtres, en particulier sur la face antérieure des tibias. Il n’y a pas de traitement et les lésions tendent à régresser spontanément.

3 Bullose diabétique
Des bulles sont parfois observées; elles s’associent à la neuropathie, chez le sujet âgé. Elles sont de taille variée, de quelques millimètres à plusieurs centimètres. Elles cicatrisent spontanément en quelques semaines.

4 Lipodystrophies
Les lipodystrophies, le plus souvent hypertrophiques, sont la conséquence d’erreurs dans la technique d’injection d’insuline : injections faites trop souvent au même endroit (fig. 18.25). Elles altèrent la cinétique de résorption de l’insuline, source importante d’instabilité glycémique. Histologiquement, il s’agit de la prolifération d’adipocytes sous-cutanés. Elles réalisent un épaississement local de la peau et doivent être recherchées au niveau des points d’injection chez tous les diabétiques traités par insuline.Acanthosis nigricans
L’acanthosis nigricans se manifeste par des placards cutanés brunâtres du cou, à surface veloutée, donnant un aspect « sale ». Les formes sévères se localisent aussi aux aisselles et plis inguinaux. C’est un signe d’insulinorésistance (fig. 18.26). Vitiligo
Le vitiligo est une pathologie auto-immune des mélanocytes se manifestant par des taches achromiques. Il s’associe au diabète de type 1 (fig. 18.27).Xanthomatose éruptive
La xanthomatose éruptive se voit dans les grandes hypertriglycéridémies et se manifeste par des nodules rouge-jaune mesurant jusqu’à 0,5 cm. On les observe sur les cuisses, les fesses et les paumes des mains.

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Infections et diabète
De multiples infections bactériennes sont plus fréquentes chez les diabétiques. Les fonctions des polynucléaires sont altérées lorsqu’ils sont exposés à des concentrations de glucose élevées.

C Foie et diabète
Obésité et résistance à l’action de l’insuline sont des déterminants majeurs des hépatopathies métaboliques (MAFLD pour metabolic-dysfunction associated fatty liver disease) : stéatose hépatique, stéato-hépatite et leur complication, la cirrhose.

De 50 % à 60 % des diabétiques de type 2 ont une hépatopathie dysmétabolique. On estime que 5 % des diabétiques ont des lésions de fibrose hépatique sévère, une prévalence 2 fois supérieure à celle de la population générale. Le risque relatif de cirrhose est 2,5 fois celui de la population générale. L’hépatopathie dysmétabolique est un facteur de risque de mortalité, par cancer et maladie cardiovasculaire.

Afin de dépister les patients atteints de MAFLD, il est possible de calculer le score FIB-4 (à partir de l’âge, des transaminases et des plaquettes sur un calculateur Internet gratuit). Si le score FIB-4 est supérieur à 2,67, il est recommandé de compléter les explorations par une mesure de l’élastométrie hépatique (Fibroscan®). En cas d’élastométrie ≥ 8 kPa, une consultation spécialisée d’hépatologie est recommandée pour discuter notamment une ponction-biopsie hépatique et rechercher des signes de cirrhose.

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Articulations et diabète
1 Capsulite rétractile
La capsulite est une complication fréquente qui se manifeste par des douleurs diffuses des épaules et une limitation des mouvements actifs et passifs de l’épaule.Maladie de Dupuytren
La maladie de Dupuytren (sclérose rétractile de l’aponévrose palmaire moyenne) est plus fréquente chez les diabétiques; 25 % des patients ayant une maladie de Dupuytren sont diabétiques.ChéiroarthropathieArthrose
L’arthrose est fréquente chez les diabétiques de type 2, ce qui n’est pas étonnant vu que ces deux pathologies partagent des facteurs de risque commun : âge et surpoids. Les articulations portantes (rachis, hanches et genoux) sont les plus fréquemment concernées. On décrit cependant chez l’obèse une plus grande fréquence des arthroses digitales, ce qui laisse penser que des facteurs autres que mécaniques sont en jeu.

E Dents et diabète
La nécessité de soins dentaires est une généralité particulièrement pertinente chez le diabétique, qui encourt essentiellement la maladie parodontale. Il s’agit d’une pathologie destructive, forme grave d’inflammation des gencives, qui est la principale cause de la perte des dents chez l’adulte.

Une autre complication du diabétique au niveau dentaire concerne la survenue d’infections et d’abcès dentaires, d’autant que le diabète est déséquilibré.

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Nous nous fondons sur les recommandations de la HAS.

Recherche d’atteinte d’organes cibles

La recherche d’éventuelles complications (symptomatiques ou non) oculaires, rénales, neurologiques, cardiovasculaires (insuffisance myocardique, artériopathies) et de lésions du pied doit être effectuée de manière systématique au travers de l’interrogatoire, de l’examen clinique et d’actes et examens spécifiques. Le bilan peut nécessiter plusieurs consultations et, dans certains cas, le recours à des avis spécialisés.

Examens complémentaires systématiques

Les actes techniques suivants sont réalisés :

*examen annuel de la rétine (rétinographe sans dilatation), qui ne dispense pas d’un examen ophtalmologique éventuel pour la mesure de la réfraction, du tonus oculaire, pour l’examen du cristallin et des autres structures de l’œil;
*ECG de repos annuel, systématique;
*échographie-Doppler des membres inférieurs : c’est un examen qui évalue la topographie des lésions; il ne devrait être pratiqué que chez des patients chez qui on envisage une revascularisation : plaie du pied, artériopathie symptomatique. Le diagnostic de l’artériopathie repose sur la mesure de l’IPS cheville/bras qui peut être fait avec un Doppler de poche ou un tensiomètre automatique professionnel;
*la pratique du Doppler des troncs supra-aortiques n’est pas codifiée. Des signes d’appel (souffle, symptômes neurologiques, imagerie cérébrale évocatrice) le justifient. Chez les patients asymptomatiques, ni la sélection des patients qui devraient recevoir cet examen, ni sa fréquence de répétition ne sont consensuelles.
Suivi biologique

Le suivi biologique concerne :

*l’HbA1c (4 fois par an, 2 fois par an chez les diabétiques de type 2 qui sont à l’objectif et dont le traitement n’est pas modifié);
*le bilan lipidique EAL (évaluation d’un anomalie lipidique : cholestérol total, HDLc, triglycérides, calcul du LDLc) une fois par an;
*la mesure du rapport albumine/créatinine (RAC) sur échantillon urinaire une fois par an;
*la créatininémie, une fois par an pour estimation du débit de filtration glomérulaire (formule du CKD-EPI, avec dosage de la cystatine C chez les patients obèses ou dénutris, selon les recommandations du KDIGO);
*principalement chez les patients atteints de DT2, un dosage des transaminases et des plaquettes afin de calculer le risque de fibrose hépatique avec le score FIB-4 (dans le cadre de l’hépatopathie dysmétabolique);
*la TSH, annuelle chez les patients diabétiques de type 1 qui ont des anticorps antithyroperoxydase.

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VIII Complications métaboliques aiguës du diabète
A « Coma » cétoacidosique

Plusieurs définitions de la cétoacidose coexistent; nous retiendrons celle de l’American Diabetes Association :

*cétonémie (> 3 mmol/l) ou cétonurie (> « ++ ») significative;
*glycémie > 250 mg/dl;
*bicarbonates < 18 mmol/l et/ou pH veineux < 7,30.
On notera dans cette définition :

*que c’est plutôt la cétonémie que la cétonurie qui est recommandée;
*qu’on peut être en cétoacidose sans être en franche hyperglycémie (c’est le cas par exemple au cours de la grossesse ou avec les médicaments inhibiteurs du SGLT2);
*qu’un prélèvement artériel n’est pas systématiquement nécessaire, toutes les données nécessaires, y compris le pH étant mesurées sur sang veineux.
L’incidence annuelle est difficile à établir, de l’ordre de 5 à 8 épisodes pour 1 000 patients par an. Cette incidence a fortement diminué depuis l’utilisation de la mesure continue du glucose. Les facteurs de risque de présenter une acidocétose sont : courte durée de diabète, antécédents psychiatriques, gastroparésie, HbA1c élevée. La mortalité est de l’ordre de 1 % dans les pays développés, essentiellement due à la pathologie causale. Cependant, il y a encore une mortalité propre de la cétoacidose, souvent iatrogène : œdème cérébral chez l’enfant, hypokaliémie, détresse respiratoire.

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Étiologie
Il peut s’agir :

*d’un déficit absolu en insuline, inaugural dans le diabète de type 1;
*ou d’un arrêt, volontaire ou non, de l’insulinothérapie; la cause en est le plus souvent une conduite inappropriée de réduction des doses d’insuline en situation de pathologie intercurrente. La baisse des doses précipite la situation à un moment où il aurait fallu augmenter, à cause de la résistance à l’insuline induite par la pathologie intercurrente (cortisol, GH, catécholamines). Cette gestion est en général due à une mauvaise analyse des signes d’alerte, en particulier les signes digestifs de la cétose : nausées et vomissements.
Dans le diabète de type 2, la cétoacidose est en général le fait d’une pathologie intercurrente sévère (chirurgicale, infarctus, etc.), mais d’autres causes existent : diabète de type 2 à tendance cétosique du sujet africain, effets indésirables des corticoïdes, des immunomodulateurs, des inhibiteurs de SGLT2.

Dans tous les cas, une pathologie intercurrente doit être recherchée; l’arrêt de l’insuline ne peut pas être retenu comme cause unique sans la recherche systématique de causes autres, infectieuses en particulier.

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Diagnostic et évolution
Phase de cétose
Un syndrome cardinal aggravé est observé (soif, sécheresse buccale, polyurie, perte de poids), associé à des troubles digestifs (nausées, vomissements, douleurs abdominales).

Phase de cétoacidose
Cette phase est caractérisée par une dyspnée de Kussmaul, rarement associée à des troubles de la conscience (état stuporeux) et à une déshydratation mixte à prédominance extracellulaire.

Critères de gravité

Les critères de gravité imposant l’hospitalisation en réanimation sont les suivants (consensus britannique) :

*sujet âgé;
*cétonémie > 6 mmol/l;
*bicarbonates < 5 mmol/l;
*pH artériel ou veineux < 7;
*hypokaliémie, < 3,5 mmol/l à l’admission;
*score de l’échelle de Glasgow < 12;
*SaO2 < 92 %;
*PA systolique < 90 mmHg;
*fréquence cardiaque > 100 ou < 60 bpm;
*trou anionique > 16.

3 Diagnostic différentiel

*Urgence abdominale : mais l’urgence abdominale (pancréatite, urgences chirurgicales) peut être une cause de cétoacidose chez le diabétique. L’élévation des enzymes pancréatiques est habituelle au cours de la cétoacidose. Dans tous les cas, la chirurgie ne doit pas être faite avant résolution des désordres hydroélectrolytiques.
*Le coma hyperosmolaire (glycémie plus élevée, insuffisance rénale, pas d’élévation de la cétonémie).

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Évolution
On note l’évolution suivante :

*régression sous traitement en 24 à 48 heures;
*complications iatrogènes : œdème cérébral, surcharge hydrosodée, hypokaliémie +++, hypophosphorémie.
5 Traitement
Ce qui peut être fait par tout médecin

  • Confirmation de la présence d’acétone devant un tableau clinique évocateur (cétonémie ≥ 3 mmol/l ou cétonurie > « ++ »).
    *Évaluation clinique de la gravité (âge, terrain, pathologie intercurrente, signes de détresse respiratoire, situation hémodynamique, niveau de conscience, tolérance digestive, importance de la déshydratation, etc.).
    *Orientation immédiate du patient vers un service d’urgence en cas de signes de gravité et/ou d’éléments faisant suspecter l’incapacité du patient à gérer la situation au domicile (intolérance digestive totale, démotivation, pas d’insuline rapide à disposition, etc.).
    Les patients sans signe de gravité (voir plus haut), bien éduqués à l’autoprise en charge de cette situation, ayant accès à une insuline rapide, pouvant contrôler régulièrement leur taux de glucose et leur cétonémie peuvent être encouragés à rester à domicile, sous réserve qu’ils puissent contacter un service référent en cas d’aggravation. Ils doivent alors être encouragés à réaliser au plus vite une dose sous-cutanée d’insuline rapide sous contrôle rapproché du taux de glucose et de la cétonémie.

Premiers gestes aux urgences

*Poser une voie veineuse et débuter la réhydratation (sérum salé 0,9 %).
*pH (sang veineux), bicarbonates, ionogramme, créatininémie, protidémie, hématocrite, CRP.
*Bilan à la recherche d’une infection causale.
*ECG.
Il est préférable de ne pas débuter l’insuline et la supplémentation potassique tant qu’on n’a pas le résultat de la mesure de la kaliémie : habituellement, une kaliémie basse (< 3,5 mmol/l) impose de débuter la supplémentation potassique avant de débuter l’insuline; une kaliémie haute (> 5 mmol/l) doit faire reporter le début de la supplémentation potassique.

Traitement curatif
Le traitement curatif est idéalement réalisé en service de diabétologie ou en soins intensifs/ réanimation en cas de signes de gravité.

Il requiert :

*l’insuline rapide ou ultrarapide en perfusion IV continue, 0,1 U/kg/h, sans dépasser 7 à 8 U/h, tant que dure la cétose :a recharge volumique par sérum salé isotonique : les apports potassiques, débutés dès que la kaliémie est < 5 mmol/l e traitement du facteur déclenchant éventuel. On gardera une vigilance extrême sur l’examen clinique, en sachant rechercher tous les foyers infectieux cachés, y compris pelviens; la fièvre peut n’apparaître que secondairement lors de la résolution de la cétose.
La perfusion de bicarbonates n’est préconisée que chez des patients épuisés (qui risquent de réduire leur hyperventilation) dont le pH est < 7,0 : on perfuse alors prudemment (compte tenu du risque d’aggravation de l’hypokaliémie) 100 ml de bicarbonate 1,4 %, renouvelable selon l’évolution du pH.Traitement préventif
Le traitement préventif consiste à établir des règles éducatives :

*rechercher l’acétone systématiquement dans le contexte glycémie élevée-pathologie intercurrente-nausées;
*il est contre-productif de rechercher l’acétone à chaque fois que la glycémie dépasse une valeur seuil : il ne faut le faire que dans les situations à risque;
*en présence d’hyperglycémie et de cétose, le patient doit savoir faire des compléments d’insuline rapide afin d’éviter l’évolution vers la cétoacidose.

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Syndrome d’hyperosmolarité hyperglycémique (coma hyperosmolaire)
Il s’agit de la décompensation classique du sujet âgé diabétique de type 2 insuffisant rénal, ou inaugurale du diabète lorsque la polyurie a été compensée par des boissons sucrées ou insuffisamment compensée (rôle de l’inaccessibilité aux boissons); c’est aussi une forme de présentation chez les patients traités par de fortes doses de glucocorticoïdes.

Ce syndrome est associé à une mortalité de 20 % à 40 %, très dépendante de l’état clinique antérieur et de la pathologie causale.

Les signes cliniques sont la déshydratation intense, intra- et extracellulaire, en général avec insuffisance rénale aiguë (c’est en général la réduction de la diurèse, et donc de la glycosurie, par insuffisance rénale aiguë qui explique l’élévation faramineuse de la glycémie) avec des troubles de la vigilance qui sont parfois révélateurs d’un diabète de type 2 méconnu.

C’est une maladie de la soif : soif non ressentie (sujet âgé, démence), non exprimée (sujet isolé, handicap), non étanchée (handicap, démence) ou mal étanchée (boissons sucrées).

1 Diagnostic biologique
Le diagnostic biologique s’établit selon les critères suivants :

*glycémie > 30 mmol/l (6 g/l);
*osmolalité > 320 mOsmol/kg H2O; calculée selon la formule : (Na+ + 13) × 2 + glycémie, où la concentration en sodium et la glycémie sont en mmol/l;
*absence de cétonémie et pH > 7,30 (pas toujours observé lorsque l’insuffisance rénale est assez profonde).

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Étiologie
Les facteurs de risque sont :

*l’âge > 80 ans;
*l’infection aiguë;
*les diurétiques;
*la mauvaise accessibilité aux boissons : maisons de retraite, état de démence, etc.;
*la corticothérapie;
*la chaleur (canicule, fièvre, etc., causes de déshydratation).
3 Traitement
Il s’agit d’une prise en charge hospitalière spécialisée :

*le traitement est essentiellement par réhydratation, d’abord du compartiment extracellulaire (NaCl, pour récupérer une diurèse qui permet le retour de la glycosurie, ce qui permet aussi de contrôler la glycémie) suivie de la réhydratation intracellulaire (eau par voie orale autant que possible plutôt que les perfusions hasardeuses de solutés hypotoniques) :l’insulinothérapie intraveineuse continue comme pour une cétoacidose, 0,1 U/kg/h, sans dépasser 7 U/h. Il est cependant essentiel de contrôler la vitesse de diminution de la glycémie et de se fixer un seuil bas supérieur à 2,5 g/l;
*les apports en potassium suivent les mêmes règles que dans la cétoacidose, avec la même prudence initiale chez des sujets souvent en insuffisance rénale;
*la surveillance clinique (conscience, pouls, PA, température, diurèse) et biologique (ionogramme sanguin et créatininémie);
*il est essentiel de prévenir les complications de décubitus, de traiter un facteur déclenchant, d’éviter les thromboses veineuses, les obstructions bronchiques par un mucus épaissi;
*il est essentiel d’éviter, par une réhydratation prudente, un passage par une situation d’hypo-osmolarité, associée à un risque de myélinose centropontique.
À distance de cet épisode aigu, il est souvent possible de reprendre un traitement hypoglycémiant oral. Mais la poursuite d’une insulinothérapie simplifiée permet souvent le passage au domicile d’un personnel de santé, et donc une meilleure prévention des récidives.

Dans les situations d’hyperosmolarité chez des sujets jeunes, sans insuffisance rénale, en général dues à une consommation massive de boissons sucrées, l’arrêt de ces apports inadaptés fait l’essentiel du travail, associé à une réhydratation orale ou parentérale et une insulinothérapie.

Les apports en potassium sont essentiels. Chez tout patient dont on ne connaît pas la consommation habituelle d’alcool et a fortiori chez les alcooliques, la prescription de vitamine B1 est essentielle lors de toute initiation d’une insulinothérapie, en prévention de l’encéphalopathie de Gayet-Wernicke.

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Hypoglycémies
Nous invitons à lire le chapitre 11 (Item 240) pour les éléments physiopathologiques et cliniques.

1 Généralités
L’hypoglycémie est quasi inévitable chez tout diabétique de type 1 « bien équilibré », souvent pluri-hebdomadaire. Cependant, la mise à disposition des nouvelles technologies (pompes/ capteurs de glucose) permet de réduire ce risque. Les « pancréas artificiels » hybrides (pompe partiellement asservie aux données de glucose interstitiel), dont la commercialisation est proche, apportent une réduction supplémentaire du risque hypoglycémique.

Les hypoglycémies ne s’observent que chez les diabétiques traités par l’insuline, les sulfonylurées (sulfamides hypoglycémiants tels que glibenclamide, gliclazide, glimépiride, glipizide, etc.) ou les glinides (répaglinide). Les analogues de l’insuline, rapides (aspart, lispro et glulisine) ou lents (détémir, glargine, degludec), sont associés à un plus faible risque hypoglycémique que les insulines plus anciennes. De plus, l’utilisation de la pompe à insuline réduit le risque d’hypoglycémies sévères comparativement à un traitement par injections multiples.

La metformine, les inhibiteurs des α-glucosidases intestinales (acarbose), les inhibiteurs de la DPP-4 (sitagliptine, vildagliptine, saxagliptine), les agonistes du récepteur du GLP-1 (exénatide, liraglutide, dulaglutide, sémaglutide) et les inhibiteurs de SGLT2 (dapagliflozine, empagliflozine, canagliflozine) ne sont jamais directement la cause d’une hypoglycémie chez le diabétique, mais peuvent potentialiser le risque hypoglycémique de l’insuline et des sulfamides/glinides.

Les hypoglycémies sont classiquement plus fréquentes chez les diabétiques proches des objectifs thérapeutiques (HbA1c < 6,5–7 %). Avec les modalités modernes de prise en charge du diabète (nouveaux antidiabétiques oraux dans le diabète de type 2, nouvelles technologies dans le diabète de type 1 : pompes, capteurs), cette association « HbA1c proche des objectifs »/« hypoglycémies plus fréquentes » tend à disparaître.

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Définitions
L’hypoglycémie chez le sujet diabétique est maintenant consensuellement définie par un taux de glucose < 70 mg/dl (< 3,9 mmol/l). Un deuxième seuil < 54 mg/dl (< 3 mmol/l) correspond aux hypoglycémies menaçantes : tout patient qui ne ressent ses hypoglycémies qu’en dessous de ce seuil est à risque d’hypoglycémie sévère et doit avoir du glucagon chez lui. L’hypoglycémie sévère est par définition, quel que soit le niveau de glycémie au moment de l’épisode, une hypoglycémie qui nécessite l’intervention d’une tierce personne. Au sein de ces hypoglycémies sévères, on distingue trois niveaux de gravité (hypoglycémie sévère; hypoglycémie sévère avec troubles de conscience et/ou convulsion; hypoglycémie sévère nécessitant une hospitalisation).

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Risques liés aux hypoglycémies
L’hypoglycémie n’est pas mortelle et ne laisse pas de séquelles cérébrales (sauf cas extrêmes et hypoglycémie très profonde et prolongée). De plus, elle ne participe pas aux complications du diabète, ne déclenche pas directement d’accident vasculaire ou cardiaque (sauf exceptionnels troubles du rythme ou de la conduction). Une hypoglycémie ne peut qu’exceptionnellement être retenue comme cause directe de mort subite chez le diabétique. Il faut cependant rappeler que certaines circonstances de survenue d’une hypoglycémie peuvent mettre indirectement en jeu le pronostic vital : hypoglycémie au volant, sur un échafaudage, lors d’une baignade, etc. Par ailleurs, l’hypoglycémie est un élément du diagnostic de fragilité du sujet qui, en cas d’hypoglycémie grave, a un risque 2 à 3 fois plus fort de décès de toute cause.

La répétition des épisodes d’hypoglycémie abaisse les seuils de déclenchement de la réponse hormonale de contre-régulation, diminue l’intensité, jusqu’à un retard ou même la disparition des signes neurovégétatifs, favorisant ainsi l’apparition brutale de troubles cognitifs profonds, de troubles du comportement, de comas (hypoglycémie sévère).

4 Correction de l’hypoglycémie

*Ingestion de sucre (15 g, soit 3 morceaux), soda ou barre sucrée, uniquement chez des patients conscients. Attention, le resucrage oral doit être proscrit chez tout patient présentant des troubles de conscience, du fait d’un risque de fausse route.
*Chez les patients inconscients, l’injection de glucagon à raison de 1 mg (Glucagen kit®), en intramusculaire (IM) ou sous-cutané (SC), est facilement réalisable par la famille, ainsi qu’à l’hôpital; geste plus simple chez les patients agités que l’injection intraveineuse directe d’une ou de deux ampoules de soluté de glucose à 30 %; une nouvelle formulation de glucagon administrable par voie nasale est maintenant disponible et remboursée, principalement destinée aux enfants.
*Chez les patients traités par sulfonylurées (sulfamides hypoglycémiants), l’administration de glucagon est classiquement contre-indiquée. Une perfusion de glucose doit être installée pour une durée supérieure de 2 à 3 fois la demi-vie de la sulfonylurée en cause.

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Situations favorisantes
Dans tous les cas, il faut rechercher une cause à l’hypoglycémie :

*délai trop long entre l’injection d’insuline (ou la prise de la sulfonylurée) et l’ingestion de glucides (risque majoré par la gastroparésie);
*dose d’insuline excessive par rapport à la quantité de glucides réellement consommée;
*effort physique impromptu, non précédé d’une diminution de dose d’insuline ou d’une collation glucidique;
*diminution des besoins en insuline lors de la guérison d’événements intercurrents tels que la grippe, une chirurgie, l’arrêt d’un traitement hyperglycémiant (en particulier les glucocorticoïdes), etc.;
*erreur dans l’injection de l’insuline ou dans la dose de sulfonylurée.
Souvent aucune cause n’est retrouvée. C’est une grande source de perplexité, de frustration et d’angoisse chez le diabétique. Des hypoglycémies répétées et inexpliquées peuvent inciter le patient à relever ses objectifs glycémiques afin de s’éloigner du risque hypoglycémique, quitte à être exposé à une hyperglycémie permanente.

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Points clés

*Le facteur étiologique commun à toutes les complications du diabète est l’hyperglycémie chronique.
*Il s’associe à d’autres facteurs modifiables aussi importants, comme l’hypertension artérielle (HTA). Le traitement de l’HTA est bénéfique non seulement sur les pathologies cardiovasculaires, mais aussi pour le rein et la rétine.
*Il est prouvé que lutter globalement contre ces facteurs est efficace.
*Les pathologies cardiovasculaires sont plus fréquentes chez le diabétique et, quand elles sont patentes, elles sont plus graves : deux tiers des diabétiques en mourront. Mais l’évolution récente dans la prise en charge des patients diabétiques, avec prescription raisonnée et sans retard de statines et de bloquants du système rénine-angiotensine-aldostérone réduit l’excès de mortalité cardiovasculaire chez les diabétiques.
*Les complications ont toutes une longue phase asymptomatique : le dépistage est un impératif.
*L’examen des pieds fait partie de toute consultation chez un patient diabétique.
*Le premier traitement d’une lésion podologique est la décharge, c’est-à-dire l’absence d’appui.

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Épidémiologie
A Adulte

À l’échelle mondiale, en 2016, 39 % des adultes étaient en surpoids et 13 % en obésité. La plupart de la population mondiale vit dans des pays où le surpoids et l’obésité font davantage de morts que l’insuffisance pondérale.

En France, les études épidémiologiques Obepi ont montré une progression de la prévalence de l’obésité qui a doublé en 25 ans, passant de 8,5 % de la population en 1997 à 15 % en 2012 (études Obepi). La prévalence de l’obésité a encore augmenté dans la dernière enquête Obepi de 2020 et atteint 17 % (17,4 % de femmes, 16,7 % d’hommes). La prévalence de l’obésité massive (IMC ≥ 40 kg/m2) est de 2 %. Cette même enquête montre que 48 % de la population française est en excès pondéral (surpoids ou d’obésité).

La prévalence de l’obésité augmente avec l’âge. L’obésité concerne inégalement les classes socio-professionnelles : sa prévalence est supérieure chez les personnes les moins diplômées et aux revenus les plus faibles. Les régions françaises aussi sont inégalement touchées. En effet, même si toutes ont enregistré une hausse du surpoids et de l’obésité, l’Est et le Nord de la France métropolitaine ainsi que les régions d’outre-mer sont nettement plus concernés.Enfant
Depuis les années 2000, les observations montrent une stabilisation de la prévalence du surpoids et de l’obésité chez l’enfant. En 2006, la prévalence estimée du surpoids incluant l’obésité était, selon les références IOTF, de 18 % chez les enfants de 3 à 17 ans, dont 3,5 % présentaient une obésité. Cependant, depuis les années 1980, la fréquence des obésités les plus sévères a été multipliée par quatre et représente 0,05 % de la population de moins de 18 ans.

La probabilité qu’un enfant atteint d’obésité le reste à l’âge adulte varie, selon les études, de 20 % à 50 % avant la puberté, à 50 % à 70 % après la puberté. Les prévalences du surpoids et de l’obésité – surtout dans sa forme grave – sont supérieures en France dans les populations défavorisées.

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Définitions de l’obésité
A Généralités

L’obésité est une maladie chronique, d’origine multifactorielle, évolutive et sans tendance spontanée à la guérison. Elle présente une large hétérogénéité phénotypique. L’obésité est définie comme une maladie, car elle affecte le bien-être physique, social et psychologique d’un individu.

Selon l’OMS, l’obésité correspond à « un excès de masse grasse entraînant des conséquences néfastes pour la santé ».

Chez l’adulte jeune en bonne santé, la masse grasse corporelle représente habituellement 10 % à 15 % du poids corporel chez l’homme et 20 % à 25 % chez la femme.

Les différentes méthodes de mesure de la composition corporelle (la bio-impédancemétrie, ou l’absorptiométrie biphotonique aux rayons X [DEXA]) n’étant pas recommandées dans la pratique clinique courante, la masse grasse à risque pour la santé est estimée à partir de l’indice de masse corporelle (IMC) : Chez l’adulte
Chez l’adulte, l’obésité est définie par un IMC ≥ 30 kg/m2; ce seuil est associé à une augmentation du risque de comorbidités et de mortalité. Les seuils sont les mêmes chez l’homme et chez la femme (tableau 19.1).Définition et gradation de l’obésité chez l’adulte.

Classification IMC (kg/m2)
Poids normal 18,5 à 24,9
Surpoids 25 à 29,9
Obésité grade I (modérée) 30 à 34,9
Obésité grade II (sévère) 35 à 39,9
Obésité grade III (massive) ≥ 40
Néanmoins, si l’IMC a l’avantage d’être simple pour la pratique clinique et pour des études populationnelles, à l’échelle individuelle, cet index présente quelques limites. Il ne prend pas en compte des facteurs influençant significativement la composition corporelle tels que le sexe, l’âge ou encore l’ethnie. Par ailleurs, l’IMC ne reflète pas toujours le niveau de sévérité ou de handicap associé à l’obésité. C’est la raison pour laquelle la HAS a défini cinq stades de sévérité de l’obésité – situation non complexe (1a, 1b), situation complexe (2), situation très complexe (3a et 3b) – fondés certes sur l’IMC, mais aussi sur six autres paramètres cliniques : le retentissement médical, le retentissement fonctionnel et sur la qualité de vie, la présence de troubles psychologiques (causes ou conséquences de l’obésité), l’étiologie de l’obésité, l’existence de trouble du comportement alimentaire et enfin la trajectoire pondérale. Ces stades sont détaillés dans le tableau 19.2.

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Chez l’enfant
Chez l’enfant, la relation entre masse grasse et IMC n’est pas linéaire, car la corpulence varie physiologiquement au cours de la croissance et est un peu différente selon le sexe. Ainsi, l’IMC normal varie avec l’âge de l’enfant.

L’IMC, une fois calculé, doit donc être reporté sur les courbes de corpulence (fig. 19.1) de référence, filles et garçons, selon les normes internationales de l’International Obesity Task Force (IOTF). Un enfant est dit en surpoids si son IMC le situe au-dessus de la courbe IOTF 25 (qui correspond à un IMC de 25 kg/m2 à 18 ans); il est dit en situation d’obésité lorsque son IMC le situe au-dessus de la courbe IOTF 30.Un bébé est normalement potelé jusqu’à l’âge de 1 an. Après cet âge, l’enfant commence à marcher; sa corpulence diminue jusqu’à ses 6 ans environ, puis elle réaugmente : c’est la période dite du rebond d’adiposité. Si ce rebond survient avant l’âge de 5 ans, celui-ci est dit précoce et signe la prédisposition de l’enfant à l’excès de poids.

Trois types de cinétique de courbe peuvent se voir chez l’enfant en situation d’obési*absence de rebond d’adiposité (pas de redescente d’IMC après 1 an), forme grave qui justifie un avis spécialisé;
*rebond d’adiposité précoce autour de 3 ans : situation très majoritaire dans l’obésité dite commune;
*croisement des couloirs après l’âge du rebond physiologique, plus rare, devant faire rechercher une obésité secondaire.La mesure du tour de taille est importante chez l’enfant : il existe une obésité abdominale lorsque le rapport tour de taille/taille (TT/T) est supérieur à 0,5 (voir plus loin).

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Évolution naturelle de la prise de poids, facteurs prédisposants, impact des régimes restrictifs
A Généralités

L’obésité est une maladie chronique évolutive. Son évolution naturelle se fait le plus souvent vers une aggravation progressive et l’apparition des complications comme illustré sur la figure 19.3.L’obésité résulte le plus souvent d’une interaction entre une susceptibilité génétique, modulée par une éventuelle influence épigénétique, et un environnement à risque. Les facteurs génétiques, environnementaux, psychologiques, sociaux et biologiques s’associent et interagissent entre eux.

L’obésité dite commune représente la très grande majorité des formes d’obésité et la contribution des facteurs environnementaux est prédominante.

Les changements dans le mode d’alimentation au cours des dernières décennies ont contribué au développement de l’obésité. Ce sont, en particulier, l’accès facile à une nourriture bon marché, palatable et énergétiquement dense, mais également une augmentation du temps de sédentarité qui correspond au temps passé assis ou allongé dans la journée, hors temps de sommeil et une diminution de notre activité physique (modes de transport non actifs/activités professionnelles peu actives).

Il est toutefois nécessaire, face à une obésité commune, d’identifier des facteurs supplémentaires favorisant la prise de poids et le développement de l’obésité

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Facteurs impliqués chez l’enfant
Les facteurs de prédisposition de l’enfant trouvent pour la plupart leur origine très précocement dans la vie, au moment de la période des 1 000 premiers jours de vie (de la conception aux 2 ans de l’enfant) et cela explique l’existence très fréquente d’un rebond d’adiposité précoce. Les situations à risque de développer une obésité dans l’enfance sont multiples, mais les experts s’accordent pour considérer comme situation à risque les éléments suivants :

*surpoids et obésité parentale, notamment de la mère au début de la grossesse (l’obésité des parents multiplie par quatre le risque d’être en situation d’obésité chez l’enfant);
*événements au cours de la grossesse : prise de poids maternelle excessive, tabagisme maternel, diabète maternel quel que soit son type;
*excès ou défaut de croissance fœtale (macrosomie/hypotrophie); les enfants nés petits pour l’âge gestationnel ont en plus un risque augmenté de complications métaboliques;
*gain pondéral accéléré dans les deux premières années de vie, d’autant plus important que la période de gain pondéral accéléré est longue (importance de la surveillance longitudinale de l’IMC pour détecter un rebond d’adiposité précoce);
*attitudes inadaptées de l’entourage par rapport à l’alimentation;
*facteurs psychopathologiques : dépression chez les filles, hyperphagie boulimique

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Facteurs communs impliqués chez l’enfant et l’adulte
Chez l’enfant et chez l’adulte, certains facteurs sont identifiés comme des facteurs prédisposants comme :

*les difficultés socio-économiques et le cadre de vie défavorable;
*le manque d’activité physique et la sédentarité;
*le manque de sommeil ou les troubles du sommeil (allant d’une désorganisation des rythmes du sommeil à un véritable syndrome des apnées du sommeil);
*les consommations excessives de produits sucrés (boissons et biscuits);
*certains facteurs psychopathologiques;
*les négligences ou abus physiques ou sexuels dans l’enfance ou l’adolescence.
D Facteurs spécifiques impliqués chez l’adulte
Chez l’adulte, les facteurs identifiés comme des facteurs prédisposants à la prise de poids sont listés ci-dessous :

*arrêt du tabac non accompagné de mesures adaptées;
*antécédents d’obésité dans l’enfance;
*ménopause;
*troubles du comportement alimentaire (impulsivité alimentaire, compulsions alimentaires, hyperphagie boulimique);
*troubles anxiodépressifs et périodes de vulnérabilité psychologique ou sociale;
*facteurs professionnels (parmi lesquels stress au travail, travail posté);
*réduction du temps de sommeil.
Les régimes trop restrictifs, déséquilibrés comportent des risques d’abandon entraînant une reprise de poids et souvent le dépassement du poids initial (effet « yoyo » des régimes). Le fait de ne pas associer d’activité physique aux modifications de l’alimentation est un facteur de risque de reprise de poids.

La restriction cognitive se définit par l’intention de contrôler mentalement son alimentation dans le but de ne pas grossir ou de maigrir. La limitation volontaire des apports alimentaires (avec fréquemment l’exclusion des aliments « plaisir ») est alors contrôlée par des facteurs externes (injonctions des médias, croyances). Les facteurs internes (signaux intéroceptifs de faim et de rassasiement) ne sont plus respectés. Cela favorise, suite aux frustrations générées, l’impulsivité alimentaire (compulsions et accès boulimiques).

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Obésité génétique
Les obésités d’origine génétique sont rares voire exceptionnelles. Elles regroupent les obésités monogéniques (en lien avec des mutations sur la voie leptine – mélanocortines) et les obésités syndromiques (le plus souvent liées à la délétion ou l’inactivation de plusieurs gènes conduisant à une obésité précoce associée à un syndrome malformatif et dysmorphique (anomalies des membres/extrémités, dysmorphie faciale), un hypogonadisme, des anomalies sensorielles (rétinopathie), un retard de développement, une petite taille, des troubles des apprentissages et une déficience intellectuelle et des troubles du comportement (par exemple syndrome de Prader-Willi, syndrome de Bardet-Biedl).

Ces formes d’obésité sont habituellement dépistées dans l’enfance, car l’obésité est précoce et sévère, mais il faut toutefois savoir envisager une obésité génétique chez un sujet adulte lorsque l’obésité est très sévère, qu’elle a débuté très précocement (dans les 24 premiers mois de vie), qu’elle a été associée à des troubles du comportement et plus particulièrement à des troubles du comportement alimentaire à type de compulsions, à un retard des acquisitions ou à un syndrome dysmorphique.

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Évaluation du sujet atteint d’obésité
A Interrogatoire

Chez l’enfant, l’interrogatoire, sous forme d’entretien, s’adresse à l’enfant selon son âge et aux adultes responsables de l’enfant.

Chez l’adulte comme chez l’enfant, la question du poids peut d’ailleurs être aussi abordée lors d’une consultation pour un autre motif.

Chez l’enfant comme chez l’adulte, les éléments suivants sont recherchés.

Vécu de l’excès de poids par la personne ainsi que sa motivation à envisager des modifications de son mode de vie.

Histoire pondérale = évolution du poids au cours du temps :

*âge de début de la prise excessive de poids (chez l’enfant, il faut évaluer l’âge du rebond d’adiposité et la cinétique de la courbe de corpulence);
*poids maximal;
*thérapeutiques mises en œuvre et leurs effets (effet yoyo).
Événements de vie associés à la prise de poids :

*changements physiologiques : puberté, grossesse, ménopause;
*changement d’environnement familial (mariage, divorce) ou professionnel (perte d’emploi, emploi stressant);
*chocs émotionnels : séparation, deuil, maltraitances, etc.;
*sevrage (tabac et autres produits : alcool, cannabis);
*arrêt du sport, immobilisation prolongée (fracture, intervention chirurgicale, etc.);
*situation sociale précaire.
Antécédents familiaux d’obésité, de pathologies cardiométaboliques (diabète, dyslipidémies, hypertension artérielle, etc.) et de cancer.

Antécédents personnels :

*troubles psychologiques (dépression par exemple) et traitements psychotropes (thymorégulateurs, neuroleptiques, antidépresseurs) pouvant favoriser la prise de poids;
*problèmes ostéoarticulaires (lumbagos/sciatiques) ayant entraîné une sédentarité ou une réduction de la mobilité;
*problèmes gynécologiques (infertilité par exemple) ayant conduit à la prescription de traitements pouvant provoquer une prise de poids;
*prise de médicaments (antidépresseurs tricycliques, neuroleptiques, lithium, antimigraineux, antiépileptiques, glucocorticoïdes, insuline, traitements hormonaux – dont œstroprogestatifs, antiallergiques);
*situations plus rares : traumatisme crânien, chirurgie de la région hypothalamo-hypophysaire, hypothyroïdie profonde;
*présence d’un handicap (moteur ou mental) qui est également un facteur de risque important d’obésité.
Analyse sémiologique du comportement alimentaire :

*évaluation qualitative de la consommation alimentaire :
–recherche d’éléments favorisant une hyperphagie prandiale :
–tachyphagie, dépistée par les moyens suivants : > 7 sur échelle analogique pour quantifier la vitesse d’ingestion (1 : la plus lente; 10 : la plus rapide); durée moyenne des repas;
–arrêt des repas au-delà du rassasiement : sensation de tension, pesanteur ou douleur au niveau de l’estomac en fin de repas; impossibilité de laisser des aliments dans son assiette ou dans le plat;
–volume des repas, tendance à se resservir.
*évaluation quantitative de la consommation alimentaire :
–répartition des prises alimentaires et rythme (nombre de repas et horaires);
–volume ingéré lors du plat principal et tendance à se resservir.
–profil de consommation au quotidien :
–rechercher une consommation suffisante de fruits et légumes;
–limiter la consommation d’aliments à densité énergétique élevée (graisses « cachées ») : fromage, charcuterie « grasse » (saucisses, pâté/terrine, rillettes), fritures, viennoiserie; matières grasses ajoutées : beurre, mayonnaise, consommation de sucres simples (sucre, miel/confiture, sodas/jus de fruits) et de pain, boissons consommées (notamment sucrées, et « excitantes » : café/thé/boissons énergisantes);
–»> si besoin, carnet alimentaire (semainier) pour aider à prendre conscience de la réalité des ingesta.
–recherche de prises alimentaires extraprandiales et leurs caractéristiques (impulsivité, fréquence, horaire, contexte de survenue) :
–grignotages : consommation tranquille en petites quantités d’aliments « plaisir »;
–compulsions (craving) : envies irrépressibles de manger sans perte de contrôle au cours de l’acte (choix d’aliments plaisants et consommés sans frénésie et en quantités limitées);
–accès boulimiques (binge eating) : envies irrépressibles de manger avec perte de contrôle au cours de l’acte (consommation des aliments avec avidité et/ou en grande quantité et/ou absence de sélection des aliments plaisants);
–hyperphagie boulimique;
–boulimie : plus rare dans l’obésité, les accès boulimiques étant associés à des conduites purgatives (vomissements, laxatifs).
–recherche de restriction cognitive;
*évaluation psychologique :
–niveaux de stress, d’anxiété et humeur dépressive;
–difficultés dans la vie personnelle ou professionnelle, difficultés scolaires;
–estime de soi et image du corps;
–temps pour soi, activités de loisirs (hobbies);
–troubles du sommeil (favorisent les tensions psychiques et l’impulsivité alimentaire).
*évaluation de la situation sociale : familiale, professionnelle, éducative, financière;
*évaluation du niveau d’activité physique : niveau habituel d’activité physique (professionnel, domicile, loisirs, sports) et de sédentarité (temps moyen passé devant les écrans, difficultés à la marche) et freins à la pratique en cas d’inactivité physique.

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Examen physique
1 Évaluation du statut pondéral et de la distribution de la masse grasse

Indice de masse corporelle
L’IMC estime l’importance de l’obésité, mais présente certaines limites : certaines prises de poids ne sont pas liées à une augmentation de la masse grasse, mais à un syndrome œdémateux généralisé (anasarque) ou à une augmentation importante de la masse musculaire (sportifs de haut niveau).

Répartition de l’adiposité
L’examen clinique du sujet atteint d’obésité doit ensuite caractériser la répartition de l’excès de masse grasse, dont dépend, en partie, le risque de complications associées à l’obésité. Ainsi, la répartition faciotronculaire de l’excès de masse grasse, appelée obésité androïde, que l’on identifie par une valeur élevée du tour de taille ou du rapport tour de taille/tour de hanches et traduisant l’accumulation de masse grasse au niveau viscéral, est associée à une augmentation de la mortalité cardiovasculaire et de la prévalence des maladies métaboliques (diabète de type 2, MASH [metabolic dysfunction-associated steatohepatitis]), de lithiase biliaire et d’apnées du sommeil. À l’inverse, l’obésité gynoïde, dont la répartition de la masse grasse prédomine au niveau sous-cutané sur la partie basse du corps (hanches et membres inférieurs), plutôt typique de l’obésité féminine, induit des risques mécaniques (arthrose) (fig. 19.4).Tour de taille
Le tour de taille est mesuré chez l’adulte debout, chez un patient en sous-vêtements, avec un mètre ruban en position horizontale à mi-distance entre le rebord costal inférieur et l’épine iliaque antérosupérieure après expiration douce, les bras ballants le long du corps. Cette mesure clinique simple est importante, car elle est bien corrélée avec la quantité de graisse intra-abdominale (= graisse viscérale).

Toutefois, cette mesure a moins d’intérêt quand l’IMC est supérieur à 35 kg/m2 (car le tour de taille mesure alors la graisse sous-cutanée et la graisse viscérale qui sont généralement toutes deux augmentées).

La mesure du tour de taille permet de définir le niveau de risque associé à la distribution de la masse grasse.

Les seuils de tour de taille associés à une augmentation du risque de pathologies métaboliques et cardiovasculaires sont les suivants :

*≥ 94 cm chez l’homme, ≥ 80 cm chez la femme : niveau 1 – critère International Diabetes Federation (IDF) 2005;
*≥ 102 cm chez l’homme, ≥ 88 cm chez la femme : niveau 2 – critère National Cholesterol Education Program-Adult Treatment Panel (NCEP-ATP) III 2005.
Chez l’enfant, le tour de taille est mesuré debout, à mi-distance entre la dernière côte et la crête iliaque ou au niveau du périmètre abdominal le plus petit.

Phénotypes spécifiques au cours de l’obésité

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Phénotypes spécifiques au cours de l’obésité

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Obésité sarcopénique
À l’excès de masse grasse s’associe un défaut de masse et de fonctionnement musculaire. Cette forme d’obésité est particulièrement prévalente chez le sujet âgé de plus de 65 ans et de pronostic plus péjoratif, car elle peut induire le développement de complications métaboliques, mais aussi une impotence fonctionnelle. Celle-ci peut être dépistée par le test de lever de chaise (5 levers en moins de 15 secondes), même si certaines pathologies associées à l’obésité (arthrose) peuvent rendre ce test non exploitable.

Obésité métaboliquement saine
Environ 20 % des obésités ne sont pas associées à des altérations métaboliques (syndrome métabolique, diabète de type 2, HTA, surrisque cardiovasculaire), mais ce phénotype est souvent transitoire.

2 Recherche d’une obésité secondaire
Il faut savoir évoquer en particulier une cause iatrogène et rechercher une prise médicamenteuse lors de l’entretien, notamment les antipsychotiques atypiques (clozapine, olanzapine, quétiapine, rispéridone), certains antidépresseurs ou régulateurs de l’humeur (IMAO, tricycliques, lithium et certains IRS), des antiépileptiques (carbamazépine, gabapentine, acide valproïque), mais aussi insuline, traitements hormonaux – dont œstroprogestatifs, anti-allergiques). Les glucocorticoïdes sont également associés à des prises pondérales.

Une prise de poids est présente dans l’hypercortisolisme, mais un hypercortisolisme ne doit être recherché que si l’obésité ou la prise de poids sont associées à des signes spécifiques cataboliques d’hypercortisolisme (vergetures pourpres et larges, amyotrophie quadricipitale, fragilité capillaire).

L’hypothyroïdie ne peut en général expliquer qu’une prise de poids modérée et il n’est pas nécessaire de doser la TSH (thyroid-stimulating hormone) systématiquement chez un patient souffrant d’obésité.

Dans le contexte de lésion hypothalamique, le plus souvent tumorale, on peut retrouver une obésité secondaire dite « obésité hypothalamique ». L’obésité est le plus souvent associée à une impulsivité alimentaire, à une diminution de la dépense énergétique de repos et liée à l’activité physique ainsi qu’à d’autres symptômes (regroupés sous le terme de syndrome hypothalamique) en lien avec l’atteinte hypothalamique, comme l’altération du rythme veille sommeil et le trouble de la régulation de la température corporelle.

Chez l’enfant, le principal signe devant faire rechercher une obésité secondaire est le ralentissement de la croissance staturale, même modeste.

401
Q

Recherche des complications
Cette étape est très importante, car l’obésité induit de très nombreuses complications qui influent sur le pronostic fonctionnel et vital, mais dont la présence est variable d’un individu à l’autre, et qui dépendent du niveau d’obésité, de la distribution de la masse grasse, de l’ancienneté de la surcharge pondérale et des éventuels facteurs de risque cardiovasculaire associés (âge, antécédents familiaux, tabac, diabète, hypertension artérielle, dyslipidémie).

Les propriétés du tissu adipeux (mécaniques et sécrétoires) et sa localisation (sous-cutanée ou viscérale) sont à l’origine de complications distinctes (cardiovasculaires, métaboliques ou inflammatoires) (tableaux 19.3 et 19.4).

Tableau 19.3

Principales complications de l’obésité chez l’enfant.

Complications Comorbidités Commentaires
Psychopathologiques
Souvent secondaires aux moqueries/stigmatisations, etc.
Anxiété et dépression
Troubles du comportement
Les rechercher à l’interrogatoire, prise en charge spécialisée si nécessaire
Métaboliques
Insulinorésistance, intolérance au glucose, diabète de type 2
Dyslipidémie
Stéatose hépatique et stéatopathie dysmétabolique
Acanthosis nigricans (fig. 19.5)
Respiratoires Syndrome d’apnées obstructives du sommeil* Asthme Avis ORL (hypertrophie des amygdales) et avis auprès d’une équipe pédiatrique spécialisée en pneumologie
Cardiovasculaires Hypertension artérielle Pression artérielle mesurée avec un brassard adapté à la circonférence du bras de l’enfant
Orthopédiques
Épiphysiolyse de hanche
Troubles de la statique vertébrale
Genu valgum surtout si asymétrique
Épiphysites de croissance
Urgence orthopédique : radiologie du bassin face en abduction et profil, IRM si doute, avis orthopédique en urgence
Bilan radiologique et avis orthopédique spécialisé
Endocriniennes
Verge enfouie fréquente, éliminer un micropénis
Adipo- et/ou gynécomastie chez le garçon
Puberté précoce chez la petite fille/retard pubertaire chez le garçon
Spanioménorrhée, hypertrichose
Avis spécialisé de l’endocrinopédiatre
Âge osseux et avis spécialisé
Bilan échographique et hormonal à la recherche d’un syndrome des ovaires polykystiques
Cutanées
Acanthosis nigricans
Mycoses des plis
Vergetures
Hyperpilosité

*Il peut se manifester chez l’enfant par : ronflements, réveils nocturnes, somnolence diurne ou excitabilité, baisse des résultats scolaires, énurésie.

Tableau 19.4

Principales complications de l’obésité chez l’adulte.

Complications Comorbidités Commentaires
Métaboliques Diabète de type 2* Présence fréquente d’un acanthosis nigricans (voir fig. 19.5), témoignant d’une insulinorésistance
Syndrome métabolique* (critère IDF 2005) Tour de taille élevé (> 94 cm pour l’homme ; > 80 cm pour la femme) associé à deux des quatre critères suivants en plus :
–PAS ≥ 130 mmHg ou PAD ≥ 85 mmHg (ou prise d’un traitement anti-hypertenseur)
–glycémie élevée : > 1 g/l (ou présence d’un diabète préalablement diagnostiqué)
–hypertriglycéridémie : ≥ 1,5 g/l (ou prise d’un traitement hypolipémiant)
–HDL-C bas : < 0,4 g/l chez l’homme ou < 0,5 g/l chez la femme (ou prise d’un traitement hypolipémiant)
Cardiovasculaires Hypertension artérielle* Pression artérielle mesurée avec un brassard adapté à la circonférence du bras du patient, sinon prendre la tension à l’avant-bras avec un brassard standard
Insuffisance coronarienne*
Infarctus du myocarde*
Accident vasculaire cérébral*

Insuffisance cardiaque gauche
Insuffisance cardiaque droite
Respiratoires Syndrome d’apnées obstructives du sommeil* Rechercher des signes cliniques évocateurs
Syndrome d’hypoventilation alvéolaire
Défini sur les gaz du sang
par une hypercapnie (PaCO2 > 45 mmHg)
Asthme Prévalence accrue dans l’obésité
Insuffisance respiratoire restrictive
Thrombo-emboliques
Thrombose veineuse profonde
Embolie pulmonaire

Opératoires
Morbimortalité per- et postopératoire plus élevée
Complications de décubitus plus fréquentes

Digestives et hépatiques
Reflux gastro-œsophagien
Lithiase biliaire*

Stéatose hépatique métabolique*
Rénales Glomérulopathie avec protéinurie pouvant aller jusqu’à l’altération du DFG
Ostéoarticulaires
Gonarthrose fémorotibiale
Arthrose digitale
Arthrose de la hanche (coxarthrose)

Cutanées
Intertrigos mycosiques (plis sous-mammaires, inguinaux, etc.)
Lymphœdème
Insuffisance veineuse
Parfois aggravées par une infection (érysipèle)

Urogenitales (femmes) Incontinence urinaire d’effort
Gynécologiques Troubles de la fertilité En lien avec une anovulation ou un syndrome des ovaires polykystiques*
Risque de fausse couche plus élevé
Déroulement et issue de la grossesse plus risqués
Diabète gestationnel*
Hypertension artérielle gravidique*

Chez l’homme Hypogonadisme
Neurologiques Hypertension intracrânienne idiopathique oubénigne
Oncologiques Sein, endomètre, côlon-rectum, rein, pancréas, œsophage, vésicule biliaire Augmentation de l’incidence et de la mortalité par cancer
Psychologiques et sociales
Discrimination sociale
Perte de l’estime de soi
Du fait de la stigmatisation

A
402
Q

Examens complémentaires
1 Examens systématiques

Chez l’enfant

A

Examens complémentaires
1 Examens systématiques

Chez l’enfantExamens complémentaires
1 Examens systématiques

Chez l’enfant

403
Q

En fonction du contexte clinique

*Bilan de complications (quand éléments en faveur) :
–cardiovasculaires : exploration d’effort, échographie cardiaque;
–ostéoarticulaires : radiographies standard centrées sur les articulations douloureuses;
–Autres cancers : dépistage uniquement si point d’appel clinique.
* Bilan étiologique : à ne réaliser que si points d’appel cliniques détaillés plus haut :
–TSH : hypothyroïdie;
–cortisol libre urinaire (CLU) sur 24 heures, cycle nycthéméral du cortisol, freinage minute à la dexaméthasone : hypercortisolisme;
–IRM hypophysaire : pathologies hypophysaires;
–analyses génétiques si suspicion d’une obésité génétique.

A
404
Q

Attitude thérapeutique et suivi du patient
A Stratégie de prise en charge

1 Chez l’adulte

L’objectif de la prise en charge thérapeutique de l’obésité ne se résume pas à un objectif pondéral, mais concerne aussi l’amélioration des comorbidités, des facteurs de risque, de la qualité de vie et de la mobilité.

La prise en charge vise le maintien de la perte de poids à long terme, la prévention de l’apparition des complications et l’amélioration de la qualité de vie. La prise en charge se fait au long cours avec une approche thérapeutique personnalisée, hiérarchisée et adaptée à chaque patient avec son accord (alliance thérapeutique). Elle repose sur un accompagnement global intégrant conseil nutritionnel, lutte contre la sédentarité et pratique d’une activité physique régulière associés au renforcement de l’écologie personnelle (sommeil, relations sociales, estime de soi/affirmation de soi, satisfactions au-delà de l’alimentation, etc.) ainsi qu’à un éventuel soutien psychologique (ouvrant à l’expression de soi) et social si besoin dans une démarche d’éducation thérapeutique.

Les changements mis en œuvre ne doivent pas être trop contraignants, les objectifs de perte de poids réalistes et celle-ci pas trop rapide. Chez l’adulte, une perte de poids de l’ordre de 5 % à 10 % du poids maximal permet déjà une amélioration significative des complications. Dans certains cas, éviter l’aggravation de l’obésité est déjà un objectif raisonnable dans cette maladie qui a une tendance spontanée à l’aggravation.

La prise en charge nutritionnelle doit être personnalisée et repose d’abord sur les modifications thérapeutiques du mode de vie qui sont déterminées avec la personne en situation d’obésité après une évaluation globale de ses besoins et attentes. La prise en charge de l’obésité est fondée sur les principes de l’éducation thérapeutique du patient (reposant sur l’analyse des besoins et attentes du patient), qui permettent de définir un programme personnalisé comprenant les compétences les plus utiles à acquérir et les priorités d’apprentissage pour modifier leur mode de vie dans la perspective de stabiliser, puis de perdre du poids. Il est recommandé au médecin d’éviter tout discours culpabilisant qui ferait de la personne en excès pondéral la seule responsable de son poids.

Si la majorité des patients porteurs d’une obésité relèvent d’une prise en charge de premier recours coordonnée par leur médecin traitant, les patients porteurs d’obésités complexes ou très complexes (niveaux 2 et 3a, 3b, classification HAS, voir plus haut) doivent être pris en charge par des médecins spécialistes de l’obésité voire dans des centres spécialisés de l’obésité (CSO). La prise en charge fait aussi appel, en fonction des situations, à d’autres professionnels (diététicien et/ou professionnels en activités physiques adaptées et/ou psychologue et/ou psychiatre).

A
405
Q

Chez l’enfant
Chez l’enfant, on s’attachera également à évaluer l’attitude éducative des parents vis-à-vis de l’alimentation de leur enfant : est-elle permissive ou, au contraire, autoritaire, laissant peu de place à l’enfant ? L’entourage pousse-t-il l’enfant à finir son assiette ? Utilise-t-il l’alimentation comme récompense ou consolation systématique ? Ce bilan doit impliquer l’enfant selon son âge et les adultes de son entourage. La stratégie de la prise en charge du surpoids et de l’obésité chez l’enfant s’appuie sur les principes de l’éducation thérapeutique. Il s’agit d’aider progressivement l’enfant et sa famille à modifier leurs comportements, dans les domaines de l’activité physique et de la sédentarité, des rythmes de vie dont le sommeil, de l’alimentation, etc. et des attitudes éducatives pour les parents. Le parcours thérapeutique est construit idéalement au plus près du lieu de vie de l’enfant et est coordonné par le médecin traitant (pour les obésités non complexes). Il est possible, selon les besoins, de faire appel à d’autres professionnels : psychologue ou psychiatre, professionnel de l’activité physique adaptée, diététicien.

En cas de situation dite « complexe », l’accompagnement va avoir pour objectif d’améliorer la condition médicale de l’enfant/l’adolescent selon les problématiques rencontrées : complications sévères, troubles psychiatriques avérés par exemple. La coordination des soins et de l’accompagnement doit alors être partagée entre le médecin qui suit habituellement l’enfant/l’adolescent(e) et un médecin de la structure spécialisée comme un CSO et un référent de proximité.

A
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Q

Moyens thérapeutiques
1 Modifications thérapeutiques du mode de vie

Conseils alimentaires
Objectif : perte de poids progressive chez l’adulte (sur 6 à 12 mois) durable +++ par des conseils réalistes et personnalisés.

Conseils alimentaires

*Pas de prescription diététique « standard ».
*Pas d’interdits alimentaires risquant d’induire des frustrations suivies de périodes de désinhibition.
*Pas de régime restrictif (à risque carentiel, mais aussi de reprise de poids au décours).
*Respect d’un rythme alimentaire et d’un équilibre alimentaire respectant les propositions du PNNS.
*Respect des signaux de faim et de rassasiement.
*Insister sur l’allongement des temps de mastication et d’ingestion (au moins 20 minutes pour un repas) et renforcer l’attention sur les sensations gustatives.
*Réduction relative des apports énergétiques totaux (max. −500 kcal/j par rapport à l’enquête initiale sans descendre au-dessous des besoins énergétiques de repos du patient) par la promotion de l’équilibre alimentaire et le travail sur les déterminants des prises alimentaires extraprandiales (en particulier les émotions).
Concernant l’activité physique

*Les recommandations d’activité physique (AP) sont les mêmes qu’en population générale mais, chez la personne en situation d’obésité, elles doivent être adaptées aux capacités des personnes et atteintes progressivement. Il faut savoir valoriser les changements mis en place même s’ils ne sont pas complets, car toute pratique d’AP apporte un bénéfice pour la santé.
*L’AP est primordiale pour le maintien de la perte de poids après amaigrissement, la préservation de la masse maigre (qui détermine la dépense énergétique de repos), et la prévention des complications métaboliques, respiratoires et cardiovasculaires. L’AP induit une perte de poids modeste uniquement (1 à 2 kg).
*Elle doit être pratiquée régulièrement, adaptée aux goûts, aspirations et problématiques médicales et psychosociales de la personne, sécurisée et mise en place progressivement (RASP : régulière, adaptée, sécurisée et progressive), afin de ne pas risquer un arrêt rapide par découragement, blessure, etc. Les activités « sport-santé » ou les activités physiques adaptées sont dans ce cadre particulièrement intéressantes. Une réhabilitation à l’effort préalable auprès d’un kinésithérapeute est parfois nécessaire.
*Il est important de limiter le temps passé à des occupations sédentaires.
*L’objectif idéal de 1 heure par jour d’AP d’intensité modérée au moins 5 fois par semaine est rarement atteint.

A
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Q

Prise en charge psychologique et comportementale
La présence de troubles du comportement alimentaire (impulsivité alimentaire, boulimie hyperphagie et noctophagie, principalement) doit conduire à une prise en charge spécifique qui peut faire intervenir un psychiatre, un psychologue et/ou un diététicien comportementaliste. Celle-ci est fondée sur les thérapies cognitivo-comportementales (TCC) qui ont fait les preuves de leur efficacité et comprennent :

*le travail sur la motivation;
*la gestion des troubles du comportement alimentaire via la gestion des émotions et du stress;
*le renforcement de l’estime de soi et de l’affirmation de soi.
2 Traitement pharmacologique

*Traitements spécifiques des complications et des facteurs de risque cardiovasculaire associés : antihypertenseurs, hypolipémiants, antidiabétiques oraux, analogues du GLP-1 (glucagon-like peptide-1) ou insuline.
*Traitement adapté des troubles des conduites alimentaires (TCA), de la dépression, de l’anxiété quand ils sont présents : antidépresseurs sérotoninergiques, anxiolytiques.
*Traitement médicamenteux de l’obésité.
–Celui-ci est toujours introduit en deuxième intention d’une prise en charge nutritionnelle bien conduite et en échec (< 5 % de perte de poids à 6 mois malgré la modification effective des modes de vie). Sa prescription est réservée aux spécialistes de l’obésité.
–Dans l’obésité commune, les analogues du GLP1 comme le sémaglutide ont maintenant l’indication si la personne a un IMC ≥ 35 kg/m2 et moins de 65 ans.
–Dans les formes plus spécifiques, les agonistes du récepteur MC4R (setmélanotide) ont maintenant l’indication pour le traitement de l’obésité et le contrôle de la faim associée à des anomalies génétiques confirmées de la voie leptine mélanocortine (POMC, PCSK1 ou récepteur de la leptine), ou à des variants génétiquement confirmés associés au syndrome de Bardet-Biedel. Ils peuvent aussi être prescrits dans les obésités avec lésions hypothalamiques après validation en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) nationale.

A
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Q

Chirurgie bariatrique
Indications
La chirurgie bariatrique est la solution de dernier recours, à proposer après évaluation des bénéfices et risques potentiels ainsi que de la capacité d’adhésion du patient au suivi. Son indication est retenue par décision collégiale, prise après discussion et concertation pluridisciplinaires chez des patients adultes réunissant l’ensemble des conditions suivantes (recommandations HAS, 2024) :

*18 à 60 ans (mais possible jusqu’à 70 ans en pesant la balance bénéfice/risque entre 60 et 70 ans);
*patients avec un IMC ≥ 40 kg/m2 ou bien chez ceux avec un IMC ≥ 35 kg/m2 mais associé à au moins une comorbidité susceptible d’être améliorée après la chirurgie, notamment : diabète de type 2, HTA traitée, hypertriglycéridémie ≥ 5 g/l, stéatohépatite non alcoolique ou fibrose hépatique quel que soit le stade, cirrhose Child A, SOPK, infertilité avec prise en charge en assistance médicale à la procréation, maladie rénale chronique, syndrome d’apnées hypopnées obstructives du sommeil (IAH > 15/h), asthme, gonarthrose, coxarthrose, lombalgie chronique invalidante, incontinence urinaire invalidante en échec des traitements médicamenteux, HTIC idiopathique, hernie ombilicale ou éventration nécessitant une perte de poids pour être réparée, handicap moteur avec ou sans paraplégie;
*en deuxième intention après échec d’un traitement médical, nutritionnel, diététique et psychothérapeutique bien conduit pendant 6 à 12 mois; en l’absence de perte de poids suffisante ou en l’absence de maintien de la perte de poids;
*patients bien informés au préalable, ayant bénéficié d’une évaluation et d’une prise en charge préopératoire pluridisciplinaires;
*patients ayant compris et accepté la nécessité d’un suivi médical et chirurgical à vie;
*risque opératoire acceptable.
N.B. : chez le patient atteint de diabète de type 2 mal équilibré, malgré un traitement considéré comme optimal, les techniques de chirurgie bariatrique peuvent être utilisées pour l’amélioration du diabète, dès un IMC ≥ 30 kg/m2, et l’on parle alors de chirurgie métabolique.

Contre-indications

*Troubles psychiatriques non stabilisés.
*Alcoolisme, toxicomanie et troubles de l’usage de substances.
*Troubles sévères du comportement alimentaire impulsif ou compulsif (par exemple hyperphagie boulimique).
*Impossibilité de suivi médical.
*Risque anesthésique majeur.
*Pathologie menaçant le pronostic vital à court ou moyen terme.

A
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Q

rincipe
La chirurgie bariatrique vise à modifier l’anatomie du tube digestif (tableau 19.6) par une restriction gastrique : anneau gastrique, gastrectomie longitudinale (sleeve gastrectomy). Elle peut être associée à une malabsorption intestinale (bypass gastrique en Y).

Tableau 19.6

Type d’intervention de chirurgie bariatrique.

Type d’intervention Description Complications et suivi
Anneau gastrique < Technique restrictive qui consiste à placer un anneau en silicone autour de la partie supérieure de l’estomac. L’anneau est relié par une tubulure à un boîtier localisé sous la peau permettant, par injection de liquide, de modifier son diamètre
Glissement de l’anneau
Dilatation de la poche, voire de l’œsophage
Vomissements et intolérance alimentaire en cas de serrage excessif
Risque de carence en vitamine B1 en cas de vomissements prolongés
Gastrectomie longitudinale Technique restrictive qui consiste à retirer les deux tiers de l’estomac
Ulcération, sténose, fistule
Reflux gastro-œsophagien
Risque de carences nutritionnelles : fer, vitamine B12
Risque de carence en vitamine B1 en cas de vomissements prolongés
Bypass gastrique en Y <
Technique restrictive
et malabsorptive qui consiste
à créer une petite poche
gastrique combinée
avec une dérivation entre
l’estomac et le jéjunum
par une anse intestinale montée
en Y
Ulcération et sténose de l’anastomose gastrojéjunale, fistule
Dumping syndrome, hypoglycémie réactionnelle
Ostéoporose et fractures
Carences nutritionnelles : vitamine B12, fer, folates, etc.
Risque de carence en vitamine B1 en cas de vomissements prolongés
Supplémentation à vie en micronutriments

A
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Q

fficacité
La perte de poids attendue est de 20 % à 25 % après sleeve et 30 % à 35 % après bypass gastrique en Y sur le long terme. La chirurgie bariatrique diminue la mortalité, améliore les complications mécaniques et métaboliques de l’obésité, et améliore la qualité de vie. Après chirurgie bariatrique, le suivi doit être réalisé la vie durant pour adapter les traitements des comorbidités, rechercher et traiter si nécessaire des complications nutritionnelles et chirurgicales.

A
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Q

Suivi d’une personne atteinte d’obésité
L’obésité est une pathologie chronique nécessitant un accompagnement au long cours visant à :

*évaluer le cheminement du patient et adapter avec lui les modifications thérapeutiques du mode de vie;
*adapter les traitements des complications et des facteurs de risque cardiovasculaire associés;
*en cas de chirurgie bariatrique : évaluer la tolérance (digestive, nutritionnelle, psychologique et chirurgicale) et l’efficacité de la chirurgie bariatrique, ainsi que la prévention des carences.

A
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Q
A
413
Q

Points clés

  • L’obésité est une maladie chronique évolutive multifactorielle sans tendance spontanée à la guérison qui touche actuellement 17 % de la population adulte.
  • Le diagnostic clinique de l’obésité est obtenu par le calcul de l’IMC.
    *La sévérité de l’obésité est définie en cinq stades déterminés sur l’IMC, mais aussi le retentissement médical, le retentissement fonctionnel et sur la qualité de vie, la présence de troubles psychologiques, l’étiologie de l’obésité, l’existence de trouble du comportement alimentaire et la trajectoire pondérale.
  • La prévalence de l’obésité est supérieure dans les classes sociales défavorisées.
  • La distribution de la masse grasse influence le risque de complications de l’obésité.
    *L’obésité est associée à des complications non seulement cardiométaboliques, mécaniques, psychosociales, mais aussi néoplasiques. Elle retentit fortement sur la qualité de vie.
    *La prise en charge d’un patient atteint d’obésité doit s’envisager sur le long terme et ne doit pas se limiter à un objectif de perte de poids.
    *La prise en charge médicale s’appuie sur les modifications thérapeutiques du mode de vie dans une démarche d’éducation thérapeutique.
    *Concernant les enfants, les parents et l’entourage doivent nécessairement être impliqués dans la prise en charge de l’obésité.
    *La prise en charge d’un patient atteint d’obésité comporte habituellement des objectifs négociés et personnalisés de modifications comportementales autour de l’alimentation, du comportement alimentaire et de l’activité physique.
  • La chirurgie bariatrique est indiquée entre 18 et 60 ans (mais est maintenant possible jusqu’à 70 ans après avoir pesé la balance bénéfice/risque) et quand l’IMC est ≥ 40 kg/m2 (ou ≥ 35 kg/m2 si comorbidités associées), après échec d’une prise en charge médicale bien conduite. Elle doit être réalisée dans le respect des indications et des contre-indications, et nécessite un suivi postopératoire à vie.
    *La gastrectomie longitudinale (sleeve gastrectomie) expose au risque de reflux gastro-œsophagien et de carences en fer et vitamine B12. Le bypass gastrique en Y expose à des carences multiples en micronutriments, dont fer, vitamine B12, folates et nécessite une supplémentation à vie.
A
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Q

Il faut distinguer le diabète gestationnel, qui apparaît typiquement à partir de 24 semaines d’aménorrhée (SA), et le diabète antérieur à la grossesse (diabète prégestationnel). Dans ce cas, la grossesse doit être programmée (préparée, avec des objectifs à atteindre avant de l’autoriser médicalement).

Parfois, le diabète prégestationnel est méconnu avant la grossesse; il s’agit généralement dans ce cas d’un diabète de type 2 (car initialement asymptomatique). Cela justifie un dépistage en début de grossesse chez les femmes à risque.

Les hyperglycémies découvertes pendant la grossesse recouvrent de ce fait à la fois le diabète gestationnel et les diabètes avérés découverts pendant la grossesse.

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Q

Rappels physiologiques
Après une phase d’anabolisme facilité en début de grossesse avec diminution des glycémies, il existe de manière physiologique en seconde partie de grossesse une insulinorésistance favorisée par les hormones placentaires et l’augmentation des hormones maternelles de contre-régulation glycémique, dont le cortisol. La finalité de cette insulinorésistance est de router les nutriments vers le fœtus pour faciliter son développement en seconde partie de grossesse.

En situation physiologique, l’euglycémie est maintenue grâce à un hyperinsulinisme réactionnel. Si la fonction pancréatique est déficiente, l’insulinosécrétion est insuffisante pour compenser l’insulinorésistance, en particulier en période postprandiale, ce qui conduit à l’apparition d’un diabète gestationnel (donc typiquement en seconde partie de grossesse).

Le glucose, les corps cétoniques, les acides gras libres et les acides aminés passent la barrière hématoplacentaire, contrairement à l’insuline.

Il existe en parallèle une diminution physiologique du seuil rénal de filtration du glucose, d’où l’absence d’intérêt de surveiller la glycosurie pendant la grossesse.

A
416
Q

Risques de la grossesse diabétique
1 Risques pour le fœtus

Il existe un lien continu entre des taux d’HbA1c élevés à la conception et le risque de malformations fœtales et d’avortements spontanés précoces (souvent secondaires).

En outre, un contrôle glycémique insuffisant durant la grossesse est associé à un risque accru de macrosomie fœtale (hyperglycémie maternelle responsable d’un hyperinsulinisme fœtal; stockage fœtal sous forme de tissu adipeux) et de mortalité périnatale.

En début de grossesse (période d’organogenèse), malformations congénitales et fausses couches spontanées

Ces situations sont plus fréquentes (incidence multipliée par trois à quatre).

Elles sont directement liées à l’équilibre glycémique en début de grossesse et se constituent au moment de l’organogenèse (c’est-à-dire pendant les huit premières semaines de la grossesse) : absence de surrisque avec un contrôle glycémique optimal avant la conception et durant les premières semaines, et risque exponentiellement croissant avec l’élévation de l’HbA1c périconceptionnelle (20 % si HbA1c > 10 %).

Les conséquences de ces malformations (encadré 20.1) sont les suivantes :

Encadré 20.1Malformations congénitales

Voici quelques caractéristiques de ces malformations :

*malformations cardiaques (le plus souvent) :
–persistance du canal artériel;
–communication interventricular;
–coarctation aortique;
*malformations neurologiques :
–spina bifida;
–hydrocéphalie;
–anencéphalie;
*malformations rénales;
*syndrome de régression caudale, exceptionnel.
*fausses couches spontanées accrues;
*mortalité fœtale et néonatale;
*malformations chez le nouveau-né.
Au cours du deuxième trimestre (période de développement fœtal)
L’hyperglycémie maternelle entraîne un hyperinsulinisme fœtal qui déclenche un hyperanabolisme fœtal avec les conséquences suivantes :

*macrosomie, avec augmentation du périmètre abdominal principalement;
*hypoxie tissulaire – d’où la production excessive d’érythropoïétine, qui peut provoquer une polyglobulie et une hyperbilirubinémie;
*retard de la maturation pulmonaire;
*hypertrophie cardiaque septale.
Au cours du troisième trimestre
Il existe un risque de mort fœtale multiplié par deux à trois, surtout en fin de grossesse, en lien avec la macrosomie, les anomalies du rythme cardiaque fœtal, le retard de maturation pulmonaire, mais surtout des anomalies de la vascularisation placentaire.

Autour de l’accouchement

Le diabète prégestationnel est associé à une augmentation de la prématurité et des césariennes. On redoutera :

*un traumatisme fœtal secondaire à la macrosomie (dystocie des épaules);
*une hypoglycémie sévère du nouveau-né (nouveau-né hyperinsulinique avec disparition de l’apport de glucose maternel);
*une hypocalcémie (carence brutale des apports maternels chez ces enfants en hyperanabolisme);
*une hyperbilirubinémie/polyglobulie (secondaire à l’hypoxie);
*une détresse respiratoire transitoire par retard de résorption du liquide amniotique;
*une maladie des membranes hyalines.

A
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Q

Risques chez la mère diabétique
La grossesse aggrave les complications microvasculaires.

Rétinopathie
La rétinopathie peut être aggravée par la grossesse. Elle apparaît rarement sur une rétine normale.

Elle doit être dépistée avant la grossesse ou au tout début, puis tous les trimestres en l’absence d’anomalie, tous les mois en cas de rétinopathie. Il convient également de rechercher un œdème maculaire.Néphropathie
La néphropathie peut apparaître ou s’aggraver pendant la grossesse mais, en général, l’aggravation est transitoire si la fonction rénale est préalablement normale. Les facteurs de risque sont les suivants :

*HTA;
*mauvais équilibre glycémique;
*rétinopathie évoluée au départ;
*ancienneté du diabète (donc plus fréquemment en cas de diabète de type 1).Coronaropathie
La coronaropathie est exceptionnelle, mais gravissime. Elle reste une contre-indication absolue à la grossesse, car il existe un risque vital pour la mère. Elle doit être dépistée en cas de diabète ancien avec des complications microvasculaires : ECG de repos systématique et recherche d’ischémie myocardique (épreuve d’effort ou autre examen) au moindre doute.Risque infectieux
Le risque d’infection urinaire est majoré, avec risque de pyélonéphrite et de décompensation diabétique (acidocétose pour le diabète de type 1), justifiant une recherche d’infection urinaire et une prise en charge rapide au cours de la grossesseHypertension artérielle et prééclampsie
Cette atteinte survient dans 25 % à 30 % des grossesses diabétiques.Dysthyroïdies auto-immunes
La femme diabétique de type 1 est plus exposée au risque de dysfonction thyroïdienne (à dépister systématiquement en préconceptionnel et en début de grossesse).

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Pendant la grossesse
Équilibre glycémique

  • Essentiel quel que soit le type de diabète.
    *Besoins en insuline modifiés : diminution en début de grossesse, puis augmentation en raison de l’insulinorésistance, puis chute brutale après l’accouchement.
    *Diabète de type 2 : dès que le diagnostic de grossesse est posé, si cela n’a pas été fait avant, les hypoglycémiants oraux et les analogues du GLP-1 doivent être interrompus avec un relais par une insulinothérapie qui sera adaptée en fonction des profils glycémiques.
    *Mesurer six glycémies capillaires par jour, avec pour objectifs glycémiques :
    –à jeun et avant repas de 0,60 à 0,90 g/l;
    –postprandial (1 heure) < 1,40 g/l ou (2 heures) < 1,20 g/l;
    *Et/ou mesure continue du glucose interstitiel, l’objectif étant d’avoir plus de 70 % (diabète de type 1) ou 90 % (diabète de type 2) du temps dans la cible entre 0,63 et 1,40 g/l sur 14 jours.
    *Danger maternofœtal en cas d’acidocétose : recherche systématique de la cétonémie ou de la cétonurie si la glycémie est > 2 g/l.
    *Dosage de l’HbA1c une fois tous les trimestres; c’est un moins bon reflet de l’équilibre glycémique pendant la grossesse qu’en dehors, en raison des modifications de l’hématopoïèse liées à la grossesse. L’objectif est ≤ 6,5 %.
    Alimentation
    L’apport calorique ne doit pas être inférieur à 1 600 kcal par jour aux deuxième et troisième trimestres. L’alimentation est répartie le plus souvent en trois repas avec éventuellement des collations si besoin (fractionnement alimentaire).

Surveillance régulière des complications et des comorbidités

*Poids.
*Pression artérielle.
*Fond d’œil ou rétinographie tous les 3 mois (ou une fois par mois en cas de rétinopathie avérée).
*Bandelette urinaire (pour recherche d’acétone et d’albumine) ou recherche de cétonémie, notamment si la glycémie est ≥ 2 g/l.
Surveillance obstétricale
Les mesures à prendre sont répertoriées dans le tableau 20.2.

Tableau 20.2

Surveillance d’une femme diabétique lors d’une grossesse (diabète de type 1 et de type 2).

Diabétologue Obstétricien*
Début de la grossesse
–Fond d’œil
–HbA1c, autosurveillance glycémique (carnet)
–Échographie à 12-14 SA : donne le terme
Suivi de la grossesse
Consultation présentielle, au moins 1 fois par mois :
–poids, PA
–bandelette urinaire
–HbA1c tous les 2 à 3 mois
–fond d’œil au moins 1 fois par trimestre voire 1 fois par mois si rétinopathie
–Échographie à 22-24 SA : morphologie + échographie cardiaque
–Échographie à 32-34 SA :
*biométrie (croissance)
*structure placentaire
*liquide amniotique
*recherche d’une cardiomyopathie hypertrophique
–Surveillance du rythme cardiaque fœtal à partir de 32 SA
Accouchement
–Adaptation de l’insulinothérapie (IVSE si besoin)
–Surveillance spécifique de l’enfant en post-partum : dépistage et traitement des hypoglycémies néonatales avec surveillance de la glycémie capillaire de l’enfant pendant 48 heures
–Traitement du diabète après l’accouchement :
*diabète de type 1 : besoin en insuline diminué (50 % de la dose de fin de grossesse) ;
*diabète de type 2 : si allaitement, poursuivre l’insuline si les objectifs ne sont pas atteints par diététique seule ; si pas d’allaitement, reprise des hypoglycémiants oraux à posologie antérieure à la grossesse
–Césarienne non systématique
–Accouchement déclenché le plus souvent en raison du risque de souffrance fœtale en fin de grossesse (mortalité fœtale in utero augmentée)

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Accouchement et post-partum
Accouchement
Les mesures à prendre sont répertoriées dans le tableau 20.2.

L’accouchement est volontiers programmé après 38 SA, par voie basse ou césarienne en fonction des conditions obstétricales. L’expulsion est facilitée s’il existe une rétinopathie sévère. La patiente est traitée par insulinothérapie (si besoin par voie intraveineuse à la seringue électrique) et perfusion de sérum glucosé, avec une surveillance glycémique horaire, car l’hyperglycémie maternelle est la cause principale de l’hypoglycémie néonatale.

Après l’accouchement
L’allaitement est recommandé.

L’insulinorésistance physiologique disparaissant, les besoins en insuline diminuent dès l’accouchement :

*en cas de diabète de type 1 : on poursuit bien sûr l’insulinothérapie, mais en reprenant les doses antérieures à la grossesse, sinon en diminuant de 50 % les doses de fin de grossesse;
*en cas de diabète de type 2 : reprise du traitement antérieur et donc éventuellement des hypoglycémiants oraux, sauf en cas d’allaitement (l’insuline est alors poursuivie sans reprise des hypoglycémiants oraux).
L’allaitement augmente le risque d’hypoglycémie maternelle; il convient dans ce cas d’adapter l’insulinothérapie et de contrôler la glycémie avant et après la tétée.

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II Prise en charge des hyperglycémies découvertes pendant la grossesse (diabète gestationnel, diabète avéré découvert pendant la grossesse)
A Définition des hyperglycémies découvertes pendant la grossesse

Les hyperglycémies découvertes pendant la grossesse sont des troubles de la tolérance glucidique de sévérité variable, débutant ou diagnostiqués pour la première fois pendant la grossesse, quels que soient le traitement et l’évolution dans le post-partum.

Ces hyperglycémies regroupent le diabète gestationnel (lié uniquement à la grossesse) et un diabète se déclarant pendant la grossesse ou un diabète préexistant mais méconnu (diabète avéré découvert pendant la grossesse). Les critères en faveur d’un diabète avéré sont des glycémies lors de la charge en glucose définissant le diabète en dehors de la grossesse (voir plus loin) pendant la grossesse et/ou en post-partum.

La prévalence des diabètes gestationnels pris en charge est actuellement d’environ 15 % de l’ensemble des grossesses en France.

B Risques
Si le diabète n’est lié qu’à la grossesse, il apparaît classiquement en seconde partie de grossesse (période d’insulinorésistance « physiologique ») et n’entraîne donc pas de risque de malformations fœtales, car la glycémie était normale au moment de l’organogenèse.

Les données disponibles sur les complications maternelles des hyperglycémies découvertes pendant la grossesse indiquent essentiellement des risques de prééclampsie et de césarienne qui sont corrélés de façon positive et linéaire au degré de l’hyperglycémie maternelle. Le surpoids et l’obésité sont des facteurs de risque de prééclampsie et de césarienne, indépendamment de l’hyperglycémie maternelle.

En revanche, les risques de complications fœtales et néonatales liées à l’hyperinsulinisme réactionnel du fœtus sont les mêmes que dans le diabète prégestationnel, avec en particulier la macrosomie, également favorisée par l’obésité maternelle, la prise de poids pendant la grossesse et la multiparité. En effet, il existe une relation linéaire et continue entre le poids de naissance et le niveau de glycémie maternelle. Cette macrosomie est le facteur explicatif de la plupart des complications rapportées en fin de grossesse en cas de diabète gestationnel.

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Dépistage du diabète gestationnel
1 Qui dépister ?

En France, il est recommandé de réaliser un dépistage sélectif (et non systématique) et donc de rechercher un diabète gestationnel chez les patientes qui ont au moins un facteur de risque parmi les suivants :

*âge supérieur ou égal à 35 ans;
*indice de masse corporelle supérieur ou égal à 25 kg/m2 en début de grossesse;
*antécédent de diabète gestationnel;
*antécédent d’enfant macrosome;
*antécédent de diabète de type 2 chez un ou plusieurs apparentés du premier degré (père, mère, frères, sœurs).
N.B. : Le diabète de type 1 chez les apparentés n’est pas un facteur de risque de diabète gestationnel; le premier degré, dans cette définition, désigne habituellement père, mère et enfants.

2 Quand et comment dépister ?
En début de grossesse
Le dépistage en début de grossesse, avant que l’insulinorésistance augmente, a pour objectif de ne pas méconnaître un diabète de type 2 préexistant à la grossesse mais méconnu, qui est associé à une morbidité maternofœtale importante.

Un dosage de glycémie à jeun est préconisé :

*une glycémie à jeun entre 0,92 et 1,25 g/l fait poser le diagnostic de « diabète gestationnel précoce »;
*une glycémie à jeun ≥ 1,26 g/l définit un « diabète avéré découvert pendant la grossesse » (supposé correspondre à un diabète de type 2 méconnu avant la grossesse).
Un diabète gestationnel précoce ou un diabète avéré découvert pendant la grossesse conduit à une prise en charge immédiate, sans nécessité d’un nouveau dépistage après 24 SA.

Entre 24 et 28 SA
L’insulinorésistance augmente à ce terme et justifie un nouveau dépistage chez une femme présentant au moins un facteur de risque, si la glycémie à jeun initiale était < 0,92 g/l (ou non réalisée). Il convient de réaliser une hyperglycémie provoquée par voie orale (HGPO) à 75 g de glucose avec mesure de la glycémie à jeun, à 1 heure et à 2 heures.

Les seuils pour poser le diagnostic de diabète gestationnel après HGPO 75 g sont les suivants :

*glycémie à jeun entre 0,92 g/l et 1,25 g/l (entre 5,1 mmol/l et 6,9 mmol/l);
*et/ou glycémie à 1 heure ≥ 1,80 g/l (≥ 10,0 mmol/l);
*et/ou glycémie à 2 heures entre 1,53 g/l et 1,99 g/l (entre 8,5 mmol/l et 11 mmol/l).
Une seule valeur supérieure ou égale à ces normes suffit pour poser le diagnostic de « diabète gestationnel ».

Si la glycémie est ≥ 1,26 g/l à jeun et/ou ≥ 2,0 g/l 2 heures après la charge, il s’agit d’un « diabète avéré découvert pendant la grossesse ».

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lus tardivement
Un nouveau dépistage peut être réalisé si une hyperglycémie non identifiée auparavant est suspectée devant une macrosomie ou un hydramnios.

En pratique

*En début de grossesse et en présence de facteurs de risque, le diagnostic de diabète gestationnel est posé si la glycémie à jeun est ≥ 0,92 g/l. Dans cette situation, il convient de débuter d’emblée la prise en charge thérapeutique. Il n’est pas nécessaire de réaliser une HGPO entre 24 et 28 SA.
*Entre 24 et 28 SA, chez une patiente avec facteur de risque chez qui la glycémie à jeun en début de grossesse était < 0,92 g/l ou en l’absence de glycémie à jeun réalisée, il convient d’effectuer une HGPO. Les seuils retenus pour poser le diagnostic de diabète gestationnel sont les seuils précédemment cités.

Les modalités de dépistage et de diagnostic des hyperglycémies découvertes pendant la grossesse sont résumées dans la figure 20.1.

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Traitement du diabète gestationnel
La prise en charge intensive du diabète gestationnel découvert après 24 SA permet de réduire les complications maternelles, fœtales et néonatales.

1 Diététique
Les recommandations existantes conseillent un apport calorique quotidien de :

*30 à 35 kcal/kg de poids chez la femme de poids normal;
*25 kcal/kg de poids chez la femme en surpoids ou obèse.
Dans tous les cas, il ne faut pas descendre en dessous de 1 600 kcal par jour.

Le fractionnement de l’alimentation en trois repas et deux à trois collations a pour but de répartir l’apport glucidique dans la journée pour contrôler la glycémie postprandiale tout en maintenant un apport nutritionnel satisfaisant.

Le pourcentage de glucides recommandé dans l’apport calorique total se situe entre 40 % et 50 %. Il n’y a pas de consensus pour la proportion de lipides et protides. Toutefois, une restriction protéique n’est pas souhaitable au cours de la grossesse.

2 Activité physique
Une activité physique modérée et régulière (30 minutes 3 à 5 fois par semaine) est recommandée en dehors de contre-indications obstétricales.

3 Autosurveillance glycémique
L’autosurveillance glycémique pluriquotidienne à domicile est recommandée : initialement 6 fois par jour (trois glycémies préprandiales et trois glycémies postprandiales); puis au minimum 4 fois par jour : le matin à jeun et après chacun des trois repas.

Il est recommandé d’avoir une glycémie < 0,95 g/l avant les repas, < 1,20 g/l en postprandial (2 heures après le début des repas).

Il n’est pas recommandé de mesurer l’HbA1c au cours du diabète gestationnel.

4 Insuline
L’insuline est indiquée dès que les objectifs glycémiques ne sont pas atteints grâce aux mesures hygiéno-diététiques. Tous les autres hypoglycémiants oraux sont contre-indiqués en France.

L’insulinothérapie est adaptée aux profils glycémiques : analogue de l’insuline rapide avant les repas pour lesquels les glycémies postprandiales restent élevées, insuline semi-lente (NPH) ou analogue d’action prolongée si les glycémies préprandiales sont élevées.

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Après l’accouchement
1 Post-partum

L’insuline est arrêtée et les glycémies sont surveillées pendant une journée pour s’assurer qu’un diabète antérieur à la grossesse n’a pas été méconnu.

Un dépistage d’une anomalie de la glycorégulation est recommandé avant la consultation postnatale afin d’identifier les femmes diabétiques de type 2 ou présentant un prédiabète (hyperglycémie modérée à jeun et/ou intolérance au glucose; voir Item 247, chapitre 18). Une mesure de la glycémie à jeun est l’option la plus pratique, bien que moins sensible que la réalisation d’une charge en glucose.

En cas de diabète, une prise en charge spécifique est débutée. En cas de prédiabète, les mesures de prévention du diabète sont renforcées (voir Item 247, chapitre 18).

2 À plus long terme

*Pour les femmes ayant présenté une hyperglycémie découverte pendant la grossesse, le risque de développer une hyperglycémie (prédiabète ou diabète) à 10 ans est de 50 %, le risque de diabète de type 2 étant d’environ 10 %. Le risque augmente avec l’âge et un dépistage par mesure de la glycémie à jeun est préconisé tous les 1 à 3 ans suivant le niveau de risque (voir Item 247, chapitre 18).
*Pour ses descendants, il existe un risque augmenté :
–d’obésité dans l’enfance et l’adolescence;
–de diabète de type 2;
–et d’HTA dès l’adolescence.

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Points clés

*Il est recommandé de dépister les hyperglycémies découvertes pendant la grossesse/diabète gestationnel en présence d’au moins un facteur de risque dès la première consultation prénatale et au 6e mois de la grossesse en cas de dépistage négatif à la première consultation.
* Le traitement repose sur les mesures hygiéno-diététiques (intervention diététique et activité physique) et, si besoin, une insulinothérapie.
*Les autres hypoglycémiants sont contre-indiqués au cours de la grossesse.
* Les femmes ayant fait un diabète gestationnel sont à très haut risque de devenir diabétiques de type 2 et, par conséquent, d’excellentes candidates à la prévention du diabète, notamment en cas de prédiabète en post-partum précoce

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