Dermatologie Flashcards
Exanthèmes I. Définition El. Démarche diagnostique devant un exanthème Eli. Diagnostic étiologique
I. Définition
O Érythème d’apparition brutale et transitoire : * peut être intense ou non, diffus ou de topographie plus spécifique, isolé ou associé à une symptomatologie variée;
* peut s’accompagner d’une atteinte muqueuse (énanthème); * peut être bénin ou potentiellement grave; * deux causes principales : - infectieuses (virales ou bactériennes) : chez l’enfant (principalement les maladies virales) et chez l’adulte (infections sexuellement transmissibles notamment la syphilis et le VIH).
- médicamenteuses.
II. Démarche diagnostique devant un exanthème Elle prend en compte : * l’anamnèse : contexte épidémique, possible contage ou prise médicamenteuse; * l’analyse séméiologique de l’éruption permettant de distinguer les exanthèmes : - roséoliformes ou rubéoliformes formés de petites macules rosées, pâles, bien séparées les unes des autres,
- morbilliformes maculo-papuleux rouges, pouvant confluer en plaques séparées par des espaces de peau saine,
- scarlatiniformes en plaques diffuses rouge vif, légèrement granités à la palpation, sans intervalle de peau saine, chauds ou cuisants, s’intensifiant dans les plis, pouvant évoluer vers une desquamation secondaire en larges lambeaux;
* les signes extracutanés et biologiques indispensables pour orienter le diagnostic : - origine virale : fièvre, syndrome grippal, énanthème, poly-adénopathie, - origine médicamenteuse : prurit, caractère polymorphe de l’éruption, hyperéosinophilie sanguine.
□ Les examens complémentaires à réaliser sont les suivants : * chez l’enfant, aucun examen n’est indispensable sauf si l’on suspecte : - une scarlatine (NFS, prélèvement de gorge), - un syndrome de Kawasaki (NFS, plaquettes, échographie cardiaque);
* chez l’adulte, en dehors d’une cause évidente, on réalisera : NFS, tests hépatiques, sérodiag nostic de MNI, test tréponémique, charge virale VIH, sérologie VIH combinée (Ag-Ac) p24;
* chez la femme enceinte, en prenant en compte son statut sérologique de début de
grossesse : sérologies de toxoplasmose, rubéole, CMV, parvovirus B19 et syphilis.
O Les exanthèmes fébriles de l’enfant sont le plus souvent d’origine virale, mais peuvent également être bactériens, inflammatoires ou médicamenteux.
* Chez l’adulte : penser au VIH et à la syphilis ainsi qu’aux médicaments (toxidermie). * Chez un nourrisson, l’apparition d’une éruption roséoliforme après 3 jours de fièvre isolée évoque le diagnostic d’exanthème subit (roséole infantile).
* La survenue d’une rubéole chez la femme enceinte non immunisée expose au risque de malformations foetales graves.
* Il faut savoir évoquer une rougeole devant l’association catarrhe oculo-nasal, conjonctivite et exan thème fébrile.
* La primo-infection à parvovirus pendant la grossesse expose au risque d’anasarque foetale. * La maladie de Kawasaki expose au risque de survenue d’anévrismes coronariens en cas de retard thérapeutique.
.Q La survenue brutale d’un exanthème diffus scarlatiniforme fébrile doit faire rechercher un syndrome
du choc toxique staphylococcique et dépister des signes de retentissement hémodynamique.
Reconnaître l’érythrodermie * Les signes cliniques comprennent : - un érythème : - généralisé, - inflammatoire, - plus violacé aux zones déclives, - d’intensité variable d’un jour à l’autre, - d’apparition plus ou moins rapide;
- une desquamation constante avec des aspects variés, fine ou en larges lambeaux; - un prurit constant, associé à une dysrégulation cutanée thermique importante marquée
par des épisodes de fièvre et d’hypothermie;- une pachydermie mieux visible au niveau des plis, témoignant d’une infiltration cellu laire spécifique;
- un oedème souvent marqué du visage, où il peut exister un ectropion; - une atteinte des muqueuses (énanthème) possible sous la forme d’une chéilite, d’une conjonctivite ou d’une stomatite;
- une atteinte des phanères après quelques semaines d’évolution avec chute des che veux, sourcils et cils, tandis que les ongles sont dystrophiques, de croissance ralentie, d’où l’apparition d’une ligne de Beau, voire une chute de l’ongle;
- une poly-adénopathie fréquemment associée et généralisée avec des ganglions parfois de grande taille, souples et mobiles;
- des troubles hémodynamiques avec déperditions hydro-électrolytiques et/ou protéiques ; - une altération de l’état général.
* Nécessite une hospitalisation dans un service spécialisé. * Ne peuvent être considérés comme une érythrodermie : - une éruption érythémato-squameuse avec de simples éléments multiples et diffus sépa rés par des intervalles de peau saine;
- un exanthème ou une nécrolyse épidermique avec décollement dont l’évolution est
aiguë.La biopsie cutanée peut mettre en évidence des signes histologiques spécifiques de la mala die responsable de l’érythrodermie. Elle doit cependant être répétée en cas de suspicion de lymphome cutané.
* Des prélèvements bactériologiques (hyperthermie, complications infectieuses) ou parasito-
logiques peuvent être nécessaires.
Complications des érythrodermies La gravité de l’érythrodermie est corrélée au terrain sur lequel elle survient et aux complications
qu’elle entraîne.a A. Troubles hydro-électrolytiques
Déperdition hydro-électrolytique : * provoquée par la vasodilatation cutanée, la desquamation, le suintement, l’oedème et la fièvre;
* pouvant décompenser une insuffisance cardiaque, respiratoire ou rénale. B. Complications du décubitus
* À rapidement prendre en charge. * Éviter : dénutrition, cachexie, escarres.
C. Complications infectieuses
Plus souvent infections cutanées bactériennes (staphylocoque), virales (herpès ou varicellezona), ou infections générales (pneumopathies-septicémies).
D. Décès
La mortalité peut atteindre 20 % et est liée aux différentes complications de la maladie, notamment infectieuses.
Prise en charge d’une érythrodermie * Hospitalisation en urgence : - examens biologiques pour évaluer la gravité de la dermatose; - rééquilibrer des troubles hydro-électrolytiques; - traiter d’éventuelles défaillances viscérales; - recherche et traitement étiologiques (voir plus haut).
* Traitement symptomatique : - le réchauffement du malade permet de limiter ses pertes caloriques, l’hypercatabolisme et la dénutrition ;
- dans les formes graves, une corticothérapie locale de niveau 1 (très forte) entraîne une
amélioration symptomatique rapide.
- L’érythrodermie est un érythème généralisé associé à une desquamation et évoluant depuis au moins 6 semaines. Érythrodermie n’est pas synonyme d’érythème ou d’exanthème.
- L’aspect clinique de l’érythrodermie ne préjuge pas de sa cause. * L’érythrodermie est un syndrome dermatologique grave dont les principales causes sont : psoriasis, der matite atopique, lymphome cutané et toxidermie (DRESS).
- Une érythrodermie nécessite une hospitalisation urgente.
Les dermatoses bulleuses auto-immunes (DBAI) constituent un groupe hétérogène de mala dies peu fréquentes et de pronostic variable, souvent péjoratif. Le diagnostic des DBAI nécessite la combinaison d’examens clinique, anatomopathologique et
immunopathologique.
I. Physiopathologie Q La cohésion de la peau est assurée par deux systèmes d’adhérence : * les desmosomes permettent l’adhérence interkératinocytaire et donnent à l’épiderme sa cohésion ;
* la jonction dermo-épidermique (JDE) est une région morphologiquement complexe com prenant de la superficie (pôle basal du kératinocyte) vers la profondeur (derme superfi ciel) : les hémidesmosomes, les filaments d’ancrage, la lame dense et les fibrilles d’ancrage. L’ensemble de ces structures assure l’adhérence entre l’épiderme et le derme sous-jacent.
Toutes ces structures sont composées de protéines d’adhérence qui peuvent être la cible d’au toanticorps, ce qui est à l’origine de la formation des bulles. On distingue deux grands groupes de DBAI : * les DBAI mtra-épidermiques (groupe des pemphigus), où la perte de cohésion des kérati nocytes (acantholyse) est due à l’altération des desmosomes par des autoanticorps, «anti substance intercellulaire»;
* les DBAI sous-épidermiques (groupe des pemphigoïdes et autres DBAI de la JDE), avec perte de l’adhérence dermo-épidermique par altération d’un composant de la JDE par des
autoanticorps «anti-membrane basale».
II. Diagnostic positif A. Clinique O Une bulle est une lésion élémentaire liquidienne superficielle de contenu clair ou sérohématique de taille supérieure à 5 mm. Elle peut siéger sur la peau ou les muqueuses. Il faut également évoquer une dermatose bulleuse devant : * des érosions cutanées post-bulleuses, arrondies, parfois recouvertes d’une croûte; * des érosions des muqueuses externes, les bulles y étant fugaces et rarement vues; * ou un vaste décollement épidermique donnant un aspect de « linge mouillé sur la peau » ; * ou un signe de Nikolsky correspondant à un décollement cutané provoqué par un frotte
ment appuyé sur la peau saine. Il traduit un décollement intra-épidermique (acantholyse).
B. Histologie Il existe une concordance entre l’aspect clinique d’une bulle récente et le niveau de clivage observé en histologie : * une bulle sous-épidermique par clivage entre le derme et l’épiderme est une bulle tendue (car le toit de la bulle est constitué par l’épiderme intact), de contenu clair ou hématique;
* une bulle intra-épidermique par détachement des kératinocytes entre eux est une bulle
flasque et fragile (car le toit de la bulle est très fin du fait du clivage intra-épidermique).
C. Immunopathologie L’origine auto-immune d’une maladie bulleuse est mise en évidence par l’examen en immuno fluorescence directe (IFD) d’une biopsie de peau (ou de muqueuse) périlésionnelle qui objec tive des dépôts d’immunoglobulines IgG et/ou IgA et/ou de C3, in vivo. Ces dépôts peuvent être : * linéaires le long de la JDE dans les DBAI sous-épidermiques; * au pourtour des kératinocytes dans les DBAI intra-épidermiques (pemphigus), donnant un aspect en mailles de filet (ou en résille).
Q N. B. : les anticorps dirigés contre la JDE (ou la jonction chorio-épithéliale quand il s’agit de muqueuses) sont appelés anticorps anti-membrane basale et les anticorps déposés à la périphérie des kératinocytes dans les pemphigus, anticorps anti-substance intercellulaire (anti-SIC). L’IFD est complétée par l’examen du sérum : * en IF indirecte (IFI) à la recherche d’autoanticorps sériques circulants anti-membrane basale dans les DBAI de la JDE ou anti-SIC dans les pemphigus;
* en immunotransfert ou en ELISA, qui permettent de caractériser les antigènes reconnus par les autoanticorps.
III. Diagnostic différe
B. Diagnostic différentiel d’une maladie bulleuse non auto-immune
£3 Les maladies bulleuses non auto immunes seront éliminées sur l’aspect clinique, l’évolution et la négativité des examens immunopathologiques, essentiellement l’IFD cutanée. On éliminera : * O une toxidermie bulleuse : nécrolyse épidermolyse toxique (syndrome de Lyell et syn drome de Stevens-Johnson) qui se caractérise par : - un début brutal et une évolution rapide, - des signes généraux imposant l’hospitalisation en urgence, - la fréquence de l’atteinte muqueuse (souvent inaugurale),
- la prise de médicaments dans le délai d’imputabilité (voir chapitre 5 - item 115);
Q une dermatose bulleuse par agents externes : - de cause physique (érythème actinique ou « coup de soleil », photophytodermatose ou «dermite des prés»), brûlures thermiques,
- de cause chimique (dermatite caustique, piqûres d’insectes, etc.), dont le diagnostic repose sur l’anamnèse;
* un érythème polymorphe bulleux : - lésions cutanées éruptives en «cocardes» (comportant au moins trois cercles concen triques),
- de disposition acrale (coudes, genoux, mains, visage), - lésions muqueuses bulleuses ou érosives fréquentes (buccales, génitales et conjonctivales), - survenue le plus souvent 10-15 jours après une infection (le plus souvent une récur rence d’herpès),
- évolution spontanée vers la guérison en 2 à 3 semaines.
Chez l’adulte, on éliminera en plus :
* une porphyrie cutanée tardive, caractérisée par :□ Chez l’enfant, on éliminera en plus : * une épidermolyse bulleuse héréditaire :épidermolyse staphylococcique
Diagnostic étiologique El Le diagnostic d’une DBAI (tableau 2.1) repose sur l’interrogatoire, l’examen clinique et les
examens complémentaires immunopathologiques.
Interrogatoire Q II recherche : * la prise de médicaments inducteurs connus : -
D-pénicillamine, inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) au cours des pemphigus,
- diurétiques épargnant le potassium au cours de la pemphigoïde bulleuse, -
vancomycine, anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), IEC dans les dermatoses à IgA linéaire; 28
* Q les antécédents personnels ou familiaux de maladies auto-immunes; * l’âge de début; * les signes fonctionnels : prurit; * les circonstances d’apparition : grossesse pour la pemphigoïde gravidique; * l’existence d’un terrain débilité : notamment maladies neurologiques grabatisantes (acci dent vasculaire cérébral, démence, maladie de Parkinson, souvent associées chez les patients atteints de pemphigoïde bulleuse), diabète ou insuffisance cardiaque, source de
complications évolutives lors de la mise en route de la corticothérapie.
B. Examen clinique * O Taille et aspect des bulles : tendues (DBAI de la JDE) ou flasques (DBAI du groupe des pemphigus).
* État de la peau péribulleuse : saine (pemphigus), urticarienne ou érythémateuse (pemphi goïde bulleuse).
* Existence d’un signe de Nikolsky (pemphigus). * Topographie des lésions cutanées : tronculaire, racine et face de flexion des membres (pem phigoïde bulleuse), faces d’extension des membres (dermatite herpétiforme, épidermolyse bulleuse acquise), plis de flexion, cuir chevelu (pemphigus, pemphigoïde cicatricielle).
* Existence éventuelle de lésions muqueuses (buccale, conjonctivale, génitale) en faveur d’un pemphigus ou d’une pemphigoïde cicatricielle.
* On apprécie aussi : - l’étendue des lésions (bulles, érosions), le nombre moyen de nouvelles bulles quotidiennes; - l’éventuelle surinfection locale; - le retentissement sur l’état général (signes de déshydratation ou d’infection systémique).
* O Toute forme étendue ou rapidement évolutive impose une hospitalisation en
service spécialisé.
C. Examens complémentaires * Biopsie sous anesthésie locale d’une bulle cutanée intacte et récente (ou du bord d’une érosion muqueuse) pour examen histopathologique.
* L’histologie fera la distinction entre un clivage sous-épidermique ou intra-épidermique. * Biopsie (peau ou muqueuse) en zone périlésionnelle pour IFD montrant des anticorps fixés in vivo, anti-membrane basale ou anti-SIC.
* □ Prélèvement sanguin pour recherche d’anticorps sériques, anti-membrane basale ou
anti-SIC par IFI standard, en précisant leur classe (IgG, IgA) et leur titre.
A. DBAI sous-épidermiques Les DBAI sous-épidermiques sont liées à la production d’autoanticorps dirigés contre diffé rentes protéines de la JDE.
7. Pemphigoïde bulleuse
O C’est la DBAI la plus fréquente. Elle touche surtout les sujets âgés (en moyenne 80 ans). Le tableau 2.2 compare les caractéristiques de la pemphigoïde bulleuse et du pemphigus.
Signes cliniques * Début par un prurit généralisé et intense, des placards eczématiformes ou urticariens. * Éruption caractéristique : bulles tendues, souvent de grande taille, siégeant sur base érythé mateuse, eczématiforme ou urticarienne (fig. 2
* Lésions symétriques avec une prédilection pour les faces de flexion et la racine des membres, la face antéro-interne des cuisses et l’abdomen.
* Pas de signe de Nikolsky.
* Atteinte muqueuse rare (habituellement absente).Diagnostic Il se fait sur les examens suivants : * numération-formule sanguine : hyperéosinophilie fréquente; * histologie standard : bulle sous-épidermique contenant des éosinophiles, sans acantholyse ni nécrose des kératinocytes, associée à un infiltrat inflammatoire dermique riche en éosi nophiles (î g. 2.2);
* IFD : dépôts linéaires d’IgG et/ou de C3 à la JDE (fig. 2.3); * QIFI standard : anticorps anti-membrane basale (de classe IgG) détectables dans 80 % des sérums (titre non lié à la sévérité ou à l’étendue de la maladie); ELISA anti-BPAG1 et anti-BPAG2 ;
* IFI sur peau clivée : les anticorps se fixent au toit du clivage (versant épidermique).
Pgemogoide bullese tt
Évolution et traitement * O II s’agit d’une maladie grave dont le taux de mortalité à 1 an est de 30 à 40 %. * Les décès sont principalement dus à des complications infectieuses (septicémies, pneumo pathies) ou cardiovasculaires (insuffisance cardiaque, accident vasculaire cérébral) favori sées par le traitement corticoïde et/ou immunosuppresseur et le terrain (sujet âgé).
* Le traitement comporte des mesures propres à toute maladie bulleuse : - bains antiseptiques; - hydratation compensant les pertes hydro-électrolytiques en s’efforçant de ne pas utiliser de voie veineuse compte tenu du risque infectieux;
- nutrition hypercalorique compensant les pertes protéiques; - corticothérapie : - locale : propionate de clobétasol (20 à 40 g/jour). Une telle corticothérapie locale forte a une efficacité similaire à la corticothérapie générale mais une meilleure tolé rance (diminution des effets secondaires et baisse de la mortalité). La corticothérapie est ensuite diminuée progressivement par paliers. Le traitement est poursuivi pen dant une durée de 6 à 12 mois,
- générale : prednisone 0,5 à 0,75 mg/kg/jour suivi d’une dégression progressive sur plusieurs mois, pouvant être utilisé en première intention pour les atteintes limitées (< 10 bulles/jour).
* Des mesures adjuvantes sont associées à toute corticothérapie. * Importance d’une surveillance de la tolérance du traitement corticoïde, la morbidité et la mortalité d’origine iatrogène étant majeures à cet âge (poids, pression artérielle, dépis
tage de foyers infectieux, prévention des complications thromboemboliques, diabète…).
- Pemphigoïde gravidique (syn. : pemphigoïde gestationis, pemphigoïde de la grossesse)3. Pemphigoïde cicatricielle Épidermolyse bulleuse acquise
Dermatoses à IgA linéaireDermatite herpétiforme
- Définition, épidémiologie 34
O Les pemphigus sont des maladies auto-immunes rares qui touchent la peau et les muqueuses. Les autoanticorps sont dirigés contre des protéines des desmosomes et sont responsables de l’acantholyse et du clivage intra-épidermique. On distingue trois grands types de pemphigus : * Q le pemphigus vulgaire (PV), où le clivage est profond, suprabasal ; * les pemphigus superficiels (PS), où le clivage est superficiel, sous-corné; * le pemphigus paranéoplasique (PPN). Les pemphigus peuvent être déclenchés par des médicaments contenant un groupe thiol (D-pénicillamine, captopril, thiopronine, pyrithioxine) et d’autres molécules (piroxicam, bêta bloquants, phénylbutazone, rifampicine). L’arrêt du médicament ne suffit pas toujours à enrayer le pemphigus contrairement aux dermatoses à IgA linéaires médicamenteuses. L’association à d’autres maladies auto-immunes est possible : myasthénie, lupus érythé mateux, syndrome de Gougerot-Sjôgren, polyarthrite rhumatoïde, maladie de Basedow,
glomérulonéphrites.
Pemphigus vulgaire O II débute souvent de façon insidieuse par des lésions muqueuses érosives : * buccales (fig. 2.6) : érosions douloureuses, traînantes, pouvant gêner l’alimentation (dys phagie) et entraîner un amaigrissement;
* génitales, moins fréquentes; * oesophagiennes, intravaginales, anales et oculaires, parfois. L’atteinte cutanée est généralement secondaire, apparaissant plusieurs semaines ou plusieurs mois après les érosions muqueuses, avec des bulles : * flasques à contenu clair, siégeant en peau saine; * fragiles, laissant rapidement place à des érosions post-bulleuses cernées par une collerette épidermique (fig. 2.7), siégeant volontiers dans les plis de flexion et le cuir chevelu, mais d’autres localisations sont possibles;
* et un signe de Nikolsky en peau périlésionnelle, et parfois en peau saine.
Pemphigus superficiels □ Ils regroupent le pemphigus séborrhéique (forme localisée) et le pemphigus foliacé (forme disséminée). Dans le pemphigus séborrhéique, les bulles, très fugaces et inconstantes, sont remplacées par des lésions squamo-croûteuses, parfois prurigineuses, distribuées sur les zones séborrhéiques : face antérieure du thorax, visage, cuir chevelu, région interscapulaire (fig. 2.8).
Il n’existe habituellement pas d’atteinte muqueuse.
Pemphigus paranéoplasique
Examens complémentaires * O L’examen histologique d’une bulle récente montre : - une bulle intra-épidermique, suprabasale dans le pemphigus vulgaire, sous-cornée par clivage dans la couche granuleuse dans les pemphigus superficiels;
- une acantholyse (kératinocytes détachés les uns des autres; fig. 2.9).* L’IFD de biopsie de peau ou de muqueuse périlésionnelle montre des dépôts d’IgG et de C3 au pourtour des kératinocytes, prenant un aspect en résille ou en mailles de filet (fig. 2.10).
* O L’examen du sérum en IFI standard montre des anticorps circulants anti-SIC de classe IgG dont le titre est corrélé à l’activité de la maladie.
* L’immunotransfert et l’ELISA déterminent les antigènes reconnus par les autoanticorps circulants (desmogléine 3 au cours du pemphigus vulgaire, desmogléine 1 au cours du
pemphigus superficiel).
- Pronostic, traitement * © La mortalité, autour de 10 %, est principalement due aux complications iatrogènes. * Le traitement d’attaque vise à contrôler la maladie : corticothérapie générale à forte dose : prednisone (1 à 1,5 mg/kg/jour).
* 0 Le rituximab (un anticorps monoclonal ciblant le CD20) peut être proposé en première intention afin de réduire la dose et la durée de la corticothérapie et réduire les effets secon daires de cette dernière.
* Des traitements immunosuppresseurs, par azathioprine, cyclophosphamide, ciclosporine,
sont parfois associés à la corticothérapie en cas de résistance au traitement corticoïde.
I. Vieillissement cutané solaire (héliodermie) * Q Terrain à risque des cancers cutanés : - exposition chronique aux radiations ultraviolettes (UV) entraînant : - vieillissement (sénescence) cutané, - cancers cutanés (tous types).
* Deux types de vieillissement cutané, de mécanismes proches associant susceptibilité géné tique et dommages cellulaires : - intrinsèque (lié à l’âge) : susceptibilité génétique >environnement; - extrinsèque (environnement) : exposition solaire > susceptibilité génétique (tableau 20.1|).
* Mécanismes à l’origine de l’héliodermie : - susceptibilité génétique : phototype (capacité de photoprotection naturelle de l’individu). Six phototypes sont décrits selon : couleur des yeux, des cheveux, présence d’éphélides (taches de rousseur), sensibilité aux coups de soleil et aptitude au bronzage (tableau 20.2);
- accumulation de dommages cellulaires (UV -» phototoxicité directe sur l’ADN prin cipal photophore de l’organisme + stress oxydatif impliquant la formation d’espèces réactives toxiques de l’oxygène).
* Aspects cliniques (tableau 20 3 et fig. 20.1 et 20.2). * Prévention primaire = réduction de l’exposition solaire (récréative et quotidienne) : - dès l’enfance; - +++ chez phototypes clairs (l/ll; susceptibilité aux UV > phototypes foncés VA/I); - information sur les risques; éducation aux moyens de protection; adaptation compor
tementale (accompagnement et communication personnalisée : éducation).
Tableau 20.2 O Classification des phototypes selon Fitzpatrick Phototype
Réaction au soleil I
Bronzage = 0 Coups de soleil = systématique
Phénotype
Carnation très claire Yeux clairs Cheveux blonds ou roux Nombreuses éphélides
II
Bronze = plus ou moins (difficilement) Coups de soleil = souvent
III
Bronzage = progressif Coups de soleil = parfois
IV V
Bronzage = facile Coups de soleil = peu
Bronzage = très facile Coups de soleil = exceptionnel
VI
Bronzage = constant Coups de soleil = absents
Tableau 20.3 Q Signes cliniques du vieillissement Perte de l’élasticité et anomalies épidermiques
Carnation très claire Cheveux blonds ou châtains Éphélides UV-induites
Carnation claire Yeux bruns Cheveux blonds ou châtains
Carnation mate Cheveux châtains ou bruns, yeux foncés
Peau foncée Cheveux foncés Yeux foncés
Peau noire
Yeux bruns ou noirs
II. Épidémiologie, physiopathologie A. Carcinomes cutanés
325
* O Cancers de l’adulte les plus fréquents au monde. * 90 % des cancers cutanés. * Motif de consultation quotidien. * Incidence en augmentation constante (allongement de la durée de vie + exposition solaire répétée) : - carcinomes basocellulaires (CBC) : > 150 cas/100000 habitants par an en France; - carcinomes épidermoïdes (CE) : >30 cas/100000 habitants par an en France; - âge d’apparition : >40 ans, sauf terrain favorisant (immunodépression, génodermatoses prédisposantes comme xeroderma pigmentosum, syndrome de Gorlin, etc.).
* Terrain et facteurs de risque sont communs aux CBC, aux CE et aux mélanomes qui sont
des maladies souvent associées.
B. Carcinogenèse épithéliale * Accumulation d’événements mutagènes et micro-environnementaux : - 1 : initiation -» agent carcinogène (UV +++, chimique, radiations ionisantes, inflamma tion chronique, infection à HPV, etc.);
- 2 : promotion ; - 3 : progression -> cocarcinogènes (immunosuppression, infections à HPV, UV, chimique, etc.).
* Exposition UV expression clinique retardée avec latence de 30/40 ans -> cancers cutanés.
Les facteurs de risque sont présentés dans l’encadré 20.1 et le tableau 20.4.
Encadré 20.1 Facteurs de risque communs à la carcinogenèse épithéliale * O Âge avancé. * Expositions solaires (UV) : - expositions chroniques et cumulées : CE et CBC ; - expositions solaires intenses et intermittentes (coup de soleil, sujet jeune) : mélanome et CBC.
* Terrain/facteurs génétiques (phototype), carnation claire (I et II) : risque accru.
Tableau 20.4 O Autres facteurs de risque identifiés Affections génétiques
Xeroderma pigmentosum (anomalie des gènes de réparation de l’ADN) Épidermodysplasie verruciforme (rôle de certains HPV) Naevomatose basocellulaire = syndrome de Gorlin (anomalie d’un gène du développement : PATCH)
Immunosuppressions acquises
Iatrogène : transplantation d’organes +++ Maladies hématologiques chroniques (leucémie lymphoïde chronique, lymphome) Infection VIH Néoplasies
Infections Radiations ionisantes
Dermatoses inflammatoires Plaies chroniques
326 Exposition à des carcinogènes chimiques
Papillomavirus humains (HPV) Radiodermite chronique
Lupus érythémateux cutané, lichen muqueux érosif Ulcère de jambe, cicatrice de brûlure, escarres
Arsenic, goudrons, tabac
III. Principales formes anatomocliniques * O CE : - évolution agressive; - métastases possibles (dissémination lymphophile puis hématogène).
* CBC : - fréquents +++, évolution lente, malignité locale;
- métastases exceptionnelles.
A. Carcinome épidermoïde 1. Facteurs de risque
. □ Exposition solaire cumulative/chronique (dose totale d’UV reçue sur une vie) +++.
* Papillomavirus humains (HPV) oncogènes (muqueuses +++, col de l’utérus, organes géni taux externes masculins et féminins, anus, cavité oro-pharyngée).
* Autres mutagènes (chimiques, radiations, inflammation chronique, plaies chroniques etc.;
voir tableau 20.5) plus rares et contextuels.
- Précurseurs des carcinomes épidermoides O Le CE résulte très souvent de l’évolution d’une lésion précancéreuse. Peut survenir de novo.Précurseurs cutanés * Kératoses actiniques photo-induites (ou solaires ou «séniles») : lésions précancéreuses les plus fréquentes. Lésions très fréquentes mais potentiel de transformation limité. Mar queur de risque de cancer cutané : - zones photo-exposées (visage, dos des mains); - lésions kératosiques ou croûteuses, multiples ± érythémateuses/chamoisées ± fines,
rugueuses à la palpation (« papier de verre »), saignant facilement après grattage (fig* Champ de cancérisation : zone anatomique comportant des anomalies prénéoplasiques et des mutations géniques infracliniques et multifocales : - traduction clinique : kératoses actiniques multiples en champ ± CE ou CBC.
* □ Traitement des kératoses : - moyens physiques : cryothérapie (azote liquide), électrocoagulation ou laser CO2, - moyens physico-chimiques : photothérapie dynamique, - moyens chimiques (topiques) : 5-fluoro-uracile crème, imiquimod crème,
- prévention primaire et secondaire par photoprotection.
Précurseurs muqueux * O Leucoplasies : - kératinisation anormale de la muqueuse (labiale inférieure +++, rôle tabac et UV); - lésions blanchâtres bien limitées, asymptomatiques, adhérentes et ne saignant pas au contact.
* 0 Traitement: - destruction (voir plus haut les moyens de traitement des kératoses)/chirurgie; - prévention : - arrêt du tabac et réduction des expositions aux autres cocarcinogènes, - traitement d’un état inflammatoire chronique muqueux (lichen scléreux, lichen
érosif).
- Carcinome intra-épithélial ou carcinome in situ (ou maladie de Bowen) O Forme non invasive de CE (dysplasie de toute la hauteur de l’épithélium mais pas de
franchissement de la membrane basale, métastase impossible).Cutané * Lésion souvent unique, en zone photo-exposée. * Plaque érythémateuse ou rosée ± pigmentée, bien limitée, squamo-croûteuse, à bordure parfois festonnée (fig. 20.4).
* Aspect «fissuraire/érodé» superficiel : suspect ++.
* Biopsie + examen anatomopathologique pour confirmation du diagnostic.* Si infiltration ± ulcération franche -révoquer une lésion invasive qui aura alors un potentiel métastatique.
* Traitements locaux ce Livre p.rov.ient de la f.ai.ll.e do.n© g.r.a.t.o.s : t.rouv© aill.eurs h.ont.eux : rej.oignez n.no.us - b it .1 y /3 6NA5bl chirurgicaux ou destructeurs
physiques ou chimiques : Q cryochirurgie, 5-fluoro-uracile topique, imiquimod topique, photothérapie dynamique (PTD). Muqueuse génitale * O Sujet masculin : « érythroplasie de Queyrat » (lésion érythémateuse rouge vif du gland, bien limitée, parfois discrètement érosive).
* Sujet féminin : lésion unique, chronique, plane ou peu infiltrée, rosée avec plages pigmentées.
* Biopsie + examen anatomopathologique pour confirmation du diagnostic. * Si infiltration ± ulcération franche -» évoquer une lésion invasive qui aura alors un potentiel métastatique.
* Traitements locaux chirurgicaux ou destructeurs physiques ou chimiques : Q cryochirurgie,
5-fluoro-uracile topique, imiquimod topique, photothérapie dynamique (PTD).
- Carcinome épidermoïde cutané primitif invasif Diagnostic positif
O Le carcinome épidermoïde cutané (CEC) primitif invasif apparaît surtout après 60 ans, homme >femme, tumeur cutanée et/ou muqueuse : * trois clés sémiologiques ± associées entre elles : - ulcération chronique, - bourgeonnement (aspect «végétant» ou nodulaire), - croûte;
* sur une zone photo-exposée de façon chronique;* lésion croûteuse, jaunâtre, indurée avec ulcération centrale (fig. 20.5); * ou lésion végétante ou bourgeonnante ( g. 20.6) ; * ou l’association des deux : lésion ulcéro-bourgeonnante ou ulcéro-végétante; * aspect évocateur -> exérèse à visée diagnostique ou biopsie
examen anatomopatho logique
confirmation + caractérisation histopronostique.Diagnostic différentiel O II se fait avec : * tous les autres cancers cutanés; * les kératoses actiniques.
Anatomie pathologique du carcinome épidermoïde cutané invasif * O Kératinocytes de grande taille, en lobules ou en travées, mal limitées, disposition anarchique. * Invasion dermo-hypodermique, stroma inflammatoire. * Différenciation kératinisante (globes cornés).
* Mitoses et atypies cytonucléaires.
Évolution, pronostic * Tout CEC doit être considéré comme potentiellement agressif. * Les facteurs de mauvais pronostic selon une classification clinico-pathologique sont regroupés dans l’encadré 20.2. Ils sont importants à identifier car ils guident la prise en charge.
Encadré 20.2 Facteurs de mauvais pronostic des carcinomes épidermoïdes cutanés : classification clinico-pathologique * Q Localisation :
- faible risque : zones photo-exposées du visage, hors cuir chevelu et zones péri-orificielles; tronc; membres; - haut risque : cuir chevelu, zones péri-orificielles du visage (nez, lèvres, oreilles, paupières), muqueuses; sur peau pathologique (radiodermites, cicatrices de brûlures, plaies chroniques).
* Taille de la tumeur primitive : surtout si supérieure à 2 cm. * Degré d’invasion locale : adhérence au plan profond; envahissement péri-nerveux et/ou osseux; emboles vasculaires.
* Épaisseur tumorale histologique >3 mm. * Degré de différenciation cellulaire en histologie : moyen à indifférencié. * Récidive locale.
* Immunodépression.
Risques évolutifs * Évolution locale : infiltration neurotrope; dissémination locorégionale par emboles vasculaires; * Évolution métastatique (régionale ou systémique) : - lymphophile : premiers relais ganglionnaires (2 % des formes cutanées et 20 % des formes muqueuses),
- puis hématogène : poumons ++, foie, os, ganglions à distance, etc. ; plus fréquent pour les CEC muqueux.
* Risque de récidive : estimé globalement à 7 % après diagnostic d’un CEC ; * Évolution défavorable souvent liée à une prise en charge initiale tardive, insuffisante, ina
daptée ou à des forme agressives.
Examen clinique * O Contrôle de la mobilité par rapport au plan profond, diamètre de la lésion. * Recherche d’autres carcinomes et/ou mélanome sur l’ensemble de la peau. * Recherche d’une adénopathie dans le territoire de drainage.
Bilan d’extension Pas de bilan d’extension systématique, sauf si forme agressive, terrain à risque particulier (immunodéprimé) ou signe clinique d’extension locorégionale -> échographie ganglionnaire,
scanner thoraco-abdominal, TEP-scan.
B. Carcinome basocellulaire * Survenue ++ après 50 ans. * Facteurs prédisposants : - exposition solaire : expositions intermittentes aiguës (enfance et adolescence ++) >exposition chronique; 80 % des CBC surviennent sur les zones photo-exposées;
- phototype : phototype clair; - prédisposition génétique : syndrome de Gorlin (naevomatose basocellulaire), xeroderma pigmentosum.
* Pas de précurseur (les kératoses actiniques ne se transforment pas en CBC).
- Diagnostic positif * Sur zones photo-exposées, jamais sur les muqueuses. * Une clé sémiologique quasi constante, la perle : - lésion perlée : papule rosée arrondie, translucide souvent avec télangiectasies; - diamètre variable, du millimètre à plusieurs centimètres.
* La perle est associée à d’autres éléments sémiologiques : croûtes, sclérose, ulcération, pig mentation, kératose.
* Trois variétés cliniques de CBC : - CBC nodulaire (fig. 20.7) : tumeur ferme, bien limitée, lisse, pouvant simuler une lésion kystique ou s’étendre de manière centrifuge; forme la plus fréquente;
- CBC superficiel (fig. 20 8) : plaque érythémateuse et squameuse, bordée de petites perles parfois à peine visibles à l’oeil nu et s’étendant progressivement; il siège surtout sur le tronc;
- CBC sclérodermiforme (fig. 20.9) : il prend l’aspect d’une cicatrice blanchâtre, rigide, dure, mal limitée, parfois atrophique.
* Toutes ces formes peuvent s’ulcérer au cours de leur évolution (fig. 20.10). La pigmentation
ne préjuge pas de l’évolution.
- Diagnostic différentiel * Autres tumeurs cutanées +++ (CEC, maladie de Bowen, mélanome dans les formes pig mentées appelées CBC tatoués).
* Autres dermatoses : le CBC superficiel peut être confondu avec une plaque de psoriasis ou une dermatophytie.
* Aspect évocateur ->■ exérèse à visée diagnostique -> examen anatomopathologique -> confirmation + caractérisation histopronostique.
* Biopsie avant traitement si diagnostic incertain, si traitement proposé non chirurgical ou si
exérèse chirurgicale complexe.
- Anatomie pathologique du carcinome basocellulaire * □ Lobules de petites kératinocytes basophiles, ressemblant à ceux de la couche basale de l’épiderme.
* Disposition périphérique palissadique. * Fentes de rétraction autour des lobules (semblant se détacher du derme). * Formes infiltrantes ou sclérodermiformes : associées à un stroma dense et fibreux, et aux
limites imprécises.
- Évolution, pronostic * Risques évolutifs : - récidive locale; - extension locorégionale à bas bruit; - survenue d’un autre cancer plus agressif (lien épidémiologique avec mélanome/CEC).
* CBC -> marqueur de risque de cancer de la peau —> surveillance et dépistage; * CBC métastase exceptionnellement -> pas de bilan d’extension à distance; * CBC -> potentiel invasif local -> formes étendues : imagerie locale parfois nécessaire pour guider le traitement (scanner cranio-facial, IRM du massif facial) (encadré 20.3);
* Le seul bilan d’extension systématique est l’examen clinique à la recherche d’autres
carcinomes associés.
Encadré 20.3 Facteurs de mauvais pronostic des carcinomes basocellulaires .□Localisation à l’extrémité céphalique : nez et zones péri-orificielles. * Formes mal limitées (sclérodermiforme, infiltrant). * Diamètre élevé surtout > 2 cm, ou > 1 cm sur nez et zones péri-orificielles.
* Caractère récidivant : risque global évalué entre 5 et 10 %.
C Traitement des carcinomes cutanés O Traitement des formes localisées de CBC et CEC : généralement similaire.
1. Chirurgie de la tumeur primitive * Discussion/validation en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) sauf pour les CBC sans critères agressifs.
* Exérèse chirurgicale = traitement de première intention avec marges selon le groupe
pronostique (bon, intermédiaire, mauvais).* Déroulé détaillé des temps cliniques : - consultation d’annonce; présentation en RCP si traitement complexe; - biopsie préalable si diagnostic incertain ou avant traitement chirurgical complexe; - chirurgie et examen anatomopathologique de la pièce : - exérèse chirurgicale d’emblée si diagnostic très probable, - simple exérèse-suture en ambulatoire le plus souvent, - parfois en deux temps avec reconstruction sous anesthésie générale selon le geste : exérèse + contrôle anatomopathologique, puis reconstruction si exérèse complète,
- marges d’exérèse standardisées : marge saine mesurée autour de la tumeur; de 3 à 10 mm en fonction du type de tumeur et de son groupe pronostique; plus élevées pour le CEC que pour le CBC,
- si exérèse chirurgicale incomplète ou « limite » : reprise indispensable.
- Alternative à la chirurgie * Q Malades inopérables ou localisations délabrantes, après biopsie de confirmation et vali dation en RCP : - radiothérapie (électronthérapie ou curiethérapie) pour les CBC et les CEC ; - cryochirurgie (cryode de contact sous contrôle impédancemétrique); à distinguer de la cryothérapie.
* Tumeurs superficielles : - photothérapie dynamique;
- topiques : imiquimod pour les CBC superficiels ou CEC in situ uniquement.Prise en charge des carcinomes épidermoïdes cutanés métastatiques : traitement discuté en RCP
- Suivi des patients, prévention secondaire * O Après traitement — surveillance médicale régulière pour dépistage : - d’une récidive locale ou ganglionnaire; - d’un nouveau CBC ou nouveau CEC ; - d’un mélanome.
* Information des patients et éducation à l’autosurveillance/autodépistage.
O Infections à papillomavirus humains (human papillomavirus ou HPV) très fréquentes : lésions épithéliales bénignes cutanées (verrues) ou muqueuses (condylomes) ->■ transfor
mation cancéreuse possible (muqueuses >peau).virus a adnencpsule
D. Prévention primaire * Prévention solaire : - stratégies d’évitement solaire (éviter les expositions entre 12 heures et 16 heures, pro téger la peau avec chapeau et vêtements, recherche de l’ombre…);
- déconseiller l’usage des lampes à bronzer; - limiter les expositions solaires, tout particulièrement pendant l’enfance et l’adolescence; - cibler prioritairement les sujets de phototype clair, ceux avec de multiples expositions solaires professionnelles ou récréatives.
* L’application d’écran solaire est utile de façon ponctuelle afin d’éviter un coup de soleil, mais ne doit pas permettre une augmentation du temps d’exposition solaire.
* Traitement des lésions précancéreuses (kératoses actiniques, lésions virales HPV-induites…).
C. Risque oncogène * O Le plus souvent, co-carcinogènes nécessaires pour les lésions cutanées : UV +++, tabac, immunosuppression (transplantésA/IH +++).
* HPV muqueux «à haut risque oncogène» (HPV16, 18, 31, 33) : peuvent être directement
carcinogènes.
II. Épidémiologie * Verrues : prévalence (proportion de sujets porteurs de la maladie) de 7 à 10 % dans la population générale (enfants scolarisés et adultes jeunes).
* Transmission : - contexte professionnel favorisant (bouchers, vétérinaires, personnels des abattoirs, poissonniers) : verrues des mains causées par HPV7 ;
- immunodéprimé : infections à HPV plus fréquentes et plus agressives. Chez les greffés d’organe, l’incidence des verrues et des cancers de la peau augmente avec la durée et l’intensité de l’immunodépression : photoprotection, autodépistage et suivi
systématique +++.
A. Verrues plantaires Deux variétés : * myrmécie (HPV1), la plus fréquente : verrue profonde, douloureuse à la pression, unique ou multiple; circonscrite par un épais anneau kératosique recouvrant partiellement la région centrale dont la surface kératosique et papillomateuse est piquetée de points noirs (micro hémorragies) (fig. 20.12);
* verrues en mosaïque (HPV2), moins fréquentes : non douloureuses, composées de mul
tiples verrues coalescentes en un placard kératosique moins épais (fig. 20.1
B. Verrues vulgaires * Verrues vulgaires communes (HPV2) : localisées principalement sur la face dorsale des mains et des doigts; plus rarement palmaires.
* Élevures de 3 à 4 mm, surface hémisphérique hérissée de saillies villeuses kératosiques
grisâtres ± crevasses (fig. 20.14). Nombre variable, parfois confluentes.* Verrues péri-unguéales et sous-unguéales (altérations unguéales possibles : indication de traitement) (fig, 20.15).
* Autres localisations moins fréquentes (visage, cuir chevelu) : aspect de verrues filiformes péri-orificielles et/ou région cervicale et/ou barbe (auto-inoculation par le rasage) souvent
de type papillome viral.
C. Verrues planes communes * Dues à HPV3. * Sur le visage, sur le dos des mains et sur les membres +++; petites papules jaunes très peu en relief, brunes ou chamois, surface lisse ou finement mamelonnée, parfois à peine visibles (fig. 20.16).
* Régressent habituellement en moins de 2 ans mais parfois chroniques chez l’immunodé
primé.
IV. Diagnostic différentiel 340
* Durillon : épaississement cutané lié à un frottement chronique (pieds +++, points d’appui). * Autre tumeur : penser au mélanome achromique de la plante des pieds +++.
* Verrues sous- ou péri-unguéales persistantes : à distinguer d’un carcinome in situ.
V. Traitement * Pas de traitement spécifique des infections à HPV. * Objectif : disparition des lésions macroscopiquement visibles. * Informer le patient du risque de récidive (environ 30 %) : persistance de l’HPV dans la peau saine.
* Régression des verrues le plus souvent spontanée : - traitement des verrues guidé par les symptômes et le vécu de la maladie;
- ne doit pas faire l’objet d’un acharnement thérapeutique.
A. Traitement préventif * Pas de traitement préventif vrai. * Limiter la diffusion par application d’un vernis incolore sur les verrues les jours de piscine ou de séances de sport fait pieds nus.
* Mesures d’hygiène familiale simples (utiliser des serviettes de toilette individualisées…).
4B. Traitements curatifs 1. Destruction chimique par kératolytiques * Simple et non douloureuse : préparations à base d’acide salicylique avec protection de la peau
saine périphérique, ou traitement de type collodion salicylé limité à la surface de la verrue.
Nécessite : - un décapage superficiel mécanique pour enlever la couche superficielle traitée avant l’application du kératolytique;
- une observance thérapeutique régulière (une application tous les soirs au coucher, par
exemple) et suffisamment prolongée pour limiter le risque d’échec.
- Cryothérapie Application directe d’azote liquide ± après décapage au bistouri de la couche cornée, doulou
reuse dans certaines localisations (verrues palmaires, péri- et sous-unguéales +++).
- Laser CO2 Nécessite une anesthésie locale et peut laisser une cicatrice. Récidive possible.
- Chez l’enfant Le traitement des verrues ne doit pas être agressif. L’éradication systématique n’est pas tou
jours justifiée.
Mélanomes : tumeurs malignes développées aux dépens des mélanocytes (cellules qui fabriquent la mélanine).
I. Épidémiologie A. Incidence et mortalité
* Différences d’incidence selon : - la latitude (exposition aux UV); - les caractéristiques pigmentaires des populations.
* Incidence maximale chez les sujets à peau blanche en Australie (40 nouveaux cas pour 100000 habitants par an chez l’homme), minimale dans les pays asiatiques ou dans les populations à peau noire.
* L’incidence est en augmentation depuis plusieurs décennies. * Q En France : - taux d’incidence intermédiaire : environ 15000 nouveaux cas par an (taux d’incidence standardisé environ 10 cas pour 100000 personnes-années; données 2012);
- taux de mortalité standardisé : 1,7 pour 100000 chez l’homme et 1,0 chez la femme, (environ 1700 décès annuels; données 2017);
- la mortalité augmente moins que l’incidence, ce qui peut être attribué à un diagnostic plus précoce de lésions moins épaisses;
- âge médian de survenue : 55 ans; exceptionnel chez l’enfant prépubère.
B. Rôle de l’environnement : avant tout l’exposition solaire 342
* Mélanome superficiel extensif : rôle majeur des expositions intermittentes et intenses et des brûlures solaires; enfance >âge adulte.
* Mélanome de Dubreuilh : exposition chronique cumulative. * Mélanomes des paumes, des plantes et des muqueuses : pas de lien avec les expositions
solaires.
C. Prédisposition familiale : facteurs génétiques * Contexte familial : 10 % des mélanomes (défini par deux personnes apparentées au premier degré atteintes dans une famille).
* Plusieurs gènes impliqués dans la prédisposition héréditaire au mélanome : le principal est CDKN2A, gène suppresseur de tumeur muté dans 10 à 30 % des formes familiales.
* Autres facteurs également génétiquement transmis : - la sensibilité de la peau au soleil (phototype, voir plus haut les carcinomes cutanés) : peau claire, cheveux blond/roux, éphélides. N.B. : phénotype « roux» lié aux variants du gène du récepteur de la mélacortine (MC1R) ± associé au risque de mélanome;
- le nombre, la taille et l’aspect des naevus : dont le « syndrome des naevus atypique » aux limites mal définies, caractérisé par la présence de naevus en grand nombre (N > 50), souvent de grande taille (> 6 mm de diamètre), ayant des aspects cliniques souvent aty piques (bords irréguliers, polychromie, aspect parfois en «oeuf sur le plat») et pouvant
siéger en peau non exposée au soleil (cuir chevelu, fesses et seins chez la femme).
Marqueurs de risque de mélanome * Antécédents familiaux de mélanome. * Antécédents personnels de mélanome (risque de second mélanome : 5 à 8 %) et/ou de
carcinome cutané.* Couleur claire de la peau et des cheveux (roux avec des éphélides, blond vénitien). * Nombre élevé de naevus/« syndrome des naevus atypiques ».
* Antécédents d’expositions solaires intenses, avec coups de soleil.
E. Précurseurs * La majorité des mélanomes naissent de novo, en peau apparemment saine sans précurseur. * Le risque de transformation maligne des petits naevus «communs» est très faible. Il n’y a aucun intérêt à en recommander l’exérèse systématique préventive.
* Les naevus congénitaux : risque de transformation plus élevé si grande taille (plus de 20 cm à l’âge adulte). Ces naevus congénitaux géants sont rares et ne sont responsables que de très peu de mélanomes en valeur absolue.
* L’exérèse préventive précoce des grands naevus congénitaux est souhaitable si elle est réa
lisable en pratique. Elle relève d’une prise en charge médico-chirurgicale très spécialisée.
II. Aspects anatomopathologiques * Histogenèse des mélanomes biphasique (sauf mélanome nodulaire) : - 1. extension «horizontale» intra-épidermique, au-dessus de la membrane basale; - 2. extension «verticale» avec envahissement du derme superficiel (phase micro-inva sive), puis du derme profond et de l’hypoderme (phase invasive).
* Un mélanome cutané a donc en règle deux composantes : - épidermique : mélanocytes en thèques irrégulières (petits amas ou nids de cellules), avec migration anarchique de cellules isolées dans le haut de l’épiderme; présence ou non d’une ulcération;
- dermique : invasion par des mélanocytes tumoraux, avec souvent réaction inflamma
toire. Des phénomènes de régression sont parfois observés.
A. Diagnostic positif * O 1. Suspicion clinique (interrogatoire et examen à l’oeil nu : facteurs de risque, critères «ABCDE» et «vilain petit canard»),
* 2. Examen dermoscopique (surtout si naevus nombreux et/ou atypiques). Dermatoscopie = microscopie de surface par épiluminescence : - augmente la sensibilité et la spécificité de l’examen clinique des opérateurs formés (dermatologues, apprentissage spécifique d’environ 2 ans);
- utile mais non obligatoire.
* 3. Exérèse à visée diagnostique. * 4. Confirmation anatomopathologique et classification histopronostique : - examen anatomopathologique : obligatoire chaque fois qu’on excise une lésion; confirme le diagnostic, permet le classement anatomoclinique et analyse les critères pronostiques (épaisseur selon Breslow, ulcération, index mitotique surtout) : ces don
nées guident la prise en charge initiale.
- La suspicion de mélanome est avant tout clinique Toujours envisager l’hypothèse d’un mélanome dans la démarche diagnostique devant une lésion pigmentée. Elle repose sur deux éléments essentiels : * l’un analytique : la règle «ABCDE»; * l’autre cognitif : la règle du «vilain petit canard ».
Règle «ABCDE» * Suspicion de mélanome si > 2 critères parmi : - asymétrie (A); - bords (B) irréguliers; - couleur (C) inhomogène (brun, noir, marron ou bleu, zones dépigmentées, halo inflammatoire);
- diamètre (D) supérieur à 6 mm (critère non spécifique); - évolution (E) récente documentée (modification de taille, de forme, de couleur, de relief).
* Règle initialement développée pour l’éducation du patient à l’autodépistage. Peu efficace pour l’identification des modifications subtiles et/ou récentes.
Règle du «vilain petit canard » * Chez un patient donné, l’aspect des naevus est globalement similaire d’un naevus à l’autre : aspect discordant par rapport aux autres naevus = suspicion de mélanome.
344
* Requiert un examen corps entier, patient dénudé, avec observation globale du revêtement cutané.
D’autres éléments doivent être pris en compte * Présence de signes fonctionnels ou perception subjective par le patient : - près de 80 % des mélanomes sont détectés par le patient avant le diagnostic par un médecin ;
- une lésion signalée comme suspecte par le patient ou son entourage doit être contrôlée avec soin par le médecin.
* Prurit ou saignement au contact, mais ce sont des signes tardifs.
- La confirmation est anatomopathologique Lésion suspecte de mélanome = exérèse rapide à visée diagnostique.
Modalités de l’exérèse * 1. Informer le patient, délai de réflexion non rigoureusement indispensable (notion d’«urgence» diagnostique).
* 2. Anesthésie locale. * 3. Exérèse complète (emportant la tumeur dans son entier, jusqu’à l’hypoderme). * 4. L’exérèse permet la confirmation diagnostique anatomopathologique, la classification anatomoclinique et l’analyse des critères histopronostiques.
Pas de biopsie partielle car : * la mesure précise de l’épaisseur maximale (Breslow) et de l’index mitotique est, par défi nition, impossible sur un prélèvement parcellaire (évaluation devant être réalisée sur pièce totale), ce qui entraîne une perte de chance pour le patient;
* cependant, si lésion de très grande taille dont l’exérèse totale est délabrante (visage, par exemple), discuter biopsie(s) sur la(les) zone(s) la(les) plus suspecte(s), éventuellement après
contact rapide avec un centre expert.L’examen histologique permet de : * 1. affirmer la nature mélanocytaire (intérêt des marquages immunohistochimiques melanA, protéine S100, HMB45);
* 2. affirmer la malignité et déterminer le sous-type anatomoclinique;
* 3. recueillir les paramètres histopronostiques fondamentaux : indice de Breslow, ulcération, index mitotique (voir plus loin);
* 4. préciser le caractère complet ou non de l’exérèse (une reprise chirurgicale sera de toute façon effectuée) ;
* 5. éventuellement, rechercher d’emblée la présence d’une mutation de B RAF sur la pièce
(selon avis de la RCP, notamment pour les tumeurs épaisses de mauvais pronostic).
- Classification anatomoclinique □ La classification anatomoclinique résume les différents profils de mélanome en cinq grandes catégories : * mélanomes avec phase d’extension horizontale initiale : - mélanome superficiel extensif (superfidal spreading melanoma ou SSM) le plus fré quent (60 à 70 % des cas), avec croissance intra-épidermique horizontale, puis verticale dermique (fig. 20.17),
- mélanome de type Dubreuilh (10 % des cas) siégeant sur les zones photo-exposées de façon chronique et principalement sur le visage chez les sujets de plus de 60 ans, associé à des signes de photovieiliissement et qui a souvent une évolution horizontale pendant des mois ou des années avant de devenir plus invasif notamment sous la forme d’un ou plusieurs nodules à croissance verticale (fig. 20.18 et 20.19),
- mélanome acral lentigineux (acral lentiginous melanoma ou ALM) - 2 à 5 % des cas, mais représente la majorité des cas chez les sujets à peau pigmentée - siégeant sur les paumes, les plantes, les bords latéraux des doigts et orteils et sur l’appareil unguéal,
- mélanomes des muqueuses buccales et génitales;
* mélanome sans phase d’extension horizontale initiale : mélanome nodulaire d’em blée (10 à 20 % des cas) d’évolution rapidement verticale invasive, parfois achromique
(ifig. 20.20 et 20.21).
B. Diagnostic différentiel * Tumeurs mélanocytaires bénignes : naevus « cliniquement atypique » avec aspects répondant parfois aux critères de mélanomes débutants («ABC » ou « ABD », par exemple) (voir plus loin).
* Tumeurs non mélanocytaires : - kératoses séborrhéiques, très fréquentes après 40-50 ans : surface mate, bords nets (posées sur la peau), petits grains blanchâtres, aspect friable; dermoscopie typique;
- carcinomes basocellulaires «pigmentés» ou «tatoués», identifiables à leur aspect translucide perlé télangiectasique;
- histiocytofibromes pigmentés, caractéristiques par leur palpation : pastille indurée; - angiomes thrombosés qui peuvent simuler un petit mélanome nodulaire.
* Lésions hématiques plantaires. Le diagnostic différentiel est aidé, pour le dermatologue formé, par la dermatoscopie (voir plus haut). Au moindre doute, l’exérèse (dans certains cas une biopsie) doit être réalisée afin de
déterminer la nature de la lésion par un diagnostic histologique.
IV. Risques évolutifs * O Mélanome in situ (intra-épidermique) : guérison constante après exérèse et marge élargie chirurgicales.
* Mélanome invasif : un risque plus ou moins élevé de récidive existe dans tous les cas
même de façon retardée :- récidive locale, apparaissant sur le site tumoral initial; - métastases cutanées ou sous-cutanées dites « en transit » entre la tumeur et le premier relais ganglionnaire (fig. 20.22);
- métastases ganglionnaires régionales; - métastases à distance, qui surviennent souvent (mais non exclusivement) après les métastases ganglionnaires régionales et peuvent toucher n’importe quel organe avec un risque particulier pour le cerveau.
* Le risque de récidive régionale et à distance est corrélé aux paramètres histopronostiques détaillés ci-après et guide les modalités de surveillance.
* Risques « épidémiologiques » : - risque de survenue d’un second mélanome primitif (voir plus haut); - surrisque d’autres cancers cutanés liés au soleil (CBC ou CE, parfois favorisés par cer
taines thérapies ciblées).
V. Critères pronostiques selon le stade A. Au stade de tumeur primaire (stades I et II) □ Un diagnostic précoce et une exérèse correcte sont les clés d’un pronostic favorable. Les principaux facteurs pronostiques liés à la tumeur primaire sont surtout histologiques : * l’épaisseur tumorale histologique maximale ou «indice de Breslow» (fig. 20.23) : principal critère pronostique. Corrélation presque linéaire entre cet indice et la mortalité;
* l’ulcération (clinique et/ou histopathologique) : valeur péjorative importante quelle que soit l’épaisseur de la tumeur;
* l’index mitotique (nombre de mitoses/mm2) : valeur pronostique indépendante pour les tumeurs de faible épaisseur (<1 mm), mais elle n’est plus retenue dans la classification
internationale actuellement en vigueur (AJCC, 8e édition).Taux de survie à 5 ans (exemples à titre informatif) : * Breslow < 1 mm avec ou sans ulcération : survie à 5 ans > 93 % ; * Breslow < 2 mm sans ulcération : survie à 5 ans >80 %; * Breslow 2-4 mm et/ou ulcération : survie à 5 ans > 50 % ; * atteinte ganglionnaire microscopique : survie à 5 ans >70 %;
* atteinte ganglionnaire macroscopique : survie à 5 ans > 50 %.
B. Mélanome au stade régional clinique ou histologique : ganglion sentinelle positif, métastases en transit et/ou adénopathie (N+ : stade III) La présence de micrométastases dans le ganglion sentinelle cliniquement et écho
f 349
graphiquement non suspect est un marqueur pronostique indépendant (passage en stade Ilia). Ce ganglion est identifié par des méthodes scintigraphiques. Les principaux facteurs pronostiques à ce stade sont : * le nombre et la taille des ganglions métastatiques et la rupture capsulaire qui sont des facteurs péjoratifs ;
* la présence d’une ulcération du mélanome primitif, qui garde un poids pronostique péjora tif à ce stade.
Les nouveaux traitements adjuvants par anti-PD1 ou par inhibiteurs de BRAFet de MEK (en cas de mutation V600E/K), après traitement chirurgical d’un mélanome stade III, ont montré une
augmentation de la survie sans récidive.
C Mélanome avec métastases à distance (M+ : stade IV) Le pronostic reste sombre mais a été récemment et significativement amélioré par les nou veaux traitements : thérapies ciblées inhibitrices de BRAF V600E/K et de MEK et immunothéra pies inhibitrices des points de contrôle (check point) immunologiques anti-CTLA4 et anti-PD1. Les principaux critères de mauvais pronostic de la maladie au stade métastatique sont : * taux de LDH élevé; * plus de trois organes atteints par les métastases; * plus de trois métastases hépatiques;
* métastases cérébrales symptomatiques et/ou plus de trois métastases cérébrales.
VI. Traitement de la tumeur primitive * O Une exérèse chirurgicale élargie complémentaire emportant la totalité de l’épaisseur cutanée jusqu’au fascia est recommandée avec des marges qui dépendent des données histologiques de la tumeur primitive, essentiellement par l’indice de Breslow (tableau 20.6).
* Cas particulier : pour le mélanome de Dubreuilh intra-épidermique, souvent mal limité et localement très récidivant, une marge de 1 cm ou une procédure de contrôle anatomopa thologique exhaustif des berges (chirurgie de Mohs) sont recommandées.
* Au stade de tumeur primitive isolée, la radiothérapie ou la chimiothérapie ne sont jamais indiquées. 350
Tableau 20.6 O Marges chirurgicales conseillées d’après l’épaisseur tumorale selon Breslow (recom mandations 2016)
Épaisseur selon Breslow Intra-épidermique 0,1-1 mm 1,1-2 mm > 2 mm
Concernant la profondeur d’exérèse, en l’absence de données robustes, une exérèse jusqu’au fascia tout en le
respectant est recommandée
A. Bilan initial (tableau 20.7) * O Au stade I (épaisseur < 2 mm ou > 1 mm seulement en cas d’ulcération) : examen cli
nique complet (inspection de la totalité du revêtement cutané; palpation du revêtement cutané de la région et de toutes les aires ganglionnaires); éducation à l’autodépistage.
* Au stade II (épaisseur >2 mm ou > 1 mm en cas d’ulcération) : même attitude + échogra phie locorégionale de la zone de drainage.
La réalisation d’une imagerie viscérale systématique (scanner ou TEP) n’est pas obligatoire pour les mélanomes de faible épaisseur. Par ailleurs, une étude du ganglion sentinelle sera proposée en cas d’index de Breslow > 1 mm et/ou d’ulcération, si aucun ganglion suspect n’est identifié cliniquement ou échographique ment dans la zone de drainage de la tumeur primitive; en cas de détection de micrométas tases, le stade est revu (IIIA) et un traitement adjuvant de 1 an peut être proposé, selon le profil
mutationnel.
D. Dépistage, prévention 1. Prévention primaire
O La prévention primaire du mélanome passe par : * l’information de la population sur les risques liés aux UV naturels (soleil) et artificiels (cabines à UV);
* la réduction des expositions avec notamment : - limitation des expositions durant les heures de fort ensoleillement, - protection vestimentaire adaptée, - usage répété de photoprotecteurs externes (écrans solaires) sur les zones découvertes.
Elle est essentielle chez les enfants, mais reste importante à tous les âges de la vie.
- Prévention secondaire La prévention secondaire vise à améliorer le pronostic par un dépistage précoce.Les médecins doivent : * savoir examiner ie tégument de leur patient dans son intégralité; * repérer les lésions pigmentées suspectes et malignes d’aspect «classique» selon les règles « vilain petit canard » et « ABCDE » ;
* se référer à un correspondant expert en cas de doute; * préférer une exérèse à visée diagnostique à un doute diagnostique. La population générale doit connaître les signes d’appel qui doivent inciter à consulter. Les sujets à risque doivent être informés et les sujets à très haut risque (antécédent de premier mélanome, syndrome des naevus atypiques) doivent avoir un suivi dermatologique spécifique (photographies, vidéodermoscopie). Les sujets âgés, isolés, les hommes peu enclins à s’autosurveiller sont des cibles importantes de la prévention secondaire en raison de la gravité particulière du mélanome dans ces populations
(diagnostic tardif de tumeurs épaisses).
I. Physiopathologie A. Origine des naevus mélanocytaires * O Naevus : prolifération et/ou accumulation de mélanocytes normaux en situation anor male. Le terme le plus couramment employé, «naevus» sans adjectif, sous-entend en général qu’il est de nature mélanocytaire.
* O État normal : mélanocytes disposés de manière isolée entre les kératinocytes de la jonc tion dermo-épidermique (1 mélanocyte pour 20 à 30 kératinocytes : unité de mélanisation). Fonction des mélanocytes : production de mélanine, pigment transféré aux kératinocytes via des dendrites.
* Cellules d’origine neuro-ectodermique (expriment la protéine S100). Au cours du déve loppement embryonnaire, les précurseurs mélanocytaires n’atteignent l’épiderme qu’après leur migration et leur différenciation.
* On distingue trois grandes catégories de lésions cutanées localisées liées aux mélanocytes : - 1. les lésions bénignes acquises qui correspondent aux naevus acquis, pigmentaires, mélanocytaires, communs : - les naevus acquis sont les lésions mélanocytaires les plus fréquentes («grains de beauté») : tumeurs faites de mélanocytes groupés en amas (thèques) dans l’épi derme et/ou le derme;
- 2. les phénomènes de nature malformative (naevus congénitaux/mélanoses dermiques) : - les naevus congénitaux : hamartomes congénitaux, - les mélanoses dermiques : tache mongolique, naevus d’Ota…, - leur origine est encore incertaine : différenciation terminale des mélanocytes trop précoce et/ou migration bloquée dans le derme et l’hypoderme au cours de l’em bryogenèse -> les naevus congénitaux géants sont ainsi assimilés à des malforma tions ou à des dysembryomes;
- 3. les tumeurs malignes : ce sont les mélanomes (voir plus haut).
B. Formes anatomopathologiques O Les cellules mélanocytaires constituant les naevus sont regroupées en thèques (amas) et on distingue selon la répartition des thèques : * naevus jonctionnel : cellules dispersées et thèques dans la couche basale de l’épiderme; * naevus dermique : thèques strictement intradermiques; * naevus mixte ou composé : thèques dans le derme et à la jonction dermo-épidermique. La composante jonctionnelle, très marquée chez l’enfant, diminue ou disparaît au cours du vieillissement. La connaissance de l’âge du sujet est fondamentale dans l’interprétation histo
logique de toute lésion mélanocytaire.L’architecture régulière, le regroupement en thèques et les caractéristiques cytologiques per mettent de distinguer les naevus des mélanomes. Diagnostic différentiel mélanome/naevus : il se fait surtout sur l’architecture et peu sur la cytolo
gie. La « dysplasie » des mélanocytes n’est pas synonyme de tumeur maligne ou précancéreuse.
C. Histoire naturelle des naevus communs * Présents chez tous les individus. * Commencent à apparaître dès l’âge de 4-5 ans; plateau vers la quatrième décennie (nombre moyen par individu : environ 20 naevus).
* Régression progressive et raréfaction après 60 ans. * Dans l’enfance : lésions planes > lésions tubéreuses (en relief). * Dans l’adolescence : croissance en taille parallèle à la croissance de l’individu. * Âge adulte : lésions tubéreuses > lésions planes. * Grossesse : augmentation de taille (abdomen ++) et modification de pigmentation pos sibles. Vigilance car possibles formes agressives de mélanome en rapport avec l’immunomodulation liée à la grossesse (tolérance accrue liée à la greffe placentaire) -> Si doute :
faire une exérèse.
II. Formes cliniques 354
A. Selon la morphologie * Très grande variabilité clinique des naevus (taille, forme, pigmentation) : chez un individu donné, les naevus ont le plus souvent une apparence comparable (voir plus haut la règle du «vilain petit canard »).
* Naevus : non évolutif, grossièrement régulier, comparable aux autres naevus.
- Naevus communs Deux types cliniques sont observés : * naevus pigmentés, soit plans (naevus jonctionnel; fig. 20.24), soit légèrement bombés à surface lisse ou rugueuse, voire verruqueuse (naevus composé ou dermique);
* naevus tubéreux, peu ou pas pigmentés, élevures (papule, souvent en dôme) plutôt sur le visage avec thèques essentiellement dermiques (naevus mixte ou dermique; fig. 20.25).
Surface lisse ou verruqueuse.
- Naevus selon leur pigmentation Naevus bleu
* Naevus de localisation dermique avec forte charge en mélanine : aspect bleuté. * Apparaît surtout à l’âge adulte, lésion plane ou saillante de teinte bleu nuit siégeant au visage, à la face d’extension du membre supérieur (fig. 20.26).
* Lésion bénigne.
Naevus achromique Certains naevus ont la couleur de la peau normale; le plus souvent de type tubéreux, parfois
centrés par un poil et prédominant au visage ou au tronc.
- Naevus cliniquement atypique Les naevus cliniquement atypiques (NCA) ont des caractéristiques cliniques proches de celles qui font craindre un mélanome d’où le terme de NCA. Ce sont des lésions : * souvent de grande taille (diamètre > 5 mm) ; * de couleur rosée ou brune ou associant ces deux couleurs; * avec asymétrie des bords, forme irrégulière, couleur inhomogène. Ils sont de type jonctionnel (le terme de naevus « dysplasique » est inapproprié : préférer naevus atypique). Ils participent au « syndrome des naevus atypiques » (voir plus haut) et sont associés à un risque accru de mélanome. Transmission familiale possible. Rechercher des antécédents familiaux de mélanome.
Naevus atypiques : marqueur phénotypique de risque, exérèse préventive non justifiée.
B. Selon la topographie * Naevus du lit de l’ongle : - mélanonychie en bande homogène, régulière, stable dans le temps. Si évolutivité, monodactylie ; craindre un mélanome (fig. 20.2 /);
- mélanonychies multiples chez le sujet à peau foncée ou affectant les ongles soumis à un frottement : pas de prolifération mélanocytaire mais simple dépôt de pigments.
356
* Naevus des muqueuses et des extrémités (paumes et plantes). * Naevus de « topographie particulière », car l’analyse anatomoclinique peut y être délicate :
oreilles et seins.
C. Selon l’évolution 1. Lésions découvertes à la naissance
Naevus congénitaux Moins de 1 % des naissances. Progressivement, leur surface peut devenir irrégulière avec une hypertrichose (fig. 20.28). Les naevus congénitaux de grande taille (par définition dont le dia mètre projeté à l’âge adulte est > 20 cm) sont rares. Ils peuvent même être géants et s’étendre à une grande partie du corps avec une tendance à la distribution métamérique, le plus souvent dorsale. L’impact esthétique et le risque carcinologique des lésions de grande taille (voir plus
loin) sont importants. Ils signent un risque accru de mélanome.
Tache bleue mongolique Elle s’apparente à un naevus bleu congénital. Très fréquente, elle est présente chez la plupart des enfants d’origine africaine ou asiatique et chez 1 % des enfants à peau claire. Elle se pré sente comme une tache ardoisée, d’environ 10 cm de diamètre, située dans la région lombosacrée. Elle disparaît en règle progressivement dans l’enfance.
Naevus d’Ota
Distribution en règle unilatérale, superposable aux territoires des deux branches supérieures du
nerf trijumeau. La sclérotique et la conjonctive homolatérale peuvent être pigmentées.
- Halo naevus ou phénomène de Sutton * Développement d’un halo achromique (blanc) autour d’un ou plusieurs naevus pigmentés; lié à un infiltrat inflammatoire cytotoxique.
* Aboutit à la disparition progressive et totale du naevus concerné (fig. 20.29). * Surtout vers la deuxième décennie et sur le tronc. Survenue plus tardive ou aspect irrégulier
du halo doivent faire craindre un mélanome.
D. Formes compliquées 1. Naevus traumatisé
* Les microtraumatismes répétés n’induisent pas la transformation des naevus. * Les naevus des zones de friction ou les naevus du visage soumis au rasage n’ont pas un plus haut risque de transformation que les autres.
* L’exérèse de lésions régulièrement excoriées se discute à titre de confort. * Les naevus localisés sur le tronc ou sur le visage directement exposés au soleil n’ont pas un potentiel de dégénérescence plus élevé.
2. Folliculite sous- ou intranaevique
Favorisée par un traumatisme ou l’inflammation d’un appareil pilo-sébacé : le naevus est tran
sitoirement inflammatoire et sensible.
III. Potentiel évolutif des naevus A. Facteurs favorisant la présence d’un grand nombre de naevus chez un individu
358
Les naevus partagent les mêmes facteurs de risque que le mélanome : * phototype clair;
* exposition solaire;
B. Risque de transformation en mélanome 1. Naevus communs
Transformation en mélanome possible mais rare (probabilité inférieure à 1 pour 100000); la plupart des naevus restent stables ; 80 % des cas de mélanome surviennent en dehors de toute lésion préexistante. Les naevus communs sont des marqueurs de risque de mélanome : * lorsque présents en grand nombre (> 50); * lorsqu’ils sont de grande taille (> 5 mm) ; * lorsqu’ils sont cliniquement atypiques (> 10 naevus atypiques); * lorsqu’il existe des antécédents familiaux de mélanome; * chez les sujets à peau blanche, ce sont les facteurs de risque les plus importants de méla nome, avec l’histoire personnelle et familiale de mélanome.
2. Naevus congénitaux Petite taille Risque de transformation comparable à celui des naevus communs.
Naevus congénitaux géants (formes très rares) * Précurseurs potentiels de mélanome. * Risque de transformation dépendant de la taille (plus il est grand, plus le risque s’accroît),
de la présence de lésions satellites et de la topographie médiane.
IV. Diagnostic différentiel * O Lentigos de petite taille (lésions bénignes) : petites macules pigmentées de quelques millimètres de diamètre, à contours plus ou moins géographiques en «tache de peinture» dont la teinte est uniforme et fixe dans le temps. Ils siègent sur les zones photo-exposées ou sur des zones de coup de soleil.
* Éphélides («taches de rousseur») : semis de petites macules brun clair, dont la pigmenta tion s’accentue avec le soleil et uniquement développés sur les zones exposées (individus roux…).
* Histiocytofibrome (lésion bénigne) : de consistance dure à la palpation avec invagination centrale (forme de disque à la palpation et couronne pigmentée).
* Kératose séborrhéique (lésion bénigne) : lésion pigmentée la plus fréquente après 40 ans; la surface est rugueuse, d’aspect « gras » ou « cérébriforme » et les bords sont rectilignes, il s’agit d’une prolifération épidermique.
* CBC nodulaire, surtout s’il est pigmenté ; lésion plus ferme, recouverte de fines télangiectasies, à croissance lente et prédominant sur les zones exposées au soleil.
* Angiome : tumeur vasculaire bénigne, surtout s’il est thrombosé. * L’examen en épiluminescence avec agrandissement (dermatoscopique) permet de reconnaître ces diverses lésions et de les distinguer d’un naevus.
* Le diagnostic différentiel est plus difficile avec : - un lentigo de grande taille; - un mélanome débutant de type superficiel extensif, voire un mélanome nodulaire pour lequel les critères morphologiques permettant le diagnostic précoce de mélanome (règles «ABCD») ne s’appliquent pas.
O En cas de doute diagnostique, l’exérèse chirurgicale de la lésion s’impose pour
examen anatomopathologique.
V. Moyens thérapeutiques A. Exérèse à visée diagnostique * El L’exérèse d’un naevus ne provoque pas sa transformation (idée reçue à combattre). * L’exérèse d’une lésion pigmentée suspecte ne doit jamais être différée, car seule l’analyse histologique permet un diagnostic de certitude.
B. Exérèse à titre fonctionnel ou esthétique
* Elle peut être : - demandée par le patient pour un naevus qu’il juge disgracieux (naevus tubéreux et/ou pileux du visage…);
- demandée à titre de confort (naevus régulièrement traumatisé/irrité/zone de frottement…).
* Sa réalisation doit être discutée avec le patient en raison de la rançon cicatricielle possible.
C. Modalités d’exérèse * Information du patient sur les modalités, l’objectif et les risques liés au geste chirurgical. * Exérèse à visée diagnostique d’un mélanome potentiel : temps de réflexion du patient compressible (notion «d’urgence diagnostique» et de risque évolutif pouvant l’emporter sur la réflexion).
* Exérèse à visée esthétique et/ou fonctionnelle d’une lésion bénigne : temps de réflexion après information incompressible (valeur médico-légale).
* Exérèse : - sous anesthésie locale; - à l’aide d’un bistouri à lame; - en passant en dehors des limites macroscopiques de la lésion; - suture selon possibilités et modalités de fermeture imposées par les impératifs anatomiques.
* Examen histologique obligatoire de toute pièce d’exérèse (résultat d’analyse : objectif de l’exérèse et document opposable en cas de procédure judiciaire).
* Consultation de contrôle du résultat et de rendu de l’analyse au patient.
VI. Prise en charge et information du patient 360
A. Prise en charge des naevus congénitaux Indépendamment de la taille, les naevus congénitaux peuvent être inesthétiques et leur surveil lance est parfois difficile du fait de leur morphologie, en particulier de leur surface irrégulière; leur exérèse se discute au cas par cas et est affaire de spécialiste. L’exérèse préventive précoce des grands naevus congénitaux peut se discuter, mais n’est pas
toujours réalisable en pratique. Elle est plus facile dans les premiers mois de la vie.
B. Prise en charge des naevus communs De façon générale : * aucun intérêt à l’exérèse systématique préventive de tous les naevus dans le but de prévenir un mélanome;
* il n’y a pas lieu de surveiller médicalement tous les individus. L’autosurveillance des lésions pigmentées et de l’ensemble de la peau doit être enseignée à tous : * l’éducation doit porter sur le repérage précoce des lésions suspectes de mélanome (voir encadré 20.4);
* lutter contre l’anxiété inutile : dépister c’est se donner les moyens de trouver, pas d’évi ter. Trouver une maladie, c’est pouvoir la soigner;
* fixer une rythmicité; * fixer un rituel : lieu toujours identique, dans les mêmes conditions et dans un ordre défini ; * repérer « l’inhabituel » : apparition, disparition, modification d’aspect; * inciter à consulter sans tarder en cas de lésion inhabituelle;
* compléter par une information sur les risques solaires.
Le
prurit est un signe fonctionnel qui se définit comme «une sensation qui provoque le
besoin de se gratter». Il peut être localisé ou généralisé. Il ne concerne que la peau et certaines
muqueuses ou semi-muqueuses.
Il existe un prurit qu’on peut qualifier de physiologique. Ce prurit est discret. Il est plus impor
tant le soir et/ou quand on se déshabille. Chaque individu se gratte de nombreuses fois dans
une journée sans que cela entraîne de désagrément majeur.
Le prurit devient pathologique lorsqu’il induit des lésions de grattage (fig. 6.1) ou lorsqu’il
retentit sur les activités quotidiennes ou le sommeil.
□ La physiopathologie du prurit est complexe. L’histamine peut être impliquée mais pas tou
jours. Le prurit peut parfois naître plus haut dans les voies de transmission (système nerveux
central ou périphérique), ou son origine peut être cutanée.
Diagnostic positif
O Le diagnostic de prurit est clinique et repose sur l’interrogatoire.
Il peut être conforté par
l’existence de lésions cutanées non spécifiques consécutives au grattage : excoriations, stries
linéaires ou ulcérations. Parfois, il s’agit de lésions papulo-vésiculeuses, papules excoriées ou
croûteuses ou encore nodules apparaissant secondairement au prurit chronique; on parle alors
de prurigo (fig. 6.2). Le prurit chronique peut entraîner une lichénification : peau épaissie,
grisâtre, recouverte de fines squames dessinant un quadrillage (fig. 6.3); il peut aussi entraîner
une surinfection (impétigo et pyodermite).
III. Diagnostic différentiel
Les autres sensations cutanées à différencier sont les dysesthésies, les paresthésies, la douleur.
IV. Diagnostic étiologique
Il repose surtout sur :
*
l’interrogatoire qui précise :
- le caractère localisé (topographie à faire préciser) ou diffus du prurit,
- sa sévérité : insomnie, troubles du comportement, retentissement sur l’état général,
gêne dans le travail ou les activités de la vie quotidienne,les circonstances déclenchantes ou aggravantes (hypersudation, repas, douche…) ou
apaisantes (bains froids…),
- les horaires de survenue,
- l’évolution (aiguë, paroxystique ou chronique),
- l’existence de signes généraux,
- le métier,
- les prises médicamenteuses et les traitements locaux utilisés,
- l’éventuel caractère collectif du prurit;
l’examen physique complet qui recherche en particulier :
- l’importance des lésions de grattage,
- des lésions cutanées, non expliquées par le grattage mais permettant d’orienter vers
une dermatose spécifique responsable du prurit,
- un dermographisme,
- des adénopathies périphériques palpables, une hépatomégalie ou une splénomégalie.
Au terme de cet interrogatoire et de cet examen clinique, le diagnostic étiologique repose sur
le caractère diffus ou localisé du prurit et pour le prurit diffus sur la présence ou non de lésions
cutanées spécifiques (f g. 6.4
V. Diagnostic étiologique d’un prurit diffus
A. Prurit diffus dermatologique ou secondaire
à une dermatose sous-jacente
Un prurit peut être observé dans de nombreuses dermatoses dont les caractéristiques cliniques
et/ou histologiques des lésions élémentaires font le diagnostic (encadré 6.1).
Encadré 6.1
Principales dermatoses prurigineuses avec lésions élémentaires
caractéristiques
* O Urticaire, dermographisme
* Dermatites de contact (caustiques, irritatives ou allergiques)
* Dermatite atopique
* Ectoparasitoses et piqûres d’insectes
* Psoriasis
* Lichen plan
* Pemphigoïde
* Mycosis fongoïde et syndrome de Sézary
*
Dermatophytoses
□ Mastocytose cutanée
- Urticaire et dermographisme (voir chapitre 13 - item 187)
* O Urticaire :
papules œdémateuses rosées, fugaces, migratrices et récidivantes (fig. 6.5).
* Dermographisme urticarien : papule urticarienne induite par le frottement de la peau
(fig. 6.6).
. □ Mastocytose cutanée = forme la plus fréquente chez l’enfant : urticaire pigmentaire
(macules ou papules pigmentées) (fig. 6.7).
- Eczéma et dermatite atopique (voir chapitre 13 - item 187)
* O Lésions érythémato-vésiculeuses d’extension progressive.
*
Secondaire à un contact avec un allergène (eczéma de contact allergique) ou constitution
nel (dermatite atopique).
- Ectoparasitoses (voir chapitre 12 - item 171)
* Gale : prurit à recrudescence nocturne épargnant le visage et sillons scabieux (voir plus
loin). Prurit collectif de personnes habitant sous le même toit très évocateur.
* Pédiculose corporelle : prurit diffus, prédominant sur le tronc et la racine des membres;
touche principalement les personnes vivant dans la précarité.
- Psoriasis (voir chapitre 7 - item 117)
Contrairement à une notion classique, les lésions de psoriasis sont prurigineuses chez environ
60 % des patients et remaniées par le grattage.
- Lichen plan
* 0
Papules de couleur brunâtre ou violine, recouvertes de petites stries blanchâtres en
réseau (fig. 6.8), prédominant à la face antérieure des poignets, des avant-bras, des coudes,
des genoux, de la région lombaire, de façon souvent symétrique.
* Biopsie : infiltrat cellulaire dermique superficiel en bande.
* Association à des lésions muqueuses possible, en particulier buccales : lésions blanches
réticulées, érythémateuses ou érosives non prurigineuses.
- Dermatoses bulleuses auto-immunes (pemphigoïde, dermatite
herpétiforme) (voir chapitre 2 - item 112)
O Le prurit est fréquent, souvent sévère, et peut précéder les lésions cutanées pseudo-urtica-
riennes et bulleuses (pemphigoïde), vésiculeuses ou bulleuses (dermatite herpétiforme). Intérêt
de l’IFD chez les sujets âgés.
- Mycosis fongoïde et syndrome de Sézary (voir chapitre 21 -
item 319 et chapitre 4 - item 114)
* 0
Lymphome cutané T épidermotrope survenant le plus souvent chez le sujet de plus
de 50 ans; il peut être révélé par des placards érythémateux et squameux, prurigineux.
* Évolution vers une infiltration de la peau avec squames peu épaisses et prurit important et
insomniant.
* Syndrome de Sézary : forme érythrodermique et leucémique du mycosis fongoïde.
B. Prurit diffus sans lésions cutanées spécifiques (ou prurit
sine materia)
O À l’examen clinique, il n’existe que des lésions cutanées provoquées par le grattage (incluant
éventuellement des lésions de prurigo).
1. Affections générales
Les prurits dus à des affections générales sont plus rares que les prurits dermatologiques.
Lorsque le prurit est nu (sans lésion dermatologique), il faut rechercher une affection générale
(encadré 6.2). En l’absence de cause évidente, des examens complémentaires d’orientation
sont réalisés (encadré 6.3).
Encadré 6.2
* O Cholestase
* Insuffisance rénale chronique/hémodialyse
* Hémopathies malignes :
-
-
maladie de Hodgkin
maladie de Vaquez
* Dysthyroïdies
* Infections chroniques par le VIH, le VHB, le VHC
* Carences :
- martiale
- vitaminiques
* Parasitoses :
- ascaridiose
- toxocarose
-
autres nématodoses sous les tropiques (onchocercose, bilharziose, etc.)
* Médicaments
* Grossesse
* Q Causes psychogènes
Examens complémentaires nécessaires en première intention devant un
prurit sine materia sans cause évidente
* O NFS, plaquettes
* y-GT, phosphatases alcalines
* Créatininémie
* TSH
* Ferritine
* EPP
* Sérologies VIH, VHB, VHC
* Radiographie du thorax
* La biopsie cutanée n’est pas indiquée
Cholestase
* Cholestase intra-hépatique ou extra-hépatique, avec ou sans ictère; prurit intense et
insomniant dans les ictères obstructifs par cancer des voies biliaires ou cancer du pancréas.
* Prurit souvent révélateur dans la cirrhose biliaire primitive.
Insuffisance rénale chronique
Prurit rarement révélateur, mais très fréquent chez les malades hémodialysés.
Maladies hématologiques
* Lymphomes : tout prurit nu et chronique chez un adulte jeune doit faire évoquer un
lymphome hodgkinien ou non hodgkinien; prurit fréquent, de pronostic défavorable
et parallèle à l’évolution de la maladie.
* Polyglobulie de Vaquez : prurit après un contact de l’eau (prurit aquagénique) surtout lors
des bains chauds.
* Autres causes : leucémie lymphoïde chronique, anémie ferriprive.
Maladies endocriniennes et métaboliques
* Hyperthyroïdie (surtout maladie de Basedow).
* Hypothyroïdie (prurit probablement dû à la sécheresse cutanée).
* Le diabète, la goutte et l’hyperuricémie ne sont pas des causes de prurit diffus. Le diabète
est en revanche volontiers à l’origine de paresthésies.
Médicaments
90
* Prurit induit pour des raisons pharmacologiques (opiacés…) ou par le biais d’une cholestase.
* Prurit par un mécanisme allergique avec lésions cutanées associées.
Infections
Parasitoses internes avec migration tissulaire et hyperéosinophilie (cysticercose, hydatidose,
échinococcose, anguillulose, distomatose et, en France, ascaridiose, toxocarose, trichinose) :
prurit et éruptions fugaces spécifiques (papules urticariennes, lésions eczématiformes, etc.).
Autres affections générales
Le prurit est très exceptionnellement d’origine paranéoplasique. Cette cause est trop rare
pour justifier la recherche systématique d’un cancer profond s’il n’y a pas de signes cliniques
d’orientation.
- Facteurs d’environnement pouvant favoriser ou aggraver un prurit
Agents irritants ou caustiques
* Q Produits irritants ou caustiques (antiseptique mal rincé, etc.).
*
Produits d’hygiène irritants mal rincés (parfumés en particulier). Il existe alors souvent des
lésions érythémateuses associées peu spécifiques.
Prurit aquagénique
* O Prurit survenant immédiatement après un contact avec l’eau quelle que soit sa tempé
rature, sans autre manifestation que le prurit.
* O Éliminer systématiquement une cause hématologique sous-jacente (en particulier poly
globulie de Vaquez).
Sécheresse de la peau (xérose)
O
Elle est souvent un facteur favorisant des prurits de cause externe, notamment chez les
personnes âgées.
Autres causes
Q Plusieurs maladies du système nerveux central (lésions cérébrales ou médullaires) peuvent
donner un prurit.
VI. Diagnostic étiologique d’un prurit localisé
ODe nombreuses dermatoses peuvent être responsables d’un prurit localisé, au moins au
début de leur évolution.
A. Mycoses (voir chapitre 8 - item 155)
Candidoses ou dermatophytoses : prurit associé aux lésions spécifiques.
B. Parasitoses
1. Ectoparasitoses (voir chapitre 12 - item 171)
* Prurit localisé avec ou sans lésion élémentaire.
* Prurit de la nuque ou du cuir chevelu : pédiculose, en particulier chez l’enfant ou les per
sonnes sans domicile fixe.
* Prurit généralisé, familial, recrudescence nocturne, prédominance de lésions non spé
cifiques (croûtes, excoriations, vésicules…) des espaces interdigitaux, des poignets, des
emmanchures antérieures, des mamelons ou des organes génitaux externes : gale.
2. Helminthiases tropicales
* □ À évoquer après séjour en pays d’endémie (onchocercose, loase, filariose lymphatique,
bilharziose…).
* Rechercher une hyperéosinophilie et un syndrome de larva migrans cutanée (ankylosto-
mose, anguillulose) : éruption serpigineuse et prurigineuse mobile sur des zones cutanées
en contact avec le sol (mains, pieds, fesses).
3. Parasitoses autochtones
Dermatite des nageurs : macules érythémateuses prurigineuses et disséminées dans les heures
suivant un bain en étang (parasites d’oiseaux, comme les puces des canards) ou en mer, qui
disparaissent en quelques jours.
C. Piqûres d’insectes (moustiques, puces, punaises,
aoûtats…) et végétaux (orties…)
Cause fréquente de prurit saisonnier associé à des lésions urticariennes, parfois centrées par
un point purpurique ou nécrotique.
D. Prurit du cuir chevelu
*
*
O II doit faire systématiquement rechercher une pédiculose (voir chapitre 12 - item 171).
Les autres causes sont :
- intolérance/eczéma de contact allergique aux produits cosmétiques capillaires;
- état pelliculaire simple;
- psoriasis et dermatite séborrhéique ;
- «névrodermite» : lichénification de la nuque.
VII. Prurit psychogène
* Q Diagnostic d’élimination; ce n’est pas un prurit idiopathique.
* Rechercher une pathologie psychiatrique associée (état dépressif, cancérophobie, anxiété…)
ou des événements stressants déclenchants.
* Efficacité du traitement psychiatrique en faveur de la réalité de l’origine psychogène.
VIII. Situations particulières
A. Grossesse
92
*
*
Cholestase intra-hépatique de la grossesse :
- prurit généralisé, sévère, nu;
- confirmée par une augmentation des sels biliaires sanguins associée ou non à une
cytolyse.
Dermatose bulleuse auto-immune spécifique de la grossesse (pemphigoïde de la grossesse),
éruption polymorphe de la grossesse.
B. Sujet âgé
Prurit dit «sénile» fréquent :
* dû aux modifications physiologiques liées au vieillissement de la peau et des terminaisons
nerveuses;
* particulier par son intensité et son caractère parfois insomniant contrastant avec la discré
tion des lésions cutanées;
* retentissement psychique pouvant être très important (dépression).
C. Infection par le VIH
O Prurit fréquemment observé au cours de l’infection par le VIH :
* isolé ou accompagné d’une éruption papuleuse;
* peut être l’occasion du diagnostic.
IX.
Traitement
A. Principes, règles générales
1. Autant que possible, privilégier un traitement étiologique
*
*
*
Traiter la dermatose spécifique révélée par le prurit.
Traiter la cause interne (traitement de la polyglobulie, de la maladie de Hodgkin…).
La cholestyramine ou la rifampicine peuvent être utiles dans les cholestases.
2. Éviter les facteurs déclenchants ou aggravants
Arrêter les médicaments suspects d’induire un prurit (après accord du prescripteur).
Conseils généraux :
- limiter les facteurs irritants : antiseptiques, savons parfumés, vêtements serrés et rêches ;
- couper les ongles courts pour réduire les lésions de grattage.
B. Traitements symptomatiques
* 0 De
*
*
*
la xérose : émollients (cérat de Galien ou cold-cream) quotidiennement sur tout le
tégument après la toilette. Favoriser savons surgras et syndets pour la toilette.
Des lésions inflammatoires : dermocorticoïdes sur les lésions provoquées par le grattage;
non recommandés en cas de prurit isolé.
Photothérapie UVB après avis dermatologique.
Les antihistaminiques ne sont pas un traitement du prurit isolé. Certains anti-HI de pre
mière génération à effet anxiolytique et hypnotique (hydroxyzine et doxépine) peuvent être
prescrits le soir au coucher en cas de prurit insomniant.
O Le prurit est un signe fonctionnel cutané responsable de grattage.
*
Les lésions élémentaires dermatologiques permettent en général le diagnostic d’une affection dermato
logique prurigineuse.
En l’absence de lésion élémentaire dermatologique, on parle de prurit sine materia pour lequel un exa
men clinique minutieux et quelques examens complémentaires systématiques sont nécessaires à la
recherche d’une affection générale pouvant être causale.
* Il n’y a pas de traitement général symptomatique du prurit.
* Les antihistaminiques ne sont antiprurigineux que si le prurit est médié par l’histamine, comme dans
l’urticaire.
O Ulcère de jambe : plaie de la jambe ne cicatrisant pas depuis plus d’un mois.
*
*
* Complication d’une maladie vasculaire sous-jacente qui conditionne pronostic ettraitement.
Fréquent, invalidant et à l’origine de nombreuses hospitalisations.
La prévalence (ulcères veineux et artériels) augmente avec l’âge : 1 % de 60 à 70 ans,
2-5 % au-delà de 80 ans.
Prédominance féminine de l’ulcère veineux (sex-ratio : 1/1,6).
Physiopathologie
A. Ulcère veineux
□ L’ulcère de jambe veineux pur est dû à une hypertension veineuse qui peut être secondaire à :
* un reflux dans les veines superficielles, perforantes (incompétence valvulaire superficielle et
varices dans la maladie veineuse essentielle);
* un reflux et/ou une obstruction dans les veines profondes (post-thrombotique);
* et/ou une déficience de la pompe musculaire du mollet.
L’hypertension veineuse conduit à une souffrance microcirculatoire et tissulaire responsable de
troubles trophiques. Un petit traumatisme peut être à l’origine de l’ulcère.
L’ulcère mixte à prédominance veineuse est défini comme un ulcère de mécanisme préféren
tiellement veineux, mais s’accompagnant d’une artériopathie oblitérante des membres infé
rieurs (AOMI) modérée qui n’explique pas à elle seule la présence de l’ulcère.
La physiopathologie de la microangiopathie veineuse est encore mal élucidée :capillaires cutanés dilatés et raréfiés;
* destruction capillaire secondaire à une adhérence et à une activation des leucocytes dans la
microcirculation avec production de radicaux libres et d’enzymes toxiques pour le capillaire
et pour le tissu interstitiel;
* piégeage des facteurs de croissance réduisant les capacités de cicatrisation de la peau ;
* dilatation capillaire avec fuite capillaire et œdème; microangiopathie lymphatique par sur
charge secondaire à la fuite capillaire.
Ulcère artériel
Les lésions cutanées sont directement en rapport avec l’ischémie par défaut de perfusion
artérielle du membre et baisse de l’oxygénation tissulaire locale.
Diagnostic
A. Ulcère
O L’examen clinique détermine les informations suivantes :
* nombre d’ulcères, taille, siège, caractère uni- ou bilatéral (ulcère périmalléolaire interne :
|fig. 18. );
* le fond : propre ou surinfecté, purulent, bourgeonnant, en voie de cicatrisation ou recou
vert d’un enduit jaunâtre adhérent (fibrine), voire d’une zone nécrotique noirâtre;
* les bords : souples au même niveau que l’ulcère (bon pronostic) ou, au contraire, durs et
faisant saillie au-dessus de l’ulcère (retardant la cicatrisation).
B. Peau péri-ulcéreuse
Rarement normale, elle reflète les complications cutanées de la maladie vasculaire sous-jacente.
1. Artériopathie
Peau luisante, dépilée. Rechercher :
* baisse de la température cutanée;
* pâleur à la surélévation du pied, cyanose de déclivité;
* allongement du temps de recoloration pulpaire.
peau peri ulceruese2. Insuffisance veineuse
*
*
*
298
Lésions dermo-épidermiques : plaques érythémato-squameuses, prurigineuses, débu
tant souvent dans la région malléolaire interne et pouvant s’étendre au reste de la jambe -
«eczéma variqueux» (fig. 18.2);
Lésions de capillarité :
- dermite ocre : larges macules malléolaires internes ou face antérieure des tibias; rouge
violacé en phase initiale, devenant brunes en raison des dépôts d’hémosidérine;
- atrophie blanche : plaques de petite taille, irrégulières, atrophiques et de couleur
ivoire parfois parcourues de fines télangiectasies. Souvent douloureuses et tendance à
l’ulcération +++;
- capillarités hypertrophiques : chevelus capillaires malléolaires ou du dos du pied.
Lésions d’hypodermite :
- hypodermite aiguë ou subaiguë : grosse jambe rouge et douloureuse, d’apparition
progressive, non fébrile;
- lipodermatosclérose (hypodermite scléreuse) après plusieurs épisodes d’hypodermite
aiguë ou d’emblée, insidieusement. Le mollet est dur avec peau scléreuse, souvent
pigmentée réalisant une véritable guêtre rétractile.
. Examen vasculaire
Un ulcère de jambe justifie :
* un examen clinique vasculaire complet;
* une échographie Doppler veineuse et/ou artérielle (tableau 18.1) avec mesure de l’IPS
□ (pression tibiale antérieure ou postérieure/pression humérale; valeur normale : 1 à 1,3).
Comparatif de l’ulcère veineux et de l’ulcère artériel
Ulcère veineux Ulcère artériel
Femme de plus de 50 ans (1,5 fois plus fréquent que chez Homme de plus de 50 ans
l’homme)
Surpoids Tabac, HTA, diabète, obésité, dyslipidémie
Ulcère unique, de grande taille, moyennement douloureux,
de siège péri mal léolaire jusqu’au 1 13 inférieur du mollet grande taille, creusant, pouvant mettre à nu les structures
sous-jacentes, de topographie suspendue ou distale
(orteils)
Complications trophiques caractéristiques de la peau
Peau péri-ulcéreuse lisse, froide, dépilée
péri-ulcéreuse
Présence de varices, l’examen artériel est normal Abolition d’un ou plusieurs pouls périphériques
Œdème, plus marqué en cas de syndrome post-phlébitique La douleur est habituellement intense
L’échographie Doppler des veines des membres inférieurs L’échographie Doppler artérielle confirme l’artériopathie et
est nécessaire pour : montre le niveau, le type des lésions et le retentissement
- confirmer le diagnostic d’ulcère veineux d’aval
- préciser le mécanisme (reflux/obstruction) Il recherche également un anévrisme de l’aorte
- orienter le traitement en mettant en évidence : abdominale, source d’emboles vasculaires
* un syndrome de reflux superficiel (en précisant les
niveaux de fuite et la topographie des perforantes)
* un syndrome de reflux profond qui est quasi synonyme
de syndrome post-thrombotique
* un syndrome obstructif profond qui est le témoin d’un
processus thrombotique ancien et mal reperméabilisé
ou récent
L’échographie Doppler veineuse doit être L’échographie Doppler veineuse doit être
systématiquement complétée par une mesure des IPS à la systématiquement complétée par une mesure des IPS à la
recherche d’une AOMI associée : recherche d’une AOMI associée :
- IPS entre 0,9 et 1,3 : ulcère veineux pur (absence - IPS entre 0,7 et 0,9 : ulcère mixte à prédominance
veineuse
d’AOMI)
- IPS > 1,3 : artères calcifiées incompressibles
L’angiographie précise le siège de l’oblitération,
sa longueur, dépiste des plaques athéromateuses
susceptibles d’emboliser; elle est indispensable à la
décision opératoire
La mesure de la PO2 transcutanée est un bon reflet de
l’oxygénation de la peau; sa mesure est prise en compte
dans la décision et le niveau d’une éventuelle intervention
chirurgicale (revascularisation, amputation)
En cas d’ischémie critique : pression artérielle systolique
< 50 mmHg à la cheville ou < 30 mmHg au gros orteil,
l’hospitalisation en milieu spécialisé est recommandée
Ulcère unique ou multiple, à l’emporte-pièce ou de
- Interrogatoire
O II recherche :
*
des signes d’insuffisance veineuse essentielle ou post-thrombotique :
- lourdeur de jambes,
- phlébalgies,
- œdème vespéral,
- crampes au repos;
* des antécédents personnels ou familiaux de varices traitées ou non, de thromboses vei
neuses profondes, superficielles ou d’embolie pulmonaire, des antécédents de trauma
tismes ou de chirurgie des membres inférieurs;
* des facteurs de risque vasculaires : diabète, HTA, tabagisme, antécédents d’AVC ou d’is
chémie myocardique;
* des antécédents obstétricaux et les autres antécédents médicaux et chirurgicaux;
* des signes d’artériopathie : claudication intermittente, douleurs de décubitus.
- Examen clinique
*
*
300
Il comprend :
- palpation des pouls périphériques;
- auscultation des artères des membres et du cou.
Il recherche :
- en position orthostatique, des varices des membres inférieurs et leur localisation (ins
pection, palpation);
- des télangiectasies, des veines réticulaires et une couronne phlébectasique de la cheville
et du pied;
- la présence de cicatrices d’anciens ulcères;
- des signes de dénutrition.
D. Évaluation du degré de handicap locomoteur
Les malades ayant une déambulation réduite ont moins de chances de succès thérapeutique
et de récupération fonctionnelle, on recherche :
* une ankylosé de la cheville elle-même souvent secondaire à l’ulcère;
* une coxarthrose;
* une gonarthrose;
* des déformations orthopédiques des pieds (hallux valgus, affaissements plantaires…).
III. Étiologie
A. Causes vasculaires
L’insuffisance veineuse, l’insuffisance artérielle, les ulcères mixtes (veineux et artériels),
l’angiodermite nécrotique sont les causes les plus fréquentes des ulcères de jambe.
Ulcère mixte artériel et veineux
Quand les deux causes sont mises en évidence simultanément, on parle d’ulcère mixte artériel
et veineux.
L’échographie Doppler veineuse avec IPS doit être complétée par une échographie Doppler
artérielle en cas de :
* abolition des pouls périphériques;
* symptômes ou autres signes cliniques d’AOMI;
* IPS <0,9 ou > 1,3 (artères incompressibles, souvent en cas de diabète).
Dans le cas d’IPS entre 0,7 et 0,9, l’ulcère est mixte à prédominance veineuse (AOMI n’expli
quant pas l’ulcère).
Angiodermite nécrotique
* El
Entité anatomoclinique définie par un infarctus cutané secondaire à une occlusion
artériolaire (artériolosclérose des vaisseaux du derme).
*
*
*
Terrain :
- la femme après 60 ans;
- HTA;
- diabète.
Les caractères évocateurs de l’ulcère sont :
- début brutal par une plaque purpurique ou livedoïde extensive;
- évolution rapide vers une nécrose noirâtre;
- puis une ou plusieurs ulcérations superficielles à bords irréguliers en « carte de géogra
phie » (fig. 18.4);
- une localisation suspendue à la face antéro-externe de la jambe;
- des douleurs très importantes, insomniantes.
Les examens complémentaires montrent :
- normalité des grands axes vasculaires artériels et. veineux;
- cryoglobulinémie négative, FAN et ANCA négatifs.
- Ulcères des vasculites ou des autres atteintes vasculaires
cutanéo-systémiques
O Les ulcères des vasculites ou des autres atteintes vasculaires cutanéo-systémiques sont
rares :
* Q polyarthrite rhumatoïde, péri-arténte noueuse, granulomatose avec poly-angéite, lupus
érythémateux surtout en cas d’association à un anticoagulant circulant ou à un syndrome
des anti-phospholipides;
* embolies de cristaux de cholestérol, cryoglobulinémies.
B. Ulcères de causes non vasculaires
Il faut se poser la question d’une autre étiologie de l’ulcère devant :
*
des examens artériel et veineux normaux n’expliquant pas la symptomatologie ulcéreuse;
* et/ou une évolution ulcérante rapide;
* et/ou l’absence d’évolution favorable vers la cicatrisation après 2 à 3 mois de traitement
bien conduit;
* et/ou une anomalie du fond (bourgeonnement hypertrophique…), du bord, de la
périphérie;
* et/ou un siège atypique.
On doit discuter :
*
un pyoderma gangrenosum (cause inflammatoire) : la lésion élémentaire est une pustule
qui rapidement laisse place à une ulcération douloureuse à extension rapide, constituée de
clapiers purulents au centre entourés d’un bourrelet périphérique violacé caractéristique;
association à une hémopathie (syndrome myéloprolifératif, myélodysplasie) ou à une mala
die inflammatoire du tube digestif (1/3 à 2/3 des cas);
* une infection (mycobactérioses dont tuberculose, mycoses profondes, parasitoses);
* un carcinome (transformation de l’ulcère en carcinome épidermoïde, à différencier d’une
tumeur ulcérée : voir ci-après IV. Diagnostic différentiel); diagnostic par biopsie;
* une cause hématologique (syndromes myéloprolifératifs ou dysglobulinémies) avec ulcé
ration souvent superficielle et nécrotique, drépanocytose avec ulcères survenant chez un
sujet jeune;un ulcère iatrogène (par exemple, traitement par l’hydroxyurée) qui cicatrise lentement à
l’arrêt du médicament;
* une pathomimie : diagnostic d’élimination devant des ulcères d’aspect inhabituel rebelles
au traitement nécessitant un avis psychiatrique.
. Diagnostic différentiel
A. Mal perforant plantaire
Le mal perforant plantaire est une ulcération d’origine neurologique particulière localisée à la
plante :
plus fréquent chez l’homme;
* localisé sur les points d’appui (talon, tête des métatarsiens);
* indolore, ce qui explique son aggravation;
* débutant par une hyperkératose qui s’ulcère.
Les causes principales sont :
* le diabète;
* les neuropathies sensitives familiales (acropathies ulcéro-mutilantes, maladie de Thévenard)
ou acquises (intoxication éthylique, lèpre dans certains pays tropicaux…);
* les anomalies médullaires traumatiques ou non (spina bifida).
B. Ulcérations tumorales
Ce sont principalement les carcinomes épidermoïdes, les carcinomes basocellulaires, les lym
phomes ou plus rarement des mélanomes ulcérés.
C. Artériolopathie calcifiante (calciphylaxie)
Évolution
A. Pronostic
*
*
O Pour l’ulcère variqueux :
- cicatrisation en 3 à 6 mois sous couvert d’un traitement étiologique et local bien
conduit;
- mais récidive et passage à la chronicité non rares.
L’ulcère post-thrombotique est plus rebelle en raison :
-
des troubles péri-ulcéreux associés souvent importants;
- des perturbations hémodynamiques;
- de la difficulté d’un traitement étiologique.L’ulcère artériel :
- peut cicatriser si un traitement étiologique est possible (pontage, dilatation artérielle…) ;
- dans les tableaux évolués ou après des phénomènes ischémiques aigus sans possibi
lité de revascularisation, la décision d’amputation du membre est parfois nécessaire
devant l’importance de la douleur, le risque septique (gangrène gazeuse) et les risques
de décompensation viscérale (insuffisance rénale sur rhabdomyolyse, hyperkaliémie…).
B. Complications
1. Dermatites de contact (voir chapitre 13 - item 187)
Elles sont fréquentes en raison du grand nombre de produits topiques utilisés dans cette situa
tion où la barrière cutanée est altérée. L’érythème microvésiculeux prurigineux est limité au
début à la zone d’application du produit, mais peut diffuser à distance par la suite.
Les principaux allergènes (intérêt des tests épicutanés) sont :
* le baume du Pérou;
* certains antiseptiques;
* les fragrances;
* la lanoline;
* les conservateurs;
* certains pansements.
Le diagnostic différentiel d’avec une dermatite de stase est parfois difficile en raison de l’intri
cation fréquente des deux mécanismes.
- Surinfection microbienne
La présence de germes sur un ulcère est un phénomène non pathologique (colonisation) et ne
justifie pas de prélèvements bactériologiques, ni de traitements antiseptiques ou antibiotiques
systématiques.
Dans certains cas, l’ulcère peut représenter la porte d’entrée d’une infection cutanée patente.
Il faut y penser devant une :
* augmentation de la douleur locale;
* inflammation des bords (symptôme et signe non spécifiques);
* lymphangite;
* fièvre.
Il peut s’agir d’une dermohypodermite bactérienne (voir chapitre 8 - item 155 et chapitre 23 -
item 350), très rarement d’une fasciite nécrosante, d’une gangrène gazeuse (anaérobies) au
cours des ulcères artériels.
Le tétanos doit être prévenu systématiquement par vaccination chez les malades non
immunisés (+++).
. Lésions ostéo-articulaires
Les modifications ostéo-articulaires sont très fréquentes : périostite puis ostéopériostite abou
tissant à l’ankylose de la cheville.
Les positions antalgiques souvent à l’origine d’attitudes vicieuses sont parfois très difficiles à
corriger
Hémorragie
Elle survient souvent dans le cadre d’ulcères veineux par saignement d’une varice (traitement
par compression et surélévation du membre).
rcinome épidermoïde
La survenue d’un carcinome épidermoïde est rare et tardive.
Il faut y penser devant un(e) :
* chronicité de l’ulcère;
* apparition de douleurs;
* hémorragie locale;
* bourgeonnement excessif de la plaie initiale ++.La biopsie doit parfois être répétée pour faire le diagnostic.
Principes du traitement
A. Traitement étiologique
Le traitement étiologique est indispensable lors de toute prise en charge d’un ulcère.
Il peut permettre une amélioration significative des performances hémodynamiques et la limi
tation du risque de récidive.
Ulcères veineux
Compression
La compression est systématique, pour lutter contre l’œdème et diminuer le reflux par un effet
mécanique.
Une compression à haut niveau de pression est recommandée (30 à 40 mmHg à la cheville) si
IPS entre 0,8 et 1,3. Il faut :
* favoriser les compressions multicouches;
* obtenir une bonne observance;
* porter la compression toute la journée.
Chirurgie
Il est nécessaire d’opérer par éveinage les insuffisances veineuses superficielles en l’absence
d’obstruction et de reflux veineux profond axial.
La sclérothérapie n’a pas fait l’objet d’études comparatives d’efficacité dans le traitement de
l’ulcère veineux. Elle est principalement utilisée en complément de la chirurgie.
Il faut envisager les recours aux greffes en pastilles ou en filet si l’ulcère résiste aux traitements
conventionnels depuis plus de 6 mois ou si l’ulcère est de grande taille > 10 cm2.
Physiothérapie Veinotoniques Crénothérapie lors des cures thermales
- Ulcère mixte à prédominance veineuse
O II faut :
* prendre en charge l’AOMI ;
* adapter la compression en diminuant la pression sous 30 mmHg, si elle est autorisée (IPS
>0,7), et en utilisant des bandes à étirement court, sous surveillance médicale.
- Ulcère artériel
Traitement médical
Le traitement médical comprend les vasodilatateurs et les analogues de la prostacycline; la
prostacycline est indiquée en cas d’ischémie grave avec non-indication ou contre-indication
chirurgicale.
Traitement chirurgical
Il s’agit des techniques de désobstruction, de pontage, de sympathectomie.
306
Les indications chirurgicales se posent en fonction des résultats des examens (échographie
Doppler artérielle et angiographie artérielle).
B. Traitement général
* O Mettre à jour la vaccination antitétanique.
* Traiter la douleur en fonction de la cause (traiter les complications locales, prescrire un
topique anesthésique…), prescrire si besoin des antalgiques, en particulier avant les soins.
* Favoriser une bonne hygiène de vie et traiter les facteurs de risque et/ou de comorbidité :
arrêt du tabac, équilibre d’un diabète, lutte contre l’hyperlipidémie, traitement de l’HTA,
perte de poids, antiagrégants si besoin, activité physique adaptée (kinésithérapie si néces
saire, en particulier en cas d’ankylose des chevilles) en évitant les microtraumatismes.
* Prise en compte du contexte social et gériatrique.
* Évaluation du statut nutritionnel, en particulier en cas de retard de cicatrisation.
C. Traitement local de l’ulcère et de la peau péri-ulcéreuse
Pour réussir, les soins locaux doivent être réalisés avec une bonne coopération entre le médecin
et le personnel infirmier
Phase de détersion
* Nettoyage de l’ulcère à la douchette (eau stérile inutile); pas d’antiseptiques en l’absence
d’infection déclarée (++).
* Enlever les débris cellulaires et croûteux à la surface de l’ulcère au bistouri, à la curette ou
aux ciseaux. Éventuellement après topique anesthésique ou MEOPA, gaz à visée antal
gique; en cas de douleurs trop importantes: anesthésie locorégionale.
* Topiques à ce stade : alginates et hydrogels pour favoriser la détersion de la fibrine ou de
la nécrose, laissés en place 48 à 72 heures selon le suintement et en l’absence d’infection
patente.
2. Phase de bourgeonnement
* tulles vaselinés (à choisir dépourvus de produits sensibilisants comme le baume du
Pérou ++);
* hydrocolloïdes, hydrocellulaires, interfaces : peuvent être laissés plusieurs jours. But : favo
riser le bourgeonnement en maintenant humidité, pH et oxygénation optimaux;
* alginates de calcium (aussi hémostatiques) et hydrofibres en cas de plaie très exsudative.
Elle fait appel à l’utilisation de trois types de produits :
3. Phase de ré-épithélialisation
Mêmes types de produits que précédemment, en particulier hydrocolloïdes et interfaces.
Greffes en pastilles (fig. 18.5) ou en résille : effet antalgique et raccourcissement de la durée
de cicatrisation. Greffes indiquées pour les ulcères de grande taille (>10 cm2) et les ulcères
rebelles ne cicatrisant pas au bout de 6 mois.
. En cas d’ulcères à caractère inflammatoire
Pansements à l’argent, si les caractères suivants sont présents et évoquent une forte colonisa
tion bactérienne :
* érythème périlésionnel ;
* plaie malodorante;
* exsudât abondant.
- Traitement de la peau péri-ulcéreuse
*
*
*
*
Port d’une compression veineuse systématique.
Suppression de l’allergène et application de dermocorticoïdes si eczéma de contact.
Désinfection et antibiothérapie générale si dermohypodermite bactérienne.
Les lésions de dermatite ocre ne régressent pas sous traitement. La contention peut éviter
leur aggravation.
a plupart des ulcères de jambe sont de cause vasculaire par insuffisance veineuse chronique ou
artériopathie oblitérante des membres inférieurs.
*
*
Les ulcères infectieux, neurotrophiques, dysimmunitaires et néoplasiques sont plus rares.
Les ulcères les plus chroniques sont les ulcères post-thrombotiques.
* La douleur en particulier de décubitus et l’extension nécrotique sont les signes d’orientation vers une
cause artérielle ou artériolaire (angiodermite nécrotique).
*
* Les modifications de la peau péri-ulcéreuse sont plus fréquentes dans les ulcères de cause veineuse.
La sensibilisation allergique aux topiques utilisés et les surinfections sont les principales complications
des ulcères veineux.
Dans l’ulcère veineux : échographie Doppler veineuse et mesure des index de pression systolique (IPS) à
compléter par échographie Doppler artérielle dans trois cas (voir texte).
* Dans l’ulcère artériel : échographie Doppler artérielle et mesure des IPS, angiographie en cas d’option
*
chirurgicale.
*
*
*
*
*
*
Le traitement chirurgical doit être envisagé en priorité dans les ulcères par insuffisance veineuse chro
nique non post-thrombotique et dans les ulcères de cause artérielle.
Traiter par compression à haut niveau de pression les ulcères veineux en l’absence d’artériopathie obli
térante des membres inférieurs (AOMI).
Les moyens du traitement local doivent être adaptés aux trois phases évolutives successives de l’ulcère :
détersion, bourgeonnement, épithélialisation.
Une bonne hygiène de vie et la rééducation de la marche sont des compléments indispensables des
traitements spécifiques.
Pour l’exécution des soins locaux, la coopération entre le médecin et le personnel soignant est essentielle.
Les récidives sont fréquentes et doivent être prévenue
L’acné est une dermatose inflammatoire chronique du follicule pilo-sébacé.
I. Physiopathologie
A. Séborrhée (augmentation de production de sébum
par la glande sébacée)
O
La sécrétion du sébum est déclenchée et entretenue principalement par la dihy-
drotestostérone, produite dans les cellules sébacées par la 5a-réductase de type I à partir de
la testostérone libre et qui se fixe sur des récepteurs aux androgènes situés sur le sébocyte.
Les androgènes circulants sont présents à des taux normaux et l’acné résulte d’une sensi
bilité particulière des récepteurs androgéniques présents sur les sébocytes et les kératinocytes
(hyperandrogénie périphérique).B. Kératinisation infundibulaire du follicule pilo-sébacé
La formation du comédon est due à une hyperprolifération des kératinocytes du follicule pilo-
sébacé associée à des anomalies de leur différenciation qui empêchent une élimination nor
male des kératinocytes de l’épithélium du canal infundibulaire.Flore microbienne et facteurs de l’inflammation
La flore (ou rnicrobiome) anaérobie des follicules sébacés est dominée par une bactérie à Gram
positif Cutibacterium acnés, qui sécrète de nombreux facteurs induisant l’inflammation du
follicule pilo-sébacé.L’acné n’est pas une maladie infectieuse mais une maladie inflammatoire du follicule
pilo-sébacé.Différentes souches de Cutibacterium acnés ont un pouvoir inflammatoire différent. Ainsi, les
souches présentes sur la peau d’un sujet sam ne sont pas les mêmes que celles sur la peau
d’un sujet acnéique.
II. Diagnostic
O Le diagnostic est clinique.
L’acné n’est pas une maladie infectieuse mais une maladie inflammatoire du follicule
pilo-sébacé.
5
A. Lésions élémentaires
7. Séborrhée
* Aspect de peau grasse et luisante.
* Affecte les zones riches en glandes sébacées : partie centrale du visage (nez, front, menton,
joues) et région thoracique supérieure (dos et face antérieure du thorax).
* Constante.
2. Lésions rétentionnelles
Elles sont de deux types, les comédons fermés et les comédons ouverts :
*
*
comédons fermés (ou microkystes) :
- petites papules de 2 à 3 mm, couleur de peau normale, parfois plus palpables que
visibles qui peuvent s’enflammer,
- liés à l’accumulation du sébum et de kératine mélangés dans le canal folliculaire dilaté
par l’obstruction de son orifice;
comédons ouverts :
- correspondent aux « points noirs »,
- lésions de 1 à 3 mm secondaires à l’accumulation des kératinocytes oxydés au sein de
l’orifice dilaté du canal infundibulaire (fig. 1.1),
- peuvent s’expulser spontanément ou s’inflammer.
. Lésions inflammatoires
Lésions inflammatoires superficielles
*
*
Papules :
- lésions < 10 mm;
- généralement issues d’une lésion rétentionnelle;
- rouges, fermes, quelquefois douloureuses;
- pouvant évoluer vers la résorption ou la formation de pustules.
Pustules : elles sont habituellement issues de papules au sommet desquelles apparaît un
contenu purulent jaune par accumulation de polynucléaires (fig. 1.2 et 1.3).
Lésions inflammatoires profondes
*
Nodules :
- lésions > 10 mm;
- pouvant évoluer vers l’abcédation et la formation de cicatrices (fig. 1.4);
- rupture dans la profondeur du derme donnant des sinus, nodules allongés très
douloureux.
4. Cicatrices
* Fréquentes.
* Essentiellement secondaires aux lésions inflammatoires surtout si celles-ci durent depuis
longtemps.
* Peuvent être déprimées et hyperpigmentées sur la peau foncée.
B. Formes cliniques
1. Formes communes
Acné mixte juvénile (fig. 1.5)
* Q Forme la plus commune de l’acné.
* Survient au moment de la puberté (en moyenne : 12 ans chez les filles, 14 ans chez les garçons).
* Peut s’étendre au tronc.
Sévérité variable :
- acné minime ou modérée : lésions rétentionnelles et inflammatoires superficielles pré
sentes en nombre variable;
- acné sévère si présence de nodules.
Acné rétentionnelle
* Forme la plus fréquente de l’acné débutante.
* Essentiellement microkystes et comédons ouverts sur le visage.
. Formes graves
Acné nodulaire ou acné conglobata
* Présence de nodules inflammatoires qui peuvent évoluer vers des abcès ou se fistuliser en
profondeur (sinus).
* Extension au tronc fréquente surtout chez le garçon.
* Évolution chronique avec formation secondaire de cicatrices souvent importantes.
Acné fulminante (acné nodulaire aiguë, fébrile et ulcéreuse)
C. Formes cliniques ou étiologiques particulières
«
1. Acné néonatale
*
□ Apparaît sur le visage dès les premières semaines de vie.
* Régresse spontanément en quelques semaines.
* Est due aux androgènes d’origine maternelle.
2. Acné révélant une endocrinopathie ‘acné n’est qu’un des signes cliniques de l’endocrinopathie, qui est à suspecter devant :
* une acné féminine grave et résistante aux traitements;
* une acné accompagnée de signes d’hyperandrogénie : hirsutisme, alopécie, troubles des
règles;
* explorations hormonales alors justifiées : dosage de la testostérone libre, de la 17OH-pro-
gestérone, du sulfate de déhydroépiandrostérone (DHA) et de la A4-androstènedione;
* échographie abdomino-pelvienne : la cause la plus fréquente est la maladie des ovaires
polykystiques.
3. Acné prépubertaire
. Acné exogène
Acné de la femme adulte
Acné excorié
D. Diagnostic différentiel
□ L’absence de lésions rétentionnelles (comédons et microkystes) élimine le diagnostic d’acné.
Les autres causes de folliculites sont :
* folliculites infectieuses (bactérienne, à Demodex ou à Candida);
* rosacée (papulo-pustuleuse ou granulomateuse);
III. Traitement
A. Moyens thérapeutiques
10
7. Traitement local
El On retrouve trois grandes classes.
Ces traitements doivent être appliqués le soir (les rayons ultraviolets les détruisent et certains
sont photosensibilisants).
Rétinoïdes topiques
* Acide rétinoïque tout-frans, ou trétinoïne (rétinoïde topique de première génération), acide
13-cis-rétinoïque, ou isotrétinoïne, et adapalène (rétinoïde de deuxième génération).
* Principalement kératolytiques (comédolytiques) sur les comédons et les microkystes.
* L’adapalène a aussi une activité anti-inflammatoire.
* L’irritation est le principal facteur limitant : nécessité d’adaptations de posologie et de
rythme d’application (passera 1 J/2 par exemple).
Peroxyde de benzoyle
*
Utilisé aux concentrations de 2,5 ou 5 % sur le visage.
« Peut être utilisé à la concentration de 10 % essentiellement au niveau du dos.
* Légèrement comédolytique
superficielles).
* Pas de résistance bactérienne connue.
* Effets secondaires : irritation, phototoxicité et décoloration des vêtements.
et
puissamment
antibactérien
(lésions
inflammatoires
Antibiotiques locaux
* Deux antibiotiques disponibles : érythromycine 4 % et clindamycine.
* Agissent sur la flore bactérienne et comme anti-inflammatoires non spécifiques.* Activité modeste, essentiellement sur les lésions inflammatoires superficielles.
* Remis en cause du fait de la progression des résistances bactériennes, notamment aux
macrolides.
* Ne jamais les utiliser seuls mais en association avec un peroxyde de benzoyle ou un réti
noïde topique et sur une durée limitée.
Traitements combinés
* Traitements locaux associant soit rétinoïde et antibiotique, soit rétinoïde et peroxyde de
benzoyle.
* Favorisent l’observance.
. Traitement général
Les traitements systémiques à l’exception de l’isotrétinoïne doivent être associés à un traite
ment local de l’acné.
Antibiotiques
* Ne jamais les associer avec un antibiotique topique.
* Les cyclines (doxycycline, lymécycline) sont le traitement de choix :
*
- activités antiséborrhéique et anti-inflammatoire présentes à des doses inférieures de
moitié à celle de l’activité antibactérienne;
- utilisées en moyenne 3 mois : au-delà risque de résistance bactériologique augmenté;
- effets secondaires principaux : phototoxicité (surtout pour la doxycycline) et dyschro
mies dentaires (ne pas utiliser chez l’enfant de moins de 8 ans).
Les macrolides (érythromycine, roxithromycine, josamycine) ne doivent être utilisés que
sur une courte période lorsque les cyclines ne peuvent pas être prescrites (femme
enceinte, jeune enfant).
Gluconate de zinc
* Activité essentiellement anti-inflammatoire inférieure à celle des cyclines.
* Utile en cas de contre-indication à celles-ci : acné prépubertaire, durant l’été (pas de risque
de photosensibilisation) et en cas de grossesse
Isotrétinoïne
* Inhibiteur non hormonal de la sécrétion sébacée induisant l’apoptose des sébocytes.
* Le plus puissant des médicaments sébostatiques et des médicaments antiacnéiques, seul
capable d’induire des guérisons.
* Les autres traitements systémiques sont uniquement suspensifs.
* Dose moyenne de 0,5 mg/kg/jour jusqu’à une dose cumulée comprise entre 120 et 150 mg/
kg (obtenue en 9 à 12 mois de traitement en moyenne).
* Pour les formes rétentionnelles, la dose pourra être diminuée à 0,2 ou 0,3 mg/kg/jour.
* Effets secondaires :
- élévation des transaminases et hyperlipidémie : dosage initial et surveillance périodique
tous les 3 mois des transaminases (ASAT, ALAT), du cholestérol total et des triglycérides,
- réglementation spéciale de prescription par le médecin et de délivrance par le pharma
cien avec suivi à l’aide d’un carnet de prescription,
- risque tératogène nécessitant une contraception efficace chez la femme en âge de
procréerà débuter 1 mois avant le début du traitement et à poursuivre pendant toute la
durée du traitement et 1 mois après son arrêt,
- contrôles mensuels du test de grossesse (p-hCG plasmatiques), le dernier ayant lieu
5 semaines après l’arrêt de l’isotrétinoïne,
- information détaillée et consentement signé par la patiente ou le représentant légal
dans le cas d’une mineure,
- sécheresse cutanéo-muqueuse dose-dépendante : chéilite, xérose cutanée, conjoncti
vite (proscrire le port de lentilles), rhinite sèche pouvant donner des épistaxis,
- exacerbation possible de l’acné pendant les 4 premières semaines de traitement : l’éva
cuation des lésions rétentionnelles avant l’instauration d’un traitement par isotrétinoïne
diminue le risque de poussées inflammatoires,
- risque d’hypertension intracrânienne en association avec les cyclines (contre-indication),
- douleurs ligamentaires,
- troubles de l’humeur : évaluation du risque de dépression recommandée (échelle) :
prévenir les patients.
Hormonothérapie
* En l’absence de besoin contraceptif, il n’est pas recommandé de prescrire un œstroproges
tatif dans l’acné.
* Œstroprogestatif à visée contraceptive chez une femme présentant de l’acné.
Privilégier les progestatifs à faible activité androgénique :
12
- première intention : lévonorgestrel (deuxième génération);
- deuxième intention : norgestimate (assimilé deuxième génération);
- si l’acné persiste malgré un traitement dermatologique bien conduit, les autres
options contraceptives seront envisagées en concertation avec la patiente et un
gynécologue;
- association acétate de cyprotérone 2 mg/éthinylestradiol 35 pg peut être proposée en
tenant compte des recommandations de l’Agence nationale de sécurité du médicament
et des produits de santé (ANSM) concernant notamment le risque thromboembolique.
Cette association ne doit pas être prescrite en cas de traitement par isotrétinoïne (effi
cacité contraceptive insuffisante).
B. Indications
* Le choix des moyens thérapeutiques varie selon le degré de gravité de l’acné.
* L’extension des lésions (moins de la moitié du visage/plus de la moitié du visage/tout le
visage) et le nombre de lésions inflammatoires profondes (nodules) permettent d’apprécier
la gravité de l’acné.
* L’observance est souvent médiocre chez les adolescents.
* Le traitement d’attaque est prescrit 3 mois pour juger de son efficacité.
* Les traitements topiques (peroxyde de benzoyle ou association peroxyde de benzoyle et
rétinoïdes) sont prescrits seuls pour les acnés légères et en association aux cyclines pour les
acnés sévères et/ou moyennes.
* L’isotrétinoïne est un traitement de deuxième intention dont la prescription se fera après
échec de 3 mois de cyclines sauf pour les formes très sévères où elle pourra être prescrite
plus précocement.
* Une fois l’obtention d’une rémission obtenue, un traitement d’entretien local devra être
poursuivi aussi longtemps que nécessaire.
Le patient acnéique a aussi besoin de conseils et d’informations
a
■
*
*
*
*
*
*
*
Appliquer le traitement local le soir sur tout le visage et pas uniquement sur les lésions.
Appliquer, le matin, une crème hydratante si nécessaire pour protéger la barrière cutanée de l’irritation
induite par les traitements topiques.
Les « nettoyages de peau » ne peuvent être qu’un complément éventuel au traitement.
Il est inutile, voire préjudiciable, de passer un antiseptique sur les lésions ou de faire une toilette
«énergique».
Les soins d’hygiène sont indispensables, mais doivent être guidés, de même que les soins cosmétiques.
Le soleil réduit transitoirement le caractère inflammatoire des lésions, mais il facilite la comédoge-
nèse en épaississant la peau et l’amélioration estivale est généralement suivie d’une poussée d’acné en
automne. Une photoprotection peut être nécessaire en cas de prescription de produits photosensibili
sants en particulier en cas de peau foncée.
Il n’y a pas de régime alimentaire à suivre.
Les effets du traitement ne sont jamais rapides : il faut 2 à 3 mois en moyenne pour obtenir un résultat
appréciable. Le patient doit en être prévenu ainsi que des effets secondaires possibles.
manque point cle acne
Rosacée
D.
EL
III.
îV.
V.
Terrain
Physiopathologie
Diagnostic
Évolution
Traitement
O Maladie faciale fréquente, touchant principalement les adultes après l’âge de 20 ans.
Elle a longtemps été confondue avec l’acné, le terme ancien d’«acné rosacée» doit être
abandonné.
Terrain
* Touche le plus souvent des sujets à peau claire, aux yeux clairs et aux cheveux clairs.
* Prédomine chez la femme (ratio F/H environ égal à 2).
* Pic de fréquence entre 40 et 50 ans.
III. Diagnostic
A. Diagnostic positif
O Le diagnostic est clinique.
1. Forme vasculaire
Phénomènes vasculaires paroxystiques : bouffées vasomotrices
(«flushes»)
* Poussées de rougeur paroxystique du visage et du cou, avec sensation de chaleur, sans
signes systémiques.
* Durée de quelques minutes.
*
Ils sont déclenchés par :
- les changements de température (entraînant parfois une thermophobie);
- l’absorption de boissons et d’aliments chauds;
- l’absorption d’alcool ;
- l’absorption d’aliments épicés.
Phénomènes vasculaires permanents : rosacée érythémato-télangiectasique
* Érythème facial permanent associé à des télangiectasies (couperose) touchant des régions
particulières : les joues, le nez, le menton et la partie médiane du front (fig. 1.7).
* Il peut s’associer à des bouffées vasomotrices.
. Forme papulo-pustuleuse, la plus caractéristique de la rosacée
Des papules inflammatoires et des pustules apparaissent sur un fond d’érythème permanent
avec la même topographie (fig. 1.8).
- Forme hypertrophique : le rhinophyma
18
* Touche principalement les hommes (dans plus de 95 % des cas).
* Généralement après l’âge de 50 ans.
* Le nez augmente de volume, est diffusément rouge, avec des orifices folliculaires dilatés.
* La peau s’épaissit progressivement, devient fibreuse et le nez prend l’aspect classique de la
«trogne», sans qu’un alcoolisme ne soit en cause (fig. 1.9).
Le passage par ces formes successives n’est pas obligatoire.
B. Diagnostic différentiel
1. Diagnostics différentiels courants
*
*
Acné :
- terrain différent (sujet jeune…);
- signes rétentionnels (comédons, microkystes);
- séborrhée;
- absence de bouffées vasomotrices.
Dermatite séborrhéique :
- fond érythémateux, mais parsemé de squames grasses;
- localisations différentes : ailes du nez, sillons naso-labiaux, sourcils, glabelle et lisière
antérieure du cuir chevelu préférentiellement;
- possible combinaison chez un même individu rosacée + dermatite séborrhéique : «der
matose mixte du visage»
evolution
La rosacée débute après l’âge de l’acné, le plus souvent chez des adultes d’âge moyen.
* Le climat continental (fortes amplitudes thermiques entre été et hiver), le travail à la cha
leur, l’exposition solaire sont incriminés dans le déclenchement de la maladie.
* L’exposition solaire augmente le plus souvent les signes fonctionnels et la rougeur.
* Les phases inflammatoires ont tendance à disparaître avec l’âge.
* L’évolution est chronique, émaillée de poussées de papules et de pustules survenant sans
facteur déclenchant particulier.
* Des complications oculaires sont fréquentes (30 à 50 % des patients ont des signes
subjectifs) : sécheresse, conjonctivites et blépharites, voire kératites.
* Une fois installé, le rhinophyma ne régresse plus et n’est sensible à aucun traitement medical
Rougeur centrofaciale chronique de l’adulte avec bouffées vasomotrices.
Diagnostic clinique : aucun examen complémentaire.
Atteinte oculaire possible.
Chronicité, évolution par poussées.
Les dermocorticoïdes sont contre-indiqués.
Dermatite séborrhéique
O La
dermatite séborrhéique, appelée également dermite séborrhéique, est une dermatose
chronique fréquente (prévalence de 1 à 3 % en France).
Physiopathologie
*
*
*
*
□ Prédilection pour les zones séborrhéiques, mais le rôle du sébum n’est pas clairement
démontré.
Rôle de Malassezia (M. furfur, M. globosa, etc.) suspecté en raison de la localisation préfé
rentielle de la dermatite séborrhéique dans les régions cutanées où la levure atteint sa plus
forte densité + efficacité des traitements antifongiques.
Pas de relation quantitative entre la gravité de la maladie et la densité de la flore levurique.
Il ne s’agit pas d’une maladie infectieuse à proprement parler et il n’y a pas de contagiosité.
Diagnostic positif
a
O Le diagnostic repose sur l’examen clinique, sans prélèvement biopsique ou autre examen
biologique ou mycologique.
Différentes formes cliniques sont décrites.
. Dermatite séborrhéique de l’adulte
* Touche le plus souvent les hommes jeunes (18 à 40 ans).
* Aggravée par les stress émotionnels et s’améliore spontanément en été.
atteinte du visage
* Localisation la plus fréquente.
* Plaques érythémateuses recouvertes de petites squames grasses dans les zones où prédo
mine la séborrhée : sillons nasogéniens, sourcils, glabelle, lisière antérieure du cuir che
velu… (fig. 1.10) ainsi que dans la barbe et la moustache chez l’homme.
* Dans les formes étendues : atteinte du menton et des bords ciliaires des paupières (blépha
rite séborrhéique) possible.
2. Atteinte du cuir chevelu
* Peut être isolée.
* Formes peu sévères : les plus fréquentes.
* Cuir chevelu recouvert de petites squames non adhérentes, réalisant au minimum un état
pelliculaire (pityriasis capitis).
* Lésions souvent asymptomatiques mais prurit ou sensations de brûlure possibles.
* Formes sévères : aspect de casque engainant des touffes de cheveux (pityriasis amiantacé).
3. Atteinte du tronc
Plaques annulaires ou circinées à bordure squameuse sur la région présternale.
Autres atteintes possibles
Zones pileuses et régions génitales.
B. Dermatite séborrhéique du nouveau-né et du nourrisson
* Débute après la deuxième semaine de vie chez des nouveau-nés en bonne santé.
* Forme typique : aspect de croûtes jaunes du cuir chevelu (croûtes de lait) et du visage.
* Dermatite du siège et squames grasses des plis axillaires possibles.
* Forme étendue et extensive : érythrodermie (dite de Leiner-Moussous) d’évolution le plus
souvent spontanément favorable.
Dermatite séborrhéique sévère et étendue
Plus fréquente chez :
* les patients atteints de la maladie de Parkinson et de syndromes extrapyramidaux iatrogènes ;
* les alcooliques chroniques;
* les malades traités pour des carcinomes des voies aérodigestives supérieures;
* les patients atteints d’infection par le VIH (40 % des cas chez les sujets séropositifs et
jusqu’à 80 % au stade Sida). C’est dans ces formes que le rôle du Malassezia spp. est le
plus clairement suspecté. Une dermatite séborrhéique grave et/ou chronique doit
conduire à réaliser un test de dépistage du VIH.
. Diagnostic différentiel
A. Psoriasis des régions séborrhéiques («sébopsoriasis»)
* □ Souvent impossible à différencier cliniquement.
* Les localisations extrafaciales et les antécédents permettent de séparer les deux entités.
B. Dermatite atopique
* Chez le nourrisson, une érythrodermie de Leiner-Moussous pourrait constituer un mode
de début d’une dermatite atopique ou d’un psoriasis.
* Chez l’adulte, le diagnostic est parfois difficile lorsque la dermatite atopique ne persiste
qu’à la tête et au cou. Toutefois, elle déborde largement les localisations typiques des
régions séborrhéiques.
O La dermatite séborrhéique est une dermatose fréquente.
La dermatite séborrhéique touche de manière sélective les zones séborrhéiques de la tête et du tronc
avec le rôle probable d’une levure, du genre Malassezia.
* Le diagnostic repose sur l’examen clinique, sans biopsie ou autre examen.
* La localisation la plus fréquente est au visage.
* Les nourrissons peuvent être atteints, parfois avec une érythrodermie (Leiner-Moussous).
Au cours de l’infection par le VIH, on observe des dermatites séborrhéiques profuses résistant au
traitement.
* Le traitement est essentiellement local (antifongique).
* Il s’agit d’une dermatose chronique évoluant par poussées, parfois favorisées par le stress et les
contrariétés.
Le psoriasis est une dermatose inflammatoire érythémato-squameuse, d’évolution chronique.
EX Elle atteint environ 2 % de la population française.
Physiopathologie
* Le psoriasis est caractérisé par un renouvellement épidermique accéléré avec hyperprolifé-
ration et troubles de la différenciation des kératinocytes.
* Il met en jeu, sur un terrain génétique particulier, des interactions complexes entre le sys
tème immunitaire, les cellules épidermiques (kératinocytes) et les vaisseaux.
* L’origine de la maladie est inconnue; une prédisposition génétique est certaine et
de nombreux gènes de susceptibilité ont été identifiésQ Le stress,
les traumatismes cutanés (phénomène de Koebner) et certains patho
gènes ou certains médicaments peuvent entraîner :
- la production de peptides antimicrobiens comme la cathélicidine (LL-37) qui stimule
la sécrétion d’interféron alpha;
- la production par les kératinocytes de cytokines inflammatoires comme IL-1 p,
IL-36 et TNFa, activant des cellules dendritiques pour produire de l’IL-12 et de l’IL-23.
* L’IL-12 et l‘IL-23 participent à la différenciation des lymphocytes T en sous-populations Th 1
produisant l’IFNy et Th17 produisant l’IL-17.
* Les IL-12, IL-17 et TNFa favorisent localement :
- la prolifération des kératinocytes;
- la néo-angiogenèse;
- la production de chimiokines nécessaires au recrutement des polynucléaires neutrophiles.
* O
L’examen anatomopathologique d’une biopsie cutanée de lésion psoriasique
peut être utile mais n’est habituellement pas nécessaire.
* O Lorsque cet examen est réalisé,
il montre (fig. 7.1) :
- une hyperkératose avec parakératose;
- une acanthose (épaississement de l’épiderme) liée à une prolifération excessive des
kératinocytes;
- des micro-abcès épidermiques à polynucléaires neutrophiles;
- un infiltrat inflammatoire dermique constitué de lymphocytes;
- un allongement des papilles dermiques et des vaisseaux néoformés dilatés.
II. Facteurs environnementaux à l’origine du
déclenchement d’un psoriasis ou de poussées
évolutives de la maladie
A. Infections
96
* Certains psoriasis de l’enfant et l’adolescent, notamment aigus en gouttes, débutent à la
suite d’épisodes infectieux rhino-pharyngés (agents viraux et streptocoque p hémolytique
du groupe A).
* Les épisodes infectieux peuvent aggraver des psoriasis déjà connus.
* La survenue ou l’aggravation d’un psoriasis au cours de l’infection par le VIH est possible.
B. Médicaments
* Caractère inducteur ou aggravant de certains médicaments comme les bêta-bloquants (y
compris les collyres); rôle débattu d’autres médicaments (lithium, sartans, IEC, anti-TNFa,
etc).
* Rebond important possible, voire développement de formes graves (psoriasis érythroder-
mique, psoriasis pustuleux généralisé), lors de l’arrêt d’une corticothérapie générale.
C. Facteurs psychologiques
* Rôle possible des chocs émotionnels et des traumatismes affectifs dans le déclenchement
de la maladie ou la survenue de poussées.
» Le stress psychologique pourrait induire une sécrétion accrue de neuromédiateurs à activité
pro-inflammatoire.
Facteurs de gravité
a
L’alcool, le tabac et la surcharge pondérale sont des facteurs reconnus de gravité et de résis
tance thérapeutique et peuvent contribuer aux comorbidités souvent présentes.
Diagnostic
* O Le diagnostic de psoriasis est un diagnostic clinique dans la très grande majorité des cas.
*
La biopsie cutanée n’est indiquée qu’en cas de doute diagnostique devant des lésions
atypiques.
formes classiques du psoriaris
Lésion élémentaire
* Il s’agit d’une papule ou d’une plaque érythémato-squameuse bien limitée, arrondie, ova
laire ou polycyclique (fig. 7.2).
* La couche squameuse superficielle blanchâtre peut être très épaisse ou, au contraire, plus
ou moins décapée par le traitement, laissant apparaître l’érythème sous-jacent.
* Le plus souvent, ces éléments sont multiples et symétriques, parfois diffus.
* La taille des lésions est variable :
-
psoriasis en plaques (fig. 7.3);
- O psoriasis en gouttes (fig. 7.4).
Localisations habituelles (zones bastions) (fig. 7.5)
O Zones exposées aux frottements et traumatismes physiques :
* coudes (et bord cubital de l’avant-bras);
* genoux, jambes;
* région lombo-sacrée, fesses;
* cuir chevelu;
* ongles;
* paumes et plantes;
* respect habituel du visage.
Points cliniques importants
Dans le psoriasis «classique», l’état général n’est pas altéré.
* Un prurit est présent lors des poussées dans environ 60 % des cas.
* Les lésions régressent sans laisser de cicatrice mais évoluent parfois vers des macules hyper-
pigmentées ou dépigmentées.
* Les lésions peuvent être douloureuses et fonctionnellement gênantes, particulièrement aux
paumes et aux plantes où des fissures peuvent apparaître.
Formes cliniques
1. Psoriasis du cuir chevelu
*
*
Le psoriasis du cuir chevelu peut se manifester par :
- des plaques circonscrites, de taille variable, arrondies, bien limitées, couvertes de larges
squames souvent épaisses, traversées par les cheveux (fig. 7.6);
- ou une véritable carapace squameuse en casque recouvrant la totalité du cuir chevelu.
Il est rarement la cause d’une alopécie durable mais les plaques épaisses peuvent engainer
les follicules pileux et parfois entraîner une chute de cheveux temporaire.La localisation occipitale est fréquente.
* À la lisière antérieure du cuir chevelu, les lésions sont souvent nettement inflammatoires et
réalisent une couronne érythémateuse et discrètement squameuse.
Psoriasis unguéal (fig. 7.7)
Il peut prendre des aspects très variés :
100
Fig 7.7
* dépressions ponctuées cupuliformes des tablettes : ongles en « dé à coudre » ;
* onycholyse avec décollement distal et zone proximale de couleur cuivrée «saumonée» ou
jaunâtre en « tache d’huile » ;
* hyperkératose sous-unguéale, paronychie, perte de transparence de l’ongle et zones leuco-
nychiques (blanches);
* disparition de la tablette à l’extrême.
. Autres localisations plus rares
*
Psoriasis inversé (non situé sur les convexités) des plis, en particulier interfessier, axillaires,
sous-mammaires, ombilical, inguinaux (fig. 7.8).Psoriasis palmo-plantaire :
- peut réaliser une kératodermie en îlots ou diffuse, souvent fissuraire (fig. 7.9),
- parfois isolé sous la forme d’une kératodermie palmo-plantaire,
- peut rendre la marche ou les activités manuelles difficiles du fait des douleurs et des
fissuresQ forme pustuleuse possible,
à type de pustulose palmo-plantaire (fig. 7.10) pouvant
s’associer à une atteinte articulaire sternale ou sterno-claviculaireO Psoriasis des
*
muqueuses :
- linguale : glossite exfoliatrice marginée,
- génitale : lésions érythémateuses non squameuses aggravées lors des rapports sexuels.
Psoriasis du visage :
- rare, il peut prendre l’aspect d’une dermatite séborrhéique avec érythème finement
squameux des sourcils et du pli nasogénien,
- des lésions associées de la conque de l’oreille et du conduit auditif externe sont possibles.
C. Formes graves
1. Psoriasis érythrodermique (voir chapitre 4 - item 114)
* Q Psoriasis généralisé à plus de 90 % de la surface cutanée avec une desquamation abon
dante et un épaississement cutané (fig. 7.11).
*
*
Peut être provoqué par un rebond du psoriasis après l’arrêt de certains agents thérapeu
tiques (corticothérapie générale).
Comme toute érythrodermie, le psoriasis érythrodermique :
- peut se compliquer de surinfection, de carence vitaminique, de troubles de la thermo
régulation, de déshydratation et de troubles hémodynamiques,
- doit entraîner l’hospitalisation du malade en milieu spécialisé.
. Psoriasis pustuleux : forme généralisée
*
Peut apparaître d’emblée ou compliquer un psoriasis en plaques plus ancien.
* Peut être déclenché par divers mécanismes (certains médicaments, grossesse…).
* Début brutal avec altération de l’état général, fièvre élevée et placards rouge vif qui se
couvrent de pustules superficielles non folliculaires d’aspect « laiteux » pouvant confluer en
larges nappes essentiellement localisées sur le tronc, secondairement érosives.
* Évolution parfois grave, pouvant mettre en jeu le pronostic vital.
* Histologie : pustules spongiformes (multiloculaires), non folliculaires et aseptiques, ce qui
les différencie des pustules d’origine infectieuse.
3. Rhumatisme psoriasique
* Se rencontre chez environ 25 % des malades (fig. 7.12).
* Sévérité de l’atteinte cutanée non corrélée à la présence d’une atteinte articulaire.
* Périphérique ou axial.
* Certaines localisations de psoriasis sont particulièrement associées à un rhumatisme psoria
sique : atteinte du cuir chevelu, atteinte unguéale, atteinte du sillon interfessier.
* Peut également être associé à une atteinte inflammatoire des insertions tendineuses
(enthésopathie : inflammation des enthèses).
* Atteinte fréquente des articulations interphalangiennes distales, de l’ensemble d’un doigt
ou d’un orteil (dactylite).Au cours de l’infection par le VIH
* Le psoriasis est souvent plus grave et réfractaire aux thérapeutiques conventionnelles.
* Il peut prendre l’aspect d’un psoriasis en plaques, pustuleux ou érythrodermique, et peut
être difficile à distinguer d’une dermatite séborrhéique profuse.
D. Psoriasis de l’enfant
104
* Souvent localisé à la zone du siège chez le nourrisson (appelé autrefois psoriasis des langes,
napkin psoriasis) (fig. 7.13).
* Souvent aigu, en gouttes chez l’enfant plus âgé et l’adolescent.
* Peut succéder à une infection rhino-pharyngée streptococcique.
* Visage plus souvent atteint que chez l’adulte.
IV. Diagnostic différentiel
A. Pour la forme classique en plaques érythémato-squameuses
1. Pityriasis rosé de Gibert (fig. 7.14)
Q Éruption d’origine inconnue (possiblement virale) souvent saisonnière.
* Médaillon isolé précédant l’éruption pendant 10-15 jours.
* Macules rosées finement squameuses et médaillons, dont le centre plus clair paraît en voie
de guérison, sur le tronc et la racine des membres.
* Disposition caractéristique « en arbre de Noël » sur le tronc.
* Évolution spontanée vers la guérison en 6 à 8 semaines (sinon évoquer des diagnostics
différentiels).
* Doit faire pratiquer de principe sérologie VIH et sérologie de la syphilis.
2. Dermatite séborrhéique (voir chapitre 1 - item 111)
* Habituellement localisée au visage (plis nasogéniens), au cuir chevelu et à la région
médiothoracique.
* De diagnostic parfois délicat car des formes frontières avec un psoriasis sont possibles
(sébopsoriasis, dermite bipolaire du nourrisson).
* La présence de lésions de psoriasis à distance aide au diagnostic.
3. Eczéma chronique (voir chapitre 13 - item 187)
*
*
Il diffère par :
- son aspect clinique qui est souvent proche en raison d’une hyperkératose fissurée, mais
avec peu de squames et des limites émiettées;
- sa topographie (visage et plis).
Le diagnostic différentiel se pose surtout avec l’eczéma nummulaire (en médaillons) et les
eczémas palmo-plantaires.
4. Lymphomes cutanés
En cas de doute, une biopsie cutanée s’impose.
diagno dif
B. Pour les autres formes de psoriasis
* psoriasis des plis : intertrigos d’origine bactérienne ou mycosique;
* psoriasis palmo-plantaire : autres causes de kératodermies palmo-plantaires acquises
(eczéma, lichen, dermatophytie);
* érythrodermie psoriasique : autres causes d’érythrodermie (toxidermies, lymphomes,
eczémas);
* psoriasis pustuleux généralisé : certaines toxidermies pustuleuses (pustulose exanthé
matique aiguë généralisée).
V. Évolution, complications
* La maladie débute le plus souvent chez l’adolescent et l’adulte jeune.
* Les psoriasis de début précoce sont plus souvent associés aux gènes de susceptibilité et
sont d’évolution plus sévère que les psoriasis débutant après la cinquantaine.
* Le handicap social peut être important.
* L’évolution est chronique :
- soit de manière quasi continue, surtout chez les patients atteints de formes sévères;
- soit par poussées entrecoupées de rémissions.
* Les rémissions sont plus fréquentes en été, du fait de l’effet bénéfique des rayons ultraviolets.
* Les poussées, souvent imprévisibles, sont parfois déclenchées par :
*
*
- des facteurs psychologiques;
- des médicaments;
- des infections notamment ORL.
Les traumatismes cutanés (griffures, vaccinations, chirurgie, coups de soleil) peuvent
aggraver le psoriasis en faisant libérer des cytokines inflammatoires par les kératinocytes
(phénomène de Koebner : fig. 7.15).
Complications :
- surinfection - rarement bactérienne, plus par Candida albicans (plis) ou dermatophytes
(paumes et plantes surtout) - qui peut entretenir ou aggraver les lésions;
- eczématisation (à évoquer si suintement et prurit intense) : penser à rechercher une
sensibilisation ou une irritation dues à un topique médicamenteux.
VI. Pathologies associées
* O Altération profonde de la qualité de vie avec syndrome dépressif parfois sévère
même en dehors des formes graves (érythrodermies, rhumatisme et formes pustuleuses).
La gravité de ce retentissement est souvent sous-estimée par le médecin.
* Association significative chez certains patients à des conduites addictives comme le
tabagisme ou une consommation excessive d’alcool.
* Surrisque de comorbidités cardiovasculaires et de maladie inflammatoire du tube
digestif.
*
Syndrome métabolique :
- syndrome associant :
-
- glycémie à jeun > 1,10 g/L,
- triglycéridémie >1,50 g/L,
- HDL <0,40 g/L chez l’homme et <0,50 g/L chez la femme,
- TA >130/85 mmHg,
- tour de taille > 102 cm chez l’homme et >88 cm chez la femme;
si ce syndrome métabolique n’est pas traité, risque de complication cardiovasculaire et
diabète de type 2.
* Risque accru de mortalité précoce pour le psoriasis sévère.
* Importance de la prise en charge multidisciplinaire des patients pour assurer un traite
ment concomitant du psoriasis et des comorbidités
II. Principes du traitement
A. Règles générales
*
O Nécessité d’une bonne relation médecin-malade.
Faire comprendre que les traitements actuels n’entraînent pas la guérison définitive
de l’affection, mais permettent la réduction de l’intensité des lésions et l’amélioration de la
qualité de vie.
* Prise en compte impérative dans le choix thérapeutique de la gravité et de l’étendue
des lésions, mais aussi du retentissement sur la qualité de vie, du préjudice fonction
nel, esthétique, professionnel, relationnel, du retentissement psychologique de la maladie
et du désir de rémission du malade.
* Nécessité d’un soutien (ou d’une prise en charge) psychologique.
* La gravité du psoriasis s’évalue par la surface corporelle atteinte (une paume : 1 %)
et par le score PASI (Psoriasis Area and Severity Index).
* L’altération de la qualité de vie est également évaluée par des scores, le plus utilisé étant
le DLQI (Dermatology Quality Life Index, score : 0-30). Un psoriasis est considéré comme
sévère en cas de DLQI > 10.
* Les psoriasis modérés à sévères ont une surface atteinte de plus de 10 % et/ou un score
PASI >10.
* Prise en compte dans le choix thérapeutique des comorbidités et des effets indésirables
potentiels, à court et à long terme, des traitements.
B. Traitements locaux
Ils sont surtout représentés par les dermocorticoïdes, les analogues de la vitamine D3 ou leur
association.
108
1. Dermocorticoïdes
* Ils s’utilisent sous forme de pommade (lésions sèches) ou de crème.
* Éviter les pommades dans les plis (risque de macération).
* Lotion, mousse et shampooing au propionate de clobétasol pour le cuir chevelu.
* Règles d’utilisation (voir chapitre 22 - item 330) :
- en dehors des lésions du visage, utiliser un dermocorticoïde d’activité forte (propionate
de fluticasone, dipropionate de bétaméthasone);
- une seule application par jour suffit (effet « réservoir » de la couche cornée) ;
- durée de traitement d’attaque de 1 à 3 semaines en traitement continu en fonction des
localisations;
- traitement intermittent (2 fois par semaine) proposé en entretien ;
- optimisation de l’efficacité possible par l’occlusion avec un pansement ou un hydrocol
loïde qui permet une pénétration accrue des topiques;
- occlusion particulièrement indiquée sur les paumes et les plantes (l’épaisseur de la
couche cornée réduit la pénétration des topiques);
- association possible avec les autres traitements du psoriasis.
2. Analogues de la vitamine D
*
Calcipotriol, tacalcitol, calcitriol :3. Association dermocorticoïde et calcipotriol
O
L’association est synergique et permet d’obtenir une efficacité supérieure à la
monothérapieAutres traitements topiques
* □ Bains et émollients : utiles pour décaper les lésions et soulager le prurit.
* Préparation à base d’acide salicylique :
_ pour décaper des lésions très squameuses en préalable à un autre traitement local ou
avant une PUVAthérapie;
_ contre-indiqué chez le nouveau-né (risque d’intoxication salicylée);
- Photothérapie
Q Les différentes photothérapies sont les suivantes :
*
*
PUVAthérapie :
_ association d’un psoralène photosensibilisant (8-méthoxy-psoralène ou 5-méthoxypso-
ralène) et d’une irradiation UVA,
_ 20 séances en moyenne à raison de 2 à 3 séances/semaine sont nécessaires,
_ photoprotection nécessaire dans les heures qui suivent,
_ port de lunettes noires obligatoire;
photothérapie UVB à spectre étroit (TL-01) :
_ ne nécessitant pas la prise de psoralène préalable,
_ efficacité comparable à celle de la PUVAthérapie,
_ moins carcinogène,
_ 20 à 30 séances en moyenne à raison de 2 à 3 séances/semaine sont nécessaires;
* association rétinoïde (acitrétine) et PUVAthérapie : rePUVA ou acitrétine et UVB ;
* photothérapies localisées pour les paumes ou les plantes.
Les précautions et les effets indésirables sont décrits dans le tableau 7.1.Photothérapie : précautions et effets secondaires
Contre-indications et précautions Effets indésirables
- Contre-indications : - À court terme :
* antécédent de cancer cutané
* dermatose photo-aggravée
* médicaments photosensibilisants
- Précautions :
* protection des organes génitaux externes
* tenir compte de la dose cumulée délivrée (ne pas
* érythème plus ou moins intense (surdosage, prise
concomitante de médicaments photosensibilisants)
* troubles digestifs (PUVA)
- À long terme :
* vieillissement prématuré de la peau
* cancers cutanés (surtout carcinomes)
dépasser 200 séances)
* surveillance cutanée prolongée (carcinomes tardifs
D. Traitements généraux - hors biothérapies (tableau 7.2)
* Acitrétine : rétinoïde.
* Méthotrexate : immunomodulateur non sélectif.
* Ciclosporine : immunosuppresseur non sélectif.
* Aprémilast : immunomodulateur inhibant une phosphodiestérase, utilisé en cas échec, ou
contre-indication, ou intolérance aux autres traitements systémiques dont la ciclosporine,
le méthotrexate ou la PUVAthérapie.
Tableau 7.2
psoriasis
110
Q Contre-indications, précautions et effets indésirables des traitements systémiques du
Contre-indications
Effets indésirables
Acitrétine
- Femme en âge de procréer sans contraception efficace,
projet de grossesse dans les 3 ans après l’arrêt du
traitement, grossesse, allaitement
- Anomalies bilan lipidique, anomalies bilan hépatique
- Tératogénicité
- Sécheresse cutanéo-muqueuse, prurit, perte des cheveux
- Hyperlipidémie
- Élévation des transaminases
- Hypertension intracrânienne si prescrit en même temps
que les tétracyclines (association contre-indiquée)
Méthotrexate
- Femme et homme en âge de procréer sans contraception - Cytopénie, macrocytose
efficace, grossesse, allaitement
- Anomalies hémogramme - Troubles digestifs
- Anomalies bilan hépatique
- Insuffisance rénale - Fibrose pulmonaire (rare)
- Fibrose hépatique (si facteurs de risque associés : alcool,
- Infection évolutive
- Pneumopathie d’hypersensibilité (rare)
diabète)
- Ulcérations cutanéo-muqueuses si surdosage et/ou
interactions médicamenteuses (aspirine forte dose,
trimétoprime)
Ciclosporine
- HTA - HTA
- Insuffisance rénale - Hypertrichose
- Antécédent néoplasie - Néphrotoxicité
- Hyperplasie gingivale
- Infection chronique
- Cancers cutanés
- Nombreuses interactions médicamenteuses
E. Biothérapies ou biomédicaments
a
Prescription réservée au spécialiste avec prescription initiale hospitalière.
1. Indications
* Psoriasis modéré à sévère avec un retentissement important sur la qualité de vie.
* En France, indication limitée aux cas d’intolérance, d’inefficacité ou de contre-indication à
au moins deux agents systémiques dont le méthotrexate, la ciclosporine et la photothérapie.
* Il existe quatre types d’agents en fonction de leur mode d’action :
- les agents anti-TNFa : étanercept, infliximab
- Q les agents ciblant l’IL-12 et l’IL-23 :
- Q les agents ciblant la voie de l’IL-17 ;
- Q les agents ciblant l’IL-23 :
F. Indications thérapeutiques
Q Elles dépendent :
* de la gravité du psoriasis, des localisations cutanées, de l’existence d’une atteinte
articulaire;
* du retentissement sur la qualité de vie du patient et de sa demande thérapeutique;
* des contre-indications de principe éventuelles;
* des antécédents du patient.
1. Formes légères à modérées de psoriasis
* Le traitement local est suffisant dans la majorité des cas quand l’atteinte ne dépasse pas
10 % de la surface corporelle.
* On peut utiliser au choix les dermocorticoïdes, les dérivés de la vitamine D ou les associations.
2. Formes modérées à sévères retentissant de manière importante
sur la qualité de vie
*
112
*
Le traitement peut faire appel selon le profil de la maladie et du patient :
- à la photothérapie avec ou sans rétinoïdes;
- aux rétinoïdes seuls (acitrétine);
- au méthotrexate;
- à la ciclosporine.
En cas d’échec ou d’intolérance à ces traitements, l’aprémilast et les biothérapies sont
utilisés.
. Conclusion
. □ Le traitement du psoriasis est planifié dans le cadre d’une collaboration entre le médecin
traitant et le dermatologue.
* Il repose sur la mise en place d’une stratégie au long cours comme dans toute maladie
chronique.
8 Le patient doit être informé de sa maladie et guidé pour acquérir des compétences permet
tant de gérer son psoriasis au quotidien.
* La prise en compte du retentissement psychologique doit être mise en œuvre tout au long
du suivi.
* L’adhésion au traitement est meilleure si le patient est associé aux choix thérapeutiques.
* La prise en charge du psoriasis doit comporter une approche transversale comportant à
côté du traitement des lésions cutanées :
-
l’évaluation et le traitement d’un éventuel rhumatisme psoriasique en coordination avec
le rhumatologuel’évaluation et la prise en charge des comorbidités cardiovasculaires et métaboliques et
des conduites addictives en coordination avec le médecin traitant.
Le psoriasis est une maladie inflammatoire cutanée chronique.
* Q II touche 2 à 3 % de la population.
* O II est caractérisé cliniquement par des lésions érythémato-squameuses.
*
Les localisations sont le plus souvent très caractéristiques : coudes, genoux, jambes, région lombo-
sacrée, cuir chevelu, ongles.
*
Le psoriasis, particulièrement dans les formes modérées à sévères, peut retentir de manière importante
sur la qualité de vie et produire stigmatisation et exclusion sociale.
Il existe des formes graves de psoriasis pouvant avoir des conséquences fonctionnelles ou vitales impor
tantes : rhumatisme psoriasique, psoriasis érythrodermique, psoriasis pustuleux généralisé.
* Q Le but du
traitement est la prise en charge au long cours d’une maladie chronique : soulager le
patient, améliorer la qualité de vie et ramener la dermatose à un niveau lésionnel compatible avec une
vie normale au long cours.
Les traitements locaux constituent la base du traitement des psoriasis peu étendus (< 10 % de la surface
corporelle), qui restent les psoriasis les plus fréquents.
* Les traitements systémiques sont adaptés aux psoriasis plus étendus (> 30 % de la surface corporelle) ou
résistant aux traitements locaux. Parmi eux, on distingue :
- la photothérapie, très efficace maisqui ne peut être utilisée au longcoursdu fait du risque carcinogène;
- les traitements systémiques par voie orale : acitrétine, méthotrexate, ciclosporine.
* Les agents biologiques (biomédicaments ou biothérapies) sont réservés aux formes modérées à sévères
de psoriasis, intolérantes ou résistantes aux traitements systémiques habituels.
*
*
Transversalité : rhumatologie, maladies métaboliques (obésité, diabète, maladies cardiovasculaires).
L’urticaire est une dermatose inflammatoire fréquente due à l’activation des mastocytes par des mécanismes immunologiques ou, le plus souvent, non immunologiques. Son diagnostic repose sur l’interrogatoire et l’examen clinique. L’évolution est le plus souvent aiguë (15 % de la population fait une poussée d’urticaire au cours de sa vie), plus rarement chronique, évo
luant pendant plus de 6 semaines.
I. Physiopathologie L’urticaire correspond à un oedème dermique (urticaire superficielle) ou dermo-hypodermique (urticaire profonde ou angioedème) dû à une vasodilatation avec augmentation de la perméa bilité capillaire secondaire à la libération par les mastocytes de différents médiateurs dont le principal est l’histamine. L’activation des mastocytes est due à des mécanismes : . Q immunologiques : - hypersensibilité immédiate médiée par les IgE (présence de récepteurs spécifiques FoeRI sur la membrane des mastocytes),
- auto-anticorps de type IgG anti-FceRI fixant le complément;
* non immunologiques : - stimulation de divers récepteurs à la surface des mastocytes, - action pharmacologique de substances exogènes sur le métabolisme de l’acide arachi donique membranaire,
- apport excessif ou libération exagérée d’histamine. 232
Lorsque les mastocytes sont activés, différents médiateurs, dont l’histamine, sont libérés dans le
derme et parfois d’autres organes ce qui est à l’origine des manifestations cliniques d’urticaire.
II. Diagnostics positif et différentiel A. Diagnostic positif
1. Urticaire superficielle O Les lésions élémentaires sont des papules oedémateuses (fig. 13.1), «ortiées» comme des piqûres d’orties, rosées ou érythémateuses, à bordure nette, sans topographie préférentielle, avec parfois un centre plus clair, de quelques millimètres à plusieurs centimètres, restant isolées ou confluant en larges plaques à contours géographiques (fig. 13.2). L’aspect clinique peut être différent : lésions annulaires ou polycycliques (fig. 13.3 et 13.4), micropapuleuses, bulleuses. Quel que soit le type des lésions, elles sont prurigineuses, fugaces, durant de quelques minutes
à quelques heures, et migratrices.
- Urticaire profonde ou angioedème L’oedème est blanc rosé, de consistance ferme, non prurigineux mais donnant une sensation de tension ou de douleur; il siège préférentiellement sur le visage (paupières et lèvres; fig. 13.5| et jl 3.6), les extrémités des membres, les organes génitaux. Il régresse en moins de 72 heures
sans séquelles. La localisation laryngo-pharyngée conditionne le pronostic.
L’urticaire superficielle et/ou profonde peut être dans une minorité de cas associée à des mani festations d’anaphylaxie : * signes respiratoires : dysphonie, dyspnée, bronchospasme; * signes cardiovasculaires : tachycardie ou bradycardie, hypotension artérielle; * signes digestifs : nausées, vomissements, diarrhées; * signes neurologiques : céphalées, convulsions (tableau 13.1). L’urticaire superficielle est isolée dans la moitié des cas, associée à des angioedèmes dans 40 % des cas. Dans 10 % des cas, il n’y a que des angioedèmes, qui nécessitent
une approche diagnostique et thérapeutique différente.
O Stades de gravité de l’anaphylaxie (classification de Ring et Messmer) Grades de sévérité I
Symptômes Signes cutanéo-muqueux, érythème, urticaire et/ou angioedème
II III IV
Atteinte multiviscérale modérée : signes cutanéo-muqueux ± hypotension artérielle ± tachycardie ± toux ± dyspnée ± signes digestifs
Atteinte mono- ou multiviscérale : collapsus cardiovasculaire, tachycardie ou bradycardie ± troubles du rythme cardiaque ± bronchospasme ± signes digestifs
Arrêt cardiaque
B. Diagnostic différentiel Le diagnostic d’urticaire est généralement facile en raison de l’aspect typique des lésions et de leur caractère fugace et migrateur. On peut discuter des piqûres d’insectes, une dermatose bulleuse auto-immune au stade prébulleux (voir chapitre 2 - item 112), un érythème poly morphe, mais les lésions persistent alors plusieurs jours aux mêmes endroits. □ Quand l’urticaire est atypique, peu ou non prurigineuse, fixe, d’autres diagnostics doivent être évoqués (vasculite urticarienne, maladie de Still… ; fig. 13.7). O Quand l’angioedème est isolé, il faut éliminer les oedèmes d’origine infectieuse, inflamma toire, endocrinienne, médicamenteuse, auto-immune, tumorale. L’eczéma aigu du visage peut
être responsable d’un oedème mais les lésions sont fixes, vésiculeuses et suintantes ( ig. 13.8|).
III. Principales causes d’urticaire Le diagnostic étiologique est le plus souvent fait par l’interrogatoire et l’examen clinique.
236
A. Urticaires physiques (ou inductibles) Le diagnostic est évoqué par l’interrogatoire, confirmé par des tests de provocation.
1. Dermographisme urticarien ou urticaire factice (fig. 13.9) * Fréquent chez l’enfant et le jeune adulte, stries urticariennes secondaires au frottement des vêtements, friction de la peau, grattage.
. Q Confirmation du diagnostic par frottement de la peau avec une pointe mousse.
- Urticaire cholinergique * O Petites papules érythémateuses de 1 à 5 mm de diamètre, surtout partie supérieure du corps.
* Déclenchement par efforts physiques, sudation, douche chaude, émotions.
* O Confirmation du diagnostic par test d’effort en atmosphère chaude.
- Urticaire au froid (fig. 13.10) * O Urticaire superficielle ou profonde due au contact avec de l’air, de l’eau, des objets froids,
le plus souvent acquise, sans cause identifiée (parfois infection virale, cryoglobuline).
* Température déclenchante variable, parfois au changement brutal de température (urti caire différentielle thermique).
* Gravité en fonction des manifestations associées (angioedème, manifestations systémiques, choc) ou de réactions oropharyngées à l’ingestion de boissons ou d’aliments froids.
* □ Confirmation du diagnostic par test au glaçon ou, s’il est négatif, par immersion de la
main et de l’avant-bras dans l’eau froide.
- Urticaire solaire * O Urticaire survenant après quelques minutes au soleil dans les zones habituellement couvertes.
* □ Confirmation du diagnostic par des photo-tests qui précisent la dose urticarienne mini
male et les longueurs d’onde responsables (lumière visible et/ou UVA et/ou UVB).
- Urticaire retardée à la pression * O Apparition de lésions infiltrées, profondes, douloureuses, 4 à 8 heures après pression, appui fort ou prolongé (plantes des pieds après une longue marche, fesses après une sta tion assise prolongée, épaule après le port d’un sac en bandoulière…).
* Manifestations systémiques associées dans la moitié des cas (fièvre, arthralgies, céphalées…). * D Confirmation du diagnostic par test à la pression : port pendant 20 minutes d’un sac de 7 kg sur l’épaule, l’avant-bras ou la cuisse et lecture du test dans les heures qui
suivent.
- Autres causes O Exceptionnelle urticaire à l’eau quelle que soit sa température, à la chaleur ou aux
vibrations.
B. Urticaires de contact * Apparition de lésions urticariennes dans la zone du contact cutané avec une substance, pouvant s’associer à des manifestations systémiques (jusqu’au choc anaphylactique), en cas d’urticaire de contact immunologique allergique. L’exemple type est l’urticaire de contact allergique aux protéines de latex contenues dans les gants ou objets en latex.
* Mécanismes immunologiques IgE dépendants ou non immunologiques. . Q Confirmation du diagnostic par tests cutanés ouverts, prick tests (fig. 13.11) et dosage
des IgE spécifiques.
C. Urticaires alimentaires * O Urticaire parfois précédée de manifestations orales, pouvant s’associer à des manifesta tions d’anaphylaxie et à un tableau de choc.
* Nombreux aliments incriminés mais rares urticaires alimentaires allergiques avec un méca nisme IgE dépendant.
238
* Diagnostic d’allergie alimentaire évoqué sur : - délai entre l’ingestion et le début des signes de quelques minutes à moins de 2 heures; - gravité des manifestations associées (> grade II); - résolution des symptômes en moins de 12 heures; - récidive à chaque prise de l’aliment, quelle qu’en soit la quantité.
* Confirmation de l’origine allergique par prick tests avec des extraits standardisés ou les produits natifs, dosage des IgE spécifiques et si nécessaire test de provocation par voie
orale en milieu hospitalier.
D. Urticaires médicamenteuses * Nombreux médicaments : principalement antibiotiques, AINS, anesthésiques généraux (curares).
* Tous les médicaments peuvent être en cause, quelle que soit leur voie d’administration, y compris vaccins et produits de contraste iodés.
* Mécanismes immunologiques IgE dépendants (allergie, moins de 10 % des cas, ex. : péni cillines) ou non immunologiques (intolérance, beaucoup plus fréquente, par histamino libération non spécifique ou activation du métabolisme de l’acide arachidonique, ex. : AINS).
* Diagnostic d’allergie médicamenteuse évoqué sur : - délai entre prise médicamenteuse et début des symptômes < 45 minutes; - durée des symptômes < 24 heures;
- sévérité des manifestations (> grade II).
E. Urticaires satellites d’une cause infectieuse * Nombreuses infections virales pouvant être associées à une urticaire : - infections des voies aériennes supérieures en particulier chez l’enfant; - infections à EBV, à CMV, hépatites (triade de Caroli : céphalées, arthralgies et urticaire); - parasitoses (giardiase, ascaridiase, toxocarose…) à évoquer en cas d’hyperéosinophilie
sanguine et ou de signes digestifs.
F. Urticaires par piqûres d’insectes * Piqûres d’hyménoptères (abeilles, guêpes, frelons, bourdons) : - urticaire isolée ou associée à des manifestations d’anaphylaxie; mécanismes immunolo giques ou non immunologiques;
- confirmation du diagnostic par tests cutanés (prick tests et surtout intradermoréac-
tions avec des extraits standardisés de venin) et dosage des IgE spécifiques.
IV. Classification des urticaires A. Le plus souvent, urticaire aiguë superficielle isolée ou associée à un angioedème
* Fréquence importante : 1 5 à 20 % de la population générale. * Poussées pendant quelques heures à quelques semaines (< 6 semaines). * Diagnostic étiologique par interrogatoire : aliments, médicaments et/ou épisodes infec tieux, vaccination, injection de produits de contraste, contact avec des végétaux, des ani maux, piqûres d’hyménoptères.
* Pas d’examens complémentaires systématiques. * En cas de suspicion d’une cause allergique (aliment, médicament, hyménoptères), bilan
allergologique orienté par l’interrogatoire.
B. Plus rarement, urticaire chronique superficielle isolée ou associée à des angioedèmes * Poussées quotidiennes ou quasi quotidiennes pendant plus de 6 semaines. * Interrogatoire ++ : - antécédents personnels et familiaux d’urticaire, d’atopie, de maladies auto-immunes; - circonstances (horaire, environnement, activités physiques et professionnelles); - habitudes de vie en particulier alimentaires; - prises médicamenteuses; - signes associés (fièvre, arthralgies, troubles digestifs); - facteurs favorisants ou aggravants (épisodes infectieux, stress).
* Individualisation de deux types d’urticaires chroniques, parfois associés : - urticaires chroniques inductibles (10-15 %), provoquées par un stimulus, reproduc tibles et ne se produisant qu’en présence de celui-ci : dermographisme, urticaires au froid, au chaud, solaire, retardée à la pression, vibratoire, à l’eau, urticaire cholinergique, urticaires de contact;
- urticaires chroniques spontanées (85-90 %), apparition «spontanée» ou favorisée par des stimuli différents en fonction des poussées : médicaments (AINS, acide acétyl salicylique), infections, stress, chaleur…
* Pas de bilan systématique dans les urticaires chroniques. En fonction du contexte, tests de provocation dans les urticaires physiques, tests allergologiques dans les urticaires
de contact.
C. Angioedèmes isolés * Dans 95 % des cas, angioedèmes (AO) dus à l’activation des mastocytes (histaminiques) par : aliments, médicaments, piqûres d’hyménoptères, latex, facteurs physiques.
* Dans 5 % des cas, angioedèmes dus à des anomalies du métabolisme de la bradykinine : - AO acquis d’origine médicamenteuse (inhibiteurs de l’enzyme de conversion, sartans, gliptines);
- AO dus à un déficit héréditaire ou acquis de l’inhibiteur de la C1 estérase (dosage quantitatif et fonctionnel du C1 inhibiteur et du facteur C4).
* Inefficacité des antihistaminiques et des corticoïdes dans les AO bradykiniques, recours à
des traitements spécifiques.
V. Prise en charge thérapeutique A. Urticaire aiguë Dans tous les cas, éviction du ou des facteurs déclenchants.
1. Urticaire et/ou angioedème sans atteinte muqueuse * Antihistaminiques H1 de 2e génération par voie orale ou injectable si poussée intense.
* Poursuite à la posologie de l’AMM : 1 cp/jour pendant 1 à 2 semaines.
- Urticaire et angioedème laryngé et/ou manifestations d’anaphylaxie > grade II * Adrénaline IM (0,01 mg/kg sans dépasser 0,5 mg) sous surveillance électrocardiographique et tensionnelle.
* Dose répétée après 5-1 5 minutes, si nécessaire. * En cas de choc ou d’arrêt cardiaque, adrénaline par voie IV titrée en fonction de la pression artérielle et de la fréquence cardiaque.
* Mesures associées : oxygénothérapie (6-8 Mmin), remplissage vasculaire par sérum salé
isotonique, aérosol de |32-mimétiques en cas de crise d’asthme.
B. Urticaire chronique * El Information du patient sur sa maladie, son évolution, les traitements proposés : - évaluation du retentissement de l’urticaire sur la qualité de vie, souvent altérée; - éviction des facteurs favorisants ou aggravants; - anti-histaminiques H1 de 2e génération à la posologie de l’AMM pendant 4 à 6 semaines; - ils peuvent être prescrits chez la femme enceinte - avis du Centre de référence des agents tératogènes (CRAT) - et chez l’enfant en adaptant la posologie;
* évaluation après ce delai : - si disparition de l’urticaire, poursuite du traitement pendant au moins 3 mois, - si persistance de l’urticaire, bilan biologique : NFS, CRP, anticorps anti-thyroperoxydase (anomalies thyroïdiennes associées dans 10 à 20 % des cas),
- modification du traitement : changement de molécules, augmentation de la posologie jusqu’à 4 fois la dose de l’AMM (hors AMM);
- moins de 10 % des urticaires chroniques sont résistantes aux anti-H 1 de 2° génération. Autres traitements en association avec les anti-H 1 : seul l’omaiizumab a l’AMM dans l’urticaire chronique spontanée résistant aux anti-H1 ; la ciclosporine peut également être efficace (hors AMM);
- la corticothérapie générale n’a pas d’indication dans l’urticaire chronique.
- O Motif fréquent de consultation : 15 % de la population fait une poussée d’urticaire au cours de sa vie. * L’histamine est le principal médiateur impliqué, que l’urticaire soit d’origine immunologique ou non. * La lésion élémentaire est une papule oedémateuse « ortiée », prurigineuse, fugace et migratrice. * L’angioedème ou urticaire profonde peut mettre en jeu le pronostic vital quand il concerne la sphère oro-pharyngo-laryngée.
- Les infections virales, les médicaments et certains aliments sont les principales causes d’urticaire aiguë. * L’urticaire aiguë correspond le plus souvent à un épisode unique et ne nécessite aucune exploration complémentaire.
- Quand le contexte clinique évoque un mécanisme allergique, un bilan allergologique doit être réalisé. * L’urticaire chronique se manifeste par des poussées quotidiennes ou quasi quotidiennes pendant au moins 6 semaines.
- Parmi les urticaires chroniques, il existe des formes inductibles dues à des facteurs physiques et de contact. * Les urticaires chroniques spontanées sont les plus fréquentes. * En l’absence de contexte clinique évocateur, aucune exploration complémentaire n’est nécessaire dans l’urticaire chronique spontanée.
- Le traitement de l’urticaire superficielle et/ou profonde repose sur l’éviction des facteurs déclenchants ou aggravants et les antihistaminiques H1 de 2e génération.
- L’adrénaline est le traitement des oedèmes laryngés et des manifestations d’anaphylaxie.
Dermatite eczema atopique
I. Physiopathologie Q Elle fait intervenir plusieurs facteurs.
A. Facteurs génétiques
* Atopie familiale : > 50 % des cas. * Atopie : prédisposition d’origine génétique à produire des anticorps d’isotype IgE lors de l’exposition à des allergènes environnementaux.
* Se manifeste selon l’organe atteint par : dermatite atopique (peau), allergie alimentaire (muqueuse digestive; le plus souvent allergie aux protéines du lait de vache; autres aller gènes possibles : oeuf, arachide), asthme ou bronchiolite (muqueuses bronchiques), rhinite ou rhinoconjonctivite allergique (muqueuses ORL et oculaire).
* On parle de « marche atopique » : succession des différentes manifestations atopiques chez un même individu à différents âges de la vie. Manifestations les plus précoces : dermatite atopique, allergie alimentaire, bronchiolite.
* Rarement : absence d’augmentation des IgE (dermatite atopique « intrinsèque »). * Maladie polygénique (plusieurs gènes en cause).
* Parmi ces gènes, mutations de gènes codant pour des protéines de la barrière cutanée :- 30 % des patients avec une dermatite atopique ont une mutation perte de fonction de la filaggrine;
- ceci induit une augmentation de la perméabilité de la barrière qui est encore aggravée par la colonisation de la surface cutanée par le staphyloccoque doré. Ce défaut de la
barrière cutanée majore encore la pénétration d’allergènes.
B. Facteurs immunologiques * Anomalie de l’immunité innée (diminution des peptides antimicrobiens -> prédisposition aux infections bactériennes et herpétiques).
* Anomalie de l’immunité adaptative : différenciation Th2, induction de la production d’IgE par les lymphocytes B, libération de cytokines dans la peau par les lymphocytes activés -> contribution à l’inflammation cutanée et à l’altération de la barrière cutanée.
* Association possible à une allergie alimentaire (ex. : protéines du lait de vache) qui aggrave la dermatite atopique (par activation lymphocytaire consécutive à la présentation des IgE
spécifiques par les cellules présentatrices d’antigène cutanées).
C. Facteurs environnementaux * Différents facteurs favorisants : - les irritants : par exemple les savons/détergents, la fumée de tabac; - les allergènes : par exemple les acariens, les aliments, les animaux domestiques, le pollen.
* Théorie hygiéniste : amélioration des conditions d’hygiène et de santé -> diminution de l’exposition aux agents infectieux -» modification de la régulation du système immunitaire inné (déviation Th2). Pourrait expliquer la prévalence en hausse (10 à 20 % des enfants
dans les pays industrialisés à niveau socio-économique élevé ont une dermatite atopique).
II. Histoire de la maladie * O Début habituel dans la première année de vie. * Évolution : - par poussées; - aggravation classique l’hiver; - formes sévères de la maladie : évolution continue; - amélioration voire « guérison » fréquente dans l’enfance ; - forme de l’adulte : 3 à 5 % des enfants évoluent vers une forme de l’adulte, notamment les formes sévères d’emblée. Début tardif à l’âge adulte possible mais rare : doit faire
éliminer d’autres diagnostics (gale, eczéma de contact, lymphome cutané T…).
III. Présentation clinique * Aspect clinique différent en fonction du stade : - en phase aiguë : eczéma. Lésions érythémateuses et vésiculeuses (mais vésicules rare
ment visibles macroscopiquement). Rupture : érosions, suintement puis croûtes;- en phase chronique : lésions érythémateuses et squameuses. Si grattage chronique : modification de la peau avec épaississement, caractère quadrillé, pigmentation : lichénification ;
- lésions mal limitées.
* Les localisations des lésions varient selon l’âge : - nourrisson : zones convexes du visage (respect médio-facial) et des membres (fig. 1 3.12’ et 13.13). Plis du cou. Zone sous la couche le plus souvent épargnée. Cuir chevelu : pos sible atteinte inflammatoire avec squames et croûtes jaunâtres (diagnostic différentiel : dermite séborrhéique ou «croûtes de lait»);
- enfant > 2 ans : atteinte des plis notamment coudes et genoux (fig. 13.14);
- adolescent et adulte : prédominance au visage et au cou.
- Autres signes cliniques : - prurit : quasi constant, parfois insomniant. Pas évident chez le tout-petit (mouvements équivalents : se frotte et s’agite notamment déshabillé);
- xérose : souvent absente chez le tout-petit; - hypopigmentation postinflammatoire : lésions mal limitées, macules hypopigmentées et légèrement rosées, finement squameuses. Sur le visage, communément appelées « dartres » ;
- signe de Dennie-Morgan : double pli sous-palpébral (fig. 13.15);
- fissure sous-auriculaire.
- Formes cliniques particulières : - eczéma nummulaire : lésions cutanées bien limitées et arrondies (fig. 13.16); - prurigo : papules et nodules érythémateux excoriés, prédominant aux membres (fig. 13.17);
- érythrodermie (notamment après arrêt d’une corticothérapie systémique qui est non
indiquée dans la dermatite atopique).
IV. Arguments diagnostiques * Diagnostic clinique ++ : aucun examen complémentaire à réaliser. * El Si une biopsie était réalisée : atteinte épidermique prédominante avec afflux de lympho cytes T (exocytose) et oedème intercellulaire (spongiose) réalisant des vésicules microscopiques.
* O Antécédents familiaux d’atopie (notamment parent au 1er degré) ou antécédents per sonnels d’atopie (allergie alimentaire, asthme ou rhinoconjonctivite) : arguments impor tants mais non indispensables.
* Une augmentation des IgE totales ou une hyperéosinophilie témoignent du terrain ato pique mais ne sont pas nécessaires pour le diagnostic.
* Tests allergologiques : aucun intérêt en première intention. Voir plus loin encadré 13.1.
V. Principaux diagnostics différentiels * Q Nourrisson : dermatite séborrhéique, gale (lésions vésiculeuses et pustuleuses des paumes et des plantes évocatrices de scabiose). Très rares syndromes génétiques impli quant un déficit immunitaire : par exemple syndrome de Buckley (ou syndrome hyper-lgE).
* Enfant, adolescent et adulte : dermatite de contact, psoriasis, lymphome cutané, gale.
VI. Complications A. Infections cutanées bactériennes
f 247
* O Staphylococcus aureus. * Aspect clinique : croûtes jaunâtres ou purulentes, souvent malodorantes. * Ne doit pas être confondu avec : - la colonisation chronique de la peau par le staphylocoque doré (quasi constante);
- le suintement des lésions aiguës.
B. Infections virales (voir chapitre 10 - item 168) 1. HSV (essentiellement HSV1) : syndrome de Kaposi-Juliusberg * histoire clinique : modification rapide des lésions; * examen clinique : - vésicules et pustules ombiliquées (déprimées en leur centre; fig. 13.18), groupées en placard devenant croûteux et parfois nécrotiques, - parfois fièvre et altération de l’état général ;
* conduite à tenir : - mise en route d’un traitement antiviral, arrêt des dermocorticoïdes, - examen clinique à la recherche d’une autre atteinte (oculaire, pulmonaire ou neurolo
gique), notamment dans le syndrome de Kaposi-Juliusberg.
- Poxvirus (molluscum contagiosum) Plus nombreux chez l’enfant atopique.
C. Dermatite (ou eczéma) de contact 248
* Suite à une sensibilisation (ex. : composants des produits topiques appliqués sur la peau). * Mesures «préventives» : éviter les allergènes fréquents (ex. : parfum, produits «bio» à
base de plantes).
D. Autres . Q Retard de croissance : peut s’observer dans les formes sévères. N’est pas dû aux corti coïdes locaux et s’améliore sous traitement. Doit faire rechercher une allergie alimentaire.
* Complications ophtalmologiques : kératocône associé à la dermatite atopique ou compli cations (rares) de la corticothérapie (surtout systémique) utilisée de manière inadéquate.
* Altération de la qualité de vie de l’enfant et de sa famille : très fréquente.
VII. Traitement A. Dermocorticoïdes (voir chapitre 22 - item 330), base du traitement
O Différents éléments sont pris en compte pour le choix du dermocorticoïde. Il faudra se poser les questions suivantes : * Quel niveau d’activité? - sur le visage, plis ou avant 2 ans : dermocorticoïdes d’activité moyenne; - sur le corps ou après 2 ans : dermocorticoïdes d’activité forte; - dermocorticoïdes d’activité très forte : en cure courte sur lésions lichénifiées;
- dermocorticoïdes d’activité faible : pas d’intérêt car pas d’efficacité.* Quelle galénique? - crèmes sur les lésions suintantes et les plis;
- pommades sur les lésions très sèches, lichénifiées.* O Quel nombre d’application ? - 1 application/jour.
* Quelle durée?
- jusqu’à disparition de l’inflammation cutanée.
B. Émollients * O Prescription systématique (lutte contre la xérose cutanée). Parfois mal tolérés en phase aiguë (début de poussée très inflammatoire).
* Application sur tout le corps, visage si besoin (parfois mal tolérés sur les plaques inflammatoires).
* Produit adapté à la peau atopique, sans parfum.
C. Inhibiteurs de la calcineurine topiques (ou immunomodulateurs topiques) * Seul le tacrolimus est commercialisé en France.
* Indications privilégiées : lésions du visage et du cou. * Médicament sur ordonnance d’exception, prescription réservée aux dermatologues et pédiatres.
* AMM : poussées de dermatite atopique modérée à sévère de l’enfant et de l’adulte en cas de résistance ou de contre-indication aux dermocorticoïdes.
. □ Pommade à 0,03 % pour l’enfant de 2 à 15 ans; pommade 0,1 % pour l’adulte. * Remboursement : uniquement pour la forme à 0,1 % (adulte). * Effets indésirables fréquents : brûlures, le plus souvent transitoires, surtout chez l’adulte. * Traitement d’attaque : 2 fois/jour. * Traitement d’entretien : 2 fois/semaine (hors AMM), pour prévenir les poussées au niveau
des zones habituellement atteintes.
D. Autres traitements * O Antihistaminiques oraux (anti-H1) : hors AMM, pas d’efficacité sur le prurit, intérêt à visée sédative.
* Antiseptiques et antibiotiques locaux ou systémiques : uniquement en cas d’infection.* Traitements systémiques = traitement des formes sévères : photothérapie, ciclosporine, dupilumab, JAK inhibiteurs. Corticothérapie générale non indiquée (risque de rebond à
l’arrêt).
E. Mesures associées * Toilette : bain quotidien ou douche de courte durée, température tiède, nettoyants sans savon et sans parfum.
* Éducation thérapeutique souvent très utile. * Soutien psychologique. * Cures thermales. * Homéopathie, phytothérapie, acupuncture : non recommandé, absence de preuve
scientifique.
F. Mode de vie * Éviter les facteurs aggravants : éviter les textiles irritants, l’exposition au tabac. * Se méfier des contages herpétiques. * Vacciner normalement tout en évitant de vacciner lors d’une poussée. En cas d’allergie associée à l’oeuf, il faut prendre un avis spécialisé pour les vaccinations contre la grippe et
la fièvre jaune.
G. Échec du traitement * Causes à évoquer : - mauvaise application du traitement et notamment des dermocorticoïdes : quantités insuffisantes, arrêt avant disparition totale de l’inflammation cutanée, dermocorticoïde de trop faible niveau d’activité;
- diagnostic erroné; - complications : infection, eczéma de contact (possible avec les dermocorticoïdes); - corticophobie ou fausses croyances : - très répandue chez les patients et les professionnels de santé, - doit toujours être recherchée (non abordée spontanément), - fausses croyances diverses : par exemple, « les dermocorticoïdes ont les mêmes effets indésirables que les corticoïdes par voie orale, ils abîment la peau, ils font sortir l’asthme »,
- conduit à une mauvaise observance.
* Mesures à discuter : - éducation thérapeutique du patient et des parents : notamment en cas de corticopho bie ou de fausses croyances;
- prise en charge psychologique : la dermatite atopique altère la qualité de vie. Le stress peut déclencher des poussées;
- enquête allergologique : en cas de suspicion d’allergie associée (encadré 13.1); - hospitalisation dans un service de dermatologie dans les indications suivantes : derma tite atopique grave, en échec thérapeutique, complications (ex. : infection grave, en
particulier herpétique), traitement systémique envisagé.
Indications d’explorations allergologiques Suspicion d’allergie alimentaire associée
* O Signes d’appel : - signes évocateurs après ingestion ou contact avec un aliment : syndrome oral (prurit buccal et pharyngé, oedème péribuccal, dysphagie); urticaire aiguë, angioedème; asthme, rhinite; vomissements, douleurs abdominales, diarrhées; voire choc anaphylactique;
- dermatite atopique grave et/ou résistante à un traitement bien conduit; - stagnation ou cassure de la courbe pondérale.
* Explorations possibles : prick tests cutanés, dosage des IgE sériques spécifiques, test de provocation orale, tests épicutanés (atopy patch tests).
Suspicion d’allergie respiratoire associée * Signes d’appel : asthme, rhinite ou rhinoconjonctivite. * Explorations : prick tests, dosage des IgE spécifiques.
Suspicion d’eczéma de contact * Signes d’appel : atteinte de zones inhabituelles, dermatite atopique ne répondant pas au traitement ou s’aggravant.
* Explorations : tests épicutanés (patch tests).
O Prévalence en augmentation. Dermatite atopique : une des manifestations les plus précoces de l’atopie. Maladie chronique, évoluant le plus souvent par poussées. Diagnostic clinique, habituellement facile. Due à des facteurs génétiques et environnementaux responsables d’une altération de la barrière cutanée. Traitement de référence : dermocorticoïdes et émollients. Problème de la corticophobie.
Éducation thérapeutique très utile.
Eczéma de contact I Physiopathologie II. Diagnostic III. Diagnostic étiologique IV. Évolution et complications V. Traitement
O L’eczéma allergique de contact est une dermatose inflammatoire fréquente due à l’activa tion de lymphocytes T déclenchée par le contact de la peau avec des substances chimiques
exogènes.
I. Physiopathologie □ L’eczéma de contact est dû à une réaction d’hypersensibilité retardée à médiation cellulaire
de type Th 1 évoluant en deux phases.A. Phase de sensibilisation * Le produit sensibilisant, l’haptène, pénètre la peau et s’associe à une protéine (antigène/ allergène) qui est prise en charge par les cellules de Langerhans qui migrent par voie lym phatique vers la zone paracorticale des ganglions lymphatiques.
* Pendant cette migration, elles subissent une maturation qui les rend capables de présenter l’antigène aux lymphocytes T naïfs exprimant un récepteur spécifique pour l’antigène. Ces lymphocytes T activés prolifèrent et se différencient alors en lymphocytes «mémoires» circulants.
* Cette première phase, cliniquement asymptomatique, dure de quelques jours à plusieurs années.
* L’exposition à des irritants qui altèrent la fonction barrière de la peau (eau, occlusion sous les gants, détergents, solvants…) facilite la pénétration des allergènes et le développement
de la réaction allergique.B. Phase de révélation * Elle survient chez un sujet sensibilisé, 24 à 48 heures après un nouveau contact avec le même allergène.
252
* Les lymphocytes T mémoires spécifiques reconnaissent l’allergène présenté par les cellules de Langerhans. Les lymphocytes T effecteurs prolifèrent et sécrètent des cytokines pro inflammatoires (IL-2, IL-17, TNFjJ, interféron y) qui recrutent des cellules mononucléées responsables de la réaction clinique et histologique (spongiose et exocytose épidermiques) d’eczéma. Les kératinocytes produisent aussi des cytokines inflammatoires qui vont majo
rer les lésions cliniques et histologiques (IL-1, IL-6, GM-CSF et TNFp).
II. Diagnostic A. Diagnostic positif
1. Forme typique : eczéma aigu O Les lésions, très prurigineuses, évoluent en quatre phases, souvent intriquées : * phase érythémateuse : placard érythémateux, oedémateux, à contours émiettés; * phase vésiculeuse : vésicules remplies de liquide clair (fig. 13.19), confluant parfois en bulles (fig. 13.20);
* phase suintante : rupture des vésicules, spontanément ou après grattage (hg. 13.21);
* phase croûteuse ou desquamative (fig. 13.22) suivie d’une guérison sans cicatrice.
- Formes cliniques Formes topographiques
* Aspect oedémateux sur le visage, en particulier sur les paupières, les extrémités des membres, les organes génitaux.
* Sur les paumes et les plantes, vésicules dures, enchâssées, dues à l’épaisseur de la couche cornée (dysidrose).
* Eczéma des zones photo-exposées évoquant un mécanisme de photosensibilisation
(fig. 13 23).
Formes chroniques * Eczéma lichénifié : le grattage entraîne un épaississement de la peau qui devient quadril lée et pigmentée (fig. 13.24);
* Eczéma chronique des paumes et des plantes : lésions fréquemment hyperkératosiques et
fissuraires (kératodermie palmo-plantaire; fig. 13.25).
- Examen histologique □ La biopsie cutanée n’est réalisée qu’en cas de doute diagnostique (fig 13.26). Elle montre : * une spongiose (oedème dissociant les kératinocytes et aboutissant à la formation de vési cules intra-épidermiques);
* une exocytose (infiltrat de cellules mononucléées entre les kératinocytes);
* un oedème dermique et un infiltrat riche en lymphocytes à prédominance périvasculaire.
B. Diagnostic différentiel 1. Dermatite irritative
□ Très fréquente sur les mains, elle est secondaire à des agressions physiques ou chimiques directes, n’impliquant pas de mécanismes immunologiques. Les principaux éléments de diagnostic différentiel entre eczéma de contact et dermatite irrita tive sont donnés dans le tableau 13.2. Une dermatite d’irritation peut se compliquer d’un eczéma de contact en altérant la fonction
barrière de la peau, ceci favorisant la pénétration d’allergènes.
Dermatite d’irritation Atteint la majorité des sujets en contact avec le produit
Rapide (minutes ou heures après l’exposition)
Bords nets
Limitée à la zone de contact, touche le plus souvent le dos des mains
Brûlure
Négatifs ou lésion d’irritation Éléments de diagnostic différentiel entre eczéma de contact et dermatite d’irritation
Eczéma de contact Épidémiologie Délai d’apparition
Lésions cutanées Topographie
Symptomatologie
Tests épicutanés
Eczema de contact attentif qlq sujets ts en contact avec le produit Sensibilisation préalable puis 24-48 heures après une nouvelle exposition à l’allergène
Bords émiettés
Déborde de la zone de contact avec l’allergène Possibilité de lésions à distance
Prurit
Positifs (lésion d’ec
- Dermatite (ou eczéma) atopique * Chez l’adulte : un eczéma de contact généralisé peut être difficile à distinguer d’une dermatite atopique.
* Chez l’enfant et l’adulte : l’association eczéma de contact et dermatite atopique est possible, évoquée en cas de résistance au traitement local bien conduit ou quand la topo graphie de la dermatite atopique est inhabituelle. Les altérations de la barrière cutanée caractéristiques de la dermatite atopique favorisent la pénétration d’allergènes, en particu
lier au niveau des mains.
III. Diagnostic étiologique O La recherche de l’allergène responsable est indispensable. Elle repose sur : * l’interrogatoire+++; * l’examen clinique; *
les tests épicutanés (ou patch tests ou épidermotests) et leur pertinence.