points soulignes le groupe verbal Flashcards
points soulignes : le groupe verbal :
Segment 2 : “It doesn’t need ironing.” (l. 28)
Dans la description, on pouvait s’attendre à ce que les candidats identifient le prédicat doesn’t need ironing, qui s’insère dans la phrase complexe it doesn’t need ironing. Ce prédicat comporte le SV doesn’t need, qui associe l’auxiliaire DO conjugué au présent et porteur d’une négation (l’adverbe NOT sous sa forme contractée) et le verbe lexical need ; le prédicat est également constitué de la forme en -ING ironing, qui est complément d’objet direct de doesn’t need.
La problématique pouvait porter sur la nature et la valeur de la forme en -ING ainsi que son interaction avec le SV qu’elle complète, dont il fallait établir les caractéristiques.
L’analyse pouvait commencer par observer que le sujet implicite de ironing n’est pas coréférentiel avec le sujet syntaxique de doesn’t need ; it, qui réfère à la robe d’Ifemelu, correspond en effet non pas au sujet, mais à l’objet implicite de ironing et au patient du procès dit par cette forme en -ING. Khalifa propose pour l’ensemble la glose suivante : it doesn’t need [( ) IRON IT]16. Nous nous trouvons donc en présence d’un procès attribué, du fait de la coréférence entre le sujet de doesn’t need et l’objet de iron, à son patient17 : le sens de la forme en -ING est donc passif, comme le montre la glose possible par it doesn’t need to be ironed. La formulation à l’étude ne présente cependant aucune des caractéristiques syntaxiques du passif18. De fait, il serait impossible de maintenir une forme en -ING dans cette configuration syntaxique : *it doesn’t need being ironed, alors que l’emploi d’une infinitive en TO ne pose pas de problème, ce qu’il fallait expliquer.
Pour ce faire, on pouvait commencer par mentionner le fait que it doesn’t need ironing et it doesn’t need to be ironed n’ont pas exactement le même sens, même si dans les deux cas, need est un verbe
16 Jean-Charles Khalifa, Syntaxe de l’anglais. Théories et pratique de l’énoncé complexe, Gap / Paris : Ophrys, 2004, p. 100.
17 Khalifa (2004 : 102-103) évoque la possibilité de considérer, en première approche, que ce type d’énoncé correspond à un « cas particulier de “montée du sujet” », selon un mécanisme qui verrait la position sujet du verbe need initialement vide puis instanciée par l’objet du verbe iron.
18 C’est la raison pour laquelle Huddleston & Pullum appellent ce type de construction « concealed passive » (2002 : 1199).
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lexical (c’est DO qui porte la négation, c’est donc lui qui est auxiliaire au sein du syntagme verbal) qui exprime un écart entre un état souhaitable et l’état effectif dans lequel se trouve la robe. Il dénote donc un état, et le référent de son sujet est donc expérient, siège de l’état need. Ensuite, on pouvait relever que dans it doesn’t need ironing, c’est l’énonciatrice qui est à l’origine du constat d’écart (ou plus exactement ici, du fait de la négation, de l’absence d’écart) entre l’état effectif de la robe et un état souhaitable, alors que dans it doesn’t need to be ironed, cet écart est présenté comme émanant du référent du sujet. Pour rendre cette différence plus claire, on pouvait opérer une manipulation avec want, qui peut, dans certaines variétés d’anglais, remplacer need. Want est en effet compatible avec une forme en -ING (it wants ironing), mais son emploi est beaucoup plus difficile avec une infinitive en TO (??it wants to be ironed19), parce que l’énoncé met alors en relation un verbe qui est perçu comme exprimant la volonté, caractéristique des animés, avec un référent qui, étant inanimé, en est nécessairement dépourvu20. À l’inverse, dans it wants ironing, want ne dit pas la volonté ; il a ici ce que Khalifa décrit comme son premier sens, à savoir celui de « manque, d’incomplétude » (2004 : 103). La formulation est acceptable parce qu’elle n’attribue pas au référent de it une volonté, mais constitue simplement le constat d’un manque à son propos. On peut expliquer cette différence de sens en s’intéressant aux valeurs respectives de -ING et de TO.
-ING est anaphorique et présente le procès comme un préconstruit acquis, ce qui s’explique ici par le fait que le procès a déjà été envisagé et explicitement mentionné, par la coénonciatrice, dans l’interrogative Did you iron that dress? (l. 27). La question porte sur l’actualisation, ou non, du procès : l’enjeu est de savoir s’il a eu lieu, c’est-à-dire si l’on peut envisager son ancrage dans une situation spécifique. Avec -ING, l’énonciatrice reprend cette première mention et la nominalise. -ING synthétise le sujet et la conjugaison : de you, on passe à un sujet implicite qui pourrait théoriquement être toute personne sachant manier un fer à repasser ; du repérage par rapport à un point de référence extérieur dit par le temps, on passe à un repère internalisé qui permet à la forme en -ING de s’abstraire de l’ancrage dans une temporalité spécifique. Ainsi, -ING éloigne de la référence à une occurrence spécifique, repérée par rapport à un agent identifié et par un ancrage temporel, pour mettre en avant la qualité du procès21.
Cet éloignement du pôle verbal est à mettre en relation avec la nature de la forme, pour laquelle on peut hésiter entre les étiquettes de gérondif et de nom verbal ; en l’absence de modification, il est difficile de trancher, mais la possibilité de l’ajout de quantifieurs ou d’adjectifs rapproche fortement la forme du pôle nominal : it needs no ironing / it needs some ironing / it doesn’t need vigourous ironing22.
La nominalisation telle qu’elle est opérée par -ING explique donc que le jugement dit par doesn’t need n’est pas vu comme émanant du référent du sujet, mais bien de l’énonciatrice : le procès est préconstruit, et ses qualités constituent une valeur qui conduit (ou non) à un constat d’écart entre l’existant et le souhaitable.
19 Huddleston & Pullum observent qu’un énoncé tel que These books want to be taken back to the library, bien que grammatical et relevant d’un sens similaire à celui de These books want taking back to the library, n’est cependant pas d’apparition aussi probable que le second à cause de la confusion possible avec le sens premier de « desire » exprimé par want (2002 : 1200). 20 Pour plus de détails sur cette question, on pourra consulter Alain Deschamps, “It needs explaining : étude de la non-coréférence avec les verbes à complément à forme non finie sans sujet”, in L. Danon-Boileau & J.-L. Duchet (éds.), Opérations interprétatives et interprétation de l’énoncé. Mélanges offerts à Jeanine Bouscaren, Paris : Ophrys, 1993, p. 155-170.
21 Pour Deschamps, la relation préconstruite est présentée « comme étant la bonne valeur (norme ou valeur souhaitable […]) » (1993 : 163). 22 Huddleston & Pullum relèvent à ce propos une ambiguïté entre « a concealed passive gerund-participial and a gerundial noun » (2002 : 1200). - 61 -
La situation est différente avec TO, qui est un marqueur de visée et indique que l’énonciatrice se place mentalement en amont de l’actualisation du procès. Contrairement à ce qui se passe avec -ING, le sujet de l’infinitive est coréférentiel avec celui du verbe conjugué (car l’infinitif est passif), de sorte que la présentation de l’événement est moins éloignée de la représentation d’une occurrence qu’avec -ING : l’enjeu avec TO reste bien l’actualisation du procès23, et, le sujet du verbe need étant mis en relation avec le procès visé du fait de sa coréférence avec le sujet implicite de l’infinitif, cette actualisation envisagée est présentée comme devant découler d’une qualité du référent du sujet, sans que le jugement de l’énonciatrice intervienne de façon déterminante24.
Dans le contexte, on observe une relation conflictuelle entre l’énonciatrice et sa mère, qui lui intime d’aller repasser sa robe : did you iron that dress? (l. 27) a une valeur de reproche, et peut-être d’ordre, qui est rendue explicite par it is rumpled et iron it (l. 29). La réponse d’Ifemelu constitue une réfutation du jugement porté par sa mère sur l’état de sa robe, réfutation d’ailleurs répétée : this dress is not rumpled (l. 30). C’est finalement la mère d’Ifemelu qui a le dernier mot : go and iron it (l. 31). Dans ce contexte, l’emploi de -ING s’explique : l’état effectif de la robe fait l’objet d’un conflit de jugements énonciatifs, et ce sont donc ces jugements qui sont mis au premier plan.
On pouvait finalement analyser la négation portée par l’auxiliaire DO à la lumière de ce contexte. La négation est une opération seconde, qui vient ici rejeter un positif préconstruit par inférence à partir de l’interrogative did you iron that dress?, qui signifie implicitement that dress is rumpled and you should iron it, autrement dit, that dress needs ironing. Avec la négation, l’énonciatrice rejette la validation de cette relation prédicative, ce qui est congruent avec la valeur de -ING : ici, l’enjeu est le conflit de jugements, et la négation permet à l’énonciatrice de rejeter le jugement posé par sa mère.
Remarques sur le traitement du segment 2
De façon similaire au segment 1, le segment 2 a parfois donné lieu à des analyses centrées sur une partie du segment seulement : certains candidats ont proposé de longs développements sur DO ou sur need, souvent suivis de quelques lignes consacrées à la nature de la forme en -ING, sans jamais prendre en considération le fonctionnement du segment dans son ensemble. La plupart des candidats ont tenté de substituer une infinitive en TO à la forme en -ING, mais cette manipulation n’a pas toujours été exploitée ; il ne suffit pas de dire que la substitution est possible, il faut aussi essayer d’expliquer les modifications syntaxiques, sémantiques et pragmatiques qu’elle induit. La valeur de la forme en -ING a parfois été assimilée à celle de la périphrase BE + -ING, ce qui a pu donner lieu à de longs développements hors sujet sur l’aspect BE + -ING. L’insertion du segment en contexte a parfois été complètement négligée ; à l’inverse, certaines démonstrations ont présenté de longues paraphrases du texte, sans analyse proprement linguistique.
points soulignes : le groupe verbal :
Segment 2 : “It doesn’t need ironing.” (l. 28)
Dans la description, on pouvait s’attendre à ce que les candidats identifient le prédicat doesn’t need ironing, qui s’insère dans la phrase complexe it doesn’t need ironing. Ce prédicat comporte le SV doesn’t need, qui associe l’auxiliaire DO conjugué au présent et porteur d’une négation (l’adverbe NOT sous sa forme contractée) et le verbe lexical need ; le prédicat est également constitué de la forme en -ING ironing, qui est complément d’objet direct de doesn’t need.
La problématique pouvait porter sur la nature et la valeur de la forme en -ING ainsi que son interaction avec le SV qu’elle complète, dont il fallait établir les caractéristiques.
L’analyse pouvait commencer par observer que le sujet implicite de ironing n’est pas coréférentiel avec le sujet syntaxique de doesn’t need ; it, qui réfère à la robe d’Ifemelu, correspond en effet non pas au sujet, mais à l’objet implicite de ironing et au patient du procès dit par cette forme en -ING. Khalifa propose pour l’ensemble la glose suivante : it doesn’t need [( ) IRON IT]16. Nous nous trouvons donc en présence d’un procès attribué, du fait de la coréférence entre le sujet de doesn’t need et l’objet de iron, à son patient17 : le sens de la forme en -ING est donc passif, comme le montre la glose possible par it doesn’t need to be ironed. La formulation à l’étude ne présente cependant aucune des caractéristiques syntaxiques du passif18. De fait, il serait impossible de maintenir une forme en -ING dans cette configuration syntaxique : *it doesn’t need being ironed, alors que l’emploi d’une infinitive en TO ne pose pas de problème, ce qu’il fallait expliquer.
Pour ce faire, on pouvait commencer par mentionner le fait que it doesn’t need ironing et it doesn’t need to be ironed n’ont pas exactement le même sens, même si dans les deux cas, need est un verbe
16 Jean-Charles Khalifa, Syntaxe de l’anglais. Théories et pratique de l’énoncé complexe, Gap / Paris : Ophrys, 2004, p. 100.
17 Khalifa (2004 : 102-103) évoque la possibilité de considérer, en première approche, que ce type d’énoncé correspond à un « cas particulier de “montée du sujet” », selon un mécanisme qui verrait la position sujet du verbe need initialement vide puis instanciée par l’objet du verbe iron.
18 C’est la raison pour laquelle Huddleston & Pullum appellent ce type de construction « concealed passive » (2002 : 1199).
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lexical (c’est DO qui porte la négation, c’est donc lui qui est auxiliaire au sein du syntagme verbal) qui exprime un écart entre un état souhaitable et l’état effectif dans lequel se trouve la robe. Il dénote donc un état, et le référent de son sujet est donc expérient, siège de l’état need. Ensuite, on pouvait relever que dans it doesn’t need ironing, c’est l’énonciatrice qui est à l’origine du constat d’écart (ou plus exactement ici, du fait de la négation, de l’absence d’écart) entre l’état effectif de la robe et un état souhaitable, alors que dans it doesn’t need to be ironed, cet écart est présenté comme émanant du référent du sujet. Pour rendre cette différence plus claire, on pouvait opérer une manipulation avec want, qui peut, dans certaines variétés d’anglais, remplacer need. Want est en effet compatible avec une forme en -ING (it wants ironing), mais son emploi est beaucoup plus difficile avec une infinitive en TO (??it wants to be ironed19), parce que l’énoncé met alors en relation un verbe qui est perçu comme exprimant la volonté, caractéristique des animés, avec un référent qui, étant inanimé, en est nécessairement dépourvu20. À l’inverse, dans it wants ironing, want ne dit pas la volonté ; il a ici ce que Khalifa décrit comme son premier sens, à savoir celui de « manque, d’incomplétude » (2004 : 103). La formulation est acceptable parce qu’elle n’attribue pas au référent de it une volonté, mais constitue simplement le constat d’un manque à son propos. On peut expliquer cette différence de sens en s’intéressant aux valeurs respectives de -ING et de TO.
-ING est anaphorique et présente le procès comme un préconstruit acquis, ce qui s’explique ici par le fait que le procès a déjà été envisagé et explicitement mentionné, par la coénonciatrice, dans l’interrogative Did you iron that dress? (l. 27). La question porte sur l’actualisation, ou non, du procès : l’enjeu est de savoir s’il a eu lieu, c’est-à-dire si l’on peut envisager son ancrage dans une situation spécifique. Avec -ING, l’énonciatrice reprend cette première mention et la nominalise. -ING synthétise le sujet et la conjugaison : de you, on passe à un sujet implicite qui pourrait théoriquement être toute personne sachant manier un fer à repasser ; du repérage par rapport à un point de référence extérieur dit par le temps, on passe à un repère internalisé qui permet à la forme en -ING de s’abstraire de l’ancrage dans une temporalité spécifique. Ainsi, -ING éloigne de la référence à une occurrence spécifique, repérée par rapport à un agent identifié et par un ancrage temporel, pour mettre en avant la qualité du procès21.
Cet éloignement du pôle verbal est à mettre en relation avec la nature de la forme, pour laquelle on peut hésiter entre les étiquettes de gérondif et de nom verbal ; en l’absence de modification, il est difficile de trancher, mais la possibilité de l’ajout de quantifieurs ou d’adjectifs rapproche fortement la forme du pôle nominal : it needs no ironing / it needs some ironing / it doesn’t need vigourous ironing22.
La nominalisation telle qu’elle est opérée par -ING explique donc que le jugement dit par doesn’t need n’est pas vu comme émanant du référent du sujet, mais bien de l’énonciatrice : le procès est préconstruit, et ses qualités constituent une valeur qui conduit (ou non) à un constat d’écart entre l’existant et le souhaitable.
19 Huddleston & Pullum observent qu’un énoncé tel que These books want to be taken back to the library, bien que grammatical et relevant d’un sens similaire à celui de These books want taking back to the library, n’est cependant pas d’apparition aussi probable que le second à cause de la confusion possible avec le sens premier de « desire » exprimé par want (2002 : 1200). 20 Pour plus de détails sur cette question, on pourra consulter Alain Deschamps, “It needs explaining : étude de la non-coréférence avec les verbes à complément à forme non finie sans sujet”, in L. Danon-Boileau & J.-L. Duchet (éds.), Opérations interprétatives et interprétation de l’énoncé. Mélanges offerts à Jeanine Bouscaren, Paris : Ophrys, 1993, p. 155-170.
21 Pour Deschamps, la relation préconstruite est présentée « comme étant la bonne valeur (norme ou valeur souhaitable […]) » (1993 : 163). 22 Huddleston & Pullum relèvent à ce propos une ambiguïté entre « a concealed passive gerund-participial and a gerundial noun » (2002 : 1200). - 61 -
La situation est différente avec TO, qui est un marqueur de visée et indique que l’énonciatrice se place mentalement en amont de l’actualisation du procès. Contrairement à ce qui se passe avec -ING, le sujet de l’infinitive est coréférentiel avec celui du verbe conjugué (car l’infinitif est passif), de sorte que la présentation de l’événement est moins éloignée de la représentation d’une occurrence qu’avec -ING : l’enjeu avec TO reste bien l’actualisation du procès23, et, le sujet du verbe need étant mis en relation avec le procès visé du fait de sa coréférence avec le sujet implicite de l’infinitif, cette actualisation envisagée est présentée comme devant découler d’une qualité du référent du sujet, sans que le jugement de l’énonciatrice intervienne de façon déterminante24.
Dans le contexte, on observe une relation conflictuelle entre l’énonciatrice et sa mère, qui lui intime d’aller repasser sa robe : did you iron that dress? (l. 27) a une valeur de reproche, et peut-être d’ordre, qui est rendue explicite par it is rumpled et iron it (l. 29). La réponse d’Ifemelu constitue une réfutation du jugement porté par sa mère sur l’état de sa robe, réfutation d’ailleurs répétée : this dress is not rumpled (l. 30). C’est finalement la mère d’Ifemelu qui a le dernier mot : go and iron it (l. 31). Dans ce contexte, l’emploi de -ING s’explique : l’état effectif de la robe fait l’objet d’un conflit de jugements énonciatifs, et ce sont donc ces jugements qui sont mis au premier plan.
On pouvait finalement analyser la négation portée par l’auxiliaire DO à la lumière de ce contexte. La négation est une opération seconde, qui vient ici rejeter un positif préconstruit par inférence à partir de l’interrogative did you iron that dress?, qui signifie implicitement that dress is rumpled and you should iron it, autrement dit, that dress needs ironing. Avec la négation, l’énonciatrice rejette la validation de cette relation prédicative, ce qui est congruent avec la valeur de -ING : ici, l’enjeu est le conflit de jugements, et la négation permet à l’énonciatrice de rejeter le jugement posé par sa mère.
Remarques sur le traitement du segment 2
De façon similaire au segment 1, le segment 2 a parfois donné lieu à des analyses centrées sur une partie du segment seulement : certains candidats ont proposé de longs développements sur DO ou sur need, souvent suivis de quelques lignes consacrées à la nature de la forme en -ING, sans jamais prendre en considération le fonctionnement du segment dans son ensemble. La plupart des candidats ont tenté de substituer une infinitive en TO à la forme en -ING, mais cette manipulation n’a pas toujours été exploitée ; il ne suffit pas de dire que la substitution est possible, il faut aussi essayer d’expliquer les modifications syntaxiques, sémantiques et pragmatiques qu’elle induit. La valeur de la forme en -ING a parfois été assimilée à celle de la périphrase BE + -ING, ce qui a pu donner lieu à de longs développements hors sujet sur l’aspect BE + -ING. L’insertion du segment en contexte a parfois été complètement négligée ; à l’inverse, certaines démonstrations ont présenté de longues paraphrases du texte, sans analyse proprement linguistique.
It is a losing situation : analyse l’infinitif
Segment 1 : […] hot in the sun, cold in the shade, bright as they climbed, and dark as they had sat in the small deserted café-bar, […] (ll. 8-9) Description Le segment est le SV had sat, soit le verbe sit à la forme HAD -EN, communément appelée past perfect ou pluperfect, affecté au pronom personnel sujet de 3e personne pluriel they, et suivi du syntagme prépositionnel in the small deserted café-bar, à fonction circonstant de lieu du verbe. Had sat se compose de l’auxiliaire HAVE au prétérit et du participe passé (forme non finie) du verbe lexical sit, de forme irrégulière, sat. La forme encode à la fois un temps, le prétérit, et l’aspect HAVE + -EN. L’ensemble fait partie d’une subordonnée introduite par la conjonction as, reliée à la relation prédicative < [It / be] dark > qui s’inscrit dans la continuité de la partie précédente de l’énoncé, the weather was [both hot and cold, bright and] dark. La phrase comporte une autre proposition en as, as they climbed, dans laquelle le verbe est cette fois-ci au prétérit simple, et non en HAD -EN. Problématique Il s’agira de s’interroger sur le choix de HAD -EN, qui ne semble pas s’imposer : as they climbed, dans une structure mise en parallèle avec la proposition dans laquelle se trouve le segment étudié, est en effet pour sa part au prétérit simple. Pourquoi n’y-t-il pas un prétérit (V-ED) dans ce second groupe verbal ? Quelle est la valeur en contexte de HAD -EN ?
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Par ailleurs, HAD -EN est une forme passée (-ED) et aspectuelle (HAVE + -EN). On pourra s’interroger sur les valeurs d’antériorité et/ou d’accompli, ainsi éventuellement que sur le rôle de HAVE. La chronologie du texte doit par ailleurs être prise en compte de manière fine pour expliciter ce qui est construit dans le passage.
Analyse
Valeur du prétérit (-ED dans HAD -EN)
Le past perfect est formé d’un temps, le prétérit, et d’un aspect, HAVE + -EN. -EN, opérateur du participe passé, est porté morphologiquement par sit, mais c’est l’ensemble du prédicat sit in the small deserted café-bar qui est marqué comme accompli à un moment de référence, que have permet de situer. Have, au prétérit, est ici l’indice d’une rupture temporelle ; le moment de référence est le moment où a lieu l’épisode décrit, c’est-à-dire la promenade en montagne des deux protagonistes ; l’énoncé étant situé dans le cadre d’une narration au passé, une forme au present perfect est inacceptable. La question est de savoir précisément par rapport à quel procès sit in the small deserted café-bar est accompli et pourquoi il est présenté ainsi.
Chronologie des procès
Deux autres énoncés du texte contribuent à situer le procès dont il est question :
(1) They were seated outside a small restaurant under a vine-covered trellis, a bottle of yellow
wine on the table between them (ll. 3-4)
(2) Now they sat after lunch, becalmed, the only two people contemplating these few square
metres of flat cobbled ground […] (ll. 13-14)
Ces énoncés ont pour point commun le sujet they, aux référents identiques, et il s’agit de décrire une position assise dans les deux cas. La première prédication de < they / be seated > au prétérit sert de point de repère (ou moment de référence) pour les autres procès, alors que dans l’énoncé (2), l’adverbe now, indexant la situation décrite comme nouveau repère du récit, de son côté replace le curseur sur le repère établi en (1). Le passage de la ligne 9 (bright as they climbed) à la ligne 13 retrace pour sa part le chemin parcouru par les deux protagonistes pour arriver à la terrasse de ce restaurant. On peut donc reconstituer la chronologie des événements de la façon suivante :
They began climbing (implicite)
They stopped in order to rest (l. 9)
They sat in the small deserted café-bar, resting (ll. 9-10)
Mr Neville asked if they could walk a little more (l. 10)
They set off again, they passed terraced orchards (ll. 10-13)
They reached the top (l. 11)
A waiter seated them outside a small restaurant (l. 12)
They had lunch (l. 12)
Now they sat after lunch, becalmed (ll. 13-16)
L’activité de climbing se fait donc par étapes, s’interrompant par moments. Climbed (l. 9) dénote une activité qui ne prend fin que lorsqu’elle atteint un terme : ici, they reached the top (l. 11). Elle reste valable jusqu’à l’arrivée au restaurant, point terminal de l’ascension. Cela justifie le fait que climbed soit au prétérit, et non au past perfect : l’activité n’a pas atteint son terme au moment où les protagonistes s’assoient dans le café désert. En revanche, les procès situés entre le début de
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l’ascension et le terme de celle-ci sont, quant à eux, marqués par un past perfect : had sat, had asked, had set off, had passed. Le procès /sit in the small deserted café-bar/ est donc antérieur à la situation « actuelle » (now, l. 13) des personnages – le moment où ils sont installés à la terrasse d’un restaurant après leur déjeuner – qui appartient au révolu (T-1).
Antériorité et/ou accompli : temps/aspect (rôle de HAVE)
On peut donc avoir une approche avant tout temporelle du rôle de HAD -EN, en considérant qu’il s’agit d’une translation d’un prétérit, d’un moment qui est construit comme antérieur à un repère lui- même passé. La valeur d’antériorité par rapport à un repère, ici principalement le moment auquel fait référence now they sat after lunch (l. 13), prime. L’action de climbed n’ayant pas atteint son terme au moment où ils s’assoient dans le café désert, il n’est pas agrammatical, mais bien incohérent de dire ?as they had climbed, qui supposerait l’ascension finie au moment où le procès had sat commence.
En revanche, l’action de had sat a atteint son terme au moment où ils sont assis à la terrasse du restaurant. La mention d’une action terminée au moment où une autre commence ouvre alors la piste d’une approche davantage aspectuelle de cette forme. La valeur aspectuelle d’accompli joue alors un rôle central : on peut dire de HAVE dans HAVE + -EN qu’il porte le procès au compte du sujet, que le procès accompli est rapporté au crédit du sujet they.
Had sat vs. sat
Il est à noter par ailleurs que sit dénote bien ici un procès statif : to be in a certain position. De ce fait, il véhicule l’idée d’une certaine durée implicite. L’hypothèse d’un sens statif plutôt que ponctuel est confortée par le co-texte droit : l’adverbiale until Mr Neville had asked suggère que le procès sit a une certaine durée interne. As a ici son sens temporel, et, avec had sat, prend un sens duratif plutôt que ponctuel (« pendant / alors que »).
Si sit était mis au prétérit, comme climb, la succession des deux verbes dans le linéaire pourrait alors indiquer une succession d’actions. Il est cependant à noter que le verbe ne se situe pas dans une succession de propositions juxtaposées ou coordonnées au prétérit, mais bien dans une suite de propositions en as (hot in the sun, cold in the shade, bright as they climbed, and dark as they sat in the small deserted café-bar…), la proposition en as donnant un cadre à < it / be bright ou dark >. Cependant, une succession d’événements serait bien établie, et une interprétation ponctuelle de sat pourrait alors par ailleurs être privilégiée (plus proche, alors, de as they sat down) ; or, dans le texte, sit constitue une étape du procès global défini par climbed, un procès global amorcé avant la pause et repris ensuite.
Remarques sur le traitement du segment 1
Un problème régulièrement observé est le fait que les candidats ont immédiatement associé à la forme une valeur d’antériorité, sans chercher en quoi celle-ci découle de l’interaction des marqueurs, et sans que les co-textes gauche et droite ne soient cités. Des contresens ont été relevés lors de l’application de cette valeur, notamment le fait que had sat marquerait une antériorité par rapport au procès désigné par climbed, ou que le verbe sit désignerait un procès dynamique, alors qu’il prend ici une valeur statique et/ou durative. Par ailleurs, le jury a été surpris de voir que quelques copies ont transformé, lors de l’analyse, sat en sat down, voire en seated. La valeur aspectuelle n’a pas toujours été mentionnée ou testée par des manipulations, et lorsqu’elle l’était, rares sont ceux qui ont expliqué que c’est bien la combinaison de HAVE et du participe passé qui active cette valeur.
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–I don’t know if I’m going to go to college (48-49)/Maybe I’ll go to college, maybe I won’t (52)
Il s’agira de s’interroger sur la manière dont les deux formes soulignées modifient les RP sur lesquelles elles portent et de justifier en contexte les choix respectifs de l’une et de l’autre. Sont-elles interchangeables ?
Avec BE GOING TO l’énonciateur envisage le sujet comme engagé dans un mouvement vers la validation du prédicat qui suit. Si on décompose pas à pas les différents constituants en les rapportant à l’analyse de notre fait de langue, on peut dire qu’au moyen de cette forme l’énonciateur identifie/représente/envisage (cf. BE) le sujet (I) comme engagé (cf. –ING valeur d’inaccompli/de borne de gauche franchie) dans un mouvement (cf. sémantisme de GO) vers (cf. TO opérateur dévirtualisant/de visée) la validation du prédicat qui suit (go to college). En outre, de par sa forme (contrainte) à l’aspect BE-ING, BE GOING TO permet à l’énonciateur de faire un commentaire sur ce qui précède.
Avec WILL, il ne s’agit plus d’évoquer un processus engagé. WILL peut signifier la volonté du sujet de valider la relation prédicative dans laquelle il s’inscrit, et on parle alors de valeur radicale du
modal. Mais WILL peut également être utilisé pour prédire la validation de la relation prédicative en question, c’est-à-dire pour poser la validation comme certaine pour un repère temporel postérieur au moment de l’énonciation ; c’est la valeur épistémique du modal.
, l’emploi de l’adverbe MAYBE portant sur l’intégralité de la RP aboutit ainsi à une réduction à une alternative simple, l’autre branche de l’alternative, la non- validation, étant posée immédiatement après : maybe I won’t. Un emploi radical de WILL impliquerait la disparition de MAYBE, la suppression de la seconde partie de la proposition et une forme pleine pour le modal, à la forme négative : I will not go to college, mais alors le conflit avec le père serait ouvert, ce qui n’est pas le cas dans notre passage.
Substituer WILL à BE GOING TO dans la première occurrence soulignée (I dont know if I will go to college) aurait permis d’évoquer la validation de < I/go to college > sans l’aspect de processus engagé ;
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1B. … PREPARING OUR LITTLE HOME FOR US. (10)
Ce segment, qui posait un problème sur la phrase complexe, a été moins souvent identifié correctement que le précédent. Beaucoup de candidats l’ont qualifié de gérondif, en oubliant qu’un gérondif, ou plutôt, une proposition gérondive, occupe la place d’un syntagme nominal, manipulation impossible dans cet énoncé (* you have been working your fingers to the bone the preparation of our little home for us). La comparaison avec to prepare our little home for us n’était pas vraiment éclairante, surtout lorsqu’on affirmait que ce nouveau segment indiquait le but en raison de for us. Il est dommage que les candidats qui ont compris qu’il s’agissait d’un participe présent aient souvent omis de dire qu’il figurait dans une proposition subordonnée participiale en fonction de complément circonstanciel (de prime abord, circonstanciel de temps) du verbe work.
Il fallait souligner l’absence de marques de temps et de personne sur le verbe, trait caractéristique d’une forme non conjuguée (ou non finie), sans oublier le caractère verbal du participe présent, dont l’objet (our little home) est ici introduit directement après le verbe, comme pour un gérondif. On devait se poser la question du sujet de cette proposition : il s’agit bien évidemment d’un you (= Joseph) effacé (ou occulté) par coréférence avec le sujet de la proposition principale, et non pas en raison d’une référence générale connue de tous (c’est-à-dire, un PRO arbitraire).
Cette occultation du sujet force la proposition à se lier à un autre constituant syntaxique (on parlera d’enchâssement ou d’intégration syntaxique) : normalement, une proposition sans sujet ne peut pas constituer une phrase. Il s’agit donc d’une proposition subordonnée, et l’on pouvait comparer subordination et coordination (you have been preparing our little home for us and (you have been) working your fingers to the bone), en faisant remarquer que cet ordre inversé semble plus naturel. En optant ici pour la subordination, l’énonciateur se contente de rattacher directement une proposition non- finie à une proposition finie sans expliciter le lien de dépendance entre ces deux propositions.
Peu de candidats ont indiqué que ces deux procès devaient se comprendre comme coextensifs, leurs cadres se superposant. Rares sont ceux qui ont pensé à une valeur causale, pourtant présente dans la conjonction de subordination as, qui peut combiner concomitance et consécution : you have been working your fingers to the bone as you prepared our little home for us.
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she has never wished she were anyone other than herself (l.34)
Description
Dans une proposition au présent perfect (has wished), le segment ! she were anyone other than herself, subordonnée nominale à forme finie du verbe, occupe la position de COD du verbe wish (on a ici, comme plus haut, un grand degré d’intégration ! !).
Problématique
La question qui se pose est double :
- pourquoi le verbe be est-il au prétérit alors qu’il dépend d’une structure verbale au présent (present
perfect) ?
- pourquoi n’avons-nous pas was, la forme habituelle du prétérit pour la 3ème personne du singulier ?
Analyse
Le prétérit : il n’a ici aucune valeur temporelle. Le segment dont il est extrait est au présent (She has the gift of accepting her life; as he comes to know her, he realizes that she has never wished she were anyone other than herself, raised in any other place, in any other way), il ne peut donc pas s’agir d’un renvoi au révolu, la proposition dans laquelle se trouve were étant sous la dépendance de ce présent.
Le verbe wish s’il connote l’expression d’un souhait ne peut devenir déclaratif que lorsqu’il est performatif, c’est-à-dire doté d’un sujet grammatical I et conjugué au présent. Dans ce cas, l’énonciation du vœu équivaut à un dire et à un faire. Ce n’est pas ici le cas et le prétérit ne peut être interprété comme marque de style indirect (prétérit de translation). La valeur du prétérit en contexte ne peut être que modale (déréalisante) : la relation she / be anyone other than herself n’a jamais été actualisée/validée/réalisée. On a ici une valeur d’irréel.
Were “ was: la possibilité existerait-elle d’avoir : she has never wished she was anyone other than herself ? A première vue, il semble difficile d’envisager cette hypothèse dans la mesure où le sémantisme de be exclut la possibilité d’identifier un sujet grammatical avec qui que ce soit d’autre que lui-même. C’est d’ailleurs semble-t- il pour cette raison que be est le seul verbe à posséder une forme spécifique de construction du déréalisant. Toutes les autres éventualités de mise en relation d’un sujet et d’un prédicat, si irréelles puissent-elles paraître, peuvent toujours être validées. Seul le « changement d’être » est absolument impossible.
Il s’agit ici justement de montrer que la possibilité de validation de la relation entre le prédicat et le sujet est encore plus éloignée : avec were une frontière supplémentaire est franchie (were est un ancien subjonctif). Cependant, comme l’ont fait remarquer bon nombre de candidats, les énoncés de type wish-was sont légion en anglais contemporain (You can only imagine the quiet gratification. Buckner has probably known too many hours in which he might have wished he was anyone but him. http://pologrounds.crimsonzine.com/20020802- 1214.html), etc.
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b/ It was the immediacy, the being out of time Points plus particulièrement attendus par le jury:
• identification du segment
• nature : nominale. the N/the fact that
• fonctionnement : BE verbe d’état/statut de out of time
• degré de nominalisation. Comparaison avec Ø being out of time
• Etiquetage : discussion nom verbal ? gérondif ?
• détermination: the
• Lien avec autre sujet the immediacy
• prise en compte de la clivée (focalisation)
Une bonification supplémentaire a été accordée lorsque des comparaisons ont été faites avec d’autres formes V-ING du texte et le type de procès (compact) a été commenté.
Pistes de réflexion
1) Description
Le segment souligné est composé des éléments suivants :
déterminant the + V-ING (BE verbe d’état) + préposition complexe OUT OF + N (time)
Ce segment apparaît dans une phrase clivée ; la suite the being out of time est un des deux sujets syntaxiques du verbe principal made. La phrase peut être réécrite de la façon suivante : the immediacy, the being out of time made me understand how worlds were lost to sustain it
2) Problématique : Rôle de –ING, degré de nominalisation : gérondif ou nom verbal ?
3) Analyse
Plusieurs degrés de nominalisation peuvent être distingués avec la construction V-ING, selon une échelle qui va du plus nominal, avec la lexicalisation, la formation d’une unité discrète (railing l. 50) au plus verbal avec le participe présent (I was eating a sandwich l.1), en passant par le nom verbal et le gérondif. Nous allons nous demander si the being out of time correspond à un nom verbal ou un gérondif.
Nous reprendrons pour commencer la distinction faite par Lees21 entre nominalisation d’action, «action nominals», ce qui correspond au nom verbal, et nominalisation factive, «factive nominals », ce qui correspond au gérondif. Dans le cas des « action nominals », nous trouvons des verbes de processus qui renvoient à une activité, une action, comme cela est le cas avec : the averting of eyes (l. 6) ; this silent staring (l. 6) ; The waiting (l. 18); The ending of it (l. 28), mais pas avec being qui est un verbe d’état. Pour les « factive nominals », l’énoncé peut être glosé par « the fact that », glose qui est acceptable pour l’énoncé étudié : « The fact that I was out of time ». Les deux interprétations, gérondif ou non verbal, semblent alors pouvoir être défendues. La présence du déterminant the nous amène toutefois à conclure que la forme étudiée est un nom verbal, ce qui ne serait pas le cas avec being sans déterminant : Ø Being out of time made me understand how worlds were lost to sustain it.
Il n’y a cependant pas de création lexicale, pas de formation d’une unité discrète, mais formation en discours. Le prédicat est compact, ce qui est le cas du premier sujet syntaxique (the immediacy, mot dérivé formé sur la base adjectivale immediate). Il y a fléchage d’une notion par rapport à une autre. On retrouve la valeur de propriété acquise, d’occurrence portée par la forme en –ING et la valeur de la prédication d’existence préalable indispensable avec the, dans un contexte explicatif, de reformulation, de reprise (de la notion de temps) pour effectuer des commentaires. La clivée place les deux prédicats nominalisés en position focale,
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a/ he saw me sitting there.
Le contexte doit être pris en compte : here est jugé possible à la place de there sans tenir compte du contexte particulier. De nombreuses copies oublient d’évoquer le sens des énoncés considérés. Les candidats se privent ainsi d’une partie importante de leurs démonstrations. Par exemple on trouve dans une copie : « ces deux propositions ne se trouvent pas sur le même plan, sinon elles auraient pu être coordonnées (he saw me and I was sitting there) ». Il est dommage que le candidat ne se demande pas quel est le sens de l’imbrication qu’il vient de souligner. Car c’est justement là le point fondamental de la démonstration : le procès sit there est imbriqué sous une forme non-finie et non pas mis en place dans une proposition indépendante. Précisément parce que le sens de la phrase est « quand il entra, il me vit (et il se trouve que j’étais assise), c’est pour ça qu’il s’arrêta soudain ». La valeur causale de la proposition que certains ont décrite comme temporelle (à cause du when, qui peut exprimer la consécution, l’hypothèse, etc. et non la seule temporalité) est liée à la confrontation entre les deux personnages et non à la station assise. C’est ce focus argumentatif qui élimine les solutions verbales comme He saw me sit there (où there serait focalisé, dans un contexte de type, « je n’avais pas le droit d’être assise là, j’ai voulu me lever mais il a vu que je m’étais assise sur son fauteuil ») ou He saw that I was sitting there (idem avec focus sur sit par contraste avec un autre procès : au lieu d’être en train de travailler ; même si there apporte la même valeur focalisant le lieu). Nous n’avons trouvé que peu de copies remarquant que le poids argumentatif portait sur me et non sur sitting. L’imbrication permet au contraire de ne pas focaliser le procès mais d’en faire un circonstant proche d’un statut adjectival. Le passage par le français permettait une glose montrant que « assis » possèderait ici un tel statut adjectival et non verbal (plutôt adjectif que participe passé) : c’était éventuellement l’occasion de remarques contrastives entre sitting/seated vs « assis ». Ces remarques sont de bons sens et ne requièrent pas de savoir préalable particulièrement technique, juste une bonne intuition de la langue.
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Segment 2 : I found it quite offensive and it may well have been the urge to demonstrate…(l.55)
Cette fois nous avons affaire à un groupe verbal, composé de l’auxiliaire de modalité may au temps présent, de l’adverbe de modalité assertive well, et de l’auxiliaire non fini have suivi du participe passé du verbe copule be. Trois problèmes se dégagent assez facilement de cet ensemble et la plupart des candidats les ont correctement identifiés : la valeur de may, sa relation avec well, et l’articulation entre le temps présent du modal et l’aspect ‘parfait’ portant sur le verbe. C’est ensuite dans le traitement de ces questions que des difficultés sont apparues.
Si la grande majorité des candidats a su identifier correctement la valeur dite « épistémique » de l’auxiliaire may en l’associant à une « équi-possibilité » - It may have been the urge to demonstrate… or it may not have been the urge to demonstrate… -
Comme l’a montré il y a plus de 20 ans Antoine Culioli, bien a une valeur concessive : « ils achèvent bien les chevaux » est équivalent à « je vous concède qu’il est néanmoins vrai qu’ils achèvent les chevaux ». Well, comme bien, est présupposant et concessif : il permet de positionner la validation par rapport à un co-texte en amont, vraisemblablement négatif (there is a chance that is was not the urge to demonstrate this that caused me to set off…), en validant la valeur positive du binôme P/P’ (did/did not).
Avec well, l’épistémicité est feinte : l’énonciateur suggère une explication. C
Il y a valeur épistémique du modal en tant que le jugement de l’énonciateur sur le contenu propositionnel résulte d’une inférence. »
C’était non seulement oublier que seul le premier élément d’un syntagme verbal peut être porteur de la marque de temps, mais c’est aussi passer à côté de deux aspects majeurs de l’analyse de ce segment : le rôle de ‘filtre’ de la modalité joué ici par have –en, et la valeur de repérage temporel qu’il apporte au verbe principal.
le marqueur d’aspect (tout comme be –ing d’ailleurs) ‘bloque’ la valeur radicale et ne laisse subsister que l’épistémique. Par ailleurs, il fallait absolument différencier ici la prise de position de l’énonciateur à T0, et l’événement sur lequel elle portait, qui se situe à T-1. Dans ce contexte, trop peu de candidats ont eu l’idée de regarder le contexte gauche, où l’on trouve It occurs to me now that the man might just possibly have meant this in a humorous sort of way ; that is to say, he intended it as a bantering remark. L’étude du contexte permettait d’établir facilement qu’il s’agissait de prendre position au présent sur un fait passé : It was/was not the urge to demonstrate how foolish…that caused me to set off…
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They must have some important personage tonight. Étaient plus particulièrement attendus :
• description linéaire du souligné. Cadre énonciatif (discours direct) ;
• étiquetage ;
• questionnement sur must et have ;
• analyse de have + complémentation ;
• modal : sens, temps ;
• fonctionnement du modal en contexte ;
• accentuation ;
• manipulation avec verbe seul ou must be having ou autre modal.
Pistes de réflexion
Cet énoncé au discours direct est prononcé par Eva et peut être adressé à Arvo — ou n’être qu’une réflexion à haute voix. La proforme (le pronom) they est anaphorique du nom propre Mannerheim, désignant un restaurant et, par métonymie, de son équipe dirigeante et de son personnel.
Le groupe verbal souligné comporte deux éléments : le modal must et le verbe have.
La relation prédicative constitutive de la phrase (dictum [Lapaire et Rotgé, Linguistique et Grammaire de l’anglais, PUM, 1991]) est : < they/ have some important personage tonight >. Cette relation est constituée mais non encore repérée par rapport à une situation dans laquelle elle se verrait validée.
Comme nous venons de le voir, elle pose, en fonction de sujet, la proforme anaphorique personnelle they et en prédicat . Nous étudierons tout d’abord la nature du prédicat avant que d’analyser le modal (modus) must.
Le prédicat est composé du verbe have suivi de sa complémentation directe some important personage. La nature du complément conditionne ici le sens du verbe have. En effet, le GN complément renvoie à un animé humain, qui, à ce titre, ne peut compléter un verbe have dans son sens premier « posséder ». Have n’a pas en contexte de fonction abstraite « opérateur » de localisation et est verbe lexical (possédant toutefois lui aussi les sèmes de la localisation) ; son sémantisme est défini par la nature de sa complémentation. Nous pourrions le gloser par entertain, par exemple.
Notons que s’il admet un COD, il n’en est pas pour autant transitif au sens strict du terme dans la mesure où, si la passivation est grammaticalement possible, elle est sémantiquement impossible car elle conduirait à un changement de sens manifeste : some important personage must be had tonight.
Have + complément sont donc ici indissociables sémantiquement, le complément étant une recharge sémantique (semantic filler) du verbe.
Ce prédicat est mis en relation avec le sujet they par l’énonciateur, sans conjugaison : la relation prédicative n’est pas validée. L’absence de temps sur le prédicat (infinitif, forme non finie) manifeste que la soudure prédicationnelle n’est pas effective.
Le modal must.
Le modal must présente une caractéristique formelle que ne partagent pas les autres modaux. Il a une seule forme, une forme de passé, qui peut aussi bien signifier un « devoir » énoncé au moment présent d’une énonciation directe qu’à un moment décroché du présent.
Il vient de l’ancien anglais (O.E.) moste, prétérit de mote, was able or permitted to [Onions, 598].
Nous étudierons successivement la valeur temporelle de must, son fonctionnement, et le rapport qu’il crée entre les termes qu’il relie.
En discours direct, suivi d’un prédicat infinitif, must prend régulièrement la valeur temporelle associée au repère énonciatif, le présent (ici, le repère est tonight). S’il y a décrochement, il est le plus souvent stylistique et associé à un autre repère énonciatif translaté par l’énonciateur dans le moment de l’énonciation (discours indirect) ou par le narrateur dans le moment du récit, par le biais d’une focalisation interne (ou du discours indirect libre).
La valeur de présent est ici manifeste : les paroles sont ancrées dans le temps de l’événement par le biais du verbe remarked, et l’adverbe tonight inscrit l’énoncé dans la situation (sit. 0), ce qui est confirmé par la présence de guillemets. En l’absence de guillemets et d’adverbe, la phrase aurait pu être comprise comme relevant du style indirect et must aurait alors pris une valeur de prétérit de translation.
Cette valeur de présent est d’autant plus évidente que le commentaire posé par l’énonciateur est spontané et concomitant d’un mouvement inscrivant une rupture dans la continuité diégétique (long silence / prise de parole).
Quelle valeur a must en contexte ? Est-il utilisé pour quantifier les chances de validation de la relation prédicative — évaluer sa valeur de vérité potentielle — ou pour exprimer une relation intersubjective forte entre énonciateur et référent du sujet grammatical ?
En utilisant un modal, extérieur à la relation prédicative, l’énonciateur prend position vis-à-vis du dictum. Le modal peut également adopter un fonctionnement épistémique ou non- épistémique que seul le contexte permet de déterminer.
Il semble que nous puissions d’emblée écarter la valeur déontique (radicale, non-épistémique, modalité de rang 4) dans la mesure où il n’existe a priori aucune relation dominant-dominé entre les trois tenants de la situationd’énonciation : locuteur Eva, interlocuteur Arvo et délocuté they. La relation, si tel était le cas, n’irait pas de soi, et must marquerait une non- congruence entre sujet et prédicat, le sujet étant dominé par l’énonciateur et contraint de mettre en œuvre le programme sémantique du verbe.
Must adopte ici un fonctionnement épistémique (modalité de rang 2) et son sémantisme premier de devoir permet à Eva de quantifier les chances de validation de la relation prédicative, qu’elle pose comme étant très fortes, tangentes au domaine du certain (glose : S / P is undoubtedly true). Les indices contextuels la conduisent à formuler un commentaire équivalant à une quasi-affirmation, laissant peu de place au doute.
Selon l’énonciateur, la relation a toutes les chances d’être validée et le rapport qu’il instaure est marqué par une forte congruence (idée de nécessité logique). L’utilisation d’un autre modal à valeur épistémique, may ou might, aurait installé le doute et une quantification médiane (may) ou faible (might) des chances de validation de la relation prédicative.
Une prédication d’existence, comme une assertion non modalisée, auraient levé le doute : there is some important personage tonight / they have some important personage tonight.
Contrairement à must déontique qui s’oralise habituellement en forme faible, must épistémique a généralement une réalisation en forme pleine. Have, quant à lui, peut être en forme pleine ou réduite.
Les paroles d’Eva, contrairement à celles d’Arvo, sont marquées par leur caractère assertif tout au long du passage et l’utilisation du modal must vient renforcer la caractérisation du personnage et sa détermination à valider, là où Arvo procède par hypothèses (30), négations (25) ou questionnement (27, 33).
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I might look like a robber baron to you, but thatřs only because you have sawdust for brains.ŗ
Description
Il sřagit de lřauxiliaire de modalité may à la forme désactualisée, suivi du verbe look [à lřintérieur dřune proposition coordonnée à la proposition suivante par la conjonction de coordination à valeur adversative but.]
La partie entre crochets n‟est pas exigible à ce stade (seule la description du segment souligné est attendue) mais elle devra de toute façon apparaître dans la suite de l‟analyse. En même temps, intégrer cette donnée à la description montre que l‟on va au delà d‟une « simple » description.
Problématique
Choix et valeur du modal en contexte
Analyse
Choix may / might Le choix de Might de préférence à May nřest pas de nature temporelle. Il nřy a pas de discours indirect (libre ou non) ou de concordance des temps à prendre en considération. May est tout à fait utilisable ici. On a affaire à un jugement présent sur une réalité présente.
Valeur de might La valeur générale de Might est épistémique : il y a calcul des chances de réalisation du procès I / look like a robber baron. Mais la valeur de might est loin de se limiter à cela. En effet, il faut remarquer dès à présent que lřénonciateur présente son discours comme étant la représentation du réel effectuée par you, ce que suggère la présence de to you. Lřinterprétation I / be a robber baron semble valorisée (on aurait en français Il se peut bien que).
Nous sommes dans une structure concessive, régulièrement fondée sur une accentuation / mise en flottement de la protase, au profit de lřapodose, qui se donne au final comme réalité unique englobante : You have sawdust for brains. Might intègre la valorisation / dévalorisation du contenu qui suit et se donne comme oscillation contrôlée du discours.
En contexte concessif, May est tout à fait possible ici, Can est très difficile à imaginer
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He is raising a din of clanking pots and clumsy feet, so loud that you figure he must be doing it on purpose (ll.56-57)
Le troisième segment à analyser était une séquence de verbes, composée de l’auxiliaire de modalité must, de l’auxiliaire be suivi par la forme en –ing du verbe plein do. Complété par l’objet direct it et le circonstant on purpose, le segment forme le syntagme verbale de la subordonnée he must be doing it on purpose.
revenir au texte afin de justifier une telle interprétation. Or il fallait souligner la présence du verbe figure indiquant un processus de raisonnement (la valeur épistémique est souvent qualifiée de « déductive »). En outre il était important de voir que doing it est anaphorique pour he is raising a din of clanking pots and clumsy feet qui a été asserté dans le contexte précédent. Ce processus en cours est donc acquis et le jugement modal porte en fait uniquement sur le circonstant de but on purpose.
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Has it occurred to you that you may not really be insomniac? (l. 40)
Dans la description, il suffisait d’indiquer qu’il s’agit d’un syntagme verbal (ou «séquence ver- bale», puisqu’il ne s’agit en fait pas d’un constituant), composé(e) de may, auxiliaire modal qui ex- prime la possibilité, et du verbe lexical be. Un adverbe (really) s’intercale entre l’auxiliaire et le verbe lexical. Il est lui-même précédé de l’adverbe de négation not. L’auxiliaire est conjugué, le verbe lexical ne l’est pas (c’est un infinitif). May est au présent.
Pour commenter la valeur épistémique on pouvait également souligner que le modal porte sur toute la relation /you — not really be insomniac/ : on estime le degré d’adéquation de cette relation avec l’extra-linguistique. En outre, le procès dit par be insomniac est statique : il est invariant, on ne se représente pas de bornes de début ni de fin, et le sujet est animé humain mais n’est pas vu comme contrôlant le procès. Or les états sont plus compati- bles avec la modalité épistémique qu’avec la modalité radicale,
La négation quant à elle porte sur le verbe lexical et non sur l’auxiliaire. La paraphrase it’s pos- sible that you are not really insomniac (par opposition à it’s impossible that you are insomniac) montre que le possible est positif, que c’est really be insomniac qui est nié. Cela dit on peut se demander si not porte sur really ou sur be insomniac : « vous êtes insomniaque mais pas vraiment » ou « vous n’êtes pas vraiment insomniaque ». Au final cela ne change pas grand-chose à ce qui est communi- qué, car really est un adverbe qui ne commente pas la relation mais l’intensifie.
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Rob thought he might get hold of England Trembles, and judge for himself. (l. 18-19)
Dans l’énoncé ci-dessus est souligné l’auxiliaire modal MAY au prétérit (-ED). Il est suivi du verbe lexical get à l’infinitif qui fait partie du prédicat get hold of England Trembles, coordonné par and à un second prédicat, judge for himself. Le sujet du groupe verbal est le pronom de 3e personne du singulier he, co-référentiel avec Rob.
La problématique porte sur la valeur du prétérit, le type de modalité, ainsi que sur le choix et la valeur du modal en contexte.
Le prétérit signale une rupture par rapport au moment d’énonciation : le procès /get hold of England Trembles, and judge for himself/ n’est pas considéré comme existant à ce moment-là. Le décrochage peut être d’ordre temporel, d’ordre énonciatif ou se faire par rapport au réel.
La proposition comportant might est une subordonnée nominale, COD du verbe thought, verbe qui introduit les pensées de Rob. L’énoncé he might get hold of England Trembles, and judge for himself exprime donc des pensées rapportées. Cela suggère dans un premier temps que le prétérit est un prétérit de translation / d’ajustement syntaxique (considéré également comme un prétérit chronologique) qui marque une rupture par rapport à l’énonciation, en d’autres termes ici à la pensée originelle de Rob.
Le prétérit porté par le modal MAY est donc un prétérit irréel / modal qui signale un décrochage par rapport au réel (voir la manipulation avec may inacceptable en contexte).
La valeur du prétérit élucidée, il s’agit de mettre en évidence le choix et la valeur du modal, ainsi que le type de modalité.
MAY est un modal qui apparaît dans des contextes de non congruence entre le sujet et le prédicat, ici < he – get hold of England Trembles, and judge for himself >. La non congruence provient de la situation :
MAY, modal du possible, est souvent considéré comme le modal de l’équipossibilité. Il exprime une possibilité subjective, ce qui justifie en partie le fait que le modal CAN n’ait pas été utilisé : avec could, la relation entre le sujet et le prédicat ne serait pas vue comme problématique, mais comme naturelle, allant de soi, ce qui ne convient pas dans le contexte.
Dans son emploi radical, la possibilité exprimée par MAY prend souvent la valeur de permission tandis que dans son emploi épistémique, la possibilité s’apparente à une évaluation des chances d’actualisation du procès.
Might est ici la trace d’une relation intersubjective entre l’énonciateur et le référent du sujet he, qui n’est autre que Rob lui-même. En effet, on obtient I might get hold of England Trembles […] si l’on repasse aux pensées originelles de Rob. La possibilité exprimée par might est celle que l’énonciateur s’accorde, ce qui prend ici le sens d’une suggestion, auquel cas l’emploi de might s’apparente à un emploi radical. Might véhicule alors un sens voisin de should : I should get hold of England Trembles, and judge for myself. En français, on pourrait dire : « Je me propose de me procurer England Trembles ».
Cet effet de sens de suggestion, appelé aussi valeur directive, est construit par l’interaction entre la valeur du modal MAY et la valeur du prétérit irréel. Ce dernier permet ici à l’énonciateur de se faire moins assertif : il prend du recul par rapport à son assertion.
Le prétérit irréel indique que la rupture se fait par rapport à l’assertion. On parle parfois de tentative use ou de prétérit d’atténuation.
Le sens de doute véhiculé par might est dû au fait qu’il y a toujours dans might quelque chose du sens de « peut-être », de l’éventualité. En effet, MAY exprimant l’équipossibilité, il y a en sous- jacence l’idée qu’on prend en compte les deux scénarios possibles, le scénario positif mais aussi le scénario négatif :
Ainsi, might, en raison de la distance dénotée par le prétérit, exprime une certaine réticence (en raison des circonstances) quant à la possibilité que s’accorde le référent du sujet.
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You haven’t been speaking to me, l. 82
Description : Ce groupe verbal comporte une double marque d’aspect :
- l’auxiliaire have, au présent, est suivi d’un participe passé, ce qui constitue l’aspect have + -en, ou perfect ;
- le verbe speak est à l’aspect be + -ing (auxiliaire be, ici au participe passé, suivi du verbe lexical à la forme en -ing)
enfin la négation not, portée par l’auxiliaire have, est à sa forme contractée.
Analyse :
À la différence de ce que l’on constate souvent avec le double aspect, cette forme n’est pas accompagnée d’un complément de durée en for ou since, tel que You haven’t been speaking to me for a while.
Quelle que soit l’interprétation, on constate que la négation, bien qu’elle soit accrochée à l’auxiliaire have, porte sur le prédicat speak to me. Par cette opération seconde de négation, l’énonciateur réfère à un procès qui n’existe pas (< you – not speak to me >)
Mais bien qu’il soit toujours d’actualité, il est difficile de parler de procès conçu comme étant en déroulement : un état ne se déroule pas. D’ailleurs, BE + -ING est difficilement compatible avec les états, mais plus fréquent avec les activités, et donc avec des sujets agentifs.
BE + -ING permet ici de centrer l’attention sur le référent du sujet you, et rend sensible la présence de l’énonciateur dans l’énoncé. Il contribue à attribuer à Madeleine, référent de you, une forme d’intentionnalité dans la non-activité < you – (not) speak to me >.
L’énoncé pourrait être glosé par : « tu ne veux pas / tu refuses de m’adresser la parole / de me parler de ta vie », ce que confirme le contraste avec une forme sans BE+-ING: You haven’t spoken to me. L
De plus, BE + -ING indiquant que l’événement est vu par le filtre de l’énonciateur, il permet à celui-ci d’exprimer un commentaire sur l’événement :
ar la forme BE + -ING]. En ce sens, on peut parler de « valeur modale » de BE + -ING dans cet énoncé.
L’aspect HAVE + -EN, quant à lui, permet de faire le lien entre deux moments temporels distincts : le moment d’énonciation, conçu comme le moment de référence, et un moment révolu situé à M-1 (non précisé) par rapport au moment d’énonciation.
Quoi qu’il en soit, le prédicat, qui porte la marque du participe passé (accrochée au verbe speak), indique une antériorité temporelle (caractéristique du participe passé -EN) : le procès a eu lieu ou commencé en amont du présent de l’énonciation. HAVE au présent, opérateur de localisation, localise le prédicat porteur de l’antériorité temporelle par rapport au sujet you dans le présent, au moment d’énonciation. En d’autres termes, ce qui prime avec le present perfect, c’est le moment repère, à savoir la situation présente et non le moment du passé où l’état était vrai : rattacher cet état passé au moment d’énonciation signifie qu’il est important dans ce présent. C’est bien le cas ici : l’énonciateur, Mitchell, évoque le passé pour en constater les répercussions / le résultat au moment d’énonciation.
Le present perfect a donc ici une valeur résultative. Faute de complément de durée, le bilan indiqué par le perfect devient qualitatif, et décrit un état résultant :
Ainsi, le double aspect, combiné au temps grammatical du présent, indique qu’une non-activité, dont le sujet est présenté comme responsable (valeur de BE + -ING), a une répercussion (valeur de HAVE + -EN) au moment d’énonciation (now : valeur du temps présent, qui renvoie au moment du dialogue), que cet état soit conçu comme terminé ou non. L’ensemble contribue ainsi à véhiculer une valeur de reproche.
Exemple de bonne copie – segment 1 (note de 3/3)
Ce segment est composé d’une proposition subordonnée introduite par la conjonction « that ». Cette proposition comprend les verbes « fall » et « marry », dont le sujet est « she » et auxquels l’adverbe « never » donne une polarité négative : < she – fall in love and marry > est rejeté. La proposition a pour fonction d’être le sujet de « was » dans la proposition principale. Or, les propositions sujet font souvent l’objet d’une extraposition.
Nous nous interrogerons donc sur les choix qui motivent le fait d’avoir laissé la proposition en début de phrase, et sur l’effet de sens véhiculé par cette tournure.
L’ordre canonique de la présentation des informations en anglais place le sujet en tête de phrase. Cependant, le principe du « end weight » veut aussi que les composants les plus lourds syntaxiquement soient déplacés en fin de phrase. Ainsi, il n’est pas rare qu’une proposition sujet soit déplacée en fin de phrase, la position syntaxique du sujet étant alors occupée par un « it » explétif (non-référentiel). Par exemple : « That he should be late is strange » devient « It is strange that he should be late ».
Dans le cas présent, une extraposition du sujet serait cependant maladroite : ?? « It was yet another indication, in a morning teeming with them, of just how screwed up she was in matters of the heart that she should never fall in love with Mitchell and marry him, precisely because of this eligibility ». En effet, la phrase dans son ensemble est assez lourde (elle contient par exemple deux compléments circonstanciels), ce qui ne facilite pas le réagencement des informations et le fait de modifier l’ordre canonique de présentation de l’information. De plus, le « it » placé ainsi en début de phrase semble être référentiel, de telle sorte qu’il renverrait à un élément du co-texte gauche ou du contexte. La position de la proposition en début de phrase est donc le résultat d’une contrainte.
Cependant, loin de n’être que forcée, cette position participe également à la construction du sens du propos. Tout d’abord, l’unité thématique du passage est conservée puisque le co-texte gauche fait directement référence aux qualités de Mitchell et au fait que ce soit l’homme dont elle devrait normalement tomber amoureuse. La proposition placée en début de phrase donne cependant un effet de contraste. En effet, les verbes « fall (in love) » et « marry » sont directement repris du co- texte gauche, mais associés à la négation « never ». Ainsi, bien que la reprise des verbes semble faire de l’information de la proposition sujet un contenu informationnel plus ancien (typiquement compatible avec la valeur de thème, soit d’information plus ancienne dont on dit quelque chose de nouveau, du sujet), la position initiale contribue également à renforcer la polarité négative grâce au « narrow focus » (soit la focalisation d’une donnée nouvelle en tête de phrase).
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the curtains had to be kept closed because of all the photographers in the parking lot (ll. 27-8)
Description :
Le segment souligné est une forme verbale auxiliée, dans laquelle la forme modale périphrastique (ou semi-auxiliaire) HAVE TO porte la marque -ED du prétérit.
Le verbe lexical HAVE est suivi de la particule infinitive (ou opérateur verbal) TO associée à un infinitif passif, be kept. Ce dernier est composé de l’auxiliaire (ce n’est pas un verbe lexical ici) BE à l’infinitif (ou à la base verbale) et du verbe lexical keep qui porte la marque -EN du participe passé.
Cette partie de prédicat est suivie à droite par un participe passé adjectival (closed). Le sujet est le GN The curtains dont le référent est non animé (ou inanimé).
Problématique :
Elle est triple. On s’interrogera à la fois sur :
- la diathèse (tournure ou voix) passive dont on devra expliquer la construction et justifier la motivation.
- la modalité dont on devra expliquer le fonctionnement et justifier le choix à la lumière
de la tournure passive, et l’effet de sens. - la valeur du prétérit.
Analyse :
1) Diathèse / voix passive Fonctionnement
Si on considère le passif comme une forme de réagencement (/réorganisation) des constituants de la phrase active, l’ordre des mots diffère de celui de l’ordre canonique sujet-verbe- objet (SVO).
Dans la structure passive, le sujet syntaxique/grammatical ne dénote pas le sujet sémantiquement agent. En effet, le référent du sujet the curtains n’est pas agent (sujet actif) du procès /keep closed/, il est considéré comme le « patient » (sujet « passif »).
Le statut de « patient » (non agent) de ce sujet est marqué sur la forme verbale par la présence de l’opérateur BE (ici auxiliaire) qui dénote l’accès à l’existence, et -EN qui dénote un résultat (ici les rideaux maintenus fermés).
Une tournure à l’actif serait grammaticalement acceptable mais peu pertinente ici au niveau pragmatique (ou discursif) : People/Hamilton had to keep the curtains closed because of all the photographers in the parking lot. On retrouve le rôle de chaque constituant :
- the curtains est objet syntaxique de keep (et non pas sujet), et correspond au patient.
- People / Hamilton, sujet syntaxique, correspond à l’agent du procès.
Bien qu’aucun agent ne soit mentionné dans l’énoncé, il s’agit d’un passif d’action car un agent est nécessaire pour actualiser le procès keep the curtains closed.
Motivation
Le choix du passif s’explique par une volonté de thématiser le patient, en faire le premier terme de la construction, parce qu’il représente le « topique ». C’est donc un choix énonciatif, le choix que fait l’énonciateur lors de la construction de son énoncé.
Par volonté de continuité / cohésion discursive, le thème préalablement mis en place est donc choisi comme terme de départ de la phrase : le sujet syntaxique the curtains.
Son statut de sujet non agent entraîne cette structure passive.
Le passif permet ainsi de ne pas mentionner l’agent, inconnu mais aussi peu pertinent dans ce contexte car évident.
2) Had to
La périphrase modale HAVE TO appartient au domaine de la nécessité et fonctionne de la manière suivante :
Valeur de TO
TO est un opérateur verbal de visée / dévirtualisation. Il présente la relation prédicative comme validable mais pas encore validée / le procès comme actualisable mais pas effectivement réalisé. Ici le fait, pour les rideaux, d’être maintenus fermés était vu comme étant à faire, donc comme n’étant pas encore réalisé ; on se situe donc en amont de l’actualisation du procès.
Valeur de HAVE
HAVE a ici un fonctionnement syntaxique de verbe lexical (et non d’auxiliaire) car il est suivi d’un infinitif en TO.
HAVE est un opérateur de localisation. Il localise un événement (ou activité) à venir (la proposition infinitive to be kept closed) par rapport à la sphère du sujet the curtains.
Cet événement (ou activité) étant affecté au sujet (par le biais de HAVE), cela s’interprète comme une obligation.
De plus, HAVE TO signale une relation non congruente (= présentée comme problématique) entre le sujet (the curtains) et son prédicat (be kept closed). La non congruence de ce procès (ou situation) est explicitée par l’emploi de la conjonction though qui lui oppose une situation congrue (the windows were indeed open, l. 27) entraînant logiquement des rideaux ouverts. C’est une modalité de non congruence : la validation du procès be kept closed est conçue comme n’allant pas de soi.
Ainsi, HAVE TO véhicule une idée de contrainte, d’obligation : ici, le maintien des rideaux fermés était obligatoire. Cette modalité a un fonctionnement (/ une valeur) radical, qui met en relation le sujet (the curtains) et son prédicat (be kept closed) de manière contrainte : elle a donc une valeur déontique.
Choix de HAVE TO
La contrainte étant localisée (HAVE TO) sur le sujet, cela s’interprète comme une obligation extérieure (/autre que) au sujet agent du procès à valider. En effet, avec la tournure passive, le référent du sujet syntaxique (the curtains) est un inanimé : il est donc difficile d’exercer, en quelque sorte, une forme de pression sur lui.
3) Valeur de -ED
Le prétérit signale que le procès (ici la nécessité) n’est pas considéré comme existant au moment de l’énonciation. -ED marque un décrochage / distanciation / décalage / rupture.
L’emploi du prétérit est motivé par un phénomène de décrochage : un décrochage par rapport au réel (prétérit irréel / modal) ; un décrochage par rapport à l’énonciation originelle (translation) mais il n’y a pas ici de mise au discours indirect, on se situe dans la narration.
C’est la troisième valeur de décrochage qui s’applique ici: un décrochage chronologique / temporel ; le prétérit renvoie à du révolu.
La contrainte est située dans le passé (au moment où Hamilton séjourne dans le motel), qui se calcule / définit en décalage / décrochage chronologique par rapport au moment origine de la narration.
Cette actualisation du procès à un moment révolu, antérieur au moment de la narration, exclut l’emploi de tout modal, a fortiori du modal MUST. En effet, d’une part un modal situe le procès dans le virtuel, et d’autre part MUST ne possède pas de forme prétérite qui permettrait d’indiquer une obligation (ou contrainte) révolue. On a donc recours à l’expression de modalité HAVE TO au prétérit.
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