BQ - Apports - Light Flashcards
Jacob Viner, 1950, “The Customs Union Issue”
Théorie du détournement d’échange par les unions douanières
Un accord commercial préférentiel peut nuire à l’efficience économique :
- En favorisant des fournisseurs moins compétitifs des pays partenaires ;
- Au détriment d’acteurs plus performants situés hors de l’accord ;
→ Entraînant une allocation sous-optimale des ressources.
Lagadec, 2002
À l’époque où le traité de Rome est signé, la théorie vinerienne est dominante.
→ La création de l’union douanière, pilier de l’intégration régionale européenne, n’a pas reposé initialement sur des motivations purement économiques.
Kemp et Wan, 1976
Discussion de la théorie vinérienne sur le détournement d’échange :
Des accords commerciaux préférentiels peuvent améliorer le bien-être en constituant une première étape vers la libéralisation multilatérale.
Klemperer, 2004, Auctions : Theory and Practice
I. Lorsqu’un décideur public éprouve des difficultés à estimer le coût d’un bien en raison d’une asymétrie d’information avec le privé, l’enchère est un bon mécanisme de révélation.
II. Cette option retenue par le Royaume-Uni et l’Allemagne en 2000 pour l’attribution des licences 3G ont conduit à un échec en raison des montants payés, trop optimistes.
Maskin, 2007, “Mechanism design : How to Implement Social Goals”
Illustration de la théorie des mécanismes
I. Lorsqu’il manque d’information, le gouvernement doit privilégier des mécanismes alignant les incitations avec la divulgation des données nécessaires, plutôt que de rechercher une solution idéale.
II. Par exemple, le recours aux enchères pour l’attribution de licences télécoms :
Les estimations des opérateurs révèlent les coûts et la demande que l’État ne maîtrise pas.
Buchanan et Tullock, 1962, The Calculus of Consent
I. La théorie des choix publics applique des outils économiques aux phénomènes politiques comme l’État, le vote ou les élections.
II. Elle repose sur :
- l’individualisme méthodologique : les comportements individuels expliquent les dynamiques collectives ;
- la rationalité des acteurs décisions fondées sur un calcul coûts-bénéfices.
III. A. Elle met en évidence les effets pervers des marchandages de voix en assemblée, qui alourdissent la dépense publique, et souligne que l’intervention de l’État n’est ni neutre ni toujours efficace.
B. L’évaluation des politiques économiques doit ainsi rester encadrée par les règles constitutionnelles et institutionnelles qui définissent leur mise en œuvre.
Buchanan, 1975, Les limites de la liberté
Le chercheur en économie politique :
- n’observe pas un processus de maximisation des ressources face à des contraintes ;
- se retrouve à analyser une organisation sociale où les décisions sont fortement influencées par des facteurs endogènes : règles, procédures, institutions et dynamiques politiques.
Tinbergen (règle de), 1952, On the Theory of Economic Policy
La poursuite de n objectifs indépendants de politique publique nécessite que le gouvernement dispose d’au moins autant (≥ n) d’instruments indépendants.
Phillips (courbe de), 1958
I. Mise en évidence d’une relation négative, au Royaume-Uni entre 1861 et 1957, entre :
- Le taux de chômage ;
- Le taux de croissance des salaires nominaux .**
II. A. Pour un taux de chômage de 5 %, les salaires nominaux restent stables.
B. Pour un taux de chômage de 2,5 %, les salaires s’accroissent de 2 % par an.
→ Une réduction du chômage d’un point de pourcentage entraînait une hausse de 0,8 point du taux d’inflation.
- Le supplément de chômage requis pour abaisser l’inflation de 1 point est appelé ratio de sacrifice.
Eggertsson, Ferrero et Raffo, 2014, “Can Structural Reforms Help Europe ?”
Une politique monétaire expansionniste ne peut venir compenser l’impact négatif d’une réforme structurelle si :
- Le pays est sous régime de change fixe ;
- S’il est intégré à une union monétaire ;
- Si sa banque centrale a déjà des taux à zéro, limitant toute marge d’assouplissement.
Bouis et Duval, 2011
Les effets positifs d’une réforme structurelle dominent sur le long terme, le bilan étant alors généralement positif.
Ainsi, dans les pays de l’OCDE, en moyenne, une refonte structurelle des marchés de biens et services et du marché de l’emploi permettrait un gain de PIB de près de 10 % à un horizon de 10 ans.
⚠️ À court terme, la question reste controversée.
Delpla et Wyplosz, 2007
I. Un gouvernement démocratique fait face à une contrainte d’économie politique lorsqu’une réforme porte ses fruits après son mandat.
II. A. Pour y remédier, il peut compenser les coûts initiaux en rachetant certains privilèges freinant la concurrence.
B. Cette approche est assimilable à un investissement collectif rentable : exemple des taxis.
Musgrave et Musgrave, 1989, Public Finance in Theory and Practice
Les trois fonctions essentielles de la politique budgétaire sont :
- L’allocation des ressources ;
- La stabilisation macroéconomique face à des chocs exogènes qui éloignent l’économie de l’équilibre ;
- La redistribution entre agents ou entre régions.
Kenneth Arrow et Gérard Debreu, 1954
I. Modèle d’équilibre général en concurrence parfaite qui a servi de référence pour les développements ultérieurs en économie.
II. Il formalise les conditions rigoureuses de validité de la concurrence, notamment :
- L’homogénéité de degré zéro des prix : : la multiplication de l’ensemble des prix par un quelconque réel positif ne modifie pas les choix des agents ;
- La loi de Walras garantissant l’équilibre des marchés : tout ce qui est offert dans l’économie est demandé.
⚠️ Cet ensemble d’hypothèses est bien plus exigeant que les conditions de la concurrence parfaite, dont il se distingue. Il fonde les théorèmes de l’économie du bien-être.
Blanchard et Tirole, 2003
Proposition de réformer la protection de l’emploi en remplaçant :
- Le contrôle judiciaire des licenciements ;
- Par un système de bonus-malus modulant les cotisations chômage des entreprises selon leur gestion des embauches et des licenciements.
Akerlof, 1970, « The Market for Lemons »
Mécanisme de la sélection adverse
I. Sur le marché des véhicules d’occasion, l’asymétrie d’information pousse les acheteurs à proposer des prix bas par crainte des vices cachés.
II. En conséquence, le prix moyen du marché devient insuffisant pour rentabiliser les véhicules de bonne qualité, incitant leurs vendeurs à se retirer.
III. Le marché se retrouve alors dominé par des produits de moindre qualité.
Keynes, 1936, Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie (I)
La stabilisation recherchée par l’économie politique trouve deux justifications :
1° Les « esprits animaux » : les comportements non rationnels des agents économiques ;
2° Les rigidités nominales des salaires et des prix : ils gênent l’adaptation aux chocs économiques.
Kydland et Prescott, 1982
La théorie des cycles économiques réels a généré une vaste littérature, contestant la vision keynésienne des fluctuations économiques :
- Rejet des comportements non rationnels et des rigidités nominales ;
- Explication par les chocs technologiques et les réactions rationnelles des agents.
→ Les cycles économiques résultent de perturbations réelles. Ces écarts, mesurés par le résidu de Solow, reflètent des fluctuations du progrès technologique autour de sa tendance de long terme.
Sargent et Sims, 1977, Business cycle modelling without pretending to have too much a-priori economic theory
Les modèles macroéconométriques dominants depuis 1950, vastes mais statiques et imprécis, ont conduit à l’émergence des modèles à facteurs dynamiques.
Deux facteurs expliquent plus de 80 % des variations économiques (chômage, inflation, croissance) :
- Modélisation DSGE (Dynamic Stochastic General Equilibrium) : approche structurelle utilisant un cadre dynamique et stochastique sous anticipations rationnelles pour identifier et tester les modèles ;
- Modélisation VAR (Vectoriels Auto-Régressifs) structurelle : approche statistique plus souple, utile pour prévoir et analyser les chocs économiques (offre, demande) et leurs effets sur l’économie.
Pakko, 1998
Les « coûts de chaussure » désignent la mauvaise allocation des ressources induite par l’inflation :
Les agents, pour préserver leurs actifs, vont plus souvent à la banque pour réduire leur détention de cash.
Cela génère des distorsions économiques, car la contrainte de temps les pousse à des allocations inefficaces.
Piketty, 1998
En 1994, l’allocation parentale d’éducation, auparavant réservée aux mères de trois enfants, a été étendue aux mères de deux enfants, modifiant leur arbitrage emploi/inactivité.
La comparaison avec d’autres groupes (mères non éligibles, mères d’un seul enfant) a permis d’éliminer les effets externes, comme la conjoncture économique.
L’étude révèle une réaction forte et rapide des bénéficiaires, incitées à quitter le marché du travail. Toutefois, cette conclusion ne s’applique pas forcément à d’autres populations, l’élasticité de l’offre de travail des mères de deux enfants pouvant différer de celle d’autres sous-groupes de population.
Atkinson et Piketty, 2007
Depuis les années 1970 :
- Les inégalités de revenus se font croissantes dans la plupart des pays avancés ;
- La richesse se concentre davantage au sommet de la pyramide sociale.
Arrignon, 2019
Une expérimentation peut servir un objectif politique, pour renforcer son apparence scientifique et évacuer les aspects les plus controversés d’un projet.
La loi TEPA de 2007 a autorisé 30 départements à tester le RSA, avec une évaluation comparant ces territoires à des zones témoins non concernées.
Cependant, bien que prévue pour trois ans, l’expérimentation a été écourtée : la loi du 1er</> décembre 2008 a généralisé le RSA dès 2009, la réforme primant sur son évaluation.
Amartya Sen, 1999, Development as Freedom
L’espérance de vie des Noirs américains était inférieure à celle des habitants du Kérala, en Inde, qui présente un IDH assez élevé.
→ le revenu monétaire peut être un mauvais indicateur des conditions de vie.
FMI, Ostry et al., 2014, Redistribution, Inequality and Growth
L’inégalité stimule la croissance à moyen et long terme, mais peut aussi l’entraver.
Les études ne montrent pas d’effet négatif direct d’une redistribution importante sur la durée de la croissance.
Une redistribution modérée, réduisant les inégalités, favorise une croissance plus durable.
Dick Cheney, 2004
Les économistes s’accordent à dire que des déficits budgétaires persistants augmentent les taux d’intérêt à long terme, en raison de l’accroissement de la dette publique et du risque de défaut.
Pourtant, le vice-président de George W. Bush a affirmé que « Reagan a prouvé que les déficits importent peu ».
Ravi Kanbur, 2001
Les désaccords sur les politiques économiques internationales proviennent de trois facteurs :
- L’agrégation des données : certains analysent l’effet global d’une politique, d’autres se concentrent sur la redistribution ;
- L’horizon temporel : les analyses privilégient souvent le long terme (5-10 ans), négligeant l’impact immédiat sur les plus vulnérables ;
- Le fonctionnement des marchés : on suppose une concurrence parfaite, alors que les marchés sont souvent imparfaits.
Avinash Dixit, 1996
Jean-Jacques Laffont, 1999
La recherche économique des 40 dernières années a démystifié la figure du dirigeant omniscient, tout-puissant et bienveillant, approche traditionnelle de la politique économique.
Il est désormais perçu comme impuissant, mal informé et influencé par des intérêts privés, rendant ses actions inefficaces, voire nuisibles.
Gollier, Eswald, Sadeleer, 2008, Le principe de précaution
Les décideurs fondent leurs choix sur des prévisions moyennes, sans intégrer la distribution des risques.
Cependant, des crises majeures comme Katrina (2005) ou Lehman Brothers (2008) peuvent ponctuellement les y contraindre.
Knight, 1921
- Risque : aléas quantifiables ;
- Incertitude : aléas non quantifiables, donc non assurables.
⚠️ Une incertitude knightienne exclut le recours au concept d’utilité espérée
Von Neumann et Morgenstern, 1944, Theory of Games and Economic Behavior
Théorie de l’utilité espérée
Les agents connaissent les probabilités des différents états possibles (succès/échec) et maximisent l’espérance de leur utilité future, pondérant chaque issue par sa probabilité.
⚠️ Seul le comportement rationnel et égoïste est pris en compte par les auteurs, sans place pour un contrat social ou un accord indivisible entre joueurs.
Gollier, 2001, « Économie du principe de précaution »
I.A. Le risque zéro est rarement efficace : les investissements en prévention ont des rendements décroissants.
I.B. → D’où la notion de « risque acceptable » : un risque est acceptable si le coût de sa réduction dépasse son bénéfice.
II. ⚠️ Les décisions politiques ignorent souvent une analyse rationnelle des coûts et bénéfices.
A. En 2000, un test VIH/hépatite C coûtait 60 MF par an de vie gagnée, contre 10 000 F pour le dépistage du cancer du sein.
B. Pourtant, le premier fut adopté sous la pression de l’opinion publique sur la contamination du sang.
Mandelbrot et Hudson, 2004
I. Entre 1916 et 2003, l’indice Dow Jones a varié de plus de 7 % à 48 reprises.
II. Or, si sa distribution était normale, un tel événement ne surviendrait qu’une fois tous les 300 000 ans.
III. Cette observation invalide l’hypothèse classique des rendements normaux, pourtant utilisée dans de nombreux modèles prévisionnels.
Lars Svensson, 2004
I. La Banque centrale tolère des fluctuations modérées autour de son objectif d’inflation.
II. Mais elle doit absolument éviter les situations extrêmes, rares mais aux effets disruptifs majeurs, en raison des hystérèses qu’elles engendrent.
Arrow, 1968
I. Si l’investissement est irréversible (coûts irrécupérables) mais que son report est possible, il faut comparer :
- La valeur d’un investissement réalisé immédiatement ;
- La valeur du même investissement réalisé plus tard.
II. A. L’investisseur attend un seuil de demande suffisant pour éviter une suraccumulation du capital.
II.B. Le capital évolue donc par paliers, et non de manière continue.
Henry, 1974
Modèle séquentiel de décision en information croissante
I. La notion d’irréversibilité est pertinente dans l’évaluation de projets à dommages environnementaux permanents (ex., enfouissement nucléaire).
II. Cette contrainte justifie l’option d’attente pour préserver la flexibilité.
⚠️ Critique : Ce modèle est réducteur, car l’inaction peut aussi avoir un coût, comme pour les émissions de carbone (Stern, 2006).
Rapport Stern sur l’économie du changement climatique, 2006 (The Economics of Climate Change)
Coût de l’atténuation vs. coût de l’inaction climatique
I. Les émissions de GES coûteraient 1 % du PIB mondial, contre une perte annuelle due à l’inaction de :
- 5 % (production et ressources) ;
- 14 % (pertes humaines et écologiques) ;
- 20 % (frein au développement des pays les moins avancés).
II. ⚠️ Critiques (Nordhaus, Weitzman, 2007) :
- Taux d’actualisation contesté, qui donne autant de valeur au bien-être futur qu’au présent ;
- Sous-estimation des gains technologiques pouvant réduire les coûts futurs.
John Muth, 1961, “Rational Expectations and the Theory of the Price Movements”
*Anticipations rationnelles
*
I.A. Les agents utilisent toute l’information disponible pour prévoir efficacement.
B. Leur analyse repose sur :
- L’historique de leurs erreurs ;
- Le modèle économique sous-jacent.
II.A. Ils ne peuvent donc être systématiquement trompés, leurs erreurs étant dues uniquement aux événements imprévisibles.
B. L’action politique non aléatoire est anticipable.
⚠️ À l’époque, dominait encore l’idée que les décisions des agents se basaient uniquement sur le passé.
Robert Lucas, 1976, “Econometric Policy Evaluation : A Critique”
« Critique de Lucas »
Contestation de ll’usage des modèles macroéconométriques pour évaluer les effets des changements de politique économique :
- Une modification des règles influence les anticipations et comportements des agents, modifiant ainsi le modèle lui-même ;
- Le modèle devient alors obsolète, car ses fonctions dépendent des politiques qu’il analyse, compromettant sa capacité prédictive.
Sims, 1980
Modélisation des variables macroéconomiques sans contrainte théorique :
- Réponse à la critique de Lucas, qui remet en question les modèles macroéconomiques traditionnels ;
- Introduit une approche purement statistique de l’économie, à l’origine des modèles VAR.
Barro et Gordon, 1983 (I)
Formalisation du défaut (ou manque) de crédibilité
I. Un gouvernement optimisant le bien-être social à chaque période n’adopte pas forcément la meilleure politique.
II.A. Il peut être tenté de tromper les agents pour améliorer le bien-être, par exemple en ciblant une inflation de 4 % pour réduire les salaires réels et lutter contre le chômage.
B. Deux conséquences du manque de crédibilité :
- Les agents anticipent et neutralisent l’effet recherché, en exigeant des hausses salariales équivalentes → L’inflation augmente sans effet sur l’emploi ;
- Même en cessant de mentir, le gouvernement reste perçu comme non crédible, ce qui altère l’efficacité de ses futures politiques.
Woodford, 2001, “Monetary Policy in the Information Economy”
« Une politique monétaire réussie ne repose pas tant sur le contrôle efficace des taux sur les dépôts à vue ou même des variations de l’indice des prix à la consommation, que sur la capacité à influencer de la façon désirée les anticipations de marché concernant ces variables. »
Krugman, 1998, “Japan’s Trap”
I. Fin des années 1990, le Japon subissait une déflation entraînant :
- Des taux réels positifs malgré des taux nominaux proches de zéro ;
- Un risque de spirale déflationniste.
II.A. Krugman propose de stimuler les anticipations d’inflation pour faire baisser le taux d’intérêt réel, favorisant ainsi l’investissement et évitant la spirale déflationniste.
B. Il suggère que la banque centrale « promette d’être irresponsable » en adoptant une politique inflationniste, contrairement à son mandat.
III. D’abord sceptiques, les autorités monétaires japonaises ont progressivement adopté cette approche.
Kydland et Prescott, 1977, “Rules Rather than Discretion”
I.A. Gouverner efficacement repose sur la théorie des jeux, plutôt que sur le contrôle optimal.
B. Les agents anticipent en remontant aux objectifs des autorités, rendant leurs prévisions réellement rationnelles.
II.A. Les politiques discrétionnaires doivent être abandonnées, car l’optimisation à chaque instant est inefficace.
B. La politique économique doit suivre des règles fixes, car une décision optimale ex ante (annoncer une faible inflation ou ne pas sauver une banque)
peut devenir sous-optimale ex post (encourager l’inflation ou sauver la banque pour éviter une crise).
III. Seules les politiques crédibles et cohérentes influencent réellement les anticipations des agents privés.
Wyplosz, 2005, “Fiscal Policy : Institutions vs. Rules”
I.A. Proposition de confier le solde budgétaire à une autorité indépendante.
B. Le gouvernement et le parlement gardent le contrôle des impôts et dépenses.
II. Objectif : allier crédibilité sur la dette à long terme et flexibilité face aux aléas économiques.
III. 📚 Inspiré de l’indépendance des banques centrales, après l’échec des règles monétaires idéales des années 1980.
Stiglitz, 2000
« La reconnaissance que l’information est imparfaite, qu’il peut être coûteux d’obtenir des informations nouvelles, qu’il existe d’importantes asymétries de l’information et que l’étendue de ces asymétries dépend des activités des entreprises et des individus, est peut-être l’innovation la plus importante des sciences économiques au XXe siècle ».
Laffont et Martimort, 2001
Notion de principal/agent
I.A. Le principal (actionnaire, manager, banquier) délègue une tâche à un agent (dirigeant, employé, entreprise) sans disposer de toutes les informations, menant souvent à des décisions sous-optimales.
B. L’information décentralisée génère des rentes informationnelles, influençant l’allocation des ressources.
II. Les contrats permettent de limiter ce problème.
III. ⚠️ Ce conflit n’est pas limité aux grandes organisations : il existe dans toute relation bilatérale (vendeur/acheteur, propriétaire/métayer, financier/entrepreneur).
Laffont et Tirole, 1986
I. A. Le régulateur attribuant une concession (eau, électricité) fait face à une asymétrie d’information sur les coûts et les efforts de réduction de ces coûts.
B. Il doit éviter :
- Une rente excessive pour le concessionnaire ;
- Une activité non rentable.
II. Proposition du contrat optimal :
- L’entreprise perçoit une partie de la rente ;
- Un « menu de contrats » est proposé, avec une subvention décroissante selon les coûts de production.
→ Les entreprises efficaces assument plus de coûts, tandis que les moins performantes tentent de les transférer à l’autorité concédante.
Cf. : https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/20141218trib651483c28/l-apport-de-jean-tirole-aux-marches-de-l-electricite.html#_ftn2
Laffont, 1999
Un gouvernement cherchant une information décentralisée doit inciter les agents à la transmettre de façon véridique. Par exemple :
- Rémunérer un agent pollueur en fonction de ses efforts de dépollution.
- Favoriser la concurrence interne dans ses services, tant que cela ne nuit pas à leur coordination.
Stigler, 1971, The Economic Theory of Regulation
Analyse de la capture du régulateur (École du choix public)
I. Les entreprises de secteurs concurrentiels (commerce, transport) peuvent influencer la réglementation, tandis que le grand public reste passif.
II. → Le régulateur peut être capturé par les acteurs qu’il surveille, orientant la régulation au profit des producteurs plutôt que des consommateurs.
Persson et Tabellini, 1990
Un gouvernement incertain de sa réélection surinvestit dans ses priorités et creuse la dette pour limiter les marges de manœuvre de son successeur, rendant l’endettement public d’autant plus élevé que l’instabilité politique est forte.
Bertrand (duopole de), 1883
I. Dans un duopole où deux entreprises fixent les prix, la concurrence peut ramener le prix au coût marginal, comme en concurrence parfaite, annulant ainsi les profits.
II. A. Ce résultat contredit l’idée selon laquelle seule une multitude d’entreprises permet un marché concurrentiel.
B. Le paradoxe est que malgré leur pouvoir de marché, les deux entreprises se retrouvent dans une situation identique à celle d’une concurrence parfaite.
III. A. Ce modèle théorique ne correspond pas à la réalité, car les duopoles génèrent généralement des profits significatifs.
B. En effet, les entreprises adoptent des stratégies pour limiter la concurrence par les prix :
- Différenciation des produits ;
- Collusion ;
- Contraintes de capacité .
Hotelling, 1929
I. Le modèle représente un continuum de produits substituables par la distance entre acheteurs et vendeurs sur une plage où deux vendeurs de glace sont situés à des points distincts.
II. Si un vendeur baisse son prix ou si l’autre l’augmente, une discontinuité apparaît :
Tous les acheteurs d’une zone donnée changent soudainement de vendeur.
III. A. Lorsque les vendeurs peuvent se déplacer, ils ajustent leur position pour maximiser leurs profits en exploitant une clientèle captive.
B. Mais en se rapprochant, ils intensifient la concurrence par les prix, menant à une guerre des prix pour capter plus de clients.
C. S’ils se retrouvent au même endroit, la concurrence les pousse à fixer un prix égal au coût marginal, comme dans le duopole de Bertrand.

Duncan Black, 1948
Modèle de l’électeur médian :
I. Dans un système bipartite, chaque parti capte son électorat extrémiste mais doit séduire l’électeur médian pour gagner.
II. Cette dynamique les conduit à aligner leurs programmes vers le centre, rendant l’issue du scrutin incertaine.
→ Selon le théorème de l’électeur-médian : le gagnant est indéterminé, puisque les deux partis ont adopté le même programme politique.
Arrow, 1951, Social Choice and Individual Values
Théorème d’impossibilité d’Arrow
I. _Confirmation mathématique du *paradoxe de Condorcet* (1785), relatif à la non-transitivité de l’expression des préférences collectives_ :
- Aucun mode de vote assorti d’au moins trois options ne garantit un classement stable des préférences, indépendamment de l’ordre de présentation des choix aux électeurs. ;
2° Aucun système simple n’exprime une préférence sociale collective, à l’exception de la dictature.
II. ⚠️ Combiné au second théorème du bien-être d’Arrow → l’hypothèse de rationalité standard ne permet pas de produire un choix social cohérent, quel que soit le mécanisme utilisé. (cf. Lengaigne et Postel, 2004).
https://www.cairn.info/revue-du-mauss-2004-2-page-388.htm
Haldane, 2012
La stabilité des règles financières limite la flexibilité des décideurs :
- Risque de réponses inadaptées aux situations imprévues ;
- Nécessité de passer d’une régulation fondée sur le risque à une régulation intégrant l’incertitude.
⚠️ Il n’en va pas de même en macroéconomie (cf. Kydland et Prescott, 1977) et en matière de politique monétaire (cf. Barro et Gordon, 1983).
Hoekman, 2015
La stabilisation du commerce international (en % du PIB) depuis les années 2000 :
- S’explique non seulement par des facteurs cycliques ;
- Mais aussi par la fin de la fragmentation des chaînes de valeur mondiales.
⚠️ Pour autant, l’ouverture internationale reste élevée.
Maskin et Tirole, 2004, The Politician and the Judge : Accountability in government
I. La solution technocratique est préférable à la gouvernance politique lorsque l’électorat a peu de chances d’identifier la meilleure décision.
II. La décision technocratique se justifie lorsque :
- La matière est très technique ;
- Les préférences sociales sont stables ;
- Les critères de performance bien définis ;
- Les décisions n’impliquent pas d’arbitrer entre des objectifs antagonistes.
Alesina et Tabellini, 2007
I. La solution technocratique est préférable à la gouvernance politique lorsque l’électorat a peu de chances d’identifier la meilleure décision – notamment en cas de problèmes de crédibilité et d’incohérence temporelle.
II. Pour autant, la politique étrangère ne peut être déléguée à une agence en raison de l’évolution rapide des situations, nécessitant des décisions fréquentes relevant d’un gouvernement légitime.
→ Les préférences sociales y sont instables et les critères de performance absents.
Persson, 1998
Ce modèle analyse l’influence du mécanisme de vote sur la décision budgétaire selon le régime politique, notamment en régime parlementaire où l’initiateur du budget favorise sa circonscription, modère les dépenses pour sa coalition et exclut les autres.
⚠️ Cependant, sa simplicité limite sa portée, car il ne prend pas en compte les préférences des acteurs.
Shleifer et Vishny, 1993, “Corruption”
- Les institutions politiques influencent la corruption des décideurs ;
- Son illégalité et son opacité la rendent plus coûteuse que la taxation.
→ D’où son impact élevé sur le développement des pays moins avancés.
⚠️ Bien que la corruption soit largement reconnue comme un indicateur de mauvaise gouvernance et un frein au développement, son impact est rarement vérifié empiriquement malgré son ampleur mondiale.
FMI, Perspectives de l’économie mondiale, 2013
Entre 1977 et 2012, une hausse d’impôts de 1 % du PIB aux États-Unis entraînait, sur trois ans :
- Une contraction de la production aux États-Unis d’environ 2,5 % ;
- D’environ 1,75 % dans les pays d’Amérique latine .
McCallum, 1995
Démonstration de l’effet frontière
I. Le commerce entre deux provinces canadiennes était en moyenne 22 fois supérieur à celui entre une province canadienne et une province américaine voisine.
II. L’entrée en vigueur au 1er janvier 1994 de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) n’y changerait pas grand chose.
Mayer et Zignano, 2005
Démonstration de l’*effet frontière*
Dans l’Union européenne :
- Où les droits de douane internes ont été entièrement éliminés ;
- Où les obstacles administratifs au commerce sont proscrits ;
→ Les villes et les régions commercent 10 fois plus entre elles quand elles appartiennent à un même État membre.
Chaney, 2014, “The Network Structure of International Trade”
Éliminer tous les droits de douane et barrières réglementaires ne suffit pas à intégrer parfaitement un territoire :
- Des barrières légales et informationnelles invisibles limitent les exportations ;
- Les entreprises privilégiant leurs réseaux existants.
Cœurdacier et Rey, 2008
Illustration du *biais national*
L’année de publication de cette étude :
- 77 % des portefeuilles américains étaient investis en titres américains ;
- Ceux-ci ne représentaient que 33 % des titres mondiaux.
Bhagwati, 2010, A new approach to tackling climate change, Financial Times
Les pays riches sont responsables de l’accumulation des gaz à effet de serre.
Les pays en développement ne devraient pas avoir à réduire leurs émissions, tandis que les pays riches devraient financer des transferts technologiques leur permettant d’y parvenir.
Gollier et Tirole, 2015
Pour traiter les problèmes environnementaux :
- Les négociations débouchant sur les engagements volontaires ne permettent que des déclarations communes et des promesses ;
- Il faut en revenir aux fondamentaux et fixer le juste prix du carbone.
Albert Tucker, 1950, “A two-person dilemma”
Origine de la métaphore du prisonnier pour le dilemme inventé la même année par Dresher et Flood à la Rand Corporation.
Axelrod, 1984
Formalisation de la stratégie « Coopération-réciprocité-pardon »
I. Dans une situation de dilemme du prisonnier, l’équilibre coopératif peut être atteint de manière stable dans des jeux répétés à l’infini, à condition qu’une simple règle de rétorsion soit mise en œuvre :
si l’un des joueurs triche, l’autre répond au tour suivant par l’absence de coopération.
II.Dans un environnement concurrentiel, c’est le joueur qui adopte la stratégie tit-for-tat (« donnant-donnant ») qui emporte la compétition.
Frankel et Rockett, 1988
Si des décideurs coordonnent leurs actions sans partager la même vision économique, les résultats peuvent être inefficaces.
Il est préférable de ne pas se coordonner lorsqu’on ne connaît pas avec certitude les mécanismes économiques.
⚠️ Pourtant, les gouvernements continuent de le faire.
Martin Feldstein, 1988
Mieux vaut éviter une mauvaise coordination plutôt que compromettre de bonnes politiques.
La coordination peut limiter la concurrence économique, masquer les responsabilités des gouvernements locaux, ou se heurter à des contraintes constitutionnelles.
Obstfeld et Rogoff, 2002
La nouvelle macroéconomie keynésienne remet en cause l’utilité de la coordination monétaire, en raison des progrès des institutions nationales de politique monétaire.
Même en économie interdépendante, ces améliorations rendent souvent la coordination inutile, voire contre-productive.
⚠️ Des travaux ultérieurs ont cependant pu remettre en cause ce premier résultat, qui reste discuté.
Jacquet, Pisani-Ferry et Tubiana, 2002, Gouvernance mondiale, rapport du CAE
Les institutions financières et commerciales gagneraient en acceptabilité si des organisations spécialisées disposaient de moyens adaptés aux défis environnementaux, sanitaires et migratoires.
Olson, 1969
Règle de l’équivalence budgétaire (ou financière)
L’administration d’un bien public est plus efficace au niveau le plus proche des usagers.
Les compétences doivent correspondre à l’aire d’incidence géographique pour limiter externalités et inefficacités.
III. ⚠️ Cette règle ne comporte en elle-même aucun biais centralisateur ou décentralisateur.
Oates, 1972, Fiscal federalism
I. Théorème de décentralisation :
Sans externalités ni économies d’échelle, la décentralisation est préférable, car elle répond mieux aux préférences locales.
Les décideurs locaux disposent d’une meilleure information, améliorant l’adéquation entre demande, offre et financement publics.
Alesina, Angeloni, Etro, 2005
L’adhésion à une union économique repose sur un compromis entre hétérogénéité des préférences et externalités positives.
Sans coordination, chaque pays optimise son bien public sans intégrer les bénéfices pour ses partenaires.
En cas de coopération, le mode de décision influence le résultat : majorité simple (électeur médian) ou unanimité (le moins favorable l’emporte).
Egger et al., 2016
Entre 1994 et 2007, l’imposition des classes moyennes a augmenté de 1,5 %, tandis que celle du top 1 % a diminué d’autant dans l’OCDE.
L’ouverture internationale a accentué le poids fiscal sur les salariés, via l’impôt sur le revenu et les cotisations.
Sans coopération fiscale, la concurrence entre États reporte la charge sur le travail non qualifié, moins mobile.
Weingast, 1995
Un État assez fort pour protéger la propriété et les contrats peut aussi confisquer les richesses.
La décentralisation limite ce risque en réduisant le pouvoir étatique.
Emmerson et al., 2016
L’appartenance à un marché unique contribue de façon significative :
- À l’augmentation de la productivité, du PIB et du revenu ;
- Y compris par rapport à une zone de libre échange.
Padoa-Schioppa, 1987
La justification économique du projet d’union monétaire est qu’on ne peut avoir en même temps :
- Un grand marché où biens et capitaux circuleraient sans entraves ;
- Une stabilité des changes ;
- Des politiques monétaires distinctes.**
McDougall (rapport), 1977
I. _Un projet d’union monétaire devrait être accompagné de la mise en place d’un budget à hauteur :
- De 5-7 % du PIB ;
- De 7,5 à 10 % si la défense était inclue.
II. A. Face au risque de chocs asymétriques, une coordination excessive peut être contre-productive.
B. Un fédéralisme budgétaire partiel garantit la flexibilité nécessaire.
Alesina et Wacziarg, 1999
Un modèle compare les externalités positives d’un bien public aux coûts d’une politique homogène pour des pays hétérogènes, à propos des politiques européennes :
- La centralisation se justifie dans certains domaines (ex. politique de pêche) ;
- Elle est excessive ailleurs, notamment sans problème d’externalités ou de passagers clandestins ;
- Elle reste insuffisante pour garantir le bon fonctionnement des marchés.
Van Rompuy et al., 2012
L’intégration des politiques économiques devrait être approfondie pour permettre un meilleur fonctionnement de l’Union économique et monétaire.
Habermas, 2015, The Lure of Democracy
L’Union européenne s’est construite par l’action politique, sans mandat direct des citoyens, sa légitimité reposant sur ses résultats.
Désormais, une gouvernance plus démocratique et responsable est nécessaire pour poursuivre l’intégration économique.
Gali, 1994
I. Un pays à forte intervention publique tend à bénéficier de stabilisateurs automatiques plus puissants.
II. Plus la taille de l’État dans la société et l’économie est importante, moins la croissance varie.
Rodrik, 2008
Un pays faisant face à davantage de risques de fluctuations agrégées, en raison par exemple d’une spécialisation géographique ou sectorielle, tend à préférer une intervention publique relativement importante :
Celle-ci permet une action contracyclique.
Romer et Romer, 2010
Elle recense les décisions budgétaires discrétionnaires annuelles, basées sur les mesures adoptées et non sur une reconstitution ex post.
⚠️ Le risque d’erreurs ou de biais dans l’évaluation budgétaire reste élevé.
Utilisée notamment par le FMI (Devries et al., 2011).
FMI, Devries et al., 2011
Analyse de 17 économies de l’OCDE via la méthode narrative (Romer & Romer, 2010), distinguant les réductions de déficit motivées par la soutenabilité de la dette ou la stabilisation économique.
⚠️ Alternative à la méthode statistique, qui peut mal interpréter l’interaction entre décisions politiques et fluctuations économiques, inversant parfois leur causalité.
Carnot et de Castro, 2015
Plutôt que le solde structurel, cette approche analyse l’effort budgétaire discrétionnaire, reflétant les décisions de réduction du déficit.
Les politiques fiscales récentes ont été plus pro-cycliques qu’estimé par l’approche statistique, aggravant les ralentissements économiques, surtout en période défavorable.
Romer et Romer, 1989, Does Monetary Policy Matter?
Une désinflation entraîne toujours une récession.
Blanchard, 2019
Si le taux d’intérêt réel reste inférieur à la croissance, les normes d’endettement usuelles deviennent obsolètes.
Dans ce cas, la dette publique peut se résorber sans consolidation budgétaire.
Eichengreen, Hausmann et Panizza, 2002
Concept de « péché originel »*
Un pays émergent ou en développement qui s’endette en devise subit un risque de change, affectant sa soutenabilité.
Ses limites d’endettement sont donc plus basses que celles des pays empruntant en monnaie nationale.
* Article intitulé « Le péché originel : le calvaire, le mystère et le chemin de la rédemption ».
Paul Samuelson, 1953, L’Economique
La politique budgétaire renvoie surtout à la fonction de stabilisation.
Elle ajuste impôts et dépenses publiques pour amortir le cycle économique, soutenir l’emploi et limiter inflation ou déflation.
⚠️ Comprise de cette façon, la politique budgétaire est une création du XXe siècle.
Bayoumi, 2000
Le Japon a utilisé la politique budgétaire comme levier monétaire entre 1992-1995 et 1998-2000.
Son efficacité a été limitée par l’absence de réforme bancaire, les banques zombies freinant l’investissement privé.
Cruces et Trebesch, 2013
La durée de l’impact d’un défaut d’État sur l’accès au crédit reste débattue.
Dans les années 1980, on pensait que les marchés « pardonnaient et oubliaient » après un retour rapide au crédit.
En réalité, l’ampleur et la durée de la hausse des taux dépendent de la restructuration, bien que celle-ci soit préférable à l’inaction.
L’Argentine (2001) a vu sa prime de risque exploser jusqu’à l’accord de 2005, impliquant une décote de 76,8 % sur 60 Md$.
⚠️ Ce fut la deuxième plus grande restructuration, dépassée par la Grèce (2012), avec 261 Md$ restructurés.
Reinhart et Trebesch, 2016
Dans le cadre d’une restructuration, les allégements significatifs de la dette publique favorisent la croissance, surtout lorsqu’ils impliquent une réduction nominale de la dette, plutôt qu’un simple ajustement des taux d’intérêt.
Darvas, Pisani-Ferry, Sapir, 2011
I. Les pays de l’OCDE n’ont jamais maintenu durablement des excédents primaires au-delà de 6 % du PIB.
II. Lorsque la Grèce a dû viser des excédents bien supérieurs, les investisseurs ont douté de sa capacité de remboursement.
FMI, 2015, Public debt sustainability analysis
La dette grecque n’était pas soutenable à moins d’un excédent primaire de 3,5 % du PIB, ce qui était considéré comme politiquement irréaliste.
⚠️ En 2016, les pays de la zone euro ont accepté un rééchelonnement de la dette, mais seulement à la fin du programme d’ajustement, en 2018, et à condition que celui-ci soit respecté.
Reinhart et Rogoff, 2010
Étude empirique de la dette publique portant sur 44 pays et deux siècles.
Une étude sur 44 pays et deux siècles montre l’absence de lien systématique entre dette et inflation.
Jusqu’à 90 % de dette/PIB, aucun effet clair sur la croissance, mais au-delà, elle ralentit.
⚠️ Ces conclusions sont débattues, notamment en raison des biais statistiques liés à la Seconde Guerre mondiale.
Hicks, 1937, Mr. Keynes and the “Classics”
L’école de la synthèse néokeynésienne émerge avec le modèle IS/LL*, qui intègre les apports keynésiens dans un cadre classique, mettant l’accent sur l’impact des politiques budgétaire et monétaire sur l’emploi.
* Investment-Savings/Liquidity preference
https://beraud.u-cergy.fr/index_fichiers/un.pdf

Hansen, 1949, Monetary Theory and Fiscal Policy ; 1953, A Guide to Keynes
I. Le modèle IS/LM, extension du modèle IS/LL de Hicks, est une référence fondatrice en macroéconomie.
II. Le modèle IS/LM décrit une économie fermée à prix fixes, où la courbe IS équilibre l’offre et la demande de biens et services, tandis que la courbe LM assure l’équilibre sur le marché monétaire.
𝐼𝑆 ∶ 𝑌 = 𝐶(𝑌,𝑖) + 𝐼(𝑌,𝑖)+𝐺
→ Elle est décroissante.
𝐿𝑀 ∶ 𝑀s = 𝐿’(𝑌) + 𝐿’’(𝑌) + 𝐿’’’(𝑖)
→ Elle est croissante.
L’intersection des courbes IS et LM marque un équilibre général stable, qui n’assure pas nécessairement le plein-emploi, car l’investissement résultant du taux d’intérêt d’équilibre peut rester insuffisant.
http://public.iutenligne.net/economie/simonnet/politique_economique/documents/chapitre4/politique_budgetaire.html

Romer, 2000
I. Les banques centrales pilotent désormais leur politique monétaire par une règle de taux, et non par l’offre de monnaie.
II. Cela rend le modèle IS/LM obsolète, l’ajustement macroéconomique passant davantage par l’inflation que par le niveau des prix.
Ricardo, 1820, “Essay on the Funding System”
Principe de l’équivalence ricardienne
Le coût d’un financement public pour les ménages est identique, qu’il repose sur l’impôt (paiement immédiat) ou sur l’emprunt (épargne anticipant des hausses d’impôts futures).
Barro (Effet Ricardo-Barro), 1974
L’effet des dépenses publiques sur l’économie ne dépend pas de leur mode de financement, qu’il s’agisse d’impôt, d’emprunt ou de création monétaire.
Dans tous les cas, le coût est supporté par les ménages, immédiatement ou à terme.
Si les agents sont rationnels, une relance financée par la dette ou la création monétaire n’augmente pas la consommation, mais l’épargne, en anticipation d’impôts futurs ou d’une dévaluation monétaire.
Mankiw, 2000
L’équivalence ricardienne de Barro (1974) repose sur des hypothèses contestables, supposant des agents rationnels à long terme, des dépenses publiques sans effet sur l’économie, une absence de contrainte d’épargne et une prise en compte illimitée des générations futures.
Ces conditions étant rarement réunies, son application aux politiques budgétaires reste limitée.
Alesina et Ardagna, 2010
Mise en évidence des effets de composition.
I. L’impact d’une variation du déficit dépend du levier utilisé (dépenses ou recettes) et de leur nature.
II. Un ajustement budgétaire rapide par la baisse des dépenses peut, dans certains cas, soutenir la consommation et la production.
⚠️ Cette conclusion est discutée par Guajardo, Leigh et Pescatori (2011).
Haavelmo (théorème de), 1945
I. Dans un cadre keynésien, une hausse conjointe des dépenses et des impôts stimule la production, tandis qu’une réduction simultanée freine l’activité.
II. A. Ce modèle suppose un investissement constant, excluant tout effet d’éviction et minimisant l’impact positif de l’épargne sur la production.
B. Il considère l’offre de travail stable, ignorant les effets négatifs des hausses d’impôts sur l’incitation à travailler.
C. L’hypothèse d’une propension marginale à consommer constante néglige l’effet de substitution entre consommation privée et services publics.
D. Enfin, ce modèle repose sur une économie fermée, alors qu’en réalité, une hausse des dépenses publiques accroît souvent les importations.
Batini et al., 2012
I. Les ajustements budgétaires ont un impact plus fort en période de récession qu’en expansion, où les politiques de dépenses stimulent moins la croissance et favorisent l’inflation.
II. Une consolidation budgétaire débutée en récession peut aggraver la crise, surtout si elle repose sur des coupes budgétaires importantes.
III. Une approche graduelle, combinant baisse des dépenses et hausses d’impôts, réduit mieux le ratio dette/PIB, surtout avec un soutien monétaire baissant les taux d’intérêt.
IV. Les multiplicateurs des dépenses publiques sont nettement plus élevés que ceux des impôts, atteignant 2,6 en zone euro contre 0,35 pour une hausse d’impôts.
Batini et al., 2014 ; Mineshima et al., 2014
Synthèses des résultats sur le multiplicateur keynésien budgétaire en pratique
I. A. Les caractéristiques de l’économie qui affectent négativement le multiplicateur budgétaire :
- L’ampleur du secteur public (pression fiscale) ;
- Le niveau de dette publique ;
- Le degré d’ouverture ;
- La flexibilité du taux de change
B. Les caractéristiques de l’économie qui affectent positivement le multiplicateur budgétaire :
- La rigidité du marché du travail ;
- La taille de l’économie, positivement.
II. L’impact de la politique budgétaire varie selon les conditions économiques :
1° Aux États-Unis, le multiplicateur des dépenses budgétaires varie de zéro en période de forte croissance à 1,5 dans les années de récession (Auerbach et Gorodnichenko, 2012) ;
2° Le multiplicateur budgétaire est plus faible lorsque la situation des finances publiques conduit les agents économiques à penser que le remboursement de la dette publique va directement peser sur eux (Sutherland, 1997).
III. Le type de consolidation budgétaire retenu affecte le multiplicateur budgétaire :
1° pour des consolidations budgétaires fondées sur la baisse des dépenses, les effets négatifs sont moins marqués, voire inexistants (Alesina et Ardagna, 2010) ;
2° celles fondées sur des hausses d’impôt ont des effets négatifs (Alesina et al., 2017) ;
⚠️ Le III est discuté par Guajardo, Leigh et Pescatori (2011).
Kopits et Symansky, 1998
I. Huit critères définissant la règle budgétaire « idéale » :
- Définition claire ;
- Transparence des comptes publics ;
- Simplicité ;
- Flexibilité ;
- Facilité à mettre en œuvre et à sanctionner ;
- Pertinence par rapport aux objectifs poursuivis ;
- Cohérence avec les autres objectifs des règles de politique publique ;
- Accompagnement par d’autres politiques efficaces.
II. Exemples de règles budgétaires :
- Interdiction de financer la dette par de l’émission de monnaie centrale ;
- Fixation du plafond de la dette publique à 60 %.
Hayek, 1976, Denationalization of Money - The argument refined
Proposition d’une régulation de l’offre de monnaie par le marché.
L’auteur s’appuie sur les expériences de free banking en Ecosse au XVIIIe siècle et aux États-Unis de 1836 à 1866.
De Grauwe et Ji, 2013
I. L’interdiction pour la BCE de monétiser la dette des États rend les obligations volatiles et expose la zone euro à des crises auto-réalisatrices.
II. Si les marchés anticipent une hausse continue de la dette malgré l’austérité, ils exigent une prime de risque plus élevée.
III. En 2010-2011, les écarts de taux n’ont pas diminué avec la consolidation budgétaire, suggérant une causalité inverse entre hausse des taux et rigueur budgétaire.
⚠️ La BCE a répondu en lançant les OMT le 6 septembre 2012, suivant le “whatever it takes” de Mario Draghi du 26 juillet.
Buchheit et al., 2013
Un cadre institutionnel équilibré est essentiel lors d’une restructuration de dette souveraine. Un coût excessif pour l’État pénalise ses citoyens et incite à différer l’échéance. À l’inverse, une restructuration trop aisée encourage l’endettement et augmente les primes de risque exigées par les prêteurs.
Coenen et al., 2012, Effects of Fiscal Stimulus in Structural Models (I)
I. Le multiplicateur budgétaire est plus élevé lorsque la politique monétaire reste accommodante (taux directeur inchangé).
II. En revanche, il diminue si la banque centrale augmente ses taux, atténuant ainsi l’effet de la relance budgétaire.
Coenen et al., 2012, Effects of Fiscal Stimulus in Structural Models (II)
Le multiplicateur des dépenses est proche de l’unité dans les grandes économies modérément ouvertes.
Ainsi, aux États-Unis, une hausse temporaire de l’investissement public, avec une réaction monétaire endogène, le fait varier entre 0,9 et 1,3.
Alesina et Ardagna, 1998
Une période de consolidation budgétaire est :
- une année où le solde primaire corrigé des variations cycliques s’améliore d’au moins 2 points de PIB ;
- ou une période de deux années consécutives où il s’est amélioré d’au moins 1,5 point du PIB chaque année.
Perspectives économiques de l’OCDE, juin 1996
Un assainissement budgétaire est significatif s’il améliore le solde structurel annuel d’au moins 3 points de PIB sur plusieurs années.
Il est souvent mené en période de croissance et a des effets keynésiens :
- Hausse du chômage immédiate ;
- Ralentissement de la croissance à court terme.
Toutefois, son impact récessif est fréquemment par un ou plusieurs des conséquences suivantes : assouplissement monétaire, désinflation, hausse de l’épargne et amélioration du solde extérieur.
Zeng, 2014, “Determinants of the Primary Fiscal Balance”
I. Les excédents primaires sont plus faciles à atteindre qu’à maintenir sur une longue période.
II. Sur une période de 50 ans :
- Seuls 37 pays sur 87 (40 %) ont enregistré un excédent primaire supérieur à 5 % du PIB sur une année ;
- Seuls 14 pays sur 87 ont enregistré des excédent primaires moyens de plus de 5 % du PIB sur cinq ans ou plus.
📚 Cet élément a été pris en compte dans les discussions sur la solvabilité de la Grèce au début des années 2010.
Sutherland, 1997
Le multiplicateur keynésien dépend du niveau de la dette publique et de la répartition future des impôts.
Tant que la dette reste modérée, les agents considèrent que l’ajustement pèsera sur les générations futures, soutenant ainsi la dépense publique.
Au-delà d’un certain seuil, ils anticipent une hausse d’impôts, réduisent leur consommation et transforment l’effet budgétaire en facteur récessif, surtout en période de crise.
Corsetti et al., 2012
Une probabilité accrue de restructuration de la dette souveraine élève la prime de risque exigée par les prêteurs, aggravant le risque de défaut.
Tant que les taux directeurs restent contrôlables, la banque centrale peut compenser, mais une fois à zéro, elle perd ce levier.
Les taux directeurs à zéro amplifient la récession pour les pays fragiles (cf. Sutherland, 1997), et renforcent le multiplicateur budgétaire pour les économies plus stables.
Mundell-Flemming (Modèle de) :
Mundell, 1962, “The appropriate Use of Monetary and Fiscal Policy for Internal and External Stability” ;
Flemming, 1962, “Domestic financial policies under fixed and floating exchange rates”
Mundell, 1968, International Economics
I. Ce prolongement du modèle IS-LM montre que le régime de change influence fortement le multiplicateur keynésien.
II. Avec une forte mobilité des capitaux, le multiplicateur est faible en change flottant (appréciation de la monnaie et perte de compétitivité) mais élevé en change fixe (moins d’éviction de la demande).
III. Lorsque les capitaux sont peu mobiles, le multiplicateur est élevé en change flottant (dépréciation et soutien aux exportations) mais faible en change fixe (perte de réserves et contraction monétaire).
IV. Le degré de développement financier, d’ouverture et de mobilité des capitaux influence aussi le multiplicateur keynésien.
V. Ainsi, l’efficacité des politiques budgétaires dépend du régime de change et du contexte économique du pays concerné.
Cour et al., 1996, The Cost of Fiscal Retrenchment Revisited: How Strong is the Evidence?
_Une période de resserrement budgétaire est expansionniste si :
Le taux de croissance moyen du PIB en écart à celui du G7, corrigé de l’écart entre les taux de croissance potentielle, est positif sur l’ensemble de la période de consolidation.
⚠️ Nombre d’épisodes de contractions budgétaires expansionnistes plutôt modeste, quelle que soit l’étude considérée.
Alesina et Perotti, 1995
I. Une consolidation budgétaire est réussie une année donnée si, trois ans plus tard, le ratio dette brute/PIB a baissé d’au moins 5 points.
Elle s’accompagne généralement d’une hausse de l’investissement, d’un gain de compétitivité sur le coût du travail, d’une accélération de la croissance et d’une baisse du chômage.
Alesina et al., 2017
Une analyse narrative sur 3 500 mesures dans l’OCDE montre que les consolidations budgétaires réduisent la production, avec un impact plus marqué pour les hausses d’impôts que pour les coupes budgétaires. Les ajustements basés sur les dépenses ont des effets négatifs limités, voire inexistants, tandis que ceux reposant sur les impôts freinent fortement le PIB.
Bundesbank, 2016
I. Modèles rejetant l’idée qu’une relance budgétaire allemande présenterait des externalités positives pour les pays voisins.
II. Ainsi, dans l’hypothèse d’une hausse de l’investissement de 1 % du PIB en Allemagne, après 2 ans, augmenteraient :
- De 0,45 % le PIB allemand et de 0,2 % le PIB néerlandais ;
- Mais seulement de 0,05 % celui de la Grèce et de 0,02 % celui de l’Espagne.
⚠️ Ces simulations sont discutées par Blanchard, Erceg et Lindé (2017).
Blanchard, Erceg et Lindé, 2017
Lorsque le taux d’intérêt d’équilibre est négatif, une expansion budgétaire dans le cœur de l’union monétaire ne provoque pas de hausse des taux. Les pays périphériques en bénéficient, leur gain représentant environ la moitié de l’effet observé dans les pays du cœur, contredisant ainsi la thèse de la Bundesbank (2016).
Bénassy-Quéré et al., 2018, How to reconcile risk sharing and market discipline in the euro area
Proposition de réforme du cadre budgétaire européen :
- Règle de cible de dépense primaire nette, ajustée selon le niveau d’endettement ;
- Fonds de stabilisation de la zone euro, financé par les États, pour absorber les chocs majeurs ;
- Renforcement de l’union bancaire avec une assurance des dépôts commune et une limitation du risque de concentration des banques sur leur propre souverain ;
- Actif sûr commun pour offrir une alternative aux obligations souveraines.
- En dernier recours, procédures de restructuration des dettes souveraines.
Tabellini et Alesina, 1990, “Voting on the budget deficit”
Les désaccords partisans sur la dépense publique et l’incapacité des électeurs à contraindre les décisions futures génèrent des incohérences temporelles.
Chaque gouvernement privilégie ses priorités budgétaires, créant un excès de dépenses inefficaces, tandis qu’une alternance fréquente aggrave les déséquilibres d’allocation des ressources.
Eldbadawi, Schmidt-Hebbel et Soto, 2015
I. Les facteurs favorisant l’adoption de règles budgétaires :
- Un PIB par habitant élevé ;
- Des institutions démocratiques ;
- Une structure fédérale ;
- L’existence de contre-pouvoirs ;
- La stabilité politique.
- Un taux de dépendance vieillesse élevé ;
- L’ouverture financière ;
- Un régime de change fixe ou de ciblage de l’inflation.
Auerbach et Gorodnichenko, 2012
L’impact de la politique budgétaire varie au cours du temps, selon les conditions économiques.
Aux États-Unis, l’impact de la politique budgétaire varie avec le cycle – le multiplicateur des dépenses passe de zéro en forte croissance à 1,5 en récession.
Le coût de la consolidation budgétaire plus élevé en temps de crise.
Cagan, 1956
I. A. Proposition d’un modèle de l’hyperinflation, à partir de l’étude de ce phénomène dans 7 pays européens.
B. L’auteur propose une définition canonique de l’hyperinflation, qui débute dans un pays lorsque l’augmentation mensuelle des prix excède 50 % par mois (soit 12 875 % par an) et s’achève le mois qui précède celui durant lequel l’inflation repasse en-dessous de ce taux de manière pérenne (au moins un an).
II. Lorsqu’un État monétise son déficit, les agents réagissent en convertissant leur monnaie en biens physiques, alimentant ainsi l’inflation, qui ne peut être réduite qu’en limitant ce financement.
II. ⚠️ Ce modèle repose sur des hypothèses restrictives, supposant une offre de monnaie exogène et des anticipations adaptives, où les événements futurs influencent peu les décisions présentes.
* Cf. Valérie Leliève, 1995.
Rogoff, 2003, “Globalization and Global Disinflation”
I. L’inflation mondiale a chuté de 30 % à 4 % en dix ans, grâce à l’indépendance accrue des banques centrales, leur approche plus conservatrice et de meilleures stratégies monétaires et de communication.
II. Des facteurs externes ont également joué, notamment l’intégration des économies émergentes, réduisant le pouvoir des insiders, et une concurrence accrue, limitant les rigidités nominales et l’inflation d’équilibre.
IV. Cette désinflation a touché même les pays sans banques centrales réellement indépendantes, confirmant l’impact des dynamiques globales.
Goodhart, 1988
D’abord créées pour financer les États en difficulté, les banques centrales ont obtenu en contrepartie le monopole d’émission monétaire, avant d’assumer la stabilité financière des banques et des marchés.
Rogers et al., 2015
Les mesures d’assouplissement quantitatif augmentent les prix des actifs en raison des anticipations de marché, qui entraînent une dépréciation de la monnaie concernée.
David Hume, 1752, deux essais :
- Of Money*
- Of Interest*
L’offre de monnaie n’influence pas durablement les variables réelles de l’économie. Ainsi, doubler la masse monétaire ou adopter une monnaie à la valeur intrinsèque plus élevée (or contre argent) affecte uniquement les variables nominales, sans impact à long terme sur l’activité réelle.
Robert Lucas, 1995
Dans la lignée de Hume, souligne le lien entre croissance monétaire et inflation à long terme.
Si la quantité de monnaie n’affecte pas durablement les valeurs réelles, les chocs monétaires ont un effet selon qu’ils sont anticipés ou non : une expansion prévue est neutre, tandis qu’une surprise monétaire stimule ou freine la production.
Aucun modèle des années 1970 n’a correctement intégré les anticipations face aux chocs monétaires, justifiant l’orientation de Kydland et Prescott vers l’étude des variables réelles (1982).
L’économie doit encore approfondir l’analyse des spécificités de la monnaie pour mieux comprendre ses effets sur l’activité.
Barro, 1995
Une étude sur une centaine de pays (1960-1990) montre qu’une inflation élevée et instable freine la croissance.
Une hausse de 10 points d’inflation réduit la croissance de 0,3 à 0,4 point, surtout en cas d’inflation élevée.
En revanche, une légère augmentation, de 2 à 3 %, n’a pas d’impact durable sur la croissance.
Robert Lucas, 1972, “Expectations and the neutrality of money”
Développement de la notion d’information imparfaite
Les producteurs observant mieux leurs propres prix que ceux de l’économie :
- En cas de hausse du niveau général des prix, ils la confondent avec une augmentation du prix relatif de leurs produits ;
- Ils réagissent alors en accroissant leur offre, jusqu’à réaliser leur erreur.
⚠️ Il ne s’agit donc pas d’une attitude irrationnelle.
Edmund Phelps, 1972, “The statistical theory of racism and sexism”
La théorie de la discrimination statistique explique comment les entreprises, face à une information imparfaite sur les qualifications des candidats, utilisent des critères visibles comme le sexe ou la race pour estimer leur productivité.
Cette approche repose sur des jugements statistiques où les employeurs projettent sur un individu des caractéristiques supposées de son groupe, influençant ainsi son salaire.
Toutefois, ce modèle ne permet pas d’expliquer les écarts salariaux moyens entre hommes et femmes, limitant son interprétation des inégalités observées.
Stanley Fischer, 1977, “Long-Term Contracts, Rational Expectations, and the Optimal Money Supply Rule”
Les salaires étant fixés par contrats sur des périodes longues, ils ne s’ajustent pas immédiatement aux décisions monétaires.
Ainsi, bien que neutre à long terme, la politique monétaire peut influencer la production à court terme en raison de cette rigidité.
John Taylor, 1980, “Aggregate Dynamics and Staggered Contracts”
La négociation salariale vise à préserver les écarts salariaux entre professions et industries, reflétant la volonté des travailleurs de maintenir leur position relative dans le temps.
Les syndicats fixent les salaires en intégrant des anticipations sur l’évolution des prix, ce qui introduit une rigidité nominale, empêchant un ajustement immédiat en cas de variation des prix.
Cette rigidité est atténuée par des négociations syndicales échelonnées, mais le décalage d’ajustement des salaires face aux chocs monétaires peut temporairement perturber la production et l’emploi, ouvrant ainsi un espace pour la politique monétaire.
Fischer 1977 ; Taylor, 1980
Les contrats salariaux empêchent une réaction immédiate des entreprises aux chocs économiques, l’ajustement ne se faisant qu’à la renégociation suivante. Cet emboîtement des contrats explique pourquoi les chocs monétaires, même anticipés, influencent l’activité à court terme.
Akerlof et Yellen, 1985
Les coûts d’ajustement des prix, bien que faibles, peuvent retarder leur modification, même en cas de variation de la demande.
Cette rigidité des prix entraîne des fluctuations importantes de la production et contribue aux cycles économiques.
Friedman, 1956
Description :
- de la nécessité pour la banque centrale de surprendre les agents économiques pour mener sa politique monétaire ;
- de l’inutilité de cette stratégie à court terme ;
- et de ses dangers à long terme, en conduisant à l’hyperinflation.
Guajardo, Leigh et Pescatori, 2011
Les auteurs étudient plusieurs économies de l’OCDE au moyen d’une approche narrative (cf. Romer et Romer, 2010).
Les consolidations budgétaires dépriment généralement l’activité, sauf exceptions.
L’intensité de la consolidation est mesurée par l’évolution du solde primaire ajusté du cycle, qui ne reflète pas uniquement les mesures d’assainissement budgétaire.
En effet, cette évolution intègre aussi des politiques anti-surchauffe, des mesures de soutien et des fluctuations des prix d’actifs, biaisant ainsi l’interprétation des consolidations budgétaires.
Sidrauski, 1967
Hypothèse de superneutralité de la monnaie
I. Sous la double hypothèse :
1° d’anticipations rationnelles (c’est-à-dire dépourvues d’erreurs systématiques) ;
2° d’ajustement immédiat des marchés ;
→ Les individus intégrent dans leurs revendications salariales toute hausse future de la monnaie induite par la politique monétaire.
II. Dans ces conditions, les effets de la politique monétaire seront inexistants, la rendant inefficace pour lutter contre le chômage, même à court terme.
Calvo, 1983
Modèle d’ajustement partiel des prix
Ce modèle suppose que la durée moyenne des prix est fixe, mais que chaque entreprise ajuste ses prix de façon aléatoire.
En conséquence, les prix ne s’ajustent que partiellement à tout instant, et leur adaptation est plus lente que dans les modèles précédents.
Il en résulte qu’une politique monétaire est plus efficace qu’une relance budgétaire pour stabiliser l’économie.
Bien qu’également efficace, la politique budgétaire n’est pas optimale au sens de Pareto, car elle ne maximise pas le bien-être économique.
Mankiw, 1985
I. Les entreprises ajustent leurs prix peu souvent, ce qui est optimal individuellement (coûts de menu) mais sous-optimal macroéconomiquement, car il néglige les externalités de demande, entraînant des pertes de bien-être.
II. Sans réaction monétaire, les chocs de demande dégradent production et emploi. Les entreprises ajustent trop leurs prix en expansion et pas assez en crise, freinant la reprise. Une politique monétaire active est nécessaire.
III. Ce modèle reste keynésien, malgré l’optimisation des agents et des prix, car les rigidités entravent l’ajustement économique.
IV. Il n’existe pas d’opposé à la Grande Dépression : les périodes de croissance, comme les années 1960 aux États-Unis, ne compensent pas une crise majeure.
E. Phelps, 1967 ; M. Friedman, 1968
Théorie de la courbe de Phillips augmentée des anticipations
La courbe de Phillips suggère qu’à taux de chômage constant, des anticipations d’inflation accélèrent la hausse des salaires et des prix.
À long terme, les salaires s’ajustent aux prix pour atteindre un équilibre sur le marché du travail.
L’équation s’exprime ainsi : chômage = taux naturel – a*(inflation constatée – anticipée).
Barro et Gordon, 1983 (II)
Le biais inflationniste apparaît quand la politique monétaire compense un niveau de production jugé insuffisant, en visant à réduire le chômage par un écart de production positif.
Les ménages, anticipant l’inflation, intègrent celle-ci dans leurs revendications salariales, neutralisant ainsi les efforts de la banque centrale.
Conséquemment, l’inflation augmente sans qu’un chômage durablement plus faible ne se concrétise.
Carl Walsh, 1995
Le recours à un contrat d’intéressement pour le gouverneur de la banque centrale est une solution pour atténuer le biais inflationniste, en alignant les intérêts du gouvernement (principal) et de la banque centrale (agent).
Rajan, 2005
I. Les taux d’intérêt bas incitent les investisseurs à prendre plus de risques pour compenser l’ajustement lent des rendements de référence.
II. La confiance dans les marchés financiers stimule la demande, favorisant l’émergence d’intermédiaires dont la taille et le risque accru amplifient la volatilité macroéconomique.
📚 L’article avait fait débat à l’époque de sa publication, mais s’est révélé presque prophétique en 2008.
Borio, 2014
I. La politique monétaire, conçue pour relancer l’économie en facilitant l’accès au risque, induit un aléa moral chez les investisseurs.
II. Elle engendre par ailleurs les prémices de crises financières et renforce les cycles à long terme.
Bernanke et Gertler, 1995
I. Le canal du crédit bancaire complète la transmission de la politique monétaire via le taux d’intérêt.
Il repose sur l’asymétrie d’information entre créanciers et débiteurs, évitant ainsi l’antisélection lors de hausses de taux.
Une liquidité abondante incite les banques secondaires à prêter davantage, stimulant investissement et consommation, l’effet étant inversé en cas de resserrement monétaire.
Kiyotaki et Moore, 1997
Le montant de collatéral limite l’endettement des entreprises.
Une hausse du taux réel renforce les contraintes de crédit.
Cela augmente le coût du capital et le rationnement du financement.
Ces contraintes entraînent un sous-investissement par rapport à l’optimum.
À l’inverse, une baisse du taux améliore l’accès au crédit.
Eggertsson et Krugman, 2012
I. Dans une situation de fort endettement privé, les pressions déflationnistes augmentent la valeur réelle de la dette et son poids sur le revenu disponible des ménages (cf. Fisher, 1933).
II. Dans ce contexte, :
- une hausse des dépenses publiques, consistant en des baisses d’impôts et des transferts de revenu ;
- peut avoir un effet multiplicateur supérieur à l’unité, à condition que le bénéfice en soit bien dirigé sur les ménages endettés.
Campbell et al., 2012
Les auteurs décrivent deux types de guidage des anticipations des agents par la banque centrale.
Le « guidage delphique » implique la communication des prévisions et intentions futures ;
Le « guidage odysséen » engage la banque à suivre une certaine trajectoire pour les taux d’intérêt, parfois à l’encontre de ses règles habituelles.
Woodford, 1995, “Price Level Determinacy”
L’effacement progressif de la frontière entre monnaie et actifs financiers rend le contrôle de la masse monétaire impossible.
Proposition de repenser la détermination du niveau des prix en substituant la théorie quantitative de la monnaie par une « théorie quantitative de la dette publique ».”.
Cette approche mise sur la gestion de la dette comme levier principal de stabilité économique.
Woodford, 2003
La dominance budgétaire désigne la situation où la politique monétaire est subordonnée au financement effectif du budget de l’État.
Pour sortir de ce schéma, recommandation :
Accorder une indépendance à la banque centrale afin qu’elle adopte une politique de taux inspirée de la règle de Taylor, tandis que les autorités budgétaires imposent un plafond au niveau de la dette publique.
Eggertsson et Woodford, 2003
Un assouplissement quantitatif n’affecte pas la demande de monnaie, car la société a besoin de liquidités et sans coût d’opportunité quand les taux s’approchent de zéro.
Toutefois, il facilite le financement budgétaire et modifie les anticipations de marché.
Curdia, Vasco et Woodford, 2011
L’analyse montre qu’un assouplissement monétaire absorbant le risque de crédit peut soutenir le volume des prêts et améliorer le bien-être, mais qu’au-delà d’un certain seuil, l’assouplissement quantitatif n’assure plus la stabilité macroéconomique.
Ainsi, les avoirs en actifs de la banque centrale servent uniquement à corriger les imperfections et inefficacités des marchés financiers.
Carpenter et Rodgers III, 2004
I. Une contraction monétaire aux États-Unis a davantage d’impact sur le taux d’emploi des minorités et des jeunes (particulièrement les jeunes Afro-Américains) que des autres catégories de travailleurs.
II. ⚠️ Cet effet s’explique par une baisse des emplois proposés et non par la diminution de l’offre de travail proposée par ces catégories de population.
Romer et Romer, 1999
L’inflation non anticipée réduit les inégalités.
Monetary policy and the well-being of the poor
Doepke et Schneider, 2006
En cas d’inflation :
- Les principaux perdants sont les ménages à la fois âgés et riches ;
- Les principaux gagnants sont des jeunes appartenant à la classe moyenne avec des emprunts immobiliers à taux fixe.
Coibion et al., 2012
Étude portant sur les données américaines dans la période 1980-2008 :
- Une politique monétaire restrictive accroît les inégalités de revenus et de consommation, en diminuant systématiquement les revenus du travail, le revenu global, la consommation et l’ensemble des dépenses ;
- En revanche, une politique expansionniste les réduit.
Claeys et al., 2015
Les politiques monétaires ultra-expansionnistes stimulent l’activité économique et rehaussent la valeur de l’immobilier des classes moyennes, mais elles font aussi grimper les prix des actifs, profitant surtout aux riches à court terme.
Par conséquent, la politique monétaire doit se concentrer sur son mandat, tandis que les réformes fiscales et sociales compensent l’augmentation des inégalités à long terme.
Wicksell, 1898
Le taux d’intérêt naturel, garantissant l’équilibre épargne-investissement, correspond à la rentabilité de l’investissement, tandis que le taux monétaire, défini par la politique de la Banque centrale, reste indépendant. Leur alignement stabilise l’inflation, la production et l’emploi, alors qu’un écart induit expansion ou récession, en fonction de l’élasticité du système financier.
Alesina et Summers, 1993
Selon cette étude comparative :
Dans les pays industrialisés, le taux d’inflation sur longue période a été négativement corrélé au degré d’indépendance de la banque centrale.
Acemoglu et al., 2008
I. Dans les pays en développement, l’efficacité de l’indépendance de la banque centrale dépend aussi de la qualité globale des institutions.
Le ciblage d’inflation par une banque centrale indépendante n’améliore pas le cadre institutionnel économique si la qualité institutionnelle politique n’est pas suffisante.
II. De bonnes institutions politiques ne garantissent pas pour autant le succès de réformes économiques.

Eijffinger et Geraats, 2006
I. La transparence de la banque centrale est définie comme « la mesure dans laquelle la banque centrale rend publique l’information relative à son processus de prise de décision ».
II. Elle se décline en plusieurs dimensions :
politique (objectifs de politique monétaire), économique (données, prévisions, modèles), procédurale (méthodes de décision), de mise en œuvre (compte-rendus et votes détaillés) et opérationnelle (divulgation des erreurs et événements inattendus).
Dincer, Eichengreen et Geraats, 2019
La transparence des banques centrales, développée principalement entre 1998 et 2010, repose sur quatre raisons essentielles :
contrepartie de leur indépendance pour renforcer le contrôle démocratique, réponse à la demande citoyenne de clarté gouvernementale, optimisation de l’efficacité des politiques monétaires en orientant les anticipations accroissement de la crédibilité de leurs engagements.
Rogoff, 1985
La coopération internationale en politique monétaire risque d’être contre-productive, car suivre une règle crédible compromet l’indépendance des banques centrales.
En situation non coopérative, la politique est tiraillée entre un biais inflationniste et un biais déflationniste visant à déprécier le taux de change.
En coopération, seul l’inflation persiste, réduisant le bien-être commun, ce qui fait de l’équilibre non coopératif un moindre mal.
Draghi, 2014
Au milieu des années 2010, difficile pour la BCE d’atteindre son objectif de moyen terme d’une inflation inférieure, mais proche de 2 %.
Appel à une politique budgétaire agrégée moins restrictive dans la zone euro pour se coordonner avec la politique monétaire
⚠️ Une telle coordination est cependant difficile à atteindre, du fait d’objectifs différents entre les autorités budgétaires nationales.
E. Phelps, 1973
Il peut donc être optimal, pour minimiser la distorsion induite par les agents se soustrayant à l’impôt, de maintenir une inflation modérée dans un pays où l’économie informelle est relativement développée.
Summers, 2014
En cas de crise grave, il se peut que le taux d’intérêt naturel* devienne négatif.
Dans de telles circonstances, une inflation nulle ou négative rend impossible pour la banque centrale de stabiliser l’économie.
* le taux d’intérêt réel qui assure l’équilibre épargne-investissement à un niveau de PIB correspondant au plein-emploi, autrement dit qui maintient la production à son niveau potentiel (Knut Wicksell, 1898).
Bruno et Easterly, 1996
Étude empirique portant sur la relation entre inflation et croissance à partir de l’après-guerre :
- Pas de preuve d’une relation en dessous d’une inflation annuelle inférieure à 40 %, définie comme le niveau de l’hyperinflation ;
- Au-delà, la croissance est affectée négativement à court et moyen terme ;
- Lorsque les épisodes d’hyperinflation sont courts, ils sont sans conséquence sur la croissance dans le long terme.
Akerlof, Dickens et Perry, 1996
I. Lorsque les salaires nominaux sont rigides à la baisse et que l’inflation est proche de zéro, un peu d’inflation permet de réduire le taux de chômage → dla courbe de Philips n’est alors pas verticale à long terme.
II. ⚠️ Le point de vue soutenu dans le courant NAIRU n’est donc pas valable lorsque l’inflation se situe à un niveau très bas.
Akerlof, Dickens et Perry, 2000
La relation entre inflation et chômage naturel varie avec la volatilité de l’inflation : une inflation basse et stable permet de réduire le chômage sans faire monter les prix. Les auteurs recommandent une fourchette de 1,5 à 4 % pour optimiser l’emploi. Ils soulignent que des biais heuristiques issus de modèles simplistes faussent la perception du NAIRU. Ces observations invitent à repenser la modélisation des attentes en économie.
Lars Svensson, 1999, 2001
L’auteur distingue trois règles fixant un taux d’intérêt ciblant l’inflation : instrumentales, se basant sur des variables macroéconomiques (inflation, écart de production) ; de ciblage strict, minimisant une perte fondée sur l’écart entre inflation prévue et objectif ; et intermédiaires, contrôlant un indicateur tel que les agrégats monétaires ou le taux de change.
Greenspan, 1999
Selon la Doctrine Greenspan, les banques centrales n’ont pas l’expertise pour évaluer la surévaluation des actifs et ne doivent pas viser leur stabilité, préférant laisser les marchés s’auto-réguler, tout en intervenant en cas de formation d’une bulle.
De plus, la régulation bancaire freine l’innovation et l’autogestion efficace des risques.
Gruen, Plumb et Stone, 2003
Un argument fort contre le ciblage des prix des actifs est que, bien que les taux d’intérêt influencent la production réelle avec des retards longs et variables, ils peuvent instantanément faire éclater une bulle financière, entraînant une chute de la production par des effets de richesse négatifs.
En réaction à l’effondrement d’une bulle, une baisse des taux pour soutenir l’activité retarderait le retour des prix à leur valeur fondamentale, démontrant qu’il n’existe pas de réponse de politique monétaire universelle, mais qu’elle doit être adaptée aux circonstances.
CJUE, 2015, Gauweiler et a.
I. « [U]ne mesure de politique monétaire ne saurait être assimilée à une mesure de politique économique en raison du seul fait qu’elle est susceptible de produire des effets indirects pouvant également être recherchés dans le cadre de la politique économique » ;
II. Le programme d’achat d’obligations souveraines sur les marchés secondaires (Outright Monetary Transaction - OMT) par la Banque centrale européenne :
- n’excède pas ses attributions relatives à la politique monétaire ;
- ne viole pas l’interdiction du financement monétaire des États membres.
Cour constitutionnelle allemande, 5 mai 2020
La décision de la BCE en janvier 2015 de lancer le PSPP sur le marché secondaire a conduit la Cour constitutionnelle allemande à estimer, pour la première fois, que la BCE et la Cour de justice (arrêt Weiss, 2018) avaient agi ultra vires. Par conséquent, le gouvernement fédéral et le Bundestag doivent désormais veiller à ce que la BCE réexamine le PSPP selon le principe de proportionnalité, afin de garantir que ses achats d’obligations souveraines restent dans le cadre de son mandat.
Merton, 1995
Pour les économistes orthodoxes, la finance soutient le fonctionnement des économies de marché modernes :
- En lissant les revenus au cours du temps ;
- En mutualisant l’épargne et en l’orientant vers des investissements productifs ;
- En traitant et en diffusant l’information ;
- Enfin, en diversifiant le risque.
Dermirgüç-Kunt et Levine, 1999
I. Les systèmes financiers sont généralement plus développés dans les pays riches :
- Les banques et intermédiaires financiers sont de plus grande taille ;
- Les marchés d’actions sont plus profonds.
II. Des systèmes financiers fondés sur les marchés d’actions plutôt que sur les banques sont favorisés par :
- Une tradition juridique anglo-saxonne ;
- De bonnes normes comptables ;
- De faibles niveaux de corruption ;
- Une forte protection des droits des actionnaires ;
- L’absence d’assurance des dépôts.
Reinhart et Rogoff, 2009
Étude quantitative des crises financières, distinguant les crises de la dette – longtemps prévalentes, échappées aux pays développés dès le XIXe siècle – des crises bancaires, qui touchent tous les pays. Ces dernières précèdent une forte hausse des prix d’actifs, liées à la libéralisation financière et aux afflux de capitaux, entraînant récessions et une hausse moyenne de 86 % de la dette publique.
Nécessité d’intégrer la dette intérieure pour expliquer défauts de paiement et crises inflationnistes.
Cœuré, 2014
Le secteur financier pourrait avoir une taille optimale. En effet, un développement excessif induit une mauvaise allocation du capital humain, car de nombreux jeunes docteurs en mathématiques préfèrent les salles de marché, attirés par des salaires élevés, au détriment de la recherche fondamentale. Ce phénomène de brain drain, bien que rationnel individuellement, nuit à l’innovation et au progrès sociétal. Ainsi, la relation entre profondeur financière et bien-être économique suivrait une courbe en cloche.
Schumpeter, 1939
C’est grâce aux paris de la finance que les innovations radicales peuvent être concrétisées :
- dans les structures de la production ;
- et dans les modes de vie.
King et Levine, 1993
Une étude empirique sur 77 pays (1960–1989) montre que le développement financier – mesuré par le crédit privé, les transactions boursières et la taille des intermédiaires – est fortement corrélé à la croissance future du PIB par habitant, à l’accumulation de capital et à son efficacité, faisant du développement financier en 1960 un bon indicateur de la croissance des trente années suivantes.
Aghion et al., 2005
Selon ce modèle, les pays ayant atteint un seuil critique de développement financier convergent en termes de croissance, l’effet étant moins marqué dans les économies développées. Dans les pays moins avancés, une finance étendue permet de mieux exploiter les transferts technologiques, nécessaires pour repousser la frontière de production. Ainsi, l’expansion financière stimule la croissance initiale, mais son impact s’affaiblit ensuite.
Zingales, 2015
Question de savoir si la finance contribue au bien-être social :
- La recherche en finance est considérée comme partiellement responsable de la crise de 2008 ;
- Les économistes sous-estiment souvent les rentes générées par le développement financier ;
- Jusqu’aux subprimes, nul n’imaginait que les innovations pouvaient être exploitées pour tromper des investisseurs moins avertis.
Arcand et al., 2012
I. L’effet marginal sur la croissance du crédit au secteur privé devient négatif au-delà de 110 % du PIB, un niveau globalement atteint au début des années 1990.
II. À des niveaux moins avancés de développement économique, il est naturel de s’attendre à ce que l’effet marginal de l’accroissement du crédit soit positif.
Easterly, Islam et Stiglitz, 2001 (“Explaining Growth Volatility”)
I. La profondeur du secteur financier (mesurée par le ratio du crédit au secteur privé par rapport au PIB) réduit la volatilité de la croissance jusqu’à un certain point, probablement aux environs de 80 à 100 % du PIB.
II. Au-delà, son expansion augmente :
- la volatilité de la croissance ;
- voire la volatilité macro-économique.
M. Friedman, 1968, “The Role of Monetary Policy”
Notion de chômage naturel
I. _Comme Phelps (1967), définition d’un taux de chômage d’équilibre, qui découle des anticipations d’inflation dans la courbe de Phillips et de leur vérification dans le long terme.
II. Contrairement à la courbe de Phillips, qui ignore l’inflation, le taux de chômage d’équilibre doit intégrer pleinement les anticipations d’inflation, car les salariés privilégient résolument la croissance réelle plutôt que nominale.
III. Contrairement au modèle de Phelps (1967), le chômage naturel se définit comme le résultat des imperfections, des rigidités et des frictions sur le marché de l’emploi ou sur celui des biens et qui empêchent la réalisation d’un équilibre général walrassien. Cette réaction a un caractère optimal* et ne nécessite donc pas de politique de stabilisation.
* Il s’agit ici de décrire<strong> la réaction de l’emploi à une différence entre salaire perçu et salaire anticipé</strong>. Le niveau d’‘inflation ne découle plus du niveau de chômage : ici, le chômage est indifférent à l’inflation ou s’élève en raison de la baisse future des salaires réels.

E. Phelps, 1967, “Phillips curves, Expectations of Inflation
I. _Comme Friedman (1968), définition d’un taux de chômage d’équilibre, qui découle des anticipations d’inflation dans la courbe de Phillips et de la vérification de ces anticipations dans le long terme.
II. L’équation de la courbe de Phillips est augmentée des anticipations et écrite en termes de taux d’inflation, plutôt que de croissance des salaires nominaux.
III. Ce modèle décrit l’ajustement salarial sur un marché du travail déséquilibré, où une politique adaptée peut modifier le taux d’équilibre du chômage.
📚 C’est Phelps qui a ouvert la voie à une synthèse néoclassique liant mécanismes keynésiens à court terme et chômage de long terme indépendant de la demande.
Pour autant, l’auteur s’est par la suite montré réservé à propos de la notion de NAIRU (cf. Modigliani et Papademos, 1975 et leur concept de NIRU), la présentant comme une vision trop simple de la situation macroéconomique.
Clarida, Gali et Gertler, 1999
Le modèle néo-keynésien, basé sur la courbe de Phillips intégrant optimisation, anticipations rationnelles et rigidités nominales, définit le taux optimal de la banque centrale. Celle-ci fixe enfin un taux à court terme pour maintenir l’inflation et l’écart de production anticipés proches de leurs objectifs – zéro écart et inflation maîtrisée. Ce modèle prospectif cible les valeurs prévues plutôt que les niveaux actuels, en phase avec les délais de transmission. Comme l’écart de production varie négativement avec le taux réel et positivement avec l’inflation, les chocs de demande sont entièrement absorbés, tandis que les chocs d’offre ne le sont que partiellement.
CJUE, 2018, Weiss
Après avoir rappelé la jurisprudence Gauweiler*, la Cour de justice considère que le programme d’achat de titres du secteur public (Public sector asset purchase programme - PSPP) ne viole pas l’interdiction du financement monétaire de la dette des États membres découlant de l’art. 123 TFUE** :
« La mise en œuvre de ce programme n’équivaut pas à l’acquisition d’obligations sur les marchés primaires et n’a pas pour effet de soustraire les États membres à l’incitation à conduire une politique budgétaire saine ».
* « <em>une mesure de politique monétaire ne saurait être assimilée à une mesure de politique économique en raison du seul fait qu’elle est susceptible de produire des effets indirects pouvant également être recherchés dans le cadre de la politique économique</em> ».
** <strong>Art. 123 §1 TFUE </strong>: «<em> Il est interdit à la Banque centrale européenne et aux banques centrales des États membres, ci-après dénommées “banques centrales nationales”, d’accorder des découverts ou tout autre type de crédit aux institutions, organes ou organismes de l’Union, aux administrations centrales, aux autorités régionales ou locales, aux autres autorités publiques, aux autres organismes ou entreprises publics des États membres; l’acquisition directe, auprès d’eux, par la Banque centrale européenne ou les banques centrales nationales, des instruments de leur dette est également interdite.</em> »
Cecchetti et Kharoubi, 2015
Ce modèle suggère qu’une augmentation exogène de la finance réduit la productivité globale des facteurs, freinant ainsi la croissance.
Elle profite surtout à des projets exigeant des garanties élevées mais peu productifs et détourne les talents vers un secteur financier surdimensionné, altérant la répartition optimale des compétences et nuisant à la performance économique.
* “Finance literally bids rocket scientists away from the satellite industry. The result is that people who might have become scientists, who in another age dreamt of curing cancer or flying to Mars, today dream of becoming hedge fund managers.”
Gurley et Shaw, 1960
Innovation en regroupant le rôle des banques, des assurances et des autres institutions financières sous le concept d’intermédiation financière :
Fonction de transformation du risque en reliant épargnants et emprunteurs.
Cette approche s’est imposée dans les années 1980.
Myers et Majluf, 1984
Théorie de l’ordre hiérarchique financier*
Le coût de financement d’une entreprise croît avec l’asymétrie d’information des investisseurs sur ses perspectives.
II. L’entreprise recourra par ordre de priorité :
- À la finance interne ;
- Puis à la dette à court terme ;
- Puis à la dette à long terme ;
- Enfin aux capitaux propres.
*« <em>Pecking order theory</em> »<em>.</em>
Shiller, Irrational Exuberance, 2000
I. L’hypothèse des marchés efficients n’est pas compatible avec les observations suivantes :
- Les prix des actions sont trop volatils pour résulter d’un comportement rationnel ;
- Ils « régressent vers leur moyenne »*.
II. A. Dans leurs décisions, les agents peuvent recourir à des ancrages.
B. Exemple du « prix le plus récent dont on se souvient » :
- Krach du 19 octobre 1987 : 22,6 % en une journée ;
- Celui du mardi 29 octobre 1929 : 23,1 %.
* Pour une variable aléatoire : si cette variable est extrême à sa première mesure, elle va généralement se rapprocher de la moyenne à sa seconde mesure. Si elle est extrême à sa seconde mesure elle va tendre à être proche de la moyenne à sa première mesure. Au contraire, si la variable n’est pas aléatoire, elle devrait s’approcher du même résultat à chaque mesure.
Modigliani et Miller (théorème de), 1958
En l’absence de frictions et d’asymétries d’information, la structure du capital n’affecte ni la valeur de l’entreprise ni son coût moyen, les résultats dépendant uniquement du rendement de ses actifs.
⚠️ Les auteurs ont été les premiers à reconnaître que leur théorème repose sur des hypothèses irréalistes.
Langedijk et al., 2015
Dans la plupart des pays, l’impôt sur les bénéfices favorise l’endettement, car les dividendes sont imposés tandis que les intérêts sont partiellement déductibles.
Merton, 1974
Cet article évalue la dette des entreprises en lien avec leur risque de défaut, ouvrant la voie à l’analyse des instruments financiers complexes et des écarts de crédit (spreads).
⚠️ Toutefois, il repose sur des hypothèses idéalisées, comme un marché parfait et des défauts à l’échéance, limitant son application.
Jensen et Meckling, Theory of the firm: Managerial behavior, agency costs and ownership structure, 1976
Théorie de l’agence
Les actionnaires supportent des coûts d’agence pour surveiller les dirigeants et s’assurer qu’ils respectent les objectifs fixés. Ces coûts incluent les frais de contrôle, les avantages indus perçus par les dirigeants et la perte résiduelle liée aux divergences d’intérêts.
Malkiel, 2003
I. Les marchés efficients sont les marchés qui ne permettent pas aux investisseurs d’obtenir des rendements au-dessus de la moyenne sans accepter de prendre des risques au-dessus de la moyenne.
II. A. L’analyse empirique des marchés financiers révèle des autocorrélations significatives à court terme, mais insuffisantes pour élaborer des stratégies spéculatives rentables.
B. Malgré les erreurs des agents, l’information imparfaite et certaines régularités empiriques, les marchés restent globalement efficients.
* prévisibilité de rentabilités futures à partir des rentabilités passées.**
Grossman et Stiglitz, 1980
Ce modèle distingue agents informés, qui paient pour obtenir de l’information, et agents non informés, qui se contentent d’observer les prix. Sur un marché efficient, les prix intègrent toute l’information, réduisant l’incitation à payer pour l’acquérir. Si tous les agents informés cessent d’investir dans l’information, les prix ne la reflètent plus, créant un paradoxe : l’efficience des marchés suppose une diffusion parfaite de l’information, mais cette diffusion même élimine l’incitation à son acquisition, compromettant ainsi l’équilibre concurrentiel.
Brunnermeier, 2001
Plusieurs explications aux krachs boursiers :
- L’éclatement d’une bulle : les investisseurs achètent des titres sur la base des plus-values attendues, jusqu’à ce que la bulle se brise sans changement des fondamentaux ;
- La pénurie de liquidités : les investisseurs ne disposent pas de réserves suffisantes pour rééquilibrer le marché ;
- En l’absence d’information parfaite, des événements extrinsèques peuvent influencer les anticipations et modifier les prix ;
- L’agrégation séquentielle de l’information : réévaluations successives des fondamentaux, déclenchant parfois un krach par effet de contagion.
Akerlof, 1970
The market for lemons
Sur tout marché, le fait que les vendeurs soient mieux informés que les acheteurs sur la qualité des produits peut créer une décote de leur prix à l’équilibre concurrentiel, voire décourager toute transaction.
Stiglitz et Weiss, 1981
L’asymétrie d’information sur le marché du crédit pousse la banque à appliquer un taux unique avec prime de risque, ce qui décourage les projets les moins risqués, incite à des investissements plus risqués et conduit à un rationnement du crédit excluant les emprunteurs restants jugés trop risqués.
Tirole et Holmström, 1998
I. La liquidité interne désigne la capacité du système financier à mobiliser et redistribuer les revenus présents et futurs.
II. Face à un choc global, seule une liquidité externe, fournie par un acteur public, peut stabiliser l’économie.
Diamond et Dybvig, 1983
Modèle canonique de la crise de liquidité
I. Les banques améliorent le bien-être social en mutualisant le risque de liquidité, assurant ainsi les déposants contre le défaut, contrairement aux marchés décentralisés.
II. Cependant, la confiance des déposants dépend des comportements des autres, générant des équilibres multiples : soit un équilibre stable, soit une panique bancaire si tous retirent leurs fonds.
III. Ce risque auto-réalisateur souligne l’importance pour les banques de maintenir des réserves de fonds propres solides.
Bagehot (Principe de), 1873
Pour éviter les paniques financières :
- il faut prêter libéralement aux banques solvables ;
- contre des garanties solides et à un taux d’intérêt élevé (afin de lutter contre l’aléa moral).
Aglietta et Valla, Macroéconomie financière, 2017
I. Dans les débats académiques, la discussion sur le prêteur en dernier ressort est encore conduite dans les termes de Bagehot.
II. D’où les controverses sans fin sur les dilemmes :
- Entre illiquidité et insolvabilité ;
- Entre coûts sociaux de la non-intervention et aléa moral de l’intervention.
Calomiris, Flandreau et Laeven, 2016
I. Le rôle de prêteur en dernier ressorte se définit comme «* celui de la banque centrale ou du gouvernement qui apporte une assistance aux intermédiaires financiers sous la forme de prêts d’urgence, de garanties, ou d’acquisitions d’actifs pour procurer les liquidités ou la santé financière requises pour mettre un terme aux paniques bancaires fondées sur des retraits de dépôts à court terme* ».
II. Ce rôle étant de nature politique, il résulte d’une négociation, bien que le principe de Bagehot privilégie la sauvegarde du système financier plutôt que celle des banques individuellement.
III. L’analyse empirique des banques centrales depuis les années 1960 ne montre aucun lien entre leurs pouvoirs et des facteurs économiques ou politiques, suggérant plutôt une idiosyncrasie.
Dang, Gorton et Holmström, 2012
Mise en évidence de la sensibilité à l’information
I. Quand la dette sert de collatéral, le bien-être exige une ignorance symétrique de la solvabilité des débiteurs, situation plus optimale que celle d’une information équilibrée voire parfaite.
II. La dette constitue la monnaie optimale pour le commerce.
III. La dette constitue également le collatéral optimal pour la dette, en réduisant l’incitation à s’informer sur son remboursement et la rendant plus liquide
⚠️ Cependant, en cas de divulgation d’une information négative sur la valeur du collatéral d’une dette :
- La dette peut devenir réactive à l’information ;
- La baisse de la valeur du collatéral, amplifiée par la réduction de sa détention due à la sélection adverse, peut entraîner une crise financière si le phénomène se généralise.
Gorton et Metrick, 2012
I. Mise en évidence de la sensibilité à l’information :
Alors que la monnaie est insensible à l’information en période de stabilité des prix, les actions sont très sensibles à l’information, leur valeur fluctuant en fonction des anticipations sur les dividendes futurs.
II. La panique financière de 2007-2008, s’est déclenchée sur le marché des repo, pourtant collatéralisés :
- Elle résulte de craintes sur la liquidité des sûretés ayant conduit à une hausse des décotes et à la dépréciation des actifs collatéralisés ;
- Le système bancaire américain est devenu illiquide pour la première fois depuis la Grande Dépression ;
- La crise a été amplifiée par des liquidations massives, une volatilité accrue et un assèchement du marché.
Merton, 1974
I. La spécificité de la dette, qu’il s’agisse d’un contrat de prêt ou d’un instrument financier négociable comme une obligation, est d’être insensible à l’information, car elle sert des intérêts fixes.
II. ⚠️ Ceci est vrai à la condition que l’emprunteur ne fasse jamais défaut.
Holmström, 2015
I. Le prêt sur gage permet d’obtenir un prêt en échange d’un bien dont il perd la propriété en cas de défaut :
- Valorisation plus efficace qu’un marché classique ;
- Le prêteur, grâce à une décote de 50 à 70 %, sécurise son remboursement.
→ Contrairement à un marché, cette opération ne permet pas la découverte du prix du gage.
II. La dette garantie par un collatéral, assorti d’une décote, est une version moderne du prêt sur gage.
III. Toutes les paniques financières sont liées à la dette :
- En période normale, l’absence d’information sur la solvabilité des agents est tolérée voire bénéfique ;
- Lorsque le risque de défaut augmente et que la valeur du collatéral chute, la dette devient sensible à l’information : conditions d’une panique financière.
Brunnermeier et Sanikov, 2017
Lorsque la dette est sur-garantie ou que le risque de défaut est faible, les investisseurs n’ont pas d’incitation à s’informer sur sa valeur :
Forme de monnaie privée partiellement substituable à celle de la banque centrale.
📚 Raison pour laquelle les agrégats monétaires larges incluent la dette commerciale à court terme.
Holmström, 2015
I. Les marchés monétaires, à la différence des marchés d’actions fondés sur la découverte du prix, fonctionnent en minimisant ce besoin grâce à la dette collatéralisée.
II. Mais lorsque le risque de défaut augmente ou que la valeur du collatéral chute, la dette devient sensible à l’information, menaçant ainsi la stabilité financière.
Irving Fisher, 1933
Lorsque la valeur des titres apportés en garantie diminue, la capacité d’emprunt des agents économiques se réduit, entraînant des contraintes de crédit qui freinent la demande globale, un effet aggravé en période de déflation, où la baisse des prix accroît la valeur réelle de la dette, comme lors de la Grande Dépression.
Kiyotaki et Moore (modèle de), 1997
Description du cycle du crédit :
- Baisse du prix des actifs
→ Baisse de la valeur du collatéral
→ Baisse des profits attendus
→ Baisse des investissements et du PIB
→ Baisse de l’offre de crédit
→ Baisse du prix des actifs
Stein, 2010
I. Les shadow banks, qui financent des prêts à long terme en levant des fonds à court terme sans être soumises aux obligations de réserves des banques centrales, jouent un rôle clé dans la création monétaire.
II. Toutefois, leur capacité d’endettement dépend de la valeur des actifs, laquelle peut chuter en cas de ventes au rabais, amplifiant les crises financières en imposant un coût social non internalisé.
III. En effet, si ces institutions doivent liquider leurs actifs pour honorer leurs engagements, elles déprécient encore davantage le marché sans en subir pleinement les conséquences.
Perotti et Suarez, 2011
Une réponse publique au problème des ventes au rabais par les shadow banks consiste dans une politique combinant deux approches :
- Taxation de leur dette à court terme pour les inciter à accumuler des liquidités et internaliser cette externalité ;
- Imposition de ratios de capital ou de liquidité lorsque les incitations à la prise de risque sont trop fortes, rendant ainsi nécessaire une politique combinant ces deux approches.
Adrian et Shin, 2011
Importance de la gestion des rendements comme outil macroprudentiel
I. Lorsque le taux long est trop bas, les prix des actifs à long terme s’élèvent :
- Les bilans des intermédiaires financiers grossissent, favorisant l’excès de capital et l’augmentation de l’effet de levier ;
- La hausse de la valeur des actifs permet aux emprunteurs d’obtenir plus de crédits en offrant davantage de collatéraux.
II. Une courbe des taux aplatie réduit les revenus bancaires liés à la transformation de la maturité, limitant ainsi l’offre de crédit.
Sommet de Pittsburg
I. En réponse à la crise financière, les chefs d’État et de gouvernement du G20 ont lancé en septembre 2009 un vaste programme de réformes réglementaires axé sur le renforcement des fonds propres bancaires, approche privilégiée par les États-Unis à celle d’une régulation du risque.
II. Ce programme sera mis en œuvre par le Conseil de stabilité financière (CSF), successeur du Forum de stabilité financière, réunissant banques centrales, régulateurs et ministères des finances des grandes économies.
Coeuré, 2013, Monetary Policy and Banking Supervision
I. Les banques centrales jouent depuis longtemps un rôle de stabilisation du système financier en tant que prêteurs en dernier ressort, mais elles n’assurent pas toutes la supervision bancaire.
II. A. Deux modèles coexistent :
- L’un intégré aux banques centrales, comme la Réserve fédérale aux États-Unis, la Banque d’Angleterre ou la BCE pour les grandes banques européennes ;
- L’autre confié à des autorités distinctes, un choix adopté dans les années 1990 par des pays comme le Japon et l’Allemagne.
B. Le débat reste ouvert sur l’optimalité de ces modèles, certains estimant que la complémentarité entre politique monétaire et supervision justifie leur intégration au sein des banques centrales.
Haldane, 2017
I. L’usage d’instruments variés pour gérer les risques de liquidité et de crédit des banques se justifie par la diversité des sources de risques et l’incertitude sur l’efficacité de chaque mesure.
II. Ainsi, les ratios de capital obligatoire poursuivent plusieurs objectifs et interagissent avec la réglementation de la liquidité, les coussins de liquidité réduisant le risque de crédit, tandis que des niveaux élevés de capital renforcent la confiance des déposants et la stabilité bancaire.
Macroeconomic Assessment Group, 2010
Mandaté par le Conseil de stabilité financière pour évaluer l’impact macroéconomique de Bâle III :
Il conclut que le renforcement des exigences en capital des banques entraînerait une légère hausse des taux de prêts et une faible baisse de leur volume, réduisant temporairement la croissance du PIB de 0,03 point par an sur 35 trimestres, avant d’être suivi par une reprise équivalente.
⚠️ À l’époque, une « guerre des chiffres » oppose régulateurs et lobby bancaire, ce dernier avançant des prévisions bien plus pessimistes, comme l’étude de la Fédération française des banques en 2010, malgré l’incertitude des scénarios contrefactuels.
Cecchetti, 2014
La mise en œuvre progressive, dans les années 2010, de l’accord de Bâle III :
- Sur le marché du crédit, ne s’est traduite que par une petite baisse du profit des banques ;
2° S’est accompagnée d’une forte reprise économique aux États-Unis et au Royaume-Uni puis, plus tard, dans la zone euro, dans un contexte monétaire très accommodant.
Neel Kashkari (président de la Banque fédérale de réserve de Minneapolis), 2016, Lessons from the Crisis
I. Les dirigeants des grandes banques sont conscients qu’elles sont aujourd’hui trop importantes pour faire faillite (too big to fail) et donc tentées par des opérations spéculatives.
II. Par conséquent, les exigences de capital devraient être augmentées :
- 23,5 % des actifs pondérés pour les plus grandes banques ;
- 38 % des actifs pondérés pour les banques que le Trésor américain identifie comme « too big to fail ».**
Conseil de stabilité financière (Financial Stability Board), 2014
Approbation des régimes de résolution
L’ordre d’imputation des pertes doit être le suivant :
- Les actionnaires de la banque ;
- Les créanciers obligataires juniors (ex. : les détenteurs de dettes contractuellement convertibles en actions) ;
- Les créanciers obligataires seniors ;
4° Les déposants, à l’exclusion des dépôts garantis.
Conseil de stabilité financière (Financial Stability Board), 2015
La norme de capacité totale d’absorption des pertes (Total Loss-Absorbing Capacity - TLAC) impose aux banques systémiques mondiales une capacité d’absorption des pertes de 16 % des actifs pondérés dès 2019 et 18 % en 2025, afin de permettre leur résolution sans recours excessif aux finances publiques.
⚠️ En 2019, selon le Conseil de stabilité financière, toutes ces banques respectaient ou dépassaient les exigences minimales de TLAC et le ratio de levier de 6 % fixé par Bâle III.
La BRRD
La directive du 15 mai 2014 sur le redressement et la résolution des banques établit une procédure de résolution pour les banques systémiques, imposant un minimum de fonds propres et d’engagements éligibles (MREL) afin de limiter l’impact sur les dépôts et les fonds publics en cas de faillite.
Entrée en vigueur le 1ᵉʳ janvier 2015, elle a été appliquée en février 2022 lorsque le Conseil de résolution unique a déclaré en faillite les filiales européennes de la banque russe Sberbank après l’annonce des sanctions européennes.
Caballero, Hoshi et Kashyap, 2008
Les prêts non performants immobilisent capital et liquidité sans générer de profits et perturbent la transmission de la politique monétaire en rendant une partie des bilans bancaires insensibles aux conditions financières.
Pour éviter de constater des pertes, les banques restructurent ces prêts et continuent de financer des entreprises « zombies » au détriment des secteurs productifs, prolongeant ainsi les récessions, comme l’a illustré le Japon des années 1990.
Shiller, 2003, The New Financial Order
I. La plupart des ménages dans les économies avancées manquent d’instruments financiers pour diversifier leur capital :
1° Leur richesse est souvent composée d’un capital humain (leur compétence) et d’un bien immobilier (leur résidence principale) ;
2° Ceci les rend vulnérables aux chocs, d’autant que les chocs locaux comme la fermeture d’une usine affectent ces deux actifs simultanément.
II. ⚠️ Même les sociétés avancées peuvent souffrir de sous-développement financier.
Badré, 2016, Money Honnie. Et si la finance sauvait le monde ?
I. Le réchauffement climatique est un défi majeur qui appelle des solutions financières novatrices.
II. Par exemple, l’encadrement et le développement des green bonds*.
⚠️ Même les sociétés avancées peuvent souffrir de sous-développement financier.
* Un emprunt obligataire émis sur les marchés par une entreprise ou une entité publique pour financer des projets écologiques, avec l’engagement de consacrer les fonds à des initiatives environnementales et de publier un rapport annuel sur leur avancement.
Rajan et Zingales, 2005, Save capitalism from capitalists
Depuis le « grand renversement » du XXᵉ siècle, où la finance de marché a cédé du terrain au modèle bancaire après les années 1930, les financiers menacent le capitalisme et les marchés.
L’essor des marchés financiers dans un espace déréglementé et globalisé a marqué la transition vers l’économie financiarisée actuelle.
Pour préserver le capitalisme, il est nécessaire de limiter la concentration du capital productif, empêcher les interventions publiques favorisant certains acteurs et corriger les inefficiences liées à la recherche de rente, notamment par des règles sur la rémunération des cadres.
Angeloni, 2014, “La politique macroprudentielle européenne de sa gestation aux premiers balbutiements”
La stabilité financière, objectif de la politique macroprudentielle, se définit comme l’absence ou la faible influence des externalités systémiques.
Ses outils incluent des coussins de fonds propres, des exigences de liquidité, des limites d’exposition, une transparence accrue et des taxes sur les financements non stables.
Fondamentalement contracycliques, ces mesures s’opposent aux approches microprudentielles qui, en période de risque systémique, imposent aux banques d’augmenter capital et liquidités, avec un effet potentiellement procyclique.
Haldane et Madouros, 2012, The dog and the frisbee
Prédire la trajectoire d’un frisbee nécessite des calculs complexes, mais un chien l’attrape instinctivement, illustrant que la prise de décision en milieu incertain repose souvent sur des règles simples.
Ces règles s’imposent parce que les capacités cognitives humaines sont limitées, une réflexion excessive peut retarder l’action, l’incertitude rend les comparaisons impossibles et des réglementations trop complexes font perdre de vue leurs objectifs.
Pourtant, la régulation financière s’est alourdie, passant d’une trentaine de pages pour Bâle I (1988) à un millier pour Bâle III, un défi majeur pour les pays émergents, d’où la nécessité, selon Bénassy-Quéré, de simplifier ces règles, une approche bien accueillie par les économies à faible revenu.
Goodhart, 2010
La crise souveraine latino-américaine de 1982 a révélé la nécessité d’un contrôle accru des banques américaines, mais la crainte de désavantager l’industrie face au Japon a conduit Washington et New York à privilégier un cadre coopératif, aboutissant aux premiers accords de Bâle.
Rueff, Le péché monétaire de l’Occident, 1971
Le système d’étalon de change-or reposait sur une contradiction :
- Il nécessitait d’émettre suffisamment de dollars pour assurer la liquidité internationale ;
- Tout en limitant leur création pour préserver la confiance dans la parité or du dollar.
Feldstein et Horioka, 1980
Selon l’hypothèse de parfaite mobilité du capital, l’investissement d’un pays devrait être indépendant de son taux d’épargne, le capital se dirigeant vers les rendements les plus élevés.
Or, une étude sur seize pays de l’OCDE entre 1960 et 1974 montre une forte corrélation entre épargne et investissement, avec un coefficient moyen de 0,89.
Ce résultat, connu sous le nom de paradoxe de Feldstein-Horioka, suggère une faible intégration financière malgré la libre circulation des capitaux.
Calvo et Reinhart, 2002, Fear of Floating
I. Étude portant sur 154 accords internationaux de change.
II. « peur du flottement » :
- La plupart des pays, notamment émergents ou en développement, affichent un flottement de leur monnaie ;
- Mais préfèrent intervenir pour limiter l’instabilité du taux de change.
Louis Bachelier, 1900
Formalisation mathématique de l’idée soutenue par Jules Regnault (Calcul des chances et philosophie de la bourse, 1863), selon laquelle :
Les prix des actions fluctuent aléatoirement à court terme autour d’une valeur de long terme du titre évalué par les spéculateurs.
Eugène Fama, 1970
Théorie des marchés efficients
I. Un marché est dit « efficient » s’il reflète pleinement l’information disponible.
II. Deux interprétations :
- Les prix suivent une marche aléatoire et sont imprévisibles ;
- Les prix correspondent à la valeur fondamentale des actifs grâce à une diffusion parfaite de l’information.
⚠️ La seconde thèse a été remise en cause, entre autres, par Grossman et Stiglitz (1980) et Shiller (1981, 2000).
Philippon et Reshef, 2012
Étude sur le secteur financier américain
I. Depuis les années 1990, la finance capte des talents qualifiés au détriment des autres secteurs, en offrant une prime salariale plus élevée, jusqu’à 50 % avant la crise.
II. L’industrie financière a attiré trop de talents :
- Il y a trop de banquiers et pas assez d’ingénieurs ;
- Alors que le coût unitaire de production des services financiers a probablement augmenté.
Bruno et Shin, 2015
La détention de dollars par les banques non américaines implique que la politique monétaire des États-Unis influence le crédit mondial :
- Une baisse des taux par la Fed rend le crédit moins cher aux États-Unis et ailleurs pour les banques financées en dollar ;
- À l’inverse, une appréciation du dollar restreint leur financement, réduisant leur offre de crédit.
Gourinchas, Rey et Govillot, 2010
I. Les États-Unis bénéficient d’un privilège exorbitant, l’allègement de leur contrainte extérieure :
Leurs actifs externes sont plus risqués, tandis qu’une grande partie de leur passif est constitué d’actifs sûrs et liquides, les obligations du Trésor américain.
II. Leur position extérieure nette s’est moins dégradée qu’attendu, car leurs actifs sont mieux rémunérés que leurs passifs.
III. Ils jouent un rôle d’assureur international :
- En période stable, leurs placements couvrent les intérêts de leur dette ;
- En crise, ils subissent de lourdes pertes.
Stoffels et Tille, 2007
I. La Suisse a accumulé des excédents courants compensés par des sorties de capitaux. Fin 2005, sa position extérieure nette atteignait 114 % du PIB, générant d’importants revenus.
II. Pourtant, cette position aurait dû être nettement plus élevée, ce qui n’a pas été le cas pour les raisons suivantes :
- Ses actifs sont en devises, tandis que ses engagements sont en francs suisses ;
- L’appréciation du franc a dévalorisé ses avoirs étrangers, limitant la progression de sa position extérieure nette.
Shambaugh, 2004
À partir d’un panel de 155 pays sur la période 1970-2000, confirmation systématique :
Avoir simultanément un ancrage monétaire* et une parfaite mobilité des capitaux limite considérablement la marge de manœuvre de la politique monétaire.
Rey, 2016
I. Le cycle financier mondial remet en cause le triangle d’incompatibilité de Mundell*.
II. A. La politique monétaire de la Fed influe mondialement :
- via ses taux et via le crédit ;
- sur la valeur des actifs et l’appétit pour le risque.
B. Par exemple :
Baisse des taux par la Fed ;
→ dépréciation du dollar ;
→ revalorisation des actifs étrangers ;
→ renforcement de la capacité d’emprunt des agents économiques ;
→ incitation à une prise de risque accrue.
* Impossibilité de cumuler régime de change fixe, politique monétaire indépendante et libre circulation des capitaux.
Obstfeld, 2009
I. La mobilité des capitaux se distingue de celle des biens par son caractère intertemporel. Elle repose sur des promesses dont le respect dépend des asymétries d’information et des risques associés.
II. En conséquence, l’ouverture financière ne garantit ni la stabilité de la consommation, ni la croissance du PIB, ni l’attractivité des investissements étrangers.
Ostry et al., 2010, Capital Inflows - The Role of Controls
I. Les contrôles sur les entrées de capitaux :
- même s’ils n’ont qu’un impact limité sur le volume des entrées et sur les taux de change ;
- peuvent modifier la composition des flux au profit des investissements à long terme.
II. Si la mobilité des capitaux devrait être la règle, de tels contrôles peuvent être utiles lorsque les outils macroéconomiques ont été épuisés.
Ethier, 1973
Cette analyse des échanges révèle :
- l’aversion des entreprises pour le risque ;
- leur couverture partielle contre le risque de change ;
- l’impact négatif de la volatilité des taux sur le commerce.
Clark, 1973
I. Modèle montrant que le risque de change freine l’ouverture commerciale.
II. En effet, une entreprise exportatrice, sans consommation intermédiaire importée, doit fixer sa production sans connaître à l’avance le taux de change, exposant ainsi entièrement son profit à sa variabilité.
Hooper et Kohlhagen, 1978
Modèle intègre le risque de change pour analyser son effet sur les prix et quantités d’équilibre :
La volatilité réduit le volume des échanges sans affecter le prix, qui dépend de l’aversion au risque des acteurs.
Pindyck, 1991
La volatilité des taux de change accroît l’incertitude, incitant les entreprises à reporter leurs investissements en raison de l’irréversibilité des coûts d’entrée et de sortie.
Demers, 1991, “Investment under uncertainty, irreversibility and the arrival of information over time”
Dans un environnement de taux de change volatiles, l’effet d’irréversibilité des décisions d’investissement dépend du degré d’aversion au risque des entrepreneurs :
- Si cette aversion est forte, la volatilité réduit l’investissement ;
- Si elle est faible, les entreprises peuvent s’adapter en intégrant cette incertitude dans leur stratégie.
Taglioni, 2002
I. Les modèles théoriques sur la relation entre volatilité du taux de change et volume du commerce sont peu concluants.
II. Les vastes études empiriques menées livrent des données également ambiguës.
III. Selon l’auteur, « on suppose habituellement que l’effet défavorable de la volatilité des taux de change [sur les flux commerciaux], s’il existe, n’est assurément pas élevé ».
Coric et Pugh, 2010
I. « [E]n moyenne, la variabilité des taux de change exerce un effet négatif sur le commerce international.Toutefois, […] ce résultat est très conditionnel. [L]es effets moyens sur le commerce ne sont pas suffisamment robustes pour être généralisés à tous les pays ».
II. A. Plusieurs facteurs peuvent réduire cet impact :
- Les entreprises peuvent se protéger via des instruments de couverture, des intrants importés ou une facturation en monnaie locale ;
- Certaines absorbent les pertes dans leurs marges.
III. A. Les petites entreprises sont souvent plus vulnérables que les grandes.
B. effet de la volatilité des taux est plus marqué dans le commerce entre économies fortement intégrées.
Haile et Pugh, 2013
Revue empirique de 89 études économétriques :
- La volatilité du taux de change a un impact sur le commerce qui va de neutre à négatif ;
- Les résultats présentés par la recherche varient beaucoup en fonction des méthodologies retenues.
Cavallari et d’Addona, 2013
Approche empirique, là où Pindyck (1991) et Demers (1991) avaient une approche microéconomique et théorique.
I. La volatilité du taux de change a un impact négatif sur l’investissement direct étranger.
II. La volatilité nominale comme la volatilité réelle découragent fortement la décision de procéder à des investissements à l’étranger.
III. Toutefois, dans le long terme, les entreprises peuvent s’adapter et diversifier leurs investissements.
Aghion et al., 2009
Modèle étudiant la relation entre croissance et taux de change :
- La volatilité du taux de change a un impact négatif sur la croissance ;
- Plus un pays est financièrement développé, plus il a intérêt à adopter un taux de change flexible ;
- Un pays dont le secteur du crédit privé n’est pas assez développé sera plus sensible aux chocs de changes et devrait donc préférer un régime de change fixe.
Mundell, 1961
Théorie des zones monétaires optimales (“A Theory of Optimum Currency Areas”)
I. _Le choix du régime de change repose sur un arbitrage coût-bénéfice :
- Coût : perte d’indépendance monétaire en régime fixe ;
- Bénéfice : réduction de la volatilité et suppression des coûts de conversion en union monétaire ou dollarisation.
II. La zone monétaire optimale est fondée sur la parfaite mobilité* des facteurs de production.
III. Une union monétaire induit des coûts économiques d’autant plus élevés que les économies participantes présentent entre elles des asymétries de structure ou de comportement.
* Cf. également McKinnon (1963), Kenen (1969), Fahri et Werning (2016)
McKinnon, 1963
I. Outre la mobilité géographique (voire sectorielle) des facteurs de production…
II. …la zone monétaire optimale doit être fondée sur le degré d’ouverture d’une économie, car c’est elle qui permet la mobilité des facteurs de production.
Kenen, 1969
I. Une zone monétaire est aussi optimale, en fonction de son degré de diversification.
II. En effet, une absence de diversification :
- expose davantage une économie spécialisée au risque de chocs asymétriques ;
2° la rend plus sensible à ces chocs ;
→ Les économies diversifiées peuvent donc plus facilement conserver un taux de change fixe.
Mundell, 1973
Une union monétaire procure une assurance contre les chocs asymétriques :
1° Accès à un même stock de monnaie élargi ;
2° Diversification des portefeuilles financiers.
⚠️ Comme le relève McKinnon (2004), Mundell est le père du débat sur l’utilité des unions monétaires, en ayant inspiré ses deux versants.
Asdrubali, Sorensen et Yosha, 1996
Aux États-Unis, sur la période 1963-1990 :
- 39 % des chocs affectant la production brute d’un État sont absorbés par les revenus des facteurs ;
- 13 % par le budget fédéral ;
- 23 % par l’accès au crédit.
→ Seuls 25 % des chocs ne sont pas lissés.
Par conséquent, une chute de production de 10 % dans un État américain entraînera une baisse de la consommation de seulement 2,5 %.
Asdrubali, Sorensen et Yosha, 1998
I. Sur la période 1963-1990_ :
- Il n’y a pas de partage des risques entre les pays de l’OCDE ou au sein de l’Union européenne ;
- Le lissage d’un choc de production se fait sur la durée, par la réduction de l’épargne des entreprises et par des déficits publics, à hauteur de 40 % seulement, le reste n’étant pas lissé.
II. → Les auteurs préconisent de revenir sur les règles budgétaires imposées par le budget de Maastricht, qui empêchent un gouvernement de réagir à un choc de production.
Afonso et Furceri, 2008
Sur la période 1980-2005, en Europe :
- Le lissage ne se fait que par l’épargne et le déficit public ;
- 43 % des chocs affectant la production sont lissés dans les quinze pays des communautés européennes, et 39 % seulement pour les onze pays de l’Union économique et monétaire.
Nikolov, 2016
I. L’Union économique et monétaire a renforcé l’absorption transfrontalière des chocs via le partage privé du risque, mais la part non lissée des chocs asymétriques reste élevée par rapport aux États-Unis.
II. A. Cette situation s’explique par des marchés du travail et des capitaux moins intégrés.
B. L’amélioration du partage privé du risque, notamment via les marchés de capitaux, reste une priorité.
Allard et al., 2013
I. La zone euro ne partage pas assez le risque.
II. A. Le lissage est trop faible :
- Au Canada et en Allemagne, le lissage est de l’ordre de 80 % ;
- Tandis qu’il n’est que de la moitié dans la zone euro.
B. Les marchés de titres financiers ne sont pas assez intégrés.
C. La politique budgétaire n’est pas assez intégrée.
Hume, 1752, Of money
Mécanisme des flux d’espèces et de prix
I. A. Si un pays mène une politique monétaire inflationniste, ses prix augmentent, rendant les importations moins chères et les exportations plus coûteuses.
B. Cela détériore sa balance commerciale, entraînant une sortie de devises et une réduction de l’offre de monnaie, jusqu’à un rééquilibrage du taux de change.
II. À l’inverse, un pays plus compétitif accumule des réserves, stimule la demande intérieure et voit son taux de change réel s’apprécier.
* Compétitivité-prix : capacité à produire des biens et des services à des prix inférieurs à ceux des concurrents pour une qualité équivalente.
Balassa, 1964 ; Samuelson, 1964
Effet Balassa-Samuelson
I. Les écarts de productivité expliquent les différences de niveaux de prix entre pays selon leur niveau de développement.
II. Dans les pays en rattrapage, la productivité est plus faible dans les secteurs exposés, mais similaire aux économies avancées dans les secteurs protégés :
- Cela entraîne des salaires plus bas, d’autant plus si la main-d’œuvre est mobile.
→ Ainsi, les biens et services coûtent moins cher dans ces pays, conduisant à un niveau général des prix inférieur.
Piton, 2015
Un secteur est considéré comme exposé à la concurrence internationale si le ratio des échanges (exportations + importations) à la valeur ajoutée brute aux prix courants est au moins égal à 20 % ; sinon le secteur, est abrité.
II. A. Ce degré d’ouverture peut varier dans le temps.
B. Ainsi, en zone euro, dans les années 2000 à 2012, l’intégration monétaire et les évolutions technologiques ont accru le taux d’ouverture des activités de finance et d’assurance.
Ahmed et al., 2015
Étude empirique portant sur 46 pays sur la période 1996–2012 :
- La réaction de plus en plus limitée des exportations au taux de change ;
- peut être attribuée pour 40 % au développement des chaînes de valeur internationales.
Krugman, 1987
Formalisation du concept de *tarification au marché\ (mise en évidence par Robinson en 1947).
I. A. En présence de variations du taux de change, si l’élasticité-prix de la demande n’est pas constante :
- lorsque la monnaie du pays d’importation, dans laquelle sont facturées les exportations, se déprécie, les entreprises exportatrices peuvent choisir d’augmenter leurs marges ;
- en maintenant leurs prix exprimés dans leur monnaie nationale.
B. Il n’est pas toujours optimal de chercher à étendre ses parts de marchés.
II. Les exportateurs peuvent donc facturer des prix différents selon la destination du produit exporté, en fonction de la concurrence rencontrée sur cette destination.
Gaulier et al., 2008
I. Le degré de tarification au marché varie en fonction du pays et du secteur :
- Il est faible pour les grandes nations exportatrices, comme les États-Unis, l’Allemagne ou la Chine ;
- Il est plus important pour les produits manufacturés, comme l’alimentation, l’habillement, les armes à feu, les produits chimiques ou optiques.
II. En moyenne, sur l’ensemble des pays et des produits, une dépréciation de 10 % entraîne une hausse des prix en monnaie nationale d’environ 2 %.
Gopinath et al., 2010
I. Les entreprises ajustent peu fréquemment leurs prix en devise étrangère lorsque leurs exportations sont libellées dans une monnaie dominante comme le dollar américain.
Or, un grand nombre de transactions étant facturées en dollars, les effets de taux de change bilatéraux sont atténués à court terme.
Gräb et Lafarguette, 2015
I. Pour les pays de la zone euro, libeller les échanges en euro tend à réduire le degré de tarification au marché.
II. Ainsi :
- Une hausse de 10 points de pourcentage de la part de l’euro comme monnaie de facturation des importations en provenance des pays hors zone euro ;
- Réduit le poids des répercussions de taux de change sur les prix à l’importation de près de 7 points de pourcentage.
Williamson, 1983
Proposition de méthode de calcul du taux de change d’équilibre fondamental (Fundamental Equilibrium Exchange Rate – Feer)
Il s’agit du taux de change réel (si la condition de Marshall-Lerner est vérifiée) qui permet d’assurer simultanément, au sein d’une économie, en tenant compte des fondamentaux économiques à moyen terme :
- l’équilibre interne : plein emploi, stabilité des prix ;
- l’équilibre externe : solde soutenable du compte courant.
Stein, 1994
Proposition de méthode de calcul du taux de change naturel (Natural Real Exchange Rate – Natrex)
I. Il s’agit du taux qui assure l’équilibre entre l’épargne et l’investissement d’un pays à long terme, en tenant compte des dynamiques de productivité, des flux de capitaux et des fondamentaux économiques structurels.
II. Le Natrex est dynamique, contrairement au Feer.
Clark et Macdonald, 1998
Méthode de calcul du taux de change d’équilibre comportemental (Behavioral Equilibrium Exchange Rate – Beer)
Le taux est calculé en fonction de variables fondamentales observables à court et moyen terme, telles que les différentiels de productivité (effet Balassa-Samuelson), les termes de l’échange, les flux de capitaux et les taux d’intérêt réels.
III. ⚠️ Il découle de régularités historiques et ne peut pas s’appliquer en cas de rupture structurelle. Il est donc complémentaire au Feer.
Obstfeld et Rogoff, 1995, 1998
Méthode de recherche du niveau adéquat du taux de change réel
Le taux de change est déterminé par les fondamentaux macroéconomiques, notamment les préférences des agents, les frictions nominales, la structure du commerce international et les déséquilibres du compte courant, permettant d’analyser l’impact des chocs monétaires et réels sur les ajustements de change.
FMI, 2015, Perspectives de l’économie mondiale, “Exchange rates and trade flows : disconnected ?”
En moyenne sur un échantillon de 60 pays sur la période 1980-2014 :
Une dépréciation de 10 % du taux de change réel entraîne une hausse des exportations nettes de 1,5 % du PIB.
⚠️ Cependant, il existe une très grande hétérogénéité entre les pays.
Mantega, 2010
I. (septembre) Réaction face à une série d’interventions (Japon, Corée du Sud, Taïwan) d’affaiblissement des monnaies nationales pour favoriser la compétitivité de leurs exportations : nouvelle « guerre des monnaies ».
II. (novembre) Accusation envers la politique monétaire expansionniste de la Fed de déstabiliser les pays émergents.
→ Les pays émergents qui présentent encore des rendements positifs voient affluer des capitaux empruntés en dollar. En l’absence de contrôle des capitaux, ne leur laisse alors le choix qu’entre :
- laisser leur monnaie s’apprécier, au risque d’une perte de compétitivité ;
- baisser leurs taux d’intérêt, au risque de développer des bulles financières.
Coeuré, 2017
I. Une politique monétaire très expansionniste suite à un choc négatif soutient la demande interne, mais également les importations, via un effet de revenus qui peut surcompenser l’effet négatif sur le taux de change.
II. En Europe, les programmes de rachat d’actifs ont été des instruments efficaces pour mener des assouplissements monétaires alors que les taux directeurs étaient à leur borne inférieure :
- Soutien de la consommation et des perspectives d’inflation ;
2° Importantes retombées sur d’autres pays via les mouvements de capitaux et la modification des prix relatifs.
→ Les taux de change ont réagi aux écarts de taux d’intérêt anticipé : mêmes effets que les politiques conventionnelles.
III. A. Les actions de politique monétaire visant à soutenir les objectifs de stabilité des prix domestiques dans les économies avancées ont été positifs pour l’économie mondiale (emploi, revenus, croissance économique).
C. En zone euro, les mesures soigneusement calibrées de la politique monétaire ont ajouté à la croissance mondiale :
- l’idée que les programmes de rachat d’actifs ont encouragé la guerre des monnaies est erronée ;
- le monde de la politique monétaire n’est pas une arène où les banques centrales sont en compétition.
Eichengreen, 2013
Pour une banque centrale, une réaction vigoureuse face à un choc commun peut aussi être une façon d’inciter les autres banques centrales à agir de façon aussi déterminée.
→ Cette réaction sert ainsi d’outil de coordination implicite.
Caballero, Farhi et Gourinchas, 2008
I. Le déséquilibre entre déficit courant des États-Unis et excédents commerciaux chinois à la fin des années 1990 s’explique par le rôle de fournisseur d’actifs sûrs joué par le Trésor américain.
II. Les bons du Trésor américain, qui représentaient en 2004 17 % de la valeur des produits financiers mondiaux dans les portefeuilles, avec des intérêts réels de long terme diminuant régulièrement, ont de moins en moins joué ce rôle, conduisant les investisseurs à se reporter sur d’autres produits.
Caballero, Farhi et Gourinchas, 2015
I. Lorsque le taux d’intérêt nominal atteint zéro, un excédent mondial d’épargne ne peut plus être absorbé par une baisse des taux, ce qui peut provoquer une « guerre des monnaies ».
II. Dans ce contexte, la production est contrainte par la demande globale, et un pays souffre davantage d’une trappe à liquidité si sa capacité à produire des actifs financiers est inférieure à sa demande.
III. Un grand pays en pénurie d’actifs sûr * peut ainsi entraîner l’économie mondiale dans une trappe à liquidité en exerçant une pression baissière sur les taux d’intérêt d’équilibre.
IV. La répartition de la récession entre les pays dépend alors des taux de change, ce qui alimente la guerre des monnaies.
* Un actif liquide dont la valeur tend à augmenter en période de crise.
Krugman, 1979
I. Les crises de change de première génération : incohérence entre la politique économique et le régime de change.
II. A. Par exemple, un pays en régime de change fixe par rapport au dollar, mais dont la masse monétaire croît plus vite que celle des États-Unis, contraint ce pays à puiser dans ses réserves de change.
B. La crise va survenir avant l’épuisement total des réserves, selon un modèle similaire à celui d’une panique bancaire.
C. Il s’agit du résultat d’une réaction rationnelle des agents privés face a un taux de change inadéquat.
⚠️ Ce modèle peut s’appliquer dans un pays à forte inflation ou présentant un déficit de transactions courantes.
Jeanne, 1996
I. Crises de change de deuxième génération (Europe en 1992-1993) : conjonction d’une économie peu prospère et d’anticipations défavorables des agents privés, qui s’attendent à une inflation.
II. Les agents privés vont exiger des salaires plus élevés pour compenser leur perte de pouvoir d’achat anticipée :
- si la production est contrainte par l’offre, cela entraîne une hausse du chômage ;
- à moins que le gouvernement ne dévalue sa monnaie pour restaurer les bénéfices des entreprises.
⚠️ Il s’agit de l’extension à l’économie ouverte du modèle d’incohérence temporelle de Barro et Gordon (1983) en transposant la tentation de créer davantage d’inflation à celle de dévaluer pour abaisser le taux de chômage.
Garman et Kohlhagen, 1983
I. La volatilité implicite mesure l’écart à la moyenne des mouvements de cours du risque d’un actif sur une période donnée.
II. Elle permet d’évaluer la valeur d’une option de vente ou d’achat de monnaie, qui s’accroît avec la volatilité (variabilité) du taux de change sur toute la durée de vie de l’option.
II. ⚠️ La valorisation du marché des options fournit donc un moyen de mesurer la volatilité des taux de change anticipée par le marché.
Cimadomo et al., 2020
Les dispositifs mis en place dans la zone euro après la crise financière mondiale, notamment le Mécanisme européen de stabilité, ont eu un effet stabilisant très substantiel :
Au lendemain de la crise, 60 % des effets de la grande récession et de la crise des dettes souveraines étaient absorbés.
Cline, 2018
A partir de calculs de FEERs, le dollar US apparaît légèrement surévalué compte tenu du déficit courant ajusté.
→ Pour résorber l’excès de déficit, le dollar devrait se déprécier de 3,2 % en termes réels effectifs.
Corsetti, 1998
I. Crises de change de troisième génération en 1997, Thaïlande, puis d’autres économies d’Asie orientale, Brésil et Russie.
II. Causées par le secteur financier :
- Pays endettés en dollars, souvent à court terme ;
- Une dévaluation de la monnaie alourdissait la charge de la dette libellée en monnaie étrangère ou stoppait net les entrées de capitaux.
Krugman, 1999
I. La crise jumelle désigne une crise de change et une crise bancaire conjointes :
- Les craintes sur la solvabilité des emprunteurs peuvent entraîner une fuite des capitaux et une crise de change ;
- Une crise de change peut provoquer une crise bancaire si les banques sont endettées en devises étrangères.
II. La crise jumelle éclate lorsque les investisseurs internationaux perdent confiance dans cet ensemble.
Frankel et Saravelos, 2012
Variables ayant le plus grand pouvoir prédictif d’une crise de change :
- Les réserves de change ;
- Le taux de change réel ;
- Le taux de croissance du crédit ;
- Le niveau du PIB ;
- Le solde courant.
⚠️ Modèle d’anticipation des crises de change peu performant : pour une crise prédite (signal), il y a de nombreuses fausses alertes (bruit).
Lucas, 1990
Paradoxe de Lucas
I. Selon la théorie néoclassique, les pays émergents devraient offrir de meilleurs rendements que les pays riches, mais en pratique les flux de capitaux se concentrent principalement entre économies développées.
II. Ce paradoxe remet en question le rôle de la mobilité des capitaux dans le développement économique à long terme.
Tobin, 1972
Proposition d’instaurer une taxe sur les transactions de change, afin de décourager les fluctuations excessives de flux de capitaux à court terme.
FMI, Ostry et al., “The Liberalization and Management of Capital Flows : An Institutional View”, 2012
Les contrôles de capitaux, accompagnées de mesures prudentielles visant à limiter les bulles de crédit, peuvent s’avérer utiles dans les économies émergentes pour réduire leur vulnérabilité.
Ils ne doivent pas se substituer aux ajustements macro-économiques nécessaires.
Par exemple, l’ajustement du taux de change.
Garber et Taylor, 1995
Il n’est pas souhaitable de conserver durablement des contrôles de capitaux ;
1° Les taxes type Tobin ou obligations de mise en réserve à la chilienne ne sont pas suffisantes pour décourager les sorties de capitaux lorsque les anticipations de dépréciation de la monnaie nationale deviennent fortes ;
2° Les taxes et les contrôles administratifs peuvent être contournés grâce aux innovations financières et à l’existence de paradis fiscaux ;
3° Il est très difficile de distinguer les « bons » des « mauvais » flux de capitaux a priori : tous seront pareillement pénalisés.
Blanchard et Katz, 1992
I. La mobilité du travail joue un rôle important dans l’ajustement aux chocs asymétriques aux États-Unis, contrairement à l’Europe.
II. Le budget fédéral et des transferts permettent également d’absorber les chocs aux États-Unis, outils absents en Europe.
Baldwin, 2006
I. Critique des travaux de Rose.
II. Étude de l’effet Rose au sein de plusieurs unions monétaires :
L’euro est associé par l’auteur à une augmentation du commerce au sein de la zone euro, depuis sa mise en place, de l’ordre de 5 à 10 %.
Fontagné et al., 2009
L’introduction de l’euro n’a pas substantiellement accru les échanges intra-zone, sans doute en raison d’autres facteurs non monétaires, mais elle a contribué à la stabilité et à la modération des prix, malgré l’influence de sur le commerce.
Martin et Méjean, 2010
Effet pro-concurrentiel de l’euro, qui a abouti à une convergence des prix du commerce intra-zone de biens et services.
⚠️ Néanmoins, cet effet est beaucoup moins important qu’aux États-Unis.**
Ghosh, 2014
Les facteurs favorisant l’adoption d’un régime de change fixe :
- Un petit pays ;
- L’existence de contrôles de capitaux ;
- Dans les pays en développement, le PIB par habitant, les réserves officielles en pourcentage des importations et l’endettement extérieur rapporté au PIB ;
- Dans les économies avancées, une forte concentration des exportations.
Frenkel et al., 2001
Les interventions coordonnées de la BCE et les autorités monétaires des autres pays du G7 n’a eu d’effet qu’à court terme sur les dynamiques des taux de change et aucun au-delà : inefficacité.
Sarno et Taylor, 2001
Remise en cause de l’efficacité des interventions de change lorsque celles-ci sont stérilisées*, généralement le cas dans les économies avancées.
⚠️ Accroissent plutôt que réduisent l’instabilité des cours.
* Intervention de la Banque centrale qui n’implique pas de changement dans la base monétaire nationale.
Dominguez et Frankel, 1993
L’effet de signal est un canal de transmission de la politique de change :
Une intervention, même stérilisée, peut influencer le taux de change en modifiant les anticipations des agents, notamment en présence de comportements mimétiques.
Chitu, Eichengreen et Mehl, 2014
I. Le remplacement de la livre sterling par le dollar montre qu’une monnaie de réserve internationale n’est pas éternelle.
II. Par ailleurs, il y a de la place pour plus d’une monnaie de réserve dans le système monétaire international.
II. Les effets de réseau jouent beaucoup moins après 1973, ce qui pourrait être défavorable au dollar à l’avenir.
Krugman, 1984
I. Les fonctions d’une monnaie de réserve internationale sont peu séparables :
- Instrument d’intervention pour la banque centrale ;
- Instrument de réserve à la banque centrale ;
- Elle sert à libeller les contrats internationaux.
II. Mise en évidence d’un effet de réseau, la monnaie se renforçant par elle-même :
- les coûts de transaction devenant plus bas ;
- le degré de convertibilité de la monnaie devient plus élevé.
III. Relation entre l’utilisation d’une monnaie et ses déterminants non linéaire : inertie à court terme qui maintient l’utilisation d’une monnaie au niveau international (dollar), alors même que les autres déterminants ont changé.
Bénassy-Quéré, 2015
I. Les cinq conditions pour qu’une monnaie devienne internationale :
- Grand pays ou grande zone monétaire ;
- Libelle des actifs échangés sur des marchés profonds et liquides ;
- Stable sur les plans interne (inflation) et externe (taux de change) ;
- Environnement réglementaire sécurisant et stabilité financière ;
- Soutenue par des attributs de pouvoir non économiques : force militaire, place dans les forums internationaux, etc.
II. A. L’euro remplit bien : 1, 3 et 4.
B. Il ne remplit pas bien :
- Le 2, car secteur bancaire trop développé et marchés financiers trop fragmentés ;
- Le 5 : l’influence géopolitique de l’europe fait défaut.
Ivashina, Scharfstein et Stein, 2012
I. L’inadéquation entre un système monétaire international unipolaire et une économie multipolaire a contribué à la crise de 2008.
II. Par exemple, elle a exposé la zone euro à une dépendance au dollar.
Gourinchas et Rey, 2016
La crise financière de 2008 a été suivie d’un déficit durable de demande agrégée, c’est-à-dire une insuffisance de la demande globale nécessaire pour stimuler la croissance économique, en raison :
- Du choc sur la confiance et la consommation ;
- De la réduction de l’effet de levier de l’endettement et du déstockage des dettes ;
- Des politiques de restriction budgétaire.
Mateos y Lago, Duttagupta et Goyal, 2009
I. Deux causes possible d’un crash du dollar :
- Les investisseurs internationaux perdent confiance dans la solvabilité des États-Unis ;
- Anticipation d’une monétisation massive des dettes américaines.
II. Nécessité de développer des sources alternatives de liquidités internationales :
- Internationalisation d’autres monnaies ;
- Développement des DTS.
Commission européenne, VAT Gap Report, 2024
I. En 2022, auraient manqué dans la collecte de la TVA au sein de l’Union européenne, avec de fortes disparités :
- 89,2 Md€, soit 7,0 % de l’impôt collecté ;
- 30,6 % en Roumanie ;
- 6,0 % en France ;
- 1,3 % au Portugal.
II. Ce chiffre, s’il marque une hausse par rapport à 2021 (75,9 Md€, soit 6,6 % du PIB de l’Union européenne) est en baisse en tendance longue depuis 2013, où il avait atteint :
168 Md€, soit près de 15 %.
📚 Outre la fraude, une part repose sur les entreprises en difficulté ou en faillite et incapables de rembourser la TVA collectées.
Zucman, 2014
I. En 2013, plus de 60 % des dépôts en Suisse détenus par des non-résidents « appartenaient » aux îles Vierges, à Jersey et à Panama, conduisant à une perte de recettes fiscales en 2013 de 190 Md$ au niveau mondial et 75 Md$ pour l’Europe.
II. L’auteur préconise :
- La transparence sur le patrimoine détenu, comme dans certains pays scandinaves où l’impôt sur le revenu payé par chaque contribuable est public ;
- Une taxe sur les exportations suisses en France, en Allemagne et en Italie coûterait plus à la Suisse que ce que ses banques gagnent par l’évasion fiscale sur des sommes en provenance de ces trois pays.
Besley et Persson, 2014
I. Les pays à bas revenus collectent généralement en imposition entre 10 et 20 % du PIB, tandis que la moyenne des pays à forts revenus est supérieure à 40 %.
II. Fractionnement ethnique = impôt négatif : un faible sentiment d’identité nationale réduit la capacité du gouvernement à lever l’impôt.
III. Dans les pays les moins avancés, il vaut mieux se concentrer sur le développement que sur l’amélioration du système fiscal.
Amiti, Redding et Weinstein, 2020
I. Aux États-Unis, les droits de douane ont été de facto payés par les consommageurs :
- Les fortes hausses de droit de douane sur les importations américaines en 2018-2019 se sont répercutées entièrement sur les prix à l’importation ;
- à l’exception de l’acier : les entreprises étrangères exportatrices ont diminué leurs marges.
II. La théorie économique enseigne pourtant que normalement les entreprises étrangères baissent leurs prix.
Hufbauer et Elliott, 1994
I. En 1990, droits de douane sur les importations de jus d’orange de 20 % :
Perte sociale pour les consommateurs américains de 70 M$, soit 13 % de la consommation de jus d’orange.
B. Les coûts nets en bien-être pour préserver les emplois aux États-Unis par des politiques commerciales protectionnistes sont extrêmement élevés :
- Ils sont estimés en moyenne à 54 000 $ par emploi protégé > coût moyen d’un travailleur ;
- Coût moyen pour les consommateurs par emploi protégé : 170 000 $.
Arulampalam et al., 2012
I. D’après cette étude empirique, les salaires supportent plus de la moitié de la charge fiscale pesant sur les entreprises au titre de l’impôt sur les sociétés et une augmentation peut même être absorbée à 100 % par des baisses de salaires sur le long terme.
II. Ceci s’explique par la plus grande rigidité des investissements en capital physique_ :
- en cas de hausse de la fiscalité, une entreprise doit réduire son stock de capital ;
- entraînant une diminution de la productivité du travail ;
- et donc une réduction des salaires ou, lorsque les salaires sont au plancher du salaire minimum, de l’emploi.
Feldstein, 2005
Une taxe sur l’épargne peut avoir in fine un effet opposé à l’effet anticipé :
- une taxe sur le capital augmente le coût du capital relativement à l’emploi, ce qui peut induire des effets de substitution favorables à l’emploi ;
- mais elle a pour effet de réduire les revenus du travail à long terme.
Mirrlees, 1971
Pour la fiscalité optimale, l y a un arbitrage à réaliser entre :
- La nécessité de taxer d’autant plus les individus que leur productivité est élevée, dans un objectif de redistribution ;
- Et l’incitation des plus productifs à travailler moins en cas de hausse du taux de l’impôt.
Slemrod, 1990
Mise en évidence des systèmes de taxation optimaux
I. A. Il est difficile de mesurer l’élasticité de l’offre de travail.
B. Les coûts liés à l’inefficacité du système fiscal sont potentiellement élevés.
II. La commodité à lever un impôt devrait être un critère pris en compte pour déterminer une bonne politique fiscale.
Taxe pigouvienne
Proposition de taxer les activités présentant des externalités négatives.
Ex : cheminées londoniennes contre le smog.
Arthur Pigou, The Economics of Welfare, 1920
Coase (théorème de), 1960, “The Problem of social cost”
En présence de bénéficiaires d’opérations engendrant des externalités négatives et de victimes de ces externalités, tant que toutes les parties peuvent négocier librement, la négociation aboutit toujours à un résultat efficace, quels que soient les droits initiaux.
Sur le fondement de cet article, Stigler lui donne le nom de « théorème de Coase » en 1966.
Grossman et Helpman, 1994
L’asymétrie entre des producteurs bien organisés et des consommateurs éparpillés est favorable à la mise en place de protectionnisme sous la forme de barrières tarifaires.
Zodrow et Mieszkowski, 1986
Modèle de concurrence fiscale
I. À l’international, si le capital circule librement, alors les rendements après impôts entre juridictions s’égalisent ex post :
- Si la productivité marginale est décroissante, une hausse de l’imposition augmente la productivité, puisque le capital diminue, ce qui compense l’impôt et ramène le rendement après impôt au niveau international ;
- En pratique, les investissements les moins productifs sont délocalisés ;
II. Si le gouvernement peut taxer une base immobile (terre, consommation, travail), alors la charge fiscale est déportée sur cette base immobile tandis que la base mobile échappe à l’impôt.
Andersson et Forslid, 2003
I. La taxe optimale pour conserver ses travailleurs mobiles n’est pas nécessairement la plus faible dans le pays possédant une agglomération d’entreprises :
Celle-ci produit une rente, qui peut être consacrée à la production de biens publics, attractifs pour le facteur de production mobile : infrastructures, éducation, etc. qui, à leur tour, attireront de nouvelles entreprises.
II. Plus les échanges sont libéralisés et les droits de douane abaissés, plus l’effet d’agglomération est renforcé.
Ivanova et al., 2005
I. La réforme russe de l’impôt sur le revenu en 2001 a entraîné une forte baisse du taux marginal supérieur de l’impôt (de 30 à 13 %).
En parallèle, il s’est pourtant produit une augmentation de 25 % des recettes fiscales en termes réels.
II. Cependant, la hausse des recettes n’est pas forcément venue d’un effet Laffer car, dans le même temps :
- un contrôle plus strict de cet impôt avait été mis en place ;
- une forte baisse de cotisations sociales avait été instituée.
Baldwin et al., 2003
La concurrence fiscale ne mène pas nécessairement vers un moins-disant, car certains pays bénéficient de rentes d’agglomération :
Économies d’échelle qui incitent les entreprises à concentrer leur activité en un petit nombre de lieux.
Devereux, 2006
L’ouverture financière du début des années 1980 et la croissance de la mobilité internationale des capitaux a conduit à une diminution de la charge fiscale sur les entreprises, mais pas à sa disparition, en raison du facteur de la demande locale, dont dépend aussi les choix de localisation des entreprises.
Benzarti et Carloni, 2018
La baisse de TVA de 19,6 % à 5,5 %, opérée en 2009 en faveur des restaurants avec service à table, n’a pas été essentiellement répercutée par des embauches et des baisses de prix, malgré les engagements : plus de la moitié a servi à augmenter les marges des restaurateurs.
Lorsque la TVA a été relevée à 7 % en 2012, puis à 10 % en 2014, les hausses de prix consécutives à la remontée du taux ont été 4 à 5 fois supérieures à celles des baisses après la réduction.
III. Les réductions de TVA ne sont donc pas une bonne mesure pour stimuler la demande car la baisse ne se répercute pas sur les prix.
Jaumotte, 2003
I. Les mesures qui stimulent la participation féminine au travail :
- L’application d’un traitement fiscal plus neutre au second apporteur de revenu ;
- Les subsides aux dépenses de garde d’enfants ;
- Les congés parentaux rémunérés.
II. Contrairement aux subsides aux dépenses de garde d’enfants, les prestations pour enfant exercent un effet négatif sur la participation féminine en raison de l’effet revenu.
II. La fiscalité de l’IR progressif introduit des distorsions excessives dans les décisions de participation au travail des femmes mariées.
Pesenti et Tille, 2000
I. Lors de la crise asiatique de 1997, les sorties nettes de capitaux :
- provenant des cinq pays les plus touchés, en l’occurrence la Thaïlande, la Malaisie, l’Indonésie, les Philippines et la Corée ;
- ont dépassé en quelques mois les 100 milliards de dollars, soit environ 10 % de leur PIB agrégé.
II. Deux causes ayant interagi :
- Les déséquilibres structurels et la faiblesse des politiques macroéconomiques ;
- Les modifications arbitraires des anticipations du marché.
III. Il est préférable de développer les outils de supervision financière et bancaire avant de s’ouvrir au commerce extérieur.
Rose, 2000
Mise en évidence - novatrice, sinon hétérodoxe de l’effet très positif d’une union monétaire sur le commerce entre les pays qui en sont membres (« effet Rose »).
⚠️ Critique portée sur l’usage biaisé des statistiques et les inversions de causalité du modèle (Baldwin, 2006).
Head et Mayer, 2014
I. La littérature économique n’a pas été capable d’arrêter une position claire sur l’effet Rose, notamment au sein de la zone euro : effets sur le commerce allant de nuls à plutôt positifs.
II. La recherche n’a pas su écarter les biais endogènes impliqués par la participation à une union monétaire : liens historiques et institutionnels, etc.
III. Il faut renverser la causalité :
Une union monétaire, en diminuant les frais de transaction, sera d’autant plus efficace que le commerce y est déjà développé, notamment via des accords de libre-échange.
Paradoxe de Triffin
I. Sous l’étalon-or, le dollar devait concilier stabilité, en tant qu’étalon monétaire, et abondance, comme instrument de réserve et de paiement.
II. L’afflux de capitaux destiné à financer les échanges entraînait son appréciation, augmentant le coût des exportations et creusant un déficit commercial chronique.
III. Cette détérioration compromettait la confiance dans la monnaie de référence, accentuant sa volatilité et fragilisant le système monétaire international.
IV. Les États-Unis ne pouvaient rééquilibrer leur balance commerciale sans risquer d’assécher les liquidités mondiales et d’inciter à l’adoption d’une autre monnaie de référence.
Triffin, 1960, Gold and the Dollar Crisis: The Future of Convertibility
Cœuré, 2015, Le rôle international de l’euro: théorie, pratique, et perspectives
**I. Les déterminants principaux d’une monnaie internationale sont :
1° L’inertie : habitudes, coûts irrécupérables, rendements croissants liés aux réseaux ou manque de solutions alternatives crédibles ;
2° Le poids économique : marchés financiers profonds et liquides ;
3° La crédibilité : les monnaies stables, d’un point de vue domestique et extérieur, sont attrayantes pour les non-résidents comme réserves de valeur.
II. Un système monétaire multipolaire serait sans doute souhaitable.
A. Le risque parfois avancé d’instabilité d’un système monétaire multipolaire, par des retraits massifs d’agents craignants pour la valeur future de leurs avoirs, serait limité :
- par le degré de substituabilité entre les monnaies de réserve ;
- par les politiques des gestionnaires de réserves officielles, dotés d’une vision de long terme et plus enclins à la recherche de la stabilité ;
- comme l’ont montré la crise financière de 2008 et la crise des dettes souveraines, même lorsque des pays émetteurs de réserves doivent faire face à des chocs de grande ampleur, la capacité de rééquilibrage des portefeuilles de réserves peut rester limitée.
B. Il y a des avantages à la multipolarité :
- Elle contribuerait à résorber d’éventuelles pénuries d’actifs sûrs dans la mesure où l’offre de ces actifs pourrait être plus élastique pour répondre aux besoins croissants de l’économie mondiale et à la demande des économies de marché émergentes ;
- Elle serait un facteur de discipline plus important pour les politiques des émetteurs de monnaie de réserve, qui devraient s’employer à résoudre rapidement toute détérioration de leurs fondamentaux face aux pressions découlant de l’existence de concurrents.
III. L’évolution vers la multipolarité est de toute façon probable, compte tenu des développements de l’euro et du renminbi.
Malinvaud, 1998
I. Rapport rendu au Premier ministre sur les conséquences à court, moyen et long terme d’une modification de l’assiette des cotisations patronales, en accordant une attention particulière aux avantages et inconvénients d’un élargissement de l’assiette des cotisations à la valeur ajoutée.
II. A. Toute réforme agissant par la modification du coût du travail ne produit des effets qu’à long terme. Il convient donc de se placer à cet horizon (10 ans) pour étudier l’impact sur l’emploi d’une réforme des cotisations patronales.
B. Les réformes de la fiscalité qui concerneraient indistinctement toutes les qualifications auraient beaucoup moins d’effet sur le coût réel du travail que leurs impacts directs conduisent à le faire penser. Tout mode de financement a finalement pour effet de faire payer à terme par le travail le coût de la protection sociale. Bien que les substitutions potentielles soient importantes, les substitutions réelles dépendront assez peu des assiettes de financement.
C. S’agissant d’un allégement du coût du travail sur les bas salaires, la conclusion est autre, car le déséquilibre entre offre et demande de travail est plus marqué et plus durable pour les faibles qualifications. En outre, le SMIC rend les bas salaires insensibles aux variations de la demande de travail.
D. À long terme, il y a une équivalence générale entre cotisations sociales, impôts sur le revenu et taxes sur la consommation.
Boskin et Sheshinski, 1983
I. Dans un régime d’imposition optimal, la perte d’efficience induite par le système fiscal est réduite lorsque les taux d’imposition marginaux sont inférieurs pour les individus dont l’offre de travail est plus élastique et donc plus sensible aux taux d’imposition marginaux.
II. Par conséquent, dans un couple, le taux optimal d’impôt sur le revenu pour l’arbitrage entre le travail et le loisir ou l’investissement dans le foyer est plus bas pour la personne qui gagne moins que le conjoint qui apporte le revenu principal du foyer.
Ramsey, 1927
Règle de Ramsey
I. A. Il est préférable de taxer là où offre et demande sont peu sensibles aux prix.
B. En effet, la hausse marginale de l’impôt conduit à des effets de substitution, notamment sous la forme de dépenses. Il faut donc privilégier des agents dont l’activité est moins sensible aux prix.
II. En d’autres termes, le taux d’imposition sur chaque marché doit être inversement proportionnel aux élasticités-prix compensées de l’offre et de la demande.
⚠️ Cet article a été critiqué car son raisonnement conduit à des situations jugées inéquitables, voire à taxer les plus pauvres en faveur des plus riches :
- à imposer les produits de première nécessité plutôt que les produits de luxe ;
- le travail plutôt que le capital ;
- les dépenses de santé plutôt que celles de loisirs, etc.
FMI, Perks et al., 2021
Filet mondial de sécurité financière (Global Financial Safety Net) :
1° Il est constitué de l’ensemble des mécanismes nationaux, bilatéraux, régionaux ou multilatéraux existant pour absorber d’éventuels renversements des flux de capitaux privés ;
2° Cet ensemble de mécanismes et d’instruments procure une assurance pour prévenir ou traiter les crises de balance des paiements en fournissant de la liquidité internationale ;
3° Il se compose des réserves de change, des accords de swap entre banques centrales, des ressources du FMI, et des arrangements financiers régionaux ;
4° Il atteignait, fin 2020, 10 000 Md de DTS, soit 13 000 Md$.
OCDE, 2013, Prix effectifs du carbone
I. La coexistence de taxes, de marchés et de normes conduit à des prix explicites ou implicites du carbone variés, ce qui rend la réduction des émissions de carbone particulièrement inefficace.
II. L’étude préconise le recours aux taxes et systèmes d’échange, qui s’avèrent, en pratique, préférables aux tarifs d’achat, subventions et instruments réglementaires, conformément à la théorie.
III. Elle indique que le coût moyen de réduction d’une tonne d’émission de carbone dans le secteur routier peut être jusqu’à huit fois plus élevé lorsque des instruments autres qu’une taxe sur les carburants sont utilisés.
Crassous, Quirion, Ghersi et Combet, « Taxe carbone - Recyclage des recettes et double dividende », Conseil économique pour le développement durable (CEDD) – 2009
I. À travers la notion, désormais largement popularisée, de « double dividende », la théorie économique postule que la fiscalité environnementale peut procurer simultanément deux avantages à la collectivité :
1° Le premier « dividende » réside dans la réduction de la pollution et des dommages qui en découlent, et est permis par le caractère incitatif de la fiscalité (« l’effet incitatif du signal-prix sur les comportements ») ;
2° le second « dividende » s’attache à l’usage des recettes procurées par cette fiscalité. Il s’agit du gain collectif, disjoint du bénéfice environnemental, et permis par une utilisation pertinente des recettes budgétaires générées par la taxe (ou, le cas échéant, par les enchères).
II. Bien qu’une fiscalité écologique ait vocation à réduire son assiette en dissuadant les comportements nuisibles à l’environnement, ses recettes ne sont jamais nulles.
Mirrlees, 2011
L’existence d’un véritable double-dividende n’est pas corroborée par les travaux empiriques :
1° Les taxes environnementales induisent des pertes de bien-être (par exemple à travers des inégalités accrues) ;
2° La redistribution du produit des taxes aux industries polluantes et/ou aux ménages modestes altère également l’existence de ce double dividende.
Ferreira, Convery et McDonnell, 2007, The Most Popular Tax in Europe? Lessons from the Irish Plastic Bags
I. Les instruments de tarification fondés sur le principe du pollueur-payeur sont des moyens utiles et efficaces pour internaliser les coûts environnementaux et encourager l’économie circulaire.
II. En 2002, l’Irlande a introduit une taxe élevée sur les sacs plastiques (0,15 € par sac) :
- en un an, la consommation de ces sacs a chuté de 90 % ;
- pour un coût d’administration correspondant à seulement 3 % des recettes.
Rapport Monti, 2017
Neuf propositions de ressources propres pour réformer le financement de l’Union européenne sans augmenter les contributions des États membres, parmi lesquelles :
- Le remplacement des contributions fondée sur le PIB par une taxe carbone commune ;
- Un IS commun ;
- Une TVA réformée commune ;
- Une taxe sur le secteur financier.
Piketty, 2013
I. L’inégalité constatée est notée r > g,
où r = taux de rendement du capital et g = taux de croissance.
II. Proposition d’introduire un impôt mondial sur la propriété et la circulation du capital pour lutter contre la concentration de la richesse.
Le taux commencerait à un niveau faible, mais augmenterait jusqu’à 10 % pour les patrimoines de milliardaires. La mise en œuvre d’un tel impôt nécessiterait une coopération mondiale, difficile à mettre en œuvre.
L’argument avancé est qu’il est sans « utilité du point de vue de l’intérêt général » puisque sa « compression » dans la seconde moitié du XXe siècle n’a pas « empêché le développement économique de suivre son cours ».
Nordhaus, 2015
I. Un club du climat pourrait apporter une solution efficace au problème des passagers clandestins en matière de lutte contre le réchauffement climatique par un petit groupe de pays volontaristes.
II. La réduction des émissions au sein d’un club de grands pays polluants serait harmonisée à l’aide d’un prix du carbone cible :
1° Le club serait ouvert à tout nouveau participant ;
2° les réfractaires seraient pénalisés à travers une taxe uniforme sur leurs exportations vers les pays du club.
📚 Selon l’auteur, un droit de douane faible, de l’ordre de 2 %, suffirait à inciter à rejoindre le club tant que le prix du carbone n’y est pas trop élevé.
Hall, 2014
Le vieillissement démographique compte pour la moitié dans les causes de la baisse significative du taux d’activité aux États-Unis dans la période récente, en raison de la baisse du taux de mortalité dans les populations âgées de 60 à 80 ans.
Gordon, 2014
I. La chute sans précédent du taux d’activité aux États-Unis dans la période récente est provoquée par un mouvement de délocalisation (offshoring) et par la concurrence des produits bons marchés des pays émergents.
La participation au marché du travail a diminué pour les hommes et les femmes, mais de façon beaucoup plus rapide pour les hommes, avec une forte augmentation du nombre de travailleurs découragés.
B. L’auteur considère cette chute du taux d’activité comme l’un des facteurs de la baisse séculaire de la croissance potentielle aux États-Unis.
II. Le taux de croissance annuel du PIB américain a été en moyenne de 2 % entre 1891 et 2007. Selon l’auteur, elle devrait désormais s’élever à 1,3 % par an.
⚠️ N.B. : cette prévision a été démentie au moins jusqu’en 2020 (sauf en 2016, plancher de 1,3 %; pour la suite, à voir).
OIT, Emploi et questions sociales dans le monde 2015
I. Le déclin de l’emploi salarié stable, à temps plein et à contrat indéterminé, est l’une des évolutions majeures du début du XXIe siècle.
II. En contrepartie, l’emploi atypique se développe sous ses différentes formes :
- travail temporaire ;
- travail à temps partiel ;
- travail intérimaire et autres relations d’emploi multipartites ;
- relation de travail déguisée et emploi juridiquement indépendant mais économiquement dépendant.
III. L’emploi atypique peut conduire à de l’insécurité pour les travailleurs, requiert des exigences de gestion de la part de l’entreprise, et comporte des externalités négatives :
- sous-investissement dans l’innovation ;
- ralentissement des gains de productivité ;
- risques pour la viabilité à long terme des systèmes de sécurité sociale ;
- volatilité du marché du travail ;
- médiocrité des performances économiques.
Bouvier et Pilarski, 2008
I. A. En France, de 1949 à 1974, le PIB en volume a progressé de + 5,4 % en moyenne annuelle, porté pour l’essentiel par les activités industrielles et de construction d’une part, les services principalement marchands d’autre part.
B. Après la crise pétrolière, la croissance a ralenti à un rythme de 2,2 % annuel qui repose désormais essentiellement sur les services marchands : la part des services marchands dans la valeur ajoutée totale de l’économie est passée de 34 % en 1949 à 56 % en 2008, tandis que la part des services non marchands est passée de 12 % à 21 %.
À l’inverse, le poids de l’industrie a diminué de 27 % en 1949 à 14 % en 2008, et celui de l’agriculture a fondu dans le même temps de 21 % à 2 %.
II. De 1974 à 2008, les effectifs de l’emploi industriel en France ont diminué en moyenne chaque année de 1,5 %, tandis que ceux de l’emploi dans les services ont augmenté de 1,5 à 2 %.
Furman et Orszag, 2015
I. Aux États-Unis, en 1970, le 1 % des plus riches en termes de revenus percevaient 8 % des revenus totaux. En 2010, ils percevaient 17 %. Cette augmentation de 9 points dans la part du revenu des 1 % les plus riches provenait, sur cette même période :
- à 68 % d’une hausse des inégalités dans les revenus du travail ;
- à 32 % d’une hausse des inégalités dans les revenus du capital ;
- à 0 % d’un déplacement des revenus du travail vers ceux du capital.
⚠️ Contrairement à la perception commune, le déplacement des revenus du travail vers le capital n’a joué aucun rôle.
II. Les auteurs pointent plutôt l’existence de rentes économiques comme sources d’inégalités. Un pouvoir de marché accru peut aller de pair avec des rentes plus élevées et permettre aux entreprises d’empêcher l’entrée de nouveaux concurrents sur le marché. Ainsi, certaines entreprises, dans les secteurs technologique et financier par exemple, dégagent systématiquement des profits supérieurs à la normale qu’elles partagent avec leurs salariés à travers des avantages de salaire.
Hsieh et al., 2019
L’accès des femmes et des minorités aux emplois de responsabilité a été à l’origine de 20 à 40 % de la croissance du PIB par tête aux États-Unis entre 1960 et 2010.
France Stratégie, 2016, « Le coût économique des discriminations »
I. La composante inexpliquée des écarts salariaux entre hommes et femmes est de l’ordre de 12 %.
II. Le gain économique potentiel d’élimination des discriminations (de sexe, d’origine, etc.), en fonction des différents scénarios envisagés par l’étude, irait de 3,6 % (simple élimination des écarts de salaires) à 14 % (en y ajoutant une convergence des heures travaillées, des taux d’emploi et d’accès aux postes élevés, ainsi qu’un alignement des taux d’éducation) de PIB supplémentaire.
Abowd, Corbel et Kramarz, 1999
I. Entre 1987 et 1990, en France :
- Une création d’emploi masquait trois embauches et deux licenciements ;
- Une destruction d’emploi masquait une embauche et deux départs.
→ La création nette d’emploi sur l’année, grandeur pertinente au niveau macro-économique, n’est que la résultante de ce grand brassage.
II. Quand un établissement diminue le nombre de ses salariés, il réduit les embauches plutôt qu’il n’augmente les licenciements.
III. Deux tiers des emplois se font à durée déterminée, et le non renouvellement de ces emplois à durée déterminée représentent la moitié des licenciements.
Shimer, 2007
I. Méthode fondée sur les « taux de hasard », c’est-à-dire la probabilité qu’une personne en emploi tombe au chômage ou qu’un chômeur trouve un emploi.
II. A. Sur longue période, les variations trimestrielles du chômage américain sont justifiées :
1° aux trois quarts par les fluctuations du taux de sortie ;
2° contre un quart seulement par le taux d’entrée.
B. Durant les crises de 1991 et de 2007, 95 % des chômeurs supplémentaires sont dus à une réduction de l’offre de travail.
III. Par conséquent, si l’on veut comprendre les fluctuations du chômage, il faut comprendre les fluctuations dans le taux de transition du chômage vers l’emploi, en d’autres termes les « débouchés du chômage ». Cette constatation s’oppose aux vues conventionnelles (par exemple, Blanchard et Diamond, 1990) selon lesquelles les récessions sont des périodes caractérisées principalement par une forte hausse du taux de sortie de l’emploi.
Elsby et al., 2013
En utilisant la méthode des « taux de hasard » de Shimer (2008), les auteurs confirment :
- que les économies anglo-saxonnes et nordiques se caractérisent par des flux d’entrée et de sortie beaucoup plus importants que les économies d’Europe continentale ;
- que si les variations des flux de sortie prédominent dans l’explication des fluctuations du chômage aux États-Unis, ce n’est pas le cas des pays nordiques et continentaux, où les flux d’entrée et de sortie y contribuent de manière égale.
Ward-Warmedinger et Macchiarelli, 2013
I. A. Les pays aux indices de mobilité entre les différents états de rapport à l’emploi (employé, chômeur, inactif) les plus élevés en Europe sont, par ordre décroissant : le Danemark, l’Espagne, la Suède, les Pays-Bas, la Roumanie, la République tchèque et la Finlande.
B. Les pays les moins mobiles sont, par ordre croissant : la Belgique, la Grèce, la Slovénie, la Bulgarie, la Slovaquie, la Lettonie, la Pologne et la Hongrie.
C. En général, la fluidité du marché du travail, telle que mesurée par cet indice de mobilité, est négativement corrélée avec le taux de chômage.
II. A. La probabilité de rester en emploi l’année suivante ne dépend presque pas de l’âge.
B. En revanche, les chômeurs jeunes de 25 à 29 ans ont plus de facilité à trouver un emploi que les autres catégories d’âge, tandis que les travailleurs de plus de 55 ans ont peu de chance de trouver un emploi s’ils tombent au chômage et presque aucun s’ils sont inactifs.
OCDE, Perspectives de l’emploi 2015
En étudiant les probabilités de transition entre quatre statuts – emploi formel, emploi informel, chômage et inactivité – dans les pays émergents, il est mis en évidence que les personnes employées dans le secteur informel tendent à y rester et que lorsqu’elles en sortent, c’est pour entrer dans le chômage ou l’inactivité.
L’emploi informel n’est pas du tout une porte d’entrée vers l’emploi formel.
Lucas, 1981
I. Dans les années 1980, la nouvelle école classique bat en brèche l’idée d’un arbitrage entre inflation et chômage, même à court terme.
II. Si les anticipations sont rationnelles, les hausses de salaires reflètent à tout moment les hausses des prix.
⚠️ La réponse des néo-keynésiens a été la justification théorique de l’existence de rigidités nominales par les « coûts de menu » ou l’emboîtement des contrats.
Nicoletti et al., 2001
I. Mise en évidence empirique d’une corrélation, entre le taux de syndicalisation et le taux de chômage, positive, mais modeste.
II. Illustration de la complémentarité institutionnelle, c’est-à-dire le fait que le chômage est toujours dû à une combinaison de facteurs :
- Ici, l’interaction entre la réglementation des licenciements et du marché, d’une part ;
- et le degré de coopération entre employés et employeurs, d’autre part.
Blanchard et Wolfers, 2000
I. Les caractéristiques du marché du travail évoluent lentement, alors que les taux de chômage ont connu des variations spectaculaires sur les décennies 1950 à 2000.
II. Interprétation proposée de cette contradiction apparente :
1° Il existe des explications qui reposent sur l’effet des chocs sur le taux de chômage naturel ;
2° D’autres explications reposent sur les caractéristiques propres des institutions du marché du travail, qui influeraient sur le taux de chômage naturel ;
3° Les auteurs avancent que une explication reposant sur l’interaction entre chocs et institutions.
III. A. En d’autres termes, les institutions du marché du travail influencent la vitesse à laquelle chaque économie s’adapte à des chocs tels que les chocs pétroliers dans les années 1970 ou la hausse des taux d’intérêt réels dans les années 1980.
B. Ainsi, les économies qui se portaient bien dans les années 1960 se sont révélées mal armées pour absorber les chocs macro-économiques des années 1970 et 1980, puis les chocs structurels liés à la mondialisation des années 1990 et 2000.
Blanchard et Giavazzi, 2001
I. Comme les rentes de monopole d’une entreprise sont souvent partiellement appropriées par les salariés, il est moins difficile de réformer le marché du travail lorsque le marché des biens et des services est dérégulé (et que les rentes sont donc faibles).
II. Selon ce modèle :
- à court terme, la dérégulation du marché du travail affecte les travailleurs en réduisant la part salariale mais sans influencer l’emploi ;
- à long terme, l’augmentation de la part des profits attire de nouvelles entreprises, ce qui entraîne un renforcement de la concurrence, une remontée du salaire réel à son niveau initial et une baisse du niveau du chômage.
Bertrand et Kramarz, 2002
I. A. La loi du 27 décembre 1973 d’orientation du commerce et de l’artisanat, dite loi Royer, avait pour objectif de permettre un développement équilibré des différentes formes de commerce, tout en protégeant le petit commerce.
B. Les ouvertures ou extensions de grandes surfaces de vente dans les localités les moins peuplées étaient soumises à autorisation administrative.
C. Elle a eu pour effet d’éviter un « écrasement brutal » du petit commerce et de ralentir, en les étalant dans le temps, les implantations de grandes surfaces.
II. Les créations d’emploi ont été significativement plus faibles dans les départements français où l’installation de nouvelles grandes surfaces a été la plus découragée, la perte d’emploi étant évaluée à 1 300 par an par les auteurs.
⚠️ La faiblesse de la croissance de l’emploi dans le secteur français de la distribution depuis les années 1970 ne trouve donc pas son unique cause dans les rigidités du marché du travail.
III. A. → La solution pour accroître l’emploi ne passe pas que par la réforme du marché du travail, surtout lorsque celle-ci rencontre beaucoup de résistances, comme c’est le cas en Europe. Lever les barrières à l’entrée de secteurs concurrentiels peut également soutenir l’emploi.
B. → Restreindre la concurrence aboutit à créer des rentes qui sont captées par les détenteurs de capital et les salariés en place, avec pour effet moins d’emploi.
Lindbeck et Snower, 1986, 2002
I. A. Les coûts de rotation de la main-d’œuvre (c’est-à-dire les coûts supportés par une entreprise lorsqu’elle licencie des employés, puis en embauche et en forme d’autres) contribuent à donner du pouvoir de marché aux employés en place, les insiders.
B. Les outsiders (les chômeurs et les personnes employées sur des contrats temporaires ou par des sous-traitants) ne bénéficient pas du même pouvoir de marché et leurs intérêts ne sont pas pris en compte de la même façon dans la négociation de salaire.
C. Comme ces coûts de rotation représentent l’écart entre la rémunération des insiders et celle des nouveaux entrants potentiels, les insiders les utilisent à leur profit et leur salaire est fixé un niveau supérieur à celui de l’équilibre concurrentiel.
II. Dans tous les pays, ce sont les catégories défavorisées – travailleurs jeunes, immigrés, peu qualifiés et temporaires – qui font les frais de la chute brutale de la demande d’heures travaillées, en raison tout particulièrement des écarts de coûts de remplacement du personnel, c’est-à-dire des coûts supportés par l’employeur lorsqu’il remplace un salarié par une nouvelle recrue.
Flamand, 2016
I. Étude empirique du marché français de l’emploi de 2003 à 2014, à partir de l’enquête Emploi de l’Insee, ainsi que de l’impact spécifique de la crise de 2008 sur le fonctionnement de ce marché.
II. A. Après la crise, les allers/retours entre le chômage et l’emploi représentent près de six transitions sur dix, ce qui témoigne de l‘instabilité du marché du travail.
B. Le risque de basculement vers le chômage dépend fortement du type de contrat de travail, ce qui atteste de la dualité du marché du travail : il est dix fois plus important pour les salariés en intérim et six fois plus important pour les salariés en CDD que pour les salariés en CDI.
C. Sur le marché français (N.B. : comme dans d’autres pays européens) :
1° Les nouveaux entrants alternent, généralement pendant plusieurs années, emplois de courte durée et chômage, avant d’accéder à un contrat à durée indéterminée ;
2° Ceci aboutit à une moindre productivité, à des salaires plus faibles et à un accès plus difficile aux marchés du crédit et du logement.
D. « Déstabilisation des stables »* : après la crise, malgré son atténuation par des mesures de flexibilité interne, on assiste également à une réduction de la durée des CDI. En outre, plus d’un tiers des CDI sont rompus avant la fin de la première année, qui concerne d’abord les moins de vingt-cinq ans et les plus de cinquante-cinq ans.
* Selon l’auteur, les stables sont ceux qui ont réalisé les trois quarts de leur carrière chez le même employeur.
Calmfors et Driffill, 1988
I. Si les négociations sont complètement centralisées (au niveau national), un syndicat va modérer ses revendications salariales car il internalise l’impact du salaire sur l’emploi.
II. Au contraire, si les négociations sont complètement décentralisées (au niveau des entreprises), il n’y a plus de surplus à partager car chaque entreprise est en concurrence parfaite.
III. Ce n’est que lorsque les négociations se font à un niveau intermédiaire que le pouvoir de marché de chaque branche sur son marché se traduit par un salaire trop élevé et un emploi trop faible.
⚠️ La courbe en cloche entre degré de centralisation de négociation et taux de chômage est toutefois peu confirmée par les travaux empiriques.
Blanchard et Summers, 1986
I. Mise en évidence d’un effet d’hystérèse :
1° Une fois qu’on a laissé s’accroître le chômage, celui-ci ne peut revenir immédiatement à sa valeur d’équilibre de long terme (le Nairu de long terme) qu’au prix d’une hausse de l’inflation ;
2° Trois canaux à la suite de l’allongement du non-emploi :
1. dégradation du capital humain ;
2. baisse de l’accumulation du capital physique ;
3. baisse de la négociation salariale.
II. A. Cette hypothèse alourdit considérablement la responsabilité des politiques macro-économiques dans la lutte contre le chômage : une politique budgétaire ou monétaire restrictive, par exemple, qui pèse temporairement sur la demande, pourrait conduire à une hausse persistante du taux de chômage.
B. Si cet effet est avéré, cela signifie en particulier que les banques centrales ont un rôle à jouer dans la réduction du chômage non seulement à court terme, mais également à long terme.
⚠️ Cette théorie, de prime abord convaincante, voit sa pertinence empirique discutée.
Yellen, 1984
Théorie du salaire d’efficience
I. I_l est dans l’intérêt des entreprises de ne pas baisser les salaires qu’elle versent_, même dans un contexte de chômage involontaire, parce que :
1° Cela peut contribuer à réduire le turn-over ;
2° Cela peut réduire les phénomènes de sélection adverse : les entreprises, si elles proposaient un prix trop bas, auraient davantage de chance d’attirer des candidats ne remplissant pas les attentes du poste ;
3° Les entreprises ne disposant pas de toute l’information dans l’investissement des salariés dans l’emploi qu’ils occupent (aléa moral), cela leur permet d’élever l’effort des travailleurs ; cet effort est une caractéristique qu’elles ne peuvent observer et donc pas rémunérer directement, mais dont elles observent l’impact sur la productivité.
II. ⚠️ Il s’agit de l’une des explications à la rigidité du salaire réel.
Blanchard, Jaumotte, Loungani, 2013
I. A. Étude organisée autour de deux concepts :
1° La micro flexibilité, c’est-à-dire la capacité de l’économie de prendre en charge la réaffectation des travailleurs aux emplois susceptibles de soutenir la croissance ;
2° La macro flexibilité, c’est-à-dire la capacité de l’économie à s’adapter aux chocs macroéconomiques.
B. Les institutions du marché du travail doivent permettre de réaliser un compromis difficile entre ces deux types de flexibilité, la protection des travailleurs et les incitations à investir pour les entreprises.
II. On peut distinguer trois grands types de régime d’assurance chômage :
1° Les pays anglo-saxons se caractérisent par une faible protection de l’emploi et une assurance chômage peu généreuse. Dans ces pays, les flux vers et hors du chômage sont importants ;
2° Les pays d’Europe continentale affichent une protection de l’emploi élevée et une assurance chômage généreuse, mais des politiques actives du marché du travail limitées. Dans ces pays, les flux sont faibles ;
3° Les pays nordiques combinent une protection de l’emploi limitée et une assurance chômage généreuse mais conditionnelle. L’idée générale est qu’il « faut protéger les autres travailleurs et non les emplois » (modèle dominant de la flexisécurité/flex-sécurité). Dans ces pays, les flux du marché du travail sont importants.
Sapir, 2005
Selon l’auteur, « the notion of “European social model” is misleading ».
I. A. L’Europe se distingue par un niveau élevé de protection sociale, mais plusieurs modèles coexistent en son sein avec des performances diverses.
B. Les modèles « nordique » et « anglo-saxon » sont les plus efficaces, mais seul le premier allie efficacité et équité.
C. En revanche, le modèle « continental » et le modèle « méditerranéen », qui conjointement englobent les deux tiers des PNB de l’ensemble de l’Union européenne à 25 et 90 % des PNB des 12 membres de la zone euro, sont inefficaces : ils sont donc par définition insoutenables et doivent être réformés.
II. Les politiques sociales et les politiques de l’emploi sont décidées au niveau national et non au niveau européen. Pour autant, il y aurait des bénéfices à coordonner ces politiques, notamment entre Etats membres de la zone euro.
Coe et Snower, 1997
I. En présence de distorsions multiples, supprimer l’une d’entre elles sans toucher aux autres n’améliore pas nécessairement la situation.
II. Sur le marché du travail, un grand nombre de politiques (indemnisation du chômage, formation, concurrence, etc.) sont complémentaires :
1° Dans le sens où l’effet de chacune d’entre elles est plus important quand elle est mise en œuvre en même temps que les autres, en raison d’interdépendances ;
2° Par exemple, un régime d’indemnisation trop important peut décourager le chômeur de rechercher un emploi, tandis que l’employeur est découragé par des cotisations à verser trop importantes.
III. Ceci pourrait expliquer pourquoi, alors même que les pays européens ne peuvent se caractériser par l’inaction en matière de réforme du marché du travail, les réformes y ont globalement échoué à réduire le chômage.
Fernandez et Rodrik, 1991
I. A. L’incertitude ex ante sur la répartition des gains d’une réforme, en termes de gagnants et de perdants, induit un biais en faveur du statu quo.
B. Il ne s’agit pas ici d’aversion au risque ou d’irrationalité, mais d’un manque d’information qui réduit mécaniquement la population susceptible d’adhérer ex ante à une réforme qui lui serait bénéfique ex post.
II. A. En conséquence, une réforme potentiellement bénéfique pour une majorité de la population peut être démocratiquement rejetée.
B. Ceci explique pourquoi il est si difficile pour les politiques de mettre en œuvre certaines politiques recommandées par les économistes.
Saint-Paul, 2000
Il peut se former des biais en faveur du statu quo sur le marché du travail :
1° La coalition susceptible de soutenir une redistribution par l’impôt n’est pas la même que celle qui soutient un contrôle des inégalités par la fixation du salaire minimum. La seconde solution peut donc être préférée, même si elle est économiquement moins efficace.
2° Les institutions créent leur propre soutien puisqu’une fraction de la population ne seraient pas employée sans elles : il s’agit d’une rente dans ce cas précis, qui augmente d’autant la résistance à la réforme qu’elle sera forte.
3° La résistance à la réforme atteint son maximum à la fin d’une récession économique.
Bruno Coquet, 2016
I. De 2002 à 2016, plus de cinquante réformes de l’emploi ont été votées par le Parlement en France, soit une par trimestre.
II. Cette instabilité, paradoxalement accompagnée d’une grande stabilité de l’indicateur de protection de l’emploi, a nui à la crédibilité et à l’efficacité des mesures prises.
Deaton, 2010
I. Les méthodes d’évaluation ex post des politiques économiques ne sont pas infaillibles.
II. A. Certes, elles permettent d’indiquer si un dispositif a eu ou non l’effet souhaité.
B. Cependant :
1° Elles ne permettent pas de comprendre pourquoi il a réussi ou échoué ;
2° ni de savoir si ces résultats sont transposables dans l’espace et le temps ;
3° Elles ne prennent pas en compte l’impact sur l’emploi des hausses d’impôt nécessaires pour les financer.
Layard, Nickell, Jackman, 1991
Proposition initiale du modèle WS-PS
I. Ce modèle analyse plus finement que le Nairu les déterminants du taux de chômage d’équilibre et les relie à des déterminants structurels explicites.
II. Il fait référence au croisement :
- d’une courbe décrivant la fixation du salaire réel comme une fonction décroissante du taux de chômage (Wage setting) ;
- et d’une courbe décrivant le comportement de marge des entreprises, visant à la formation des prix relativement aux salaires comme une fonction croissante du taux de chômage (Price setting).
III. A. La courbe PS est croissante parce que le rapport du prix au salaire, P/W, est d’autant plus élevé que la conjoncture est bonne et le chômage faible. En effet, plus il y a de chômage, plus les entreprises se feront la guerre des prix pour vendre leurs produits et donc moins ces dernières auront des pouvoirs de price-making.
B. L’intersection des deux courbes donne le taux de chômage d’équilibre à long terme.
Cf. article.

Nash (marchandage de), 1950
Modélisation possible de la négociation salariale.
I. Les entreprises et les syndicats négocient sur le couple salaire-emploi. La négociation conduit à un point de tangence entre une courbe d’iso-utilité (création d’emploi) et une courbe d’iso-profit (maximisation du profit).
L’ensemble de ces points de tangence, appelé courbe des contrats, représente tous les couples (salaire, emploi) optimaux au sens de Pareto.
II. A. Le modèle est efficace parce qu’il conduit à un optimum de Pareto : par exemple, il n’est pas possible d’élever l’utilité du syndicat sans réduire le profit de l’entreprise.
B. Néanmoins, il est peu réaliste : en France, 5 % seulement des négociations d’entreprise portaient sur l’emploi dans les années 2000 (Dares, 2008).

Thaler et Sunstein, 2009
Ouvrage sur la notion de nudge* ou application du « paternalisme libéral »
I. Des suggestions indirectes peuvent tirer profiter des sciences du comportement pour obtenir la décision souhaitée pour le groupe, sans coercition.
II. Exemple du don d’organe :
1° En Allemagne, le principe est de ne pas donner en cas de décès, sauf consentement expressément exprimé ;
2° En Autriche, le principe inverse prévaut : sauf expression inverse, les personnes sont donneuses d’organe par défaut.
→ Alors que les pays sont culturellement très proches, 99 % des autrichiens sont donneurs potentiels, contre 15 % des Allemands.
* to nudge: to push somebody gently, especially with your elbow, in order to get their attention.//a nudge: a slight push, usually with the elbow.
Arrondel, 2017
I. En 2011, trois questions très simples (issues de Lusardi et Mitchell, 2014) sont posées à un échantillon représentatif de la population adulte française :
1° La première porte sur le calcul d’un intérêt composé ;
2° La deuxième sur l’effet de l’inflation sur le pouvoir d’achat réel ;
3° La capacité à hiérarchiser le risque associé à différents produits financiers.
II. D’après cette enquête, un tiers seulement des Français auraient été capables de répondre correctement à chacune de ces questions.
Selon des comparaisons internationales, cette éducation financière variait récemment d’un peu plus de 3 % en Russie et en Roumanie à 53 % en Allemagne. Elle varie aussi considérablement selon le niveau d’études, les préférences politiques, etc.
III. A. Si l’éducation financière joue bien un rôle sur la vision de long terme et le portefeuille des investisseurs, elle est loin d’être le déterminant majeur de la propension à investir dans l’économie. Améliorer les connaissances économiques des jeunes épargnants sera loin d’être le remède miracle.
B. D’autres leviers sont possibles : fiscalité, coûts de transactions, informations, culture du risque, optimisme, etc.
Kahneman et Tversky, 2000
I. Pour étudier la prise de décision face au risque, l’économie orthodoxe repose sur la théorie de l’utilité espérée de Von Neuman et Morgenstern.
II. Les auteurs vont introduire une rupture dans la théorie de la décision en situation de risque, en démontrant que les anticipations des ménages ne sont généralement pas rationnelles et sont souvent incohérentes :
1° En effet, les agents utilisent des heuristiques*, ce qui présente le défaut de les conduire à des biais de comportement ;
2° Les auteurs identifient l’optimisme, le conservatisme, l’aversion au risque dans le domaine des gains et le goût pour le risque dans le domaine des pertes.
* L’heuristique (du grec ancien εὑρίσκω, heuriskô, « je trouve ») est « l’art d’inventer, de faire des découvertes » en résolvant des problèmes à partir de connaissances incomplètes. Ce type d’analyse permet d’aboutir en un temps limité à des solutions acceptables. Celles-ci peuvent s’écarter de la solution optimale.
Lusardi et Mitchell, 2007, 2014
I. Les baby-boomers ont des situations de fortunes extrêmement hétérogènes.
II. Les auteurs proposent une méthodologie pour calculer l’éducation financière des agents. Trois questions simples sont posées :
1° Si les chances de tomber malade sont de 10 %, et que la population comprend 1 000 personnes, combien de personnes sont malades ?
2° Si une loterie offre 2 M$ de prix, et qu’il y a cinq gagnants, combien gagne chacun d’eux ?
3° Enfin une question portant sur la notion d’intérêts composés.
III. Il apparaît que la plupart des ménages ne savent pas répondre correctement aux trois questions, ce qui implique qu’ils ne maîtrisent pas les rudiments de gestion des risques et d’allocation de portefeuille.
Or, il y a une forte corrélation entre la capacité à répondre aux questions et le niveau de fortune des populations au moment de leur retraite, ce qui met en évidence la difficulté à planifier celle-ci pour les personnes moins éduquées financièrement (ici, chez les populations latino et noires).
Piketty, 2001, Les Hauts Revenus en France au XXe siècle
I. A. Un système d’imposition progressif limite l’accumulation de patrimoine. Associé à des droits de succession, cela réduit les inégalités héritées.
B. Toutefois, à condition que les ménages ne puissent échapper à l’impôt en délocalisant leur revenu ou leur richesse.
II. A. L’impôt sur le revenu est institué en 1914, devient progressif en 1917. L’impôt sur les successions, qui existait sous la forme d’un modeste prélèvement proportionnel de 1 %, devient progressif au début du XXe siècle et, avec la Première guerre mondiale, son taux s’élève de 2,5 % à 40 %.
B. Au-delà des causes conjoncturelles (crise des années 1930…), ces deux prélèvements seraient une explication structurelle de la remise à zéro de certaines grandes fortunes après la Première guerre mondiale : elles ont dû faire face à ces deux importantes ponctions durant leur phase de reconstitution.
Atkinson, 2015, Inequality: What can be done?
I. Si un revenu universel coûte x % du PIB, cela suppose de prélever x % du PIB en impôts en plus des y % déjà prélevés pour financer les biens publics.
II. Une solution intermédiaire consisterait à offrir une allocation universelle à tous les enfants, permettant de lutter contre la pauvreté infantile très répandue dans de nombreux pays. Elle remplacerait les allocations familiales sous conditions de ressources.
III. Dans tous les cas, l‘auteur propose que le revenu ne soit pas inconditionnel mais vienne en contrepartie d’une « participation » à la société (travail, éducation, formation, recherche active d’emploi, garde de jeunes enfants ou de personnes âgées, etc.).
IV. Proposition d’un « héritage pour tous » : une dotation de capital financée par l’impôt sur les dons et héritages reçus tout au long de la vie. Ces héritages universels seraient versés à la naissance sur un compte spécifique.
Van Parijs, 2019, entretien
I. L’argument technologique en faveur du revenu de base, selon lequel l’automatisation, la robotisation et l’intelligence artificielle vont massivement détruire les emplois de personnes qu’il faudra ensuite nourrir est présenté comme simpliste.
II. La version valide de l’argument technologique en faveur du revenu universel est qu’il facilite, tout au long de la vie, un va-et-vient plus souple entre l’emploie et la formation, et donc l’apprentissage.
Thaler et Sunstein, 2003
Présentation d’un « paternalisme libertarien »
Le paternalisme ne va pas à l’encontre de la liberté individuelle tant qu’il n’est pas coercitif :
En jouant sur les heuristiques des individus, il est possible d’orienter leur comportement dans une direction collectivement profitable, sans pour autant remettre en cause leur liberté.
Karabarbounis et Neiman, 2013
I. Depuis les années 1980, la part du travail dans les revenus a décru dans le monde, notamment en Allemagne, au Japon et aux Etats-Unis, avant même la crise de 2008. Elle a été d’autant plus importante partout où elle était accompagnée d’une baisse des biens d’investissement.
L’élasticité de substitution identifiée est de 1,25.
II. Elle est restée plutôt stable dans des pays comme la France ou le Royaume-Uni.
Ball et Onken, 2021
I. Étude empirique de 29 pays de l’OCDE de 2002 à 2019, qui confirme l’existence d’un effet d’hystérèse du chômage (cf. Blanchard et Summers, 1986, 1987).
II. La hausse ou la baisse d’un point du taux de chômage fait évoluer le taux de chômage naturel de 0,16 point dans la même direction.
Van Parijs, 1995
I. Un des effets attendus du revenu universel est de procurer une « liberté réelle » aux individus et un pouvoir de négociation en leur permettant de refuser de « mauvais » emplois, ce qui conduira à les revaloriser ou à les laisser disparaître.
Le revenu universel devrait aussi les encourager à prendre des risques, à innover ou à créer leur propre entreprise.
II. À l’objection du surfeur de Malibu que Rawls aurait faite à Van Parijs (pourquoi la société financerait-elle quelqu’un qui choisirait de vivre en faisant du surf à Malibu), répond le concept de liberté réelle de l’auteur.
La liberté réelle se fonde sur deux conditions :
1° Ne pas être empêché d’agir en fonction de sa volonté ;
2° Posséder les ressources ou les capacités de mettre en œuvre sa volonté.
Ainsi, le surfeur de Malibu remplirait la première condition, mais pas la seconde, car le revenu universel ne lui paierait pas le billet d’avion.
La liberté réelle est donc d’abord une question de degré (personne ne peut être totalement libre).
Dingeldey, 2001
I. Comparaison entre les systèmes fiscaux de dix pays européens et leurs effets sur la participation des femmes au marché du travail.
II. A. Une fiscalité conjugalisée au sein d’un foyer a un impact négatif sur le taux de cette participation.
B. Mais la simple dichotomie entre imposition conjointe et individualisation ne permet pas de comprendre la variété des comportements de participation des femmes au marché du travail et néglige les schémas de participation des ménages au marché du travail.
C. Ils sont le produit de facteurs aussi différents que :
1° la régulation du travail à temps partiel ;
2° la politique de la famille et de l’emploi ;
3° ou la configuration du système fiscal.
III. La seule suppression du quotient familial ne suffit pas à modifier la structure de l’emploi féminin en couple. Les systèmes fiscaux plus favorables à la participation des femmes au marché du travail ne produisent un tel effet que lorsqu’ils s’accompagnent de règles organisant les conditions de l’emploi et le respect de l’égalité sur le marché du travail, un fort développement des modes de garde des enfants défamilialisés.
Dow, 1958
I. Formalisation d’une courbe de Beveridge, en compilant 12 années de données issues de la situation du Royaume-Uni entre 1946 et 1958.
II. Relation théorique inverse entre le taux de chômage et le taux d’emploi vacants :
- Quand le taux de chômage est faible, le taux d’emploi vacant est élevé ;
- À l’inverse, quand le taux de chômage est élevé, le taux d’emploi vacant est faible.
III. À fonctionnement du marché du travail inchangé (absence de choc conjoncturel par exemple), l’économie se déplace le long de la courbe de Beveridge. Deux types d’évolution sont possibles :
- Une détérioration du fonctionnement du marché se traduit par un déplacement de la courbe tout entière vers la droite ;
- A contrario, un meilleur appariement la déplace vers la gauche.
IV. Une réforme structurelle du marché doit donc consister :
- Non pas à un déplacement vers la gauche, le long de la courbe ;
- Mais à un déplacement vers la gauche de l’ensemble de celle-ci.
Becker, 1965
L’offre de travail d’un individu résulte d’un arbitrage entre travail et loisir.
Becker, 1964
La deuxième moitié du XXe siècle a vu une forte augmentation du taux d’emploi des femmes et de leurs salaires, en raison notamment de la hausse de leur capital humain.
Becker, 1981
La baisse de la fécondité dans les pays du Nord est liée à l’augmentation de la valeur du temps, en particulier pour les femmes.
Goos, Manning et Salomons, 2009
I. De 1993 à 2006, on a assisté à une polarisation du marché du travail avec, d’une part, une augmentation de l’offre de travail pour les hauts salaires et les cadres aussi bien que pour les travailleurs dans les services à la personne, et d’autre part une chute de l’emploi dans les professions à tâches répétitives de bureau ou de l’industrie manufacturière. Les travailleurs se concentrent de plus en plus, désormais, en haut et en bas de l’échelle des salaires.
II. Le modèle met en évidence le rôle du changement technologique, de la mondialisation, des institutions, mais le facteur le plus important reste l’hypothèse de routinisation développé par Autor, Levy et Murnane (2003).
III. La même tendance fondamentale se généralise dans les seize pays étudiés, en dépit d’importantes différences entre les pays :
- dans la structure de leurs industries ;
- dans la réglementation de leurs marchés du travail ;
- dans leurs niveaux de croissance économique locaux.
Autor, 2015, “Why are There Still So Many Jobs ? The History and Future of Workplace Automation”
I. Le progrès technologique permet de réduire les emplois. En 1900, le secteur agricole employait 41 % de la main-d’œuvre américaine. En 2000, cette part s’était réduite à 2 %.
Pour autant, les deux derniers siècles d’automatisation, depuis la crise des Luddites, n’ont pas empêché le taux d’activité de croître, avec l’entrée des femmes sur le marché du travail.
II. Au-delà de la part des emplois qui pourraient disparaître du fait de l’automatisation des tâches, le principal problème tient à la polarisation du marché du travail.
Plutôt qu’une déformation générale en faveur du travail qualifié, on observe plutôt une polarisation du marché du travail en défaveur des qualifications intermédiaires :
- le progrès technique favorise la création d’emplois peu qualifiés (typiquement chauffeurs livreurs et services à la personne) et d’emplois très qualifiés ;
- au détriment des emplois de qualification intermédiaire (comptables, vendeurs, agents d’assurance).
Déjà observable, cette tendance devrait être amplifiée par les progrès de l’intelligence artificielle.
III. Toutefois, de nouveaux emplois moyennement qualifiés, combinant des compétences moyennes et spécialisées et n’étant pas remplaçables par des machines sans une chute de la qualité du travail rendu, peuvent également se développer dans les années futures : techniciens en radiologie, électriciens, plombiers, chauffagistes, etc.
Le Ru, 2016
I. Les théories néo-luddites les plus alarmistes, qui tablent sur la disparition d’un emploi sur deux dans les vingt prochaines années, raisonnent en termes de métiers et non de tâches.
Ainsi, l’industrie allemande, qui est une des plus robotisée au monde, emploie 100 000 salariés de plus qu’il y a vingt ans.
II. Le contenu des métiers évolue avec le numérique dans un sens qui les rend paradoxalement moins automatisables.
III. En adoptant une approche par compétences requises, seuls 15 % des emplois français sont susceptibles de faire l’objet d’une automatisation.
France Stratégie, 2016, « Quels leviers pour l’emploi ? »
En 2014 en France, 60 % des chômeurs au sens du BIT n’avaient pas dépassé le secondaire.
Pour rappel, c’était alors le cas de 23 % des 15-64 ans en France, contre seulement 10 % aux Etats-Unis et 9 % en Pologne.
Rapport Charpin, Commissariat général au Plan, 1993
I. Depuis 1991, le chômage ne cesse d’augmenter, touchant en 1993 plus de 10 % de la population active. La population active augmente de manière dynamique alors que, au regard de ses partenaires, la France crée moins d’emplois pour un niveau de croissance donné.
II. Le rapport met en évidence d’un problème spécifique au coût du travail au SMIC. Il propose une mesure générale de baisse du coût du travail prenant la forme d’une franchise de cotisations sociales sur les mille premiers francs de salaire mensuel (152 euros).
III. Comme il difficile d’isoler les seules catégories peu qualifiées, suivant les recommandations de ce rapport, seront régulièrement mis en place des allégements de cotisations sociales employeur sur les bas salaires durant les années 1990.
Bossler et Gerner, 2016
I. L’introduction en 2015 d’un salaire minimum fédéral allemand a donné lieu à controverses, mais il ne semble pas qu’elle ait nui à l’emploi agrégé.
II. Cependant, les premières évaluations indiquent qu’elle l’a réduit :
- dans les Länder de l’Est, où la proportion de salaires inférieurs au nouveau minimum légal était sensiblement plus importante ;
- ainsi que dans les entreprises faisant face à une concurrence intense.
Kramarz et Philippon, 2000
I. Étude empirique sur la relation entre chômage et salaire minimum en France.
II. Sur la période 1990-1998, l’élasticité de la demande de travail était à peu près égal à 1,5 : une hausse de 1 % du salaire minimum en France, induisait une augmentation de 1,5 points de la probabilité de perte d’emploi des salariés directement concernés*.
III. L’effet reste toutefois faible sur l’emploi global, les salariés au smic ne représentant qu’entre 3 et 4 % de l’ensemble des personnes en emploi.
* Cet ordre de grandeur été confirmé par des études ultérieures.
Cahuc et Carcillo, 2014
Synthèse de plusieurs études sur le rapport entre salaire minimum et demande de travail :
1° Les résultats trouvés par Card et Krueger (1994) peuvent être nuancés : ils peuvent varier en fonction du groupe de contrôle (en l’espèce, leur étude portait sur les fast-foods) ;
2° Confirmation des résultats de l’étude de Kramarz et Philippon (2001) : en France, une augmentation de 1 % du salaire minimum diminue la probabilité de conserver son emploi de 1,3 % pour les hommes, et de 1 % pour les femmes.
Card et Krueger, 1994
Recours à l’expérimentation « naturelle », par la méthode des « doubles différences ».
L’augmentation en 1992 du salaire minimum au New Jersey, alors que dans l’État voisin de Pennsylvanie, ce salaire minimum n’augmentait pas, a fait comparativement augmenter l’emploi dans les fast-food.
Des travaux ultérieurs ont généralisé cette analyse aux États-Unis (Dube, Lester et Reich, 2010).
Card et Krueger, 1997, Myth and Measurement : The New Economics of the Minimum Wage
Une série de constats empiriques contredit les implications du modèle classique du marché du travail, qui suppose que tous les travailleurs sont toujours payés à leur productivité marginale, en présence d’une hausse du salaire minimum :
- Beaucoup de salariés dont le salaire était inférieur au nouveau niveau du salaire minimum n’ont pas été licenciés après la hausse de ce dernier ;
- Même des salariés qui ne sont pas rattrapés par le nouveau salaire minimum voient, à la suite de la hausse de ce dernier, leur salaire augmenter.
Dube, Lester et Reich, 2010
Travaux généralisant l’analyse de Card et Krueger (1994) en exploitant un ensemble d’hétérogénéités entre États et comtés. Les hausses du salaire minimum aux Etats-Unis se sont faites sans dommage pour l’emploi.
⚠️ N.B. : tandis qu’en France, le Smic net est à 60 % du salaire médian, il est à 40 % aux Etats-Unis.
John Schmitt, 2013
I. Selon cette méta-analyse, une hausse du salaire minimum n’a pratiquement aucun effet perceptible sur l’emploi.
Passage en revue de 1500 études, dont la presque totalité concluent que l’effet d’une hausse du salaire minimum n’a presque pas d’effet sur l’emploi, les résultats se retrouvant dans une écrasante majorité autour d’une élasticité avoisinant zéro, avec un effet très légèrement négatif toutefois.
Ce résultat s’explique parce que le choc que représente une augmentation du salaire minimum ne représente qu’une part modeste de l’ensemble de leurs coûts. L’étude classique se focalise sur l’effet négatif de cette augmentation sur les revenus de l’employeur, mais ce dernier peut recourir à d’autres canaux d’ajustement.
II. Les hausses du salaire minimum ont en revanche un effet positif sensible sur le turnover des salariés, qui représente un autre coût pour les employeurs, en rendant plus facile le recrutement de nouveaux employés, en incitant ceux en poste à rester ou à augmenter leur productivité.
Abowd et al., 2000
I. Réplication des études françaises (Kramarz et Philippon, 2000) et américaines (Card et Krueger, 1994) en appliquant la même méthode aux données des deux pays :
Elle consiste à analyser à la fois les effets directs d’un changement du salaire minimum réel et les effets résultant des différents comportements des individus proches les uns des autres dans la distribution des salaires à la suite de ces hausses ou baisses du salaire minimum réel.
II. Elle confirme qu’une hausse du salaire minimum est beaucoup plus défavorable à l’emploi en France qu’aux Etats-Unis.
Nouveau et Ourliac, 2012
I. À partir des études disponibles, les auteurs ont conclu que les allégements de cotisations sociales antérieures à 1997 ont accru l’emploi de 200 000 à 400 000 unités, pour un coût net par emploi de l’ordre de 8000 à 28 000 €.
II. Les allègements de cotisation sociale sur les bas salaires peuvent avoir un effet positif sur l’emploi en raison de deux effets qu’elles peuvent entraîner :
1° Un « effet de substitution et d’assiette » : la baisse du coût relatif du travail par rapport au capital conduit à une nouvelle combinaison des facteurs de production favorable à l’emploi ;
2° Un « effet volume » : la baisse des coûts de production induit une baisse des prix de vente ainsi que des prix de consommation. Cela génère à la fois une hausse de la compétitivité à l’extérieur, une hausse du pouvoir d’achat à l’intérieur, ce qui stimule la demande et donc la création d’emploi.
III. Les effets des allégements de cotisations sociales patronales sur l’évolution des salaires sont a priori ambigus :
- La baisse du chômage ainsi que le partage du surplus entre salarié et employeur peuvent conduire à une hausse des salaires négociés ;
- Inversement, la progressivité des taux de cotisation peut limiter la progression des salaires, en rendant plus coûteuse pour l’employeur l’augmentation de salaire avec les gains de productivité.
⚠️ Les études empiriques existantes ne permettent pas de conclure à l’existence d’effets significatifs de « trappe à bas salaires ».
Koléda, 2015
I. Critique des baisses de charges ciblées sur les bas salaires (baisses de charges Juppé, Pacte de responsabilité 2015) qui ont peu aidé la compétitivité du secteur manufacturier exportateur. Ces entreprises emploient en effet moins de travailleurs peu qualifiés à bas salaires et leur compétitivité-coût ne serait donc pas améliorée par ce type de baisses de charges.
II. Des allégements de cotisations sociales sur le travail qualifié devraient être plus favorables à l’emploi que ceux sur le travail non qualifié.
⚠️ Cette thèse est répandue dans les milieux industriels, qui mettent en avant un effet de compétitivité. Ce fut l’argument principal sous-tendant l’extension en avril 2016 du Pacte de responsabilité au-delà de 1,6 SMIC et jusqu’à 3,5 SMIC dont le fondement se trouvait dans le rapport Gallois.
Card, 1990
Cf. Borjas (2015), et Clemens et Hunt (2017)
I. L’arrivée des immigrés cubain en Floride, en avril 1980 (« Exode de Mariel ») a augmenté de 7 % la population active à Miami, et davantage si l’on considère le marché des travailleurs non ou peu qualifiés.
II. En effectuant une comparaison avec des villes « témoins », il est relevé que le taux de chômage des travailleurs en place, aussi bien noirs que blancs, n’a pas été durablement affecté.
Cette hausse a été résorbée en l’espace d’un an du point de vue de l’emploi local, sans effet négatif sur les salaires des travailleurs peu qualifiés, y compris les Cubains arrivés avant l’exode de Mariel.
II. La capacité d’absorption du marché du travail de Miami peut s’expliquer par l’existence de vagues précédentes de migrants, qui ont spécialisé ce marché dans l’emploi peu qualifié.
Par ailleurs, on constate une baisse de migration (en provenance des États-Unis comme de l’étranger) à Miami, qui peut également être un facteur explicatif, avec un déplacement ailleurs qu’à Miami de la destination d’autres populations migrantes.
Dubois et Koubi, 2016
I. La réforme des retraites de 2010 en France a procédé à un relèvement de 2 ans en seulement 5 ans de l’âge d’ouverture des droits (de 60 à 62 ans).
Elle entraîné une hausse du taux d’activité des personnes de 60 ans (+24 points pour les hommes, +22 points pour les femmes), qui s’est répartie en 2/3 d’emploi et 1/3 de chômage.
Il y a donc eu, à court terme, une hausse simultanée du taux d’emploi et du taux de chômage des seniors.
II. Par ailleurs, les comportements avant 60 ans peuvent aussi avoir été affectés par un effet « horizon » : les personnes adaptent en partie leurs comportements en fonction de la distance à laquelle ils se trouvent de l’âge normal de la retraite. On parle d’effet horizon lorsque le décalage de l’âge d’accès à la retraite entraîne un décalage similaire de l’ensemble des transitions de fin de carrière.
Boeri, Garibaldi et Moen, 2016
La réforme « Fornero » de 2011 en Italie a relevé l’âge de retraite des travailleurs sans transition.
Les entreprises les plus touchées par cette mesure ont réduit l’embauche de jeunes, ce qui montre qu’il y a des effets de court terme des mesures de report de l’âge à la retraite. Sur 150 000 emplois perdus chez les 18-24 ans dans les années qui ont suivi la grande récession, 36 000 sont attribuables à cette réforme.
Anne et L’Horty, 2002
I. Comparaison dans dix villes françaises, au début des années 2000, du revenu net d’un ménage payé au SMIC et des transferts sociaux dont il bénéficiait s’il ne travaillait pas. Étaient pris en compte :
- Les transferts locaux (logement, restaurant scolaire, crèche, etc.) ;
- Les transferts nationaux (revenu minimum d’insertion, allocation sous conditions de ressources).
II. → Dans le cas d’un couple avec deux enfants, le cumul des aides nationales et locales aboutissait au début des années 2000 à un revenu net de 19 200 € par an pour un ménage sans revenus d’activité. Pour obtenir par le travail un revenu identique, ce ménage aurait dû dégager un revenu d’activité d’au moins 15 550 €, soit un cumul à deux de 44,5 heures par semaine au SMIC.
⚠️ L’accès à un emploi à temps complet au smic conduisait donc à une perte de revenu pour tous les ménages ayant au moins un enfant.
Clark et Oswald, 2002
Enquête auprès de 7 000 ménages britanniques dans les années 1990, montrant sans ambiguïté que le passage du chômage à l’emploi améliorait un indice de bien-être, noté sur 36, de 2,6 points, tandis que le passage de l’emploi au chômage le dégradait de 1,7 point.
En comparaison, un mariage améliorait le bien-être de 0,3 point et un divorce le dégradait de 1,5 point.
Enfin, une variation du revenu était sans effet sensible.
Malgouyres, 2016
Quelle que soit la cause de leur disparition ou de leur création, les activités exposées jouent fortement sur l’évolution de l’emploi local.
Les coefficients estimés supposent que chaque emploi détruit dans le secteur manufacturier par les délocalisations en Chine a induit la destruction en France, entre 1995 et 2007, de 1,5 emploi supplémentaire au niveau local. Selon d’autres études, le coefficient varierait de 0,6 à 1,5 en France.
A l’inverse, les bassins d’emploi locaux portent très longtemps la trace des sinistres industriels.
→ L’emploi exposé exerce un effet d’entraînement sur l’emploi abrité, mais la relation opposée n’est pas observée.
Flamand, 2016
Entre 2006-2007 et 2008-2009 (avant/après la crise) :
- Le taux de perte d’emploi des CDI est passé de 1,4 % à 2,2 % pour les CDI ;
- De 12 % à 26 % pour les intérimaires.
⚠️ L’instabilité n’est pas réservée aux seuls salariés en contrats à durée limitée → elle peut aussi toucher des personnes en contrat à durée indéterminée. Sur ce point, l’auteur parle de « déstabilisation des stables ».
Beuve, Paris et Schurich-Rey, 2017
I. La plupart des économistes s’accordent sur les effets distributifs de la protection de l’emploi : pour les salariés qui en bénéficient, elle diminue le risque de perte d’emploi, mais l’augmente pour ceux qui n’en bénéficient pas.
II. L’affirmation exacte proposée à un panel d’anciens contributeurs aux analyses du CAE était ici :
« La protection élevée contre les licenciements nuit à l’emploi des jeunes en CDI. »
Scarpetta et Tressel, 2004
I. Étude empirique portant sur 18 pays de l’OCDE.
II. A. Une protection élevée de l’emploi, induisant pour les employeurs des coûts particulièrement élevés d’embauches et de licenciements, conduisent à un comportement spécifique des entreprises :
1° Les entreprises chercheront à élever la productivité de leur facteur travail en formant leurs employés plutôt qu’en modifiant leurs effectifs par des licenciements et des embauches ;
2° Cependant, l’efficacité de cette stratégie dépend de la coordination entre les entreprises, notamment en offrant des salaires similaires à compétence égale, sous peine d’introduire un comportement de passager clandestin, où certaines entreprises laisseront les autres dépenser pour la formation d’employés qu’elles recruteront ultérieurement.
B. Cette protection élevée de l’emploi élève le coût anticipé de l’échec pour les entreprises innovantes, qui sont celles qui ont le plus besoin de renouveler leur force de travail après l’introduction d’innovations technologiques.
III. → Les restrictions à l’emploi incitent à l’innovation au sein des entreprises existantes, plutôt que par des mécanismes schumpétériens de « destruction créatrice ».
Krebs et Scheffel, 2013
I. A. La réforme Hartz IV, qui comportait une réduction significative de l’indemnisation des chômeurs de longue durée, a réduit le taux du chômage structurel de 1,4 point.
B. Les réformes Hartz I à III l’ont abaissé de 1,5 point.
II. Ces réformes ont joué un rôle important dans les bonnes performances du marché du travail durant la Grande récession.
Dustmann et al., 2014
I. A. De 1998 à 2005, la croissance allemande stagne à 1,2 % annuel, avec une récession en 2003. Le chômage atteint 11,1 % en 2005.
B. Dans les années qui suivirent, le chômage baissa, n’augmentant presque pas durant la Grande récession. En 2011, la balance commerciale de l’Allemagne atteignait 1 758 Md$.
II. A. L’effet des réformes Hartz est surestimé.
B. Ce sont plutôt les institutions du marché du travail allemand et la réaction endogène du système de négociation collective, d’une grande rapidité et flexibilité face à la crise, qu’il faut créditer du mérite d’avoir favorisé le redressement allemand.
Dormont, Fougère et Prieto, 2001
I. A. Le système d’indemnisation du chômage en vigueur avant 1992 en France ne comprenait qu’un seul palier : une allocation de base, versée pendant 14 mois, suivie d’une allocation de fin de droits faisant décroître subitement et fortement l’indemnisation.
B. Ce mécanisme incitait très significativement à la reprise d’emploi à l’approche de la date butoir, et ceci d’autant plus que le salaire antérieur était élevé.
II. L’étude d’un échantillon statistique de bénéficiaires d’allocations de chômage permet de constater que le passage à une dégressivité par paliers en 1992 a éliminé cet effet et lissé les sorties du chômage, augmentant les chances d’y rester.
Fougère, 2000
Des expérimentations contrôlées aux États-Unis et d’autres programmes menés en Europe ont conduit aux conclusions suivantes :
1° Les vérifications strictes des droits à l’indemnisation-chômage et le contrôle de l’activité des chômeurs n’ont pas d’effet significatif sur la réduction de la période de chômage, mais permettent seulement de réduire le nombre de demandes indues de droits ;
2° Un accompagnement individualisé des chômeurs, c’est-à-dire des conseils et aides personnalisés et un suivi renforcé permet :
- de réduire significativement la durée du chômage ;
- d’offrir à ses bénéficiaires l’accès à des emplois mieux payés (⚠️ ce qui est un indicateur de la qualité de l’appariement) ;
- Cet accompagnement doit intervenir le plus tôt possible dans la période de chômage pour produire des effets.
Visser, 2016
La Grande Dépression a conduit la Grèce, le Portugal et la Roumanie a substantiellement réduire, entre 2008 et 2014, le recours aux procédures d’extension (généralisation à tous les salariés d’une branche des dispositions d’un accord conventionnel).
Cette évolution est en cohérence avec les recommandations du FMI et de la commission européenne qui privilégient la décentralisation de la négociation collective.
Gautier, 2017
I. La fixation des salaires en France est régulée par un système institutionnel où coexistent un salaire minimum national fixé par le gouvernement, des accords de branche et des accords d’entreprise.
Les accords de branches ont longtemps été dominants, et ils définissent encore au total 60 000 minima, qui ont valeur légale compte tenu du fait que les accords de branche sont systématiquement « étendus » à toutes les entreprises par le ministère du Travail.
II. Dans d’autres pays européens comme l’Allemagne ou l’Espagne, les entreprises peuvent décider de déroger aux accords de branche.
III. Les minima de branche jouent un rôle important dans les politiques salariales et influencent le smic via l’indexation de celui-ci sur la moitié des gains de pouvoir d’achat du salaire de base.
Deaton, 2013
I. La révolution scientifique et les Lumières ont engendré des améliorations en termes de santé et de bien-être largement sous-estimées par les données de revenus.
II. Pour autant, ces progrès se sont accompagnés d’inégalités, car tout le monde n’en a pas bénéficié, ce qui indique la complexité de l’interaction dialectique entre progrès et inégalités :
- Avant les Lumières, élites aristocratiques et masses laborieuses ne se différenciaient guère en termes d’espérance de vie ;
- Aujourd’hui, c’est la pauvreté qui reste le facteur premier des inégalités sanitaires.
Blanchard et Wyplosz, Deux thèses hétérodoxes sur l’économie européenne,
Pisani-Ferry, Contrepoint (même publication)
2004
I. Selon le premier auteur, la différence de PIB par habitant entre les États-Unis et l’Europe ne reflète pas une performance économique insuffisante de la zone euro.
Les productivités seraient comparables, mais la différence de PIB s’expliquerait une « préférence pour le loisir » des Européens :
Tandis que les Américains auraient choisi d’allouer leurs gains de productivité à leurs revenus, les Européens les auraient alloué à leurs loisirs, en choisissant de travailler moins longtemps.
⚠️ Cette analyse est contestée par le troisième auteur, appelé à commenter les deux autres :
La productivité européenne peut être surestimée parce qu’une partie importante des personnes faiblement qualifiées, à faible productivité, est exclue du marché du travail.
II. Pour le second auteur, malgré l’existence d’un processus d’intégration économique très avancé et unique au monde, l’Europe demeure encore une collection d’exceptions nationales qui empêchent toute généralisation excessive. À l’idée d’une Europe au marché du travail uniformément rigide, il oppose l’extrême flexibilité du marché britannique ; à celle d’un choix à faire entre protection sociale et compétitivité, il oppose l’ensemble de l’Europe du Nord. Pour lui, l’avancée de l’intégration européenne ne résoudra pas mécaniquement les problèmes de chaque État en l’absence d’arbitrages nationaux.
⚠️ Pour le troisième auteur, le fond de l’affaire réside dans l’absence de choix fait entre deux modèles : celui d’une souveraineté collective appuyée par des moyens incitatifs (budget européen), celui d’un modèle concurrentiel où les plus dynamiques tireraient les autres vers le haut.
Solow (résidu de), 1956
La productivité globale des facteurs désigne l’augmentation de l’efficacité des deux facteurs de production combinés – capital et travail.
Elle correspond donc à la part de la croissance qui, ne s’expliquant pas par l’accumulation de capital ou par l’augmentation des heures travaillées, leur est exogène : c’est le résidu de Solow.
Alwyn Young, 1992, « A Tale of Two Cities »
La croissance rapide en Asie de l’Est dans les années 1990 s’expliquerait par une accumulation de capital encouragée par une politique colbertiste (taux d’intérêt très bas, politique industrielle volontariste, etc.).
Tandis que Hong Kong réussit à maintenir une progression rapide de la PGF, grâce à sa politique de laisser-faire, Singapour, par sa politique dirigiste, a vu sa croissance similaire se fonder sur une accumulation de capital productif.

Krugman, 1994
Le « miracle asiatique » est le fruit de la « transpiration », pas de « l’inspiration » :
C’est-à-dire de l’accumulation de capital, de l’augmentation de la participation et de la qualification de la force de travail, plutôt que d’une amélioration de la productivité.
⚠️ Cette critique élude cependant une question cruciale : comment les pays d’Asie ont-ils pu mobiliser autant de ressources productives ?
Maddison, 2007
De la Préhistoire à la fin du Moyen-Âge, le revenu moyen dans le monde fluctue autour de 450 $ (2007) par habitant et par an.
Il passe à 650 $ annuels entre 1400 et 1800.
Décollant avec la révolution industrielle, il dépasse les 1500 $ à la veille de la première guerre mondiale.
En 2003, il atteint 6 500 $.
D’après les projections de l’auteur, le PIB par habitant moyen atteindrait 11 700 dollars en 2030.
Mokyr, 2017
I. A. Une mutation des croyances a été opérée en Europe entre 1500 et 1700 : les hommes ont pris conscience qu’ils pouvaient utiliser la science pour contrôler leur destin mais aussi la Nature.
B. L’affirmation d’une culture européenne spécifique aurait été le facteur décisif des transformations économiques et sociales relevant de la révolution industrielle, expliquant la « la grande divergence » avec la Chine.
II. Des explications culturelles permettent ainsi de relier l’explosion de la croissance aux Lumières en Europe et à leurs deux piliers :
- la compréhension de la nature (à la base du progrès technique) ;
- l’idée que le pouvoir et le gouvernement doivent servir la société dans son ensemble.
Les synergies puissantes entre ces deux idées ont déclenché et soutenu l’explosion de la croissance. Le progrès est finalement devenu une valeur en soi.
Gordon, 2016
I. Les progrès de productivité ne sont pas constants dans le temps.
La croissance exceptionnelle des années 1870 à 1970 (de 1,8 % de 1870 à 1920 puis 2,8 % de 1920 à 1970) doit être considérée comme une parenthèse de l’histoire humaine.
L’auteur observe une baisse tendancielle et progressive de la productivité globale des facteurs. La société américaine ressemblerait davantage à celle des années 1970 que cette dernière à celle des années 1920.
II. Préconisations diverses :
- Augmentation de la progressivité de l’impôt pour les revenus les plus élevés ;
- Augmentation du salaire minimum ;
- Généralisation de l’éducation d’âge préscolaire ;
- Maîtrise des coûts de la formation universitaire ;
- Réduction des peines d’incarcération ;
- Élargissement de la légalisation de la vente de drogue ;
- Ouverture de l’immigration.
Alvin Hansen, 1939 (“Economic Progress and Declining Population Growth”)
I. Introduction du concept de stagnation séculaire.
Elle se définit comme la concomitance d’une faible croissance et d’un faible effort de formation brute de capital fixe (ou investissement).
II. Son explication réside dans le ralentissement des opportunités d’investissement au sein de trois variables clés :
- le progrès technologique et les innovations ;
- la croissance de la population ;
- l’exploitation de nouveaux territoires et de nouvelles ressources naturelles.
III. Loin des idées malthusiennes, l’accroissement démographique est un moyen d’influer sur la composition de la production à la fois :
- via un canal direct (augmentation de la production et de l’investissement) ;
- via un canal indirect (facilitation de l’innovation technologique).
Larry Summers, 2014
I. Reprise du concept de stagnation séculaire.
Le constat est le même que celui d’Alvin Hansen (1939) : la croissance est faible, de même que l’inflation et le niveau d’investissement alors que l’épargne, excessive (qui ne peut donc être absorbée dans sa totalité par l’investissement), tire le taux d’intérêt réel à la baisse.
II. La stagnation séculaire désigne plusieurs points cardinaux sous forme d’objectifs devenus à un moment donné inatteignables pour une économie : une croissance économique garantissant un niveau d’emploi élevé et un niveau des prix maîtrisé, le tout dans un contexte de stabilité financière.
III. Ces facteurs déséquilibrants qui entretiennent la stagnation sont reflétés par une réduction du rôle de la productivité globale des facteurs dans une croissance qui peine donc à repartir, ce qui se répercute négativement sur la croissance potentielle.
IV. Dans ce contexte de baisse des taux d’intérêt nominaux et de difficultés d’ajustement à la baisse des taux d’intérêt réels (trappe à liquidités), le champ des possibles en matière monétaire pour contrer l’insuffisance de la demande agrégée apparait alors nettement restreint, risquant de rendre permanente l’atonie des économies industrialisées.
V. L’auteur défend une réponse par la politique budgétaire afin de pallier la pénurie d’investissement, en favorisant notamment l’investissement public comme soutien de la demande.
Paul David, 1990, « The dynamo and the computer »
Il a fallu longtemps pour que l’invention de l’électricité affecte (positivement) la productivité.
En étudiant l’introduction de l’électricité aux Etats-Unis, l’auteur montre que, pour qu’une usine profite au mieux de l’électricité, elle devait restructurer radicalement sa façon de travailler.
Le gain de productivité n’est apparu que dans les années 1920, soit quarante ans après l’apparition de la première centrale électrique.
Jorgenson, Ho et Stiroh, 2008
I. Alors qu’une grande incertitude demeurait sur l’incidence de l’informatique sur la productivité depuis les années 1980, il faudra attendre 1995 pour que des gains apparaissent, plus de quarante ans après la première commercialisation d’un ordinateur (UNIVAC en 1951).
II. Entre 1995 et 2000 (avant le krach boursier de 2001-2002) :
- les investissements dans les TIC ont contribué à 37 % de la croissance de la productivité du travail aux Etats-Unis ;
- les industries TIC ont contribué à 58 % de la croissance de la PGF.
Gordon, 2016
I. Les TIC suscitent un type d’innovations qui affectent beaucoup moins la productivité que les précédentes vagues d’innovations :
- L’emploi global a été beaucoup plus lié au PIB qu’à l’informatisation ;
- et, à l’exception de la fin des années 1990 où les investissements ont été massifs dans les matériels et équipements, les promesses de gains de productivité liés aux TIC n’ont pas été tenues.
II. L’auteur rejoint ainsi Daron Acemoglu et al. (2014), selon lesquels l’impact des industries ICT (Information, Communication et Technologie) sur la productivité n’est visible que sur les secteurs en question, qui ne représentent qu’une modeste part du PIB, mais non sur le reste de l’économie.
Autor, Levy et Murnane, 2003
Hypothèse de « routinisation »
I. L’adoption des technologies de l’information et de la communication (TIC) :
- réduit la demande pour des tâches routinières et prévisibles qui peuvent être automatisées et exécutées par des robots ;
- et augmente simultanément la demande des tâches non répétitives, analytiques et intellectuelles.
II. A. Le remplacement des tâches routinières concerne les travailleurs situés au milieu de la distribution des salaires comme les ouvriers qualifiés et les employés de bureau. Il augmente la demande en salariés très qualifiés qui occupent des emplois dans la tranche supérieure de la distribution des salaires (chefs d’entreprise, dirigeants, cadres et autres professionnels hautement qualifiés).
B. En même temps, la réduction de la demande d’emploi en salariés intermédiaires entraîne une augmentation mécanique de l’emploi dans les postes à bas salaire par la déqualification des travailleurs à salaire intermédiaire licenciés et par les changements d’opportunité d’emploi pour les jeunes arrivant sur le marché du travail.
Goldin et Katz, 2010
I. Il existe une « course » entre l’éducation, qui élève progressivement l’offre de travail qualifié, et la technologie, qui élève progressivement la demande de travail qualifié.
II. Si la seconde tendance est plus rapide que la première, la prime de qualification (écart de rémunération entre qualifiés et non qualifiés) augmente, car l’offre de travail plus qualifiée manque tandis que l’évolution technologique accroît la demande.
III. Dans ce cadre, un pays où le salaire relatif des moins qualifiés tend à baisser accuse probablement un retard dans son effort éducatif.
Iwata, Khan et Murano, 2003
I. Revue du débat économique qui s’est tenu dans les années 1990 sur la croissance asiatique.
II. Les articles de Young (1992) et Krugman (1994) ont été critiqués par d’autres économistes qui ont mis en évidence un taux de croissance plus élevé de la productivité globale des facteurs à Singapour.
Haskel et Westlake, 2017
L’importance croissante du capital immatériel pourrait aider à comprendre la dynamique potentiellement structurelle derrière la « stagnation séculaire ».
On peut identifier quatre canaux de compréhension de ce phénomène :
1° Les difficultés croissantes à correctement mesurer l’investissement via des actifs intangibles ;
2° La spécificité du capital immatériel a généré plus d’externalités ;
3° Le fait que cette spécificité a également exacerbé l’écart entre les entreprises à la frontière technologique de leur secteur et les autres ;
4° Des externalités décroissantes des actifs intangibles liées possiblement à la difficulté des nouvelles entreprises à s’approprier le capital immatériel ou à la nature de type « recherche de rente » d’une part des actifs intangibles.
Malinvaud, 1998, Les cotisations sociales à la charge des employeurs : analyse économique
I. Rapport rendu sur les modifications possibles de l’assiette des cotisations sociales. Or, en la matière, il n’y a pas d’« assiette miracle » :
- la masse salariale augmente aussi vite en tendance que la valeur ajoutée ;
- toute modification des modes de financement de la sécurité sociale ont pour effet de faire payer par le travailleur le coût de la protection sociale.
II. Toute augmentation de salaire, parce qu’elle induit une augmentation du taux de cotisations sociales, est de fait « taxée ». Une trop forte progressivité des cotisations sociales peut conduire à la formation de trappes à bas salaire : elle découragerait les employeurs d’augmenter leurs salariés et ces derniers de se former en rendant plus difficile la valorisation de cet investissement.
⚠️ N.B. : selon les auteurs du BQ, l’existence des trappes à bas salaire n’est pas démontrée empiriquement.
Carbonnier et al., 2015
Les politiques socio-fiscales d’allégements sur les bas salaires :
- auraient permis la survie de certaines entreprises à faible productivité et positionnées sur des produits de médiocre qualité ;
- décourageant ainsi la réallocation des facteurs de production vers les entreprises les plus performantes ;
- et perpétuant une orientation défavorable de l’appareil productif vers des emplois pour lesquels la France n’a pas d’avantage comparatif.
Bernard et Rey, 2017
I. Il est difficile de mesurer directement les effets des contrats aidés sur l’emploi et le chômage. Pour estimer plus précisément les effets des variations du nombre de bénéficiaires sur le chômage et l’emploi, on utilise habituellement des modèles calibrés, reposant sur une estimation de l’élasticité de la demande de travail à son coût. Plus le coût du travail est abaissé, plus le nombre d’emplois créés augmente.
II. A. Dans le secteur marchand, financer un emploi crée moins d’un emploi, car une partie des recrutements en contrat aidé correspond en réalité à des effets d’aubaine : l’employeur qui bénéficie de l’aide aurait embauché même en l’absence d’aide.
Ainsi, pour les emplois d’avenir marchands, dont le taux de prise en charge était de 35 %, un emploi d’avenir supplémentaire permettait une création nette de 0,15 emploi.
B. Dans le secteur non marchand, les employeurs sont supposés avoir une contrainte de masse salariale ; ils ont des besoins en emploi, mais ne les réalisent pas à cause de la contrainte financière. Ainsi l’effet emploi est beaucoup plus important que dans le secteur marchand : financer un contrat aidé permet de créer un emploi supplémentaire. L’effet emploi retenu correspond ainsi au taux de prise en charge financière par l’État, c’est-à-dire 0,7.
III. Parmi les embauches qui auraient eu lieu même en l’absence d’aide financière, les employeurs ont dans certains cas modifié le profil de la personne recrutée pour bénéficier de l’aide (« effet profil »). Globalement faibles, les effets profils sont davantage prononcés dans le secteur marchand et ont conduit au recrutement de personnes généralement plus jeunes, moins diplômées et moins expérimentées.
IV. En outre, l’aide conduit à avancer le calendrier des embauches.
⚠️ Harrod, 1939, et Domar, 1946
(Modèle Harrod-Domar)
Il s’agit de deux contributions séparées, qui parviennent aux mêmes conclusions.
I. A. Fonction de production à facteurs complémentaires qui adapte la théorie de Keynes au long terme :
1° Harrod cherche à dynamiser la théorie keynésienne pour en faire un modèle de la croissance de long terme ;
2° Puisqu’à court terme, le seul effet de l’investissement est celui du multiplicateur keynésien de la demande, Domar montre que l’investissement joue également un rôle sur l’offre.
B. Il s’agit de l’ancêtre des modèles de la théorie de la croissance exogène, notamment du modèle de Solow (1956).
II. Les modèles, qui ne se prétendent pas réalistes, prédisent un déséquilibre croissant entre capital et travail, jusqu’à ce que l’insuffisance de capital bride la croissance.
III. La croissance économique étant instable, cela justifie l’intervention de l’État.
IV. Ces contributions ont fourni une justification théorique aux politiques d’aide à la reconstruction de l’immédiat après-guerre (plan Marshall de 1947).
Solow et Swan, 1956
I. Modèle constituant toujours aujourd’hui un cadre de référence de l’analyse néoclassique de la croissance.
II. Sur le sentier de croissance :
- les marchés sont en équilibre ;
- les facteurs de production sont substituables ;
- le rendement marginal du capital est décroissant : l’incitation à investir disparaît quand le rendement marginal est égal au coût d’usage du capital.
II. Le modèle s’appuie sur deux courbes majeures : celle de l’augmentation de l’épargne, et donc du capital, et celle de la dépréciation du capital. La dépréciation est représentée par une courbe linéaire, tandis que l’épargne cesse de croître après une certaine quantité dépassée.
En effet, l’incitation à accumuler du capital diminue au fur et à mesure que l’économie croît, et elle disparaît lorsqu’une hausse supplémentaire du stock de capital coûte davantage qu’elle ne rapporte en termes de production.
III. Toute économie atteint à un moment un point où toute augmentation des facteurs de production n’engendrera plus d’augmentation de la production par tête. Ce point correspond à l’état stationnaire, où chaque économie est censée converger à terme.
Cette prédiction étant irréaliste, un facteur supplémentaire doit expliquer la poursuite de la croissance : c’est le progrès technique. Les équations ne permettant pas d’établir son origine, il est exogène au modèle, et ainsi appelé « résidu ».

Mankiw, Romer et Weil, 1992
Le modèle de Solow et Swan fournit un cadre théorique cohérent avec la comptabilité de la croissance mais n’est pas réaliste : il sous-estime les effets positifs de l’accumulation du capital sur l’accroissement de la population et oublie un facteur de production accumulable, le capital humain.
Les dépenses d’éducation doivent donc être traitées comme un investissement et non comme une consommation.
⚠️ Le nouveau modèle proposé par les auteurs est encore imparfait : la croissance à l’équilibre stationnaire ne dépend toujours que de facteurs exogènes, la démographie et le progrès technique.
Ramsey (Modèle de), 1928, A Mathematical Theory of Saving
L’objectif social est de maximiser durablement la consommation par tête.
Ce modèle montre qu’il existe bien un taux d’épargne qui maximise la consommation par tête* :
- ce taux d’épargne optimal est exactement égal au poids du capital dans la fonction de production.
→ Les revenus du capital doivent être réinvestis dans l’économie, tandis que les revenus du travail sont consommés.
* “<em>The rate of saving multiplied by the marginal utility of money should always be equal to the amount by which the total net rate of enjoyment of utility falls short of the maximum possible rate of enjoyment</em>.”
Arrow, 1962 (“The Economic Implications of Learning by Doing”)
Formalisation du learning-by-doing
I. L’action et la pratique permettent de construire empiriquement des savoir-faire et, dans une certaine mesure, des connaissances.
L’entreprise qui investit pour former ses employés à une nouvelle technologie incorporée à une nouvelle génération du capital, rend disponible à d’autres entreprises ce savoir-faire.
II. Cette information est un bien collectif en raison de ses propriétés d’indivisibilité et d’inappropriabilité. Par conséquent, un équilibre concurrentiel peut s’avérer sous-optimal en matière d’invention et de transmission de savoir-faire : le retour sur investissement dans ce domaine est incertain pour une entreprise, d’autant que les salariés sont libres de se faire débaucher (notamment pour un salaire plus élevé), soustrayant ce capital de savoir-faire de l’entreprise qu’ils quittent.
III. L’auteur propose plusieurs solutions dont aucune n’est infaillible :
- Le rôle de l’État dans l’apprentissage : investissements dans l’éducation, subventions à la recherche ;
- Les effets de réseaux : l’État doit donc encourager la concentration géographique (districts, effets de clusters) ;
- Les incitations à la recherche et à l’innovation : brevets, propriété intellectuelle permettant d’inciter au partage ;
- Des réseaux d’information ouverts : bases de données de recherche, conférences industrielles…
Barro et Sala-ì-Martin (Modèle de), 1995
Les dépenses publiques (éducation, services publics) sont envisagées comme un facteur de production supplémentaire susceptible de bloquer la baisse des rendements marginaux du capital privé.
Néanmoins, la mise à disposition de ce facteur de production introduit une distorsion susceptible d’abaisser le niveau de production.
Le modèle fournit une justification de l’intervention publique en montrant qu’à un certain taux, celle-ci peut conduire la croissance à être positive à long terme, mais il montre aussi que si son coût d’opportunité est trop élevé, il peut être un frein à la croissance.
J. Schumpeter, 1942, Capitalisme, Socialisme et Démocratie
Analyse du processus de destruction créatrice par lequel une innovation majeure conduit à la disparition de la génération précédente de produits ou de procédés.
Les entrepreneurs engagent des ressources pécuniaires et humaines pour trouver et exploiter les technologies nouvelles. Ils risquent à tout instant d’être évincés par une innovation concurrente, mais tant que l’innovation concurrente n’est pas là, l’entreprise innovante fait du profit.
La perspective de ce profit constitue l’incitation à innover, et c’est parce que ce profit est construit sur l’élimination des innovations de la génération précédente que l’auteur parle de destruction créatrice.
Aghion, Antonin, Bunel, 2020, Le pouvoir de la destruction créatrice
I. Les auteurs s’appuient sur le « paradigme schumpeterien », par opposition au modèle de croissance néoclassique :
« La destruction créatrice est ce moteur du capitalisme qui assure le renouvellement permanent et la reproduction, mais qui en même temps génère du risque et des bouleversements qu’il faut savoir réguler et orienter. »
II. Quatre thèses principales :
1° L’innovation est à l’origine de la croissance économique qui elle-même est le socle de l’amélioration du bien-être des sociétés. L’innovation est créatrice de bien-être ;
2° L’innovation produit des effets néfastes sur certains secteurs de la société, ce qui la rend difficile à accepter socialement et politiquement. L’innovation est aussi destructrice de bien-être ;
3° L’État doit produire un contexte institutionnel permettant de favoriser l’innovation tout en protégeant les victimes de l’innovation pour qu’elles s’adaptent aux nouvelles conditions économiques. L’État est au cœur d’un capitalisme régulé favorisant et rendant acceptable la destruction créatrice. Son rôle est central puisqu’il doit assurer un double équilibre :
- Il doit assurer un équilibre entre protection des innovateurs par des rentes spécifiques et mise en concurrence des entreprises. Les innovateurs sont encouragés à innover par l’existence de droits de propriété leur octroyant un monopole temporaire (les brevets) et par des investissements spécifiques de l’État (éducation, secteur innovants, etc.). Mais, une fois la juste récompense de l’innovateur reçue, la concurrence doit reprendre ses droits car elle est elle-même favorable à l’innovation lorsque les nouveaux innovateurs cherchent à gagner des parts de marché. La mise en concurrence suppose par ailleurs la lutte contre des rentes illégitimes (non liée à l’innovation) ;
- L’État doit assurer un équilibre entre l’insécurité endogène au processus d’innovation et la stabilité pour les secteurs qui sont victimes des nouvelles vagues technologiques. L’innovation créé du chômage, de la précarité et des mauvaises conditions de santé, ce qui la rend légitimement contestable à court terme. L’État doit alors protéger les citoyens par des garanties sociales de toutes sortes (assurance chômage, formation professionnelle, système de santé, etc.) ;
4° L’État n’est cependant pas un acteur exempt de défauts, il est capable de collusion avec les intérêts économiques et peut de ce fait protéger des rentes illégitimes au regard de l’efficacité économique. L’enjeu est alors de favoriser une constitution démocratique et, surtout, d’opposer au marché et à l’État un troisième pôle : la société civile. Celle-ci peut par ses choix de consommation, par l’influence dans les entreprises (responsabilité sociale de l’entreprise) ou par des manifestations obliger l’Etat (et le marché) à se réformer dans le sens d’une plus grande prise en compte de l’intérêt général.
III. Dans la conclusion, reprenant la distinction de Daron Acemoglu, James Robinson et Thierry Verdier (Acemoglu et al., 2017), les auteurs contestent l’idée d’avoir à choisir entre un capitalisme féroce (cutthroat capitalism), efficace et féroce pour les individus, et un capitalisme douillet (cuddly capitalism), inefficace économiquement mais protecteur pour les individus. Le capitalisme est le meilleur système économique pour l’intérêt général, mais les forces du marché (innovation et concurrence) doivent être tenues par un État puissant et une société civile jouant son rôle de contrepouvoir.
« Le capitalisme est un cheval fougueux : il peut facilement s’emballer, échappant à tout contrôle. Mais si on lui tient fermement les rênes, alors il va où l’on veut ».
Bartelsman, Scarpetta et Schivardi, 2003
I. Le taux d’entrée et de sortie (turnover) sur le marché des entreprises aux États-Unis et en Europe sont similaires. Il est plus facile pour des petites entreprises de s’insérer sur un marché, mais la plupart des entreprises en sortent avant d’avoir atteint un niveau de production rentable.
II. Dans les économies développées, un tiers des gains de productivité du travail proviennent du processus de création et destruction, les deux tiers restants se faisant à l’intérieur des entreprises existantes.
III. Les anciennes entreprises contribuent aux gains de productivité en investissant et en substituant du capital au travail, les nouvelles plutôt en augmentant la PGF.
IV. Aux Etats-Unis, les entreprises naissent petites, mais celles qui survivent font plus que doubler leur effectif en deux ans, tandis qu’en Europe, elles croissent de 10 à 20 % seulement.
Aghion et Howitt (Modèle de), 1992
I. Modèle de croissance développé en 1987 puis amélioré en tenant compte des critiques. Il repose sur quatre idées inspirées de Schumpeter :
1° La croissance de long-terme résulte de l’innovation. Sans innovation, l’économie est stationnaire. L’économie stationnaire prévaut avant le capitalisme et fonctionne à l’image d’une boucle fermée se reproduisant à l’identique ;
2° L’innovation ne tombe pas du ciel et est un processus éminemment social. Elle résulte en effet de décisions d’investissement de la part des entrepreneurs. Contrairement aux classiques et à la vision marxiste, l’entrepreneur de Schumpeter ne se rattache à aucun groupe social particulier. Il est celui qui innove (Schumpeter distingue les inventeurs et les entrepreneurs qui innovent). Il répond aux incitations positives ou négatives données par les institutions et les politiques publiques : ainsi, un pays qui connaît l’hyperinflation ou une protection des droits de propriété insuffisante découragera l’innovation ;
3° Le concept de destruction créatrice : les nouvelles innovations rendent les innovations antérieures obsolètes ;
4° La croissance de la productivité peut être engendrée soit par l’innovation « à la frontière » soit par l’imitation de technologies plus avancées. Plus un pays se développe (c’est-à-dire se rapproche de la frontière technologique), plus c’est l’innovation qui devient le moteur de la croissance et prend le relais de l’accumulation du capital et du rattrapage technologique (de l’imitation).
II. A. Le taux de croissance de la production dépend :
- de la probabilité qu’une innovation découle de la recherche ;
- de la taille de cette innovation ;
- de la taille de l’économie (l’innovation rapporte davantage sur un grand marché) ;
- de la part des profits dans la valeur ajoutée : une part élevée incite à l’innovation, car la rente correspondante est importante.
B. → L’effort d’innovation est moindre quand :
- l’innovation est facilement réplicable (absence de système de brevets) ;
- la concurrence est forte sur le marché des biens (la rente d’innovation diminue).
Aghion et al., 2012, Credit Constraints and the Cyclicality of R&D Investment: Evidence from France
I. Étude empirique menée sur 13 000 entreprises de 1994 à 2004 pour étudier la relation entre la contrainte de crédit et les investissements en recherche et développement (R&D) sur le cycle économique.
II. Les conclusions sont les suivantes :
1° L’investissement en R&D est contre-cyclique en l’absence de contrainte de crédit, mais devient procyclique lorsque les entreprises font face à un durcissement des contraintes de crédits ;
2° Ce résultat est seulement observé pour les entreprises dont les secteurs d’activité reposent davantage sur un financement externe, ou qui se caractérisent par des actifs majoritairement immatériels ;
3° Au sein des entreprises les plus contraintes par le crédit, les chutes d’investissement en R&D durant les récessions n’augmentent pas en proportion durant les phases de reprise.
Paul David, 1985, “Clio and The Economics of QWERTY : The constraints of history”
Exemple de « dépendance au sentier » (Path Dependency) :
1° Adopté dans les années 1870 par l’un des premiers fabricants de machines à écrire, la société Remington, le clavier QWERTY minimisait le risque d’enchevêtrement des touches quand l’utilisateur frappait rapidement. Il a été repris par tous les concurrents, alors même que les études ont montré qu’il n’était pas optimal ;
2° Le système DSK (Dvorak Simplified Keyboard), breveté en 1932, qui permettait de frapper beaucoup plus vite, n’a pas réussi à le supplanter. Le système QWERTY s’est maintenu jusqu’à aujourd’hui sur les claviers d’ordinateurs, alors que la raison initiale de son existence a disparu depuis bien longtemps.
Bartelme et Gorodnichenko, 2015
I. Une voiture Honda est faite de 20 à 30 000 éléments produits par des centaines d’entreprises différentes.
L’idée révolutionnaire d’Henry Ford, dont le rêve d’autosuffisance totale dans la production automobile fut réalisé dans son usine située au confluent des fleuves Rouge et Detroit (États-Unis), s’est révélée être à contre-courant de l’histoire de l’économie.
Les décennies passant, l’idée d’intégrer verticalement toutes les étapes de la production s’est montrée inadaptée aux objectifs des entreprises transnationales (ETNs).
II. Les gains de productivité sont devenus de plus en plus dépendants de la division internationale du travail entre entreprises, qui vendent des inputs intermédiaires à d’autres entreprises, générant un réseau complexe de relations commerciales.
Baldwin, 2016, The Great Convergence
I. Le commerce, via la réduction des barrières commerciales et les progrès des technologies de la communication, ont contribué à mondialiser les chaînes de valeur globales (CGV).
Ce phénomène a renforcé la concurrence et élevé la productivité d’ensemble.
II. Les CGV ont tendance à s’organiser au niveau régional.
Chamberlin, 1933, The theory of monopolistic competition
I. La différenciation des produits est une stratégie visant à introduire une distinction entre, d’une part, le produit fabriqué et vendu par l’entreprise et, d’autre part, les produits des concurrents.
Le but est de réduire l’âpreté de la concurrence quand il y a homogénéité des produits proposés par les différentes entreprises, et donc quand il y a substituabilité entre eux. Le producteur qui différencie son produit réussit ainsi à s’approcher des conditions du monopole (production assurée par une seule entreprise), même si celui-ci est limité dans l’espace et dans le temps.
II. Ce comportement reproduit par plusieurs entreprises sur un marché conduit à une situation de concurrence monopolistique.
Dixit et Stiglitz, 1977
I. Modèle de concurrence monopolistique, appliquant la théorie de Chamberlin à l’organisation industrielle.
II. Revisité par Krugman dès 1980, il a fondé un important corps de théories économiques sur le commerce international, la croissance et la géographie économique.
Il peut être intégré à d’autres modèles, afin de prendre par exemple en compte la préférence du consommateur pour la diversité.
Krugman, 1991, “Increasing Returns and Economic Geography”
I. Impulsion théorique au développement de la nouvelle économie géographique, qui étudie les différences de taux de croissance selon les régions. Il s’appuie sur le modèle Dixit-Stiglitz (1977) pour lui conférer une dynamique spatiale.
II. Les entreprises se regroupent en fonction de données :
- Géographiques : accès aux voies de communication, aux ressources naturelles, à l’eau potable ;
- Culturelles : langue, système politique ;
- Industrielles : proximité des fournisseurs, accès aux consommateurs, externalités de savoir-faire.
La spécificité de l’économie géographique est l’introduction de coûts de transport, qui permettent de moduler les forces de concentration.
III. L’arbitrage des entreprises se fait entre :
- Concentrer leurs activités en un seul lieu pour exploiter les économies d’échelle ;
- Ou diversifier leurs implantations pour réduire les coûts de transport.
Kuznets, 1955
Courbe de Kuznets
I. Hypothèse d’une relation « en cloche » entre le niveau de développement d’un pays et la dispersion de ses revenus individuels :
- Les inégalités seraient faibles dans les pays pauvres (pays africains) et dans les pays riches (Europe) mais élevées dans les situations intermédiaires (Amérique latine) ;
- Le développement s’accompagnerait d’une augmentation temporaire des inégalités.
II. Cette hypothèse est importante pour penser les arbitrages que le développement économique peut induire.
Deininger et Squire, 1998, New ways of looking at old issues: inequality and growth
I. La constitution d’une base de données sur le revenu et la propriété immobilière à travers plusieurs pays ne permet pas de valider la courbe de Kuznets.
II. Les auteurs mettent en évidence une forte relation entre la croissance à long terme et l’inégalité initiale du revenu et de la propriété foncière :
1° L’inégalité réduit la croissance du revenu pour les pauvres mais pas pour les riches. La relation n’est ainsi pas significative dans les pays riches.
⚠️ Les auteurs rejettent la causalité inverse, soit l’hypothèse de Kuznet.
2° Ils concluent que des politiques publiques facilitant l’accès aux actifs des pauvres a pour double effet d’améliorer la croissance et de réduire la pauvreté.
Galor et Tsiddon, 1997
I. Le cycle de vie des technologies gouverne à la fois l’importance des capacités individuelles requises et le degré des inégalités de revenus.
Sur le second point, l’innovation technologique explique les inégalités, en ce qu’elle en crée au sein des secteurs, autant qu’entre secteurs, des rentes provisoires inégalement réparties.
II. A contrario, il est nécessaire de laisser se développer initialement les inégalités, sous peine de contrarier le progrès technologique. La recherche institutionnelle de l’égalité doit intervenir lorsque le progrès technologique est dans sa phase de maturité.
Causa et al., 2014
Dans la majorité des pays de l’OCDE, la croissance du PIB depuis le début des années 1980 s’est accompagnée d’un accroissement des inégalités de revenus. Cet accroissement est dû en grande partie à des changements technologiques favorisant les plus qualifiés.
En effet, le progrès technique, en stimulant l’embauche de travailleurs qualifiés et en détruisant simultanément des emplois dans les secteurs en déclin (progrès technique biaisé), explique en partie cette augmentation des inégalités.
Milanovic, 2016, Global Inequality
I. D’après les enquêtes Gallup menées depuis 2008, 10 % de la population mondiale (soit 700 millions de personnes) souhaiterait émigrer. L’auteur insiste sur l’actualité de cette question des migrations internationales.
II. A. Les migrations internationales entraînent des tensions dans un monde qui à la fois se dit ouvert, qui estime légitime que tout individu cherche à maximiser son revenu, mais qui privilégie toujours le développement économique dans son espace national et par ailleurs estime normal de traiter différemment natifs et étrangers.
B. Les traitements inhumains infligés aux travailleurs étrangers dans les pays du Golfe sont souvent dénoncés (et notamment les saisies de passeport qui en font quasiment des esclaves), mais la critique des traitements qu’ils subissent dans leurs propres pays (Sri Lanka, Népal, Inde, Pakistan) est beaucoup moins audible. Pourtant, les mouvements migratoires vers le Golfe peut laisser penser qu’ils y trouvent de meilleures conditions.
Milanovic, 2016
Le progrès technique est un déterminant essentiel d’un nouveau cycle de Kuznetz, probablement durable, d’augmentation des inégalités au sein des pays riches.
Cependant, le pic des inégalités de ce second cycle devrait être moins élevé que le précédent, en raison des institutions en place (stabilisateurs automatiques notamment). De l’aveu même de l’auteur, il s’agit d’une conjecture.
Kaldor, 1957, A Model of Economic Growth
I. Dans un modèle sous hypothèse de plein-emploi :
Les plus aisés ayant une proportion à l’épargne plus importante, un accroissement des inégalités et de la part dans le revenu national des plus aisés augmente, toutes choses égales par ailleurs, l’épargne et par conséquent l’investissement et la croissance.
Les riches épargnent en effet plus que les pauvres : l’accroissement des inégalités se révèle alors favorable au taux de croissance, à condition que la richesse accumulée par la fraction la plus riche de la population soit investie dans les industries qui dégagent les gains de productivité (« théorie du ruissellement » de la richesse sur l’ensemble de l’économie).
II En d’autres termes, il faut* :
1° que l’augmentation du revenu des plus aisés ne s’accompagne pas d’une baisse équivalente de leur épargne ;
2° que l’augmentation d’épargne se traduise par une augmentation de l’investissement productif ;
3° et que l’augmentation de l’investissement se traduise par une augmentation de la croissance (et non pas seulement par une croissance plus capitalistique).
* (Peut-être pas dans l’article)
Summers, 2014
I. L’augmentation des inégalités est aussi un facteur de risque de stagnation séculaire, par l’excès d’épargne qu’il implique :
- Le taux naturel d’intérêt, auquel le désir d’épargne et le désir d’investissement sont égaux à la pleine capacité des facteurs de production (plein-emploi, pleine utilisation des équipements), est négatif ;
- La consommation est trop faible pour permettre l’utilisation complète des facteurs de production.
→ La croissance est donc plus faible que son potentiel.
De plus, la non-utilisation complète des facteurs de production peut réduire le potentiel de croissance par des effets d’hystérèse.
Deaton, 2013
Les inégalités de salaires, qui proviennent d’inégalités dans les rendements de l’éducation, encouragent l’offre de compétences, et même si ce n’est pas désirable en soi, cela peut augmenter le niveau de vie pour tout le monde.
Rajan, 2010
Les moins favorisés accroîtraient leur endettement pour soutenir leur consommation lorsque leur revenu stagne. Le gouvernement peut être tenté de réagir à une hausse des inégalités par un assouplissement des conditions de crédit pour les ménages les plus pauvres, ce qui peut finalement conduire à des situations de surendettement.
⚠️ Empiriquement contesté par Cournède et Denk (2017).
Cynamon et Fazzari, 2015
L’augmentation des inégalités qui a réduit les revenus des 95 % du bas de la pyramide a commencé autour de 1980. Pour stabiliser son niveau d’endettement, ce groupe aurait dû réduire la proportion de son revenu consacré à la consommation, ce qu’il n’a pas fait jusqu’en 2006, et son endettement a drastiquement augmenté, contrairement au top 5 % des revenus. Durant la Grande récession, la réduction attendue s’est produite, avec la baisse de la consommation du bottom 95 %.
Cette accentuation des inégalités et le niveau de demande qui en découle expliquerait en partie la lenteur de la reprise.
Alesina et Rodrik, 1994
I. Proposition d’un modèle théorique avec des citoyens inégalement dotés en capital et où l’imposition finance l’investissement public et la redistribution.
II. Plus les inégalités augmentent, plus le taux d’imposition augmente également et plus la croissance se réduit. Ceci ne vaut seulement que pour des niveaux élevés d’imposition : l’imposition et les dépenses publiques qui sont associées à des niveaux plus faible d’inégalités augmentent la croissance.
En effet, plus la répartition primaire des revenus est inégalitaire, plus l’électeur médian vote en faveur d’une fiscalité redistributive, jusqu’au point où le taux de prélèvement sur les revenus élevés, qui redistribue la rente vers le facteur travail et la consommation des plus pauvres, devient un frein à l’accumulation de capital et donc à la croissance.
Bénabou, 1996
Proposition d’un modèle théorique dans lequel la dispersion des revenus augmente le risque de conflits entre groupes sociaux à propos de la répartition des profits et crée un « dilemme du prisonnier » dans lequel aucun de ces groupes ne veut contribuer à la création de richesses.
Au fur et à mesure que les inégalités s’accroissent, l’électeur médian est de plus en plus incité à réclamer des redistributions importantes, ce qui décourage les investissements.
Rodrik, 2017
Étude de l’interaction réciproque entre la montée des débats populistes des années 2010 dans les pays développés et l’affaiblissement du soutien à l’ouverture commerciale, voire aux fondements de l’économie de marché.
Ce contrecoup de la mondialisation était prévisible, mais la forme qu’il a été amené à prendre l’était moins. L’aile gauche et l’aile droite des populismes sont distincts et la première a prospéré en Amérique latine, la seconde en Europe.
Selon l’auteur, « [c]e qui paraît une réaction raciste ou xénophobe peut trouver ses racines dans des angoisses ou des bouleversements de nature économique ».
Deininger et Squire, 1998, New ways of looking at old issues: inequality and growth
Constitution et étude d’une base de données très riche sur le revenu et la propriété immobilière à travers plusieurs pays :
1° La relation entre les inégalités (mesurées par l’indice de Gini de la distribution des revenus) et le taux de croissance dépend du niveau de développement : elle est négative pour un PIB par tête faible ou au contraire élevé, et positive dans les situations intermédiaires ;
2° D’après les auteurs, ce ne sont pas les inégalités de revenus qui contrarient la croissance, mais les inégalités de dotations initiales (notamment la distribution des terres).
Deininger et Squire, 1998, “New ways of looking at old issues: inequality and growth”
I. Étude empirique reposant sur de nouvelles données relatives aux revenus et à la propriété
Les auteurs testent deux canaux : le canal de l’investissement en actifs pour les pauvres et celui de la participation politique.
Ils trouvent que l’inégalité foncière a un effet significatif sur l’investissement en capital humain et par conséquent sur l’investissement et la croissance :
- L’inégalité et la croissance sont endogènes : les 20 % les plus pauvres bénéficient de la croissance à moyen terme ;
- L’inégalité initiale est défavorable aux pauvres mais pas aux riches ;
- L’investissement est associé à plus de croissance pour tous mais bénéficie davantage aux pauvres qu’aux riches ;
- Une diminution d’un écart-type de l’inégalité initiale de propriété foncière augmente la croissance du revenu du quintile inférieur de 1,05 % par an. Par comparaison, une augmentation d’un écart-type de l’investissement l’augmente de 1,8 %.
→ La conclusion est qu’en termes de lutte contre la pauvreté, il vaut mieux créer de nouveaux actifs plutôt qu’essayer de redistribuer ceux déjà existants.
FMI, Ostry et al., 2014, Redistribution, Inequality and Growth
I. Une augmentation de 5 points du Gini (différence entre les Etats-Unis et le Gabon en 2005) réduit le taux de croissance moyen annuel d’un demi-point de pourcentage.
Une augmentation de 1 point du Gini réduit de 7 % la durée moyenne anticipée des épisodes de croissance.
II. En revanche, sauf dans les cas extrêmes, les politiques de redistribution n’ont pas d’effet négatif sur la croissance.
Aghion et al., 2016, “Innovation and Top Income Inequality”
I. L’innovation est positivement associée à une hausse des inégalités tirée par les hauts revenus, mais aussi à une plus forte mobilité sociale. Les barrières à l’entrée diminuent les effets des entrants sur l’innovation et la mobilité sociale.
Cependant, de plus forts taux de marge pour les entreprises en places peuvent conduire à plus d’inégalités sociales et moins d’innovation.
II. Par conséquent, l’innovation et l’existence d’inégalités ne sont pas nécessairement corrélés. En revanche, la mobilité sociale est associée à l’innovation.
North, 1990, Institutions, Institutional Change and Economic Performance
Les institutions sont définies comme « les règles du jeu dans la société ou, plus formellement, les contraintes créées par les hommes qui régissent les interactions humaines ».
A la suite de Coase, l’auteur met l’accent sur les coûts de transaction qu’induit un environnement institutionnel de faible qualité et insiste sur l’importance de la sécurité des contrats.
Les institutions ont donc joué un grand rôle pour permettre la Révolution industrielle. Le décollage des futurs pays avancés doit presque tout au développement des brevets, qui ont rendu possibles les innovations.
La Porta, Lopez-de-Silanes, Schleifer et Vishny, 1999, “The Quality of Government”
Théorie de l’origine juridique* :
Les pays comme la France et ses anciennes colonies, s’inscrivant dans une tradition de droit civil héritée du droit romain, souffriraient d’un Etat pesant, voire spoliateur, d’une réglementation faisant obstacle à l’initiative économique – bref d’institutions moins flexibles qui conduisent à un développement moins rapide.
Au contraire, le Royaume-Uni et ses anciennes colonies, qui ont hérité d’une Common Law fondée sur la jurisprudence, bénéficieraient d‘institutions plus flexibles et d’une meilleure protection des droits de propriété.
* <em>Legal Origins Theory</em>. 📚 Cf. “La Legal Origins Theory : droit, économie, idéologie”, Vandenbulke, 2017/1, RIDE
La Porta, Lopez‐de‐Silanes, Shleifer and Vishny, 1998, “Law and Finance”
I. En se fondant sur la typologie de la Legal Origins Theory (pays de common Law d’une part, pays de civil Law d’autre part, dans laquelle on distingue entre droit scandinave, germanique et français), étude de données de 49 pays pour examiner les différentes protections juridiques des actionnaires et des créanciers offertes ces systèmes juridiques.
II. A. Les pays de common law offrent les meilleurs niveaux de protection des actionnaires, tandis que les pays de droit civil français les plus mauvais. La concentration dans la propriété des actions des plus grandes sociétés publiques est négativement corrélée avec la propriété des investisseurs, ce qui est cohérent avec l’hypothèse selon laquelle la place des petits porteurs d’origines diverses tend à se réduire dans les pays protégeant mal leurs droits.
B. En l’absence de sécurité des contrats, le droit civil rendrait donc nécessaire la finance d’intermédiation, tandis que la common Law accompagnerait mieux le développement de la finance de marché et protégerait mieux les actionnaires minoritaires.
Rodrik, 2004
I. Il est seulement possible de mesurer le niveau de protection de la propriété en se fondant sur le sentiment de protection exprimé par les propriétaires, mais il n’est pas possible d’en inférer quelles régles, législations ou institutions spécifiques permettent d’obtenir ce résultat.
II. A. Ainsi, en Russie, un investisseur bénéficie en principe de la pleine protection d’un régime de droits de propriété privée, contrôlée par un système judiciaire indépendant.
En Chine, il n’y a aucune protection de ce genre, car la propriété privée n’a pas été (jusqu’à une date très récente) reconnue légalement et les tribunaux n’y sont certainement pas indépendants.
B. Et pourtant, du milieu à la fin des années 1990, les investisseurs ont constamment donné de meilleures notes à la Chine qu’à la Russie en matière d’État de droit.
Ils se sentaient mieux protégés en Chine qu’en Russie.
→ Il y a loin entre la théorie (les institutions et le droit – cf La Porta et al., 1998, 1999) et la réalité. La littérature empirique ne dit pas comment la sécurité des investisseurs est atteinte, mais seulement qu’elle importe.
Acemoglu, Aghion et Zilibotti, 2006
I. Notion de distance à la frontière :
Pour les pays les plus éloignés de la frontière technologique (représentée par l’économie la plus avancée à un instant donné), le progrès technique passe surtout par l’adoption de technologies existantes (l’imitation) et les institutions propices à la croissance sont celles qui favorisent cette adoption.
II. Mais plus on se rapproche de la frontière, plus il est important d’encourager l’innovation et de mettre en place des institutions spécifiques : protection de la propriété intellectuelle, financement de projets, incitation aux investissements risqués, etc. Le cadre institutionnel doit rester flexible.
Kose et al., 2006
Un des enseignements des crises financières de 1997-1998 dans les pays émergents est que la libéralisation des mouvements de capitaux ne doit pas être recommandée à tous les pays, comme l’OCDE et le FMI le croyaient avant ces crises, mais seulement à des pays déjà développés et dont les institutions financières sont robustes.
Kaufman, Kraay et Mastruzzi, 2008
Les indicateurs de la base de données de la Banque mondiale pour évaluer la qualité de la gouvernance sont les suivants :
1° La qualité de la démocratie représentative ;
2° La stabilité politique ;
3° L’efficacité de l’administration ;
4° La qualité de la réglementation ;
5° Le respect de l’Etat de droit ;
6° La lutte contre la corruption.
Thomas Malthus, 1798, Essai sur le principe de population
I. Conclusions sur des rendements décroissants qui correspondaient à une expérience très précise de la fin du XVIIIe siècle : celle de la mise en valeur de terres de moins en moins fertiles et de plus en plus difficiles à cultiver, à laquelle s’est justement opposée la contre-expérience de l’innovation et des gains de productivité.
La croissance géométrique de la population s’oppose à la croissance arithmétique de la production.
II. La fécondité est considérée comme le ressort fondamental de la croissance. Le report des mariages compense les chocs négatifs en période de crise et leur avancée permet d’encourager les reprises en accompagnant les chocs technologiques, si bien que le niveau de vie par tête demeure constant sur longue période.
Milanovic, 2016
I. Comme d’autres auteurs, mise en évidence que :
- la baisse des inégalités intra-pays observée entre 1820 et 1990 n’est pas spécifique aux pays d’Europe occidentale ;
- que les inégalités à l’échelle mondiale, entre pays, ont augmenté au cours de cette même période ;
- que, depuis la fin du XXe siècle, cette tendance s’est inversée : moins d’inégalités à l’échelle mondiale et plus d’inégalités à l’intérieur des pays, avec des exceptions notables.
II. A. La « déconcentration » du capital et les interventions avant impôts et transferts sont une approche plus prometteuse pour réduire les inégalités que la redistribution, en particulier compte tenu de la difficulté qu’il y a à augmenter la fiscalité des revenus du capital dans un monde globalisé.
B. Il s’agirait notamment de réduire les inégalités de dotations :
- en matière de détention d’actifs ;
- dans l’éducation.
C. Dans ces conditions, les inégalités de revenus de marché diminueraient et n’impliqueraient plus qu’une redistribution de nature plus modeste, de nature à satisfaire ceux qui considèrent les taxes trop élevées comme mauvaises pour l’activité.
Piketty, 2013, Le capital au XXIe siècle
Au niveau mondial, la redistribution opérée par les impôts et transferts a un impact limité sur les inégalités.
Celles-ci dépendent bien davantage :
- Des forces motrices de la rémunération du capital et du travail ;
- De l’impact politique et économique cumulatif de la concentration du revenu ;
- Du rôle des inégalités de patrimoine.
Aghion et al., 2012, Industrial Policy and Competition
I. Une concurrence accrue et la menace de nouvelles entrées obligent les entreprises existantes à investir pour faire face à cette pression concurrentielle.
II. Une politique sectorielle ciblant la production peut améliorer la situation si elle est compatible avec le maintien de la concurrence.
Cournède et Denk, 2017
I. La financiarisation peut se définir comme la prise par la finance d’une place de plus en plus grande dans la vie économique. Elle est observable au travers des indicateurs de la comptabilité nationale, par exemple la place de la valeur ajoutée du secteur financier dans le PIB.
II. A. La financiarisation se traduit généralement par une augmentation des inégalités (Cournède et Denk, 2015) : les ménages les plus aisés profitent le plus des opportunités offertes par le crédit, y ayant un meilleur accès. Par conséquent, à l’opposé de l’hypothèse de Rajan (2010), il apparaît que l’accumulation du crédit contribue au creusement des inégalités.
B. L’exploitation d’une base de microdonnées en zone euro montre que l’hypothèse de Rajan ne s’y confirme pas.
III. Une plus grande place pour les actions cotées dans le financement de l’économie se traduit aussi par davantage d’inégalités de revenu.
Jorgenson et Vu, 2016
I. Les technologies de l’information et de la communication (TIC) ont profondément modifié les habitudes de travail et les interactions entre les individus. Elles ont fait évoluer les pratiques des entreprises et de l’administration.
II. L’importance accordée à l’innovation est remise en question : comparée au progrès technologique (notamment le développement des semi-conducteurs dans la puissance de calcul informatique), elle n’a joué en fait qu’un rôle relativement modeste, qui ne justifie pas sa place centrale dans les théories modernes de la croissance économique.
III. Les politiques économiques devraient donc mettre l’accent sur la remise en cause de leurs modèles pour tenir compte du progrès technologique.
Barro et Sala-ì-Martin, 1995, Economic Growth
Les variables qui exercent un effet significatif sur le PIB par tête de long terme sont :
1° La qualité du capital humain : niveau d’éducation, espérance de vie ;
2° Le bon fonctionnement des marchés : degré de concurrence, distorsions introduite par l’intervention de l’État, corruption ;
3° La stabilité macroéconomique (notamment la stabilité des prix) ;
4° L’instabilité politique (guerres, coups d’état, ou simplement alternance entre partis politiques).
Solow, 1956
La productivité globale des facteurs explique les 7/8e du doublement de la productivité du travail aux Etats-Unis de 1909 à 1949, tandis que l’augmentation de l’intensité capitalistique explique le huitième restant.
L’auteur l’appelle aussi « la mesure de notre ignorance ».
Meisel et Ould Aoudia, 2007
I. La « bonne gouvernance », c’est-à-dire la qualité des institutions, mesurée par les indicateurs de la Banque mondiale :
- est corrélée au niveau de développement (le PIB par tête ou revenu) ;
- n’est pas corrélée à la vitesse de développement (la croissance de moyen-long terme).
II. Certaines variables institutionnelles facilitent le décollage économique et d’autres aident à soutenir une croissance économique de long terme et rendent possible un rattrapage économique :
1° La « bonne gouvernance » ne ressort pas comme une priorité pour le décollage économique. Elle le devient dans un second temps, ainsi que l’ouverture du système de régulation sociale, lorsque, bénéficiant d’une croissance soutenue et prolongée, un pays cherche à converger avec les pays développés ;
2° Dans les autres pays en développement (non-convergents), la priorité réside dans la construction de capacités d’anticipation stratégique et de coordination entre élites.
Rapport Spence (Commission sur la croissance et le développement), 2008
I. Observation de la forte hétérogénéité des trajectoires de croissance forte dans certains pays en développement.
Pourquoi certains pays se développent et atteignent des taux élevés et durables de croissance (7 % en moyenne par an pendant au moins 25 ans depuis), alors que d’autres n’y arrivent pas ?
II. 13 pays remplissent ce critère des 7 %, mais se présentent comme très hétérogènes :
- démocratiques et pluralistes comme le Japon ou la Corée du Nord, à parti unique comme la Chine ;
- ayant opté pour des politiques d’exportation et d’attrait des IDE (Singapour, Hong Kong, la Malaisie), de substitution des importations par des productions (Brésil), d’investissement (Japon).
→ Le lien entre institutions et croissance est complexe et non-linéaire.
Conseil européen, 2010, Europe 2020
Stratégie de croissance à 10 ans formulée par l’UE, qui identifie cinq grandes priorités, associées à cinq objectifs quantifiables à l’horizon 2020 :
1° Porter le taux d’emploi à 75 % de la population âgée de 20 à 64 ans ;
2° Investir 3 % du PIB dans la R&D ;
3° Objectifs 20-20-20 : réduire les émissions de GES de 20 %, réaliser 20 % d’économies d’énergie et porter à 20 % la part des énergies renouvelables dans son bilan énergétique ;
4° Ramener le taux d’abandon scolaire à moins de 10 % et faire en sorte que 40 % des jeunes au moins obtiennent un diplôme de l’enseignement supérieur ;
5° Réduire de 20 millions le nombre de personnes menacées par la pauvreté.
Le Rapport annuel 2016 sur la gestion et la performance du budget de l’UE a montré que les difficultés qui demeuraient concernaient l’emploi, la R&D et la réduction de la pauvreté, tandis que les objectifs susceptibles d’être atteints étaient ceux relatifs à l’énergie, à la préservation du climat et à l’éducation.
Caballero et Hammour, 1994
En raison du phénomène de la destruction créatrice établi par Schumpeter, il ne faudrait pas s’opposer, par des politiques de stabilisation, à l’effet de « nettoyage » de récessions.
⚠️ Cela ne signifie pas que ces épisodes de récessions soient désirables.
Ollivaud et Turner, 2015
I. L’OCDE avait initialement estimé que la crise de 2007-2009 n’aurait pas d’impact négatif sur la croissance de la productivité globale des facteurs à moyen terme.
II. Selon les auteurs de cet article, cette prévision s’est avérée trop optimiste.
Il est néanmoins difficile d’évaluer cet impact, en raison :
- de l’impossibilité de se référer à un contrefactuel ;
- de la présence d’effets des différentes politiques menées après la crise, qu’il est difficile de démêler des effets de la crise elle-même.
Philippon et Veron, 2008
Certaines entreprises européennes qui pourraient investir dans la recherche sont contraintes par un accès insuffisant aux financements.
En sous-estimant le lien entre développement financier et croissance, les politiques publiques ont négligé un important levier pour l’emploi et la croissance en Europe.
Ramey et Ramey, 1995
Etude empirique présentant une analyse allant à contre-courant de la dichotomie classique séparant la croissance de la volatilité des fluctuations économiques :
Il y a un effet négatif de l’instabilité du PIB sur la croissance moyenne.
Barrel et Weale, 2003
Les politiques de « stop and go » (alternance entre la relance et la restriction) menées au Royaume-Uni jusqu’en 1997, qui ont conduit à une variabilité élevée du taux de croissance du PIB, des taux d’intérêt et du taux de change, ont pu ralentir la productivité britannique.
Aghion et Banerjee, 2005
Moins un pays est financièrement développé, plus l’instabilité de son PIB nuit à sa croissance de long terme.
Drew et al., 2004
I. Modèle permettant de comparer les effets des chocs temporaires sur la zone euro et aux États-Unis.
II. Les rigidités sur les marchés financiers, des biens et du travail affectent négativement la résilience des pays à des chocs économiques temporaires.
Pagano, 1993
I. Trois canaux d’influence des marchés financiers sur la croissance de long terme :
1° L’abaissement du coût du capital : il abaisse les coûts de transaction par des économies d’échelles (coûts de production des services financiers, taxes, réglementations) et par des mises en concurrence rendant le processus d’intermédiation plus efficace ;
2° La stimulation de l’épargne : un système financier solide inspire confiance et permet la hausse du taux d’épargne, augmentant l’investissement à long terme ;
3° Une meilleure allocation du capital disponible : collecte d’information sur les projets d’investissements, diversification des risques et financement de l’innovation, orientation de l’épargne vers les projets les plus productifs.
II. Cependant, le secteur financier peut souffrir d’imperfections : les recettes perçues par le secteur financier peuvent rémunérer les services qu’ils rendent, mais également refléter une inefficacité associée au pouvoir de marché en tant qu’intermédiaires.
Schumpeter, Théorie de l’évolution économique, 1911
Le rôle du système financier dans l’émergence de l’innovation financière est une constante historique.
L’expansion du crédit, donc de la monnaie, est indispensable à l’investissement donc à l’activité et la croissance. La monnaie cesse d’être neutre et devient une condition de l’expansion économique.
⚠️ L’ouvrage paraît l’année même où Irving Fisher formalise la théorie quantitative de la monnaie dans son ouvrage Le Pouvoir d’achat de la monnaie, postulant sa neutralité.
Loi du 24 décembre 2020 de programmation pour la recherche pour les années 2021 à 2030
Les dépenses intérieures de recherche et développement (R&D) rapportées au PIB s’élevaient à, en 2017 :
2,2 % en France
2,8 % aux États-Unis
2,15 % en Chine
3,2 % au Japon
4,55 % en Corée du Sud
1,35 % en Italie
1,97 % dans l’UE 28
2,37 % dans l’OCDE.
La loi fixe l’objectif de porter :
- Les dépenses intérieures de recherche et développement des administrations et des entreprises à au moins 3 % du produit intérieur brut annuel ;
- Les dépenses intérieures de recherche et développement des administrations à au moins 1 % du produit intérieur brut annuel au cours de la décennie suivante.
Philippon et Veron, 2008
La capacité du marché financier américain à innover et à diriger les fonds vers les usages les plus productifs est un atout majeur des États-Unis par rapport à l’Europe ou au Japon.
La montée de la finance d’entreprise américaine, combinée à un marché du travail fluide, a contribué à l’émergence d’un modèle de croissance qui repose sur l’entrée et la croissance rapide de nouveaux acteurs, qui s’étend bien au-delà du secteur des nouvelles technologies. En effet, ceux-ci, en apportant au marché de nouveaux produits et des technologies plus productives, mettent en difficulté les entreprises en place.
Rodrik, 2005
Après les crises des économies émergentes de la fin des années 1990, d’autres dimensions ont été ajoutées aux préconisations des institutions issues du consensus de Washington : flexibilité des marchés du travail, respect des règles de l’OMC, protection sociale, dépenses ciblées pour lutter contre la pauvreté.
⚠️ B.Q. : ces préconisations et toutes celles qui les ont précédées (Williamson, 1989) finissent par donner l’apparence d’un « inventaire à la Prévert ».
Comin et Philippon, 2005
I. A. La volatilité de la valeur des entreprises a augmenté avec la déréglementation des marchés des produits et le développement de la R&D. Or, si les auteurs n’identifient pas d’indice d’une plus faible corrélation entre la finance et l’économie, ils en trouvent pour les secteurs à fort investissement en R&D.
B. L’investissement en R&D dans l’industrie conduit à une augmentation de la volatilité de la valeur des entreprises et à une diminution de la covariation de ce secteur avec l’économie en général.
II. N.B. B.Q. :
Il y a une nécessité d’améliorer le fonctionnement des marchés, car ce bon fonctionnement contribue à la PGF par l’optimisation de l’allocation des ressources entre capital et travail.
Cette nécessité n’est pas nouvelle mais prend une importance croissante depuis deux ou trois décennies, au vu du besoin croissant de réallocation des facteurs de production entre secteurs et entre entreprises d’un même secteur.
John Williamson, 1999
I. Les politiques de croissance prioritaires à la fin des années 1980 avaient été surnommées par l’auteur, dès 1989, « le consensus de Washington », pour désigner cet ensemble de politiques que « à peu près tout le monde à Washington pense plus ou moins nécessaires partout en Amérique latine ».
II. Ici, l’auteur relève que ce terme est désormais employé comme critique, ce qui n’était pas son intention initiale.
📚 Certaines des préconisations portées par ses institutions ont depuis été remises en cause (discipline budgétaire, libéralisation financière, unification des taux de change…), notamment par le « consensus de Buenos Aires », resté cependant sans grande suite.
Cf. la fiche wiki sur le consensus de Washington
Barro, 2001
Étude empirique portant sur une centaine de pays entre 1965 et 1995.
L’éducation des femmes au niveau primaire élève le taux de croissance en diminuant le taux de fertilité. Les hauts niveaux d’éducation féminins semblent mal employés sur les marchés du travail de la plupart des économies.
Le taux de croissance est positivement relié au nombre d’années d’études supplémentaires au nombre moyen d’années suivies dans le secondaire et dans le supérieur.
Une année supplémentaire d’éducation élève le taux de croissance de moyen terme, toutes choses égales par ailleurs, de 0,44 point de pourcentage.
Cependant, la qualité des années supplémentaires d’études, mesurées par les résultats aux examens, est plus déterminante encore que la qualité.
Enfin, de bons résultats en science sont corrélés avec une croissance plus élevée.
Banque mondiale (Sianesi et Van Reenen), 2002
L’éducation est un bien public, c’est pourquoi il ne faut pas s’arrêter à son rendement individuel.
1° Il y a un lien entre le niveau de développement d’un pays et le rendement le plus efficace du niveau d’éducation à améliorer : le rendement social le plus élevé est celui de l’éducation primaire dans les pays en développement, de l’enseignement supérieur dans les pays développés ;
2° Le rendement privé de l’éducation est plus élevé que son rendement social, car ce dernier prend en compte tous les coûts directs de l’éducation et le coût d’opportunité du financement public ;
3° Le rendement de l’éducation féminine est plus élevé que celui des hommes, notamment parce qu’il baisse le niveau de fertilité, et donc la croissance de la population.
Nelson et Phelps, 1966 (“Investments in Humans Technological Diffusion and Economic Growth”)
Étude fondatrice : mise en évidence du lien, au niveau macroéconomique, entre la performance de l’éducation et la productivité par tête.
L’éducation est un acte d’investissement dans les individus, et des individus éduqués sont porteurs d’un capital humain.
II. ⚠️ Cette constatation importe dans le cadre de l’établissement d’un lien entre la structure de l’investissement et le progrès technologique.
En outre, elle implique d’importantes externalités en matière de rendement social et de rendement privé de l’éducation.
Aghion et al., 2009
L’enseignement supérieur a un fort effet sur la croissance dans les pays proches de la frontière technologique (alors qu’il n’affecte pas la croissance dans les pays qui en sont éloignés) :
Une augmentation d’un point de pourcentage dans la proportion de diplômés dans la population active augmente la croissance de la PGF de moyen terme d’environ 0,1 point de pourcentage (ce qui est élevé).
Vinokur, 1987
I. Les interventions du FMI auprès des pays endettés s’accompagnent de politiques d’« ajustements rapides », c’est-à-dire des réductions massives de dépenses publiques. Or, les crédits scolaires représentant généralement le premier poste budgétaire, ils étaient généralement les premiers visés à l’époque.
II. A. La Banque mondiale était plus sensible à l’importance de l’éducation. En 1986, elle a publié un rapport mettant en évidence plusieurs éléments :
- il y a une mauvaise allocation des ressources au sein même des systèmes éducatifs, et il convient de redéployer des crédits du secondaire et du supérieur vers le primaire, où ils apportent un meilleur rendement ;
- en effet, c’est généralement dans l’enseignement supérieur que le taux de rendement privé est plus élevé que le taux de rendement social : il convient donc de réduire les aides publiques à ce secteur.
B. Selon l’auteur, le modèle proposé par la Banque mondiale est finalement assez simpliste : personne ne conteste l’intérêt d’améliorer l’enseignement primaire, et il est assez vain de discuter des conclusions du rapport ou de ses préconisations qui n’ont de sens qu’envisagés dans leur globalité. La seule alternative consisterait dans l’analyse de chaque système éducatif dans la dynamique de ses rapports avec les structures économiques, sociales, politiques et idéologiques.
Aghion et al., 2008
Pour améliorer les performances de l’Europe en matière d’enseignement supérieur (mesurées à la fois par le classement de Shanghai et les dépôts de brevet), la qualité de la gouvernance des universités est aussi important que la dépense en formation supérieure rapportée au PIB.
Préconisations :
1° Augmenter les dépenses dans l’enseignement supérieur (36 500 € aux États-Unis contre 8 700 € en Europe), car elles sont positivement corrélées aux performances ;
2° Améliorer la gouvernance des universités, car l’augmentation des dépenses et l’autonomisation des universités sont des facteurs qui fonctionnent en synergie ;
3° Accroître la mobilité des étudiants et la compétition entre les universités.
Nicoletti et Scarpetta, 2005
I. Indicateurs synthétiques mesurant l’intensité de la réglementation des marchés des biens et services dans les pays de l’OCDE :
- Les différences de la pression réglementaire expliquent partiellement les différences de taux de croissance de la PGF : la corrélation est négative ;
- La comparaison entre les situations en 1998 et en 2003 montre une convergence des indicateurs agrégés de la réglementation sur le marché des biens vers des niveaux faibles.
II. Les réformes qui accroissent les pressions concurrentielles sur les marchés des biens tendent à augmenter à la fois l’investissement et la productivité multifactorielle *.
* L’efficience globale avec laquelle les facteurs travail et capital sont conjointement utilisés dans le processus de production.
Aghion et al., 2005
I. Fondements théoriques apportés, en se fondant sur l’étude du lien, au Royaume-Uni, entre la marge des entreprises et le nombre de brevets déposés, à l’idée que trop de concurrence décourage l’innovation, mais que pas assez de concurrence la tue :
1° La concurrence réduit la rente extraite des innovations réussies et donc l’incitation à innover (nécessité d’une protection de la propriété intellectuelle)…
2° Mais elle favorise aussi l’innovation lorsqu’elle donne le moyen à une entreprise de contester le pouvoir de marché des entreprises en place.
II. La relation entre compétition et innovation est une relation en U inversé.
Champsaur, 2007
Dans les premières phases de la libéralisation des industries de réseau (télécommunications ; plus récemment, énergie), l’entrée de nouveaux acteurs a été encouragée par une réglementation asymétrique visant à empêcher toute stratégie d’éviction par des prix agressifs et toute forme de représailles mortelles de la part des entreprises en place.
Au fur et à mesure que la concurrence s’intensifie, il faut toutefois veiller aussi à préserver une incitation à investir et à innover, ce qui suppose un certain niveau de profitabilité.
Griffith et Harrison, 2004
I. Les réformes qui facilitent l’entrée sur les marchés et l’allégement des contraintes administratives réduisent les marges des entreprises.
Cette diminution des rentes soutient l’investissement et l’emploi à travers le renouvellement du tissu productif.
II. Les auteurs trouvent en revanche que la disparition des rentes serait défavorable à la R&D, mais invitent à la prudence sur ce résultat.
OCDE, 2004
Si la convergence des pays européens est indéniable, celle des régions européennes n’est pas nette : ce sont les régions riches des pays initialement en retard (Catalogne, par exemple) qui ont enregistré les rattrapages les plus nets.
Le Gallo et Dall’erba, 2006
L’analyse de la dynamique des revenus régionaux en Europe met en évidence le fait que la convergence d’une région donnée dépend fortement du niveau de développement de ses voisines, conduisant à de véritables « clubs de convergence ».
Rapport au président de la Commission européenne (Rapport Sapir), 2003
Rapport au président de la Commission européenne.
Il a fait la proposition de séparer les fonctions d’allocation et de redistribution du budget européen en distinguant, en son sein :
- D’une part, un « fonds de croissance » dont l’objectif serait de financer les projets les mieux à même de contribuer à la croissance de l’ensemble de l’Union ;
- Et d’autre part, un « fonds de convergence » réservé aux pays ou aux régions en retard de développement.
Martin, 1999
I. Des politiques publiques visant à influencer la géographie économique en modifiant les infrastructures pour davantage d’égalité peuvent conduire à des inefficiences économiques. D’un autre côté, laisser se développer la spécialisation régionale peut avoir des conséquences sociales très dures sur certains travailleurs pauvres, peu qualifiés et peu mobiles.
II. Proposition, pour faire face aux inégalités de développement des régions :
- Diminuer le coût de l’innovation, au travers de subventions par exemple, peut conduire à réduire les disparités régionales, et peut être préférable au financement des régions.
On vise ici à la fois l’efficacité économique et l’équité régionale.
Rodriguez et Rodrik, 2001
En dépit du consensus (FMI, BM, OCDE) de l’époque sur la supériorité de l’ouverture internationale, la relation entre entre ouverture commerciale et croissance n’est pas évidente :
1° Aucun pays ne peut atteindre une croissance soutenue sans s’ouvrir aux échanges, mais l’ouverture ne suffit pas à créer la croissance.
Au contraire, l’ouverture peut pousser un pays à se spécialiser entièrement dans les secteurs où il dispose d’avantages comparatifs (agriculture par exemple) et compromettre sa montée en gamme future ;
2° En présence d’imperfections de marché (comme des externalités positives des marchés soumis à la concurrence des importations), des restrictions aux échanges peuvent être préférables.
Krugman, 1991
Il existe des équilibres multiples, au sein desquels la capacité des gouvernements et des institutions internationales à influencer les anticipations peut faire basculer d’un équilibre à l’autre.
Ce rôle de coordination nécessite de la crédibilité.
OCDE, Going for Growth, 2017
I. Série de rapports annuels proposant d’identifier, pays par pays, les domaines où la performance et les politiques publiques sont relativement les plus faibles et d’en déduire trois priorités pour l’action publique, fondées sur les indicateurs adaptés.
II. A. Le rapport de 2017 relève un ralentissement du rythme des réformes structurelles au sein de l’OCDE, notamment dans l’éducation et l’innovation, et constate que les gouvernements ont tendance à se concentrer sur des domaines d’intervention spécifiques, se privant ainsi des synergies et des complémentarités entre réformes.
B. Il fait les propositions suivantes :
- Faciliter l’entrée et la croissance des entreprises innovantes ;
- Promouvoir l’égalité d’accès à une éducation de qualité et intégrer les femmes et les migrants au marché du travail ;
- Augmenter l’investissement dans les infrastructures ;
- Améliorer la formation des travailleurs et les politiques actives du marché du travail.
Hausmann, Rodrik et Velasco, 2005 (“Growth Diagnostics”)
I. Constat que les politiques fondées sur le consensus de Washington dans les quinze années qui précèdent ont produit des résultats très inégaux.
Il faut distinguer le développement de la croissance. Il faut également adapter les politiques économiques proposées à l’environnement dans lequel elles ont vocation à s’appliquer.
II. Passage en revue de plusieurs stratégies possibles :
1° L’élimination globale de toutes les distorsions économique. Elles nécessitent non seulement une profonde connaissance de l’environnement économique et politique, mais la capacité de les éliminer, ce qui rend cette solution impossible à mettre en œuvre ;
2° La stratégie qui semble prédominer est celle de faire autant de réformes que l’on peut. Selon le cadre proposé par les auteurs, cette approche est défectueuse d’un point de vue économique, car d’autres distorsions peuvent conduire les réformes suivies à produire des effets négatifs ;
3° Promouvoir les choix de second rang. Approche similaire à la précédente, mais plus ciblée. Le problème est que les réformes souhaitables sont généralement identifiables ex post plutôt que ex ante ;
4° Cibler les plus grosses distorsions. Cette approche produit normalement de meilleurs résultats que les deux précédentes, mais se heurte à deux limites : elle nécessite une connaissance approfondie des distorsions en cours ; l’élimination d’une importante distorsion (par exemple, les droits de douanes sur les importations) ne répond pas nécessairement aux problèmes les plus fondamentaux d’une économie (par exemple, l’insuffisance de l’investissement) ;
5° La focalisation sur les réformes susceptibles de produire les effets les plus importants dans l’économie. C’est celle qu’il est proposé de suivre par les auteurs.
III. Proposition d’un cadre d’analyse de la croissance sous la forme d’un arbre de décision.
Il faut se focaliser sur l’identification du problème propre à chaque situation.
Les auteurs proposent de retenir en priorité les réformes dont l’impact direct sur la réduction des distorsions entre la valeur privée et la valeur sociale d’une série d’activités est le plus fort, comme c’est le cas de l’éducation.
Aghion et al., 2012, Credit constraints…
Les entreprises qui meurent lors d’une récession ne sont pas nécessairement les plus inefficaces : elles peuvent être simplement les plus fragiles ou celles qui ont pris le plus de risque.
A REVOIR
Ventura et Voth, 2015
Contrairement à ce qui est généralement soutenu, la montée de l’endettement public dans l’Angleterre du XVIIIe siècle, n’a pas produit des effets négatifs ou même neutres sur le développement économique du pays.
La production abondante de titres obligataires d’État a introduit une liquidité qui a permis aux épargnants, notamment la noblesse anglaise, de se détourner des secteurs à faibles rendements, notamment l’agriculture, vers le financement des industries montantes comme le textile ou le fer. De ce fait, en parallèle, la demande de facteurs de production dans les secteurs à faibles rendements s’est abaissée, ce qui a renforcé le phénomène.
Livre blanc de la Commission européenne, 2005, « Politique des services financiers 2005-2010 »
Plan d’action pour les services financiers élaboré par la Commission, pour l’intégration des services financiers.
Il visait à remédier à la très grande fragmentation de la gestion d’actifs, de la banque de détail, du capital-risque et du financement des PME.
⚠️ D’après la BCE (2020), « Des évolutions favorables en matière d’intégration financière ont été observées ces dernières années, notamment en ce qui concerne les relations de paiement de montant élevé, les taux spécifiques du marché des prises en pension garanties et, très progressivement, les volumes de prêts bancaires aux particuliers, mais elles ne se sont généralement pas manifestées sur les marchés boursiers. »
Beuve, Paris et Schurich-Rey, 2017
I. Les thèses faisant très largement consensus dans le panel d’anciens membres du CAE interrogés sur ces questions :
1° La plus grande liberté de circulation des biens et services au sein du marché unique a amélioré en moyenne la situation des Européens depuis les années 1980 ;
2° Lorsque l’offre de logement locatif est contrainte, subventionner la demande via des aides au logement conduit à une hausse des loyers.
II. Les thèses largement admises :
1° En France, les allégements de cotisations sociales employeurs ont un effet positif sur l’emploi quand ils sont ciblés sur les bas salaires ;
2° L’ouverture des commerces le dimanche permet de créer des emplois ;
3° Un prix unique des émissions de gaz à effet de serre, reflétant les coûts du réchauffement climatique, est un moyen efficace pour réduire ces émissions ;
4° La protection élevée contre les licenciements nuit à l’emploi des jeunes en CDI.
Williamson, 1989
Identification d’une dizaine d’instruments économiques qui font, selon l’auteur, consensus à Washington :
1° la discipline budgétaire ;
2° la préférence pour la réduction des dépenses publiques plutôt que les hausses d’impôt ;
3° en cas d’impôt, le choix d’une assiette large et d’un taux marginal d’imposition faible ;
4° le taux d’intérêt devrait être déterminé par le marché et le taux d’intérêt réel devrait être positif ;
5° un taux de change compétitif est plus important que la façon dont il est déterminé, y compris par le marché ;
6° la libéralisation des échanges ;
7° la promotion des investissements directs à l’étranger ;
8° la privatisation des entreprises publiques ;
9° la déréglementation ;
10° la protection des droits de propriété.
Kim, 2016
Mise en évidence empirique d’un lien très fort entre élévation du niveau d’éducation des femmes et baisse de la fertilité.
L’explication de ce lien n’est en revanche pas évidente.
Karra, Canning et Wilde, 2021
La transition démographique est en cours en Afrique subsaharienne depuis quelques décennies.
Il a déjà été mis en évidence (Barro, 1991 ; Mankiw, Romer et Weil, 1992) que la baisse de la fertilité qui accompagne les dernières étapes de la transition démographique introduit la possibilité d’un dividende démographique et une fenêtre d’opportunité pour la croissance économique :
- augmentation du revenu ;
- augmentation de la participation des femmes au travail ;
- amélioration de l’investissement dans la santé et l’éducation des enfants, ce qui augmente leur productivité ultérieure sur le marché du travail ;
- la modification de la structure de la population par classes d’âge peut affecter le taux d’épargne national et l’investissement ;
- il peut y avoir une rétroaction positive lorsque la croissance économique contribue en retour à la baisse de la fertilité et d’autres bénéfices économiques.
North, Wallis et Weingast, 2009
Trois catégories d’ordres sociaux, articulés entre l’économique et le politique, sont distingués dans l’histoire :
1° L’ordre social primitif (les « chasseurs-cueilleurs »), avant l’apparition des sociétés organisées ;
2° L’ordre social à accès limité (LAO - “Limited Access Order”) dans lequel la violence est canalisée : l’ordre et la stabilité sont maintenus par un système politique fondé sur l’extraction et la distribution des rentes. Les relations personnelles dominent, les règles ne s’appliquent pas de manière impersonnelle. Les élites (souvent des seigneurs de guerre) s’entendent pour gérer en commun les droits de propriétés, partager les rentes et assurer la stabilité nécessaire à la prospérité de ces rentes ;
3° L’ordre social ouvert (OAO - “Open Access Order” ou État naturel), qui a émergé il y a près de 300 ans, et qui caractérise les pays les plus avancés : principe de la concurrence, aussi bien politique qu’économique. La contestabilité des rentes, fruits de l’innovation, fait qu’elles ne sont pas attachées à des personnes, ce qui les rend plus acceptables.
II. Pour devenir des OAO, les LAO doivent satisfaire trois conditions liminaires (doorstep conditions) :
1° L’établissement d’une règle de droit entre les élites ;
2° L’existence d’organisations « perpétuelles » (capables de perdurer indépendamment de la personnalité deleurs membres), y compris l’État lui-même ;
- 3° Le contrôle de la coalition au pouvoir sur les militaires.
III. Trois types d’États naturels :
- Les États naturels fragiles : LAO dans lesquels l’État ne se maintient que difficilement face à la violence interne ou externe ;
- Les LAO basiques : LAO capables d’établir une organisation durable et stable de l’État (essentiellement composé d’institutions de droit public) ;
- Les États naturels matures : ils possèdent une structure institutionnelle durable et il est possible d’y établir des organisations des élites en dehors du cadre de l’État.
⚠️ Ces trois types ne sont pas des étapes successives, mais différentes formes sur lesquelles il est possible de revenir.
Coeuré, 2017
I. Mise en évidence d’une corrélation très forte, au sein de l’Union européenne, entre le PIB par habitant de 2015 et le rang en 2008 dans les indicateurs de gouvernance mondiaux.
II. Ces divergences dans la qualité des institutions sont une des raisons de la difficulté de la conduite de la politique monétaire en zone euro.

Acemoglu, Aghion, Zilibotti, 2006, “Distance to Frontier, Selection, and Economic Growth”
Démonstration de l’importance d’un cadre institutionnel flexible :
- Les institutions comptent à chaque étape du développement d’un pays (c’est-à-dire du rapprochement de la frontière), mais doivent s’adapter à ces différentes étapes ;
- D’où la nécessité, pour les institutions internationales, d’affiner leurs recommandations aux pays en développement.
⚠️ Ce sont des choix cruciaux à certains points de bifurcation qui ont déterminé l’évolution vers la démocratie ou vers le maintien d’un ordre social à accès limité.
Tiebout, 1956, “A pure theory of local expenditures”
Les citoyens peuvent déménager lorsqu’ils désirent un produit ou un service public qui ne leur est pas proposé par une collectivité locale (« vote avec les pieds »).
Adam Smith, Enquête sur la nature et les causes de la richesse des nations, 1776 (I)
I. Notion d’avantage absolu :
Productivité d’une personne, d’une entreprise ou d’une nation qui a besoin d’une plus petite quantité de facteurs de production pour produire un bien qu’une autre.
II. Ici, appliquée à l’échelle d’un pays.
Adam Smith, Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, 1776 (II)
Une manufacture pauvre, employant une dizaine d’ouvriers, spécialisés dans chacune des dix-huit opérations nécessaires à la fabrication d’une épingle, peut conduire à la production de quarante-huit mille épingles par jour, tandis que si chaque ouvrier accomplissait lui-même toute la fabrication de l’épingle, il n’en produirait au mieux qu’une vingtaine par jour.
Coase, 1960, “The problem of social cost”
I. L’auteur y affirme que le problème des externalités peut être résolu par des transactions directes entre les parties concernées, sans intervention directe de l’État. Ce dernier doit seulement attribuer des droits de propriété clairement délimités.
II. La solution est critiquable :
1° Les quelques exemples chiffrés par l’auteur sont fondés sur des données imaginaires ;
2° L’acheteur ou le vendeur peut se comporter en monopole ou en monopsone et entraîner des situations de blocage ;
3° Les biens concernés sont souvent des biens collectifs, ce qui peut entraîner des comportements de passager clandestin.
Edward Chamberlin, 1933, Théorie de la concurrence monopolistique
I. Description du comportement individuel d’entreprises concurrentes quand des éléments de différenciation existent, et la façon selon laquelle un équilibre de marché s’établit entre elles.
II. A. Un de leurs outils est la différenciation des produits :
1° La possibilité ouverte aux vendeurs de différencier leur produit confère à ces derniers un pouvoir de marché en raison du caractère spécifique de leur produit par rapport à ceux vendus par les concurrents ;
2° Chamberlin n’exclut cependant pas l’idée que la présence de produits substituts peut affaiblir ce pouvoir et le fragiliser.
B. Il conclut que les marques sont mauvaises pour l’économie et que les gouvernements devraient refuser de les protéger.
III. ⚠️ L’approche de Chamberlin est diamétralement opposée à celle adoptée par Hotelling (1929) :
1° Chamberlin suppose que l’entrée d’une nouvelle firme affecte la demande qui s’adresse à toutes les firmes existantes de façon symétrique ;
2° Pour Hotelling, l’entrée n’affecte que la demande des produits voisins dans l’espace des caractéristiques.
Baumol, Panzar et Willig, 1982
I. Théorie des marchés contestables :
Les marchés sur lesquels sont garantis des prix concurrentiels, même s’ils sont dominés par un seul ou un petit nombre d’acteurs, en raison de leur accessibilité à de nouveaux entrants.
II. Dans ce cadre, les conditions d’un marché concurrentiel sont :
1° la libre entrée (pas de barrières) ;
2° et la libre sortie (pas de coûts irréversibles autres que ceux de la dépréciation du capital).
John Rawls, 1971, Une théorie de la justice
I. Métaphore du voile d’ignorance :
1° Pour penser un problème, on occupe une position originelle faisant abstraction de ses préférences ;
2° Ici, on ignore la place qu’on occupera dans la société avant d’en déterminer les règles d’équité.
II. A. Les politiques publiques doivent augmenter le bien-être de la personne la plus défavorisée de la société, plutôt que de maximiser la somme des utilités de tous les individus (critère du maximin).
B. En d’autres termes, parmi toutes les politiques de redistribution envisageables, on retient celle où la situation des plus défavorisés est la moins mauvaise.
Jean-Charles, chevalier de Borda, mathématicien du XVIIIe (Méthode de Borda), 1781
I. Proposition d’une méthode pour procéder à des votes portant sur plus de deux possibilités : les votants classent chacun des choix, ce qui permet de leur attribuer des points.
II. Il s’agit d’une formalisation, la méthode étant utilisée par le Sénat romain jusqu’à l’an 105.
Robert Fogel, 2004
(historien, prix Nobel d’économie avec Douglas North en 1993)
I. En Grande-Bretagne, en 1780 : la malnutrition touche une personne sur cinq, la rendant inapte au travail.
II. A. De 1775 à 1975 : la ration calorique moyenne augmente de 26 %, tandis que la taille moyenne des hommes augmente de 10 centimètres.
II. B. L’amélioration de l’alimentation compte pour 30 % dans la croissance du revenu par tête en Grande-Bretagne sur la même période.
Keynes, Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie, 1936
Description du fonctionnement des marchés :
1° Image des « esprits animaux » : face à l’incertitude sur le long terme, il résulte de nos « esprits animaux » un besoin spontané d’agir ;
2° Image des « concours de beauté » : les marchés sont similaires aux paris sur les concours de beauté, dans lesquels on trouve trois degrés de pronostics. Au premier degré, on parie sur celle qu’on pense la plus belle. Au deuxième degré, on parie sur celle que la majorité de ceux qui parieront vont trouver la plus belle. Au troisième degré, on parie sur ce qu’on pense que les autres vont anticiper des votes de chacun.
1° :
2° David Hume (XVIIIe) ;
3° Irving Fisher (1911) ;
4° Milton Friedman.
Auteurs de la théorie quantitative de la monnaie :
2° Il a introduit la dichotomie classique entre les variables nominales (unités monétaires) et les variables réelles (unités physiques) ;
3° Il a formalisé la théorie quantitative de la monnaie ;
4° 1912-2006, Prix Nobel en 1976.
Irving Fisher (Effet), 1930, The Theory of Interest
Sachant que :
taux d’intérêt nominal = taux d’intérêt réel + taux d’inflation
→ Lorsque la banque centrale augmente dans le long terme le taux de croissance de l’offre de monnaie, le taux d’inflation et le taux d’intérêt nominal sont plus élevés ;
→ le taux d’intérêt nominal s’ajuste à l’inflation anticipée.
Alan Greenspan, 1996
I. Dénonciation de l’« exubérance irrationnelle » des marchés : mise en garde contre une probable surévaluation du marché des actions, quelques années avant l’explosion de la bulle internet.
II. L’expression n’était sans doute pas spécialement recherchée par son auteur, mais elle connaîtra un certain succès. Elle sera reprise par Shiller (Irrational Exuberance, 2000)
Le paradoxe de Condorcet
Lorsqu’un vote est organisé et qu’il y a plus de deux choix possibles, si l’on essaie de recourir à des votes successifs pour départager les choix deux par deux, ces votes peuvent présenter une transitivité :
- A l’emporte sur B, B sur C, C sur A ;
- selon l’ordre de présentation, le résultat peut être circulaire : A l’emporte sur B, puis C l’emporte sur A ; tandis que B l’aurait emporté sur C, et A l’aurait emporté ensuite sur B.
→ l’ordre du vote détermine le résultat final.
Le paradoxe de Condorcet est le suivant : le choix entre A et C ne serait pas le même selon que B est présent ou non.
(Condorcet, 1785)
Théorie de la préférence pour la liquidité
I. Keynes, 1936, Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie.
II. La liquidité d’un actif est la facilité avec laquelle cet actif est converti en moyen d’échange. La monnaie étant l’actif le plus liquide, les facteurs qui déterminent la demande de monnaie sont :
- Le niveau de revenu : la demande de monnaie de précaution est proportionnelle au revenu ;
- Le niveau des taux d’intérêt : la demande de monnaie diminue avec la hausse des taux d’intérêt.
→ il existe donc une demande spécifique de monnaie : le taux d’intérêt s’ajuste afin d’équilibrer l’offre et la demande de monnaie.
III. ⚠️ Il s’agit d’une théorie alternative à la théorie des fonds prêtables, selon laquelle le taux d’intérêt résulte de l’ajustement de la demande et de l’offre de prêts.
IV. Aujourd’hui, l’offre de la monnaie est contrôlée en Europe par la BCE (instruments principaux : open-market, « refi » - taux de refinancement -, « RO » - refinancing operations).
Thomas Malthus, Essai sur le principe de population, 1798
Critique de la croissance démographique :
1° progression géométrique de la population c/ progression arithmétique des moyens de subsistance ;
2° parabole du banquet.
FMI, Mirestean et Tsangarides, 2009
I. Les déterminants les plus importants de la croissance sont :
1° Le revenu initial ;
2° L’investissement ;
3° La croissance démographique ;
4° L’espérance de vie.
II. Les déterminants suivants semblent également importants :
1° Le niveau d’inflation ;
2° Le niveau d’endettement ;
3° L’ouverture économique.
Garrett Hardin, La tragédie des Communs, 1968
Les biens communs revêtent des caractéristiques qui rendent difficile de les protéger :
1° Il est coûteux d’attribuer des droits de propriété : par exemple, des droits sur l’océan ;
2° Ils sont rivaux : les poissons pêchés en mer diminuent le stock disponible pour les autres pêcheurs, voire les stocks futurs.
John Bates Clark, 1899
Théorie néoclassique de la répartition :
« en concurrence parfaite, les facteurs de production sont rémunérés à leur productivité marginale »
Kahneman et Tversky, 1973, 1974
Série d’articles dans la lignée d’Herbert Simon.
I. L’heuristique d’ancrage :
La tendance des individus à se référer à des situations connues ou familières ou à prendre des décisions basées sur cet ancrage, ces référentiels pouvant être biaisés.
II. L’heuristique de disponibilité :
Les situations dans lesquelles les décisions sont basées sur des informations immédiatement disponibles, sans recherche de nouvelle information concernant une situation. Par exemple, une couverture médiatique importante.
III. L’heuristique de *représentativité* :
Les individus formulent des jugements sur la base d’informations stéréotypées. Les tatouages ou piercings peuvent par exemple conduire à juger négativement une personne.
John Harsanyi, 1961
Jeu de l’ultimatum
I. A. Une première personne (joueur A) se voit attribuer une certaine somme d’argent (par exemple 100 euros), et doit décider quelle part elle garde pour elle et quelle part elle attribue à une seconde personne (joueur B).
B. La seconde personne doit alors décider si elle accepte ou refuse l’offre. Si elle la refuse, aucun des deux individus ne reçoit d’argent.
II. A. Le modèle standard de l’Homo œconomicus postule que les individus poursuivent leur intérêt matériel individuel et agissent de manière rationnelle pour atteindre leurs objectifs.
B. Dans un tel cas de figure, le joueur B devrait accepter toute offre supérieure à zéro de la part du joueur A, et le joueur A, anticipant la réponse du joueur B, devrait faire la plus petite offre positive possible, par exemple 1 euro.
III. En pratique, si l’offre du joueur A est trop basse, le joueur B refuse la majorité du temps.
Michael Kremer, 1993, Population Growth and Technological Change
Théorie du Mozart
I. Plus une population est forte, plus la probabilité qu’il y ait un Mozart dans cette population, c’est-à-dire un génie ou un entrepreneur schumpétérien, augmente (Phelps, 1968*).
Par conséquent, plus les potentiels de croissance et de développement seront forts.
II. L’innovation peut donc résulter de la croissance démographique.
“One can hardly imagine, I think, how poor we would be today were it not for the rapid population growth of the past to which we owe the enormous number of technological advances enjoyed today. . . . If I could re-do the history of the world, halving population size each year from the beginning of time on some random basis, I would not do it for fear of losing Mozart in the process.”
Tatsiramos, 2006, “Unemployment Duration and Subsequent Employment Stability”
I. A. Une assurance chômage généreuse et plus longue est plus susceptible de favoriser une période de travail plus longue, y compris si son effet direct est d’accroître la durée au chômage.
B. Cette étude valide empiriquement la thèse selon laquelle une plus grande durée au chômage permet un appariement de meilleure qualité sur le marché du travail.
II. Alors que la plupart des études sur le rapport entre assurance chômage et emploi se concentrent sur ses effets directs, cette étude empirique étudiant un panel de ménages dans huit pays de l’Union européenne se concentre sur l’un de ses effets indirects, la durée d’emploi après une période de chômage, en raison d’un meilleur appariement. La période minimale envisagée est de six mois.
Kydland et Prescott, 1982 (conclusions)
1° Les heures travaillées agrégées(une mesure du facteur travail) sont corrélées avec les variations de laproduction nationale ;
2° Si à une date donnée, le stock de capital est indépendant du PNB réel, ces deux variables redeviennent corrélées si l’on inclut un retard d’une année ;
3° Des trois facteurs affectant la demande agrégée : la consommation et l’investissement sont procycliques, tandis que les dépenses publiques ne semblent pas corrélées avec la croissance ;
4° Les importations et les exportations sont procycliques, avec un retard de six mois ;
5° Le travail et le revenu du capital sont fortement procycliques ;
6° M1 ne détermine pas le cycle économique (rien ne prouve qu’une augmentation de M1 dope la croissance) ;
7° Le crédit pourrait occuper un rôle important dans l’analyse du cycle économique ;
8° Le niveau des prix est contracyclique.
Taylor, 1993
Règle de Taylor
I. La fixation des taux d’intérêt pour les banques centrales en période ordinaire doit être fixée selon la règle suivante :
i = r + π + 0,5(π – π̇) + 0,5 (p – ṗ)
où i désigne le taux d’intérêt de la banque centrale, r le taux d’intérêt réel neutre, π le taux d’inflation, π̇ le taux d’inflation cible, p le niveau de production effectif réel et ṗ le niveau de production potentiel.
II. A. Elle a été formulée dans le but d’étudier « le rôle des règles de politique monétaire dans un monde où les formulations simples et algébriques de telles règles ne peuvent pas et ne devraient pas être appliquées mécaniquement par les décideurs ». En effet, cette règle ne doit pas être appliquée mécaniquement : toute décision d’une banque centrale doit toujours être explicitée et justifiée.
B. Elle doit être mise entre parenthèse en période de crise financière, afin de mettre en œuvre des approches plus pragmatiques.
Taylor (1993) aménagé par Goldman Sachs (1996)
I. Popularisation de la règle de Taylor.
II. La fixation des taux d’intérêt pour les banques centrales en période ordinaire doit être fixée de la manière suivante :
rnominal = rneutre réel + panticipée + 0,5y + 0,5 (p – pcible)
où r désigne le taux d’intérêt de la banque centrale, p le taux d’inflation des quatre derniers trimestres et y l’écart entre le PIB effectif réel et le PIB tendanciel.
Arthur Okun, 1962
Loi d’Okun
Mise en évidence d’une relation linéaire empirique entre le taux de croissance (du PIB) et la variation du taux de chômage :
1° en dessous d’un certain seuil de croissance, le chômage augmente ;
2° au-dessus de ce seuil, il diminue, à élasticité constante.
Okun, 1968
L’indice de misère d’Okun
I. A. Il est égal à la somme du taux d’inflation et du taux de chômage.
B. Plus l’indice est élevé, plus la misère ressentie par les citoyens moyens est grande.
II. A. Il s’est élargi ces derniers temps pour inclure d’autres indicateurs économiques, tels que les taux des prêts bancaires.
B. Ces derniers temps, les variations de l’indice de misère d’origine sont devenues populaires comme moyen d’évaluer la santé globale de l’économie mondiale.
Modigliani et Papademos, 1975
James Tobin
Concept de Nairu (Non accelerating inflation rate of unemployment)
I. Il s’agit du « taux de chômage d’équilibre vers lequel le chômage converge, en l’absence de chocs d’offre temporaires, une fois que le processus d’ajustement dynamique de l’inflation est achevé » (OCDE).
II. Il permet deux mesurer deux éléments :
1° Le chômage structurel, qui est à peu près égal au NAIRU ;
2° L’écart entre le taux de chômage effectif et le NAIRU, qui donne une indication sur les futures évolutions du taux de chômage.
Courbe de Laffer, 1974 (d’après la « légende »)
I. A. Courbe en cloche montrant que les recettes fiscales sont fonction du taux d’imposition :
1° Elles augmentent en fonction de l’effet « revenu » (les agents travaillent plus et produisent plus pour compenser l’impôt) ;
2° Puis elles déclinent en raison d’un effet de substitution (du loisir au travail).
B. 📚 Idée que « trop d’impôt tue l’impôt » déjà exprimée par A. Smith (1776) ou par J.-B. Say (1821).
II. Reagan diminua le taux de l’impôt sur le revenu des personnes physiques de 9 % de 1980 à 1984. Alors que dans le même temps, ces revenus augmentaient de 4 %, la recette totale de cet impôt diminua.

Michael Spence, 1973
I. Sur le marché du travail, les employeurs peuvent avoir du mal à voir quels sont les meilleurs candidats à l’embauche.
II. Les meilleurs travailleurs peuvent signaler leurs talents aux entreprises en obtenant des diplômes universitaires. Le diplôme n’a pas de valeur intrinsèque.
III. Toutefois, cela ne fonctionne que si le signal est crédible : si les travailleurs à faible productivité obtiennent facilement un diplôme, alors ils peuvent se prétendre efficaces.
“Job Market Signalling”
FMI, Lledo et al., 2017
I. A. À la fin des années 1980, seuls six pays disposaient de règles budgétaires : États-Unis, Allemagne, Japon, Singapour, Indonésie, Malaisie.
B. Ils étaient 93 en 2017.
II. On dénombrait 39 pays dotés de comités budgétaires indépendants en 2016.
Nordhaus, 1975
Cycle politique des investissements pré-électoraux (“Political business cycle”).
Tiebout, 1956, “A pure theory of local expenditures”
Les citoyens peuvent déménager lorsqu’ils désirent un produit ou un service public qui ne leur est pas proposé par une collectivité locale (« vote avec les pieds »).
Calmfors et Wren-Lewis, 2011
I. Les comités budgétaires sont complémentaires plutôt que substituables aux règles budgétaires.
II. Ils aident à évaluer le respect de règles complexes et à justifier d’éventuels écarts à la règle budgétaire.
Fall et al., 2015
Selon les études empiriques, les cadres budgétaires (règles, institutions, combinaison des deux) sont utiles.