Toxidermie médicamenteuse Flashcards
Toxidermie médicamenteuse : généralités ?
= effets cutanés des médicaments administrés par voie interne : concerne 1 à 3% des utilisateurs de nombreux
médicaments courant, 10 % des patients hospitalisés, bénin dans > 90% des cas, met rarement en jeu le pronostic vital (1 cas pour 10 000 à 100 000), obligation de signalisation à la pharmacovigilance surtout pour les formes graves
- Réaction idiosyncrasique (majorité) : imprévisible, survenant pour des doses thérapeutiques usuelles
Différents mécanismes des EI d’un médicament :
Non immunologique = effet pharmacologique ou toxique : le plus souvent prévisible, lié au mode d’action du médicament (alopécie des antimitotiques…)
Immunologiques :
- IgE médiés : hypersensibilité immédiate (urticaire, angioedème, choc anaphylactique
- Médié par les Lc : hypersensibilité retardée, plusieurs jours après la prise, sévérité variable
=> Tout médicament peut être impliqué
Toxidermie bénigne : toxidermie érythémateuse ?
= 40-60% des cas = exanthème maculo-papuleux
- Début 4 à 14 jours après début du traitement (« érythème du 9e jour »)
- Atteinte initiale du tronc ou de la racine des membres, extension possible pendant quelques jours
Polymorphisme (évocateur) :
- Macules isolées (morbilliformes)
- Nappes scarlatiniformes
- Papules ou plaques oedémateuses, parfois à disposition arciforme
- Purpura pétéchial des jambes (en cas d’érythème intense)
- Prurit fréquent, parfois sévère
- Fièvre modérée ou absente
- Absence d’énanthème (avec possible chéilite : lésion érythémateuses, parfois squameuses ou fissurées, pouvant toucher le versant semi-muqueux des lèvres)
- Durée ≈ 1 semaine à 10 jours après arrêt du médicament, avec parfois fine desquamation
- Bio : possible hyperéosinophilie, souvent modérée (<1G/L), vérifier absence d’atteinte rénale et
hépatique (signe de toxidermie grave) - Biopsie cutanée : nécrose kératinocytaire, non spécifique, infiltrat inflammatoire +/- PNE
Toxidermie érythémateuse : diagnostic différentiel ?
- Eruption d’origine infectieuse (virale ou bactérienne toxinique) : contage, syndrome
infectieux, énanthème, monomorphisme de l’exanthème
=> Majoritaire chez l’enfant (70-80% des exanthèmes), minoritaire chez l’adulte - Toxidermie grave débutante : diffusion de l’érythème, infiltration des lésions (en particulier œdème du visage), fièvre élevée, polyadénopathie, douleurs cutanées ou muqueuses intenses, érosions muqueuses, signe de Nikolsky, purpura ou nécrose
Toxidermie bénigne : urticaire ?
= 20-30% des cas
Urticaire immédiat
= Réaction immuno-allergique IgE-dépendante (après sensibilisation préalable)
- Papules mobiles et fugaces, quelques minutes/heures après administration
=> Contre-indication à l’emploi ultérieur sans précaution (risque d’anaphylaxie)
Urticaire pharmacologique
= Lié aux propriétés de médicaments activant les médiateurs de l’inflammation : AINS, pénicilline, codéine…
- Réaction inconstante, pouvant débuter plusieurs jours après la 1ère prise et plusieurs heures après la dernière prise
Urticaire du 7ème jour
- Papules fixes, débutant quelques jours après le début du traitement
- En cas d’arthralgies associées : évoquer une maladie sérique (réaction à l’injection de protéines étrangères de sérums ou vaccins) ou une pseudo-maladie sérique
(généralement après administration d’antibiotiques)
Toxidermie bénigne : photosensibilité ?
= Survenue dans les heures suivant une exposition solaire, sur les zones photo-exposées
=> L’absence d’antécédent de réaction de photosensibilité est évocatrice d’une cause exogène
(médicamenteuse ou de contact)
Photo-allergie
- Lésions d’eczéma débutant en zone exposée, pouvant s’étendre en zones couvertes
- Parfois déclenchées par des expositions solaires minimes
- Exceptionnellement persistante malgré l’arrêt du médicament inducteur
- Délai : 7 à 21J après début du traitement, systémique ou topique
Photo-toxicité
= Selon les doses de médicament et les doses d’UVA
- Erythème actinique intense (« coup de soleil ») malgré une exposition limitée
- Bulles tendues des mains ou des jambes : pseudo-porphyrie
- Onycholyse : décollement distal douloureux de la tablette des ongles
- Réaction dans les heures qui suivent l’exposition et dès les premières prises médicamenteuses
Toxidermie de photosensibilité : diagnostic différentiel ?
- Photosensibilité endogène : métabolique (porphyrie), lupus érythémateux, idiopathique (« allergie solaire » ou lucite)
- Photosensibilité de contact : plantes, parfums, topiques médicamenteux
Toxidermie bénigne : érythème pigmenté fixe ?
- Début dans les heures (< 48h) suivant la prise du médicament, souvent au paracétamol ou AINS
- Plaques érythémateuses arrondies, 1 à 10, de quelques centimètres de diamètre, souvent
douloureuses et infiltrées, parfois recouverte d’une bulle - Localisation préférentielle : organes génitaux, lèvres, rarement multifocale
- Disparition en quelques jours, laissant des taches pigmentées, brunes ou ardoisées
- Récidive aux mêmes sites (évocatrice) en cas de réintroduction du médicament inducteur
=> Pathognomonique d’une toxidermie : seule dermatose de cause quasi exclusivement
médicamenteuse
Toxidermie grave : oedème de Quincke et anapylaxie ?
Histamino-libération
- Réaction anaphylactique IgE-dépendante : spécifique, risque élevé de récidive au même médicament ou à des médicaments de formule proche
- Réaction anaphylactoïde, indépendante des IgE, par activation pharmacologique des médiateurs de l’inflammation : risque de récidive avec l’ensemble des produits de même effet pharmacologique, même de formule chimique différente (produit de contraste iodé hyperosmolaire…)
Autres médiateurs
- Angioedème aux IEC ou aux gliptine : accumulation de bradykinine (<5% des angiœdèmes). Œdème persistant souvent plus de 24h +/- signes digestifs, corticoïdes et antihistaminiques inefficaces.
- Angioedème aux AINS : accumulation de leucotriène
Toxidermie grave : toxidermie pustuleuse ?
= Pustulose exanthématique aiguë généralisée (PEAG)
- Début généralement 1 à 4 jours après administration du médicament, souvent un antibiotique
- Erythème en nappe, scarlatiniforme, prédominant dans les grands plis (aisselles, aines…)
- Se recouvrant en quelques heures de pustules amicrobiennes superficielles de petite taille (< 2
mm), à contenu lactescent, pouvant confluer en entraînant un détachement partiel de la partie
superficielle (sous-cornée) de l’épiderme
- Atteinte muqueuse inconstante
- Fièvre, AEG souvent associé
- Hyperleucocytose à PNN, parfois considérable
- Biopsie cutanée : accumulation de PNN dans la partie superficielle de l’épiderme, réalisant des
pustules sous-cornées
- Evolution : régression rapide après l’arrêt du traitement, disparition des pustules en quelques
jours avec desquamation diffuse
Diagnostic différentiel
- Psoriasis pustuleux : début moins brutal, évolution plus prolongée, ATCD de psoriasis,
aspect histologique ne permet souvent pas de trancher
Toxidermie grave : syndrome DRESS ?
= Drug Reaction with Eosinophilia and Systemic Symptoms : risque accru chez le sujet noir
- Début tardif, 2 à 8 semaines après début de traitement
- Eruption grave et étendue, parfois érythrodermique, infiltrée (œdème du visage et des extrémités)
- Signes associés : prurit sévère, ADP diffuses, fièvre élevée
- Atteintes viscérales (parfois grave) : hépatite et néphropathie interstitielle +++, pneumopathie
interstitielle, myocardite, syndrome d’activation macrophagique…
- Hyperéosinophilie : généralement > 1,5 G/L, parfois retardée, souvent associé à une lymphocytose avec syndrome mononucléosique
- Réactivation de virus du groupe herpès (HHV6 +++, HHV7, EBV, CMV)
- Régression lente sur plusieurs semaines, plusieurs poussées possibles dans les semaines à mois qui
suivent, souvent associées à des réactivations virales
Diagnostic différentiel :
Autres causes d’érythrodermie : psoriasis, dermite de contact, lymphomes T épidermotropes (mycosis fongoïde et syndrome de Sézary), syndromes hyperéosinophiliques primitifs ou secondaires, souvent moins aigus
Toxidermie grave : généralités sur la nécrolyse épidermique toxique (NET) ?
= Selon la surface d’épiderme nécrosé (décollé ou décollable) : syndrome de Lyell > 30% ou
syndrome de Stevens-Johnson < 10%
- 10 médicaments en cause dans 50% des cas : allopurinol, adiazine, carbamazépine, lamotrigine,
névirapine, AINS (oxicam), phénobarbital, phénytoïne, salazopyrine, sulfaméthoxazole
=> Forme la plus grave de toxidermie : risque élevé de mortalité = 20-25%
Toxidermie grave : clinique de la NET ?
- Début peu spécifique, 7 à 21 jours après début du traitement, par des manifestations cutanéo-muqueuses : fièvre, brûlures oculaires, pharyngite, éruption érythémateuse douloureuse et non prurigineuse
- Evolution rapide en quelques heures/jours vers la phase d’état : érosions muqueuses multifocales et bulles cutanées
- Signe de Nikolsky positif : détachement de lambeaux d’épiderme à la moindre pression
- Syndrome de Stevens-Johnson : bulles et vésicules disséminées, restant distinctes et de petites tailles, zones limitées de décollement par confluence
- Syndrome de Lyell-NET : vastes lambeaux d’épiderme décollés, mettant à nu le derme suintant rouge vif, ou décollable, restant en place avec un aspect de « linge fripé »
- Fièvre constante, état général profondément altéré
- Atteinte viscérale possible : nécrose de l’épithélium bronchique (polypnée avec hypoxémie), de pronostic très défavorable
- Ré-épidermisation en 10 à 30 jours, avec séquelles fréquentes (troubles de pigmentation et cicatrices muqueuses, en particulier oculaires (synéchies))
Toxidermie grave : examens complémentaires de la NET ?
- Leucopénie, augmentation de multiples enzymes
- Troubles hydro-électrolytiques par déperdition cutanée
- Biopsie cutanée : épiderme nécrosé sur toute son épaisseur, se détachant d’un derme peu
modifié (discret infiltrat lymphocytaire), immunofluorescence directe négative
=> Score pronostic Scorten : âge > 40 ans, antécédent de cancer/hémopathie, détachement cutané > 10%, pouls > 120, bicarbonate < 20, urée > 10, glycémie > 14
NET : diagnostic différentiel ?
Erythème polymorphe majeur
= Rare, prédominant chez l’enfant et l’adulte jeune
- Lésions éruptives en « cocardes » ou en « cibles », parfois avec centre bulleux, distribution acrale (coudes, genoux, mains, pieds, visage) souvent symétrique, souvent monomorphes
- Lésions érosives muqueuses fréquentes (définissant l’érythème polymorphe majeur, absence dans l’érythème polymorphe mineur)
- Récidive fréquente
- Lié à une récurrence d’herpès (dans 50-60%, labial surtout, génital), ou plus rarement à une autre cause infectieuse (pneumopathie à Mycoplasma pneumoniae…)
- Epidermolyse staphylococcique : chez le nourrisson, absence d’érosion muqueuse, décollement superficiel, souvent péri-orificiel et des grands plis décollement sous-cornée à l’histologie, bon pronostic sous antibios
- Dermatose bulleuse auto-immune : sans nécrose épidermique, dépôts d’Ac en IFD
- Brûlures : sans lésion muqueuse, nécrose cutanée de profondeur variable
Toxidermie médicamenteuse : imputabilité intrinsèque ?
Délais évocateurs
- Urticaire : quelques minutes/heures
- Photosensibilité : tous délai, quelques heures/jours après exposition solaire
- Anaphylaxie : quelques minutes
- Eruption pustuleuse : 1 à 4 jours
- Toxidermie érythémateuse : 4 à 14 jours
- Syndrome de Stevens-Johnson ou de Lyell-NET : 7 à 21 jours
- DRESS : 2 à 6 semaines
Evolution
- Amélioration après arrêt du médicament
- Aggravation après la poursuite du médicament
Réintroduction
- Antécédent d’effet analogue après une prise antérieure
- Reproduction de la toxidermie après réintroduction volontaire du médicament suspect (à éviter) ou après réintroduction accidentelle
Sémiologie
- Clinique caractéristique d’un accident médicament : ++ en cas d’érythème pigmenté fixe, acceptable en cas de syndrome de Stevens-Johnson, syndrome
de Lyell-NET ou PEAG
Facteurs favorisants
- Eruption érythémateuse à l’aminopénicilline lors d’une mononucléose infectieuse, mais pas de risque à la réintroduction une fois la MNI guérie
- Infection VIH : augmente le risque de toxidermie bénigne ou grave
- Syndrome DRESS associé à une réactivation d’herpesvirus (HHV6, HHV7,CMV, EBV)
- Immunosuppression
=> L’atopie n’est pas un facteur de risque de toxidermie
Elimination d’autres causes
- Recherche des causes nécessitant un traitement spécifique
- Investigations exhaustives en cas de médicament suspect indispensable
Tests = Rarement validés :
- Prick-test et hypersensibilité immédiate à la pénicilline ou aux curarisants
Toxidermie médicamenteuse : CAT ?
- Toute réaction grave ou inattendue doit être notifiée aux instances de pharmacovigilance
- En cas de réaction bénigne : l’utilisation du médicament suspect peut être poursuivie sous surveillance si le bénéfice attendu du traitement le justifie
- En cas de réaction grave : l’utilisation ultérieure du médicament suspect est contre-indiqué (avec remise d’un document écrit au malade ou note sur le carnet de santé)