LL16 JL Lagarce, Juste la fin du monde, Partie 1, scène 3 (Monologue de Suzanne?) Flashcards
Mouvement 1
Les mots elliptiques, lignes 33-39
L33-34 : “Parfois‚ tu nous envoyais des lettres‚
parfois tu nous envoies des lettres”
CC de temps « Parfois »-> liens distendus que Louis entretient avec sa famille.
Polyptote : « envoyais»/ « envoies » : actualise le propos de Suzanne : la dénonciation n’en est que plus vive.
L37-38 : “rien‚ comment est-ce qu’on dit ?
elliptiques.”
Le pronom « rien » et l’adjectif « elliptiques » sont mis en valeur par leur place en début de ligne.
L33-39 : “Parfois‚ tu nous envoyais des lettres‚
parfois tu nous envoies des lettres‚
ce ne sont pas des lettres‚ qu’est-ce que c’est ?
de petits mots‚ juste des petits mots‚ une ou deux phrases‚
rien‚ comment est-ce qu’on dit ?
elliptiques.
« Parfois‚ tu nous envoyais des lettres elliptiques. »
La figure de l’épanorthose traverse à nouveau le discours de la sœur : rectifie la nature du lien de communication : « des lettres », des petits mots », « juste des petits mots » , « une ou deux phrases /rien, comment est-ce qu’on dit ? /elliptiques. » -> Gradation descendante.
Le seul lien de communication devient de plus en plus ténu et suggère la difficulté de dire -> Le reproche est perceptible.
Mouvement 2
Louis et l’écriture, lignes 39-54
L40-43 : “Je pensais‚ lorsque tu es parti
(ce que j’ai pensé lorsque tu es parti)‚
lorsque j’étais enfant et lorsque tu nous as faussé compagnie
(là que ça commence)”
Anaphore (« Je pensais » -> jusqu’à la ligne 46) -> Etat d’esprit de Suzanne au moment du départ de son frère : retour en arrière.
Répétition de la subordonnée circonstancielle de temps : « lorsque tu es parti » / « lorsque tu nous as faussé compagnie » -> origine de la crise familiale au départ de Louis.
L39-46 : “« Parfois‚ tu nous envoyais des lettres elliptiques. »
Je pensais‚ lorsque tu es parti
(ce que j’ai pensé lorsque tu es parti)‚
lorsque j’étais enfant et lorsque tu nous as faussé compagnie
(là que ça commence)‚
je pensais que ton métier‚ ce que tu faisais ou allais faire dans la vie‚
ce que tu souhaitais faire dans la vie‚
je pensais que ton métier était d’écrire (serait d’écrire)”
Accumulation de quatre circonstancielles de temps qui crée un effet de retardement, de suspension du sens : protase -> révélation à la ligne 46 -> Cette phrase sonne aussi comme un reproche car elle est paradoxale avec les phrases « elliptiques » mentionnées plus haut.
L43 : “(là que ça commence)”
Jugement critique et reproches perceptibles dans le langage familier -> elle éprouve aussi des difficultés à dire ce qui serait un tabou familial autour du départ de l’aîné -> phrase très énigmatique que recouvre le pronom « ça » qui serait à l’origine du drame familial.
L46 : “je pensais que ton métier était d’écrire (serait d’écrire)”
Le conditionnel « serait d’écrire » : met en doute le désir d’écrire de Louis
L47-54 : “ou que‚ de toute façon
– et nous éprouvons les uns et les autres‚ ici‚ tu le sais‚ tu ne peux pas ne pas le savoir‚ une certaine
forme d’admiration‚ c’est le terme exact‚ une certaine forme de l’admiration pour toi à cause de ça –‚
ou que‚ de toute façon‚
si tu en avais la nécessité‚
si tu en éprouvais la nécessité‚
si tu en avais‚ soudain‚ l’obligation ou le désir‚ tu saurais écrire‚
te servir de ça pour te sortir d’un mauvais pas ou avancer plus encore.”
Suzanne = porte parole de la famille -> utilise le « nous » et emploie un mot qui n’a jamais été proféré par les autres : « l’admiration » pour Louis et ses talents d’écrivain.
Ce sentiment n’a jamais été avoué à Louis -> Difficulté à nommer le sentiment, « une certaine forme de… » dans les milieux populaires, surtout pour des qualités qui concernent le domaine intellectuel.
=> L’écriture, pour Suzanne, est vue comme une sorte de remède, de soin et a donc une utilité et non pas comme un choix conscient de devenir écrivain.
Mouvement 3
Une écriture pour « les autres », lignes 55-62
L55 : “Mais jamais‚ nous concernant”
Adversatif « Mais » qui introduit une opposition entre Louis, le « tu » et le « nous », la famille qui forme une entité après le départ du fils. « jamais, nous concernant »
L56 : “jamais tu ne te sers de cette possibilité‚ de ce don (on dit comme ça‚ c’est”
L60 : “jamais tu ne te sers de cette qualité que tu possèdes‚ avec nous‚ pour nous”
Phrases à la forme négative construites avec l’adverbe « jamais tu ne te sers de » : parallélismes, répétitions, et variations : les reproches s’intensifient. La famille est déconsidérée par Louis qui ne rentre pas en lien par le langage : aucune volonté de sa part de rompre la distance.
L56-58 : “jamais tu ne te sers de cette possibilité‚ de ce don (on dit comme ça‚ c’est une sorte de don‚ je crois‚ tu ris)
jamais‚ nous concernant‚ tu ne te sers de cette qualité”
Suzanne cherche ses mots pour désigner l’écriture : « possibilité », « don », « qualité » qu’elle leur préférera. .
Comme le précise la note de bas de page, l’écriture était perçue dans certains milieux, comme un « don » quasi divin, l’écrivain étant un homme dit inspiré. S reprend ainsi les formules convenues.
L56-57 : “jamais tu ne te sers de cette possibilité‚ de ce don (on dit comme ça‚ c’est une sorte de don‚ je crois‚ tu ris)”
La didascalie interne « tu ris » qui marqua la réaction de Louis suggère que ce dernier ne prend pas à son compte cette idée ( celle de la sacralisation de l’écrivain).