Chapter 6 Flashcards
La logique interne de la loi
Les lois sont des « commandements » (Portalis, Discours préliminaire du premier projet de code civil, 1801).
Elle doit être claire (clarté et intelligibilité de la loi).
Elle obéit à une logique rigoureuse privilégiant alternativement :
1. l’aspect intellectuel de la délibération ;
2. l’aspect volontaire de la décision.
Principe du contradictoire, le bicamérisme constituant un facteur d’amplification du débat, dans le cadre d’un dialogue d’abord égalitaire. Le jeu de la navette concentre les aspects litigieux. L’Assemblée nationale conclut le processus en dernier ressort.
Publicité de l’ensemble de la procédure (art. 33 C).
La notion de travaux préparatoires
I. A. Ils serviront à interpréter la loi en recherchant la volonté du législateur, quand le texte comporte des obscurités ou des ambiguïtés.
B. Sinon application de la « lettre claire » : le juge ne se soucie pas des intentions de l’auteur.
II. Il ne peut s’agir que d’éléments dont le législateur avait explicitement connaissance au moment où il a pris sa décision, éléments rappelés par les indications accompagnant la publication des lois au JO : exposé des motifs, rapports des commissions, débats en séance, décision du Conseil constitutionnel.
La structure de la procédure législative
Deux phases distinctes :
1. Une phase préparatoire : commissions ;
2. Une phase de discussion et de décision : exclusivement en séance plénière dans les assemblées françaises.
Innovations dans la procédure législative sous la Ve République
I. A. La direction effective du travail législatif attribuée au Gouvernement par la Constitution.
B. Direction gouvernementale encore consolidée par la discipline majoritaire en 1958.
II. Le développement du contrôle exercé par le Conseil constitutionnel :
1. la minorité peut le saisir depuis 1974 avant la promulgation des lois ;
2. il a intégré à l’élaboration de la loi, la préoccupation de la conformité aux dispositions de fond et de procédure de la Constitution.
Le dépôt des projets et propositions de loi
Art. 39, al. 1er C : « L’initiative des lois appartient concurremment au Premier ministre et aux membres du Parlement. »
Distinction traditionnelle des projets (gouvernement) et des propositions (membres du Parlement).
Les projets sont indifféremment déposés, par l’entremise du Secrétariat général du Gouvernement, déposés sur le bureau de l’une ou l’autre assemblée, sauf (art. 39, al. 2 C) :
- priorité de l’Assemblée nationale : projets de LF et LFSS, leur priorité interdisant toute initiative ;
- priorité du Sénat : les lois « ayant pour principal objet l’organisation des collectivités territoriales » (« sans préjudice du premier alinéa de l’article 44 C » = réserve le droit d’initiative des députés et le droit d’amendement du Gouvernement et des députés). Exemple de la loi organique du 1er août 2003 relative au référendum local déposé au Sénat, et la loi organique du même jour relative à l’expérimentation par les collectivités territoriales devant l’Assemblée.
Dans les autres cas, le choix du gouvernement dépend de considérations :
- pratiques : encombrement de l’ordre du jour ;
- politiques : attitude prévisible du Sénat à l’égard d’un projet particulier.
Les projets et propositions recevables sont imprimés et distribués (« publiés » au Sénat, ce qui inclut la diffusion sur le site internet, depuis la résolution du 2 juin 2009) et renvoyés en commission. Ils sont insérés au JO (art. 81 RAN et 24 RS).
Sort des textes non adoptés
À l’Assemblée nationale, ils deviennent caducs à la fin de la législature.
Au Sénat, assemblée permanente, les propositions sur lesquelles il n’a pas statué deviennent caduques de plein droit à l’ouverture de la troisième session ordinaire suivant celle au cours de laquelle elles ont été déposées (art. 28 RS).
Les projets bénéficient d’une immunité: Ainsi, la proposition reconnaissant le 19 mars comme journée nationale du souvenir, votée par l’Assemblée le 22 janvier 2002 et transmise au Sénat, a été adoptée par celui ci le 8 novembre 2012, selon une procédure jugée conforme par le Conseil constitutionnel (⚖️ CC, n° 2012-657 DC, Journée nationale du souvenir).
Le président du Sénat transmet à son homologue, en début de législature, les propositions de loi adoptées par le Sénat et antérieurement transmises à l’Assemblée nationale : la procédure législative peut ainsi poursuivre son cours à cheval sur des législatures différentes.
Le Gouvernement peut retirer ses projets à tout moment jusqu’à leur adoption définitive (art 84 RAN/25 RS) - ainsi, un projet de loi viant à proroger le régime transitoire institué à la sortie de l’état d’urgence sanitaire, adopté par l’Assemblée nationale et transmis au Sénat, a finalement été retiré sur décision du Premier ministre.
Au contraire, la proposition d’un député, ne peut plus être retirée après son adoption en première lecture.
Les phases de la procédure législative
I. Dépôt.
II. Examen en commission.
III. Discussion en séance :
- première partie de la discussion ;
- motions de procédure ;
- discussion des articles ;
- vote sur l’ensemble.
IV. Bicaméralisme :
- navette ;
- éventuellement procédure paritaire ;
- éventuellement dernier mot de l’assemblée nationale ;
- adoption en termes identiques.
V. Saisine éventuelle du Conseil constitutionnel.
VI. Promulgation.
La présentation des projets
La loi organique du 15 avril 2009 prise en application de l’art. 39 C comporte un chapitre II portant sur la présentation des projets de loi.
Art. 7 de la loi : « les projets de loi sont précédés de l’exposé de leurs motifs » (selon la décision ⚖️ CC, n° 2009-579 DC portant sur cette LO : cet article « consacre ainsi une tradition républicaine qui a pour objet de présenter les principales caractéristiques de ce projet et de mettre en valeur l’intérêt qui s’attache à son adoption »).
Art. 8 : innovation de l’étude d’impact : les documents en rendant compte doivent être joints aux projets lors du dépôt, définissant les objectifs poursuivis par le projet de loi, recensant les options possibles en dehors de l’intervention de règles de droit nouvelles, etc.
Art. 9 : L’assemblée sur le bureau de laquelle le projet de loi a été déposé (= seule la première assemblée saisie) dispose d’un délai de dix jours pour constater que ces règles ont été méconnues.
La conférence des présidents de l’assemblée saisie en second ne peut présenter devant le Conseil constitutionnel le grief tiré de ce que l’étude d’impact jointe au projet de loi méconnaîtrait l’art. 8 de la loi organique du 15 avril 2009 (⚖️CC, n° 2018-770 DC, Immigration maîtrisée).
La conférence des présidents de l’assemblée a été saisie le 30 septembre 2013 d’une contestation concernant le projet relatif à l’avenir et à la justice du système de retraites, mais elle n’y a pas donné suite et c’est celle du Sénat qui a inauguré le 26 juin 2014, la faculté que lui ouvrent ces dispositions ➞ ⚖️ CC, n° 2014-12 FNR, Délimitation des régions, qui s’est borné à un examen formel des exigences de l’art. 8 de la loi organique.
Pour la première fois, la Conférence des présidents de l’Assemblée nationale, saisie par le groupe LR, s’est prononcée en faveur de la méconnaissance des règles de présentation fixées par la LO de 2009, actionnant la saisine du Conseil constitutionnel (⚖️ CC, n° 2023-13 FNR, projet de loi relatif à la programmation militaire de 2024 à 2030 : conformité des conditions de présentation du projet de loi aux dispositions de la loi organique du 15 avril 2009).
Recevabilité des propositions de loi
I. Premier filtrage avant même l’annonce de leur dépôt par une délégation du Bureau de l’assemblée concernée, qui examine leur recevabilité financière : « Lorsqu’il apparaît que leur adoption aurait les conséquences prévues par l’article 40 de la Constitution, le dépôt est refusé » (art. 89, al. 1er RAN/24, al. 2 RS). À ce stade, le contrôle est peu exigeant à l’Assemblée, qui admet l’aggravation d’une charge publique compensée par un gage.
L’auteur de la proposition de loi peut demander une explication écrite de la décision d’irrecevabilité (art. 89, al. 6 RAN).
Le nombre de propositions irrecevables est réduit, d’autant que les conseils donnés par la délégation à l’auteur peuvent rendre l’initiative recevable.
II. Pas d’examen de la recevabilité au regard du domaine de la loi (art. 41 C) car seul le Gouvernement et le président de l’assemblée peuvent exercer cette prérogative, le second ne l’invoquant pas au stade du dépôt.
Avis du Conseil d’État sur les propositions de loi
La révision du 23 juillet 2008 a prévu, à l’art. 39, al 5 C, que le président d’une assemblée peut soumettre au Conseil d’État, pour avis, une proposition de loi avant son examen en commission, sauf opposition de son auteur, qui dispose de cinq jours pour l’exprimer (art. 4 bis de l’ordonnance n° 58-1100).
45 avis rendus sur des propositions de loi entre 2009 et 2022, dont la plupart sont devenues des lois.
📚 De manière exceptionnelle, la LOLF du 1er août 2001, d’initiative parlementaire, avait donné lieu à un avis du Conseil d’État, à la demande du Gouvernement, le 21 décembre 2000.
La commission saisie au fond
Selon l’art. 43 C :
«Les projets et propositions de loi sont envoyés pour examen à l’une des commissions permanentes dont le nombre est limité à huit dans chaque assemblée.
À la demande du Gouvernement ou de l’assemblée qui en est saisie, les projets ou propositions de loi sont envoyés pour examen à une commission spécialement désignée à cet effet.»
➞ Inversion en 2008 de la présentation originelle, qui prévoyait par défaut la saisine d’une commission spéciale, mais qui dont la pratique ne s’est jamais imposée. Les commissions permanentes ont défendu leurs attributions contre les velléités de concurrence de la nouvelle institution, souvent avec la compréhension du Gouvernement, dont les ministres entretiennent des rapports réguliers avec les commissions permanentes, tandis que les parlementaires d’une commission spéciale sont inconnus et parfois trop directement intéressés.
Si une commission permanente se déclare incompétente ou si un conflit de compétence s’élève entre deux ou plusieurs commissions, « le Président, après un débat où sont seuls entendus le Gouvernement ou l’auteur de la proposition et les présidents des commissions intéressées, propose par priorité à l’Assemblée la création d’une commission spéciale. Si cette proposition est rejetée, le Président soumet à l’Assemblée la question de compétence » (art. 85, al 2 RAN). Au Sénat, la création d’une commission spéciale est de droit dès la déclaration d’incompétence ou le conflit de compétence (art. 16 RS). Ce type de conflit est très rare (un exemple en 1974, au sujet d’une disposition relative à des documents d’urbanisme et disjointe, en tant que cavalier budgétaire, d’une loi de finances rectificative, et dont les présidents des commissions respectivement des lois et de la production réclamait la compétence au fond pour en connaître).
La commission saisie pour avis
I. Art. 87 RAN : toute commission peut décider de se saisir pour avis d’un projet ou d’une proposition de loi qui a été renvoyé à une autre commission permanente : elle en informe le président et sa décision est publiée au journal officiel. La commission désigne alors un rapporteur pour avis, qui a le droit de participer avec voix consultative aux travaux de la commission saisie au fond et d’y défendre les amendements de sa commission. On recense ainsi 164 saisines sous la 14e législature.
II. Même procédure prévue par l’art. 17 RS. Toutefois, si plusieurs commissions demandent à être saisies pour avis, réunion de la conférence des présidents qui peut ordonner le renvoi aux différentes commissions ou proposer la création d’une commission spéciale.
Délégation de l’examen d’articles à une commission saisie pour avis
Pratique non formalisée, «troisième voie entre commissions permanentes et spéciales» (Jean-François Kerléo, 2017) pour prendre en compte la nature transversale d’un compte :
Une commission saisie pour avis peut bénéficier d’une délégation au fond sur une partie du texte. Les décisions prises sont adoptées sans discussion par la commission saisie au fond.
Cette procédure est régulièrement utilisée : par exemple, loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie ; loi du 29 juillet 2019 relative à la reconstruction de Notre-Dame.
La liberté d’exercice de la commission
Art. 40 RAN : chaque commission est maîtresse de ses travaux, dans le respect des règles constitutionnelles, organiques et du règlement.
L’art. 86 RAN tient compte des conséquences de la révision de 2008 concernant l’ordre du jour et le texte discuté en séance, qui doit être celui de la commission : la désignation des rapporteurs et la mise à disposition du rapport doivent intervenir dans un délai permettant la discussion du texte par l’Assemblée. L’insuffisance ou l’absence du rapport ne peut empêcher l’ouverture de cette discussion - une position contraire rendrait caduc l’ordre du jour prioritaire du Gouvernement.
Le rôle du rapporteur
Le rapporteur est « le véritable pivot de la procédure législative » (Paul Cahoua, 1985) :
- il procède à l’examen du texte, avec l’assistance des fonctionnaires du secrétariat administratif de la commission ;
- il procède aux auditions ou les propose à la commission (publicité par les moyens choisis par le bureau au Sénat, 16, al. 8 RS et publication des compte-rendus à l’Assemblée nationale art. 46, al. 3 RAN ) ;
- il propose des amendements et fait connaître son point de vue sur les amendements proposés ;
- la commission se prononce sur le rapport.
À l’Assemblée nationale, en raison de son rôle central et porte-parole de la Commission, quasi monopole représentants des groupes de la majorité pour les rapports sur les textes prioritaires.
Il a été refusé en 2019, que le groupe minoritaire ou d’opposition à l’origine du texte en discussion dans le cadre d’une niche obtienne de droit la fonction de rapporteur pour l’un de ses membres ➞ il pourrait être a mené à défendre au banc des convictions contraires aux siennes, celle de la majorité de la commission.
Les participants à la commission
Art. 86 al. 5 et 6 RAN.
- les membres de la commission ;
- l’auteur d’une proposition ou d’un amendement ;
- les rapporteurs des commissions saisies pour avis ;
- tout député peut présenter un amendement en commission, qu’il soit ou non membre de celle-ci.
La participation du gouvernement de droit. Le ministre est tenu de déférer à une demande d’audition, en vertu du principe de la responsabilité du Gouvernement. Toutefois, le Conseil constitutionnel juge que des dispositions du règlement permettant à une commission permanente d’imposer à un ministre une telle audition méconnaissent le principe de la séparation des pouvoirs (⚖️ CC, n° 2019-759 DC, Modification du RAN).
Le dépôt des amendements en commission
I. À l’Assemblée nationale, le délai de dépôt des amendements en commission (art. 86 RAN) est identique à celui du dépôt des amendements en séance (art. 99 RAN) : transmis au secrétariat de la commission au plus tard à 17 heures le troisième jour ouvrable précédant l’examen du texte.
II. Au Sénat, la date limite de dépôt est l’avant-veille du début de l’examen en commission (art. 17 bis RS).
La participation du Gouvernement aux travaux en commission
L’art. 42, al. 1er C (issu de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008) selon lequel la discussion en séance porte sur le texte adopté en commission, et l’art. 44, al. 1er C, selon lequel le droit d’amendement s’exerce en commission, impliquent que le Gouvernement puisse participer aux travaux des commissions (⚖️ CC, n° 2009-579 DC, LO relative à l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution).
➞ Rupture au Sénat, où l’art. 18 RS précisait que les ministres devaient se retirer au moment du vote ; la décision ⚖️ CC, n° 2009-582 DC, Modification du RS a précisé que les membres du gouvernements avaient le droit d’assister au vote en commission. Désormais, l’art. 18 RS, devenu art. 15 bis RS, prévoit que les ministres peuvent assister à l’ensemble des votes.
📚 Les débats des commissions se déroulent le mercredi matin (art. 50 RAN), en même temps que le Conseil des ministres.
Les collaborateurs des ministres peuvent les accompagner : le président Accoyer a évoqué une séance de la commission des affaires sociales sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 où étaient présents cinq ministres et vingt-deux de leurs collaborateurs. La présence des ministres devant les commissions sénatoriales reste, quant à elle, en pratique exceptionnelle.
Le rapport déposé en commission
Les rapports concluent à l’adoption, au rejet ou à la modification du texte dont la commission a été initialement saisie, et comportent un tableau comparatif faisant état de ces éventuelles modifications et en annexent les amendements soumis à la commission (art. 86 al. 3 RAN).
Le texte est publié séparément du rapport et mis à disposition par voie électronique dans un délai qui ne peut être inférieur à dix jours avant l’examen en séance ; et «dans les meilleurs délais » en cas de procédure accélérée (art. 86 al. 3 RAN).
Au Sénat, les avis des commissions saisies pour avis sont publiés sauf si la commission décide de les donner verbalement (art. 17 RS).
À l’Assemblée nationale, ils figurent sous la forme d’annexes au rapport de la commission saisie au fond (art. 86. al. 7 RAN)
Les délais d’examen
I. Selon l’al. 3 de l’art. 42 C, ajouté en 2008 :
« La discussion en séance, en première lecture, d’un projet ou d’une proposition de loi ne peut intervenir, devant la première assemblée saisie, qu’à l’expiration d’un délai de six semaines après son dépôt. Elle ne peut intervenir, devant la seconde assemblée saisie, qu’à l’expiration d’un délai de quatre semaines à compter de sa transmission. »
L’al. 4 prévoit que ces délais ne s’appliquent pas en cas de procédure accélérée, ni aux projets relatifs aux états de crise (retranscription à l’art. 91 RAN).
II. A. ⚖️ CC, n° 2012-655 DC, Loi relative à la mobilisation du foncier public : procédure accélérée pour la loi relative à la mobilisation du foncier public, la commission des affaires économiques du Sénat a approuvé les amendements du rapporteur le mercredi matin, mais elle n’a pu présenter son propre texte, entraînant plus tard sa censure par le Conseil constitutionnel, au motif que la loi avait été adoptée selon une procédure contraire à l’art. 42 C.
B. Le 12 février 2020, la Commission spéciale sur le texte relatif aux retraites a dû prendre acte de son incapacité à adopter un texte, n’ayant pu, après 75 heures de travaux, examiner que 5 566 amendements sur un total de 22 220 déposés).
La présentation du rapport
Art. 91, al. 2 RAN : la discussion s’engage par l’audition éventuelle du gouvernement, la présentation du rapport de la commission saisie au fond et, s’il y a lieu, l’audition du rapporteur de la (ou des) commission(s) saisie(s) pour avis.
Le rapporteur, «pivot de la procédure législative», devient l’interprète des positions de la commission et intervient tout au long du débat, en contrepoint avec le ministre. Tous deux disposent de la prérogative de pouvoir prendre la parole à tout moment, mais pour une durée maximale de 2 minutes 30 pour le rapporteur.
Au Sénat, art. 42 RS : discussion ouverte par le gouvernement pour les projets et les propositions transmises par l’Assemblée et acceptées par lui. Elle est poursuivie par la présentation du rapport de la commission ; en première lecture des propositions déposées au Sénat, ouverte par leur auteur dans la limite de 10 minutes et poursuivie, le cas échéant, par la présentation du rapport de la commission.
Avant la révision de l’art. 42 C, l’art. 90 RAN interdisait qu’un texte soit mis en discussion s’il n’avait pas fait l’objet d’un rapport de la commission, ce qui ne pouvait pas faire obstacle à la priorité du gouvernement en cas d’absence ou de caractère incomplet d’un rapport. Désormais, l’art. 42 C prévoit que le texte discuté en séance est celui déposé par le Gouvernement ou transmis par l’autre assemblée à défaut d’adoption d’un texte par la commission. 📚 Selon le président Mermaz (15 décembre 1983), «si l’on pouvait opposer au Gouvernement l’absence ou le caractère incomplet d’un rapport […], on rendrait caduc le droit que le Gouvernement tient de la Constitution […] d’établir l’ordre du jour prioritaire».
Le Conseil constitutionnel a jugé que l’adoption d’une loi sans présentation du rapport au nom de la Commission n’était contraire à la Constitution (⚖️ CC, n° 84-181 DC, Entreprises de presse).
L’audition des membres du CESE
Art. 69, al. 2 C : « Un membre du Conseil économique, social et environnemental peut être désigné par celui-ci pour exposer devant les assemblées parlementaires l’avis du Conseil sur les projets ou propositions qui lui ont été soumis » par le Gouvernement.
À l’Assemblée nationale, le représentant du CESE est entendu après les rapporteurs des commissions compétentes, introduit dans l’hémicycle par le chef des huissiers. «Son exposé terminé, il est reconduit hors de l’hémicycle avec le même cérémonial.» (art. 97 RAN).
Au Sénat, il a accès dans l’hémicyle pendant toute la durée de la discussion en séance publique. Il s’exprime avant la présentation du rapport de la commission saisie au fond et la parole peut lui être donnée dans la suite du débat (art. 42 RS).
Déroulement de la discussion générale
Après la présentation du rapport, la parole est donnée aux orateurs qui se sont fait inscrire dans la discussion générale, avec une priorité pour l’auteur ou le premier signataire d’une proposition (art. 91 RAN/art. 29 ter RS).
La conférence des présidents peut décider de l’organisation de la discussion générale dans les conditions de l’art. 49 RAN/art. 29 ter RS).
Les motions de procédure
La motion de procédure a pour effet d’entraîner le rejet du texte ou la suspension du débat.
L’exception d’irrecevabilité et la question préalable peuvent interrompre la poursuite de la discussion. Elles ont été fusionnées dans le règlement de l’Assemblée nationale par la résolution du 27 mai 2009.
La motion de renvoi en commission a été supprimée par la réforme du RAN du 4 juin 2019.
Les trois motions subsistent au Sénat (art. 44 RS).
L’exception d’irrecevabilité
Elle vise à faire reconnaître que le texte proposé est contraire à une ou plusieurs dispositions constitutionnelles.
Elle ne peut être soulevée qu’une fois, après la présentation du rapport, et entraîne le rejet du texte. Interviennent dans la discussion, l’un des signataires, le gouvernement, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et, avant le vote, la parole est accordée pour cinq minutes à un orateur de chaque groupe.
Elle a donné lieu à des abus (emploi systématique et détournement de son objet), ce qui a conduit le président Fabius à réduire en 1999 le temps de parole du signataire, initialement illimité, à 1h30, sauf décision contraire de la conférence des présidents. Pour les textes inscrits à la niche de l’art. 48 RAN, le temps de parole du signataire est de 15 minutes.
Rituellement soulevée par l’opposition (35 fois en 2007-2008), mais quasiment jamais adoptée (exception, par exemple le 9 octobre 1998, contre la proposition relative au pacte civil de solidarité, en raison de l’absentéisme de la majorité ; un nouveau texte a été déposé).
L’art. 44, al. 2 RS précise que l’exception vise un texte contraire à « une disposition constitutionnelle, légale ou réglementaire » (sauf irrecevabilités des art. 40 et 41 C qui font déjà l’objet de procédures spécifiques). Elle peut être soulevée pendant la discussion et à l’encontre d’une disposition. Depuis la résolution du 18 juin 2019, l’exception d’irrecevabilité ne peut-être opposée à un texte qu’une fois par lecture, sauf adoption d’une motion de renvoi en commission. Il y est fréquemment recouru, car elle est une occasion pour l’opposition d’obtenir un temps de parole supplémentaire.
La question préalable
Objet d’opportunité : son objet est de « faire décider qu’il n’y a pas lieu à délibérer » (art. 91, al. 5 RAN).
Pas de question préalable à l’encontre des textes inscrits à la niche de l’art. 48, al. 5 C.
Selon le Conseil constitutionnel, le rejet du texte par la question préalable « n’interrompt pas les procédures prévues pour parvenir à l’adoption d’un texte définitif » (⚖️ CC, n° 2008-564 DC, Loi relative aux OGM).
La résolution du 27 mai 2009 a procédé à la fusion entre la question préalable et l’exception d’irrecevabilité pour instituer la motion de rejet préalable (art. 91, al. 5 RAN).
Au Sénat, L’art. 44 RS précise que l’objet de la question préalable est de faire décider soit que le Sénat s’oppose à l’ensemble du texte, soit qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération. Elle peut donc être employée pour marquer l’opposition de l’assemblée à un texte, ce qui prive toutefois celle-ci de la possibilité de peser sur sa rédaction définitive.
La technique de la question préalable positive, ou «49, al. 3 C sénatorial», a été employée après 1986, en parallèle de l’emploi de l’art. 49 al. 3 C à l’Assemblée nationale, devant laquelle le texte revenait aussitôt, avant d’être adopté en commission mixte paritaire. Contrairement à ses saisissants qui y voyaient un détournement de procédure, le Conseil n’a pas jugé affectée la régularité de la procédure législative (⚖️ CC, n° 86-218 DC, Élection des députés).
Récemment, la majorité de gauche au Sénat a manifesté son opposition, de septembre 2011 au printemps 2012, en votant 13 questions préalables, avant de l’utiliser « en vue d’accélérer la procédure d’adoption d’[un] texte » (⚖️ CC, n° 2012-662 DC, Loi de finances pour 2013).
La motion de rejet préalable à l’Assemblée nationale
Elle résulte de la fusion de l’exception d’irrecevabilité et de la question préalable par la résolution du 27 mai 2009.
Art. 91, al. 5 RAN :
«Il ne peut ensuite être mis en discussion et aux voix qu’une seule motion de rejet préalable, dont l’objet est de faire reconnaître que le texte proposé est contraire à une ou plusieurs dispositions constitutionnelles ou de faire décider qu’il n’y a pas lieu à délibérer. L’adoption de la motion de rejet préalable entraîne le rejet du texte à l’encontre duquel elle a été soulevée. Dans la discussion, peuvent seuls intervenir l’un des signataires pour une durée qui ne peut excéder quinze minutes sauf décision contraire de la Conférence des présidents, le Gouvernement et le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond. Avant le vote, la parole est accordée, pour deux minutes, à un orateur de chaque groupe.»
Si plusieurs motions sont déposées, un tirage au sort pondéré (prenant en compte le nombre de signataires) est effectué.
Elle intervient avant l’ouverture de la discussion, sauf pour les textes inscrits à la séance mensuelle réservée aux groupes d’opposition ou minoritaire en vertu de l’art. 48 al. 5 C, où elle intervient après (art. 91, al. 10 RAN).
On recense 172 motions de rejet préalable à l’Assemblée nationale durant la 15e législature.
Le renvoi en commission
Souvent utilisé comme technique d’obstruction, avant sa suppression à l’Assemblée nationale. Il était demandé avant la discussion générale (art. 91 RAN) ; sauf pour les textes prioritaires (prérogative du gouvernement), c’était toujours l’Assemblée qui fixait la date et l’heure de présentation du nouveau rapport.
Au Sénat, il peut y avoir plusieurs demandes de renvoi visant tout ou partie du texte et elles peuvent intervenir après la clôture de la discussion générale. Cependant, si un vote est déjà intervenu sur une demande de renvoi portant sur l’ensemble du texte, la nouvelle demande n’est recevable que si elle émane du Gouvernement ou de la commission (art. 44, al. 5 RS).
Motions de procédure à l’encontre de propositions de loi présentées en application de l’art. 48, al. 5 C
Les propositions de lois déposées dans le cadre de l’art. 48, al. 5 C sont juridiquement soumises aux règles du droit commun.
En pratique, des accords informels entre les groupes prévalent. Au Sénat, il a été convenu, par un «gentlemen’s agreement» (Bachschmidt, 2017) établi en 2009 et confirmé plusieurs fois, qu’aucune motion de procédure n’est déposée à l’encontre des propositions de lois déposées en première lecture, sauf accord du groupe concerné.
À l’Assemblée nationale, la conférence des présidents a décidé, le 23 juillet 2019, qu’il ne pourrait être déposé de motion de rejet préalable sur les textes examinés au cours d’une journée réservée à un groupe d’opposition ou minoritaire.
Motions de procédure à l’encontre de propositions de loi présentées en application de l’art. 11 C
I. Le chapitre XII bis du règlement de l’Assemblée nationale, introduit en 2014, prévoit les règles consacrées à l’examen des propositions de loi présentées dans le cadre de l’art. 11, al. 3 C. Une motion de rejet préalable ainsi qu’une motion de renvoi en commission peuvent être déposées (art. 124-1 RAN).
II. A. 1° Le Président de la République soumet au référendum une proposition de loi n’ayant pas été examinée par les deux assemblées dans un délai de six mois (art. 11, al. 5 C et 9 de la loi organique du 6 décembre 2013).
2° La motion de renvoi en commission ne constitue pas une modalité d’examen d’un texte, contrairement à la motion de rejet préalable.
B. Exclure le dépôt d’une motion de renvoi en commission reviendrait donc, dans la situation où un groupe minoritaire ou d’opposition déciderait d’inscrire une telle proposition dans le cadre de son ordre du jour réservé (art. 48, al. 5 C), à supprimer la possibilité pour la majorité de l’assemblée d’obtenir l’organisation d’un référendum en refusant, grâce à l’adoption de la motion de renvoi en commission, d’examiner une proposition de loi. C’est pour cette raison que le Conseil constitutionnel a censuré cette disposition du RAN (⚖️ CC, n° 2014-705 DC, Règlement de l’Assemblée nationale).
III. Le règlement du Sénat ne comprend pas de modalités spécifiques concernant le dépôt de motions de procédure visant de telles propositions de loi.
Motion préjudicielle ou incidente
Elle n’existe qu’au Sénat.
Selon l’art. 44, al. 4 RS : son objet « est de subordonner un débat à une ou plusieurs conditions en rapport avec le texte en discussion et dont l’effet, en cas d’adoption, est de faire renvoyer le débat jusqu’à la réalisation de la ou desdites conditions ».
Application très limitée.
Base de la discussion des articles
I. A. Ancien privilège de l’art. 42 al. 1er C : discussion des projets portant, devant la première assemblée saisie, sur le texte présenté par le gouvernement ; et pour les textes en navette, délibération sur le texte adopté par l’autre assemblée (art. 42 al. 2 C).
B. Pour les propositions inscrites à la « niche » de l’art. 48, al. 5 C, la commission s’abstenait de présenter des conclusions de rejet à l’égard des propositions de l’opposition, l’Assemblée refusant généralement le passage à la discussion des articles par une motion de procédure, ou rejettant les articles les uns après les autres.
II. A. La nouvelle rédaction de l’art. 42 al. 1er C est reprise aux art. 90 RAN et 42 al. 6 RS. Toutefois, au Sénat, en vertu d’un accord conclu en 2009 entre les présidents de groupe et de commission et acté par la conférence des présidents, les propositions des groupes d’opposition ou minoritaires sont discutées sur la base du texte initial, sauf souhait contraire du groupe intéressé.
B. ⚠️ ⚖️ CC, n° 2012-655 DC, Mobilisation du foncier public : la discussion en séance ne s’étant pas déroulée à partir du texte adopté en commission, mais sur celui déposé par le gouvernement, la procédure d’adoption de la loi a été jugée contraire à l’art. 42, al. 1er C, ce qui entraîna sa censure intégrale.
C. L’un des objectifs de la réforme de l’art. 42 C était d’alléger l’examen en séance des amendements techniques, rédactionnels ou de détails, mais le nombre des amendements en séance n’a en pratique pas diminué (sauf en cas de temps législatif programmé).
Ordre de la discussion des amendements
Art. 95, al. 1er RAN et 42 al. 7 RS : la discussion des articles porte successivement sur chacun d’eux (RS : et sur les amendements qui s’y rattachent).
Ils sont mis en discussion après la discussion générale sur le texte et avant le vote sur le texte et la question principale (art. 100 RAN/46 bis RS).
Délibération dans l’ordre éliminant les solutions concurrentes, en partant des plus éloignées du texte pour se rapprocher de celui-ci. Puis les amendements sont mis en discussion dans l’ordre suivant : « amendement de suppression et ensuite ceux s’écartant le plus du texte proposé et dans l’ordre où ils s’y opposent, s’y intercalent ou s’y ajoutent » (art. 100, al. 4 RAN). Disposition similaire à l’art. 46 bis, al. 2 RS.
Lorsque plusieurs amendements exclusifs l’un de l’autre viennent en concurrence, le président peut les soumettre à une discussion commune à l’Assemblée nationale (art. 100 RAN) ; au Sénat, la mise en discussion commune est impérative, sauf décision contraire de la conférence des présidents (art. 46 bis, al. 2 RS).
Droit de parole dans la discussion des articles
Art. 95, al. 2 RAN : les interventions des commissions et des députés sur les articles du texte en discussion ou sur les nouveaux articles additionnels proposés par le gouvernement ou par les commissions par voie d’amendement, ne peuvent excéder 2 minutes (5 minutes avant la résolution du 27 mai 2009).
Pour lutter contre l’abus du droit d’amendement, le temps de parole pour les amendements identiques a été réduit par la résolution du 4 juin 2019 : le cas échéant, lorsque plusieurs membres d’un même groupe présentent des amendements identiques, la parole est donnée à un seul orateur de ce groupe désigné par son président ou son délégué (art. 100 RAN) Toutefois, le Conseil constitutionnel a précisé que cette restriction ne devait intervenir que pour prévenir les usages abusifs de prise de parole (⚖️ CC, n° 2019-785 DC, Règlement de l’Assemblée nationale).
Pour tous les autres amendements, ne peuvent être entendus sur chacun d’eux, que le Gouvernement, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond, le président ou le rapporteur de la commission saisie pour avis, et un orateur d’opinion contraire, pour une intervention inférieure à deux minutes 2 minutes, sauf gouvernement (art. 100 RAN).
Au Sénat, la règle de droit commun en séance, depuis la résolution du 1er juin 2021, est que la durée d’intervention d’un sénateur ne peut excéder deux minutes. Le signataire de l’amendement dispose également d’un temps de parole de deux minutes pour en exposer les motifs (art. 46bis al. 5 RS).
L’obstruction
L’usage systématique des moyens de procédure pour faire obstacle au déroulement normal de l’examen d’un texte et en retarder l’adoption.
Apparition avec l’examen de la loi Sécurité et liberté en 1980. La droite la relança avec la loi de 1982 de nationalisation. Depuis, à chaque législature, gauche et droite y recourent alternativement.
La loi de 2006 relative au secteur de l’énergie connut 137 665 amendements déposés, 42 demandes de suspension de séance, 157 rappels au règlement, 3 vérifications de quorum, pour faire durer 120 heures les 35 séances consacrées à 17 articles du projet.
Cette «pathologie» conduisit à la réforme de 2009 instituant le temps législatif programmé (TLP).
Le temps législatif programmé
L’art. 55, al. 4 à 6 RAN met en œuvre les dispositions de l’art. 17 de la LO du 15 avril 2009. Lorsque la conférence des présidents a fixé la durée maximale de l’examen d’un texte :
1. la parole est refusée aux membres d’un groupe qui a épuisé le temps qui lui a été attribué ;
2. un amendement déposé par un membre d’un groupe dont le temps de parole est épuisé est mis aux voix sans débat ;
3. le président d’un groupe dont le temps de parole est épuisé ne peut pas demander un scrutin public, sauf sur l’ensemble d’un texte ;
4. lorsque le Gouvernement ou la commission dépose un amendement après l’expiration des délais opposables aux députés, un président de groupe peut demander qu’un temps supplémentaire soit attribué aux groupes (et aux non-inscrits) pour la discussion de l’article amendé ou de l’article additionnel proposé.
📚 Il peut arriver que le Gouvernement dépose sciemment en séance des amendements purement rédactionnels afin d’attribuer un temps supplémentaire à chaque groupe.
Le temps législatif programmé n’est pas appliqué en cas de procédure accélérée et qu’un président de groupe s’y oppose :
1. pour cette raison, le Gouvernement a retardé l’inscription à l’ordre du jour du projet sur le dialogue social dans la fonction publique, sur lequel plus de 5 000 amendements avaient été déposés) ;
2. n’ayant pas respecté cette contrainte temporelle à propos du projet de loi sur les retraites en février 2020, le Gouvernement a dû faire face à l’obstruction parlementaire et au déploiement de 41 000 amendements en séance publique, contraignant le Premier ministre à solliciter l’art. 49 al. 3 C.
Contesté par l’opposition en 2009, le temps législatif programmé a été appliqué 32 fois jusqu’à la fin de la législature. Puis il a été repris par la nouvelle majorité, par exemple en seconde lecture de la loi sur le « mariage pour tous », après un débat difficile en première lecture. Employé à 11 reprises de mai 2013 à juin 2014.
Outre la lutte contre l’obstruction, il encourage les groupes à concentrer la discussion sur les dispositions jugées les plus importantes, dès lors qu’ils sont débarrassés des restrictions drastiques qui entourent la discussion des articles (deux minutes par orateur) et des amendements (un orateur pour, un orateur contre, deux minutes chacun). Il peut alors également conduire à de nouveaux déséquilibres (en juillet 2013, l’examen du texte sur les métropoles concentra la discussion sur Paris au détriment des métropoles régionales).
L’organisation de l’ensemble de la discussion
L’organisation de l’ensemble de la discussion remonte à 1935, s’est appliquée jusqu’en 1969, lorsque ne fut plus conservée que l’organisation de la discussion générale.
Le temps législatif programmé fut contesté en 2009 par l’opposition, mais celle-ci y a recouru lorsqu’elle est devenue majoritaire en 2012, par exemple pour la seconde lecture du texte sur le «mariage pour tous» en avril 2013.
Le temps législatif programmé, outre la dissuasion de l’obstruction, permet aux groupes de concentrer leurs interventions sur les dispositions qu’ils jugent les plus importantes, car les restrictions drastiques qui encadrent la discussion des articles et des amendements ne s’appliquent plus, à condition que ces interventions ne se multiplient pas à l’excès au début de la discussion.
Réserve lors de l’examen des articles
La réserve d’un article ou d’un amendement, dont l’objet est de modifier l’ordre de la discussion, peut toujours être demandée, lorsque l’adoption d’une disposition apparaît subordonnée au vote d’une autre. Elle est de droit à la demande du Gouvernement ou de la commission saisie au fond. Dans les autres cas, le Président décide (art. 95 RAN).
Il est d’usage constant que le président de séance consulte la commission saisie au fond et suive son avis.
Au Sénat, la discussion peut aussi être modifiée lorsque la priorité ou la réserve est demandée pour un article ou un amendement, de droit pour la commission saisie au fond, sauf opposition du gouvernement, auquel cas le Sénat statue sans débat (art. 44, al. 6 RS). Cette modalité peut avoir pour but de faire tomber un nombre important d’amendements incompatibles ou n’yant plus d’objet avec la disposition venant d’être adoptée.
Le retrait d’un texte
I. A. Le Gouvernement peut à tout moment et jusqu’à son adoption définitive retirer son texte (art. 84, al. 1er RAN).
B. Il ne peut cependant retirer un article sur lequel des amendements ont déjà été adoptés dans le but de lui substituer une solution alternative par le vote d’un article additionnel, sous peine de porter atteinte au droit d’amendement (⚖️ CC, n° 2006-540 DC, Loi relative au droit d’auteur).
II. L’auteur ou le premier signataire d’une proposition peut la retirer à tout moment jusqu’à son adoption en première lecture (art. 84, al. 2 RAN).
L’art. 44 al. 2 C
« Après l’ouverture du débat, le Gouvernement peut s’opposer à l’examen de tout amendement qui n’a pas été antérieurement soumis à la commission. »
Il ne s’agit pas à proprement parler une irrecevabilité (faculté).
Pas d’un usage fréquent, mais pas non plus exceptionnel. Il a permis au ministre de l’Éducation nationale d’écarter près de 2 400 amendements à la proposition sur la loi Falloux le 27 juin 1993.
Le règlement du Sénat, où la question s’est posée en 1986, précise que les sous-amendements sont soumis aux mêmes règles de recevabilité et de discussion que les amendements (art. 44 bis RS).
Le vote sur l’ensemble du texte
Après le vote du dernier article du texte ou du dernier article additionnel proposé par voie d’amendement, « il est procédé au vote de l’ensemble du projet ou de la proposition » (art. 95 al. 6 RAN/art. 42 RS).
⚠️ Si le texte ne comporte qu’un article unique, le vote de celui-ci équivaut à un vote sur l’ensemble du texte.
À l’assemblée, le vote sur l’ensemble peut être précédé d’explications de vote dans les conditions de droit commun (art. 54 al. 7 RAN/art. 42 al. 15 RS).
Au Sénat, de droit à la demande de la commission ou par décision du Sénat, il est possible de procéder à un renvoi du texte en commission pour coordination.
Au moment du scrutin sur l’ensemble, une seconde délibération est possible pour réparer une erreur ou corriger un vote-surprise :
- À l’Assemblée nationale, de droit à la demande du Gouvernement ou de la commission saisie au fond, ou si celle-ci l’accepte (art. 101 RAN) ;
- Au Sénat, la décision est toujours prise par la Haute Assemblée (art. 42 RS), ce qui lui permet de se trouver en désaccord éventuel avec le Gouvernement, contrairement à l’Assemblée.
Dans tous les cas, le texte est renvoyé à la commission qui doit présenter un nouveau rapport.
La seconde délibération permet au gouvernement de revenir sur une erreur qu’il a commise antérieurement, sur un vote sur lequel la majorité a été insuffisamment mobilisée ou s’est opposée aux desiderata gouvernementaux, ou de faire marche arrière pour des raisons politiques en obtenant le rejet d’un amendement précédement adopté. Elle peut éventuellement être couplée avec le vote bloqué de lart. 44 al. 3 C.
📚 Les règlements permettent la seconde délibération de la première partie de la loi de finances de l’année (art. 119 RAN/art. 47 bis RS) et des différentes parties d’une loi de financement de la sécurité sociale (art. 121-3 RAN et 47 bis-1 A RS).
37 secondes délibération lors de la 15e législature (dont 27 à la demande du gouvernement). 9 occurrences au Sénat entre 2016 et 2017.
Le principe de spécialité des votes
I. L’article est le cadre normal de vote. Cette présentation :
- a un objet intellectuel : la clarté du dispositif normatif :
- offre l’unité de décision qui permet au législateur de manifester sa volonté.
II. A. L’assemblée a voté chaque article d’un texte, chaque amendement, chaque sous-amendement le concernant.
B. Cette règle traditionnelle est consacrée par les art. 95 et 100 RAN, 42 et 46 bis RS. Selon Eugène Pierre, elle répond à un principe fondamental du droit parlementaire, qui vise à assurer l’indépendance et la sincérité des votes émis par une assemblée.
Vote par division
I. Lorsque la complexité d’une question l’exige, On peut descendre au-dessous du vote par article avec le vote par division, qui peut toujours être demandé (art. 63, al. 3 RAN), sur un article, un amendement ou un sous-amendement.
II. A. Il est de droit à l’assemblée lorsqu’il est demandé par le gouvernement ou la commission, sinon c’est le président de séance qui décide.
B. Au Sénat, dans les « questions complexes » ; de droit lorsqu’il est demandé par la commission, sinon le président de séance est le seul juge de cette condition (art. 42 al. 11 RS).
⚠️ A contrario, le vote bloqué permet de contraindre une assemblée à se prononcer par un seul vote sur l’ensemble d’un texte.
Art. 44, al. 3 C
I. « Si le Gouvernement le demande, l’assemblée saisie se prononce par un seul vote sur tout ou partie du texte en discussion en ne retenant que les amendements proposés ou acceptés par le Gouvernement. »
II. Innovation de 1958, que la décision ⚖️ CC, n° 59-5 DC, 1960, Règlement de l’Assemblée nationale a précisé :
- l’objet de la disposition est de permettre au gouvernement d’obtenir un résultat équivalent à celui de la question de confiance prévu par la Constitution de 1946, mais sans mettre en jeu sa responsabilité ;
- la disposition permet à la fois le vote sur le tout et le vote sur la partie (article quand un vote par division intervient) ;
- son application ne peut faire obstacle à la discussion de chacune des dispositions du texte sur lequel il est demandé à l’assemblée saisie de se prononcer par un seul vote (rappelé par ⚖️ CC, n° 2023-849 DC, Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 : dans le cas contraire, il serait porté atteinte aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire). Il n’est donc pas un obstacle à l’obstruction, sauf sur les explications de vote individuel ou en cas de demandes systématiques de scrutin public.
III. Double dérogation au principe de la spécialité des votes :
- il permet au Gouvernement d’éviter qu’un amendement ne fasse l’objet d’un vote distinct ;
- il impose l’adoption ou le rejet d’une disposition particulière en la liant à celle d’une autre ou à l’ensemble.
IV. Très utilisé pendant les premières législatures, il n’intervient désormais plutôt qu’à titre technique :
- notamment en seconde délibération de la loi de finances ;
- au Sénat, pour lutter contre l’obstruction à la loi sur les retraites en octobre 2010, en avril 2013 sur la sécurisation de l’emploi, ou encore en mai 2023 sur la réforme des retraites.
V. Dénaturant l’esprit de la «niche» de l’art. 48, al. 5 C, le vote bloqué peut être employé sur les propositions de l’opposition inscrites à l’ordre du jour, en reportant le vote au mardi suivant où la majorité est en nombre. Ce fut le cas, systématiquement, entre 2009 et 2012.
Vote des intitulés
Les intitulés sont dépourvus de valeur juridique. Ils n’auraient donc pas de raison d’etre mis aux voix.
Toutefois, la pratique parlementaire admet le vote d’amendements portant sur l’intitulé de la loi elle-même ou de ses intitulés intermédiaires (titres, chapitres, sections).
Ainsi, le titre du projet de loi constitutionnelle instituant la loi d’équilibre de la sécurité sociale a été modifié le 25 janvier 1996 en instituant les lois de financement de la sécurité sociale pour tenir compte du changement de dénomination prévu par le législateur pour cette nouvelle catégorie de lois.
Lorsque l’intitulé est modifié, la navette se poursuit même si le texte lui-même est adopté conforme.
Cependant, « s’il est loisible à une assemblée parlementaire de procéder à une telle modification, celle-ci est par elle-même sans effet sur la régularité de la procédure d’adoption du projet de loi ». Ainsi, la modification de l’intitulé d’un projet de loi pour le rendre cohérent avec l’adoption d’un amendement initialement sans lien avec le texte n’a pas pour effet de le rendre conforme à l’art. 45, al. 1er C (⚖️ CC, n° 2007-546 DC, Ratification de l’ordonnance relative à l’organisation de certaines professions de santé).
Les procédures abrégées à l’Assemblée nationale
Règles pour la procédure simplifiée à l’Assemblée nationale fixées depuis la résolution du 27 mai 2009 (cf. art. 103, 104, 106, 107 RAN) :
- décidée par la conférence des présidents à la demande du Président, du gouvernement, du président de la commission saisie au fond ou d’un président de groupe. Lorsqu’elle est décidée, les mêmes autorités peuvent y faire opposition, jusqu’à la veille de la discussion à 13 heures ;
- en l’absence d’amendements, le président met directement aux voix l’ensemble du texte, sauf décision contraire de la conférence des présidents ; sinon il appelle uniquement les articles auxquels des amendements se rapportent. Sur ces amendements, seuls peuvent intervenir le gouvernement, l’auteur, le président ou rapporteur de la commission et un orateur contre ;
- interdiction des motions de procédures.
Non utilisée depuis 2005, on assiste à un retour de cette procédure en 2021, ou en 2022, sur des textes de loi à portée normative réduite. Par ailleurs, les groupes minoritaires et d’opposition ont un intérêt à solliciter cette procédure dans le cadre de la journée mensuelle de l’art. 48, al. 5 C, dans la mesure où son caractère expéditif leur permet de présenter un plus grand nombre de propositions de loi (2019).
Procédures abrégées au Sénat
I. La procédure d’examen simplifié ne concerne que l’approbation d’engagements internationaux (art. 47 decies RS).
II. Deux procédures n’ont plus qu’un intérêt historique:
1. le vote sans débat (art. 47 ter RS): jamais appliqué;
2. le débat restreint: vote sur les amendements de la commission et sur les articles auxquels ils se rapportent, puis le Président met aux voix l’ensemble (art. 47 quinquies RS).
III. Le Conseil constitutionnel a censuré comme portant atteinte au droit d’amendement une réforme ambitieuse du Sénat, qui consistait à interdire de reprendre en séance les amendements repoussés par la commission (⚖️ CC, n° 90-278 DC, Règlement du Sénat).
IV. Procédure de législation en commission.
Procédure de législation en commission
I. A. En 2008, nouvelle rédaction de l’art. 44 C, qui prévoit que le droit d’amendement s’exerce «en séance ou en commission», a permis d’échapper à la jurisprudence ⚖️ CC, n° 90-278 DC, Règlement du Sénat.
B. L’art. 16 de la loi organique du 15 avril 2009 indique que les « règlements des assemblées peuvent [instituer] une procédure d’examen simplifiée d’un texte et […] prévoir que le texte adopté par la commission saisie au fond est seul mis en discussion en séance ».
C. Les art. 47 ter à quinquies RS prévoient une procédure de législation en commission, expérimentée à partir de 2015 et pérennisée dans le règlement en 2017, procédure au cours de laquelle le droit d’amendement ne s’exerce qu’en commission. Elle n’est pas applicables aux révisions constitutionnelles, aux PLF et aux PLFSS.
II. Un droit de veto est reconnu au gouvernement, au président de la commission et au président de groupe. Ce droit de veto peut s’exercer en conférence des présidents mais aussi à l’issue de la réunion de la commission.
III. A. En séance publique, seule l’exception d’irrecevabilité peut être présentée et aucun amendement n’est recevable, sauf s’ils visent à assurer le respect de la Constitution, opérer une coordination avec un texte en vigueur ou en discussion ou procéder à la correction d’une erreur matérielle.
B. Lors de la séance, le Président met aux voix l’ensemble du texte adopté par la commission, ou certains articles seulement. Seuls peuvent intervenir le Gouvernement, les représentants des commissions et, pour explication de vote, un représentant par groupe.
IV. A. Le succès relatif du mécanisme (25 textes examinés entre janvier 2018 et septembre 2019) a conduit l’Assemblée nationale à se doter d’un mécanisme similaire (art. 107-1 à 107-3 RAN) avec la résolution du 4 juin 2019.
B. La procédure de législation en commission a été appliquée pour la première fois en 2020, au projet de loi visant à créer le statut de citoyens sauveteurs.