Chapter 5 Flashcards
Caractères des actes du Parlement
I. Les actes du Parlement sont ses décisions, c’est-à-dire les votes qu’il émet, notamment pour remplir ses deux fonctions principales : le vote de la loi et le contrôle du Gouvernement.
II. Ils ne résument pas toute l’activité parlementaire : procédures informatives qui participent aux fonctions que Bagehot jugeait essentielles : exprimer l’état d’esprit du peuple sur les questions débattues, enseigner à la nation ce qu’elle ne sait pas, lui faire entendre ce qu’autrement elle ignorerait.
Distinction Parlement/pouvoir législatif
⚠️ Usage courant de confondre les deux.
Cependant :
- confusion de la partie avec le tout : le Parlement fait la loi, mais exerce aussi une activité de contrôle ;
- il n’est pas seul à faire là loi : le Gouvernement partage l’exercice de la fonction législative, notamment en matière d’initiative.
La spécificité du Parlement
I. La spécificité du Parlement, c’est que « dans l’accomplissement de ces fonctions variées, il procède toujours par la même opération de la volonté, qui est la délibération » (Maurice Hauriou).
II. ⚠️ Le pouvoir délibérant n’est pas absorbé par la fonction de faire la loi, ni par celle de contrôler le gouvernement. Par ailleurs, il n’est pas seul à faire la loi.
Définition de la délibération
« Une résolution collective, sur un objet de gouvernement […], prise à la majorité des voix et après discussion publique, par une assemblée formant corps et constituée en une autorité publique » (Maurice Hauriou, Précis de droit constitutionnel, 1929).
➞ Double aspect :
1° le processus collectif de formation de la volonté ;
2° la décision qui en résulte.
Les fonctions du Parlement
I. A. La législation : activité normative.
Impropriété de l’appellation «pouvoir législatif» :
- l’exécutif participe à la législation formelle ;
- le pouvoir réglementaire ressortit matériellement à la législation.
B. Le contrôle : activité politique, désignant la mise en jeu de la responsabilité politique du Gouvernement et par extension les activités informatives qui s’y rattachent, ainsi que les manifestations par lesquelles les assemblées tendent à influencer l’action gouvernementale (exemple : les résolutions des art. 34-1 et 88-4 C).
Le contrôle exprime la solidarité entre l’exécutif et le pouvoir délibérant, caractéristique du régime parlementaire.
II. La fonction constituante se rapporte à la fonction législative ➞ différentes compétences mise en œuvre.
La fonction juridictionnelle à celle de contrôle : avant la révision du 23 février 2007, exercée par Haute Cour de justice, au caractère essentiellement politique la rattachant à une fonction de contrôle ➞ depuis devenue procédure de destitution.
III. Cette présentation se retrouve dans le découpage en trois titres du Règlement de l’Assemblée nationale :
Titre premier : Organisation et fonctionnement de l’Assemblée
Titre II : Procédure législative
Titre III : Contrôle parlementaire
Unité et spécialité de l’activité parlementaire
Liaison entre la délibération législative et l’exercice du contrôle.
L’activité politique : soutien au gouvernement ou opposition. Elle se manifeste dans les deux fonctions législative et de contrôle, qu’elles soient distinctes ou mixtes (l’habilitation de l’article 38 C ou l’engagement de responsabilité sur un texte).
L’activité de contrôle a été restreinte au vote de la motion de censure en 1958, avant d’être légèrement assouplie en 2008.
Les clivages politiques sont plus marqués dans le vote d’une motion de censure, à l’occasion des questions au gouvernement, pour les textes à forte charge idéologique, que dans le cas d’une discussion législative ordinaire plus technique. Idem pour l’affluence.
Par ailleurs, juridiquement, la portée d’une discussion législative n’est pas la même que celle d’un débat politique, notamment en ce qui concerne la valeur des travaux préparatoires pour l’interprétation des dispositions équivoques ou obscures.
La fin de la souveraineté parlementaire
Jusqu’à la IVe République, tradition de souveraineté parlementaire : les assemblées tiraient leurs pouvoirs d’une représentation effective du souverain, c’est-à-dire du peuple dont elles exprimaient seules la volonté = puissance illimitée, la Constitution ne lui étant pas supérieure.
Rupture de la Ve République, anticipée par Carré de Marlberg dans La loi, expression de la volonté générale(1931) : les pouvoirs du Parlement n’auront « d’autres sources que l’octroi qui lui en a été fait par la Constitution » et ne s’analyseront plus en une « puissance de souveraineté » mais « en une compétence constitutionnelle » ≠ compétence de la competence.
La définition des missions du Parlement
Le Comité consultatif pour la révision présidé en 1993 par le doyen Vedel a fait remarquer que les art. 5 et 20 C définissaient les missions respectives du Président de la République et du Premier ministre, mais rien pour le Parlement.
➞ Omission réparée par la révision du 23 juillet 2008, qui ajoute à l’art. 24 C un nouveau premier alinéa selon lequel « Le Parlement vote la loi. Il contrôle l’action du Gouvernement. Il évalue les politiques publiques ».
Le domaine de la compétence législative par le Parlement
Le domaine de la loi ≠ illimité (compétence de droit commun).
→ art. 34 et 37 C = compétence d’attribution.
Cependant le domaine de la loi est également « déterminé par d’autres dispositions de la Constitution » (⚖️ CC, n° 65-34 L, Régime de retraite des marins du commerce) :
- loi ordinaire : art. 3, 35, 36, 38, 47, 53, 66, 72, 73 C ;
- LO : 23 articles renvoyant à une loi organique :
- LC : art. 89 C.
Domaine du vote ≠ domaine de l’initiative (art. 40 C).
Le contrôle politique exercé par le Parlement
Approche restrictive. Avant la révision de l’art. 24 C en 2008, la Constitution ne fixait pas explicitement au Parlement la mission de contrôler l’action du Gouvernement, selon le président Mazeaud.
Ce contrôle prend les formes suivantes :
- séances hebdomadaires réservées aux questions des parlementaires (art. 48, al. 2 C), instituées sur le mode conventionnel ;
- mise en cause de la responsabilité du Gouvernement (art. 49 et 50 C) ;
- procédures informatives, qui n’entraînent toutefois pas d’actes.
Les restrictions :
- refus des résolutions à objet politique (⚖️ CC, n° 59-2 DC, Règlement de l’Assemblée nationale) ;
- contrôle de conformité des règlements (art. 61, al. 1er C) ;
➞ tout acte des assemblées trouve son fondement dans une habilitation constitutionnelle.
L’évaluation des politiques publiques
Forme plus technique du contrôle = appréciation des moyens au regard des résultats (efficacité de la dépense publique, gestion de l’État).
Avant 2008 : visée par les art. 47 et 47-1 C seulement, et pratiquée à la marge (création en 1983 de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques).
Depuis 2008, nouvelle rédaction de l’art. 24 C qui l’étend à l’ensemble des politiques publiques.
La portée du cantonnement législatif
I. Décision ⚖️ CC, n° 82-143 DC, *Blocage des prix et des revenus*
Interprétation par le Conseil constitutionnel de la délimitation opérée par les art. 34 et 37, al. 1er C, rapprochée des dispositions la sanctionnant (art. 37, al. 2 et 41 C) ➞ ces dernières présentant un caractère facultatif, la délimitation du domaine de la loi relève de la recevabilité et non du fond.
II. A. Le domaine de la loi s’étend au fur et à mesure des dépassements, puisque les dispositions réglementaires présentes dans une loi ont force de loi, tandis que le déclassement de l’art. 37, al. 2 ne suffit pas les compenser.
B. « la portée d’une loi, constitutionnelle ou autre, ne se juge pas d’après ce que ses auteurs ont voulu ou cru faire, mais bien d’après ce qu’ils ont effectivement fait, c’est-à-dire d’après les effets que sont susceptibles de produire et surtout d’après les effets qu’ont produits, en fait, les principes et les institutions qu’ils ont adoptés » (Carré de Malberg, La loi, expression de la volonté générale, 1931).
III. A. En revanche, le législateur ne doit pas renvoyer au pouvoir réglementaire le soin de fixer les règles ressortissant à la compétence législative = sanction par le Conseil constitutionnel de cette « incompétence négative », jurisprudence inaugurée en 1967 (⚖️ CC, n° 67-31 DC, Statut de la magistrature).
B. Le législateur ne peut y renoncer que dans les formes prévues par l’art. 38 C, cette habilitation ne pouvant s’étendre à certains domaines que la Constitution réserve exclusivement à la loi en tant qu’acte du Parlement (lois organiques, lois constitutionnelles et art. 35, 36, 38, 47, 47-1, 53 C).
Les extensions jurisprudentielles de la compétence du législateur
Les validations d’acte administratif (⚖️ CC, n° 80-119 DC, Loi portant validation d’actes administratifs).
Les dispositions dérogeant à des principes généraux du droit (⚖️ CC, n° 69-57 L, Frais de scolarité à l’école polytechnique).
La compétence du législateur s’étend donc à n’importe quel acte administratif, y compris la validation d’actes individuels (⚖️ CC, n° 85-192 DC, Dispositions d’ordre social).
Les restrictions jurisprudentielles à l’exercice des compétences du législateur
I. A. Extension du contrôle de conformité de l’art. 61, al. 2 C (⚖️ CC, n° 71-44 DC, Liberté d’association ) ➞ l’exercice de la compétence du législateur est subordonné aux dispositions de fond contenues dans la Constitution, incluant son préambule et les textes auxquels il renvoie.
B. Le législateur n’est donc plus souverain dans les limites de son domaine. Ainsi, désormais, la loi «n’exprime la volonté générale que dans le respect de la Constitution» (⚖️ CC, n° 85-197 DC, Évolution de la Nouvelle-Calédonie).
II. L’impulsion au développement de ce contrôle a été donné par la révision du 29 octobre 1974 étendant la saisine du Conseil constitutionnel à 60 députés ou 60 sénateurs (donc l’opposition) :
- 862 décisions DC au 1er janvier 2024, contre 53 au 1er janvier 1975 ; - soit 53 en quinze ans c/ 809 en 49 ans ;
- soit une moyenne de 3,5 c/ 16,5 décisions par an.
L’extension du contrôle de constitutionnalité à la QPC (958 décisions au 1er janvier 2022 pour une entrée en vigueur au 1er mars 2010, soit 100 décisions par an en moyenne) n’a pas réduit le volume des saisines des parlementaires.
Les restrictions jurisprudentielles affectent en réalité moins l’institution parlementaire que l’exécutif, qui dirige la législation et se fondait sur les règles procédurales constitutionnelles pour limiter les initiatives parlementaires : ces dernières lui sont désormais opposables = renforcement du caractère parlementaire du régime de la Ve République
Intensité de l’activité législative du Parlement
2/3 des séances publiques des assemblées consacrées aux débats législatifs, sans compter les travaux des commissions ➞ « hypertrophie » législative souvent dénoncée.
L’nstauration d’une semaine mensuelle de contrôle en 2008 ne l’a qu’atténuée.
Bilan de la IVe République : 2 655 lois promulguées de février 1947 à juin 1958.
Bilan de trois législatures (1988-2002) : 1252 lois promulguées, soit une moyenne de 89 lois par an.
La principale question est celle de la prépondérance du Gouvernement qui amène les assemblées à être qualifiées de « chambres d’enregistrement ». La loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 donne plus de place à l’initiative parlementaire.