Conférence Flashcards

1
Q

Le conseil souverain de Nouvelle-France: Le cadre juridique français transposé dans la colonie 1663 à 1760

Quels est l’organisation des pouvoirs?

A

Jusqu’en 1627, les gouverneurs agissant comme des vice-rois ont les pleins pouvoirs en vertu d’une commission (Jacques Cartier 1535 et Champlain 1608).

Le gouverneur et l’intendant

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Q

Quel est le rôle du gouverneur?

A

Détenant les pleins pouvoirs dans un premier temps, le gouverneur se voit adjoindre un conseil par un édit de 1647, composé du gouverneur de Montréal et du supérieur des jésuites.

Des syndics des habitants sont élus à Montréal, Trois Rivières et Québec pour 3 ans. A partir de 1648, ils votent au conseil. Dès 1677, ils disparaissent.

A partir de 1685, le gouverneur perd son influence au sein du conseil en matière civile.

S’il siège au Conseil souverain mais ne le préside plus, ses fonctions demeurent essentiellement militaires. Il commande les troupes, les implantations de forteresses, les relations avec les autochtones et les colonies voisines.

Il participe, avec l’intendant, à l’octroi de seigneuries.

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3
Q

Quel est le rôle de l’intendant?

A

Le premier intendant de justice, police et finances fut Jean Talon nommé en 1665.

Il a pleine compétence en matière de police, d’économie et de finance.

À partir de 1685, le Conseil Souverain ne discute plus des questions de réglementation en son absence.

Il est responsable de l’administration de la justice. Il nomme les officiers des juridictions royales et les notaires.

Ses actes sont directement applicables. Il édicte de nombreux règlement en matière de commerce, de salubrité publique, de qualité des marchandises.

Il préside les débats du Conseil souverain à partir des années 1680. Il peut évoquer devant lui toutes affaires (par exemple censitaires seigneurs).

L’intendant peut se saisir des litiges de nature commerciale. Il n’est pas tenu de suivre les règles juridiques en vigueur.

Il peut édicter une ordonnance destinée à régler un litige (ex. testament reçus par des prêtres qui n’occupent pas une cure).

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4
Q

L’organisation du pouvoir judiciaire

Quels sont les rôles des tribunaux de première instance?

A

À partir de 1664, c’est l’intendant qui organise les tribunaux. Les sulpiciens de Montréal nomment le juge de Mtl. Une juridiction royale (à Trois-Rivières) et la prévôté de Québec sont établies en 1664.

Une juridiction royale remplace en 1693 cette juridiction, mais les seigneurs conservent les droits de moyenne et basse justice. Ex: Justice seigneuriale de Notre Dame des Anges.

Dans quelques seigneuries, il existe une cour seigneuriale composée d’un juge, d’un procureur fiscal et d’un greffier.

La moyenne justice équivaut aux amendes inférieures à 60 sols, permet la nomination des tuteurs, curateurs, de dresser des inventaires après décès.

La basse justice, correspond aux amendes inférieures à 10 sols.

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5
Q

Qu’est ce que la juridiction religieuse?

A

Il existe une officialité à Québec qui peut connaître des questions de Dîmes, la validité de certains mariages, l’hérésie et la simonie…

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6
Q

En quoi consiste la juridiction d’appel dans le conseil souverain?

A

Le Conseil souverain est créé en 1663 et il devient le tribunal d’appel.

Il juge «en la forme et manière qui se pratique et se garde dans le ressort de notre Cour de Parlement de Paris».

À l’instar des autres provinces, la Nouvelle-France dispose, à partir de 1663, d’une juridiction supérieure, le Conseil souverain, qui sera dénommé Conseil supérieur en 1703.

Ordonnance de Louis XIV, roi de France et de Navarre, du mois d’avril 1667. Avec le procès verbal contenant les modifications faites par le conseil à la dite ordonnance, dans É.O. I, p. 106-230.

De même que les autres parlements, son devoir était d’enregistrer et de publier les lois du royaume, de légiférer pour les besoins de la colonie et surtout d’entendre les causes criminelles et civiles. Rapidement, l’intendant se réserve la fonction législative, alors que la fonction judiciaire est réservée au Conseil. Ce dernier était formé du gouverneur, de l’évêque, de cinq conseillers et du procureur général

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7
Q

En quoi consiste l’organisation de la Juris Dictio?

A

Si le gouverneur garda le titre de président de l’assemblée, c’est l’intendant qui présida de facto le Conseil. En son sein, aucune proposition n’était soumise et on n’enregistrait pas les votes, la décision étant alors celle de celui qui présidait, agissant sur l’avis des autres membres.

À partir de 1675, les membres du Conseil ne sont plus nommés par le gouverneur, mais obtiennent une commission royale, sur recommandation de l’intendant et leur nombre est porté à sept, le quorum étant difficile à atteindre (trois juges pour le civil, cinq pour le criminel).

Si son activité est essentiellement judiciaire, les conseillers sont également enjoints de seconder l’action des administrateurs, rôle traditionnel des juges des provinces ultramarines. Le personnel administratif et de justice est toutefois peu nombreux

Le projet de règlement rédigé parTracy et Talon «pour la justice et la distribution des terres du Canada» en janvier 1667 illustre la dynamique qu’ils entendent impulser au sein du Conseil. Talon demande que les attributions et les jours de réunion de ce Conseil soient clairement spécifiés.

Il souhaite également «qu’on administre au Canada une forme de justice distributive, brève et gratuite, (et) qu’il soit établi des juges dans divers quartiers ou juridictions ayant pouvoir de juger en première instance de toute matière civile jusqu’à la concurrence de la somme de dix livres» (règlement fait parTracy et Talon pour la justice et la distribution des terres du Canada, 24 janvier 1667, MG1-C11A, bobine no. C-2375, vol. 2, fol. 547-568). PAS MIS EN OEUVRE

Selon Talon, il est souhaitable qu’il ne puisse être alors porté appel que devant trois autres juges parmi les quatre juges qui seraient établis à Québec (Id., fol. 549).

S’interrogeant sur leurs salaires et vacations, il oriente plutôt cette rémunération vers un salaire honorifique que vers une rétribution conséquente. Concernant la procédure à suivre, il promeut la médiation, puisqu’il souhaite, qu’avant de se pourvoir en justice à Québec, soit tentée «la voie de la composition à l’amiable» afin de régler les petits litiges.

Il s’interroge à cette occasion sur les droits des parties et les peines à infliger aux coupables. Il propose au roi une ordonnance permettant d’obliger ceux qui ont des terres à déclarer ce qu’ils possèdent, celle-ci donnant les conditions et clauses portées par leurs titres. Cela permettrait de vérifier si ces contrats ne causent aucun préjudice aux droits de la couronne, et ensuite de connaître l’étendue des terres concédées et des terres mises en valeur au Canada et celles qui reste à distribuer dans les lieux «commodément situé[s]» (Id., fol. 550-559).

Le Conseil supérieur fut dépouillé de ses vastes compétences administratives au profit de l’intendant, alors que l’autonomie des trois tribunaux royaux de première instance s’avéra quasi-inexistante. Le Conseil souverain de la Nouvelle-France est ainsi une institution sous l’influence prépondérante de l’intendant. L’intendant Dupuy témoigne ainsi du rôle qu’il a joué au sein du Conseil Souverain:

«Je n’ai eu, ainsi que chacun de ceux qui le composent, que ma voix dans les arrêts, c’est peut-être la première fois qu’on a imputé au président les jugements d’une compagnie entière. […] Si j’ai joint des principes et des maximes aux arrêts qui ont été rendus, je l’ai fait pour l’acquis de mon devoir puisque, dans une colonie aussi formée et d’un peuple aussi nombreux que l’est celui du Canada, auquel il est nécessaire tous les jours de rendre la justice et où il est question de juger les points de droit et de coutume les plus difficiles, on n’y envoie un intendant de justice que pour aider ceux qui ne sont pas moins en état de juger sur chaque espèce qui se présente au tribunal lorsque quelqu’un leur met devant les yeux, avec fidélité et avec exactitude les principes et les maximes de chaque matière qui se présente à juger» («Mémoire de l’intendant Dupuy au ministre, 1729», p. 103).

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8
Q

En quoi consiste l’enseignement des conseils souverains?

A

Il n’existe pas d’université ou d’école de droit dans la colonie et la profession d’avocat n’est pas reconnue devant les juridictions, même si des procureurs, notaires ou praticiens défendent la population au sein du prétoire. Malgré ses efforts pour assainir l’appareil gouvernemental transplanté en Nouvelle-France, Colbert n’est pas parvenu à échapper à l’enchevêtrement des pouvoirs, caractéristique structurelle de l’État monarchique français.

Ainsi les agents coloniaux, surtout à la fin du xvii e siècle, «gaspillent beaucoup d’énergie à se définir les uns par rapport aux autres» (Louise Dechêne, Habitants et marchands, p. 372).

Pour la seule ville de Montréal, les normes de police émanent de six organes différents, soit le juge de la juridiction, le Conseil souverain, l’intendant (ou son subdélégué), le gouverneur particulier, le major de la ville et enfin le gouverneur-général.

L’interdiction de reconnaître les procureurs ou avocats est permanente dans les instructions aux administrateurs. Le recours à l’avocat, qui est la règle devant les juridictions métropolitaines en vertu de l’ordonnance civile, est donc rejeté devant les juridictions de la colonie.

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9
Q

Quels sont les rôles de avocats et des procureurs par rapport au conseil souverain?

A

Le souhait du roi est de permettre aux parties de se représenter elles-mêmes, tout praticien du droit pouvant néanmoins, à l’occasion, servir de procureur, ce dont les notaires et les huissiers ne se privèrent pas.

La volonté royale est donc davantage d’éviter la création d’un corps d’avocat, d’un barreau canadien constitué, plutôt que de priver les parties de Nouvelle-France de défenseurs. Les difficultés à organiser les rapports de pouvoir entre gouverneur et intendant - sans négliger l’influence de l’évêque - témoignent des problèmes posés par le choix original fait dans la colonie.

Toutefois, à partir du début du xviiie siècle, l’administration est en place et devient capable de gérer un territoire de plus en plus vaste, comme le développement de Détroit le montre.

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10
Q

L’action du Conseil Souverain au regard des sources du droit

Quels sont les sources du droit colonial?

A

Ce sont les ordonnances royales (surtout procédure et droit public), la Coutume de Paris (organiser les biens, succession, …), la doctrine et la jurisprudence, le droit romain en matière d’obligations et de manière supplétive, les canons de l’Église en matière religieuse

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11
Q

En quoi consiste les ordonnances royales?

A

Selon les termes de l’édit de création, le Conseil Souverain doit juger selon les lois et ordonnances du royaume. Les lois existant en France en 1663 s’appliquent donc de plein droit.

Certains édits du Conseil d’Etat sont, à partir de cette date, établis à la destination unique du Canada et des colonies. Il est alors précisé explicitement par le roi que le conseil souverain doit enregistrer ces textes.

Contrairement à l’Ordonnance du commerce de 1673, l’Ordonnance sur la procédure civile de 1667 a bien fait l’objet d’un enregistrement à travers les modifications approuvées par Louis XIV en 1678 par le Conseil souverain de Québec.

On constate toutefois que les grandes ordonnances royales ont continuellement été appliquées en Nouvelle-France sans faire l’objet d’un enregistrement préalable systématique.

Dans ces conditions, bien que non enregistré, le «code marchand» de 1673 aurait naturellement trouvé aussi à s’appliquer. Collet écrit en 1712:

«Mon premier soin a été, suivant vos ordres Monseigneur, de m’instruire du règlement du roi pour cette colonie. Je prévois que, dans la suite, il sera nécessaire de faire encore quelques explications sur des articles de différentes ordonnances de Sa Majesté, qui ne peuvent pas être entièrement exécutées dans cette colonie, j’en ferai des mémoires raisonnés que j’aurai l’honneur d’envoyer à votre Grandeur»

Souhaitant réformer cette situation dérogatoire au droit commun et à la lettre de l’ordonnance civile, Collet propose au ministre de procéder aux enregistrements devant le Conseil supérieur à la requête du procureur général du roi, après lecture et publication à l’audience du Conseil.

Il déplore également, dans le même mémoire, l’application locale de l’ordonnance de la Marine d’août 1681.

En règle générale, les édits et ordonnances français ne sont pas enregistrés et transcrits dans les registres.
Exception à cette règle, l’ordonnance sur la procédure civile de 1667.

Un procès-verbal de 1678 contient des remontrances à son sujet, une adaptation aux conditions du pays, extension de divers délais sont préconisés. Le roi accepte les suggestions du Conseil.

En 1707, le Conseil adopte par exemple un règlement modifiant l’ordonnance de 1667.

En 1746 et 1747, Louis XV défend même au Conseil supérieur de Québec de procéder à l’enregistrement d’ordonnances sans avoir d’instructions expresses à cet effet.

En principe donc, les ordonnances royales continentales ne peuvent être évoquées devant le conseil puisqu’elles ne sont pas enregistrées.

En pratique pourtant, la législation royale a été régulièrement appliquée en Nouvelle-France.

À la lecture de ce mémoire, une pratique locale s’affirme autour de l’obligation d’enregistrement des ordonnances par le Conseil. Collet est conscient des problèmes posés par la pratique du Conseil, qui n’enregistre qu’une partie des textes et n’assurant qu’une publicité très parcellaire des instruments normatifs:

«J’ai remarqué que, jusqu’à présent, les édits, déclarations ou arrêts du Conseil d’État du roi n’ont point été enregistrés suivant la déclaration du 24 février 1673, à la requête du procureur général du roi, et que l’enregistrement en a seulement été fait (sans lecture ni publication à l’audience) au greffe du conseil supérieur de ce pays, et que cet enregistrement n’a point été fait dans les juridictions de la prévôté et amirauté de Québec, ni dans celle de Montréal ou Ville-Marie et des Trois-Rivières, quoique cette formalité soit nécessaire et prescrite par l’article 4e du titre 1er de l’ordonnance du mois d’avril 1667, afin que les édits, déclarations et arrêts du Conseil d’État du Roi soient gardés et observés dans cette juridiction» (Ibid., fol. 190v-191).

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12
Q

Quel est l’application de la coutume de Paris?

A

Dans les premiers temps de la colonie, il existe un certain flottement juridique. Les trois concessions de seigneurie ne faisaient référence à aucune coutume particulière.

La Compagnie des Cents associés (1627-1663) concède des fiefs à son tour sans préciser le droit applicable. En 1647, elle déclare pourtant vouloir suivre la Coutume de Paris.

Sous ce régime, les concessions octroyées aux censitaires font références à la Coutume de Paris pour les lods et ventes, saisines et amendes.

Les seigneurs de Beaupré ont recours par contre à la Coutume de Normandie dans une clause prévoyant le retrait seigneurial.

Après 1655, la Compagnie des Cents Associés renvoie plutôt à la coutume du Vexin français.

La raison en est que cette coutume prévoit le paiement systématique d’un droit de relief (fiscal) en cas de mutation de fief.

En 1664, par l’art. 33 de l’établissement de la Compagnie des Indes Occidentales de 1664, les juges de la colonie doivent appliquer la Coutume de la prévôté et vicomté de Paris.

Certains articles de la Coutume ne s’appliquent pourtant pas à la Nouvelle France. Il s’agit essentiellement du Titre 12, concernant la garde Noble et Bourgeoise et des articles relatifs à des particularismes de la région parisienne ou à des délais.

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13
Q

En quoi consiste la doctrine et la jurisprudence française?

A

La doctrine française permet aux magistrats d’étayer leur argumentation, en l’absence quasi complète d’une doctrine québécoise, (Ferrières, Domat et Pothier).

Seul François Joseph Cugnet (Traité abrégé des anciennes lois, coutumes et usage de la colonie du Canada, aujourd’hui province du Québec 1775) et L. G. Verrier ont tenté d’enseigner le droit tel qu’appliqué dans la Nouvelle-France.

L’absence d’enseignement, de faculté de droit renforce l’influence française sur la doctrine et la jurisprudence.

La jurisprudence suivie par le Conseil Souverain est celle du Parlement de Paris.

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14
Q

En quoi consiste la réglementation locale?

A

Elle consiste essentiellement dans les actes de l’intendant. Sa législation locale est particulièrement importante en matière de police, il règlemente l’activité des coureurs des bois, encadre la traite, l’organisation urbaine et intervient en matière commerciale et fiscale. Le Conseil souverain peut également intervenir afin d’organiser le fonctionnement de la justice.

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15
Q

Quel est l’application normative à la Nouvelle-France?

A

Adaptation par les textes et la pratique, adaptation juridique et sociale

Les mariages à la Gaumine, contournent la procédure ecclésiastique. (contourner la volonté des parents et l’accord des prêtes)

Les sanctions paraissent moins fortes contre ces mariages qu’en Europe.

Il y a une certaine tolérance sociale et juridique.

Face à l’application de l’ordonnance sur la procédure civile de 1667, le Conseil supérieur établi le 07 novembre 1678 un certain nombre d’observations sur l’ordonnance civile et évoque l’impossibilité «d’exécuter certains de ses articles au Canada». (07 nov. 1678, procès-verbal dressé par le Conseil souverain de Québec contenant plusieurs observations sur l’ordonnance royale du mois d’avril 1667, AC, C11A vol. 4, fol. 207-213v.)

Le pouvoir royal entérine ces modifications en juin 1679, faisant siennes la plupart des réflexions des juristes coloniaux. Confrontés au manque de personnel judiciaire, l’éloignement et l’isolement, aux difficultés de communication, la Métropole, après examen des remontrances formulées par la juridiction canadienne, décide d’adapter la norme procédurale dans un esprit de collaboration.

Les motivations de l’édit de juin 1679 visent clairement une adaptation au contexte colonial: «[…] ayant reconnu que plusieurs articles de notre ordonnance ne conviennent point à l’état présent du dit pays, quelques changements ont été faits sous notre bon plaisir par nôtre dit Conseil de Québec […]».

En 1707, l’intendant Raudot souligne auprès du ministre l’augmentation quotidienne de «l’esprit d’affaires et de chicane», remarquant que «l’ignorance et le peu de règles qu’on a observées» jusqu’alors dans les contrats occasionnent «bien des litiges» et risquent de les multiplier à l’envi».

In fine, le pouvoir, décide bien souvent d’entériner purement et simplement la pratique canadienne.

Par exemple, considérant que les Canadiens, « connaissant mal l’ordonnance de 1667 et les règlements et édits qui en ont modifié certaines dispositions (…) », sont la proie des praticiens et de « ceux qui ont l’esprit processif »43, Collet propose alors de faire valider « tous les actes, contrats et procédures sur licitations ou adjudications par décret jusqu’en l’année 1710 inclusivement » ou de rédiger un projet d’ordonnance qui remplacerait l’ordonnance de 1667 sur la procédure civile et les règlements subséquents.

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16
Q

En quoi consiste la réforme du notariat par le conseil souverain?

A

Le Procureur général Collet intervient positivement dans l’organisation du notariat19 même s’il voyait de manière circonspecte leur action comme procureur.

La déclaration royale du 2 août 1717 pour la conservation des minutes des notaires, fait suite à un mémoire de Collet où il « signalait la nécessité d’obliger les notaires à classer leurs actes par ordre chronologique et le besoin d’instituer un système d’inventaire et de dépôt des greffes des notaires décédés ».

Dans ce mémoire il se montre fort sévère avec les praticiens de la colonie, et annonce la future enquête de Louis-Guillaume Verrier. C’est surtout la transmission et la conservation des greffes qui fait défaut selon lui : on trouve dans la colonie, si on en croit sa plume « des minutes et protocoles de notaires décédés non enregistrés ni même attachés ensembles qui sont entre les mains d’héritiers ignorants (…) ».

Il demande un règlement afin que tous les notaires soient tenus « de lier ensemble par années et par dates les minutes de tous les actes ». Il se montre assez virulent contre ces notaires et huissiers qui « se mêlent de plaider et d’écrire pour les parties », fomentent des procès et « mettent tout en usage pour les éterniser ».
Il souhaite « défendre aux notaires non seulement d’entreprendre la conduite d’aucun procès mais encore de conseiller ou d’écrire pour aucune partie ». Dans le même temps, il se propose d’abolir « les appointements à mettre en droit au Conseil et les conclusions en procès par écrit ».

Verrier s’attache à réclamer, en conformité avec les ordonnances, les minutiers des notaires afin de les déposer au greffe de la Prévôté et se chargea, à partir de 1730, de la réforme de cette profession. Deux déclarations royales visant l’une la conservation des minutes des notaires et l’autre les actes notariés dans les colonies de l’Amérique organisent la pratique notariale dans la colonie avant la réforme menée par Verrier.

Appuyé par le notaire Christophe-Hilarion Du Laurent comme greffier, Verrier vérifia chaque acte dans les minutiers, organisa les documents et collecta des renseignements biographiques concernant les notaires concernés.

Obtenant le satisfecit élogieux du gouverneur Beauharnois et de l’intendant Hocquart à la lecture des huit premiers procès verbaux, le ministre lui annonça, après deux ans de cette tâche ingrate, qu’il désirait qu’il rédige trois déclarations concernant les « défectuosités des actes notariés, les contrats de mariage et l’imposition d’amendes aux notaires qui n’observaient pas les formalités requises ».

Une déclaration du Roi, en date du 9 mai 1733, obligera désormais chaque notaire à se procurer un registre coté et paraphé au premier et dernier feuillet, par le procureur du Roi, afin de servir de répertoire à l’enregistrement des actes qu’il devait recevoir, registre qu’il devait retourner entre les mains du procureur du Roi, une fois celui-ci rempli. L’action sur la norme est ici exemplaire : analyser la pratique, caractériser les défectuosités, obtenir la sanction royale afin de réformer la pratique pour l’avenir.

17
Q

Quel est l’adaptation du droit de la famille?

A

Âge du mariage (25 et 30 ans)

On trouve chez les administrateurs locaux des réticences à permettre aux parents de s’opposer au mariage de leur fille jusqu’à l’âge de 25 ans comme le leur permettait la Coutume de Paris.

«en 1668, il y a eu un arrest rendu au conseil de sa Majesté qui fait deffenses aux pères de s’opposer aux mariages de leurs garçons quand ils auront 20 ans, à peine d’amende» ainsi qu’aux jeunes filles de 16 ans.

Bégon face à la volonté royale, s’engage à exécuter l’arrêt «portant défense aux pères et mères de s’opposer aux mariages de leurs enfants, à savoir les garçons à 20 ans, et les filles à 16, et suivra exactement cette jurisprudence dans toutes les affaires qui viendront pardevant lui au sujet des mariages»

L’article 220 de la Coutume prévoit «qu’homme et femme conjoints ensemble par mariage sont communs en biens meubles et conquêts immeubles faits durant et constant ledit mariage. Et commence la communauté du jour des épousailles et bénédiction nuptiale».

Bourjon précise dans son Droit commun de la France et la Coutume de Paris réduit en principe que «[l]a Loi ou plutôt la Coutume, dans le cas que le contrat de mariage ne contient pas séparation contractuelle de biens, en donne l’administration à son mari, sa sagesse a tempéré cette dépendance, en assujettissant l’un au travail, dont elle exempte l’autre par sa faiblesse. Art. 233 de la Coutume de Paris». F. BOURJON, préc., p.2.

La communauté de meubles et d’acquêts est imposée par la Coutume de Paris. «Il faut cependant souligner que l’adoption de la communauté de meubles et d’acquêts a été progressive et librement consentie. Les époux montréalais se sont d’abord soumis volontairement au droit parisien pour établir leurs conventions matrimoniales».

Coutume de Paris, l’article 223 prévoit que

«[l]a femme mariée ne peut vendre, aliéner, ni hypothéquer ses héritages, sans l’autorité et consentement exprès de son mari. Et si elle fait aucun contrat sans l’autorité & consentement de sondit mari, tel contrat est nul tant pour le regard d’elle que de sondit mari, & n’en peut être poursuivie, ni ses héritiers après le décès de sondit mari». C. de FERRIÈRE, préc., p.22

L’article 22 de la Coutume prévoit que le «mari ne peut vendre, échanger, faire partage ou licitation, charger, obliger, ni hypothéquer le propre héritage de la femme, sans le consentement de sadite femme, & icelle de lui autorisée à cette fin». P.-L.C. GIN, préc., p.339.

Dans le cadre des besoins courants du ménage, la femme contracte valablement, s’acquittant ainsi de son rôle de maîtresse de maison tout en ne s’engageant pas personnellement, car elle agit alors selon Pothier, en vertu d’un mandat présumé que son mari lui aurait donné.

Robert-Joseph POTHIER, Traité du contrat de mariage et de la puissance du mari, Œuvres de Pothier, Tome septième, n°49, Siffrein, 1822.

Les femmes marchandes publiques peuvent disposer de nombreux avantages liés à leurs statuts si elles en remplissent les conditions. Sur la femme marchande publique selon la Nouvelle Coutume de Paris,

F. Bourjon décrit une jurisprudence relativement libérale de la part des juridictions parisiennes, permettant à un assez grand nombre d’actes de commerce d’accorder la qualité de marchande publique

18
Q

Quel est l’adaptation coloniale de la capacité juridique de la femme?

A

Exemple de collaboration

Les épouses des militaires gèrent bien souvent les biens de la Communauté. C’est le cas, par exemple, de Jean-Baptiste-Nicolas-Roch de Ramesay qui donne procuration à son épouse, Louise Godefroy de Tonnancourt en 1733, lorsqu’il est nommé commandant pour le poste de la pointe de Chagoamigon , puis en 1742, lorsqu’il est nommé au poste de Ouinipigon.

Pour les femmes en puissance de mari, tous les actes de la vie juridique nécessitent une autorisation, qu’elle provienne soit de leur mari directement, soit de la justice. Aux XVIe et XVIIIe siècles, la jurisprudence et les jurisconsultes semblent enclins à accentuer l’emprise des maris sur leurs femmes, qui voient se restreindre leurs possibilités d’agir au nom de leur époux.

Bourjon, dans son Droit commun de la France, rappelle d’ailleurs que «la femme en puissance de mari, ne peut contracter aucun engagement sans l’autorisation de son mari, le mariage la mettant sous sa puissance; c’est une disposition prudente & salutaire qui maintient la paix, conserve encore les biens de la communauté».

Pourtant puisque cette incapacité a «pour motif principal l’intérêt du mari, il la fait cesser en autorisant la femme; autorisation qui lève l’incapacité de cette dernière, autrement ce qui a été principalement en sa faveur, se repliroit & opéroit contre lui-même».

Les époux peuvent donc révoquer les actes et les actions intentées en justice par leur épouse. F. BOURJON, préc., p.501.

«[…] le 30 juillet 1686, Jacques de Lalande se prévaut de cette mesure» contre Marie Couillard, «qui a signé un billet pour des marchandises obtenues» durant l’un de ses voyages en France. «De Lalande refuse la dette, déclarant n’avoir eu connaissance de ce billet, étant en France». La prévôté de Québec lui donne raison.

19
Q

Quel est l’adaptation à la Coutume de Paris?

Donner un exemple a contrario

A

L’usage de la procuration, rendu indispensable dans la colonie lorsque le mari est appelé à s’éloigner régulièrement, est réglementé par l’article 223 de la Nouvelle Coutume de Paris. Un tel acte se révèle un gage de sécurité juridique pour les tiers à la communauté, et permet un développement économique indispensable à la Nouvelle-France.

Pour Bourjon, «Cette autorisation absolument nécessaire pour faire cesser l’incapacité de la femme, ne peut être supplée par aucun autre terme, elle doit être expresse; c’est rigueur à laquelle il faut se tenir, quoique l’exacte raison semble la rejeter».

Formalisme rigoureux en ce qui concerne les procurations, qui doivent être spéciales et expresses

A contrario
À Louisbourg, par exemple, le 19 juin 1737, le capitaine marchand et négociant Joseph Brisson décide, devant notaire, de confier par une procuration très large à sa femme Marie-Joseph Petit, le pouvoir «de par luy et en son nom, pendant son absence, d’acquérir, gérer et administrer toutes leurs affaires … de quelques natures qu’elles soient, comme de tenir les marchés qu’il pouvait avoir fait, en conclure de nouveaux, négocier avec leurs débiteurs, vendre et aliéner leurs biens en cas de nécessité et généralement faire tout ce que ledit Sr Brisson feroit s’il était présent en ces lieux, approuvant et ratifiant et trouvant pour agréable, tout ce que ladite Demoiselle fera».

DPPC 2109, CAOM, Aix-en-Provence, Greffes du Conseil Supérieur de Louisbourg-Isle Royale, Procuration donnée par Joseph Brisson à sa femme en date du 19 juin 1737 devant Claude Joseph Desmarest notaire royal à Louisbourg et deux témoins, fol. 389.

20
Q

Qui est et quel est le rôle du douaire?

A

À la mort de son mari, la veuve à droit au douaire coutumier, une pension qui doit la protéger de la pauvreté; c’est un droit qui porte sur la moitié des propres du mari, c’est-à-dire les fonds de terres, les édifices, rentes, offices…, consistant en l’usufruit, c’est-à-dire la jouissance, de certains des immeubles du mari, qui sont restés en dehors de la communauté.

La plupart des époux, au cours de leur mariage, n’ont pas d’immeuble pour servir de base à un douaire coutumier. Aussi, ils lui substituent un douaire conventionnel payable à l’épouse après la mort du mari et tiré sur tous les biens du mari. Un couple peut aussi convenir que le survivant acquerra, avant le partage, certains biens meubles ou une somme fixe de la communauté, un préciput, ou que, s’il n’y a pas d’enfant, l’époux survivant gardera le tout.

Lorsque les époux attendent des héritages, on en fait mention et on détermine s’ils seront compris dans la communauté ou non. Dans tous les cas, la veuve peut renoncer à sa part de la communauté lorsqu’elle est déficitaire, privilège prévu pour compenser la mauvaise administration du mari.

«Il faut cependant souligner que l’adoption de la communauté de meubles et d’acquêts a été progressive et librement consentie. Les époux montréalais se sont d’abord soumis volontairement au droit parisien pour établir leurs conventions matrimoniales», J.-M. Augustin, préc., p.19.

21
Q

En quoi consiste la conquête?

A

Les sources du droit français sont écartées; la pratique en Nouvelle-France; la coutume de Paris; la législation commerciale édictée spécifiquement par l’intendant et le Conseil souverain de 1663 à 1760; Ordonnance royale sur le commerce de 1673 et sur la Marine de 1681

Capitulations

Lors de la capitulation générale de Montréal, Amherst déclare que les québécois deviennent sujets du droit d’Angleterre, alors que les Français demandent le respect de la Coutume de Paris.

1759-60 Conquête de la Nouvelle-France
1763 Traité de Paris
1763 Proclamation royale (pose le statut juridique de la colonie)

22
Q

En quoi consiste la proclamation royale?

A

Du 7 octobre 1763

Le Traité de Paris cède la colonie aux anglais le 10 février 1763. Le roi d’Angleterre accorde la liberté de religion catholique, les Français ont 18 mois pour quitter les lieux et vendre aux britanniques.

Les fonctionnaires, quelques familles nobles, seigneurs quittent le territoire.

La plupart des marchands français restent.

Des marchands britanniques s’installent

La proclamation du 7 oct. 63 crée la Province de Québecet prévoit la création d’une assemblée législative chargées de légiférer avec le gouverneur conformément aux lois d’Angleterre, la mise en place du Droit anglais, et le Commerce libre des fourrures

C’était le parlement de Paris qui était compétent pour les questions d’administration coloniale, ainsi que le Conseil d’État du roi de France, avant que ces textes ne soient remplacés par le droit public d’origine britannique

Cugnet, lorsqu’il cherche à témoigner de ce droit public en 1774, indique l’importance de ce droit public d’origine française pour la conduite de la colonie

«J’ai cru qu’ayant rédigé mes deux traités de la loi des Fiefs, et des lois de propriété de cette province, je devais pour compléter mon ouvrage, et rendre en entier les lois municipales, en composer un troisième concernant la Police; cette partie si nécessaire au maintien du bon ordre, étant totalement négligée».

Il déplore dans son Traité de la police et son Traité de la loi sur les fiefs l’abandon des règles françaises en matière notamment de voirie et d’urbanisme suite à l’Acte de Québec: «Cette partie si nécessaire est entièrement négligée, elle demande un traité particulier des anciens usages, afin que les habitants puissent se rappeler leurs anciennes obligations, et les engager à les reprendre».

Comme le souligne Sylvio Normand, le droit de l’urbanisme et la police de manière générale furent des domaines totalement modifiés par les Britanniques, qui font passer les nouveaux sujets «d’une réglementation tatillonne à une liberté sans frein», tant dans l’évolution de l’urbanisme que des règles de commerce.

Informé des difficultés exposées dans les travaux de Cugnet, le législateur colonial intervient et rétablit des règles proches des normes françaises, renvoyant pour partie aux «anciens usages et coutumes du pays» et pour partie établissant des règles spécifiques.

23
Q

Quels sont les décisions post proclamation 1763?

A

Le gouverneur peut constituer les tribunaux sans l’assemblée.

Ces tribunaux doivent appliquer le droit anglais, la loi et l’équité (equity dans la version anglaise) conformément autant que possible aux lois anglaises.

Les contemporains et la Cour du Banc du Roi (Campbell c. Hall 1774) vont en déduire que la Common law doit être appliquée à la colonie.

Le serment du Test exclut les Français du gouvernement. Le gouvernement civil débute en août 1764, avec la nomination de Murray à la tête de la Province.

Le 17 septembre 1764, le conseil du gouverneur édicte l’Ordonnance établissant les Cours civiles.

Murray crée deux tribunaux distincts ayant une compétence concurrente en matière civile, le Banc du roi connaît les causes civiles et criminelles selon les lois anglaises, alors que la Cour des plaids communs peut juger des procès civils.

La cour des plaids communs doit juger selon «l’équité» «en tenant compte des lois d’Angleterre autant que les circonstances et l’état actuel des choses le permettent (…)».

En fait cette équité consiste dans les lois françaises appliquées jusqu’alors dans la colonie. Trois juges qui parlent peu français sont nommés à cette cour.

Les parties ont la faculté d’obtenir un procès devant jury. La Cour des plaids communs est en fait créée au profit des Canadiens français…et constitue dès lors une épine dans le pied des marchands anglais

24
Q

Qu’est-ce qui se passe après l’Acte de Québec?

A

Abandon du Serment du test

Nomination des premiers juges francophones

Transposition de certaines normes britanniques

Relativement peu de normes bas canadiennes ou haut canadienne

Diapo 57 (schéma)

25
Q

L’ombre portée du juge Sewell: la prépondérance britannique

A

Archétype du magistrat «britannique»

1793, le gouverneur Carleton, et le juge en chef Smith proposent sa nomination aux fonctions de solliciteur général et d’inspecteur du domaine du roi

Soulignant la «profonde ignorance» caractéristique du peuple canadien, il fustige les «prétendus griefs» des Canadiens

Prédominance de la pensée juridique britannique

Problème de l’enregistrement du « Code Marine » ou de l’ordonnance sur le commerce

Après l’apriori, la réalité des références civilistes

26
Q

ARRÊT SLIDE 60

A