CHAMP D’APPLICATION RATIONE MATERIAE DU DIH Flashcards
CONTEXTE
Le DIH ne s’applique qu’en cas de conflit armé, c’est le fait condition pour déclencher son application (Charles Rousseau). Notion qui a remplacé la notion de «guerre», elle se veut + englobante et prend en compte d’autres types d’affrontements interdits que la guerre à proprement parler
-> art 2 commun CG 1949 traduit cette volonté : «la présente Convention s’appliquera en cas de guerre déclarée ou de tout autre conflit armé surgissant entre deux ou plusieurs parties».
-> avec cet article, le DIH s’applique dès qu’un conflit armé est objectivement identifiable (≠ reconnaissance subjective par la déclaration de guerre).
L’existence d’un conflit armé
Définition conflit armé : Pas de définition conventionnelle. C’est TPIY, Tadic, 1995 qui définit le conflit armé pour la première fois = tout recours à la force armée entre deux Etats ou conflit armé prolongé entre les forces gouvernementales d’un Etat et un groupe armé organisé ou entre ceci sur le territoire d’un Etat». -> dès que l’un de ces contexte est identifié, tous les actes qui y sont relatifs sont soumis au DIH. -> suppose des acteurs BELLIGÉRANTS.
La situation de neutralité
La neutralité est désignée en opposition à la belligérance. Si un conflit armé éclate, des Etats y seront parties, et d’autres non, ils seront donc neutres vis-à-vis du conflit. -> le DIH protège ces Etats neutres.-> le droit de la neutralité est coutumier et est donc opposable à tous les Etats (CIJ, avis sur le nucléaire, 1996) et a été codifié aux CG V + CLH XIII.
Le statut d’Etat neutre confère une protection mais pose aussi des obligations :
- droits : ne pas faire l’objet d’attaques par les belligérants ; la protection des personnes vivant sur le territoire..
- Obligations de neutralité : ne pas apporter de soutien à l’un des belligérant ; de ne pas laisser utiliser/traverser son territoire par l’un des belligérant (ex de la Biélorussie) ; d’arrêter et de détenir tout combattant qui arriverait sur le territoire.
-> Nouveaux enjeux du droit de la neutralité : doctrine de la «neutralité qualifiée» = l’aide apportée à un Etat dans le cadre de sa légitime défense fait-il perdre le statut d’Etat neutre ? La CLH n’interdit pas la vente d’armes par l’Etat neutre si légitime défense. L’Etat qui le ferait perdrait son statut de neutralité MAIS n’aurait pas violé la règle de neutralité -> donc ne pourra pas voir sa responsabilité engagée pour avoir aidé un Etat belligérant dans ce cas. (≠ envoi de troupes officielles).
CAI ET CANI
Contexte : pour que le DIH s’applique, il faut un conflit armé. 2 types :
- CAI
- CANI
CAI (contexte)
Art 3 commun CG : il y a CAI en cas de conflit armé interétatique ; de guerre de décolonisation ou de situation d’occupation.
CAI (critère)
INTENTION BELLIGÉRANTE : Comme le conflit armé est désormais un fait objectif (déduite d’affrontements existants, sans besoin d’un élément subjectif tenant à une déclaration de guerre ou à la reconnaissance du statut de belligérant), son identification repose sur des critères objectifs : l’intention belligérante attribuable à un Etat.
-> C’est cette intention, soit d’attaquer, soit de se défendre, qui permet d’identifier un CAI (≠ hypothèse d’une erreur ou si l’intention est attribuable à un groupe privé qui n’est pas assimilé à un organe de l’Etat).
Seuil d’intensité ou durée exigée ? NON : «la durée du conflit, ni le caractère plus ou moins meurtrier de ses effets, ne joue aucun rôle sur la qualification du CAI» (CICR). ≠ CANI.
CAI (types)
3 situations susceptibles de CAI :
- conflit intérétatique
- guerre de déconolonisation
- guerres de libération nationale
Conflit intérétatique
Il y a CAI en cas de recours à la force armée entre deux ou plusieurs Etats (TPIY, Tadic). Pour que le DIH s’applique, les opérations militaires doivent être SOIT officiellement attribuables à un Etat (de jure) SOIT attribuables à l’Etat en raison du contrôle exercé sur des personnes qui ne sont pas des organes de l’Etat mais qui y sont assimilées (de facto) :
- de jure : On regarde si ce sont deux armées officielles qui s’affrontent = critère objectif.
- De facto : Guerre RU/Afghanistan : Britanniques considèrent que la guerre en Afghanistan est un CAI en démontrant que les actes d’AL Qaida ont bénéficié du soutien des talibans, donc les actes de ce groupe terroriste sont attribuables à l’Afghanistan (les talibans ne faisaient rien pour empêcher les actions d’Al Qaida + confusion de leurs actions). DONC si des preuves permettent de rattacher les actions d’un groupe à un Etat, on est dans le cadre d’un CAI, donc le DIH s’applique.
Les guerres de décolonisation
Ce sont les conflits armés entre un Etat et un mouvement de libération nationale = entité qui s’autoproclame comme représentant un peuple colonisé et lutte pour son indépendance et un Etat colonisateur -> cet entité est un Etat en devenir (droit à l’autodétermination externe), donc le conflit est un CAI.
Critère : il faut un peuple colonisé :
- culturellement distinct de l’Etat colonisateur.
- victime de discrimination : il n’a pas les mêmes droits que les citoyens de l’Etat d’origine.
- Une séparation géographique entre l’Etat colonisateur et l’Etat colonisé : «critère de la mer». Il faut une vraie séparation.
Les guerres de libération nationale
Art 1 §4 PA I CG 1977 prévoit que sont des conflits armés internationaux auxquels s’appliquera le protocole, «les conflits armés dans lesquels les peuples luttent contre la domination coloniale et l’occupation étrangère et contre les régimes racistes dans l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes». DONC ces guerres sont autorisées par le Droit international et qualifiées de CAI, si situation de :
- Guerre contre la domination coloniale : menée par des peuples colonisés sur des territoires considérés non autonomes par l’ONU.
- Guerre contre occupation étrangère : liée soit à une domination coloniale soit à un régime raciste (ex : occupation de la Namibie par l’Afrique du Sud ; occupation par le Maroc du Sahara occidental).
- Guerre contre les régimes racistes : guerres menées en Afrique du Sud ou en Rhodésie contre les régimes d’apartheid (lutte de Mandela). En effet, si on considérait que c’était du droit interne, ces peuples n’auraient bénéficié d’aucune protection (car ils sont justement persécutés par leur Etat). C’est une manière de protéger l’humain.
LE CANI (contexte et définition)
Définition : Art 1 PA II CG : conflit qui n’est pas international et qui se déroule sur le territoire d’un Etat entre ses forces armées et des forces dissidentes ou des groupes armés organisés ;
Art 8-2-f SDR + TPIY, Tadic : conflit qui oppose de manière prolongée, sur le territoire d’un Etat, l’armée de cet Etat à des groupes armés OU entre des groupes armés entre eux -> exclusion des troubles internes. Il faut donc que le conflit ait atteint un certain seuil d’intensité.
Critères :
- seuil d’intensité
- contrôle territorial
- groupe armé organisé
LE CANI (seul d’intensité)
Pour qu’une situation interne soit qualifiée de CANI, elle doit atteindre une intensité qui dépasse les capacités des opérations de police habituelles en temps de paix et doit exiger l’intervention des forces armées. Indices d’intensité (TPIY, Haradinaj, 2008) :
- le nombre d’affrontements
- Le type d’armes (à feu, avion, tank..) de matériel militaire et de munitions (+ grand, + CANI) utilisés
- Le nombre de personnes et le type de force engagée dans les combats : des hommes en âge de combattre ? Militaires ?
- Le nombre de victimes
- L’étendue des destructions matérielles (immeubles, églises, temples, mosquées, routes..)
- Le nombre de civils ayant fui : les conflits armés génèrent des réfugiés. C’est un critère. Si civils fuient, c’est un conflit armé.
- Saisie de la question/prise de position par le CSNU : indice d’internationalisation de la situation car le CSNU ne s’intéresse qu’aux situations susceptibles de menacer la paix et la sécurité internationales.
Quid de la durée ? La définition du SDR parle de «conflit armé prolongé», mais en DIH, ça n’est pas un critère : (absent de l’art 3 commun et du PA II), la notion de prolongation est déduite de l’intensité des violences.
LE CANI (contrôle territorial)
Appréciation diffère selon les sources du DIH : art 3 commun est relatif au contrôle territorial exercé par l’Etat alors que le PA II exige un contrôle territorial effectif du groupe armé.
Donc selon les circonstances du conflit, les sources à appliquer diffèrent.
LE CANI (un groupe armé organisé)
Pour qu’il y ait un CANI, il faut des affrontements entre GAO et Etat ou entre GAO. Différents critères d’identification du GAO :
La jurisprudence est unanime : il faut un élément de structure, une capacité à s’organiser pour considérer le groupe comme organisé. CICR parle d’une «organisation suffisante pour concevoir et mener des opérations militaires continues et concertéesET pour imposer une discipline au nom d’une autorité de fait»
-> TPIY, Haradinaj, 29 novembre 2012 : Le tribunal identifie plusieurs critères pour déterminer le commandement organisé :
- une structure de commandement : Le groupe doit être capable de faire respecter la hiérarchie qui existe en son sein par des règles disciplinaires dans le cadre d’une chaîne de commandement = système de communication au sein du groupe, ordres donnés et exécutés. (chef, sous chef, exécutants..).
- Une capacité à définir une stratégie unique et à mener des actions militaires
- Un certain niveau de logistique : être capable de se procurer des armes, de recruter des combattants, de donner des instructions pour les mouvements des troupes au sol.
- Des règles de discipline et existence d’un système d’application de ces règles
- Une capacité à parler d’une seule voix, dans l’objectif de conclure un cessez-le-feu ou des accords de paix :
Le conflit armé internationalisé
Situation d’un CANI qui va devenir CAI en raison :
- de l’intervention d’un ou plusieurs Etats tiers
- de l’intervention de forces multinationales