CHAMP D’APPLIATION RATIONE PERSONAE DU DIH Flashcards
CONTEXTE
Question de savoir A QUI s’applique le DIH (qui a l’obligation de le respecter, qui en bénéficie)
LES DESTINATAIRES DU DIH (contexte)
A quel titre les acteurs du DIH sont-ils contraints de respecter le DIH ? Quel est le fondement à l’obligation du respect du DIH ? 4 destinaires :
- les Etats
- les entités non étatiques
- les OI
- les individus
-> les règles du DIH ont des origines conventionnelles mais aussi coutumières. Donc elle s’appliquent à une large catégorie d’acteurs.
Les ÉTATS (fondement de l’obligation)
La ratification des instruments du DIH par les Etats - fondement de l’obligation de soumission au DIH. MAIS il faut vérifier que l’Etat soit partie au traité ET qu’il n’ait pas posé de réserve à l’une des conventions du DIH = déclaration d’un Etat qui adhère au texte mais qui décide d’exclure l’application d’une disposition particulière de ce texte.
-> Les réserves connues :
- Art 44 du Règlement de la Haye de 1907 : avec cette réserve, les États peuvent « forcer » la population à trahir.
- Réserve au Protocole de Genève,1925 (ancêtre des conventions contre les armes chimiques et biologiques) : permet aux Etats d’utiliser des gaz asphyxiants, toxiques ou similaires et des moyens bactériologiques En 1996 l’AGNU a demandé aux 36 Etats concernés par cette réserve de la retirer (ce qui n’a pas été fait).
- Réserve à la CG III : protection des prisonniers de guerre peu importe les actes qu’ils ont commis. Avec cette réserve, si un prisonnier de guerre est reconnu coupable de CG ou de CCH, il ne peut plus bénéficier de la protection de cette convention.
-Réserve à l’article 68 de la CG IV : un Etat occupant doit appliquer le droit pénal du territoire occupé. Avec cette réserve, les Etats qui agiraient comme puissante occupante s’autorisent à remplacer la règle interne par leur propre règle.
-> Les Etats sont les premiers destinataires du DIH via la ratification des instruments du DIH, mais les réserves - lorsqu’elles existent - sont susceptibles d’atténuer la portée des obligations posées dans les traités.
Les Etats (obligations)
3 obligations pèsent sur les Etats
- Obligation de respecter le DIH en toute circonstances
- obligation de prévenir toute violation du DIH
- ## obligation d’enquêter, poursuivre ou extrader
L’obligation de respecter le DIH en toute circonstances
2 implications :
- L’obligation de s’abstenir de toute violation du DIH : Toutes circonstances» s’entend comme une règle de non réciprocité = même si la partie adverse ne respecte pas le DIH, l’autre est tenue de continuer à le respecter. Plusieurs conséquences :
- le non respect d’un traité de DIHH n’est pas susceptible d’entraîner sa suspension ou sa dénonciation par les autres parties :
- Si un Etat décide de se retirer du traité pendant un conflit armé : le retrait ne prend effet qu’à la fin du conflit.
- L’obligation de garantir la mise en oeuvre et l’application du DIH par ses ressortissants et/ou sur son territoire : Chaque Etat a l’obligation de s’assurer du respect du DIH par ses ressortissants ET/OU de s’assurer du respect du DIH sur son territoire.
L’obligation de prévenir toute violation du DIH
Cette obligation suppose plusieurs actions de l’Etat lié par l’obligation de garantie et de mise en oeuvre du DIH.
- l’obligation d’intégrer le DIH dans le droit interne : les Conventions de Genève exigent expressément que les Etats prennent toutes mesures législatives nécessaires pour fixer les sanctions pénales adéquates à appliquer aux personnes ayant commis ou donné l’ordre de commettre des infractions graves au DIH (système moniste).
- L’obligation d’intégrer le DIH au programme de formation et d’instruction militaire :
- L’obligation de former des conseillers juridiques : Le CICR encourage la création de commissions nationales ou des instances qui non seulement font un rapport sur l’application du DIH par les Etats, mais sont aussi observateurs du respect du DIH par les Etats. En France, l’instance qui a cette fonction de veiller à la bonne application du DIH est la CNDDH (commission nationale des droits de l’homme).
L’obligation d’enquêter, de poursuivre ou d’extrader
Les crimes de guerres sont IMPRESCRIPTIBLES : quelque soit le moment où l’accusé est identifié, il pourra être jugé (sauf s’il est mort). Cette obligation implique :
- l’obligation de rechercher les personnes suspectées d’avoir commis des infractions graves au DIH qualifiables de crimes de guerre : une fois la personne identifié, l’Etat a SOIT l’obligation de la juger, quelque soit sa nationalité, SOIT - à défaut de compétence - l’obligation d’extrader la personne vers une juridiction compétente.
- L’obligation de prévoir une compétence universelle pour les infractions graves : les conventions de Genève exigent des Etats qu’ils prévoient dans leur législation interne une compétence pour pouvoir juger toute personne auteur de crime de guerre. Mais seulement 100 Etats ont cette compétence, qui en plus n’est pas homogène (pas les mêmes critères selon le droit interne..). Toutefois, depuis la guerre en Syrie, le nombre de criminels de guerre jugés par la compétence universelle a explosé.
LES GROUPES ARMÉS NON ÉTATIQUES
3 catégories de groupes non étatiques soumis à l’obligation de respect du DIH
- les mouvements de libération nationale
- les collectivités infra étatiques
- les groupes armés
Les mouvements de libération nationale
Les MLN sont destinataires du DIH à deux conditions :
- être en lutte contre un Etat partie aux conventions de Genève
- Avoir consenti au respect du DIH : déclaration d’application des Conventions de Genève et des protocoles additionnels adressée à la Suisse (dépositaire des CG). Ce qu’a fait l’ANC (MLN Sud-africain), L’OLP (déclaration 1982) et Le Front Polisario (déclaration 2015).
-> les MLN ne sont pas des Etats, ils ne peuvent pas ratifier les Conventions de Genève. L’application se fait pas une déclaration consistant en un engagement au respect du DIH. Mais ça ne fait pas des MLN des parties.
Les collectivités infra étatiques
Ce sont les forces armées régulières qui se réclament comme appartenant à un gouvernement ou à une autorité non reconnue par la puissance détentrice (Ex, Guerre du Biafra au Nigeria).
-> 2 conditions pour que des entités non étatiques soient destinataires du DIH :
- engagement àrespecter le DIH par une déclaration auprès de la Suisse.
- un contrôle réel sur le territoire qu’elle prétend administrer et sur la population qui y vit.
-> si la collectivité remplit ces conditions, elle est considérée comme un destinataire du DIH et se voit donc conférer une protection + obligation de respect.
Les groupes armés
La question des groupes armés se pose à l’origine dans le contexte de CANI. Le groupe armé n’est par définition pas en capacité de ratifier des instruments internationaux, mais c’est un destinataire du DIH pour plusieurs raisons :
- présence sur le territoire d’un Etat ayant ratifié les conventions : dans ce cas, tous les ressortissants de cet Etat doivent appliquer les textes ratifiés. La règle s’applique d’autant + lorsque le conflit a lieu sur le territoire de l’Etat en question.
- Groupe agissant pour un Etat ayant ratifié les conventions : dans ce cas, le groupe armé devient un organe de facto de l’Etat et est donc lié par les engagements internationaux de ce dernier.
- Accord conclu entre le groupe armé et les belligérants prévoyant l’engagement réciproque au respect du DIH (ex : conflit entre les groupes armés de Bosnie et de Serbie à l’égard de la Bosnie).
Indices allant en ce sens :
- Les prises de positions internationales + JP qui affirment que les groupes armés sont liées par le DIH.
- La notion de «tous les groupes « et «toutes les parties» à laquelle l’ONU se réfère en temps de conflit
- L’institut du Droit international : En1999, IDI indique que tous les GA dans un CA sont liés par le DIH et DIDH (pas contraignant mais indice d’une règle coutumière).
- TSSL (Tribunal Spécial pour la Sierra Leone), Affaire Norman, 2004 : “toutes les parties à un conflit d’arme qu’ils s’agissent d’E ou d’un acteur non étatique sont liées par le DIH.
LES ORGANISATIONS INTERNATIONALES (fondements de l’obligation)
Les instruments du DIH ne sont ouverts qu’à la ratification des Etats. Mais en tant que sujet du DI, les OI ont l’obligation de respecter le DI, y compris le DIH.
Positions des institutions en ce sens :
- institut du droit international (1971) : toutes les règles du DIH sont applicables de plein droit à l’ONU et doivent être respectées en toute circonstance par les forces lorsqu’elles sont engagées». Donc les OMP, lorsqu’elles sont décidées et envoyées par l’ONU, doivent respecter en toutes circonstances le DIH.
- CICR : consacre la position de l’IDI en 1993 : le DIH s’applique à toutes les forces armées de l’ONU.
- ONU :
- 1956 : s’engage elle-même à repêcher les principes et règles des CG -> règle coutumière qui figure dans tous les règlements de création des OMP.
- 1990-1992 : l’obligation est inscrite dans les accords entre Etat d’envoi de l’OMP et Etat d’accueil de l’OMP (accord type) -> les 2 s’engagent à respecter le DIH, donc l’ONU devient responsable des dommages causés par ses forces, mais c’est à l’Etat d’envoi de sanctionner les auteurs de violation (partage de responsabilité entre la réparation qui revient à l’ONU et la sanction pénale qui revient à l’Etat d’envoi).
- 1994 : art 20 convention sur la sécurité du personnel de l’ONU et du personnel associé prévoit que le DIH s’applique à toutes les opérations de l’ONU (protection + obligation).
- 1999 : acte contraignant du SGNU qui codifie l’ensemble des règles sur le sujet.
LES ORGANISATIONS INTERNATIONALES (conséquences de l’obligation du respect du DIH).
La question des conséquences de l’obligation du respect du DIH pour les OI renvoie à la responsabilité internationale pour :
- les violations commises dans le cadre des fonctions
- les violations commises en dehors du cadre des fonctions
Violations commises dans le cadre des fonctions
OMP = organe ad hoc de l’ONU crée par le CSNU pour une mission spécifique. Casques bleus = fonctionnaires de l’ONU et bénéficient des immunités -> uniquement pour les actions commises dans le cadre de ses missions.
-> la responsabilité revient à la personne qui avait le CONTRÔLE EFECTIF de l’OMP :
- Si SGNU : responsabilité ONU. Art 8 projet sur la responsabilité des OI : le comportement d’un organe est considéré comme un fait de cette OI si l’organe ou l’agent agit en qualité officielle et dans le cadre de ses fonctions. Valable même si action ultra vires !
- Si Etat d’envoi : situation dans laquelle une OMP est exclusivement composée des combattants d’un seul Etat (ex : à Srebrenica, les casques bleus néerlandais ont manqué à leur mission de protection des musulmans. Or, ils agissaient sur les ordres de la Dutch Bat, au nom du gouvernement irlandais. Pas de lien de commandement entre le SGNU et la Dutch Bat, donc les faits illicites sont attribuables au gouvernement des Pays-Bas.
Violation en dehors du cadre des fonctions
Situation dans laquelle le casque bleu est hors service, il n’agit pas en qualité officielle. -> 1993 : le SGNU considère que l’ONU peut être considérée comme responsable du fait d’un acte commis par un agent international, même en dehors de ses fonctions. MAIS dans cette hypothèse, l’ONU aura le droit de se retourner contre l’Etat d’envoi = responsabilité en 2 temps.
-> Preuve difficile : Affaire Sangaris : Des enquêtes d’ONG révèlent que des militaires FR auraient violé des enfants, de manière organisée avec des soldats de l’Etat d’accueil. Une enquête FR a été lancée, avec une seule mise en examen, mais en 2018, une ordonnance de non lieu a été prononcée pour manque de preuve.
Quid si c’est un agent de l’Etat et non d’une OI qui a commis la violation ? En DIH, la responsabilité de l’Etat pour violation du DIH par un agent étatique joue quelle que soit la nature de l’acte de l’agent, qu’il soit de nature privée ou officielle. Idée qu’aucun acte n’échappe à la responsabilité pour violation du DIH. Donc engagement de la resp de l’agent ET DE L’ÉTAT.