AVRIL 10- TROUBLES RÉACTIONNELS, RÉACTIONS TRAUMATIQUES AU STRESS, ÉTATS LIÉS À LA NÉGLIGENCE ET À LA MALTRAITANCE Flashcards

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Q

TROUBLES RÉACTIONNELS,

RÉACTIONS TRAUMATIQUES AU STRESS, ÉTATS LIÉS À LA NÉGLIGENCE ET À LA MALTRAITANCE

A

Ont en commun la nature de leur étiologie.
= causes issues de l’environnement.

enfants en cours de développement=> le stress a sur eux un impact plus complexe et souvent plus durable avec non seulement des effets immédiats (anxiété, agitation), mais aussi influence négative sur le cours de leur développement.

Lorsque les sources de stress sont chroniques, les effets sont particulièrement négatifs

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Q

Troubles réactionnels

A

Comme pour l’adulte, les stress de la vie peuvent perturber le fonctionnement psychique des enfants. en présentant transitoirement divers symptômes d’anxiété, de dépression ou d’agitation.

Le stress est une composante normale de la vie, Tenter d’éviter tout stress à un enfant (comme le recommandaient certains manuels des années 60) conduit à le gâter et à moyen terme à le rendre égocentrique, exigeant et incompétent. Un montant raisonnable de stress est donc nécessaire pour apprendre à l’enfant le contrôle de soi et la tolérance à la frustration.

Sémiologie

Lorsque l’enfant est soumis à un montant de stress exagéré, il peut y réagir par de l’agitation, des colères, de l’agressivité vis-à-vis de ses pairs, une baisse du rendement scolaire ou des troubles du sommeil (sommeil agité, cauchemars). Le tableau peut se présenter sous forme de troubles anxieux, avec anxiété de séparation, peur de la nouveauté, ou sous forme de trouble oppositionnel avec désobéissance, impolitesse, esprit d’opposition. L’adolescent, de son côté, peut devenir irritable, renfermé, déprimé ou au contraire avoir des comportements à risque (par ex. : abus d’alcool, promiscuité sexuelle). La communication avec les adultes est difficile.

Étiologie Les troubles réactionnels sont par définition provoqués par des stress. Parmi les plus fréquents on peut citer le divorce des parents, la perte d’un proche, les accidents, les changements de situation (par ex. : déménagement), des agressions ou sévices sexuels subis en dehors de la famille. Tous les enfants sujets à des stress ne présentent pas des perturbations psychologiques. Leurs réactions dépendent de plusieurs facteurs : la nature du stress, la personnalité de l’enfant et en particulier sa sensibilité au stress, son stade de développement et la façon dont il interprète le stress et enfin le soutien qu’il trouve au sein de son foyer. La nature du stress explique en partie la réaction qui en découle. La plupart du temps, les pertes (décès d’un proche) conduisent à des réactions de type dépressif, les accidents (accident de la route, incendie) à des réactions de type anxieux. De façon générale, on peut dire que les stress amplifient les tendances pré-existantes de l’enfant: s’il est de nature anxieuse, il peut, une fois confronté à un stress, réagir par des réactions d’évitement et une anxiété de séparation. S’il est plus exubérant, il peut devenir agité et agressif, avec ses pairs ou avec les adultes. Le stade de développement de l’enfant, ses expériences passées et son tempérament influencent l’interprétation personnelle qu’il peut avoir de la situation stressante. C’est ainsi que le petit enfant, lors du décès d’un parent, peut avoir des craintes de perdre ou d’être abandonné par le parent survivant. Un enfant un peu plus âgé peut se demander ce qu’il aurait pu faire pour garder le parent décédé en vie. Un jeune adolescent peut se sentir seul et éprouver du ressentiment contre la personne disparue ou contre le sort. Le divorce entraîne des réactions diverses, en partie parce qu’elles dépendent des interprétations que les enfants s’en font. L’enfant peut être affecté dans son sentiment de sécurité et d’attachement (s’il se croit abandonné par le parent qui part), dans son estime de soi (s’il pense que le parent absent ne tient pas à lui), dans son sentiment de stabilité (s’il change de maison, de voisinage, d’amis). La manière dont un enfant gère un stress dépend en grande partie du climat affectif qui règne dans la famille, ainsi que de la compréhension et du soutien dont il bénéficie par rapport à ce qu’il a vécu. Même un traumatisme important, tel qu’un viol, peut être assimilé si l’enfant est bien accompagné psychologiquement par sa famille. Par ailleurs, il faut distinguer les stress qui ont un impact direct sur l’enfant de ceux dont l’impact concerne surtout la famille. La perte d’emploi d’un parent ou la pauvreté sont des stress qui affectent la famille et non spécifiquement l’enfant. Dans ces derniers cas, la nature stressante de l’événement pour l’enfant dépend de la manière dont le stress est géré à l’intérieur de la famille (comment l’enfant est informé et impliqué).

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Q

Réactions traumatiques au stress

A

Lorsqu’il s’agit d’un stress intense de nature exceptionnelle, l’enfant peut réagir par des symptômes chroniques reliés spécifiquement à l’événement traumatique. L’expression “réaction traumatique au stress” est préférée à celle de “syndrome de stress post-traumatique” (expression consacrée aux adultes) pour marquer la nature plus variable et plus complexe des réactions enfantines (Yule, 1999).

Sémiologie

Certains stress sortent de l’ordinaire, c’est-à-dire qu’ils ne font pas partie des expériences de vie de l’individu moyen. On peut citer le viol, une agression physique, un accident de la route, un incendie de son logement, la guerre… Dans ces cas, la réaction au stress est plus sévère et plus chronique qu’elle ne l’est dans le trouble réactionnel. Elle comporte des symptômes spécifiques (décrits ci-dessous). Les symptômes se distinguent selon qu’ils se rapportent directement au traumatisme, qu’ils relèvent de phénomènes anxieux plus diffus ou de séquelles cognitives. 1. Composante traumatique: les enfants et les adolescents sont envahis par des réminiscences intrusives à propos du traumatisme : des souvenirs de l’événement très chargés émotionnellement leur reviennent de façon involontaire. Dans les cas les plus graves, l’enfant peut revivre l’événement comme s’il se déroulait dans le présent (il peut en revoir mentalement des scènes et se sentir envahi du même sentiment de terreur que lors de l’événement, un détail de l’environnement peut déclencher une attaque de panique ou un épisode dissociatif). Il peut alors agir en conséquence (se figer ou se débattre, frapper, pleurer). Parfois l’enfant est décrit comme étant “dans la lune”, “ailleurs”, “absent” “dans son monde”. Ces phénomènes de réminiscences et de reviviscences ressemblent à des expériences dissociatives (l’individu est conscient de l’environnement dans lequel il se trouve mais en est détaché ; il est avant tout préoccupé par des pensées liés au traumatisme, il est dans un état second). Ils apparaissent souvent dans les jeux ou les dessins de l’enfant. Les phobies et l’évitement relatifs aux lieux, aux personnes ou aux objets en rapport avec le traumatisme sont fréquents (par exemple une victime de viol ne veut plus aller aux toilettes ou monter dans une voiture inconnue parce que c’est dans ce type de lieu que s’est déroulé l’agression). 2. Composante anxieuse : Le sommeil perturbé est un symptôme très courant, avec peur du noir, cauchemars, terreurs nocturnes, somnambulisme. L’anxiété de séparation est fréquente, même chez les adolescents. Les plus jeunes insistent pour dormir avec leurs parents. Des peurs voire des phobies sans rapport apparent avec le traumatisme peuvent également apparaître. L’enfant est irritable et sujet à des crises de colère; son seuil de frustration est abaissé. Il vit dans un état d’alerte continu. 3. Composante cognitive : Immédiatement après le traumatisme, l’enfant peut présenter un besoin incoercible de parler de ce qu’il a vécu. Mais dans un deuxième temps, il se montre réticent à parler de ses émotions, même avec ses proches. Ses raisons peuvent être diverses : il craint de les bouleverser, il a honte, il se sent responsable, il préfère ne pas penser. On note par ailleurs des difficultés de concentration, des problèmes de mémoire, des troubles du langage (mutisme, bégaiement), ainsi que des moments d’inattention. Le rendement scolaire peut s’en trouver affecté. La réaction des adolescents se rapproche de celle des adultes. La composante dépressive peut y être très importante et s’ajouter à la composante anxieuse. Il peut y avoir des attaques de panique et des réactions phobiques extrêmes. 4. Considérations développementales La signification attribuée à un même événement traumatique peut différer considérablement de l’enfant à l’adulte. Un tout petit peut par exemple ne pas comprendre la signification véritable d’un accident, en particulier s’il est accompagné d’une personne qui le rassure. Très jeune, l’enfant peut ne pas saisir la nature sexuelle d’une agression de ce type; c’est la violence et la coercition qui l’impressionnent. On doit donc connaître la signification que l’enfant attribue à la situation traumatisante pour comprendre les symptômes que celle-ci a engendrés. En partant de ce principe, on peut comprendre certains faits : -Presque tous les enfants sont sensibles à l’aspect agressif ou coercitif d’un acte. La violence indique clairement qui est le coupable. Pour cette raison, un enfant brutalisé peut, dans une certaine mesure, gérer plus facilement un traumatisme qu’un enfant qui a été séduit ou exploité. -La jeunesse de l’enfant ne constitue pas nécessairement un facteur aggravant. -Bien que de façon générale, l’intelligence puisse considérablement aider l’enfant à gérer le stress, elle peut, en même temps, le rendre plus conscient du danger ou des implications d’un stress et de ce fait le rendre plus vulnérable. -Certains traumatismes, en particulier ceux de nature sexuelle, peuvent entraîner de graves séquelles bien après l’événement. C’est ainsi qu’à l’adolescence, bien des victimes réalisent la nature sexuelle des sévices vécus pendant l’enfance. C’est à cette époque tardive que doivent être gérées les émotions que cette prise de conscience entraîne.

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Q

Effets de la négligence et de la maltraitance

A

La négligence émotionnelle ou physique peut être le prélude à la maltraitance et aux sévices sexuels, dans la mesure où l’enfant n’est pas protégé contre les dangers et en particulier contre les adultes malveillants. Ces circonstances de négligence ou de maltraitance peuvent entraîner un état mental particulier ainsi que des problèmes de développement.

De plus en plus, les chercheurs réalisent que le stress ne résulte pas toujours d’un événement traumatique unique, mais tout aussi fréquemment d’une situation stressante chronique ou à répétition. Ils constatent par ailleurs que ce ne sont pas les éléments objectifs d’une situation qui importent le plus, mais plutôt leur valeur subjective. Ces deux constatations permettent de comprendre pourquoi dans le cadre des relations interpersonnelles, le stress peut être plus intense et durable. Etant donné que c’est au sein de la famille que l’identité de l’enfant se forme, l’impact des traumatismes qui surviennent dans ce contexte sont généralement plus importants qu’ailleurs. C’est ainsi que les études sur le stress chez les enfants se sont peu à peu rapprochées des études sur la négligence et sur la maltraitance. Ces dernières s’étaient développées de façon quelque peu marginale, car elles répondaient à une urgence pratique plutôt qu’à un besoin théorique. Elles portaient sur les stresseurs plus que sur les enfants. On observe à l’heure actuelle une convergence de ces deux types de recherches. La négligence et la maltraitance ne sont pas des conditions psychopathologiques de l’enfant ou de l’adolescent. Elles concernent l’étiologie, à savoir la négligence ou les agissements d’individus à leur encontre, dans un contexte familier. Leurs causes (c’est-à-dire les raisons qui conduisent les adultes à négliger ou à maltraiter les enfants) ne seront pas abordées car elles ne renvoient pas directement à un tableau symptomatique spécifique de l’enfant. Notre propos est plutôt d’en décrire les effets possibles. Le terme de “maltraitance” est un terme vague qui se réfère aux cas où un adulte recourt à des méthodes coercitives vis-à-vis d’un enfant. Cependant dans son sens restreint, il renvoie aux cas chroniques, dont les acteurs sont des proches. Lorsque le stress est issu de la famille et s’étale sur plusieurs années, on parle d’état consécutif à la négligence ou à la maltraitance.

Définitions et types de négligence
La négligence constitue une absence ou une insuffisance de soins adéquats. Elle peut être de nature physique, l’enfant n’étant pas nourri, vêtu, logé ou protégé correctement et/ou de nature émotionnelle ou éducative, l’enfant n’ayant que peu de relations avec ses figures d’attachement. Ce vide émotionnel s’accompagne souvent d’un contact réduit avec d’autres enfants, d’une absence de loisirs ou de distractions, d’une fréquentation scolaire irrégulière, d’un manque d’encouragement ou de valorisation. Bien que légalement, la négligence soit définie en termes concrets et précis, en réalité, c’est plus la conséquence d’un état d’esprit des proches que d’une série d’actes (ou d’une absence d’actes). Les adultes sont indifférents à l’enfant, ou plus souvent encore, ils ont d’autres préoccupations. Des cas fréquents de négligence sont associés à la maladie mentale des parents (la dépression de la mère en particulier) ou encore à l’alcoolisme et la drogue (qui deviennent des préoccupations obsédantes pour les parents). Cependant d’autres cas peuvent s’observer parmi les enfants de personnes qui se consacrent exclusivement à leur carrière ou à la recherche du plaisir. La maltraitance désigne l’ensemble des actes à caractère nocif (en opposition aux manquements de soins) dirigé contre un enfant ou un adolescent et venant d’un parent ou d’une personne en charge de l’enfant (éducateur, baby-sitter). Le milieu familial dans son ensemble peut être impliqué. La maltraitance peut être de plusieurs types. Un enfant peut être maltraité physiquement c’est-à-dire secoué, frappé, battu, brûlé ou blessé. Il peut être maltraité psychologiquement lorsqu’il est injurié, insulté, méprisé, ridiculisé, humilié ou menacé de façon répétée. Il peut être maltraité sexuellement si on tente de l’exciter par des images ou des caresses, s’il subit des attouchements sexuels, s’il lui est demandé d’exciter l’adulte, d’accomplir des actes sexuels (fellation en particulier), s’il est pénétré ou violé. Dans la plupart de ces derniers cas, l’enfant n’est pas agressé physiquement car il est plutôt séduit, manipulé, acheté ou menacé afin de se plier aux exigences de l’adulte. Un autre type de maltraitance est de nature sociale, éducative ou morale. L’enfant peut être privé d’école, de contact avec d’autres enfants; il peut être perverti par l’observation de comportements violents ou sexuels déplacés. La négligence favorise la survenue de maltraitance physique ou sexuelle. Lorsque la famille se désintéresse de l’enfant et qu’il y a peu de communication, l’enfant court des risques accrus d’être maltraité lorsqu’il interfère avec les besoins des adultes qui l’entourent. Il a plus de chances d’être exploité par son entourage ou d’être la cible des pédophiles. La négligence (à l’exception des cas extrêmes) est malheureusement difficile à détecter, car ses effets sont moins manifestes, ils apparaissent lentement et insidieusement. Sémiologie Les cas très sévères de négligence peuvent être accompagnés d’un arrêt du développement, aussi bien physique que psychologique : l’enfant ne grandit pas, son comportement régresse, son langage est retardé. Le retirer de son milieu entraîne une amélioration rapide, mais celle-ci disparaît une fois que l’enfant réintègre sa famille. Dans les cas moins graves, les séquelles de la négligence et de la maltraitance sont principalement d’ordre affectif. L’enfant négligé (ou maltraité) est en manque émotionnel. Il peut y réagir par une recherche frénétique d’affection : compliments, caresses, valorisation. Etant donné qu’il est peu supervisé, sa recherche d’attention peut le mettre dans des situations à risque. Dans les cas plus graves, il peut au contraire devenir indifférent, apathique, peu communicatif, sans imagination, sans intérêts véritables, sans motivation. Il peut devenir incapable de jouir de la vie. Il ne s’intéresse pas à l’école où il n’apprend pas. Chez l’enfant, contrairement à l’adulte, les événements traumatiques constituent des expériences princeps qui déterminent en partie comment les situations seront vécues par la suite. Le monde peut alors lui apparaître comme indifférent ou malveillant. L’enfant, du simple fait qu’il n’est pas protégé par les adultes, vit dans un climat d’anxiété et de menace. Ces sentiments peuvent être accentués par les punitions, les expulsions de l’école ou les déménagements d’une famille souvent désorganisée. L’enfant développe une méfiance généralisée vis-à-vis des adultes. Lorsqu’il y a eu maltraitance importante, la perspective de l’avenir apparaît comme une lutte ; le but de la vie est de survivre. Il s’ensuit une moralité concrète et primitive. Parce que ses proches ne l’ont pas aidé à se forger une identité, l’enfant négligé ne sait pas trop qui il est, où il va et ce qu’il veut. Comme il a été à la merci des uns et des autres, il ne se sent pas autonome. Il va à la dérive ; il se laisse porter par le moment, sans projection dans l’avenir (plans de carrière, projets) et sans pouvoir s’appuyer sur des souvenirs clairs. Souvent, l’enfant négligé ou maltraité ne développe pas un sens normal de la causalité (qui se forme aux alentours de 8 ans). En effet, les actions de l’enfant négligé ne sont généralement pas suivies de conséquences prévisibles (il est puni ou récompensé en fonction de l’humeur des adultes plutôt qu’en fonction de ce qu’il fait) ; celles de l’enfant maltraité, quelles qu’elles soient, ont le plus souvent des effets négatifs (l’enfant est puni ou maltraité de façon aléatoire et incompréhensible pour lui). Face à de telles réponses, l’enfant a du mal à anticiper les événements et agit dans le présent, sans réfléchir à l’avenir. Parce qu’on ne l’éduque pas suffisamment, parce qu’on ne lui parle pas assez, l’enfant négligé présente souvent des retards de langage. Il est limité dans le domaine de la pensée abstraite. Il a souvent des difficultés d’apprentissage. L’enfant négligé n’a pas l’occasion d’apprendre les rudiments des relations sociales. En particulier, il ne sait pas véritablement communiquer, il ignore ce qu’est la réciprocité et a du mal à comprendre le point de vue d’autrui. Par conséquent, il n’utilise que peu le langage pour entretenir des relations avec autrui. Souvent il est inapte au dialogue et ne sait pas faire de compromis. Ainsi pour s’affirmer, il recourt à la force et se montre agressif et peu sociable. De fait, il a peu d’amis. Bien des enfants négligés en arrivent à développer un trouble oppositionnel voire un trouble des conduites. D’autres, à l’inverse, ont tendance à se replier sur eux-mêmes. Dans les cas de maltraitance sans négligence (par ex. : abus répétés de la part d’un beau-père), peuvent apparaître des réactions traumatiques au stress (décrites plus haut). Les perturbations émotionnelles propres à ces réactions peuvent se chroniciser (anxiété généralisée, états phobiques, états dépressifs, tentatives de suicide). La maltraitance sexuelle n’implique pas nécessairement une négligence (le plus souvent la mère ne soupçonne rien et fournit des soins adéquats à son enfant). De ce fait, le tableau qui en découle se distingue de celui de l’enfant à la fois négligé et abusé. Les retards de langage, les troubles des apprentissages et les difficultés à s’exprimer sont moins fréquents. Par contre, l’image de soi peut être particulière avec le sentiment d’être impuissant, contrôlé et/ou stigmatisé. A cela s’ajoute souvent une précocité sexuelle et une vision sexualisée du monde. Dans les cas d’inceste (le type le plus fréquent étant l’inceste beau-père belle-fille suivi par l’inceste père-fille), les distorsions au sein des relations interpersonnelles sont importantes, avec une confusion des responsabilités et des rôles propres à chaque génération (avec ce que l’on nomme la “parentification” : l’enfant assume le rôle de parent vis-à-vis du parent) et a une vision sexualisée des rapports. Parfois la victime ne réalise pas la nature profondément pathologique de la relation.

Prévalence Il est difficile de donner des statistiques pour la négligence et la maltraitance car les chiffres varient énormément en fonction des critères utilisés. On peut néanmoins dire que les fréquences sont très élevées.

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Troubles de l’attachement

A

Les travaux sur l’attachement permettent de différencier différents troubles consécutifs à la négligence et à la maltraitance. Il en existe 5 types qui se distinguent par la qualité de l’attachement que l’enfant manifeste vis-à-vis de son parent, attachement qui va de l’indifférence à la parentification.

Si la négligence et la maltraitance ne constituent pas des troubles psychopathologiques de l’enfant, ce n’est pas le cas des troubles de l’attachement qui sont consécutifs à de tels traitements. Le DSM-V et la CIM-10 font état de troubles réactionnels de l’attachement, mais ces classifications ne tiennent pas suffisamment compte des connaissances établies dans le domaine. Zeanah, Mammen et Lieberman (1993) ont donc proposé un système de classification pour les enfants de 1 à 5 ans qui est plus au fait des travaux de recherche sur l’attachement. Ils distinguent 5 types de troubles différents. Dans le type I : trouble de l’attachement non attaché, l’enfant ne manifeste pas de préférence particulière pour un adulte donné et ne semble s’attacher à personne. Il peut, par ailleurs, présenter un retard de développement significatif. Vraisemblablement, une telle perturbation survient chez les enfants élevés en institution, les cas de négligence extrême ou les enfants dont les tuteurs se sont succédés les uns après les autres. Le type II : trouble de l’attachement indiscriminé se caractérise par une tendance à ne pas s’assurer de sa sécurité auprès du parent dans les situations non familières et à ne pas se réfugier vers lui en cas de peur ou d’appréhension. L’enfant fait plutôt preuve de promiscuité, en allant vers n’importe qui pour obtenir des soins et du réconfort. Certains enfants ont en outre tendance à avoir des accidents et des comportements à risque. Dans le type III : trouble de l’attachement inhibé, l’enfant se montre réticent à s’éloigner de sa figure d’attachement et à explorer l’environnement comme le font les autres enfants de son âge. Certains de ces enfants s’accrochent de manière excessive à leur parent, une attitude qui va bien au-delà de la simple timidité. Face à des inconnus, ces enfants se montrent extrêmement anxieux. Une autre catégorie d’enfants de type III se montrent totalement soumis face à leur parent (compulsive compliance) en lui obéissant en toute circonstance, sans manifester la moindre résistance. Cet état résulte vraisemblablement d’une maltraitance physique à son encontre. L’enfant se montre ainsi hypervigilant ; il inhibe ses affects et manque de spontanéité en présence du parent maltraitant. Dans le type IV : trouble de l’attachement agressif, la relation avec le parent est essentiellement marquée par la colère. En effet, l’enfant se montre très agressif envers sa figure d’attachement (physiquement ou verbalement) et/ou envers lui-même (par ex. : en se frappant la tête contre les murs). Souvent l’agressivité est tellement prédominante que d’autres manifestations anxieuses telles que des difficultés de séparation ou des troubles du sommeil passent inaperçues ou sont interprétées par les parents comme des tentatives de les mettre au défi. L’agressivité peut apparaître dans d’autres contextes, mais à un moindre degré. L’enfant peut piquer des crises de colère terribles lorsqu’il est frustré. De tels enfants sont (ou ont été) généralement témoins ou victimes de violence à la maison. Dans le type V : trouble de l’attachement avec inversion des rôles, l’enfant endosse le rôle de parent et se soucie de manière inhabituelle de son bien-être. Dans son comportement, l’enfant peut infantiliser le parent en veillant sur lui ou en le commandant et en le punissant. Il semblerait qu’un attachement désorganisé pendant la petite enfance prédispose à ce type de trouble.

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Vignette clinique : Caroline, 14 ans, réaction traumatique au stress

A

Caroline a été violée de façon très violente à l’âge de 8 ans par un ami de la famille. À 14 ans, âge auquel elle révèle l’incident, elle reste très perturbée, avec anxiété généralisée, absentéisme scolaire, rejet et haine des hommes, rage, phobies multiples, abus d’alcool et de drogues. Lorsqu’on lui demande de compléter des débuts de phrases, elle donne les réponses suivantes: J’aime… être dans un endroit où il y a beaucoup de monde. Où je me sens en sécurité. Je suis heureuse quand… je sais que je suis en sécurité. J’aimerais savoir…quelle est la différence entre l’inceste et le viol. Je regrette… que le viol me soit arrivé et que je me sois mise à boire et à prendre de la drogue. Ma plus grande crainte… est de voir [nom de l’agresseur]. Six ans après le traumatisme, on peut voir que la vision du monde de Caroline est encore en grande partie déterminée par son expérience passée. Elle sait que sa prise de drogue et d’alcool est due au traumatisme qu’elle a vécu mais elle ne tente pas d’y mettre un terme. De plus, elle continue à se sentir menacée par son agresseur sans pouvoir en analyser le bienfondé ; elle reste sous son emprise. Sa situation est très grave car jusqu’à présent, elle n’a pas voulu dévoiler l’incident en raison des menaces de mort que l’agresseur avait proférées si elle parlait. Elle a gardé une perspective enfantine sur l’événement (sa totale passivité face aux événements et une incapacité à profiter de l’aide qui lui est offerte). Mais elle a aussi acquis de mauvaises habitudes (absentéisme, abus d’alcool et de drogues). Comme c’est le cas ici, le silence et le secret mènent à l’isolement de la victime et, par absence de dialogue, ne lui permettent pas d’analyser ce qui s’est passé d’une façon plus mature.

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Vignette clinique : Arthur, 7 ans, négligence

A

Arthur est un enfant de 7 ans qui manque souvent l’école ou qui y arrive en retard sans raison valable. Il a été abandonné par son père. Il vit seul avec sa mère qui travaille le soir; il se couche tard. La famille déménage fréquemment. Arthur est perçu comme triste et “dans la lune” par le personnel scolaire. Il est assez remuant et désorganisé en classe. Par contre, il est toujours aimable et poli avec les adultes et gentil avec les autres enfants. Il semble manquer de confiance en lui. L’institutrice rapporte que bien qu’Arthur soit toujours bien habillé, sa mère passe son temps à le rejeter et à l’humilier. Pendant l’évaluation psychologique, il se présente comme un enfant agréable et communicatif. Il dessine lentement et minutieusement et demande son opinion à la psychologue. Il explique spontanément: - Moi, j’aime les histoires de Jésus. - Pourquoi ? - Parce qu’il donne la vie. Alors qu’il travaille à un second dessin, il pose la question: - Est-ce que tu as des animaux chez toi ? - Oui et toi ? - J’ai deux chiens. C’est Marinette que je préfère. - - Ah oui ! Et pourquoi ? - - Parce que je lui manque tout le temps.” Un peu plus tard, alors que la psychologue lui demande de dessiner quelque chose de triste, l’enfant demande: - Est-ce que je peux dessiner quelque chose de pas vraiment triste ? - Comme quoi ? - Toute ma famille… Moi, j’ai pas de papa. Il est un peu fou aussi… pas vraiment comme Ben Laden… Il ne sait pas comment s’y prendre avec les enfants. - Toi, qu’est-ce que tu en penses ? - J’aime pas trop, trop ça. - Ça quoi ? - C’est parce que mon papa me manque.” Le mot “triste” évoque la famille et en particulier l’absence du père. L’enfant accuse et disculpe à la fois son père. Il reprend une explication qui a pu être fournie par la mère ou un membre de l’entourage. Le dessin de la famille, quant à lui, est révélateur. L’enfant y inclut les membres de sa famille élargie. Il les nomme mais change les noms des personnages à plusieurs reprises. Finalement, c’est sa mère qu’il dessine et qu’il désigne en dernier. L’enfant se sent appartenir à une famille mais les frontières y sont floues et les personnages changeants, sans consistance. Les sentiments vis-à-vis de la mère semblent être ambivalents. Lors d’une épreuve dans laquelle l’enfant doit faire un choix entre deux options, il n’arrive pas à trancher. Par exemple, entre un serpent et une grenouille, il déclare: “Les deux, parce qu’un serpent, ça peut se cacher sous terre ; les grenouilles, ça peut attraper des insectes, puis ça peut aller dans l’eau. Les serpents, j’aime ça parce qu’il y en a de toutes sortes et il y en a qui sont de toutes les couleurs.” Ce petit garçon est négligé. La famille est désorganisée, avec absence de figure paternelle, déménagements fréquents, absentéisme et retards scolaires. En outre, il manque de sommeil. L’enfant a des besoins affectifs insatisfaits. Il recherche l’attention et tend à se réfugier dans un monde religieux. Il aimerait être désiré (le chien qui l’attend). Il a aussi une personnalité compulsive (lenteur, méticulosité, difficulté à faire des choix). La lenteur et la méticulosité peuvent être des traits de personnalité mais elles peuvent aussi, comme la difficulté à faire des choix, être dues à une image de soi incertaine ou à une difficulté à se fixer des buts. L’enfant nourrit du ressentiment contre ses parents sans oser en prendre conscience (il hésite à représenter sa mère et souffre de l’absence de son père, qu’il compare à Ben Laden). Il se sent appartenir à un milieu indifférencié où il n’est qu’une personne parmi d’autres (les interversions dans le dessin de la famille). Il ne peut fournir son plein rendement à l’école et présente des troubles de l’attention avec hyperactivité. Ceux-ci sont dus à un état de préoccupation par rapport à la mauvaise qualité de la relation avec sa mère et à l’absence d’un père.

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