Abattoirs Flashcards
Infraction courantes?
80 % des chaînes d’abattage inspectées (abattoirs de boucherie*) présentaient ainsi des non-conformités en 2016 lors d’une inspection générale des abattoirs ordonnée par le ministre de l’Agriculture. Cet événement est resté exceptionnel. Depuis, il n’y a pas eu d’audit d’une telle ampleur pour permettre de garder une vision d’ensemble, même si les contrôles relatifs à la « protection animale en abattoirs » ont augmenté depuis 2016. En 2019, 68 % des contrôles effectués en abattoirs d’animaux « de boucherie » et 59 % des contrôles en abattoirs de « volailles » et de lagomorphes ont mis en évidence des non-conformités.
L’insuffisance des contrôles est soulignée par toutes les expertises. En particulier, l’absence de surveillance du poste d’abattage est monnaie courante, et laisse libre cours aux cas de maltraitances involontaires ou intentionnelles. Actuellement, les seules poursuites juridiques pour cruauté ou maltraitance envers les animaux en abattoirs reposent sur des images d’enquête que l’association a diffusées.
Et les filières bio?
Les animaux issus du circuit de production biologique sont globalement tués de la même façon que lors des abattages standards. Les images des abattoirs du Vigan, de Mauléon-Licharre, du Mercantour ou de Pézenas révélées par L214 ont montré les mêmes conditions de mise à mort, la même violence subie par les animaux issus des filières bio et Label Rouge.
Types d’étourdissements?
Depuis 1964, la réglementation impose que les animaux terrestres soient rendus inconscients au moment de la saignée, sauf dérogation pour les abattages rituels.
Qu’on ne s’y trompe pas : si le mot « étourdissement » est parfois confondu avec « endormissement », il désigne une réalité des plus brutales, les méthodes actuellement pratiquées étant le choc électrique (pour les volailles, moutons, chèvres, lapins et une partie des cochons), la perforation de la boîte crânienne (pour les bovins et les chevaux), et l’asphyxie au gaz (pour une partie des cochons et des volailles).
Étourdissements sans douleurs?
Selon les textes, l’étourdissement doit être, par définition, immédiat et indolore.
Sont pourtant autorisés le gazage au dioxyde de carbone des cochons, qui plonge les animaux dans une lente et douloureuse asphyxie. C’est aussi le cas du bain d’eau électrifié utilisé majoritairement pour les volailles, qui nécessite un accrochage des oiseaux par les pattes en pleine conscience.
Des avis officiels de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) recommandent l’abandon de ces deux méthodes10, 11. Pour autant, le règlement européen de 2009 sur la protection des animaux au moment de leur mise à mort explique n’avoir pas retenu ces préconisations scientifiques, pour la seule raison qu’elles n’étaient pas économiquement viables !
En France, près de 800 millions d’oiseaux et plus de 3 millions de cochons (1/4 des cochon) sont ainsi « étourdis » chaque année selon des méthodes contestées par toutes les expertises scientifiques.
État du matériel?
Pour les volailles, l’Office alimentaire et vétérinaire européen (OAV) a carrément relevé de mauvais paramétrages d’étourdissement dans tous les abattoirs auditionnés16 !
Contrôle de l’inconscience?
En pratique, des audits réalisés par l’OAV dans les abattoirs français en 2013 et 2015 ont révélé que les contrôles de l’inconscience sont en réalité extrêmement rares, et que les animaux mal étourdis sont rarement étourdis une deuxième fois comme l’exige la réglementation.
Aussi, comme l’expliquent les experts de l’INRA, le contrôle de l’inconscience est particulièrement complexe à établir. Il nécessiterait une observation minutieuse et individuelle des animaux, combinant plusieurs critères. Il s’agit par exemple de vérifier le réflexe cornéen (clignement de la paupière au toucher de la cornée), mais aussi la présence de respiration, de relevés de tête ou de cris.
Pourtant bien souvent, comme à l’abattoir d’Alès, les employés se contentent de coups de pieds pour tester la réaction des animaux, une méthode qui n’est bien évidemment pas répertoriée dans les différents moyens de s’assurer de l’inconscience d’un animal.
L’abattage rituel c’est mieux?
Quelle que soit l’espèce, l’égorgement sans étourdissement préalable est jugé « inacceptable » par la Fédération des Vétérinaires Européens (FVE)3, et « à éviter » par l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA)4, en raison des souffrances nettement supérieures qu’il engendre par rapport à un abattage standard. Depuis 2013, l’abattage sans étourdissement est également dénoncé en France par le Conseil national de l’ordre des vétérinaires dont le président a déclaré qu’ « Il est irréfutable que les animaux souffrent lors de ces mises à mort . Cela peut donner lieu à des scènes insoutenables avec par exemple des animaux dépecés alors qu’ils sont encore vivants »5.
Au-delà des souffrances inhérentes à l’absence d’étourdissement, les infractions routinières aux réglementations qui encadrent l’abattage rituel ajoutent encore au calvaire des animaux : en particulier en ce qui concerne les modes d’immobilisation et d’égorgement, et le contrôle de la perte de conscience avant l’accrochage.
À quoi ressemble l’abattage rituel?
Les vaches, moutons et chèvres abattus rituellement doivent être immobilisés individuellement lors de la saignée, et ce jusqu’à leur perte de conscience effective. Leur tête doit en particulier être maintenue pour permettre un mouvement rapide et précis du couteau, et pour ne pas ralentir le processus de saignée6. Cela se fait généralement au moyen d’un tonneau rotatif (individuel pour les bovins, et à entrées multiples pour les moutons et les chèvres.
S’ensuit l’égorgement devant être effectué de manière franche, large, et sans cisaillement, de manière à sectionner en une seule fois les veines jugulaires et les deux artères carotides de l’animal7.
Un rapport vétérinaire de 2010 indique d’ailleurs qu’en moyenne 5,2 coups de couteau sont pratiqués pour l’égorgement des bovins dans le rituel halal, contre 3,2 coups pour les bovins dans le rituel juif, et entre 1 à 6 coups pour les moutons (tous rituels confondus)8.
Ce cisaillement, indicateur d’un mauvais geste et/ou d’un couteau mal aiguisé, cause en effet des douleurs supplémentaires aux animaux.
Il peut également être à l’origine de faux-anévrismes qui prolongent la durée de l’agonie. Selon l’INRA, ces faux-anévrismes concernent entre 16 et 18 % des bovins adultes et 25 % des veaux abattus rituellement. Pour les veaux, en présence de faux-anévrisme, l’agonie peut alors durer jusqu’à 11 minutes.
Et les poissons?
Les poissons subissent un degré de cruauté encore décuplé par rapport aux animaux terrestres. Pour eux, l’obligation d’étourdissement avant la mise à mort ne s’applique tout simplement pas ! La réglementation est d’ailleurs particulièrement paradoxale à ce sujet : elle demande à ce que « Toute douleur, détresse ou souffrance évitable épargnée aux animaux lors de la mise à mort et des opérations annexes »12 (c’est le seul article du règlement sur la mise à mort des animaux qui s’applique aux poissons), mais elle n’exige aucune mesure spécifique visant à limiter leurs souffrances. En pratique, différentes techniques (avec ou sans étourdissement) sont utilisées pour mettre à mort les poissons d’élevage, certaines plus cruelles que d’autres. L’abattage par décharge électrique ou par la technique du « choc sur la tête » entraînent une mort relativement rapide, alors que le gazage au dioxyde de carbone, la coupe des branchies sans étourdissement préalable ou encore l’asphyxie à l’air ou sur la glace entraînent une mort particulièrement lente et douloureuse.
Aucune des recommandations émises par l’EFSA en 2009 n’a été intégrée au règlement européen sur la protection des animaux au moment de leur mise à mort, pour des raisons d’impact économique en particulier. À l’heure actuelle, il n’existe donc aucun cadre réglementaire à l’abattage des poissons d’élevage.
Mais les poissons ça ne souffre pas?
Un rapport de l’INRA publié en 2017 sur la conscience animale explique que les poissons ressentent des émotions, et peuvent éprouver consciemment de la douleur :
« De nombreux animaux, y compris les poissons, sont capables des mêmes processus d’évaluation que ceux qui déclenchent des émotions conscientes chez les humains. »24
En définitive, si l’on inclut les poissons trop souvent oubliés de nos considérations, on découvre que la mise à mort sans étourdissement préalable concerne en réalité la majorité des animaux exploités pour notre consommation alimentaire, alors même que « l’étourdissement » est présenté comme étant la norme. Qu’il s’agisse de saumons, de truites, de moutons ou de bovins, l’absence d’étourdissement signifie pour tous la même chose : une agonie plus longue et plus douloureuse.
Qu’en est il en 2020?
Début 2020, 51 % des abattoirs de boucherie et 17 % des abattoirs de volailles pouvaient pratiquer des abattages sans étourdissement, dans des proportions variables. Le pourcentage des animaux abattus sans étourdissement est estimé selon le ministère de l’Agriculture, à au moins :
14 % pour la filière bovine
28 % pour la filière ovine et caprine.(source : OABA, 2020 (p. 15))
Si la certification halal en France exige la mise à mort des animaux sans étourdissement préalable, c’est plus par usage que par nécessité religieuse. Ainsi, l’Indonésie – pays du monde où les musulmans sont les plus nombreux (200 millions) – accepte que les animaux soient étourdis avant l’abattage.
Selon AVS (À Votre Service), label de certification halal, en France 70 % des bêtes abattues rituellement sont des volailles ; et sur ces 70 %, 90 % sont étourdies par électronarcose avant la saignée (comme en abattage standard).
Mensonge au consommateur?
La disproportion entre les abattages rituels et la demande réelle pour une viande issue d’abattages religieux est dénoncée depuis plusieurs années par des associations de protection animale, du fait que souvent, ces abattages sont réalisés sans étourdissement des animaux. Ce problème a fait l’objet de nombreuses campagnes d’information.
Cette réalité est bien connue du gouvernement. En 2005, un rapport officiel (Coperci) estimait : « Il est indéniable que la proportion atteinte par les mises à mort sans pré-étourdissement traduit un détournement de l’esprit des textes sur la protection animale ».
Ainsi, la viande issue d’animaux tués selon un rituel religieux peut être vendue dans le circuit standard sans que cela soit mentionné sur les emballages.
Déchargement et attente?
Concernant le déchargement, la réglementation exige que les animaux ne soient « ni lancés ni renversés »2, et que l’usage de l’aiguillon électrique pour les faire avancer soit « évité dans la mesure du possible », le cas échéant appliqué uniquement sur des animaux qui ont la possibilité d’avancer, et uniquement sur les membres postérieurs des bovins adultes et des cochons3.
En pratique, les enquêtes de L214 ont montré que les aiguillons électriques sont utilisés de manière routinière par les employés des abattoirs, et qu’il n’est pas rare de les voir utilisés sur les parties les plus sensibles des animaux, y compris lorsqu’ils n’ont pas la possibilité d’avancer, comme à l’abattoir d’Alès.
Lors du déchargement, l’état de santé des animaux doit également être évalué, et des mesures prises pour ceux « présentant des besoins particuliers ». En pratique, lorsque ce contrôle est effectivement réalisé, les animaux blessés ou malades sont simplement euthanasiés et évacués à l’équarrissage avec ceux qui sont morts pendant le transport. Mais il arrive aussi que des animaux en état de grande faiblesse soient tout de même conduits sur la chaîne d’abattage. Le président du groupe Bigard lui-même, Jean-Paul Bigard, explique être souvent choqué par l’état de santé des bovins à leur arrivée à l’abattoir :
« Je suis très souvent choqué par l’état physiologique invraisemblable des animaux qui arrivent à l’abattoir, et dont l’abatteur n’est pas responsable. Ces animaux ont pourtant vécu dans des prés, dans des étables, mais les vétérinaires les ont vus plus ou moins rapidement, plus ou moins soigneusement. »