Séance 4 : la responsabilité pénale Flashcards
Raisons de cette omniprésence
Une opinion publique informée et réactive
- Depuis plusieurs années, l’accident du travail est perçu comme la marque d’un dysfonctionnement social ;
- Exemples : primes d’insalubrité, intérêt des partenaires sociaux.
Des magistrats rigoureux
- 1974 : 2 condamnations à des
peines d’emprisonnement ;
- 2021 : près de 200
condamnations à des peines
d’emprisonnement.
Une loi plus répressive
- Apparition d’un nouveau
« coupable » : la personne morale ;
- Création d’un nouveau délit : la
mise en danger de la vie d’autrui
;
- Renforcement des sanctions :
ordonnance du 7 avril 2016.
Quelques chiffres
Les politiques de prévention ont permis une amélioration considérable des conditions de travail des
salariés durant ces 50 dernières années.
▪ Accidents du travail : entre 1955 et 2008, le nombre d’accidents du travail a diminué de 31%, alors
que le nombre de salariés a plus que doublé (+111%). On dénombre toujours 656.000 accident du
travail par an dont 733 mortels. Il faut y ajouter 233 accidents du trajet mortels.
▪ Maladies professionnelles : le nombre de maladies professionnelles reconnues a augmenté de 4% en
moyenne par en entre 2005 et 2012. Cela est dû principalement à la hausse de la reconnaissance des
TMS (7% par an). On dénombre 175 décès par an liés à des MP
Malgré les efforts engagés depuis de nombreuses années, plusieurs constats permettent de dresser un bilan
beaucoup plus terne.
Il existe des différences sectorielles marquées :
La baisse du nombre d’accidents du travail est principalement due à deux secteurs : la métallurgie et le
BTP.
Certains secteurs sont des exceptions et affichent une hausse des accidents du travail : les services au sens
large (restauration, cafés, hôtellerie, organismes financiers, assurances, cabinets d’expertise, administrations,
action sociale, santé, travail temporaire, nettoyage).
▪ La France reste au-dessus d’autres pays européens en termes d’accidents du travail mortel : avec 517
accidents du travail mortels en 2014, soit 3,74 pour 100 000 travailleurs, la France se situe au-dessus de la
moyenne européenne (2,32 pour 100 000).
▪ On assiste à une explosion des pathologies psychiques : en 2016, le nombre d’avis favorables prononcés
par les CRRMP en matière de maladies psychiques liées atteint 596 cas, soit environ 40% de plus qu’en
2015. La France est le pays européen qui reconnaît le plus le syndrome d’épuisement professionnel.
Impact de la pandémie de Covid-19 en 2020
Les accidents du travail ont diminué de 17,7 % par rapport à 2019.
▪ Les maladies professionnelles ont diminué de 18,8% entre 2019 et 2020. En revanche, les affections
psychiques reconnues poursuivent une hausse. 1 441 maladies professionnelles relevant de troubles
psychosociaux, soit environ 37% de plus qu’en 2019, ont donné lieu à une prise en charge favorable par
l’Assurance maladie.
L’enquête
En cas d’infraction aux règles édictées par le Code du travail, le Procureur de la République peut
décider l’ouverture d’une enquête préliminaire.
▪ Pour ce faire, il pourra s’appuyer sur :
* Les services de police ;
* Les services de l’inspection du travail.
▪ Il peut également saisir le juge d’instruction aux fins d’ouverture d’une information judiciaire.
L’enquête de police ou de gendarmerie peut être :
Une enquête de flagrance (article 53 du Code de
procédure pénale) :
- Si l’infraction constitue un délit puni d’une peine
d’emprisonnement ;
- Sous le contrôle du Procureur de la République,
elle permet la réalisation d’actes à caractère
coercitifs mais est enfermée dans un délai de 8
jours ;
- A l’expiration de ce délai, et si l’enquête n’est pas
terminée, le Procureur peut décider de
poursuivre l’enquête en la forme préliminaire ou
d’ouvrir une information judiciaire.
Une enquête préliminaire (articles 75 à 78 du
Code de procédure pénale) :
- Les policiers ou les gendarmes procèdent aux
constatations, relevés et saisies qui leur
paraissent nécessaires pour déterminer les
circonstances de l’accident et d’éventuelles
responsabilités.
Audition
Audition des personnes non mises en
causes (victimes, témoins, etc…) :
- Elle a lieu au commissariat de police ou de
gendarmerie, après simple convocation
orale.
Audition des personnes mises en cause :
- Elle se fait dans le cadre de l’audition pénale
libre ;
- La convocation indique les éléments
caractéristiques de l’infraction pour laquelle
elle est mise en cause, son droit d’être assistée
par un avocat au cours de l’audition si
l’infraction concernée est punie par une peine
de prison, etc… ;
- La personne entendue doit se rendre à la
convocation mais elle a le droit de garder le
silence et peut quitter le commissariat ou la
gendarmerie quand elle le souhaite.
Une personne ne peut être mise en garde à vue que (article 62-2 du Code de procédure pénale) :
S’il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de
commettre un crime ou un délit puni par une peine de prison ;
* Et que la garde à vue est l’unique moyen de parvenir à l’un au moins des objectifs suivants :
- poursuivre une enquête impliquant la présence de la personne concernée ;
- garantir la présentation de la personne devant la justice ;
- empêcher la destruction d’indices ;
- empêcher une concertation avec des complices ;
- empêcher toute pression sur les témoins ou la victime ;
- faire cesser l’infraction en cours.
▪ Ces conditions sont rarement remplies dans l’hypothèse d’un accident du travail, même grave, de
sorte que la garde à vue paraît généralement exclue et n’est qu’exceptionnellement mise en œuvre.
L’agent de l’inspection du travail qui est informé d’un accident du travail effectue une
enquête. Il dispose de larges pouvoirs d’investigation :
Demander la communication
de documents
Faire appel à des organismes
agréés pour vérifier l’état des
locaux et des matériels
Procéder aux fins d’analyse à
tous prélèvements portant sur
les matières mises en œuvre
et les produits distribués ou
utilisés.
Interroger les salariés
Les services de l’inspection du travail
Extension des possibilités de décider d’un arrêt temporaire de travaux ou d’activité en cas de danger
grave et imminent (art. L. 4731-1 du Code du travail)
* Institution d’une procédure de retrait d’urgence des jeunes travailleurs (âgés de 15 à 18 ans) de leur
poste de travail (art. L. 4733-1 et suivants du Code du travail)
* Simplification de la procédure d’arrêt d’activité de l’entreprise en cas d’exposition des salariés au
risque chimique (art. L. 4721-8 du Code du travail)
* Extension des possibilités d’ordonner des analyses de produits (art. L. 4722-1 du Code du travail)
* Accroissement des pouvoirs d’investigation dans le domaine de la santé et de la sécurité au travail et
en matière de harcèlement moral et de harcèlement sexuel (art. L. 8113-5 du Code du travail)
L’ordonnance du 7 avril 2016 prévoit :
Elargissement du champ d’application
des amendes administratives.
Recours à la transaction pénale (en cas
de violation de certaines dispositions
du Code du travail).
Recours à l’ordonnance pénale
pour les contraventions prévues
par le Code du travail.
Le directeur de la DREETS peut également transmettre le procès-verbal au Ministère public.
En cas de manquements aux dispositions du Code du travail (art. L. 8115-1 du Code du travail), l’agent
de contrôle de l’inspection du travail a le choix entre
Rédiger un procès-verbal.
Rédiger un rapport adressé à la
DREETS. Sur la base de ce rapport, la
DREETS peut prononcer une amende.
Procédure de sanction administrative
L’agent de contrôle informe par écrit la personne mise en cause :
* du manquement retenu à son encontre ;
* de la sanction envisagée ;
* de la possibilité de présenter ses observations dans un délai d’1 mois (qui peut être prorogé
d’un mois à la demande de l’intéressé, si les circonstances ou la complexité de la situation le
justifient).
▪ A l’issue de ce délai, l’autorité administrative peut, par décision motivée, prononcer l’amende et
émettre le titre de perception correspondant. Elle informe de cette décision le CHSCT, lorsque le
manquement a trait à des questions relevant de ses missions ; le CSE, dans les autres cas ; à défaut,
les DP.
▪ Possibilité de contester la décision de l’administration devant le tribunal administratif, à l’exclusion de
tout recours hiérarchique.
Montant de la sanction administrative
Montant maximal : 4 000 euros, appliqué autant de fois qu’il y a de travailleurs concernés par le
manquement
▪ Des sanctions administratives spécifiques, d’un montant au plus égal à 10 000 euros, sont prévues en
cas de manquement de l’employeur aux décisions prises par l’inspection du travail en matière d’arrêt
temporaire de travaux ou d’activité, de demandes de vérifications de mesures ou d’analyses, de
retrait d’un jeune salarié affecté à des travaux interdits ou réglementés, placé dans une situation
l’exposant à un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé.
▪ Pour fixer le montant de l’amende, l’autorité administrative prend en compte les circonstances et la
gravité du manquement, le comportement de son auteur ainsi que ses ressources et ses charges.
Sanction administrative et sanction pénale
Préserver la possibilité pour le Ministère public de diligenter des poursuites pénales s’il l’estime
nécessaire.
A cette fin, la DREETS communique au représentant du parquet un tableau des sanctions administratives
envisagées et prononcées pour ces motifs.
Afin de ne pas faire obstacle à la mise en œuvre des sanctions administratives, le parquet s’engagera à
répondre dans un délai contraint, au-delà duquel il sera considéré comme ne s’opposant pas à la mise en
œuvre de la voie administrative.
La circulaire retient, à titre indicatif, le délai d’1 mois.
Dans le cas contraire, le procureur de la République indiquera à la DREETS qu’il souhaite diligenter des
poursuites pénales et lui demandera la transmission du rapport dressé par l’agent de contrôle aux fins de
saisine d’un service de police ou de gendarmerie pour enquête
Le champ d’application de la transaction pénale (art. L. 8114-4 du Code du travail)
« L’autorité administrative compétente peut, tant que l’action publique n’a pas été mise en
mouvement, transiger avec les personnes physiques et les personnes morales sur la poursuite d’une
infraction constituant une contravention ou un délit »
* Une infraction pénale a été relevée à l’encontre d’un employeur ;
* Contravention ou d’un délit puni d’une peine d’emprisonnement de moins d’un an ;
* L’action publique n’a pas été mise en mouvement (autrement dit le Procureur de la République
n’a pas exercé de poursuites pénales à l’encontre de l’employeur) ;
▪ La DREETS peut désormais transiger sur la poursuite d’une infraction.
La transaction pénale couvre les dispositions relatives :
au contrat de travail, au règlement intérieur et au droit disciplinaire,
* à l’application des conventions et accords collectifs,
* à la durée du travail, des repos et congés, au salaire et avantages divers, à l’exception des
dispositions relatives aux durées maximales du travail, aux repos, à l’établissement d’un
décompte de la durée de travail et à la détermination du salaire minimum,
* à la santé et sécurité au travail, à l’exception des dispositions relatives au contrôle et des
obligations de l’employeur en matière d’installations sanitaires, de restauration,
d’hébergement et de prescriptions techniques de protection durant l’exécution de travaux
de bâtiment et génie civil,
* au contrat d’apprentissage,
* à certaines professions et activités.
▪ Toutes les matières expressément exclues du champ de la transaction pénale relèvent du champ de
l’amende administrative.
La procédure de transaction pénale
L’agent de contrôle transmet un PV à la DREETS qui peut, au lieu de transmettre ce procès-verbal au
Parquet, opter pour une proposition transactionnelle.
La proposition de transaction de la DREETS doit mentionner (art. R. 8114-4 du Code du travail) :
* la nature des faits reprochés et leur qualification juridique ;
* le montant des peines encourues ;
* le montant de l’amende transactionnelle ;
* les délais impartis pour le paiement et, s’il y a lieu, pour l’exécution des obligations ;
* le cas échéant, la nature et les modalités d’exécution des obligations imposées en vue de faire cesser
l’infraction, d’éviter son renouvellement ou de remettre en conformité les situations de travail ;
* l’indication que la proposition, une fois acceptée par l’auteur de l’infraction, doit être homologuée
par le procureur de la République.
La proposition de transaction est adressée en double exemplaire à l’auteur de l’infraction, à compter
de la date de clôture du procès-verbal de constatation de l’infraction, dans un délai de :
- quatre mois pour les contraventions
- un an pour les délits
▪ S’il accepte la proposition, l’auteur de l’infraction en retourne un exemplaire signé dans le délai d’1
mois à compter de sa réception.
▪ A défaut de réponse dans le délai d’1 mois, la proposition de transaction est réputée refusée.
Procédure de transaction pénale : en cas d’acceptation de la transaction
la DREETS transmet le dossier au procureur de la République
pour homologation.
▪ Lorsque l’homologation est prononcée, l’autorité administrative :
* notifie celle-ci à l’auteur de l’infraction (art. R. 8114-6 du Code du travail) ;
* « informe le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, lorsque l’infraction a
trait à des questions relevant de ses missions, le comité d’entreprise, dans les autres cas, et à
défaut, les délégués du personnel ».
Ordonnance pénale
L’inspecteur du travail dresse un procès-verbal de constatation des infractions et le transmet au
Parquet.
▪ Le Ministère public décide d’opter pour la procédure simplifiée et communique au tribunal de police le
dossier de poursuite et ses réquisitions.
Le juge peut statuer sans débat préalable
par une ordonnance pénale portant soit
relaxe, soit condamnation à une amende
ainsi que le cas échéant, à une ou plusieurs
peines complémentaires encourues.
Le juge peut également décider qu’un débat
contradictoire est nécessaire et renvoyer le
dossier au Ministère public aux fins de
poursuites dans les formes de la procédure
ordinaire.
L’ordonnance pénale peut faire l’objet d’une opposition
Par le Ministère public dans un
délai de 10 jours à compter de
l’ordonnance.
Par le prévenu dans un délai de 30 jours
à compter de la date d’envoi de la LRAR
notifiant l’ordonnance (respect des droits
de la défense).
Le dossier est alors porté à l’audience du tribunal dans les formes de la procédure ordinaire.
Il est recommandé à l’employeur de coopérer avec les agents de l’inspection du travail :
Refuser l’accès à l’établissement ou refuser de répondre aux questions des agents ruinerait la
défense devant le tribunal éventuellement saisi ensuite et pourrait caractériser le délit
d’obstruction aux fonctions de l’inspection du travail, qui constitue en soi un délit, passible de
sanctions pénales (art. L. 8114-1 du Code du travail).
* L’employeur ou ses représentants ne doivent en aucun cas dicter aux personnes entendues ce
qu’elles ont à dire.
Cependant, devoir répondre aux demandes de l’inspection du travail n’impose en aucun cas d’être
proactif :
* Lors de son interrogation, l’employeur est prudent de s’en tenir à une description factuelle de
l’accident, sans en extrapoler la cause ou sans épiloguer sur ce qu’il n’a pas fait ou ce qu’il
aurait pu mieux faire.
L’enquête interne
L’une des missions principales du CSE est de contribuer à promouvoir la santé, la sécurité et
l’amélioration des conditions de travail des salariés.
▪ Suite à un accident du travail, le CSE dispose du pouvoir de réaliser une enquête en interne afin
d’en établir la cause et de proposer des mesures de prévention adaptées. Ce pouvoir peut être
délégué à la CSSCT.