Les administrations nationales : Les agences de l'Etat Flashcards

1
Q

Définition des agences de l’Etat

A

Les agences de l’État sont des organes administratifs qui disposent d’une certaine autonomie pour accomplir une fonction précise, il y a donc deux critères de définition de l’agence de l’État. D’une part l’autonomie de la gestion et d’autre part la spécialisation de la fonction. Les agences de l’État exercent une mission d’intérêt général précise, pour le compte de l’État, et disposent, pour accomplir cette mission d’une indépendance plus ou moins forte vis-à-vis des services centraux de l’administration que nous avons vu dans la précédente vidéo, c’est-à-dire du Gouvernement, des ministres, des directions de l’administration centrale, des sous- directions ou encore des bureaux des ministères. Il existe une forme d’indépendance des agences vis-à-vis de ces structures traditionnelles, de l’administration de l’État.

Le terme « agence » a été employé dans deux rapports très importants publiés en 2012. Premier rapport : « L’État et ses agences » qui a été rédigé par l’Inspection Générale des Finances, service d’inspection des administrations qui est placé sous la tutelle des Ministres de l’Économie et des Finances.

Second rapport, « Les agences, une nouvelle gestion publique ? » du Conseil d’État, organe à la fois conseiller du Gouvernement et juge de l’administration sur lequel nous reviendrons.

Dans son rapport, l’IGF estime qu’une agence « se caractérise par sa structure de gouvernance différenciée par rapport à une administration classique, à la hiérarchie verticale et intégrée ». Il faut donc bien distinguer les agences d’une sorte d’administration classique, bureaucratique et hiérarchisée. « L’agence repose sur un double principe de spécialisation et d’autonomie de gestion ». Cette spécialisation et cette autonomie de gestion constituent une forme d’administration renouvelée, d’administration moderne, en tout cas théoriquement.

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Q

Typologie des agences de l’Etat

A

Les agences de l’État peuvent être distinguées en fonction de l’autonomie dont elles disposent.

D’abord des entités faiblement autonomes ( services à compétence nationale.) : ce sont des agences qui certes sont spécialisées et bénéficient de quelques libertés de gestion mais elles relèvent de la hiérarchie de l’administration centrale. Il s’agit de services qui ont des compétences précises et qui disposent de certaines marges de manœuvre, mais marges de manœuvre limitées.

Deuxième catégorie d’agences, les agences qui certes sont distinctes de l’État, c’est-à-dire qu’elles bénéficient d’une personnalité morale distincte de l’État mais elles sont soumises, tout de même à un contrôle de l’administration centrale. Il s’agit d’agences, qui encore une fois, ont un but précis, une mission précise et qui certes sont distinctes de l’État mais font toujours l’objet d’un contrôle. Il y a deux catégories d’agences dans cette catégorie-là : les établissements publics et les groupements d’intérêt public, autrement appelés GIP.

Troisième catégorie, ces agences-là bénéficient d’une très grande autonomie pour réaliser leurs missions, elles peuvent être dotées ou non de la personnalité morale, mais en réalité peu importe, elles bénéficient de véritables garanties d’indépendance. Il s’agit de ce que l’on appelle les autorités administratives indépendantes (AAI) et les autorités publiques indépendantes (API).

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Q

Services à compétence nationale

A

Les services à compétence nationale sont créés au sein même de l’administration centrale, ils sont rattachés à un ministre, à un directeur d’administration centrale ou à un chef de service. Bref, ils sont intégrés dans la hiérarchie des services ministériels, et ils ne disposent pas, ces services à compétence nationale, de la personnalité morale.

Les services à compétence nationale n’ont pas non plus de pouvoir de décision, ils regroupent des agents qui sont chargés d’une tâche précise au sein de l’administration centrale, mais ces agents n’ont pas de pouvoir, par exemple réglementaire, ils ne prennent pas de décision. Cependant, ces services sont identifiables au sein de l’administration, c’est-à-dire qu’ils ont leur nom et ce sont des regroupements d’agents. Et ces services disposent de certaines libertés pour leur gestion, par exemple d’un point de vue budgétaire ou de gestion de leurs agents. Pour illustrer cette catégorie, je prendrai deux exemples.

Premier exemple de service à compétence nationale, le Traitement du Renseignement et Action contre les Circuits FINanciers clandestins (TRACFIN). TRACFIN a été créée en 1990 auprès du Ministère de l’Économie, pour recevoir, analyser et exploiter des renseignements
permettant d’identifier des cas de fraude, des cas de blanchiment d’argent ou encore des cas de financement du terrorisme. Les banques, les établissements de crédits, d’assurance, les professionnels de l’immobilier ou encore du droit sont tenus de faire remonter les informations auprès de TRACFIN, de faire des déclarations. Et TRACFIN, après analyse, pourra éventuellement, s’il y a une forme de présomption de fraude ou de blanchiment d’argent ou de financement du terrorisme saisir le Procureur de la République, qui pourra ensuite condamner ce genre de fraude. Voici donc un service qui est très spécialisé, une fonction bien précise au sein de l’administration, qui est chargé d’une tâche concrète, identifiable. Et ce service dispose pour réaliser cette mission d’agents spécifiques qui relèvent certes de l’administration centrale mais qui disposent d’une certaine marge de manœuvre dans l’exécution de cette mission.

Deuxième exemple de service à compétence nationale, l’Agence des Participations de l’État qui a été créée en 2004, toujours au sein du Ministère de l’Économie. L’Agence des Participations de l’État est en effet le gestionnaire d’un ensemble d’actions dont l’État est titulaire au sein de certaines sociétés privées. En effet, l’État dispose de parts au sein du capital d’EDF, de La Poste, de la SNCF, de Renault, de France Télévisions ou encore de divers ports et aéroports. L’APE est chargée d’analyser la situation financière de ces entreprises, elle propose une stratégie au Ministre de l’Économie et aux autres ministres concernés par exemple le Ministre des Transports (SNCF) ou du Ministre de la Culture (France Télévisions). Puis l’Agence met en œuvre cette stratégie, elle réalise les programmes de financement, etc. En d’autres termes, cette agence gère les participations de l’État dans différentes sociétés privées.

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Q
  1. Les agences dotées de la personnalité morale mais soumises au contrôle de l’État (a. Les établissements publics)
A

e sont des personnes morales de droit public qui sont chargées d’une mission d’intérêt général particulière. Ces missions sont d’une extrême diversité : contrôler des activités, rendre des services à la population (soins, éducation), entreprendre des travaux de recherche, prendre en charge la restauration d’un monument (exemple: Notre-Dame de Paris), concevoir un réseau de transports (exemple : Société du Grand Paris), etc. Et pour réaliser leurs missions les établissements publics disposent d’une assez grande marge de manœuvre. D’abord ce sont des personnes morales qui sont distinctes de l’État. Ensuite, ce sont organes qui ne reçoivent pas d’instructions mais qui s’organisent eux-mêmes, c’est-à-dire qu’ils règlementent par exemple eux-mêmes le droit de grève de leur personnel. Ils disposent également de leur budget, de leur comptabilité, etc. Il s’agit donc d’établissements qui disposent d’une certaine liberté par rapport à l’État. Mais il ne faut pas pour autant en tirer une complète liberté, les établissements publics restent soumis à l’État.

Premièrement, les établissements publics ne se créent pas eux-mêmes. Un établissement public est créé par le législateur ou par le Premier Ministre. Il ne décide pas de sa création, il est créé de manière autoritaire, et il ne décide pas non plus de sa fin, c’est-à-dire que le Premier ministre ou le législateur peut le supprimer.

Deuxièmement, la liberté d’organisation interne de certains établissements publics est assez limitée. Je vais prendre un exemple, celui des universités, dont l’organisation interne est très largement déterminée par le Code de l’Éducation lui-même. Tous les établissements publics ne s’organisent donc pas complètement librement.

Troisièmement, les établissements publics sont soumis à une habilitation qui leur a été donnée. On parle de principe de spécialité, c’est-à-dire qu’un établissement public est créé pour exécuter une mission précise de laquelle il ne peut pas s’écarter. Un établissement public et ses organes ont une habilitation pour agir dans un certain champ qui est déterminé par le texte qui institue cet établissement public. Et les organes de cet établissement public ne peuvent pas faire sortir l’établissement public de sa mission telle qu’elle a été déterminée par le texte fondateur.

Quatrièmement, un établissement public est soumis au contrôle de l’État. C’est ce que l’on appelle la tutelle de l’État sur les établissements publics. Chaque établissement public est rattaché à une administration étatique, administration qui exerce en retour un contrôle sur cet établissement public. Cependant, le contrôle qui est exercé sur les établissements publics est très variable d’un établissement public à l’autre. Tout dépend toujours du texte fondateur de cet établissement public qui va déterminer les conditions dans lesquelles l’État va le contrôler. Pour vous montrer la diversité des conditions du contrôle de l’État sur les établissements publics, je vais prendre deux exemples assez distincts l’un de l’autre du point de vue du contrôle.

D’abord l’Institut français du Cheval et de l’Équitation, cet institut fait l’objet d’un contrôle assez important de l’État. C’est un établissement qui relève de la tutelle du Ministre de l’Agriculture d’un côté et du Ministre des Sports de l’autre. Il a pour mission de promouvoir l’élevage des équidés et des activités qui sont liées au cheval, et notamment il gère une école d’équitation. Le contrôle de l’État sur cet établissement prend plusieurs formes. D’abord, 7 des 21 membres de son Conseil d’Administration sont nommés par des ministres. Ensuite l’État exerce un contrôle financier sur les activités de cet institut. Et enfin, les ministres disposent d’une forme de relai au sein de cet établissement public, qui est dénommé Commissaire du Gouvernement, c’est-à-dire représentant du Gouvernement au sein de l’établissement public. Ce Commissaire du Gouvernement peut s’opposer à une délibération du Conseil d’Administration de l’établissement public ce qui permettra ensuite au ministre compétent de s’opposer à l’adoption d’une mesure par un établissement public.

Deuxième exemple, qui est très distinct de l’Institut français du Cheval et de l’Équitation, la Caisse des Dépôts et des Consignations, qui elle fait l’objet d’un contrôle bien plus souple et assez particulier. C’est un établissement public très important, qui a plusieurs fonctions. D’abord, la Caisse des Dépôts et des Consignations gère les fonds d’épargne qui sont déposés sur les livrets A, les livrets de développement durable et les livrets d’épargne populaire. C’est- à-dire qu’une grande partie des comptes que nous avons tous, sont gérés par la Caisse des Dépôts et des Consignations. Ensuite la Caisse des Dépôts et des Consignations utilise ces fonds pour financer des projets d’intérêt général comme par exemple du logement social, des structures d’hébergement pour des populations vulnérables, des actions de développement durable, des projets de grandes infrastructures comme par exemples des lignes à grande vitesse, des bâtiments publics ou encore des établissements scolaires. C’est l’essentiel des fonctions de la Caisse des Dépôts et des Consignations, il y en a d’autres mais je ne reviens pas dessus, il s’agit simplement d’un exemple. La Caisse des Dépôts et des Consignations fait l’objet d’un contrôle assez unique de la part de l’État. D’abord, le contrôle administratif est très léger, l’administration centrale nomme le Directeur général de la Caisse des Dépôts et des Consignations et 4 des 16 membres de la Commission de Surveillance de cet établissement public. Mais c’est à peu près tout ce que fait l’État, l’administration centrale dans le fonctionnement de la Caisse des Dépôts et des Consignations. En effet, l’essentiel du contrôle qui est exercé sur la Caisse des Dépôts et des Consignations est parlementaire. Les députés et les sénateurs peuvent s’opposer à la nomination du Directeur général par le Gouvernement. La Commission de Surveillance qui est l’organe principal de la Caisse des Dépôts et des Consignations est présidé par un parlementaire et elle comporte majoritairement en son sein des parlementaires ou des personnes qui sont nommées par des parlementaires. Globalement, le contrôle qui est exercé sur la Caisse des Dépôts et des Consignations n’est pas administratif mais parlementaire. Voyez donc l’écart qui existe entre l’Institut français du Cheval et de l’Équitation et la Caisse des Dépôts et des Consignations, l’un est très contrôlé, l’autre beaucoup moins de la part de l’administration.

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Q
  1. Les agences dotées de la personnalité morale mais soumises au contrôle de l’État (b. Les groupements d’intérêt public)
A

Il existe une différence fondamentale entre les GIP et les établissements publics. Les GIP ne sont pas créés de manière autoritaire. Ce sont des groupements qui sont constitués quasiment par un contrat, contrairement aux établissements publics qui sont créés par une décision de l’administration centrale ou du législateur.

Les GIP eux sont créés par rassemblement conventionnel de personnes publiques et de personnes privées. Il s’agit d’une forme donc d’association entre les services de l’État et les services d’autres personnes publiques et d’autres personnes privées. Cette association de services va ensuite prendre en charge une mission d’intérêt général.

En effet, les GIP sont soumis au contrôle de l’État. D’une part le contrat qui créé un GIP est soumis à l’approbation des ministres compétents. Ensuite, un GIP est nécessairement dirigé par une assemblée dont la majorité des membres représente des personnes publiques ou des entreprises publiques. Et enfin, tout GIP comporte en son sein, comme les établissements publics, un Commissaire du Gouvernement, qui est là pour représenter l’État dans le fonctionnement du GIP.

Un exemple : en 1993, est créé le GIP Habitat et interventions sociales pour les mal-logés et les sans-abris. Ce GIP a été créé entre l’État, un établissement public que l’on appelle Fonds d’action sociale pour les travailleurs immigrés et plusieurs sociétés privées notamment des organismes d’HLM, des entreprises qui sont chargées de la construction de foyer pour les travailleurs. Ce GIP exerce ses missions dans les domaines de la recherche de logement, l’accompagnement social, il participe à des projets de reconstruction urbaine, coordonne des plateformes d’accès aux logements, etc. Il s’agit d’une structure qui met en commun les savoir-faire qui sont ceux des personnes publiques et des personnes privées qui interviennent dans ce domaine.

La catégorie des GIP a été créée par le législateur en 1982. Mais le législateur dans cette loi de 1982, n’a pas précisé s’il s’agissait de personnes privées ou de personnes publiques. La question pouvait se poser car un GIP regroupe des personnes publiques et des personnes privées, et pourrait simplement constituer une association de personnes et bénéficier simplement de la personnalité morale de droit privé, une forme d’association. Et la question s’est posée au juge à propos du GIP dont je vous parlais, le GIP Habitat et interventions sociales. S’agit-il d’une personne publique ou d’une personne privée ? Le Tribunal des Conflits qui a été saisi de la question, a répondu dans un arrêt GIP Habitat et interventions sociales
contre Madame Verdier, arrêt du 14 février 2000. Selon le Tribunal des Conflits, le législateur a entendu, dans la loi de 1982 qui a créé la catégorie des groupements d’intérêt public, faire de ces groupements des personnes publiques. Notamment parce qu’il a imposé un contrôle des GIP par les personnes publiques.

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6
Q
  1. Les agences jouissant de garanties d’indépendance : les autorités administratives indépendantes et les autorités publiques indépendantes
A

Les AAI sont des services de l’État, c’est-à-dire qu’elles ne disposent pas de la personnalité morale, et les API elles disposent de la personnalité morale c’est-à-dire qu’elles sont distinctes de l’État. Ces autorités exercent différents types de mission, elles ont en charge la protection des droits et libertés ou alors elles ont en charge le contrôle, la régulation, de certains secteurs économiques ou de production, c’est le cas par exemple de l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) en matière de marchés financiers ou de l’Autorité de régulation des transports en matière de transports ferroviaires, autoroutiers ou encore aéroportuaires.

Pour réaliser leurs missions les AAI et les API disposent de pouvoirs très divers : elles édictent des règlementations, elles donnent des autorisations, elles inspectent, elles recommandent, elles ordonnent des pratiques ou éventuellement sanctionnent. Ces organismes disposent de garanties d’indépendance vis-à-vis de l’État, garanties qui ont été reprises dans une loi de 2017 relative au statut général des AAI et des API. Les membres des AAI et des API sont irrévocables, ce qui garantit une forme d’indépendance vis-à-vis de l’État, aucune administration ne peut leur adresser des instructions et elles ne font l’objet d’aucun contrôle financier de la part des administrations centrales. En revanche, les AAI et les API sont soumises à un contrôle démocratique, parlementaire et à un contrôle juridictionnel.

Je prendrais rapidement un exemple d’autorité administrative indépendante, la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique. Cette autorité est chargée d’assurer la transparence sur la situation des élus et des personnalités publiques. Cette mission correspond aux standards actuels de transparence de la démocratie, elle garantit l’accès des citoyens à des informations qui sont nécessaires à la constitution de leur avis sur le personnel politique et public. Et dans ce cadre-là, la Haute Autorité reçoit et vérifie des déclarations de patrimoine, dont vous avez très probablement entendu parler, elle reçoit les déclarations de patrimoine d’environ 15 000 personnes. Ce sont donc des personnalités publiques ou politiques. Deuxième fonction de la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique : prévenir les conflits d’intérêts c’est-à-dire qu’elle se prononce sur la situation personnelle des élus ou des fonctionnaires, elle peut déconseiller certaines activités, elle peut même éventuellement imposer à ces personnes politiques ou publiques de faire cesser des conflits d’intérêts. Et pour exercer ses missions la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique est indépendante, bénéficie de garanties d’indépendance vis-à-vis de l’État. La plupart de ses membres sont élus par des juges ou nommés par les présidents de l’Assemblée Nationale et du Sénat. Ces membres sont irrévocables et sont nommés pour 6 ans non renouvelable. Ces membres ne peuvent recevoir aucune instruction. Leur fonction est incompatible avec tout autre mandat politique ou autre fonction publique. Cette AAI dispose également d’un budget qu’elle emploie librement et d’ailleurs elle s’organise également librement

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7
Q

B. Les raisons d’être des agences de l’État :

1. Le besoin d’efficacité

A

L’avènement d’une vision économique de l’Homme et des rapports humains a eu lieu dans tous les domaines de l’activité humaine, y compris dans celui de l’intérêt général et de l’administration. Alors même que les acteurs publics n’existent que pour la satisfaction d’un intérêt général qui dépasse la simple somme des besoins particuliers des individus, la rationalité économique s’est imposée à l’action publique. À partir des années 1970 – 1980, d’abord dans les pays anglo-saxons puis dans le reste du monde, des auteurs et des institutions, comme par exemple le FMI, ont défendu l’idée selon laquelle l’administration devrait fonctionner comme une entreprise. C’est-à-dire se fixer des objectifs, le plus possible chiffrés d’ailleurs, et atteindre ces objectifs avec le moins de moyens possibles.

On parle à propos de ce courant de la nouvelle gestion publique, qui vient de l’expression anglaise « New Public Management». L’un des préceptes de cette idéologie est que les structures administratives doivent, comme les structures privées, être le plus spécialisé possible, être autonomes et enfin être jugées sur leurs résultats. L’administration traditionnelle, bureaucratique, verticale, fondée sur la hiérarchie ne serait pas efficace et il faudrait donc créer des petites structures dotées d’un but précis et qui seraient autonomes les unes des autres. Dans ce cadre théorique, l’autonomisation et la spécialisation des services administratifs serait nécessaire. Plusieurs formes institutionnelles sont utilisées dans ce cas.

Premièrement, l’établissement public, qui est doté de la personnalité morale, qui est autonome de l’administration centrale même s’il est contrôlé par elle, qui est spécialisé. L’établissement public fournit ainsi un outil souple de réalisation d’un service particulier. Il a son propre budget, une comptabilité particulière, ses propres agents, des facilités de recrutement, etc. Il ressemblerait d’ailleurs, du point de vue de sa conception, à une entreprise.

Deuxième structure qui est utilisée pour atteindre ce besoin d’efficacité, le service à compétence nationale qui certes n’a pas une personnalité morale distincte de l’État mais qui a une mission précise, il est identifiable au sein de la hiérarchie administrative et donc il est évaluable, et il bénéficie en plus de certaines libertés de gestion interne.

Troisième structure qui peut répondre à ce besoin d’efficacité, d’un point de vue économique, c’est le GIP. En effet, le Groupement d’Intérêts Publics réunit des personnes publiques et des personnes privées, c’est un mode souple de gestion puisqu’il est contractuel à la base. Il gère une mission précise, et en plus de cela, d’un point de vue économique, il mutualise des moyens, c’est-à-dire qu’il met en commun des moyens qui sont utilisés par des personnes distinctes les unes des autres, des personnes publiques et des personnes privées, ils mettent en commun ces moyens pour atteindre un but, qui serait donc théoriquement, plus facile à atteindre de cette manière.

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B. Les raisons d’être des agences de l’État :

2. Le besoin d’indépendance à l’égard de l’administration centrale

A

Certaines administrations ont la charge d’une mission qui implique des garanties d’indépendance vis-à-vis du reste de l’État. C’est par exemple le cas des universités, celles-ci ont été créées, historiquement, en dehors de l’État. Elles bénéficiaient de ce que l’on appelle des franchises universitaires c’est-à-dire des libertés vis-à-vis du pouvoir.

Elles disposent aujourd’hui d’un statut d’établissement public et sont donc toujours distinctes, d’une certaine manière, de l’État, même si elles sont contrôlées par lui. Ce statut est donc une continuité d’une tradition qui remonte au Moyen-Âge, une époque à laquelle l’université ne relevait, non pas du pouvoir temporel c’est-à-dire de l’État mais du pouvoir spirituel. Mais même si les universités ne relèvent plus du pouvoir spirituel, leur indépendance est toujours justifiée. Article L141-6 du Code de l’éducation : «

Le service public de l’enseignement supérieur est laïque et indépendant de toute entreprise politique, économique, religieuse ou idéologique ; il tend à l’objectivité du savoir ; il respecte la diversité des opinions. Il doit garantir à l’enseignement et à la recherche leurs possibilités de libre développement scientifique, créateur et critique ». Un ensemble de raison qui justifie, en partie évidemment, l’existence d’établissements publics distincts de l’État dans ce domaine.

Mais le principal exemple d’organe administratif qui est doté de garanties d’indépendances, pour assurer l’impartialité de ses décisions, ce sont les autorités administratives indépendantes et les autorités publiques indépendantes. Ces organismes administratifs sont dotés d’une autonomie très poussée, car ils interviennent dans des domaines qui sont sensibles et où l’influence de l’exécutif doit s’effacer pour garantir l’adoption de bonnes décisions, décisions impartiales.

C’est le cas par exemple de la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique, elle est indépendante du pouvoir pour exécuter correctement sa mission vis-à-vis des membres du Gouvernement ou des agents de l’administration centrale. C’est aussi le cas du Défenseur des droits, dont la mission est, en vertu de l’article 71-1 de la Constitution, justement de veiller « au respect des droits et libertés par les administrations de l’État, les collectivités territoriales, les établissements publics, ainsi que par tout organisme investi d’une mission de service public, ou à l’égard duquel la loi organique lui attribue des compétences ». Pour exercer correctement cette mission, le Défenseur des droits, doit être indépendant de l’exécutif.

La création d’administrations indépendantes peut aussi résulter d’une obligation internationale ou européenne, de créer un organisme indépendant du pouvoir. C’est le cas par exemple d’une autorité créée en 2008, d’une API : l’Autorité de Régulation des Transports. L’Union Européenne a décidé à partir des années 1990, que les États membres allaient devoir ouvrir le transport ferroviaire à la concurrence, ils allaient ainsi devoir mettre fin à des monopoles, comme par exemple en France avec le monopole de la SNCF sur le transport de personnes et de marchandises sur des rails. Les États membres devaient donc permettre à d’autres entreprises d’utiliser les réseaux ferrés et devaient également créer des autorités de régulation, c’est-à-dire des autorités chargées de contrôler l’utilisation des réseaux par les entreprises de transport. Et il fallait justement que ces autorités de régulation soient indépendantes de l’État pour assurer l’impartialité de leurs contrôles, elles devaient être à la fois indépendantes des entreprises de transport, mais aussi des administrations car les administrations et notamment en France gèrent un service public de transport. Pour assurer donc l’impartialité de la décision de l’Autorité de régulation des transports, il faut que celle-ci soit distincte à la fois des entreprises qui utilisent les réseaux ferrés et de l’État qui gère un service public sur le réseau ferré.

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9
Q

B. Les raisons d’être des agences de l’État :

3. Le besoin d’expertise

A

La création d’organes administratifs identifiables et spécialisés permet d’y réunir des personnes expertes dans un domaine et qui pourront prendre les décisions les plus adéquates par rapport aux questions dont ces agences sont chargées. L’expertise est par exemple très clairement l’objet de deux agences qui existent en matière de nucléaire. Il y a l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) qui est une AAI, et l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN).

L’ASN d’abord qui est une AAI, est chargée de la surveillance de toutes les activités nucléaires sur notre territoire : production d’électricité par les centrales, imagerie médicale, traitement des cancers, etc. Et l’ASN regroupe un ensemble de personnes qui sont spécialistes de cette matière qui est éminemment technique. Et au passage, l’ASN est indépendante de l’État car l’État a justement des activités en matière de nucléaire et il doit être contrôlé par cette agence, agence qui est donc distincte de lui, qui bénéficie de garanties d’indépendance vis-à- vis de l’État qu’elle contrôle.

L’IRSN ensuite qui est un établissement public constitué pour l’essentiel d’experts de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, c’est-à-dire de la protection contre la radioactivité, contre les rayonnements ionisants. L’IRSN est à la disposition de l’État pour proposer des études de terrain, des améliorations de la règlementation, des améliorations des pratiques etc. Et cet IRSN, cet établissement public est justement composé de personnes qui sont très qualifiées et qui peuvent prendre les meilleures décisions, qui peuvent proposer les meilleures améliorations de la réglementation par exemple, car ce sont des personnes qui sont expertes dans ce domaine.

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