Preuve pénale Flashcards
Le lundi 1er juin 2020, Serge Lemay, Alex Jean-Claude et Walter Smith sont accusés conjointement. La dénonciation comprend sept chefs d’accusation :
- complot de meurtre (art. 465 (1) a) C.cr.);
- tentative de meurtre à l’endroit de Jonathan Ianos (art. 239 C.cr.);
- tentative de meurtre à l’endroit de Florina Balcani (art. 239 C.cr.);
- avoir déchargé une arme à feu (art. 244 C.cr.);
- possession de drogue en vue du trafic (art. 5 (2) de la L.d.a.s.);
- vol d’automobile (art. 333.1 C.cr.);
- recel d’un bien d’une valeur de plus de 5 000 $ (art. 355 a) C.cr.).
Comme les trois prévenus ont participé à une aventure commune, la poursuite pourrait-elle les accuser conjointement ?
Oui. Toutefois Serge Lemay, Alex Jean-Claude et Walter Smith étant coaccusés, ils ne pourront être appelés à témoigner par la poursuite contre leurs coaccusés (art. 4 (1) de la Loi sur la preuve).
Serge Lemay, Alex Jean-Claude et Walter Smith ont commis ensemble plusieurs crimes.
Dans l’hypothèse où la poursuite porterait des accusations séparées contre les trois complices, pourrait-elle contraindre Walter Smith à témoigner au procès de Serge Lemay?
Oui. Lorsque des complices sont accusés dans des dossiers séparés, ils peuvent être contraints de témoigner l’un contre l’autre au procès de leur complice (R. c. S. (R.J.), [1995] 1 R.C.S. 451).
Serge Lemay, Alex Jean-Claude et Walter Smith ont commis ensemble plusieurs crimes.
Dans l’hypothèse où la poursuite porterait des accusations séparées contre les trois complices, et que Walter Smith témoignait au procès de Serge Lemay, si le témoignage de Walter était incriminant, la poursuite pourra-t-elle utiliser ce témoignage pour contre-interroger Walter Smith lors de son propre procès?
Non. Si le témoignage antérieur forcé est incriminant, il doit être considéré comme inadmissible en preuve contre lui, même dans le but manifeste d’attaquer seulement sa crédibilité. La seule utilisation possible doit se limiter aux poursuites pour parjure ou témoignages contradictoires, s’il y a lieu (art. 13 de la Charte; R. c. Henry, 2005 CSC 76).
Serge Lemay, Alex Jean-Claude et Walter Smith ont commis ensemble plusieurs crimes.
Dans l’hypothèse où la poursuite porterait des accusations séparées contre les trois complices, et que Walter Smith témoignait au procès de Serge Lemay, la preuve dérivée qui pourrait être révélée par son témoignage forcé pourra-t-elle être admissible contre lui lors de son procès?
Non. À moins que cette preuve dérivée aurait pu être obtenue sans ce témoignage forcé (R. c. S. (R.J.), précité).
Après avoir appris, par le rapport médical soumis par le procureur de la poursuite, que l’état de Florina, une témoin des événements, a nécessité par le passé l’intervention d’un psychiatre pendant plusieurs mois, les avocats de la défense demandent au procureur de la poursuite de leur divulguer la totalité du dossier psychiatrique de Florinaen possession de son psychiatre. Le procureur de la poursuite refuse d’accéder à cette demande.
Le procureur de la poursuite peut-il refuser d’accéder à cette demande ?
Oui. Car il s’agit d’un document personnel en possession d’un tiers. Ces documents ne font pas partie du dossier de la poursuite ou d’un agent de l’État. La protection de la vie privée en matière de renseignements est un droit constitutionnel (R. c. O’Connor, [1995] 4 R.C.S. 411).
Désireux d’assurer à leurs clients une défense pleine et entière, les avocats de la défense décident de demander au tribunal d’obliger le procureur de la poursuite à leur divulguer tous les rapports psychiatriques antérieurs de Florina, une témoin importante des événements en cause.
Les avocats de la défense peuvent-ils demander au tribunal d’obtenir la divulgation de cette preuve ?
Oui. Ils devront présenter au juge du procès une requête appuyée d’un affidavit exposant les motifs précis pour obtenir la divulgation d’un élément de preuve en possession d’un tiers, selon les critères établis dans l’arrêt R. c. O’Connor, précité. Un avis de cette requête doit être donné au psychiatre en possession du dossier ainsi qu’à Florina Balcani. Un subpoena duces tecum assurera la présence à la cour du psychiatre (art. 700 (1) C.cr.) (voir également R. c. McNeil, 2009 CSC 3).
Une enfant de 10 ans peut-elle rendre témoignage?
Oui. Toute personne âgée de moins de 14 ans est présumée habile à témoigner. Elle témoignera sous promesse de dire la vérité, puisqu’elle ne peut être assermentée ni faire d’affirmation solennelle (art. 16.1 (1), (2), (6), (7) et (8) de la Loi sur la preuve).
La cour pourrait-elle décider de ne pas recevoir le témoignage d’une enfant de 10 ans?
Oui. Si elle n’a pas la capacité de comprendre les questions et d’y répondre. Il appartient à la partie qui met cette capacité en doute de convaincre la cour qu’il existe des motifs d’en douter (art. 16.1 (3) et (4) de la Loi sur la preuve).
Une témoin pourra-t-elle relater devant le tribunal, pour faire preuve de leur contenu, les paroles prononcées par la victime immédiatement avant les coups de feu fataux « Non, Serge! Non, Serge! »?
Oui. Il s’agit d’une déclaration contemporaine et spontanée (res gestae) qui constitue une exception traditionnelle à la prohibition du ouï-dire (R. c. Graham, [1974] R.C.S. 206).
Vanessa, 10 ans, a très peur de témoigner devant les accusés et elle est gênée de le faire en présence du public. Elle demande s’il est possible que les accusés ne soient pas présents lors de son témoignage. Est-ce possible?
Oui. Sur demande du poursuivant ou de tout témoin, l’article 486.2 C.cr. permet aux personnes de moins de 18 ans de témoigner à l’extérieur de la salle d’audience ou derrière un écran leur permettant de ne pas voir l’accusé, lequel a toutefois l’obligation d’être présent pendant toute partie de l’audience engagée contre lui (art. 650 (1) C.cr.).
Le juge peut également rendre une telle ordonnance, s’il est d’avis que cela est nécessaire pour obtenir du témoin un témoignage complet et franc.
Un témoin demande que le public en général soit exclu de la salle d’audience. Est-ce possible?
Oui. En ce qui concerne le public, les procès ont lieu en audience publique. Cependant, si le juge qui préside est d’avis qu’il est dans l’intérêt de la moralité publique, du maintien de l’ordre ou de la bonne administration de la justice d’exclure le public, il pourra ordonner le huis clos (art. 486 (1) C.cr.). À l’article 486 (2) C.cr., le fait de veiller à ce que soit sauvegardé l’intérêt des témoins mineurs relève de la bonne administration de la justice.
Un témoin affirme que l’accusé est le tireur, qu’elle est en mesure de le décrire et de l’identifier. Elle le pointe du doigt. Elle explique que si elle n’a pas dit aux policiers dans sa déclaration écrite, au moment des événements, qu’elle pouvait identifier l’agresseur, c’est qu’elle a eu peur et qu’elle espérait ne pas être mêlée à cette histoire. De plus, comme elle ajoute avoir raconté cette nouvelle version à l’enquêteur avant le début du procès, l’avocat de l’accusé prétend que cette preuve que la poursuite ne lui a pas divulguée permet à la cour d’accorder une réparation en vertu de l’article 24 (1) de la Charte.
Y a-t-il eu atteinte au droit à la divulgation de la preuve de l’accusé?
Oui. La poursuite a l’obligation de divulguer tous les éléments de preuve pertinents, c’est-à-dire utiles pour la défense, qui sont en sa possession, qu’ils soient inculpatoires ou exculpatoires et qu’elle prévoit s’en servir ou non (art. 7 de la Charte; R. c. Stinchcombe, [1991] 3 R.C.S. 326).
Un témoin affirme que l’accusé est le tireur, qu’elle est en mesure de le décrire et de l’identifier. Elle le pointe du doigt. Elle explique que si elle n’a pas dit aux policiers dans sa déclaration écrite, au moment des événements, qu’elle pouvait identifier l’agresseur, c’est qu’elle a eu peur et qu’elle espérait ne pas être mêlée à cette histoire.
L’avocat de l’accusé a-t-il la possibilité d’affaiblir son témoignage ainsi que de semer un doute dans l’esprit du jury en ce qui concerne l’identification faite au procès par le témoin ?
Oui. Il doit contre-interroger le témoin afin de la mettre en contradiction avec sa déclaration écrite antérieure. Cependant, il doit auparavant attirer son attention et lui exhiber les parties de sa déclaration qui doivent servir à la mettre en contradiction. En principe, en vertu de l’article 10 de la Loi sur la preuve, tout témoin peut être contre-interrogé sur sa déclaration écrite antérieure sans qu’on soit obligé de lui exhiber l’écrit. En toute justice pour le témoin, il importe de lui rappeler les circonstances dans lesquelles il aurait fait cette déclaration antérieure. S’il nie l’avoir faite, la preuve de son existence devra être faite soit en interrompant immédiatement son témoignage et en faisant entendre les policiers qui ont pris sa déclaration au moment opportun.
En août, avant la tenue de l’enquête préliminaire, Zaid Musharef est retourné vivre au Pakistan. La police n’arrive pas à le retrouver pour qu’il puisse être assigné comme témoin au procès. Le procureur de la poursuite veut mettre en preuve ce que Zaid Musharef a vu lors des événements, et a immédiatement déclaré à Ibrahim Rahman à ce sujet.
Le procureur de la poursuite peut-il mettre en preuve ce que Zaid Musharef a vu?
Oui. Pour mettre en preuve ce que Zaid Musharef a vu, la poursuite doit faire relater par Ibrahim Rahman ce que Zaid Musharef lui a déclaré, ce qui constitue du ouï-dire. Avant d’admettre cette preuve, le tribunal devra tenir un voir-dire, hors la présence du jury, afin de déterminer le caractère de nécessité et de fiabilité de cette déclaration. La nécessité sera établie par l’impossibilité de retrouver l’auteur de la déclaration et la fiabilité par les circonstances qui ont donné lieu à celle-ci : contemporanéité, spontanéité, absence de raison de mentir, etc. (R. c. Khan, [1990] 2 R.C.S. 531; R. c. Smith, [1991] 1 R.C.S. 714; R. c. Khelawon, 2006 CSC 57).
Si le tribunal considère que cette preuve est nécessaire et fiable, Ibrahim Rahman pourra, lors de son témoignage, relater ce que Zaid Musharef lui a déclaré avoir vu.
Lors de son témoignage, le témoin mentionne qu’il ne se souvient pas du numéro de plaque d’immatriculation du véhicule ayant servis à commettre le crime. Le procureur de la poursuite peut-il mettre en preuve le numéro de la plaque d’immatriculation du véhicule?
Oui. Par la technique visant à rafraîchir la mémoire de son témoin à l’aide de la facture. Si sa mémoire n’est pas ravivée, il faut lui faire dire qu’il a noté le numéro sur la facture en question. Il faut ensuite déposer la facture en preuve pour valoir de son contenu.