Personnage En Marge, Plaisir Du Romanesque Flashcards
Le plaisir d lire ne tient il qu’à la passion amoureuse ?
Un amour fou de Des Grieux
Une passion source de malheur
La voix unique de Des Grieux réinvente avec sensibilité l’histoire de ses amours
Le roman (ré)invente Manon
Le récit est enfin celui de la reconstruction du personnage de Des Grieux
Une maîtrise parfaite de l’art d’écrire
Le roman Manon Lescaut est intégré comme un épisode dans les Mémoires d’un homme de qualité
Le rythme du récit emporte le lecteur
Un amour fou de Des Grieux
Des Grieux insiste sur le « charme » qu’exerce Manon à chaque instant, et s’emploie à peindre un amour fou, une passion qui balaie tout sur son passage.
Dès leur rencontre, Des Grieux est emporté par des sentiments dont l’intensité même le surprend. À partir de ce moment-là, et même dans des moments de ressentiment ou d’éloignement, Manon lui est indispensable. Après six mois de prison familiale, il sentait que son « cœur attendait encore quelque chose et que, pour n’avoir rien à désirer de la plus charmante solitude, il y fallait être avec Manon. »
Manon remet tout son être dans les mains de Des Grieux et préfère la certitude d’une mort dans le désert américain à la vie sans lui.
Une passion source de malheur
L’intensité de la passion lui confère une dimension tragique. « C’est l’amour, vous le savez, qui a causé toutes mes fautes. Fatale passion ! » La passion est donc la justification des actes répréhensibles qui marginalisent les personnages. Par amour, Des Grieux renonce aux principes vertueux qui avaient réglé son existence. lI abandonne sa famille et ses amis ; il apprend à tricher aux cartes pour tromper des joueurs et tue même un garde lors de son évasion de Saint Lazare.
La voix unique de Des Grieux réinvente avec sensibilité l’histoire de ses amours.
Son but est de séduire et d’emporter l’adhésion de l’Homme de Qualité. Le récit met en avant la morale de l’intention, toujours pure, même si les actions ne le sont pas. Manon n’a jamais la volonté de nuire à Des Grieux; alors qu’elle vient de le trahir pour la troisième fois, elle explique qu’elle « pèche sans malice » et qu’elle « est droite et sincère .» De même, Des Grieux n’a pas l’intention de tuer, mais il se trouve dans un cas justifié que le texte ne condamne pas (la liberté) et par l’absence de préméditation. C’est donc non pas à l’aune de leurs actes, mais de leur nature qu’il faut les juger. Le roman les présente comme un couple dont la profondeur des sentiments saisit tous ceux qu’ils rencontrent.
Le roman (ré)invente Manon
Manon est une double création :
-du lecteur d’abord qui est emporté, comme Renoncour, par l’image entraînante et charmante d’une jeune fille qu’il fantasme. Jamais Prévost ne décrit Manon, qui a « l’air de l’Amour même .»
-du Chevalier ensuite, qui finit par construire d’elle l’image divine de l’amour. D’abord il va s’employer à montrer qu’elle n’est «ni tout à fait innocente ni tout à fait coupable »; elle ne cherche visiblement pas à séduire les hommes qui la désirent, mais inoculer par l’argent, elle use de ses charmes, son infidélité est donc la conséquence d’une société dépravée.
Des Grieux va montrer l’évolution de Manon qui devient une figure exemplaire et idéalisée de l’amour, comme la Didon de Virgile dans laquelle il voyait une image parfaite de la fidélité. Mort dans le désert
Le récit est enfin celui de la reconstruction du personnage de Des Grieux
Seul survivant de la tragédie amoureuse, son récit a une valeur testimoniale :
-des dangers d’une passion funeste
-de la leçon exemplaire qu’il faut en tirer
En enterrant Manon, le chevalier se déleste du vieil homme qu’il était ; il retrouve des « idées dignes de sa naissance » et les « inspirations de l’honneur » ; il reconnaît les torts qu’il a eus envers la société et s’engage à réparer le scandale de sa conduite passée.
‘Les semences de la vertu qu’il avait jeté autrefois dans mon cœur, commencer à produire des fruits dont il allait être satisfait. ‘ à Tiberge
Le narrateur lui-même maîtrise parfaitement l’art du récit
Dans sa reconstruction des faits, Des Grieux ménage des arrêts et des suspens qui renforcent l’attente du lecteur. Au moment où il va retrouver Manon dans sa prison, un long échange avec un serviteur suspend le temps : la conversation favorise la dramatisation de l’épisode, en recréant une situation émotionnelle que le lecteur ne peut que partager.
Le récit joue également sur des effets dynamiques, en utilisant fréquemment la technique de la prolepse: « Vous verrez que ce n’est pas sans raison que je me suis étendu sur cette ridicule scène »
Le narrateur sait varier les tons et les effets en fonction de ses destinataires ; il est dynamique et efficace avec Lescaut mais pathétique face au Prieur devant qui il multiplie les interjections et les sanglots.
Le roman Manon Lescaut est intégré comme un épisode dans les Mémoires d’un homme de qualité
Le récit de Des Grieux est précédé d’une première rencontre entre Renoncour et les deux amants, au moment de leur départ pour la Louisiane. Manon a disparu lors de leur seconde rencontre à Calais; il ne fait aucun doute qu’elle est morte. Le roman crée ainsi une attente chez le lecteur.
Le rythme du récit emporte le lecteur
Les épisodes s’enchaînent les uns aux autres dans un tourbillon des émotions des personnages. Cette precipitation prive le récepteur de tout recul intellectuel : par manque de distance avec le récit, plongé dans un rapport purement sensible à ce qu’il vient d’écouter et qu’il est incapable de juger.
Ainsi, peut-on soutenir que ce sont avant tout leurs aventures extraordinaires qui font l’intérêt des personnages de marginaux dans un roman, alors que le lecteur recherche aussi des personnages qui le touchent, et que le romancier a généralement l’ambition d’instruire son lecteur ?
La marginalité des personnages autorise au romancier une certaine liberté d’imagination
Le lecteur goûte le plaisir du dépaysement par rapport au monde ordinaire
Le lecteur peut assouvir à bon compte sa fascination pour les bas-fonds
Le romanesque du coeur l’emporte sur le romanesque des aventures
Les personnages de marginaux offrent au romancier l’opportunité d’explorer la complexité des individus
Certains romans ayant pour héros des marginaux sont intentionnellement dépourvus de tout romanesque
Une réflexion morale
Une réflexion sociale
Une réflexion sur la condition humaine
La marginalité des personnages autorise au romancier une certaine liberté d’imagination
Choisir pour héros des personnages de marginaux offre au romancier l’opportunité d’imaginer des intrigues peu banales et mouvementées, en alternant les épisodes drôlatiques et les moments plus sérieux, voire tragiques. S’ils ne s’étaient pas écartés du chemin qui leur était tracé et mis au ban de la société en décidant de fuir ensemble, Manon aurait été religieuse, Des Grieux serait entré dans l’ordre de Malte. Comme leur marginalité les prive de ressources financières, les deux jeunes gens recourent à des expédients douteux pour survivre (prostitution, tricherie, escroquerie). Le bonheur n’interrompra que briefe leurs malheurs : ‘La Fortune ne me délivra d’un précipice que pour me faire tomber dans un autre.’
Le lecteur goûte le plaisir du dépaysement par rapport au monde ordinaire
Les personnages qui vivent en marge permettent au lecteur de découvrir l’envers de la société et des milieux qu’il ne voit pas habituellement. Dans Manon Lescaut, les deux personnages côtoient des milieux interlopes, comme le frère de Manon, « homme brutal et sans principe d’honneur », qui profite d’eux et les encourage sur la voie du déshonneur, en conseillant à Manon de se prostituer et à Des Grieux de tricher. Il y a aussi dans le roman quantité de figures fugitives: des soldats prêts à n’importe quel coup de main, des gardiens de prison prompts à se laisser acheter, des domestiques voleurs.
´Une fille comme elle devrait nous entretenir, vous, elle et moi’
Le lecteur peut assouvir à bon compte sa fascination pour les bas-fonds
Il y a certainement chez le lecteur une forme de curiosité fascinée pour les bas-fonds de la société comme de l’âme humaine que les aventures vécues par des personnages à la fois marginaux et dangereux lui permettent d’assouvir sans courir le moindre risque. En outre, ces aventures sont racontées d’une manière qui joue du suspense ce qui provoque chez le lecteur des sensations fortes. Cette attirance est manifeste dans le succès de certains genres littéraires comme le roman noir, auquel sont dédiées de nombreuses collections éditoriales (par exemple Série Noire chez Gallimard), Le cinéma regorge de gangsters, de mafieux (Le Parrain, Scarface), voire de tueurs en série (Le Silence des agneaux).
Le romanesque du cour l’emporte sur le romanesque des aventures
Les aventures dans les romans découlent souvent de la passion amoureuse. Le romanesque du cour peut commander celui des aventures et l’emporter sur elles. C’est en effet l’amour qui entraîne Des Grieux dans toutes ses aventures qui sont pour lui comme autant de sacrifices, qui le font déchoir de sa classe sociale. Après avoir perdu son honneur, il se dépouille de deux symboles de sa condition nobiliaire : il vend son cheval pour suivre Manon jusqu’au Havre, et rompt son épée pour creuser la tombe de Manon.
Les personnages de marginaux offrent au romancier l’opportunité d’explorer la complexité des individus
Il est notable que beaucoup de romans dont le héros est un marginal sont écrits à la première personne. En effet, ce choix rapproche le lecteur du personnage, mais surtout il fait passer les actions au second plan par rapport à l’explicitation des motivations des personnages. C’est le Chevalier lui-même qui raconte ses propres aventures passées: « Je veux vous apprendre, non seulement mes malheurs et mes peines, mais encore mes désordres et mes plus honteuses faiblesses. » Il met donc l’accent sur les répercussions des événements sur lui et entreprend une confession, ce qui implique une introspection. En effet il veut élucider le mystère de la passion, se comprendre lui-même et comprendre Manon,
Certains romans ayant pour héros des marginaux sont intentionnellement dépourvus de tout romanesque
Certains romans dont le héros est un marginal se distinguent par leur absence complète d’aventures romanesques. Ce marginal peut être un antihéros, au sens où il s’agit d’un personnage ordinaire. Le refus du romanesque est total : ce sont des personnages sans destin qui montrent la vacuité de l’individu dans la société moderne. Roquentin, un intellectuel isolé ronge par un sentiment de vide écrit un journal intime dans La Nausée de Sartre, c’est un personnage sans quête : « Je n’écris plus le livre. C’est fini, je ne peux plus écrire. Qu’est-ce que je vais faire de ma vie ? Rien. Exister.’ Ce passage intervient vers la fin du roman, alors que Roquentin a renoncé à écrire le livre historique qu’il projetait.
Une réflexion morale
Tandis qu’un personnage héroïque offre un modèle idéal à suivre, le personnage en marge, justement en raison de son imperfection, soulève des problèmes moraux intéressants. Prevost pense que proposer un tel exemple est plus instructif pour le lecteur qui voudrait réformer sa propre conduite. Il soumet à la réflexion du lecteur un cas moral. Dans le cours de son récit, Des Grieux s’interroge sans cesse pour comprendre ce qui l’a fait dévier du droit chemin : « qu’on m’explique donc par quel funeste ascendant l’on se trouve emporté tout d’un coup loin de son devoir, sans se trouver capable de la moindre résistance ».
Sa marginalité provient de l’impossibilité de concilier amour et vertu dans la société de son temps.
Une réflexion sociale
Les personnages de marginaux et leurs aventures dans un roman peuvent aussi être un moyen pour le romancier de faire une peinture de la société de son époque, à travers le regard décalé que de tels personnages portent sur elle. L’intérêt dans ce cas n’est donc ni dans le romanesque des aventures ni dans celui des caractères des personnages. L’utilisation du regard étranger ou naïf d’un marginal dans le conte philosophique permet de critiquer les institutions politiques, religieuses, sociales (Candide de Voltaire).
´Rien n’était si beau, si leste, si bien ordonné que les deux armées ‘chapitre 3
Une réflexion sur la condition humaine
Le personnage du marginal peut également être le support d’une réflexion philosophique sur la condition humaine, en particulier lorsque ce personnage se présente sous l’aspect d’un être médiocre et sans quête, sans but dans la vie. L’attention dans ce cas se focalise sur une vie dépouillée de tous les masques. L’Étranger de Camus a pour protagoniste un personnage en marge condamné à mort qui découvre l’absurdité du monde et de l’existence humaine : leur lucidité révèle ce que les autres hommes se refusent à voir et se cachent. Cette lucidité terrible est cependant le seul moyen d’accéder à la véritable liberté. Meursault fait la paix avec lui même après sa condamnation. Chapitre 5 P2
Des personnages à la fois marginaux et représentatifs de leur époque
Certains marginaux révèlent les travers d’une époque. Par exemple, si Des Grieux peut tricher, recourir à des hommes de main, s’évader…, c’est que ces pratiques sont courantes à l’époque. De même, la prostitution de Manon correspond à la réalité sociale de beaucoup de femmes de son milieu social. D’ailleurs tout l’encourage à considerer son corps comme une marchandise, et les hommes riches et puissants s’empressent de lui proposer de l’entretenir fastueusement.
D’une certaine manière, les deux personnages ne sont pas des marginaux mais des personnages réalistes.
´Il lui parlait de M de G…M…, vieux voluptueux qui payait prodigieusement bien les plaisirs’
Des personnages contradictoires
Le Chevalier Des Grieux est un bon exemple d’une contradiction entre les intentions et les actions. Son mobile, l’amour, est noble et exalte en lui la vertu de sacrifice mais l’entraîne cependant dans une déchéance sociale et morale, puisqu’il se porte sur une femme considérée comme inférieure à lui par la société, et immorale. Ce sont les barrières que la société impose à son aspiration à un bonheur personnel, mais non conforme, qui introduisent ce divorce entre les bonnes intentions et les actions mauvaises.
‘ l’amour est une passion innocente ; comment s’est-il changé, pour moi, en une source de misère et de désordre ?’
Des héros qui pèchent par excès
Des personnages possédant toutes ou la plupart des qualités qui sont celles des héros peuvent se marginaliser en succombant à la tentation de la démesure. C’est le cas de Des Grieux qui étaient promis à une brillante carrière dans les ordres et étaient admirés par tous. Son amour pour Manon l’amène à faire de mauvaise choses.
‘ j’escamotais assez légèrement pour tromper les plus habiles et ruiner sans affection quantité d’honnêtes gens.´après incendie de Chaillot
Des héros… en marge
Des Grieux peut être considéré comme un héros grâce à son amour sans faille auprès de Manon. Il sacrifie tout à l’amour qu’il porte à Manon : sa conscience morale, son honneur, sa foie, sa situation sociale. L’amour devient chez lui une valeur absolue qui transforme tout et qui transforme la vie en vertu au nom d’une morale naturelle, fondée sur l’amour, il est donc un héros de l’amour.
‘J’y plaçais l’idole de mon cœur…Je ne la mis dans cet état qu’après l’avoir embrassée mille fois, avec tout l’ardeur du plus parfait amour.´
Des marginaux qui se révèlent des héros
Avec certains personnages de marginaux s’opère une inversion des pôles: c’est dans la marge que se trouvent la justice, la morale, la vérité, et dans le conformisme aux valeurs sociales établies que se trouve le mal. Le personnage de Gwynplaine de L’Homme qui rit illustrent cette inversion des valeurs de la norme et de la marge. Son apparence physique à entraîné dans un premier temps une marginalité qui l’a conduit à faire du cirque mais lui a aussi permis de défendre le peuple à la chambre des lords.
‘Si vous saviez ce que j’ai vu ! Hélas ! en bas, quel tourment ! Le genre humain est au cachot. Que de damnés qui sont des innocents ! ‘ Chapitre VII de la Partie II, Livre II, Ce passage est central dans le roman, illustrant le contraste entre la laideur physique et la beauté intérieure du personnage qui dénonce l’injustice sociale