Ordres et désordres sociaux Flashcards
Introduction à Michel Dobry
Michel Dobry est un sociologue affilié au structuralisme bourdieusien qui décrit un modèle avec une puissance explicative décuplée de ce qu’est une crise multi-sectorielle.
Le monde ne pose pas de problème en dehors des situations de crises. Affiliation à Bourdieu puisqu’il y a un raisonnement relationnel.
Inflexions entre Bourdieu et Dobry
Bourdieu étudie la stabilité, la reproduction, là où Dobry se focalise sur la crise et le champ des possibles.
Le champ de Bourdieu devient le secteur pour Dobry car il lui semble plus hétérogène.
Selon Dobry, la dynamique multi-sectorielle produit un basculement en une conjoncture fluide.
La fluidité.
Toute mobilisation est relativement hétérogène. Une situation de fluidité est le moment où les frontières entre les mouvements sociaux s’effacent.
La conjoncture ordinaire est non-fluide dans le sens où les secteurs sont des auto-référentiels indépendants. Ils produisent des temporalité propre, des formes d’objectivation des frontières et des règles propres. Ils sont par ailleurs intolérants à l’intrusion : exemple lorsque Coluche veut se présenter à la présidentielle de 1981.
On parle alors de conjoncture fluide lorsque les secteurs se confondent et qu’ils ne sont plus des référentiels.
Les transactions collusives.
Les secteurs sont connectés à d’autres comme par exemple le médiatique et le politique. Ce sont des collusions ou plus justement des points de “transactions collusives”. Des échanges s’y créent en des points de contacts. Ces flux sont stables et non attentifs à une réciprocité immédiate.
Il existe deux formats de transactions collusives : l’actif qui consiste en la contribution à rendre les négociations fluides et le passif qui consiste à ne pas intervenir chez le voisin.
Le scandale, c’est la pénétration d’un secteur dans le secteur du voisin, c’est une rupture des transactions collusives lorsque les secteurs provoque la désectorisation. C’est dans le cas de la révolution russe : le cosaque qui tue un gendarme.
La crise.
La crise est un mélange d’une rupture des transactions collusives et une désectorisation, moment où les frontières sociales entre les mondes s’érodent. Il y a une rupture de légitimité car les transactions collusives permettaient la reconnaissance intersectorielle. le modèle nécessite une exigence démonstrative empirique.
Note sur le documentaire : Lénine, une autre histoire de la révolution russe (2016) de Cédric Tourbe et Michel Dobry.
Une crise doit se vivre minute par minute puisque son explication se trouve en elle : Nous les vieux ne reverrons sans doute jamais une révolution de notre vivant”, Lénine.
Passage en conjoncture fluide : 23 janvier 1917, le cortège d’ouvrière rencontre le cortège de bourgeoise. Les deux sous-groupes sociaux ont des revendications propres mais sont pris dans le même mouvement.
Rupture des transactions collusives : lorsque les cosaques se joignent aux manifestants. Lorsque les garnisons de Petrograd se joignent au mouvement.
Trois illusions dans l’étude des crises.
L’illusion étiologiques : chercher les déterminants des facteurs profonds.
L’illusion de l’histoire naturelle : histoire comme un enchainement par branche de série causale.
L’illusion héroïque qui se focalise sur un homme.
L’hypothèse de continuité.
L’hypothèse de continuité est la considération de la continuité entre les périodes de crises et les situations ordinaires. La crise n’est pas une pathologie du monde social car on peut la comprendre avec les mêmes outils car c’est simplement le passage d’une sectorialisation plastique à une sectorialisation fluide.
L’accident historique.
Le point de départ d’une crise est anodin dans le cas de la révolution russe, c’est le policier qui ne s’oppose pas immédiatement, la fusion des cortèges et la fermeture des magasins en raison du beau temps.
Les unités naturelles.
Les unités naturelles sont des évidences sociales comme l’homme bourgeois et sa femme bourgeoise. La crise prend tout d’abord lorsque les unités naturelles sont solidaires et également quand des unités naturelles différenciées se rejoignent.
L’interdépendance tactique élargie.
Ensemble de trajectoires similaires sans intentionnalité qui ricochent à des endroits très hasardeux du monde social. Les acteurs du mondes sociaux peuvent jouer des coups qui provoquent des chaines démultipliés de causalité dont l’anticipation est très compliquée.
Il y a trois indices permettant d’identifier cet effet :
- Le jeu tendu imparfait qui correspond à la distorsion entre le coup joué et le résultat. Une action va ricocher un endroit éloigné du monde social. Cela a quelque chose à voir avec l’évasion des calculs puisque les calculs ne sont plus le fait des secteurs. Exemple : le Prikaze n°1 qui en temps normal ne produirait aucun effet.
- Le second indice est la multiplication des coups audacieux correspondant à la démultiplication des effets ainsi que le fait que les acteurs sortent de leur rôle habituel puisqu’ils ont un impact inhabituel sur le monde social. Exemple : moment où un commandant des armées s’égare loin de la ville à cause des conducteurs de trains.
- Troisième indice : l’inhibition tactique des acteurs stratégiques qui est le fait que les secteurs ne pèsent plus dans le jeu. Par exemple : lorsque l’armée change sans recevoir d’ordre.
La régression vers l’habitus.
L’espace sociale continue à structurer l’individu. Pierre Bourdieu pour expliquer le moi social parle de régression vers l’habitus. C’est le fait que quelqu’un se ressemble. Il y a donc une régression vers ce à quoi on ressemble.
Exemple : C’est Lénine qui conserve sa paranoïa alors qu’il est fêté en héros.
De plus la mémoire du passé permet de comprendre que quelque chose d’incongrue se passe.
La saillance situationnelle.
En situation habituelle, les boussoles des acteurs sont le résultat des secteurs, en crise, la boussole est le fait des relations. La conséquence des interactions provoque la saillance situationnelle. La saillance est une prise, des points d’appuis. Elles apparaissent dans le flux des événements. Le phénomène cohabite avec la régression vers l’habitus. Un individu peut devenir une charisme situationnel puisque par le biais des circonstances la saillance est plus probable.
Plusieurs clôtures à la crise.
La fin d’une crise est caractérisée par une re-sectorisation. La plus tentante des issues est militaire. Il y a la solution électorale, la tactique du maintien dans l’incertitude.
Exemple de mai 1968.
Mai 1968 naît dans la répression des étudiants de Sorbonne par la police (pénétration intersectorielle).
Il y a un accident historique : les filles ne sont pas arrêtées.
Basculement dans une conjoncture fluide avec les étudiants et les ouvriers qui se joignent.
Inhibition tactique des secteurs : le chef du syndicat n’a plus de contrôle sur les ouvriers. issu par les élections sous la pression militaire montrant à quel point même une personne à qui on prête un charisme extrême comme De Gaulle a douté de ce qu’il devait faire.