Contestations, troubles et contre-pouvoirs dans la première moitié du XVIIe siècle Flashcards
Arlette Jouanna a d’ailleurs présenté les Guerres de religion comme étant en partie dues …
aux rivalités aristocratiques dans sa thèse, Le devoir de révolte. La noblesse française et la gestation de l’État moderne (1559-1661), 1989. Selon elle, des Guerres de religion à la Fronde, la noblesse n’a pas cessé de se soulever contre le pouvoir monarchique, tout en restant le principal pilier sur lequel s’appuie cette monarchie. La cause en est la définition du pouvoir et son exercice à travers la mise en place de l’absolutisme : les révoltes nobiliaires sont très
politiques. Elles traduisent une résistance à la mutation de l’État monarchique moderne.
11 novembre 1630 :
la « journée des dupes » : Richelieu pense sa dernière heure arrivée, d’autant que ses ennemis réclament la paix et pensent proche l’avènement de Gaston. Le 11
novembre, Louis XIII fait appeler Richelieu à Versailles, dans son pavillon de chasse, et il l’assure de sa confiance. La reine, croyant Richelieu condamné par Louis XIII, dévoile ses partisans. Le soir même, elle est exilée à Compiègne
Le comte de Montrésor est l’un des principaux opposants. Proche de :
Gaston d’Orléans, auquel il est très dévoué, il lui reconnaît des valeurs morales dont Richelieu lui semble dépourvu, lui qui ne pratique que la haine, la persécution et la violence d’État [ selon ses détracteurs ].
On connaît les raisons de la révolte du comte de Soissons grâce à un document daté du 2 juillet 1641 mais publié après la bataille :
Manifeste pour la justice des armes des princes de la
paix. Soissons dénonce les manœuvres de Richelieu pour approcher la couronne en mariant ses nièces avec des princes de sang royal, ce qu’il avait tenté de faire avec lui d’ailleurs. Il s’agit là d’une atteinte à la monarchie et au roi, que Soissons dénonce au nom de « toute la maison royale ». Il était du devoir de Soissons de dénoncer la tyrannie du cardinal de Richelieu qui avait violé les lois fondamentales du royaume en portant atteinte aux libertés des provinces, en
faisant condamner de nombreux nobles et en épuisant le peuple par une fiscalité et un effort de guerre injustifiables, toujours selon le Manifeste.
Ces révoltes populaires ont-elles constitué une alternative politique ? Ont-elles mis en avant
un programme politique ?
Les révoltés ne souhaitent pas marcher contre le roi. Ils contestent
les augmentations fiscales et l’appareil bureaucratique qui s’étoffe pour le service de l’État.
Durant de longues décennies, la monarchie a trouvé face à elle un front assez large
socialement, unissant les catégories populaires, les petits notables, les gentilshommes dans les
campagnes qui refusaient l’évolution de fond de l’État et la concentration, même inachevée,
de l’autorité aux dépends de l’autonomie locale.
La Fronde : ces événements sont très importants dans
la construction politique de la France de la seconde modernité. Ils sont l’écho d’une contestation puissante et multiforme qui marque le royaume de France des années 1630/40, parfois appelées par les historiens, les :
« années cardinales » pour marquer l’empreinte du
cardinal de Richelieu. En réalité, la politique est menée tout à la fois par le roi et son principal ministre. Les contemporains ont cru à tort que Richelieu dictait au roi les lignes de sa politique. Après sa mort, survenue en décembre 1642, ils ont compris qu’il n’en n’était rien.
En 1751, Voltaire publie :
Le siècle de Louis XIV : il brosse de la Fronde un tableau très sombre alors que Louis XIV incarne le roi soleil. La place qu’y ont occupé les femmes lui permet de tourner en ridicule les événements – les philosophes des Lumières, et Voltaire tout particulièrement, contribuant à la mise à l’écart des femmes.
Il faut souligner l’importance des femmes dans la noblesse et dans cette élite cultivée et avide de liberté. Outre la marquise de Rambouillet, dont le salon était fréquenté par l’élite intellectuelle française, Mme :
de Sablée est restée dans les mémoires. Autrice du Grand Cyrus, elle a vécu à la cour aux côtés de Marie de Médicis et de ses dames ; après 20 ans passés dans la Sarthe, devenue veuve en 1640, elle revient à Paris, fréquente La Rochefoucauld et la plupart des nobles et intellectuels de l’époque.
les femmes occupent une place importante
dans la société nobiliaire et si elles subissent le poids d’un discrédit, cette évolution est loin
d’être approuvée par l’élite du royaume. Face à la brutalité virile du soldat, elles incarnent une
véritable alternative culturelle, idéologique et politique. Le travail récent de Sophie Vergnes :
Les frondeuses. Une révolte au féminin (1643-1661), 2013, les rend à nouveaux visibles. Elle les
montre très présentes, tant du côté du pouvoir que des rebelles. Elles sont des guerrières,
comme la Grande Mademoiselle, fille de Gaston d’Orléans, ou des diplomates, comme l’ont été
les grandes dames depuis le début du XVIe siècle.
La fille de Gaston d’Orléans, duchesse de
Montpensier, dite la :
« Grande Mademoiselle », née en 1627, est la seule héritière des Bourbons-Montpensier : c’est « le plus beau parti d’Europe » (Sophie Vergnes, p. 297). En 1650, elle est à la tête d’une fortune personnelle considérable, qui lui permet de lever une armée au
service de Condé.
La responsabilité de la guerre civile qui se profile incombe :
aux deux partis (JM Constant, 2016, p. 297) qui tous deux « veulent faire parler la poudre ». Condé s’impose à la tête des armées royales, et c’est son frère, le prince de Conti qui commande les troupes du Parlement. Condé dispose d’une armée de 8.000 à 10.000 hommes, ce qui ne lui permet pas de bloquer
complètement Paris, ville forte de 400.000 habitants environ.
En janvier 1652, Mazarin et ses troupes se sont concentrés à
Poitiers. Condé est allié aux Espagnols mais le Parlement refuse de le suivre contre Mazarin, puisque ce dernier a été appelé par le roi. D’ailleurs, deux frondeurs de renom rallient aussi la cause du cardinal,
Turenne et son frère aîné le duc de Bouillon. De manière claire, le pouvoir (le roi, la reine et Mazarin) choisit de négocier avec les partis en présence mais en 1652, la guerre civile ne peut être évitée car Condé affronte les troupes levées par Mazarin à Bléneau .
À Paris, les frondeurs et frondeuses ont également mis en péril le pouvoir. En février 1651,la reine songe à fuir pour rejoindre Mazarin mais ce projet est éventé et elle doit ouvrir le palais au peuple de Paris qui va défiler durant la nuit du 9 au 10 février pour voir le jeune roi dormir :
Jusqu’en mars, la reine et ses enfants sont sous étroite surveillance, gardés par la milice parisienne, et pourtant, la popularité de Louis XIV ou celle de Gaston d’Orléans est immense. Cela ne diminue en rien la violence des revendications : à Paris en juillet 1652, 200 notables sont massacrés au moment où les autorités urbaines négocient une paix avec les armées du roi.