"Historiens" Flashcards

1
Q

Ammien Marcelin

A

Né vers 330 à Antioche-sur-l’Oronte, Ammien Marcellin est d’origine grecque mais écrit en latin ; il meurt vers 395, probablement à Rome.

Il est le dernier grand historien de langue latine de l’Antiquité tardive et l’un des derniers auteurs païens d’importance, connu pour son œuvre majeure, les Res Gestae, qui constitue une suite à Tacite.

Soldat de métier, il sert comme protector domesticus sous le général Ursicinus, qu’il suit dans diverses campagnes militaires, notamment en Gaule et contre les Perses sassanides.

En 359, il assiste au siège et à la chute d’Amida, événement marquant dont il donne une description détaillée dans ses écrits ; il participe également à la désastreuse expédition de Julien en Perse en 363.

Après la mort de Julien, Ammien quitte l’armée, voyage, puis s’installe à Rome vers 380 où il commence la rédaction de son œuvre historique.

Les Res Gestae couvraient à l’origine l’histoire de l’Empire romain de 96 (mort de Nerva) à 378 (bataille d’Andrinople), mais seuls les livres XIV à XXXI (de 353 à 378) nous sont parvenus.

Ces 18 livres offrent une source essentielle et unique pour comprendre la seconde moitié du IVe siècle, en particulier les règnes de Constance II, Julien, Valentinien Ier et Valens.

L’œuvre alterne récits chronologiques, portraits d’empereurs, digressions sur la géographie, l’ethnographie, la magie, l’astrologie, la philosophie, et les mœurs contemporaines.

Ammien admire profondément Julien, qu’il décrit en détail, et critique sévèrement Constance II, Jovien et Valens, qu’il juge négativement pour leur faiblesse, leur cruauté ou leur médiocrité.

Son regard est celui d’un aristocrate cultivé et nostalgique d’un ordre ancien ; il dénonce la décadence morale de Rome, l’inefficacité de l’administration, et les intrigues de cour.

Sa vision de l’histoire est marquée par un pessimisme profond : l’empire apparaît miné par la corruption, la violence, la superstition, les trahisons, les pressions barbares et les divisions religieuses.

Il reste cependant modéré religieusement : païen convaincu, il ne manifeste ni hostilité systématique au christianisme, ni fanatisme païen ; il prône la tolérance et critique les excès de tous bords.

Son style est complexe, riche en hellénismes, et mêle rigueur militaire, érudition rhétorique, et volonté morale : il cherche à instruire et juger, non simplement à relater.

Les Res Gestae ont été écrites à Rome dans les années 380-390 et connurent un grand succès auprès du public sénatorial païen ; elles furent redécouvertes au XVe siècle.

L’œuvre est marquée par un effort de vérité et une forte implication personnelle : Ammien, témoin des événements, cherche à transmettre l’expérience vécue avec honnêteté et lucidité.

Il utilise peu les discours fictifs typiques de l’historiographie antique, préférant les exemples concrets, les anecdotes marquantes, et les jugements fondés sur l’observation directe.

Malgré des biais évidents (culte de la vertu antique, admiration de Julien, critique sévère du christianisme officiel), son témoignage reste irremplaçable pour comprendre le monde romain finissant.

Son latin littéraire est influencé par la prose classique et le style tardif, avec une structuration rythmée annonçant la prose médiévale ; son érudition inclut Platon, Tacite, Salluste, Tite-Live et Cicéron.

Sa méthode historique n’est pas critique au sens moderne (absence de sources explicites), mais vise à transmettre une mémoire cohérente des événements et des figures marquantes.

Ammien représente une synthèse entre tradition gréco-romaine et monde nouveau ; il est à la fois le chantre d’un monde ancien et l’analyste lucide de sa transformation irrémédiable.

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Q

Socrate le Scolastique

A

Socrate le Scolastique (né vers 380 à Constantinople, mort vers 440) est un historien ecclésiastique grec, appartenant probablement à l’Église novatienne, ce qui influence son regard tolérant sur les dissidences chrétiennes.

Son œuvre principale, Histoire ecclésiastique, écrite vers 439/440, se veut une suite à celle d’Eusèbe de Césarée et couvre la période allant du règne de Constantin Ier (306) jusqu’à la 17e année de Théodose II (438), avec une volonté marquée d’objectivité et d’accessibilité.

Le livre I retrace le règne de Constantin, notamment le concile de Nicée (325), la conversion de peuples païens (Axoumites, Géorgiens), la politique religieuse de l’empereur et la découverte de la vraie Croix.

Les livres II et III couvrent les règnes des fils de Constantin, de Julien et Jovien ; y sont traités la crise arienne, les nombreux conciles post-nicéens, la politique religieuse de Julien, et la défense de la culture classique chrétienne contre son interdiction.

Le livre IV aborde les règnes de Valentinien Ier et de Valens : il décrit les persécutions contre les Nicéens, la résistance monastique (notamment en Égypte), et évoque des figures comme Évagre le Pontique.

Le livre V se concentre sur le règne de Théodose Ier (379–395), ses efforts pour restaurer l’orthodoxie nicéenne, les conciles de 381 et 383, les diverses liturgies, et relate la destruction du Sérapéum d’Alexandrie.

Le livre VI couvre le règne d’Arcadius (395–408), avec un accent sur Jean Chrysostome, dont il brosse un portrait équilibré, mêlant critique et admiration.

Le livre VII couvre la période de Théodose II jusqu’en 438 : il traite des tensions croissantes avec les juifs, des législations anti-hérétiques, et critique les évêques persécuteurs (comme Nestorius), tout en louant la modération de Proclos.

Socrate adopte un style modéré, humaniste et historiquement rigoureux : il cite de nombreuses lettres impériales, conciliaires ou épiscopales, insérant souvent les documents eux-mêmes dans le texte.

Son appartenance aux novatiens, dissidence fidèle au concile de Nicée, le pousse à plaider pour la tolérance religieuse et la coexistence des courants chrétiens dans l’Empire.

Il est publié dans la Patrologia Graeca (vol. 67) et traduit intégralement en français dans la collection Sources Chrétiennes (vol. 477, 493, 505, 506, éditions du Cerf).

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3
Q

Olympiodore le Jeune

A
  • Olympiodore le Jeune (c. 495-570) était un philosophe néoplatonicien et astrologue d’Alexandrie.
  • Il fut disciple de Damascios et enseigna à l’école néoplatonicienne d’Alexandrie, où il était actif vers 550.
  • Son œuvre inclut des commentaires sur Platon et Aristote, ainsi qu’un commentaire sur l’astrologie de Paul d’Alexandrie.
  • Olympiodore est parfois identifié à tort avec Olympiodore l’Alchimiste.
    Il avait un point de vue critique envers le christianisme, manifestant un certain anti-christianisme, au point de justifier des pratiques comme le suicide.
  • Son approche pédagogique innovante dans la tradition néoplatonicienne influença ses disciples et marqua la fin de l’école néoplatonicienne d’Alexandrie.
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4
Q

Zosime

A

Zosime est un historien grec païen, né vers 460, probablement à Constantinople, et actif sous les règnes de Zénon et d’Anastase Ier ; il occupa la fonction de comte du trésor impérial avant de se consacrer à l’écriture de son Histoire nouvelle.

Son œuvre, Histoire nouvelle (Ίστορία νέα), composée entre 500 et 520, se veut une suite de l’histoire romaine dans la tradition de Polybe : elle vise à expliquer les causes de la décadence de l’Empire romain d’Occident, jusqu’à son effondrement.

L’ouvrage comprend six livres (inachevés) et couvre l’histoire romaine depuis Auguste jusqu’à l’année 410, peu avant le sac de Rome par Alaric ; la fin abrupte du livre VI indique que l’auteur n’a pas pu achever son travail.

Zosime adopte un ton résolument païen et antichrétien, unique parmi les auteurs antiques conservés, blâmant le christianisme et la négligence de Constantin Ier comme principales causes de la chute de l’Empire.

Il critique Constantin pour avoir transféré la capitale à Byzance et vidé les frontières de leurs garnisons, et considère Julien comme un héros manquant de temps pour redresser la situation.

Il voit dans l’abandon des dieux traditionnels une faute grave ayant entraîné la perte des faveurs divines et la décadence politique et militaire.

Zosime partage avec d’autres historiens tardifs une croyance dans les prodiges, les oracles et les causes surnaturelles, mais il les assume plus nettement, dans une perspective nostalgique du paganisme.

Les livres I et II sont très lacunaires pour les périodes antérieures à Dioclétien ; des fragments ou mentions suggèrent que certaines parties ont pu être arrachées, notamment celles sur les persécutions chrétiennes.

La narration devient plus dense à partir du IIIe siècle, avec une attention particulière à la crise militaire, aux campagnes d’Aurélien et à la réorganisation impériale.

Les livres III et IV traitent des règnes de Julien, Jovien, Valentinien Ier, Valens, Gratien, Théodose Ier ; à partir de 376, des lacunes apparaissent, dues probablement au manque de sources fiables (comme les Annales perdues de Nicomaque Flavien).

Le livre V couvre les années 395 à 409, avec un changement de source notable (Olympiodore à partir du chapitre 26) ; on note plus de mots latins et une orientation vers les événements occidentaux.

Le livre VI est inachevé, s’arrêtant à l’été 410, sans décrire le sac de Rome par Alaric ; il s’agit peut-être d’une interruption brutale par la mort ou d’un abandon du projet.

Zosime est très dépendant de ses sources, notamment Eunape (jusqu’en 404) et Olympiodore (à partir de 406), sans les critiquer ni tenter de combler les manques.

Il est souvent jugé médiocre par la critique moderne : lacunes géographiques, erreurs de transcription des titres latins, confusions de chiffres (par exemple sur les pertes des Alamans à Strasbourg).

Son œuvre est unique en ce qu’elle présente une histoire de la décadence vue par un païen opposé au christianisme à une époque où celui-ci est religion d’État ; il représente ainsi un des derniers échos d’un regard traditionnel gréco-romain.

Le style de Zosime est discontinu, parfois négligé, et certains passages ont probablement été censurés (comme le folio découpé à V, 22 ou le passage manquant sur la tétrarchie).

Il n’eut pas de postérité immédiate : son ton antichrétien fit que son œuvre fut peu diffusée et connut des critiques virulentes, y compris dans l’Antiquité (Photios, Bossuet).

Un seul manuscrit (le Codex Vaticanus Graecus 156) nous a transmis son texte, longtemps conservé dans les sections restreintes de la bibliothèque vaticane.

Le texte connut des éditions en latin au XVIe siècle, notamment par Leunclavius, puis une édition critique grecque au XIXe siècle ; la traduction moderne de référence est celle de François Paschoud (CUF, 1971-1989).

Malgré ses biais et ses faiblesses, Zosime est une source essentielle sur la perception païenne de la chute de l’Empire, et complète les récits chrétiens contemporains comme ceux de Sozomène, Philostorge ou Orose.

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5
Q

Prosper d’Aquitaine

A
  • Prosper d’Aquitaine (c. 390-463) était un écrivain chrétien, théologien, et historien, originaire de l’Aquitaine romaine.
  • Disciple de saint Augustin, il est connu pour sa défense ardente de la doctrine augustinienne de la grâce, notamment contre les pélagiens.
  • Prosper a entretenu une correspondance avec saint Augustin, qu’il n’a jamais rencontré, et a contribué à diffuser ses enseignements en composant des résumés et des versifications de ses idées théologiques.
  • Son œuvre principale inclut le “De gratia Dei et libero arbitrio” (432), écrit contre Jean Cassien, ainsi que l’“Epitoma Chronicon”, une chronique couvrant la période de 379 à 455.
  • Il fut appelé à Rome par le pape Léon Ier pour servir comme secrétaire, marquant ainsi son influence dans les cercles ecclésiastiques.
  • Bien que laïc, il est vénéré comme saint, avec une fête célébrée le 25 juin.
  • Son engagement dans la controverse pélagienne et sa propagation des idées augustiniennes lui ont valu une place centrale parmi les premiers défenseurs de la théologie de la grâce.
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6
Q

Hydace de Chaves

A

Hydace de Chaves (vers 395 – après 469) est un évêque et chroniqueur originaire de Lémica, près de Xinzo de Limia en Galice. Il est une figure centrale de l’Hispanie tardo-romaine et un témoin précieux des événements de la fin de l’Empire romain d’Occident.

Il effectue dans sa jeunesse un voyage en Orient, probablement en Palestine et en Égypte, au cours duquel il rencontre saint Jérôme à Bethléem, rencontre qu’il évoque à deux reprises dans sa Chronique. Ce voyage suppose un haut rang familial et une formation soignée.

Ordonné clerc vers 416, il devient évêque d’Aquae Flaviae (actuelle Chaves, Portugal) en 427. Il exerce son épiscopat en Gallaecia à une époque de graves troubles liés aux invasions barbares, notamment celle des Suèves.

Il joue un rôle actif dans la vie politique et religieuse de sa région : il tente de défendre les populations galaïco-romaines face aux Suèves et entreprend en 431 un voyage pour solliciter l’aide du général romain Aetius.

En 445, il lutte contre le manichéisme, et s’oppose également vigoureusement au priscillianisme, qu’il considère comme une hérésie majeure menaçant la foi chrétienne en Hispanie.

En 460, il est arrêté dans sa propre église par les Suèves, sur ordre du roi Frumarius, et emprisonné pendant trois mois. Cet épisode souligne sa position d’opposant politique et spirituel à la domination barbare.

Il meurt probablement vers 470, peu après la fin de sa Chronique, dont la dernière entrée date de 469.

Son œuvre principale, la Chronique, couvre la période allant de 379 à 469. Elle constitue une continuation de celle de Jérôme de Stridon, et suit le modèle des chroniques universelles chrétiennes. Elle donne une importance croissante aux événements en Gallaecia et en Hispanie à partir de 451, date à laquelle cette province devient isolée du reste du monde méditerranéen.

Son regard est profondément pessimiste : il interprète les bouleversements politiques, la fragmentation de l’empire, et la montée des royaumes barbares comme des signes de la fin des temps. Vers la fin de sa Chronique, il recense de nombreux prodiges et présages, et pense que l’Apocalypse pourrait survenir en 482.

Hydace est l’un des premiers auteurs à dater les événements selon l’Ère d’Espagne (Era Hisp.), un système de datation utilisé longtemps dans la péninsule ibérique.

Son œuvre, bien que brève et concentrée sur une région périphérique, est un document historique essentiel pour comprendre la désintégration de l’autorité romaine et la transition vers les royaumes barbares en Occident. Elle reflète aussi la perspective d’un évêque romain attaché à l’ordre impérial et inquiet face à la domination germanique.

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7
Q

Philostorge

A
  • Philostorge (c. 368 - après 425) était un historien et écrivain religieux originaire de Cappadoce, connu pour ses œuvres écrites dans le contexte de l’Antiquité tardive.
  • Il est l’auteur d’une “Histoire ecclésiastique” en douze livres, qui couvre la période 324-425 et représente une des rares sources conservées offrant le point de vue arien sur les événements ecclésiastiques du IVe siècle.
  • Sa vision historique est influencée par son adhésion à l’arianisme, une branche du christianisme qui contestait la doctrine de la Trinité promue par l’Église nicéenne.
  • Les écrits de Philostorge sont majoritairement perdus; cependant, nous en avons des fragments préservés grâce à l’abrégé réalisé par le patriarche Photios et à d’autres sources byzantines comme la Souda.
  • Outre son œuvre principale, Philostorge aurait aussi écrit une “Réfutation de Porphyre” et un “Éloge d’Eunome”, bien que ces textes ne nous soient pas parvenus.
  • Sa perspective offre un éclairage précieux et alternatif sur les conflits théologiques de son époque, en particulier les débats autour de l’arianisme.
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8
Q

Théodoret de Cyr

A

Théodoret de Cyr, né vers 393 à Antioche et mort entre 458 et 466, est un évêque, théologien et historien chrétien de langue grecque, rattaché à l’école d’Antioche. Il est considéré comme l’un des grands historiens ecclésiastiques de l’Antiquité tardive.

Consacré à Dieu dès sa naissance par sa mère, il est élevé par deux moines. Après la mort de ses parents, il distribue ses biens aux pauvres et entre au monastère de Nicerte où il reste sept ans. En 423, il devient évêque de Cyr, un petit diocèse dépendant d’Hiérapolis.

Dans son diocèse, il combat activement les hérétiques (notamment plus de mille marcionites convertis) et les païens, brûlant notamment 200 exemplaires du Diatessaron de Tatien. Il bâtit des églises, gère les affaires civiles et se rend fréquemment à Antioche. Il parle le grec et le syriaque.

À partir de 430, il est au cœur de la querelle nestorienne. Il appelle d’abord Nestorius à accepter le terme Theotokos, mais rejette ensuite les décisions du concile d’Éphèse (431), qui dépose Nestorius sous l’impulsion de Cyrille d’Alexandrie. Il participe avec Jean d’Antioche à une contre-condamnation de Cyrille.

Théodoret refuse longtemps d’adhérer à la réconciliation de 433 (Symbole d’Union), jugeant que la condamnation de Nestorius reste injustifiée. Il accuse Cyrille d’apollinarisme, rédige des réfutations et polémiques (dont la Réfutation des douze anathèmes et le Pentalogos).

En 449, il est déposé lors du « Brigandage d’Éphèse » sous l’influence de Dioscore d’Alexandrie. Il se retire à Nicerte et écrit au pape Léon Ier pour protester contre cette décision.

Réhabilité après la mort de Théodose II, il participe au concile de Chalcédoine (451) et est réintégré à son siège après avoir accepté de condamner « la doctrine attribuée à » Nestorius. Il reste une figure majeure de l’école antiochienne.

Ses œuvres sont vastes et couvrent plusieurs genres : apologétique, dogmatique, exégétique, historique, hagiographique et épistolaire. Il est condamné en 553 au concile de Constantinople II (controverse des Trois Chapitres) mais réhabilité en 680-681.

Parmi ses ouvrages majeurs figurent :

Histoire ecclésiastique (en 5 livres, de 325 à 429).

Histoire des moines de Syrie (ou Vie de trente solitaires), un recueil hagiographique avec un traité final sur la charité.

Thérapeutique des maladies helléniques, traité apologétique majeur contre le paganisme.

Eranistês, dialogues dogmatiques contre Eutychès.

De nombreux commentaires bibliques (Psaumes, Isaïe, Cantique, prophètes, Épîtres de Paul).

Des traités dogmatiques sur la Trinité, l’Incarnation, et des textes contre Cyrille.

Plus de 230 lettres conservées.

Son œuvre exégétique insiste sur la rationalité de la foi, l’interprétation littérale et historique des Écritures, dans la tradition antiochienne.

Il voit dans le monachisme un modèle de perfection chrétienne et un fait spirituel fondamental du IVe et Ve siècle.

Ses écrits sont traduits dans la collection Sources Chrétiennes (Éditions du Cerf), en volumes bilingues.

Théodoret incarne un christianisme oriental cultivé, profondément marqué par les conflits doctrinaux de son temps, et attaché à une vision modérée mais ferme de l’orthodoxie.

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9
Q

Sidoine Apolinaire

A

Sidoine Apollinaire naît à Lyon vers le 5 novembre 430 dans une illustre famille gallo-romaine, dont plusieurs membres ont exercé la charge de préfet du prétoire des Gaules.

Il reçoit une éducation littéraire classique, centrée sur la poésie latine, en particulier Ovide et Virgile, et devient l’un des poètes les plus célèbres de son temps.

En 452, il épouse Papianilla, fille du sénateur Avitus (futur empereur), ce qui le lie à une des familles les plus puissantes de Gaule et à la cité de Clermont.

Panégyriste officiel de son beau-père Avitus, il compose un éloge de ce dernier lors de son accession à l’Empire en 456, mais doit ensuite composer avec les revers politiques, notamment la chute d’Avitus.

Malgré les changements de pouvoir à Rome, il se rallie successivement à Majorien puis à Anthémius, auxquels il dédie aussi des panégyriques, ce qui lui vaut d’être nommé préfet de Rome en 468.

Son administration à Rome est entravée par de graves famines liées à la perte de l’approvisionnement en blé africain depuis la prise de Carthage par les Vandales.

En 470, il est ordonné prêtre puis élu évêque de Clermont, ville qu’il défend politiquement et militairement contre les Wisigoths entre 470 et 475, aux côtés d’Ecdicius.

Après la prise de Clermont par Euric, Sidoine est emprisonné, puis exilé à Carcassonne ; il revient ensuite à Clermont pour reprendre son épiscopat, exerçant aussi une grande charité envers les pauvres.

Sidoine se distingue comme un évêque lettré et aristocrate, peu impliqué dans la théologie, attaché aux valeurs romaines et aux arts littéraires, plutôt qu’à la spiritualité chrétienne profonde.

Il est considéré comme un des derniers représentants de la culture romaine classique en Gaule, et un témoin précieux de la transition entre l’Empire et les royaumes barbares.

Son œuvre littéraire comprend 24 Carmina (Poèmes), dont plusieurs panégyriques à des empereurs, et 147 Epistulae (Lettres), destinées à publication, inspirées notamment par Symmaque.

Ses poèmes cessent après son ordination épiscopale par respect des conventions ecclésiastiques, mais ses lettres prolongent son activité littéraire et politique jusqu’en 482.

Il critique vivement les peuples barbares, notamment les Burgondes, qu’il décrit avec mépris dans son Carmen XII, révélant un esprit conservateur et hostilité aux nouveaux arrivants.

Il meurt vers 486, âgé d’environ 56 ans, et est rapidement vénéré comme saint dans la Gaule médiévale, sa fête étant célébrée le 21 août dans les traditions catholique et orthodoxe.

Son style littéraire est raffiné, nourri de références à Virgile, Ovide, Claudien, Pline le Jeune, Tacite, et marqué par une préciosité rhétorique caractéristique des élites gallo-romaines de la fin de l’Empire.

Il incarne toutes les tensions de son époque : entre romanité et barbarie, entre culture aristocratique et christianisme, entre fidélité à Rome et adaptation aux royaumes germaniques.

Il est une source de premier plan pour les historiens du Ve siècle, notamment sur la vie politique et culturelle en Gaule, et sur les dernières lueurs de la tradition littéraire latine classique.

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10
Q

Mérobaudes

A
  • Origines et Carrière : Flavius Merobaudes est un poète et rhéteur latin du Ve siècle, probablement originaire de la Bétique, en Espagne. Il est issu d’une famille influente, étant le petit-fils du général Mérobaudes.
  • Carrière Militaire et Politique : Merobaudes est général des troupes romaines en Espagne et est reconnu pour ses talents militaires et littéraires. Il obtient des honneurs tels que la mise en place de sa statue dans le Forum de Trajan à Rome, un privilège rare pour un païen.
  • Relations avec l’Empire : Au service de la cour impériale de Ravenne, il côtoie l’empereur Valentinien III et le général Aétius pendant près de vingt ans, devenant un témoin privilégié des événements majeurs de cette période.
  • Œuvres Littéraires : Merobaudes est l’auteur de deux panégyriques dédiés à Aétius, l’un en vers et l’autre en prose. Il a également écrit quatre carmina minora (poèmes mineurs) qui reflètent le style précieux de la poésie de l’Antiquité tardive. Ces œuvres, ainsi que des fragments supplémentaires, ont été découverts sur un palimpseste de Saint-Gall.
  • Redécouverte et Reconnaissance : Sa notoriété littéraire a été redécouverte au XIXe siècle, lorsque des inscriptions et des fragments de ses œuvres ont été retrouvés et attribués à lui, consolidant sa réputation en tant que poète et orateur.
  • Héritage : Merobaudes est considéré comme un lettré important de l’Antiquité tardive, ayant servi l’État romain tout en étant un témoin et un participant actif aux événements marquants de son époque. Ses œuvres, bien que fragmentaires, offrent un aperçu précieux de la culture et de la politique du Ve siècle.
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11
Q

Cassiodore

A

Cassiodore (vers 485 – vers 580) est un homme politique et écrivain latin d’Italie du Sud, actif sous les règnes des rois ostrogoths. Il est d’abord haut fonctionnaire à Ravenne, puis, après un retrait de la vie publique, fondateur du monastère de Vivarium et défenseur de la culture antique au service du christianisme.

Issu d’une famille aristocratique romanisée, son cursus honorum commence comme consiliarius (503), puis quaestor sacri palatii (506-511), consul ordinarius (514), magister officiorum (523-527), et enfin préfet du prétoire (533-538), un des plus hauts postes administratifs de l’Italie ostrogothique.

Cassiodore est proche des rois Théodoric, Amalasonthe, Théodat et Witigès. Sa carrière semble marquée par une certaine prudence politique et une capacité d’adaptation, ce qui l’oppose à la figure tragique de Boèce, qu’il remplace après sa disgrâce.

En 538, il compose De Anima, marqué par un tournant religieux et contemplatif. Il se retire dans sa propriété de Squillace (Calabre) et fonde le monastère de Vivarium, où il développe un programme intellectuel chrétien et un centre de copie des manuscrits.

Le Vivarium, situé sur un locus amoenus, fonctionne comme une cité monastique dédiée à l’étude, à la copie des textes sacrés et profanes, et à l’application des arts libéraux. Cassiodore y promeut la lectio divina et un idéal de piété savante.

Ses Institutiones, destinées aux moines, sont divisées en deux livres : Divinarum litterarum (Scripture et théologie) et Saecularium litterarum (arts libéraux : grammaire, dialectique, rhétorique, géométrie, arithmétique, astronomie, musique).

Il rédige de nombreux traités théologiques, moraux, exégétiques (comme l’Expositio Psalmorum) et techniques (comme De orthographia), compile des extraits patristiques (Complexiones, Florilèges), produit des recueils canoniques et liturgiques.

Il traduit ou fait traduire plusieurs œuvres grecques : Histoire ecclésiastique (abrégé de Socrate, Sozomène et Théodoret), Antiquités judaïques de Flavius Josèphe, extraits de Clément d’Alexandrie, etc.

Son œuvre politique majeure est constituée des Variae, recueil de 468 lettres et formules administratives, panégyriques et décrets rédigés durant ses charges officielles. Ces textes documentent l’organisation de l’administration ostrogothique et la rhétorique du pouvoir.

Il est aussi l’auteur de l’Historia Gothorum (aujourd’hui perdue), dont Jordanès a rédigé un résumé dans sa Getica. Cette œuvre visait à légitimer la royauté ostrogothique par une généalogie noble et une continuité historique entre Goths et Romains.

Dans la dernière partie de sa vie, Cassiodore témoigne d’un souci de transmission culturelle, de conservation des manuscrits, et d’orthodoxie chrétienne. Il apparaît comme une figure centrale de la transition entre Antiquité tardive et haut Moyen Âge.

Sa mort est située entre 580 et 585. Son monastère survit quelque temps, bien que décline rapidement après les troubles lombards. Vivarium reste une étape cruciale dans l’histoire de la culture manuscrite médiévale.

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12
Q

Jordanès

A

Jordanès, historien latin du VIe siècle, était d’origine ostrogothique, converti au christianisme et probablement évêque de Crotone. Il séjourna à Constantinople en 551, date à laquelle il composa son Histoire des Goths (De origine actibusque Getarum), résumée d’une œuvre perdue de Cassiodore.

Il affirme avoir été notaire au service du général goth Gunthigis et avoir eu brièvement accès aux livres de Cassiodore, qu’il résume de mémoire, complétant son travail avec des lectures personnelles et des éléments issus de la tradition orale.

Sa Getica est la seule source conservée de l’époque retraçant l’histoire des Goths, englobant Ostrogoths et Wisigoths. Elle s’ouvre sur un tableau ethnogéographique du Nord de l’Europe, incluant l’île mythique de « Scandza », d’où les Goths seraient partis pour fonder Gothiscandza sur la côte baltique.

Le récit de Jordanès mêle histoire et légende : combats contre un pharaon égyptien (Vesosis), destruction de Troie après la guerre d’Agamemnon, identification des Goths aux Gètes de l’Antiquité, etc. Il s’efforce de doter les Goths d’une origine noble et d’une tradition antique.

Il reprend de nombreuses sources classiques grecques et latines : Tacite, Trogue Pompée, Pline, Ptolémée, Jérôme, Strabon, Priscus, Lucain, etc. Certains récits sont empruntés aux carmina prisca (chants anciens des Goths), bien que cette origine soit douteuse selon les chercheurs modernes.

Le latin de Jordanès est un latin tardif instable : déclinaisons fluctuantes, fautes morphologiques et syntaxiques, vocabulaire appauvri, usage de formes vulgaires ; cela reflète les évolutions vers les langues romanes et le déclin de l’enseignement grammatical classique au VIe siècle.

Sa Getica a longtemps été la source principale sur les Goths. Cependant, son assimilation des Goths aux Gètes et Daces est aujourd’hui largement remise en cause, notamment par des historiens roumains et anglo-saxons. Elle servirait davantage à construire un mythe politique qu’à restituer une histoire fiable.

Des critiques modernes (Christensen, Curta, Goffart) considèrent l’œuvre comme un exemple d’invention d’un passé glorieux pour légitimer l’aristocratie gothique à l’image des grandes familles romaines. Elle reflète les enjeux idéologiques de l’époque plus qu’une réalité historique documentée.

L’intérêt du texte réside néanmoins dans sa description de l’expansion gothique, de la période hunnique, et de figures comme Cniva ou Riothamus (source possible du mythe arthurien). Il témoigne aussi de la construction des récits ethno-historiques au moment des Grandes Invasions.

L’œuvre a connu une large postérité : redécouverte à la Renaissance, imprimée dès 1515, éditée par Mommsen en 1882, elle a suscité de nombreuses controverses sur la véracité de ses sources et son influence sur les représentations médiévales des peuples barbares.

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Grégoire de Tours

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  • Grégoire de Tours (538-594), évêque de Tours et historien gallo-romain.

-Issu d’une famille aristocratique chrétienne, il devient évêque en 573.

  • Auteur de “Histoire des Francs”, une œuvre majeure qui combine récits historiques et vies de saints, couvrant la période de Clovis à 591.
  • Il critique les conflits entre les rois francs et défend les valeurs chrétiennes.
  • Son œuvre a grandement influencé l’historiographie médiévale, faisant de lui une figure centrale dans la transmission de l’histoire des Mérovingiens.
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14
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Marcellin Comes

A
  • Marcellinus Comes, chroniqueur romain du VIe siècle, né en Illyrie et mort peu après 534.
  • Il était chancelier de l’empereur Justinien et portait le titre de “comes”, signifiant “compagnon” ou “comte”.
  • Son œuvre principale est une chronique en latin, couvrant la période de 379 à 534, qui se concentre sur l’Empire romain d’Orient.
  • Deux autres œuvres, mentionnées par Cassiodore, sont perdues : De temporum qualitatibus et positionibus locorum et une description de Jérusalem et de Constantinople.
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15
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Jean Malalas

A

Jean Malalas, né vers 491 à Antioche et mort vers 578 à Constantinople, est un fonctionnaire byzantin et chroniqueur, auteur de la plus ancienne chronique byzantine conservée : la Chronographia.

Son nom vient du syriaque mallālā, signifiant « rhéteur », mais ce titre semble usurpé car son style et sa connaissance du grec révèlent une éducation seulement secondaire.

Sa carrière alterne entre Antioche et Constantinople, où il travaille notamment sous Marinus (512–519) et Théodotus (522–523). Il participe probablement à l’administration diplomatique sous Justinien, ce qui explique son intérêt pour la politique étrangère jusqu’en 533.

Témoignant du séisme de 526 à Antioche et des mesures de reconstruction, il montre une familiarité avec les événements orientaux, mais recentre sa chronique sur Constantinople après 533.

La Chronographia s’étend de la création du monde jusqu’au règne de Justinien, dont il donne la durée exacte (38 ans, 7 mois, 13 jours), laissant supposer qu’il vécut jusqu’à la mort de l’empereur en 565, bien que son texte s’interrompe en 563.

Son œuvre, en 18 livres, combine récits historiques, mythologie, fables populaires, légendes bibliques, anecdotes et éléments religieux. Les premiers livres sont peu fiables mais les derniers, où il est témoin, sont plus précis historiquement.

Il cite 75 sources, parfois inconnues ou inventées, et s’inspire largement d’Eustathe d’Épiphanie, dont il reprend le calcul de la création du monde, mais en déformant la chronologie.

Le style de Malalas est populaire, écrit en grec commun (koïnè) mêlé d’expressions latines et orientales, parfois maladroit, avec peu de structure, d’élégance ou de critique historique.

Il alterne entre chronique universelle et histoire locale (notamment d’Antioche), et innove en nommant chaque livre et en insérant une succession continue depuis Adam jusqu’à son époque.

Bien que son œuvre ait reçu peu d’attention à Constantinople, elle eut un grand succès dans l’Orient byzantin et le monde slave, influençant le Chronicon Paschale, Théophane le Confesseur, et de nombreuses traductions slavonnes.

Plusieurs versions de la Chronographia ont été produites : une première vers 527, une deuxième vers 528 (source du slavon), une troisième vers 533 et une dernière sans doute jusqu’en 565.

Malalas est aujourd’hui perçu comme un auteur important pour l’histoire byzantine du VIe siècle, notamment par les informations qu’il donne sur l’administration, la diplomatie et la vie quotidienne sous Justinien, malgré les faiblesses de sa méthode historique.

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16
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Isidore de Séville

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  • Isidore de Séville (vers 560-636), évêque et docteur de l’Église, né à Carthagène, a été une figure centrale du royaume wisigothique d’Espagne.
  • Il a joué un rôle clé dans la conversion des Wisigoths au christianisme trinitaire et a œuvré pour la formation intellectuelle du clergé.
  • Auteur de l’encyclopédie Etymologiae, qui rassemble et transmet le savoir antique, il est également connu pour son traité De fide catholica contra Judeos.
  • Canonisé en 1722, il est le saint patron des informaticiens et des internautes.
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Procope de Césarée

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  • Biographie :
    Procope de Césarée (vers 500 - vers 565) est un historien et avocat byzantin, principalement connu pour ses récits sur le règne de l’empereur Justinien. Il fut le secrétaire du général Bélisaire et l’accompagna dans ses campagnes militaires avant de se consacrer à l’écriture.
  • Œuvres principales :
    – Les Guerres de Justinien : Une trilogie couvrant les guerres perses, vandales et gothiques. Cet ouvrage présente un Justinien glorifié et met en avant les succès militaires et architecturaux de l’empire.
    Histoire secrète de Justinien : Contrairement aux Guerres de Justinien, cet ouvrage brosse un portrait très critique de Justinien, de Bélisaire et de leurs épouses, révélant les coulisses sombres du pouvoir byzantin.
    Sur les monuments : Un éloge des constructions de Justinien, montrant l’empereur comme un bâtisseur divin. L’œuvre reste inachevée.
    Contributions historiques :
    Procope est considéré comme le principal historien du VIe siècle, écrivant en grec classique et s’inspirant d’historiens antiques comme Hérodote, Thucydide et Polybe. Son travail est essentiel pour comprendre le règne de Justinien, l’Empire byzantin et les relations avec les barbares.
  • Contradictions et complexité :
    Ses écrits montrent une ambivalence notable. D’un côté, il loue Justinien dans Les Guerres de Justinien et Sur les monuments, et de l’autre, il le diabolise dans Histoire secrète de Justinien. Cette dualité a suscité des débats sur l’authenticité de son œuvre, mais il semble qu’il ait délibérément choisi de publier des textes critiques après la mort des protagonistes pour éviter des répercussions politiques.
  • Héritage :
    Procope a influencé l’historiographie byzantine et demeure une source clé pour l’étude de l’Antiquité tardive. Son style narratif, son usage des sources primaires et son analyse des causes des événements en font un « journaliste » de son temps, plus qu’un historien académique classique.
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Bède le Vénérable

A
  • Bède le Vénérable : Synthèse rapide
  • Biographie : Moine anglo-saxon né vers 672/673 en Northumbrie, mort en 735 à Jarrow. Ordonné prêtre vers 702, il a passé sa vie dans les monastères de Wearmouth et Jarrow.
  • Œuvre principale : Histoire ecclésiastique du peuple anglais (731) — raconte l’histoire de l’Angleterre depuis la conquête romaine jusqu’en 731. Lui vaut le titre de « Père de l’histoire anglaise ».
  • Autres travaux : Nombreux commentaires bibliques, traités scientifiques (De Natura Rerum), et ouvrages sur le comput (calcul du temps liturgique).
  • Méthodologie : Utilise des sources fiables, pratique la critique historique, allie érudition et foi chrétienne.
  • Héritage : Proclamé docteur de l’Église en 1899 par Léon XIII. Saint patron des historiens et écrivains anglais.
  • Impact : Influence la Renaissance carolingienne et reste une référence en histoire et en théologie médiévale.
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19
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Jérôme de Stridon

A
  • Biographie :
    Naissance et mort : Né vers 347 à Stridon (actuelle Slovénie/Croatie) et mort le 30 septembre 420 à Bethléem.
  • Carrière : Moine, traducteur de la Bible, Père de l’Église latine et Docteur de l’Église.
    Rôle à Rome : Secrétaire du pape Damase Ier, il traduit les Évangiles en latin à la demande du pape.
    Installation à Bethléem : Après le décès de Damase en 384, Jérôme s’installe en Palestine, où il fonde un monastère et se consacre à l’écriture.
  • Œuvre principale :
    La Vulgate : Traduction latine de la Bible, reconnue comme texte officiel de l’Église catholique jusqu’au XXe siècle.
  • Travaux théologiques : Nombreux commentaires bibliques, en particulier sur l’Ancien Testament, et écrits polémiques contre les hérésies de son temps.
  • Méthodologie :
    Traduction directe depuis l’hébreu et le grec : Une approche novatrice pour l’époque, privilégiant la “veritas hebraica” (vérité hébraïque).
  • Exégèse biblique : Combine le sens littéral, allégorique et spirituel des textes.
    Influence et Héritage :
    Docteur de l’Église : Proclamé par Boniface VIII en 1298.
    Patronage : Saint patron des traducteurs, archivistes, bibliothécaires, étudiants et écoles bibliques.
    Iconographie : Représenté souvent avec un crâne, un lion et en tenue de cardinal (même si le cardinalat n’existait pas à son époque).
  • Anecdote :
    Rêve marquant : Un rêve où il est accusé d’être plus « cicéronien » que chrétien l’incite à se consacrer à l’étude des Écritures plutôt qu’aux classiques païens.
    Jérôme de Stridon demeure une figure clé du christianisme ancien, à la fois comme érudit et comme défenseur de la foi orthodoxe.
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20
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Claudien

A
  • Biographie :
    Naissance et mort : Né vers 370 à Alexandrie, décédé vers 404 à Rome.
    Carrière : Poète latin de la cour de l’empereur Honorius à Milan, poète de cour et mondain.
    Langues : Écrit principalement en latin, parfois en grec.
    Religion : Païen convaincu, critiqué par Augustin d’Hippone et Orose pour son opposition au christianisme.
    Œuvres principales :
    Poèmes politiques et panégyriques :
  • Panegyricus Probino et Olybrio Consulibus
    De Tertio Consulatu Honorii Augusti
    De Consulatu Stilichonis
    De Sexto Consulatu Honorii Augusti
    Poèmes mythologiques :
  • De raptu Proserpinae (inachevé) : Épopée sur l’enlèvement de Proserpine.
    Gigantomachie : Récit mythologique sur la lutte des Géants contre les Dieux.
    Poèmes de célébration et libelles :

De Bello Gildonico : Sur la révolte de Gildon.
De Bello Gothico : Sur la guerre contre Alaric en 402-403.
In Rufinum et In Eutropium : Poèmes satiriques.
Poèmes didactiques :

  • Phoenix, De magnete, De crystallo cui aqua inerat.
    Style et influence :
    Style : Vigoureux, marqué par la rhétorique et l’influence du « baroque » alexandrin (comme Nonnos de Panopolis).
    Importance : Considéré, avec Prudence, comme l’un des derniers grands poètes latins de l’Empire romain.
    Héritage :
    Claudien reste une figure marquante de la poésie latine tardive, reconnu pour ses œuvres politiques, mythologiques et satiriques.
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21
Q

Pétrone

A
  • Pétrone est probablement Titus Petronius Niger, consul sous Néron, surnommé arbiter elegantiae (« arbitre du bon goût »). Il est contraint au suicide vers 66 ap. J.-C. après avoir rédigé une satire secrète sur les débauches de l’empereur.
  • Œuvre principale : Le Satyricon, roman satirique en prose et vers, dont seuls des fragments (notamment les livres XIV à XVI) nous sont parvenus. Le récit narre les errances d’Encolpe, Ascylte et Giton dans une Rome décadente.
  • Genre et style : Œuvre hybride mêlant satire, parodie, roman de mœurs, poésie et mime. Le style joue sur les contrastes de registres, les ruptures de ton, l’usage du langage populaire, et les emprunts parodiques aux grands genres littéraires antiques.
  • Esthétique : Parodique, ironique, subversive. Le Satyricon dégrade les modèles classiques (épopée, tragédie, rhétorique), ridiculise les prétentions sociales et les postures morales, et donne voix à une pluralité de personnages par l’hétéroglossie.
  • Thèmes : Décadence morale, imposture intellectuelle, satire sociale des affranchis enrichis (Trimalcion), sexualité débridée, impuissance, errance, désorientation identitaire, rapports humains fondés sur la manipulation ou l’illusion.
  • Philosophie : Entre stoïcisme moqué et épicurisme désabusé. Pétrone semble critiquer toute doctrine dogmatique. Son héros Encolpe est instable, lucide mais impuissant, symptôme d’un monde sans repères.
  • Réalisme : Pétrone excelle dans la peinture sociale (langues, décors, comportements). Il est vu par Erich Auerbach comme un maître du réalisme antique (ex. : festin chez Trimalcion).
  • Innovations : Considéré comme un précurseur du roman picaresque, du roman moderne (par son goût de l’errance, du fragment, de l’ambiguïté narrative). Il dépasse les modèles anciens par son regard distancié.
  • Postérité : Influencé par Lucain, Sénèque, Épicure, il inspire Schwob, Sterne, Smollett, Fielding, Montherlant. Adapté par Fellini (Fellini-Satyricon, 1969), Polidoro (1968), ou en musique par Maderna (opéra inachevé Satyricon).
  • Mort et figure littéraire : Son suicide devient un modèle du dandysme. Il meurt dans le raffinement, refusant la gravité, en organisant une mort esthétique et ironique, fidèle à son image d’élégant désabusé.
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22
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Éphrem le Syrien

A
  • Identité : Diacre syriaque (v. 306–373), théologien, poète mystique, figure majeure du christianisme oriental, proclamé Docteur de l’Église en 1920.
  • Lieu et contexte : Né à Nisibe (Empire romain), témoin des conflits romano-perses. Exilé à Édesse après la cession de Nisibe aux Perses.
  • Langue et influence : A écrit exclusivement en syriaque ; ses œuvres furent traduites en grec, arménien, copte, latin. Ses hymnes ont marqué la liturgie orientale.
  • Œuvres : Plus de 400 hymnes (madrāšê), homélies poétiques (mêmrê), commentaires bibliques. Utilisation d’un style symbolique, rythmique, souvent chanté par des chœurs féminins.
  • Combat doctrinal : Défenseur de l’orthodoxie nicéenne contre les hérésies (manichéens, marcionites, bardesanites). A écrit pour éduquer et stabiliser la foi dans un contexte religieux instable.
  • Spiritualité : Vie ascétique, service des malades (mort lors d’une épidémie). Vision du combat spirituel intérieur comme plus redoutable que la persécution extérieure.
  • Héritage : Surnommé « Harpe du Saint-Esprit », source majeure de la mystique syriaque. De nombreux textes pseudépigraphes circulent sous son nom (notamment en grec).
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23
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Ambroise de Milan

A

Ambroise de Milan (Aurelius Ambrosius), né en 339 à Trèves, mort en 397 à Milan. Évêque de Milan de 374 à sa mort. Père et Docteur de l’Église, un des quatre grands Pères latins avec Augustin, Jérôme et Grégoire.

Acteur central des débats entre ariens et nicéens. Baptise Augustin vers 387. Défenseur de la foi nicéenne contre les hérésies.

Lecteur de Cicéron et des Pères grecs, il adopte l’allégorie comme méthode d’exégèse : « La lettre tue, l’esprit vivifie ».

Poète, introducteur de l’hymnodie latine chrétienne. Initiateur du chant ambrosien et du chant antiphonique.

Fêté le 7 décembre (ordination), parfois aussi le 4 avril (mort). Patron de Milan, des apiculteurs et de diverses professions.

Fils du préfet du prétoire des Gaules. Frère de Satyr et Marcelline. Cousin de Symmaque, haut fonctionnaire païen.

Anecdote : un essaim d’abeilles sur sa bouche au berceau est vu comme un signe de son éloquence future.

Formation juridique à Rome. Avocat, puis gouverneur de la province de Ligurie-Émilie à Milan (résidence impériale occidentale).

Élu évêque en 374, malgré son statut de catéchumène. Acclamé par le peuple en pleine crise entre ariens et catholiques. Résiste puis accepte. Baptisé, ordonné et sacré en quelques jours.

Redistribue ses biens, vit avec simplicité, étudie l’Écriture et les Pères grecs. Introduit la lectio divina en Occident.

Prédication morale, catéchétique, accessible, anti-arienne. Défend l’autonomie de l’Église face à l’empereur. Affronte Valentinien I et II, puis Théodose.

Meurt à Milan le 4 avril 397. Inhumé dans la crypte de la basilique Saint-Ambroise.

Œuvres majeures :

De officiis ministrorum : éthique chrétienne (inspirée de Cicéron)

De sacramentis et De mysteriis : sur les sacrements

De fide et De Spiritu Sancto : sur la Trinité, contre les ariens

De paenitentia : sur la pénitence, contre les Novatiens

Apologia David : défense du roi David

Lettres, oraisons funèbres (Théodose, Valentinien II), sermons

Quatre hymnes authentifiés : Aeterne rerum conditor, Splendor paternae gloriae, Jam surgit hora tertia, Deus creator omnium.

Le style des hymnes : 8 strophes de 4 vers courts, encore chantés aujourd’hui.

Représentations : évêque avec crosse, parfois fouet (contre les ariens), ou à cheval. Associé à une ruche (éloquence).

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24
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Augustin d’Hippone

A

Naissance et origines : Augustin est né en 354 à Thagaste (actuelle Souk Ahras, Algérie) dans une famille berbère romanisée. Son père, Patrice, est païen, et sa mère, Monique (future sainte Monique), est une chrétienne fervente qui aura une grande influence sur sa vie spirituelle.

Éducation et jeunesse : Éduqué à Madaure puis à Carthage, il se distingue dans l’étude de la rhétorique, discipline qu’il enseignera plus tard. Il mène une vie jugée dissolue, fréquente les théâtres et a un fils hors mariage, Adéodat, avec une concubine qu’il ne nomme jamais.

Quête spirituelle et adhésion au manichéisme : Pendant environ dix ans, il suit la doctrine manichéenne, séduite par son dualisme radical (lutte entre lumière et ténèbres). Déçu par les contradictions du manichéisme et l’absence de réponses satisfaisantes, il s’en éloigne progressivement.

Rencontre du néoplatonisme et d’Ambroise : Installé à Milan, Augustin découvre les auteurs néoplatoniciens, notamment Plotin, qui l’amènent à concevoir un Dieu immatériel et intérieur. Il assiste aux prédications d’Ambroise de Milan, qui lui fait découvrir une lecture allégorique de la Bible, transformant sa perception des Écritures.

Conversion : Après une longue crise intérieure, il se convertit au christianisme en 386 à la suite d’une expérience mystique dans un jardin (épisode du “Tolle lege” : “prends et lis”). Baptisé en 387 par Ambroise avec son fils Adéodat. Peu après, sa mère Monique meurt à Ostie.

Retour en Afrique et ordination : De retour à Thagaste, il vit en communauté monastique avant d’être ordonné prêtre à Hippone en 391, puis évêque en 395. Il reste à ce poste jusqu’à sa mort.

Activité épiscopale : Il prêche, écrit, dirige une Église locale très active. Son action pastorale est marquée par la lutte contre plusieurs hérésies :

Le manichéisme, qu’il connaît de l’intérieur ;

Le donatisme, mouvement rigoriste africain qui refusait toute indulgence aux pécheurs et remettait en cause la légitimité de certains évêques ;

Le pélagianisme, contre lequel il développe sa théologie de la grâce, affirmant que l’homme, marqué par le péché originel, ne peut se sauver sans l’aide de Dieu.

Pensée théologique :

Il insiste sur la nécessité de la grâce divine, la faiblesse de la volonté humaine et la puissance du péché.

Il élabore une anthropologie chrétienne fondée sur l’introspection (Les Confessions) et l’union de l’intellect et de l’amour dans la recherche de Dieu.

Sa lecture de l’histoire dans La Cité de Dieu oppose la cité terrestre (fondée sur l’amour de soi) à la cité céleste (fondée sur l’amour de Dieu), une conception qui marquera toute la pensée médiévale.

Œuvres principales :

Les Confessions (vers 397) : autobiographie spirituelle, récit de sa jeunesse, de sa conversion et de son cheminement vers Dieu.

La Cité de Dieu (413–426) : réponse à ceux qui accusent le christianisme d’avoir affaibli Rome après son sac de 410 ; théologie de l’histoire et de la société.

De Trinitate : réflexion sur le mystère trinitaire à partir de l’analogie avec l’âme humaine.

De Doctrina Christiana : traité sur la lecture et l’interprétation de l’Écriture.

Nombreux traités contre les hérésies, sermons, lettres, commentaires bibliques.

Mort : Il meurt en 430, à 76 ans, alors que la ville d’Hippone est assiégée par les Vandales. Il est canonisé au Moyen Âge et proclamé Docteur de l’Église. Sa pensée influencera aussi bien le catholicisme médiéval que les Réformateurs du XVIe siècle.

Postérité : Augustin est l’un des plus grands penseurs de l’Antiquité tardive. Son influence est immense, aussi bien sur la théologie, la philosophie que la mystique chrétienne. Il est considéré comme un Père de l’Église latine, aux côtés de Jérôme, Ambroise et Grégoire le Grand.

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Paul Diacre

A

Né vers 720 à Cividale del Friuli, Paul Diacre appartient à la noblesse lombarde, descendant d’un compagnon du roi Alboïn. Son père se nomme Warnefried, sa mère Theudelinde.

Il est formé à la cour de Pavie sous le règne du roi Ratchis. Élève du grammairien Flavien, il devient précepteur des enfants du roi Didier, notamment de sa fille Adalberge.

En 774, après la conquête du royaume lombard par Charlemagne, Paul devient moine à l’abbaye du Mont-Cassin. En 776, il intervient auprès de Charlemagne pour obtenir la libération de son frère emprisonné en Franconie. Il est ensuite intégré à la cour carolingienne à partir de 782.

Il participe à la Renaissance carolingienne aux côtés d’Alcuin, Pierre de Pise ou Paulin d’Aquilée. Il compose des poèmes de cour, des traités grammaticaux et historiques.

Il rédige vers 783, à la demande d’Angilram, évêque de Metz, les Gesta episcoporum Mettensium, histoire des évêques de Metz et des origines de la dynastie carolingienne.

Il se retire à Mont-Cassin vers 786 et y écrit l’Historia Langobardorum, grande chronique des Lombards de leurs origines à 744. Il y compile aussi un Homéliaire (244 homélies patristiques), utilisé dans l’Église jusqu’au concile Vatican II.

Il est aussi l’auteur de l’Historia Romana, continuation du Brevarium d’Eutrope jusqu’à Justinien, à la demande d’Adelperga.

Il compose de nombreux poèmes (épithalames, hymnes, épitaphes), dont Ave Maris Stella et Ut queant laxis, cette dernière servant de base au nom des notes musicales par Guido d’Arezzo (Ut, Re, Mi, Fa, Sol, La).

Il meurt entre 797 et 799 au Mont-Cassin, avant le couronnement impérial de Charlemagne (800).

Ses œuvres incluent aussi :

De verborum significatione (abrégé de Festus),

Commentarius in Donatum (traité grammatical),

Vita beati Gregorii papae (biographie de Grégoire le Grand),

trois fables (le lion malade, le veau et la cigogne, la puce et la goutte).

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26
Q

Eutrope

A

Eutrope, eunuque arménien, naît dans l’Empire sassanide et connaît une ascension fulgurante malgré un passé d’esclave vendu plusieurs fois.

Grâce à la protection du général Abundantius, il entre au service impérial, puis gagne la confiance de Théodose Ier et devient grand chambellan sous Arcadius.

En 395, il arrange le mariage d’Arcadius avec Eudoxie pour asseoir son pouvoir, supplantant son rival Rufinus, assassiné peu après.

Il laisse Alaric ravager la Grèce en 396, puis le nomme magister militum en Illyrie et cantonne les Wisigoths en Épire, tout en déclarant Stilicon ennemi public.

Il obtient les titres de patrice et de consul en 399 — seul eunuque à ce jour à atteindre cette dignité — et fait exiler son ancien protecteur Abundantius.

Son autoritarisme et ses manœuvres politiques le rendent impopulaire. Eudoxie, devenue influente, le fait écarter du pouvoir.

Réfugié dans la cathédrale de Constantinople, il est défendu par Jean Chrysostome dans une homélie.

Capturé après avoir quitté l’église, il est exilé à Chypre, puis ramené à Chalcédoine où il est jugé et exécuté par décapitation en 399.

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27
Q

Paul Orose

A

Né vers 380 à Braga (Bracara Augusta), Paul Orose est un prêtre chrétien et apologiste originaire de la Gallécie.

En 414, il fuit l’Hispanie occupée par les Suèves et rejoint Augustin d’Hippone à Hippone pour discuter du priscillianisme.

Augustin l’envoie en Palestine en 415 pour combattre le pélagianisme aux côtés de Jérôme ; il y participe au synode de Jérusalem et rédige Apologeticus de arbitrii libertate.

De retour à Hippone, il rapporte des reliques de saint Étienne découvertes à Jérusalem et un ensemble de lettres aux évêques africains.

Il rédige Histoires contre les païens à la demande d’Augustin, une histoire universelle de l’humanité depuis Adam jusqu’en 416, destinée à contrer l’idée selon laquelle l’abandon du paganisme aurait causé le sac de Rome.

Son œuvre suit trois axes : intégration des histoires orientales, fusion christianisme/histoire romaine, et lecture eschatologique de l’histoire (fin du monde dans deux siècles).

Orose affirme que plus le christianisme progresse, moins les malheurs frappent l’humanité ; il présente le christianisme comme facteur de salut historique.

Augustin se désolidarise discrètement de l’œuvre : il la réfute dans La Cité de Dieu (livre XVIII), critiquant la confusion entre cité terrestre et céleste, et le millénarisme.

Orose est sans doute mort en mer vers 418, après un séjour à Minorque où il laisse les reliques de saint Étienne, réputées miraculeuses.

Son œuvre connaît une large postérité : première histoire universelle chrétienne, elle influence Cassiodore, Isidore de Séville, Paul Diacre, Alfred le Grand, Ibn Khaldoun, et même Dante.

Hervé Inglebert souligne que l’“augustinisme politique” est en réalité orosien, non augustinien.

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Isidore de Séville (Isidorus Hispalensis)

A

Né entre 560 et 570 à Carthagène, Isidore appartient à une famille noble hispano-romaine ; son frère Léandre, archevêque de Séville, l’éduque.

Il devient évêque de Séville en 601 et le reste jusqu’à sa mort le 4 avril 636.

Il joue un rôle clé dans la conversion des Wisigoths ariens au christianisme trinitaire, notamment en soutenant la politique religieuse de Récarède Ier et de Sisebut.

Il est l’unificateur idéologique du royaume wisigoth : au IVe concile de Tolède (633), il développe l’idée de rex, gens, patria, fusionnant identité religieuse, politique et nationale.

Hostile aux Juifs, il rédige De fide catholica contra Iudaeos ; bien qu’il ne réclame pas leur persécution, il soutient les conversions forcées sous Sisebut et participe à leur justification.

Son œuvre maîtresse, Etymologiae, est une encyclopédie en 20 livres synthétisant le savoir gréco-romain et chrétien : grammaire, zoologie, histoire, liturgie, etc.

Sa méthode étymologique est fondée sur des rapprochements phonétiques parfois arbitraires ; son objectif est pédagogique et mnémotechnique.

Il est aussi l’auteur de chroniques historiques (Historia Gothorum, Chronica Majora), de traités théologiques, exégétiques et monastiques.

Il développe une théologie du pouvoir royal fondée sur la iustitia et la pietas ; les rois doivent être vertueux, sinon ils peuvent être déposés.

Il meurt en 636 à Séville ; ses reliques sont transférées à León au XIe siècle ; il est proclamé Docteur de l’Église en 1722.

En 2002, il devient saint patron des informaticiens en raison de la structure arborescente de son œuvre, qui préfigure les bases de données.

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Hydace de Chaves

A

Hydace est né vers 400 à Lemica (Galice), dans une famille hispano-romaine probablement aisée.

Jeune, il voyage en Orient, rencontre saint Jérôme à Bethléem, ce qui marque profondément sa vision religieuse.

Ordonné clerc vers 416, il devient évêque d’Aquae Flaviae (actuelle Chaves) en 427.

Il lutte activement contre les hérésies (manichéisme, priscillianisme) et les sectes dans une région marquée par l’implantation des Suèves.

Il tente de préserver l’autorité romaine : en 431, il se rend auprès du général Aetius pour demander de l’aide contre les Suèves.

En 460, il est emprisonné trois mois par le roi suève Frumarius, sans abandonner son opposition.

Il rédige une Chronique couvrant les années 379 à 469, poursuivant le travail de Jérôme de Stridon.

Le texte, concentré sur l’Hispanie, suit un prisme eschatologique fort : les événements (guerres, invasions, hérésies) sont lus comme des signes de la fin du monde, qu’il attend pour 482.

Sa vision du monde reste strictement romano-chrétienne : pour lui, hors de l’Empire romain, point de salut.

Sa Chronique constitue une source essentielle sur les effets des invasions barbares en Hispanie (surtout en Gallaecia) et sur l’effondrement local de l’Empire romain d’Occident.

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30
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Tertulien

A

Nom et origine : Quintus Septimius Florens Tertullianus, né à Carthage entre 150 et 160, dans une famille indigène romanisée (punique ou berbère), probablement de classe moyenne élevée. Son père, centurion de la cohorte proconsulaire, meurt tôt.

Formation :

Instruction initiale auprès d’un litterator (maître d’école), puis approfondie chez un grammairien.

Connaissance approfondie de la littérature gréco-latine : Homère, Hésiode, Phérécyde de Syros, Sophocle, Diodore de Sicile.

Formé à Rome à la rhétorique, au droit, à l’histoire, à la médecine, à la philosophie et aux sciences naturelles.

N’a probablement pas exercé comme avocat, mais son style très technique montre une solide maîtrise du droit.

Fonde une grande partie du vocabulaire juridique-théologique latin (ex. satisfactio, substantia, persona).

Conversion et vie religieuse :

Converti vers 193–195 (rédige l’Apologeticum en 197).

Marié à une chrétienne ; célèbre la vie conjugale entre croyants dans Ad uxorem.

Jamais explicitement présenté comme prêtre, se dit laicus (simple fidèle), mais prêche : sans doute un didascale (docteur laïc autorisé à enseigner).

Orientation montaniste (vers 206) :

Se rapproche du montanisme (ascétisme rigide, prophétisme, extases, glossolalie).

Défend l’idée d’une Église des purs, où certains péchés (apostasie, meurtre, adultère) ne peuvent être pardonnés.

Devient de plus en plus rigoriste : interdit le remariage, condamne les spectacles, les parures, les compromissions.

Selon Augustin, il fonde une communauté indépendante à la fin de sa vie.

Doctrine théologique :

Formule pionnière sur la Trinité : « una substantia, tres personae » (une substance, trois personnes).

Dieu unique se distribue en trois entités distinctes mais non séparées.

Le Christ possède deux natures (divine et humaine) unies sans confusion dans une seule personne.

Système théologique très influencé par sa formation juridique : Dieu juge, l’homme doit satisfaction pour ses fautes ; dimension morale très forte.

Sa doctrine annonce certaines définitions des conciles ultérieurs (Nicée, Chalcédoine).

Style et méthode :

Latin vigoureux, incisif, parfois violent ; usage fréquent de l’ironie, de la provocation.

Structure argumentative héritée de la rhétorique classique.

Mépris du compromis et du relâchement ; vision dualiste stricte : Dieu contre les démons, Église contre le monde.

Fortement attaché à la notion de vérité révélée, méfiant vis-à-vis de la philosophie païenne.

Rapport aux femmes :

Ambigu : voit la femme comme dangereuse, tentatrice, mais reconnaît la vertu des mères chrétiennes, veuves ou femmes âgées.

Dans De cultu feminarum, critique de la coquetterie, perçue comme voie d’accès du démon dans le monde.

Néanmoins, il admet qu’elles peuvent être guides spirituels si elles ont acquis sagesse et retenue.

Vision du monde et du salut :

Le monde est corrompu, dominé par les démons.

Le salut ne passe que par la foi, la pureté morale et la fidélité au Christ.

Refuse toute dilution du christianisme dans la culture gréco-romaine.

Très critique envers les chrétiens tièdes ou mondains.

Œuvres principales (plus de 30 traités conservés) :

Apologeticum (défense du christianisme contre les accusations païennes).

Adversus Marcionem (réfutation du dualisme de Marcion).

De praescriptione haereticorum (défense de l’autorité de l’Église contre les hérétiques).

De anima (traité anthropologique et spirituel).

De carne Christi (défense de l’incarnation réelle).

De spectaculis, De idololatria (critique des pratiques païennes).

De monogamia, De virginibus velandis (rigorisme moral).

De baptismo, De oratione, De paenitentia, etc.

Postérité :

Père de la théologie latine, malgré son passage au montanisme.

Rejeté partiellement à cause de cette hérésie, mais influent sur Cyprien, Augustin, et la théologie occidentale.

Jugé par Malebranche comme un esprit plus imaginatif que rationnel.

Figure centrale du christianisme africain ancien.

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31
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Synésios de Cyrène

A

Identité : Synésios de Cyrène (Συνέσιος ὁ Κυρηναῖος), né vers 370 à Cyrène, mort vers 413. Philosophe néoplatonicien, écrivain, épistolier et évêque de Ptolémaïs (Pentapole, actuelle Libye).

Origines et formation :

Famille aristocratique grecque prétendant descendre des rois de Sparte.

Études à Alexandrie, où il suit l’enseignement de la philosophe néoplatonicienne Hypatie.

Très attaché à elle, entretient une correspondance régulière jusqu’à sa mort.

Formé en philosophie, astronomie, mathématiques, littérature grecque classique.

Vie publique et politique :

Revenu en Cyrénaïque, exerce des fonctions militaires et administratives.

En 399, ambassadeur auprès de l’empereur Arcadius à Constantinople pour demander un allègement fiscal de la Pentapole.

Réside à la cour pendant 3–4 ans, critique la décadence de la vie impériale dans ses écrits.

À son retour, soutient l’ascension de Cyrille d’Alexandrie au patriarcat.

Épiscopat :

Devient évêque de Ptolémaïs (v. 410–413) malgré sa condition initiale de catéchumène.

Accepte la fonction sans renier sa philosophie néoplatonicienne.

Marié à une chrétienne alexandrine, père de trois enfants, tous morts avant lui.

Refuse de renoncer à ses pratiques intellectuelles, combine rationalité hellénique et foi chrétienne.

Position religieuse et philosophique :

Néoplatonicien convaincu, adapte cette philosophie à sa vision chrétienne.

Refuse de séparer science, culture grecque et foi religieuse.

Soutient une théologie rationnelle, influencée par Platon, Plotin et Hypatie.

En tension avec la tendance anti-païenne montante à Alexandrie.

Pensée religieuse et vision du rêve :

Dans Traité sur les songes, défend une conception du rêve comme canal divin universel et accessible par l’éducation personnelle.

Pour lui, tous les songes ont un sens, à condition d’être correctement interprétés.

Travaux possibles en alchimie :

Parfois identifié à Synésios l’Alchimiste, actif vers 380.

Ouvrages : De l’œuvre des philosophes et Dialogue sur Démocrite, présents dans les corpus d’alchimistes grecs anciens.

Œuvres principales :

Catastasis : portrait dramatique de la désagrégation de la Cyrénaïque romaine.

Éloge de la calvitie (400) : exercice rhétorique ironique, réponse à l’Éloge de la chevelure de Dion Chrysostome.

Dion (404) : réflexion sur la place respective de la philosophie, de la religion et de la culture.

Discours sur la royauté : critique implicite du pouvoir impérial.

Les Récits égyptiens : récit philosophique allégorique.

De la Providence (Aegyptii) : traité philosophico-religieux à portée politique.

157 lettres conservées, riches sources sur les enjeux religieux, culturels et politiques de l’époque.

Postérité :

Figure de transition entre culture païenne et christianisme tardif.

Incarnation d’une forme d’humanisme tardo-antique conciliant foi et raison.

Son indépendance intellectuelle préfigure les tensions entre clergé et culture savante dans l’Antiquité tardive.

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Augustin de Canterbury

A

Identité : Augustin de Cantorbéry, moine bénédictin né à Rome au début du VIe siècle, mort entre 604 et 609 à Cantorbéry. Premier archevêque de Cantorbéry (597), chef de la mission grégorienne. Saint des Églises catholique, anglicane et orthodoxe.

Origines et mission :

Prieur de l’abbaye Saint-André à Rome.

Envoyé en 595 par le pape Grégoire le Grand pour convertir les Anglo-Saxons.

À la tête d’une quarantaine de missionnaires, d’abord effrayés, mais encouragés à continuer par le pape.

Appui diplomatique reçu des souverains mérovingiens et de leurs évêques.

Contexte religieux et politique :

L’Angleterre post-romaine est dominée par des royaumes anglo-saxons païens.

Christianisme subsiste à l’ouest (Église celtique), mais isolé de Rome.

Le Kent est dirigé par Æthelberht, époux de Berthe, princesse mérovingienne chrétienne, ce qui facilite la mission.

Arrivée et installation (597) :

Autorisé à prêcher à Cantorbéry par Æthelberht.

Baptême du roi (probablement 597), qui entraîne des conversions massives.

Fondation de l’abbaye Saint-Pierre-et-Saint-Paul (future abbaye Saint-Augustin).

Reconnaissance par Rome :

Grégoire envoie un pallium (601), donnant à Augustin le statut d’archevêque.

Ordre de créer deux provinces ecclésiastiques : Londres et York, avec 12 évêques chacune.

Échec du transfert du siège à Londres (contrôle franc limité).

Création des évêchés de Londres (Mellitus) et Rochester (Juste) en 604.

Administration et pédagogie :

Probable fondation d’écoles pour former un clergé local (hypothèse soutenue par les résultats postérieurs).

Introduction de la liturgie romaine.

Correspondance doctrinale avec Grégoire conservée dans le Libellus responsionum.

Relations avec l’Église celtique :

Tentative de soumettre les évêques gallois et bretons en 603 : échec.

Rejet dû à une erreur diplomatique (refus de se lever en leur honneur).

Divergences théologiques (tonsure, date de Pâques), organisation (monachisme vs épiscopat), et rivalités politiques (Æthelberht vu comme envahisseur).

Mort et succession :

Meurt un 26 mai entre 604 et 609, probablement en 604.

Il sacre lui-même son successeur Laurent.

Son œuvre est limitée géographiquement au Kent, mais fonde durablement l’Église anglaise.

Postérité et culte :

Vénéré comme « apôtre des Anglais ».

Modèle des missions anglo-saxonnes ultérieures sur le continent (VIIIe siècle).

Tombe d’origine dans l’abbaye Saint-Augustin à Cantorbéry.

Translation des reliques en 1091, promotion du culte à la suite de la conquête normande.

Relique détruite à la Réforme ; culte relancé à Ramsgate en 2012.

Crois érigée à Ebbsfleet en 1884 à l’emplacement supposé de son arrivée.

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Nonnos de Panopolis

A

Identité : Nonnos de Panopolis, poète grec du Ve siècle, originaire de Panopolis (actuelle Akhmîm, Haute-Égypte), actif entre la fin du IVe et le milieu du Ve siècle.

Contexte culturel :

Figure de la littérature grecque tardive dans l’Égypte romaine.

Proche d’un courant d’auteurs hellénisants égyptiens (Tryphiodore, Musée, Palladas).

Témoigne de la survivance raffinée de la culture grecque païenne en milieu provincial et multiculturel.

Œuvre principale – Les Dionysiaques :

Épopée mythologique de 48 chants en hexamètres dactyliques.

Sujet : vie, exploits et triomphes de Dionysos, dieu du vin et de l’extase.

Composition entre 450 et 470.

Reprend la forme et les procédés de l’épopée homérique, mais dans un style orné, foisonnant, baroque.

S’appuie sur la rhétorique sophistiquée de son époque.

Vise à rivaliser avec Homère en réécrivant la tradition païenne dans un cadre formellement grandiose.

Structure : chaque chant commence par une invocation à la Muse, souvent suivie d’un résumé.

Œuvre chrétienne – Paraphrase de l’Évangile selon Jean :

Mise en vers (hexamètres) de l’Évangile de Jean.

Attestée comme authentique, mais son ordre par rapport aux Dionysiaques reste débattu.

Interprétations opposées :

conversion au christianisme après les Dionysiaques ;

ou auteur chrétien ayant d’abord produit l’épopée païenne dans un cadre rhétorique.

Pierre Chuvin soutient l’hypothèse d’un Nonnos d’abord chrétien, puis séduit par la théologie païenne.

Exercice littéraire de transposition du texte sacré dans les formes classiques grecques.

Style et portée :

Style riche, allusif, saturé de métaphores et d’ornementations.

Travail très soigné sur la métrique et l’harmonie sonore.

Utilise une mythologie païenne flamboyante dans les Dionysiaques, mais dans une logique plus symbolique que cultuelle.

La Paraphrase propose une lecture poétique de l’évangile, dans une langue hautement classique, sans intention polémique.

Transmission et postérité :

Redécouvert à la Renaissance : le manuscrit des Dionysiaques est retrouvé à Tarente par Sambucus au XVIe siècle.

Édition par Christophe Plantin.

Traductions françaises dès le XIXe siècle (comte de Marcellus).

Récemment édité dans la CUF (Les Belles Lettres), en particulier pour la Paraphrase.

Objet de débats critiques sur la relation entre christianisme et culture païenne en contexte tardif.

Postérité intellectuelle :

Symbole du syncrétisme culturel du Ve siècle.

Fait partie des derniers grands représentants de la poésie épique grecque.

Étudié pour sa tentative de réconcilier forme païenne et contenu chrétien.

Modèle du poète chrétien hellénisé dans la transition vers l’époque byzantine.

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Prudence

A

Identité : Aurelius Prudentius Clemens, né en 348 à Calahorra (Espagne romaine), mort après 405. Poète chrétien latin engagé dans la construction culturelle du christianisme impérial.

Carrière :

Formation juridique, carrière administrative sous l’Empire (Théodose Ier).

Gouverneur de deux cités (non identifiées), proche des milieux du pouvoir à Milan (Ambroise).

Témoin de la crise religieuse de la fin du IVe siècle (païens vs chrétiens, ariens vs nicéens).

Se retire vers 400, adopte un mode de vie ascétique, consacre ses dernières années à l’écriture poétique au service de la foi chrétienne.

Poésie chrétienne militante :
Prudence se donne pour mission de transposer la culture païenne dans une forme chrétienne, en exploitant les ressources de la poésie latine classique (formes métriques, vocabulaire savant, allusions littéraires), tout en l’orientant vers des objectifs théologiques et moraux.

Œuvres majeures (env. 20 000 vers) regroupées en cycles :

Poésie didactique/théologique :

Apotheosis : défense de la divinité du Christ, contre les hérésies.

Hamartigenia : traité sur l’origine du mal, combat contre le manichéisme.

Psychomachie : allégorie du combat entre Vertus (chrétiennes) et Vices (païens), premier poème allégorique occidental.

Contra Symmachum : réponse polémique à la demande de restauration de l’Autel de la Victoire ; manifeste pour un empire chrétien.

Poésie liturgique et lyrique :

Cathemerinon : douze hymnes en vers pour sanctifier les moments de la journée et les fêtes chrétiennes (Noël, Épiphanie…).

Peristephanon : hymnes dédiés aux martyrs, valorisant leur héroïsme et leur rôle dans la foi.

Dittochéon : inscriptions poétiques pour accompagner des images bibliques (forme épigraphique).

Poèmes programmatiques : Præfatio, Epilogus, introductions aux œuvres, affirmant son renoncement au monde et son engagement chrétien.

Style :

Utilisation maîtrisée de l’hexamètre et d’autres mètres latins classiques.

Richesse de vocabulaire, emprunts techniques (droit, rhétorique, médecine).

Inspiration virgilienne et horatienne, usage de réminiscences païennes pour les mettre au service d’un message chrétien.

Systématisation allégorique : structuration symbolique des contenus (ex. Psychomachie).

Thèmes principaux :

Lutte contre le paganisme résiduel et les hérésies.

Défense des dogmes trinitaire, christologique et anthropologique (péché originel, salut).

Glorification du martyre et de l’ascèse.

Intégration du culte chrétien dans une esthétique poétique héritée de Rome.

Modèles et influences :

Poètes classiques : Virgile, Horace, Ovide.

Contemporains : Ausone, Claudien, Paulin de Nole.

Père spirituel : Ambroise de Milan (inspiration liturgique et doctrinale).

Influence biblique très forte (Évangiles, Psaumes, Apocalypse).

Portée littéraire et culturelle :

Premier à créer une œuvre chrétienne complète dans une forme littéraire héritée de Rome.

Introduit une logique de recueil structuré à des fins didactiques et théologiques.

Fusion entre la poésie profane et la catéchèse chrétienne.

Premier grand poète latin chrétien après la reconnaissance officielle du christianisme.

Réception :

Immense succès au Moyen Âge, surtout à l’époque carolingienne : lu, commenté, copié dans les monastères.

Un des auteurs les plus diffusés après la Bible.

Imité par Amarcius, cité par Alcuin, étudié dans les écoles monastiques.

Héritage :

Modèle fondateur pour toute la poésie chrétienne occidentale médiévale.

Transition réussie entre culture antique et christianisme impérial.

Symbole d’un christianisme lettré, romanisé, capable d’absorber les codes classiques.

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35
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Évagre le Scholastique

A

Identité : Évagre le Scholastique (Εὐάγριος Σχολαστικός), né vers 536 à Épiphanie (Syrie), mort après 594. Historien ecclésiastique et juriste byzantin.

Carrière juridique :

Formation juridique à Apamée, exercée à Antioche.

Le titre scholastikos désigne alors un avocat.

Conseiller juridique du patriarche Grégoire Ier d’Antioche (571–594).

Mission à Constantinople en 587 pour défendre ce patriarche dans une affaire d’accusations populaires et officielles.

Questeur impérial sous Tibère II Constantin (578–582), puis chartophylax (gardien d’archives) sous Maurice Ier.

Œuvre : Histoire ecclésiastique en 6 livres.

Commence en 431 (concile d’Éphèse, condamnation de Nestorius), se termine en 593 (mort de Grégoire d’Antioche).

Se veut suite des Histoires de Socrate le Scolastique, Sozomène et Théodoret de Cyr.

Combine histoire ecclésiastique et histoire impériale : évènements religieux, politiques et militaires (ex. guerres avec les Perses).

Montre une réelle rigueur documentaire : inclusion de documents authentiques, citations de sources (Zacharie le Rhéteur, Procope, Malalas, Jean d’Épiphanie…).

Défenseur de l’orthodoxie, mais adopte un ton modéré vis-à-vis des “hérétiques”.

Caractéristiques du récit :

Crédule face aux miracles (typiquement hagiographiques), mais sans exagération polémique.

Style jugé élégant et clair par ses contemporains (cf. jugement de Photius), bien que parfois prolixe.

Témoin oculaire de certains événements, notamment à Antioche.

Positionnement historique :

Dernier grand représentant du genre de l’Histoire ecclésiastique en grec tardo-antique.

Transition entre la tradition historiographique classique (héritée d’Eusèbe) et l’historiographie byzantine proprement dite.

Postérité :

Source majeure pour l’histoire religieuse, politique et sociale du VIe siècle byzantin.

Transmis par la tradition patristique, utilisé par Photius et les chroniqueurs byzantins.

Moins diffusé que ses prédécesseurs, mais considéré aujourd’hui comme l’un des plus fiables pour son époque.

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36
Q

Eusèbe de Césarée

A

– Né vers 265 et mort en 339, Eusèbe est évêque de Césarée en Palestine, élève de Pamphile et influencé par Origène.
– Il est un proche de l’empereur Constantin Ier, qu’il soutient dans sa politique religieuse, et qu’il glorifie dans sa Vie de Constantin.
– Il défend l’arianisme, notamment en soutenant Arius et en convoquant un concile à Césarée pour défendre ses thèses.
– Sa théologie est subordinatianiste : il affirme l’infériorité du Fils par rapport au Père.
– Il participe au concile de Nicée (325), où, après des hésitations et sous la pression de Constantin, il accepte le symbole de foi et le terme homoousios, tout en l’interprétant de façon compatible avec ses vues.
– Il joue un rôle dans l’exil de plusieurs adversaires de l’arianisme, comme Eustathe d’Antioche et Athanase d’Alexandrie.
– Il meurt en 339, probablement le 30 mai.

– En tant qu’historien, Eusèbe est le fondateur du genre de l’Histoire ecclésiastique, qu’il rédige en dix livres, retraçant l’histoire du christianisme des origines à 323.
– Il utilise une riche documentation : lettres impériales, archives ecclésiastiques, récits antérieurs, qu’il cite largement.
– Il revendique une perspective apologétique : il sélectionne les faits édifiants et omet ceux qu’il juge nuisibles à la foi.
– Il rédige aussi une Chronique universelle en deux parties : une Chronographie et un Canon chronologique, poursuivis ensuite par Jérôme.
– On lui attribue aussi une Vie de Constantin et deux Éloges de Constantin, riches en informations mais fortement hagiographiques.

– Comme hagiographe, il écrit Les Martyrs de Palestine, qui relatent les persécutions sous Dioclétien, et il transmet la célèbre Lettre des chrétiens de Lyon et Vienne (177).
– Il glorifie les martyrs en insistant sur leur endurance et leur foi face aux tortures, comme dans le cas de Blandine et Sanctus.

– Comme exégète, Eusèbe écrit des traités sur l’harmonie des Évangiles, sur la fête de Pâques, sur la topographie biblique, et sur des questions posées par les textes.
– Il propose une lecture théologique fondée sur la typologie : les figures bibliques de l’Ancien Testament annoncent le Christ.
– Il justifie l’intégration des peuples non juifs dans la généalogie et la mission chrétienne, comme le montre son interprétation du livre de Ruth.

– Comme apologiste, il rédige La Préparation évangélique (15 livres) pour démontrer la supériorité du christianisme sur les traditions païennes.
– Il y cite de nombreux auteurs antiques et théologies anciennes pour mieux les dépasser du point de vue chrétien.
– Dans La Démonstration évangélique (20 livres, dont 10 conservés), il montre l’accord entre prophéties juives et accomplissements évangéliques.
– Dans Contre Hiéroclès, il répond à un pamphlet païen comparant Apollonius de Tyane à Jésus.

– Comme théologien, il défend l’orthodoxie arienne contre le sabellianisme dans ses traités Contre Marcel et Sur la théologie ecclésiastique.

– Œuvres principales : Histoire ecclésiastique, Chronique, Préparation évangélique, Démonstration évangélique, Contre Hiéroclès, La Théophanie, Vie de Constantin, Harmonie des Évangiles, Commentaires des Psaumes et d’Isaïe, Onomasticon, Lettres, Traités dogmatiques.

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37
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Olympiodore de Thèbes

A

– Olympiodore de Thèbes est un historien grec du Ve siècle, né vers 380 à Thèbes, en Égypte, et mort vers 425.

– Il est actif à la fin de l’Empire romain d’Occident, durant les règnes d’Honorius et de Théodose II.

– Il participe à une ambassade envoyée par l’empereur Honorius en 412, selon Photios, auprès des Huns (Photios évoque Attila, mais c’est probablement une confusion chronologique).

– Il a également été parfois identifié à tort comme alchimiste, mais il faut le distinguer d’Olympiodore l’Alchimiste.

– Son œuvre principale, aujourd’hui perdue, est une Histoire de l’Empire romain de 407 à 425, écrite en 22 livres et destinée à l’empereur Théodose II.

– Cette Histoire est un prolongement du travail d’Eunape et est connue par des résumés transmis par Photios dans sa Bibliothèque (codex 80 et 214).

– Olympiodore y mêle des faits historiques, des traditions orales, des récits populaires, et parfois des légendes issues de la mémoire paysanne.

– Il s’y exprime avec un style direct, parfois poétique, et incorpore des traditions orales, comme le montre le passage rapporté par Moïse de Khorène sur la descendance de Xisuthre et les fondations mythiques de régions d’Asie.

– Il s’intéresse aux origines mythiques des peuples orientaux, à travers des noms légendaires (Sim, Daron, Tzéronk, Zarouant) transmis par la tradition arménienne.

– Son œuvre illustre une histoire “classicisante” de la fin de l’Antiquité, qui combine érudition grecque et contexte chrétien tardo-romain.

– Bien qu’historien païen dans un monde de plus en plus chrétien, il reste un témoin capital de la période troublée des années 410-425, notamment pour l’histoire diplomatique et militaire de l’Empire.

– Il est une source précieuse (via Photios) pour les règnes d’Honorius et de Théodose II, ainsi que pour l’étude des relations de l’Empire avec les peuples barbares, notamment les Huns.

– L’ensemble de ses fragments a été édité et traduit par R. C. Blockley dans The Fragmentary Classicising Historians of the Later Roman Empire.

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Moïse de Khorène

A

– Moïse de Khorène (Movsès Khorenatsi en arménien) est un historien, chroniqueur et écrivain ecclésiastique arménien, généralement daté entre le Ve et le début du VIe siècle.
– Il est traditionnellement considéré comme le “père de l’historiographie arménienne”, bien que sa chronologie exacte et l’authenticité de certaines parties de son œuvre soient débattues.
– Il aurait été disciple de saint Mesrop Machtots, inventeur de l’alphabet arménien, et de saint Sahak, catholicos d’Arménie.
– Son œuvre principale est l’Histoire de l’Arménie (Patmut’iwn Hayots’), un récit qui mêle légendes nationales, traditions orales, généalogies, données bibliques et sources gréco-romaines.
– L’Histoire de Moïse retrace la généalogie légendaire des rois arméniens, depuis Haïk (l’ancêtre éponyme des Arméniens) jusqu’au règne d’Artachès II au Ier siècle avant Jésus-Christ, et poursuit jusqu’à la période de saint Grégoire l’Illuminateur et la conversion de l’Arménie au christianisme.
– Il affirme s’être appuyé sur des archives officielles, des traditions orales et les récits d’anciens bardes arméniens (gousans), mais plusieurs de ses sources sont invérifiables.
– Son récit présente une vision chrétienne et providentialiste de l’histoire arménienne, insérant l’Arménie dans l’histoire du salut.
– Il cite Eusèbe de Césarée, Denys le Périégète, l’Histoire romaine d’Eutrope, des textes grecs païens et chrétiens, ainsi que des traditions propres au Caucase.
– L’œuvre de Moïse est essentielle pour la compréhension de l’identité nationale arménienne, du lien entre religion chrétienne et royauté, et de la mémoire collective du peuple arménien.
– Son style est à la fois narratif, oratoire et poétique, influencé par la rhétorique antique et la liturgie chrétienne.
– Son Histoire de l’Arménie est aujourd’hui divisée en trois parties : (1) Origines mythiques et dynastiques, (2) Période hellénistique et romaine, (3) Époque chrétienne et contemporaine de l’auteur.
– L’œuvre a été critiquée à l’époque moderne pour ses anachronismes, emprunts littéraires et reconstructions historiques, mais elle reste une source capitale pour la mémoire, la langue et l’histoire arménienne.

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39
Q

Eunape de Sardes

A

– Eunape est né vers 349 à Sardes, en Lydie (Asie Mineure), et est mort après 414.

– Il est historien, rhéteur, philosophe et biographe grec de l’Antiquité tardive.

– Élève de Chrysanthios de Sardes, son parent par alliance, puis de Prohérésios à Athènes, il est initié aux mystères d’Éleusis.

– Il enseigne à son retour à Sardes, tout en étant influencé par la philosophie néoplatonicienne de Jamblique et par la rhétorique sophistique.

– Il exprime une hostilité marquée au christianisme, et une admiration forte pour l’empereur Julien, qu’il défend avec ferveur.

– Il a probablement vécu jusqu’au règne de Pulchérie (414-416), ce qui suggère une longévité jusqu’à environ 65 ans.

– Son œuvre majeure est les Vies de philosophes et de sophistes, écrites vers 395-396, rassemblant 25 biographies intellectuelles couvrant la période de 207 à 407.

– Ces Vies comprennent des philosophes (Plotin, Jamblique, Julien…), des sophistes (Libanios, Prohérésios…), et des médecins (Oribase…).

– Elles relèvent d’un genre original, mêlant récits hagiographiques païens, éléments miraculeux, et anecdotes biographiques.

– Eunape insiste moins sur les doctrines philosophiques que sur le mode de vie spirituel et l’élévation morale des personnages.

– Il s’inscrit dans la lignée du néoplatonisme tardif, en soulignant la dimension divine des sages païens et leur rôle comme intercesseurs entre les dieux et les hommes.

– Ses récits valorisent des figures thaumaturgiques comme Sosipatra d’Éphèse ou le divin Jamblique, parfois comparables aux saints chrétiens.

– Il compose également une Histoire en 14 livres, couvrant la période de 270 (Claude II) à 407 (Honorius et Arcadius), en continuité avec Dexippe.

– Cette Histoire est perdue, mais connue par une centaine de fragments transmis par Photios, la Souda, les Excerpta de Constantin VII, et Zosime.

– Photios en donne un portrait très critique : Eunape y est violemment anti-chrétien et attaque l’image de Constantin.

– Il existerait deux versions de son Histoire : une première très polémique, et une seconde, plus expurgée mais moins cohérente.

– Il est une source précieuse pour l’histoire intellectuelle et religieuse de la fin de l’Antiquité, en particulier pour le néopaganisme lettré.

– Ses œuvres témoignent du combat culturel des derniers païens, cherchant à défendre leur tradition contre la montée du christianisme impérial.

– Son style mêle érudition, admiration pour les maîtres, religiosité païenne et intention apologétique païenne.

– Il reste aujourd’hui une figure clé de la résistance intellectuelle païenne dans l’Empire romain tardif.

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Prosper d’Aquitaine

A

– Prosper d’Aquitaine naît vers 390 à Limoges, dans l’Empire romain d’Occident, et meurt vers 463 à Rome.

– Il est un théologien laïc, historien et écrivain chrétien, profondément influencé par saint Augustin, qu’il défend toute sa vie.

– En 427, il se rend à Marseille pour approfondir sa formation religieuse, probablement comme frère laïc.

– Il écrit à son épouse un témoignage de vie conjugale chrétienne, lui demandant de partager avec lui une union spirituelle autant que charnelle.

– Face à la montée du semi-pélagianisme dans le sud de la Gaule, il écrit à saint Augustin pour le défendre et propage ses idées sur la grâce.

– En 431, il voyage à Rome pour consulter le pape Célestin Ier à propos de la doctrine d’Augustin.

– En 440, il devient secrétaire du pape Léon Ier, renforçant son influence dans les affaires doctrinales de l’Église.

– Bien qu’il n’ait jamais été prêtre, Prosper s’engage pleinement dans les controverses théologiques, notamment contre Jean Cassien et les pélagiens.

– Il compile une version abrégée des commentaires d’Augustin sur les Psaumes, ainsi qu’un recueil de 92 sentences tirées de ses œuvres, préfigurant les futures sentences médiévales.

– Il compose aussi 106 épigrammes versifiées, résumant des doctrines d’Augustin sous forme mnémotechnique.

– Son œuvre De gratia Dei et libero arbitrio (432) s’oppose directement à Jean Cassien et affirme la nécessité absolue de la grâce.

– Dans De vocatione omnium gentium (vers 450), il tente de concilier la volonté divine de sauver tous les hommes et la doctrine augustinienne de l’élection.

– Il pousse le pape Célestin à écrire aux évêques de Gaule contre les dérives doctrinales locales.

– Sa Chronique (Epitoma Chronicon), prolongation d’Eusèbe et de Jérôme, couvre les années 379 à 455 ; elle est une source capitale pour l’histoire de 425 à 455, qu’il a vécue.

– Il en propose cinq versions successives, la dernière juste après la mort de Valentinien III, en 455.

– Certaines œuvres autrefois attribuées à Prosper, comme le Chronicon Imperiale (Prosper Tiro), sont aujourd’hui reconnues comme indépendantes, voire parfois pélagiennes.

– Ses ouvrages visent à défendre le dogme de la grâce gratuite, essentielle au salut, en s’appuyant sur l’autorité papale et l’héritage d’Augustin.

– Il compose aussi un poème polémique, Adversus Ingratos, vers 430, contre les pélagiens.

– Carmen de Providentia Divina (attribué incertainement) tente d’interpréter théologiquement les invasions barbares comme expression de la Providence.

– Il joue un rôle majeur dans la crise doctrinale de la Gaule dans les années 420, agissant comme propagandiste de la vision augustinienne du salut.

– Il est canonisé comme saint laïc, et sa fête est célébrée le 25 juin.

– Pour Antoine Arnauld, Prosper est « le plus grand disciple de saint Augustin, et le chef des disciples de saint Augustin ».

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Claudien Mamert

A

– Claudien Mamert (Claudianus Mamertus) est un philosophe et théologien gallo-romain né vers 420 à Vienne et mort vers 470 dans la même ville.

– Il est le frère de saint Mamert, évêque de Vienne, qui l’ordonne prêtre ; tous deux sont engagés dans la vie religieuse et la réforme liturgique, notamment l’instauration des rogations (vers 469).

– Claudien Mamert est décrit par Sidoine Apollinaire comme un platonicien chrétien, érudit et maître dans les arts libéraux, ne se distinguant des autres platoniciens que par sa foi.

– Son œuvre principale est le De statu animae, en trois livres, composé entre 468 et 470, consacré à la nature de l’âme.

– Dans ce traité, il s’oppose à la thèse de Fauste de Riez qui soutenait que l’âme humaine est corporelle ; Mamert défend la spiritualité de l’âme en s’inspirant de saint Augustin, du néoplatonisme, et de Porphyre.

– L’ouvrage se fonde sur une philosophie chrétienne rationaliste, articulée autour de la logique aristotélicienne et de la métaphysique néoplatonicienne.

– Claudien affirme que l’âme humaine est incorporelle, raisonnable, immortelle, et qu’elle conserve son individualité après la mort, en préparation du jugement.

– Il développe également une théologie trinitaire, où l’âme humaine, par son intelligence, son souvenir et sa volonté, reflète le modèle de la Trinité.

– Son style est rhétorique et savant, nourri de citations classiques, ce qui reflète l’élite intellectuelle gallo-romaine chrétienne de son temps.

– Le De statu animae devient une référence majeure au Moyen Âge en matière de psychologie théologique, influençant Cassiodore, Abélard, Nicolas de Clairvaux, et même les débats sur l’anthropologie chrétienne au XIIe siècle.

– Il est également auteur de deux lettres conservées et peut-être d’un lectionnaire liturgique, selon Sidoine Apollinaire.

– Claudien Mamert est un pont entre Augustin et Boèce, représentant une philosophie chrétienne rationaliste et fidèle au dogme, à la fin de l’Antiquité.

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42
Q

Scholastique de Nursie

A

– Scholastique de Nursie naît vers 480 à Nursie en Ombrie, dans une famille noble probablement d’origine sénatoriale, et est la sœur jumelle de saint Benoît de Nursie.

– Elle se consacre très jeune à la vie religieuse et fonde avec quelques vierges un monastère féminin à proximité de celui de son frère à Subiaco, puis à Piumarola, près du Mont-Cassin.

– Elle est considérée comme la fondatrice du premier monastère féminin suivant la règle de saint Benoît, marquant la naissance de la branche féminine de l’ordre bénédictin.

– Chaque année, elle retrouve son frère dans une maison entre leurs monastères pour une journée de prière et de dialogue spirituel.

– Lors de leur dernière rencontre en 547, elle prie pour qu’il reste avec elle malgré la règle de son monastère, et une tempête divine l’y contraint ; cet épisode est vu comme un miracle d’amour fraternel.

– Trois jours après cette rencontre, Scholastique meurt ; Benoît voit son âme s’élever au ciel sous la forme d’une colombe.

– Elle est enterrée au Mont-Cassin dans le même tombeau que son frère, comme signe de leur union spirituelle et corporelle dans la foi chrétienne.

– Le récit de sa vie est principalement connu grâce au Livre II des Dialogues de Grégoire le Grand, où elle est présentée comme un modèle de piété féminine.

– De nombreuses reliques lui sont attribuées, notamment à l’abbaye de Juvigny-sur-Loison, au Mans, et au Mont-Cassin, où un examen archéologique en 1955 a permis d’authentifier ses restes avec ceux de saint Benoît.

– Elle est vénérée dans l’Église catholique comme sainte, fêtée le 10 février, patronne des mères, des femmes en couches, des enfants sujets aux convulsions et invoquée contre les intempéries.

– Sa mémoire est associée à plusieurs lieux de culte et pèlerinages, notamment au Mont-Cassin, à Juvigny-sur-Loison et au Mans.

– L’émeute de la Sainte-Scholastique en 1355 à Oxford rappelle sa popularité : une querelle entre étudiants et habitants aboutit à une tradition annuelle d’expiation jusqu’en 1825.

– Elle reste une figure majeure du monachisme féminin et un symbole de dévotion fraternelle, de prière et d’intercession efficace, aux côtés de saint Benoît.

43
Q

Domninos de Larissa

A

– Domninos de Larissa (Δομνῖνος) est un mathématicien et philosophe juif helléniste, né vers 420 à Larissa de Syrie (Empire byzantin), mort vers 480.

– Il est élève de Syrianos à Athènes, en même temps que Proclos, avec qui il entre en rivalité sur l’interprétation des doctrines de Platon.

– Domninos aurait introduit des opinions personnelles dans ses lectures de Platon, ce qui fut perçu comme une trahison par Proclos et l’Académie, qui choisit de suivre ce dernier.

– Après la mort de Syrianos et l’élévation de Proclos à la tête de l’Académie, Domninos quitte Athènes et retourne à Larissa.

– Une anecdote relate qu’il consomma de la viande de porc, bien qu’étant juif, pour soigner une maladie pulmonaire grave, sur recommandation médicale.

– Il aurait enseigné à Asclépiodote d’Alexandrie, qu’il finit par rejeter quand il estima qu’il était devenu plus savant que lui.

– Son œuvre la plus connue est un Manuel d’introduction à l’arithmétique (Ἐγχειρίδιον ἀριθμητικῆς εἰσαγωγῆς), un traité concis de théorie des nombres qui marque une réaction contre l’arithmétique néo-pythagoricienne de Nicomaque et revient aux principes d’Euclide.

– Ce manuel traite des nombres, des proportions et des moyennes, dans un style clair et structuré.

– Un autre texte, Comment un rapport peut être retiré d’un rapport (Πῶς ἔστι λόγον ἐκ λόγου ἀφελεῖν), lui est aussi attribué, sans certitude absolue.

– À la fin de son manuel, il annonce un ouvrage à venir intitulé Éléments d’arithmétique, dont on ne sait s’il l’a effectivement écrit.

– Domninos est une figure marginale mais importante du néoplatonisme tardif, en tant qu’héritier critique d’Euclide et adversaire des élaborations doctrinales trop mystiques dans l’interprétation de Platon.

44
Q

Proclus

A

– Proclus, surnommé « le Diadoque » (le successeur), est un philosophe néoplatonicien né à Byzance en 412, mort à Athènes en 485.

– Il est formé à Alexandrie et Athènes, auprès d’Olympiodore l’Ancien, Plutarque d’Athènes, Syrianos et Asclépigénie (qui lui enseigne les rites théurgiques).

– En 438, il devient scolarque (chef) de l’Académie platonicienne d’Athènes, succédant à Syrianos.

– Il mène une vie intense : enseignement, écriture, discussions philosophiques et pratiques religieuses (rituels, purifications, jeûnes).

– Il est connu pour avoir synthétisé toute la pensée néoplatonicienne tardive et intégré une dimension mystique et théurgique à la philosophie.

– Il a pour élèves Ammonios, Marinos, Isidore de Gaza et influence le néoplatonisme chrétien, musulman et médiéval latin.

– Il est exilé un temps en Lydie en raison de ses positions païennes dans un Empire chrétien.

– Proclos considère l’Un comme principe suprême et ineffable. Sa pensée repose sur une hiérarchie de l’être allant de l’Un à la matière.

– Il développe une cosmologie extrêmement structurée avec neuf degrés de divinité, des hénades, des intelligibles, des âmes universelles, etc.

– Son Commentaire sur le Timée propose une cosmologie pythagoricienne et une hiérarchie divine très détaillée.

– Son Commentaire sur le Parménide développe une dialectique négative (apophatique) de l’Un et un registre des puissances négatives.

– Sa Théologie platonicienne explicite en détail la hiérarchie divine en trois temps : principes généraux, degrés hiérarchiques, dieux hypercosmiques et encosmiques.

– Ses Éléments de théologie sont une exposition systématique en style géométrique (définitions, théorèmes, démonstrations) de sa métaphysique.

– Il affirme que toute réalité procède de l’Un, selon une logique d’émanation hiérarchisée. Chaque niveau contient les propriétés des niveaux supérieurs sous une forme propre.

– Proclus est aussi théurge : il pratique les rites orphiques, chaldaïques, et se perçoit comme un hiérophante. Il pense être la réincarnation de Nicomaque de Gerasa.

– Il rédige un traité Contre les chrétiens sur l’éternité du monde, réfuté par Jean Philopon et al-Ash’arî.

– Il écrit également des traités mathématiques (commentaire sur Euclide), astronomiques (sur la sphère, les hypothèses de Ptolémée) et poétiques (Chrestomathie, poèmes orphiques).

– Son influence est immense : sur le Pseudo-Denys, le Livre des Causes, Avicenne, Thomas d’Aquin, Maître Eckhart, Marsile Ficin, Nicolas de Cues, et jusqu’à Whitehead.

– Sa méthode euclidienne et sa théologie systématique ont marqué toute la tradition philosophique et mystique postérieure.

45
Q

Marinos de Néapolis

A

– Marinos de Néapolis est un philosophe néoplatonicien né vers 450 à Naplouse (Palestine), mort vers 500, probablement à Athènes.

– Il est d’origine samaritaine ou juive et se convertit au mode de vie grec.

– Il devient l’élève de Proclus, à l’Académie néoplatonicienne d’Athènes.

– Il succède à Proclus à la tête de l’Académie en 485, malgré une santé fragile et des capacités jugées limitées par certains (notamment Damascios).

– Il est contraint de se réfugier à Épidaure à cause des persécutions chrétiennes contre les païens.

– Son œuvre principale est une biographie de Proclus, source essentielle sur la vie et l’enseignement de ce dernier.

– Il y mentionne une éclipse censée survenir un an après la mort de Proclus, ce qui atteste d’une rédaction très proche de l’événement.

– Marinos écrit aussi un commentaire sur les Données d’Euclide.

– Selon Damascios, dans son interprétation du Parménide, Marinos abandonne les hénades supérieures à l’Être (doctrine proclienne) pour revenir à une lecture centrée sur les idées.

– Il aurait également rédigé des commentaires sur Aristote et sur le Philèbe de Platon, mais il détruit ce dernier à cause des critiques d’Isidore de Gaza, son successeur.

– Son importance vient davantage de son rôle de transmission du néoplatonisme et de son témoignage historique que d’une originalité philosophique majeure.

46
Q

Ammonios

A

Né vers 440 à Alexandrie, Ammonios est le fils du philosophe Hermias et d’Aedesia. Il est issu d’un milieu philosophique néoplatonicien.

Il devient élève de Proclus à l’Académie platonicienne d’Athènes, héritant ainsi de la tradition néoplatonicienne athénienne.

De retour à Alexandrie, il enseigne la philosophie à partir de 475, occupant une position éminente dans l’école néoplatonicienne d’Alexandrie, où il exerce jusqu’après 517.

Il est maître de nombreux commentateurs majeurs du VIe siècle, dont Jean Philopon, Asclépios de Tralles, Damascios, Olympiodore le Jeune et Simplicios de Cilicie.

Son enseignement porte essentiellement sur les œuvres d’Aristote, qu’il commente longuement. Il cherche à concilier le platonisme avec l’aristotélisme, dans l’esprit de l’école alexandrine.

Il a écrit ou inspiré plusieurs commentaires aristotéliciens, souvent transmis sous les noms de ses disciples (notamment Philopon) :

Isagoge de Porphyre

Catégories, De l’interprétation, Premiers et Seconds Analytiques, Physique, De l’âme, Métaphysique

Certains de ces commentaires sont en réalité des notes prises par ses élèves.

Il a aussi rédigé un traité intitulé Du Destin, traitant des causes, du déterminisme et de la providence, dans une perspective néoplatonicienne.

Il pratique également l’astronomie : on sait qu’en 502, il observe et commente des phénomènes célestes. Il est également versé en géométrie.

Une Vie d’Aristote lui est parfois attribuée, mais l’authenticité est discutée.

Il joue un rôle central dans la transition entre l’école d’Athènes et celle d’Alexandrie, en transmettant la méthode de lecture néoplatonicienne des textes aristotéliciens.

Sa pensée est marquée par un équilibre entre la théologie néoplatonicienne de son maître Proclus et le rationalisme méthodique d’Aristote.

Il est un maillon fondamental dans la chaîne des commentateurs antiques, assurant la continuité de la tradition philosophique grecque dans le monde byzantin et islamique.

Il meurt à une date incertaine, après 517, probablement à Alexandrie.

47
Q

Isidore d’Alexandrie

A

Isidore de Gaza, aussi appelé Isidore d’Alexandrie, est un philosophe néoplatonicien né vers 450 à Alexandrie et mort vers 520, probablement à Athènes.

Il est le frère d’Ulpianus de Gaza et étudie la philosophie à Athènes, où il est élève de Proclus, puis de Marinos de Néapolis, dont il apprend les doctrines aristotéliciennes.

Vers 490, il succède à Marinos comme scholarque (directeur) de l’école néoplatonicienne d’Athènes.

Son disciple le plus célèbre est Damascios, qui lui consacre une biographie, la Vie d’Isidore ou Histoire de la philosophie, principal témoignage sur sa vie et sa pensée.

D’après Agathias, Isidore est considéré comme l’un des plus grands philosophes de son temps, appartenant à la “fleur la plus noble” des sages byzantins du VIe siècle.

Il défend une conception non chrétienne du divin, ce qui le place en opposition avec les autorités impériales chrétiennes de l’époque.

Lors de la fermeture de l’école d’Athènes en 529 par l’empereur Justinien Ier, Isidore fait partie des sept philosophes qui s’exilent en Perse, auprès du roi Khosro Ier, réputé pour son intérêt pour la philosophie.

Il est souvent désigné sous le nom d’Isidore de Gaza, bien qu’il soit né à Alexandrie, en raison de son rattachement tardif à cette région ou de confusions postérieures.

Il incarne la dernière génération de l’académie platonicienne d’Athènes, avant la transmission de ses traditions vers l’Orient (Perse, monde islamique) et l’Occident médiéval.

48
Q

Simplicius

A

“Simplicius de Cilicie (né vers 480, mort vers 560) est un philosophe néoplatonicien grec, originaire de Cilicie (actuelle Turquie), formé à Alexandrie puis à Athènes.

Il est disciple d’Ammonios (fils d’Hermias) à Alexandrie, puis de Damascios à Athènes, avec qui il partage l’enseignement de la philosophie néoplatonicienne dans l’Académie platonicienne.

Il est le dernier grand commentateur d’Aristote dans la tradition néoplatonicienne, et s’oppose à Jean Philopon, autre grand commentateur d’Aristote, mais chrétien.

Lors de la fermeture de l’école néoplatonicienne d’Athènes en 529 par l’édit de l’empereur Justinien Ier, Simplicius fait partie des philosophes qui s’exilent à la cour du roi sassanide Khosro Ier en Perse.

Il revient probablement en Grèce après la clause de tolérance du traité de paix entre Justinien et Khosro en 533, qui garantit la liberté religieuse aux philosophes.

Il meurt probablement à Athènes vers 560.

Il adopte une position néoplatonicienne fidèle à Proclos et Damascios, mais cherche à intégrer Aristote dans un cadre platonicien.

Il interprète la ““métaphysique”” d’Aristote comme une théologie, une étude des réalités séparées de la matière et de l’intellect pur, dépassant le monde physique.

Il est réputé pour sa rigueur d’exégèse et sa fidélité aux textes anciens, en particulier à Aristote, tout en les relisant dans une perspective néoplatonicienne.

Ses principales œuvres sont des commentaires sur :

le Manuel d’Épictète

le Du ciel d’Aristote (De Caelo)

la Physique d’Aristote

le De l’âme (De Anima)

les Catégories d’Aristote

Il joue un rôle fondamental dans la transmission du corpus aristotélicien, et ses commentaires sont une source majeure pour l’histoire de la philosophie antique.

Il est considéré comme un lien essentiel entre le néoplatonisme tardo-antique et les philosophies arabes et byzantines médiévales.

Galilée rend hommage à Simplicius dans son Dialogo sopra i due massimi sistemi del mondo en nommant Simplicio le personnage aristotélicien du dialogue.”

49
Q

Plutarque d’Athènes

A

Plutarque d’Athènes (350–432) est un philosophe grec néoplatonicien, fondateur de l’école néoplatonicienne d’Athènes vers 400, qui marque la renaissance de l’Académie platonicienne après sa disparition en 86 av. J.-C.

Il est descendant de Plutarque de Chéronée, philosophe et historien du Ier siècle, et appartient à une famille sacerdotale athénienne liée à Asclépios et aux mystères d’Éleusis.

Son maître est probablement Nestorius, hiérophante d’Éleusis de 355 à 380, mais il est surtout formé dans l’environnement des philosophes syriens néoplatoniciens présents à Athènes à la fin du IVe siècle.

Il est le premier “scholarque” (recteur) de la nouvelle Académie, d’où se succéderont : Syrianos (432), puis Proclus (437), qui se disent respectivement son “fils” et “petit-fils” spirituels.

Il est également le maître de Hiéroclès d’Alexandrie, considéré comme fondateur ou premier scholarque de l’école néoplatonicienne d’Alexandrie.

Plutarque joue un rôle de médiateur entre les traditions de Porphyre et Jamblique, et celles de Théodore d’Asinè. Il propose une lecture systématique du Parménide de Platon selon neuf hypothèses.

Il prône que l’étude d’Aristote doit précéder celle de Platon, afin de former d’abord l’intellect logique avant de s’ouvrir à l’intelligible.

Il écrit des commentaires sur Aristote (notamment le De Anima) et sur le Phédon de Platon, dont il reste des fragments. Ces œuvres influencent Syrianos et Proclus.

Il défend une vision tripartite de la raison : (1) puissance chez l’enfant, (2) actualisation chez l’adulte à partir de l’imagination et de la sensation, (3) intelligence transcendante chez Dieu.

Plutarque est théurge et attaché aux pratiques religieuses néoplatoniciennes. Pour lui, les rites permettent une union effective avec les dieux.

Sa fille Asclépigénie, formée à la théurgie, initiera Proclus aux mystères et à la philosophie néoplatonicienne ésotérique.

Son enseignement combine philosophie, religion et métaphysique, posant les bases de l’orientation religieuse de l’école néoplatonicienne d’Athènes jusqu’à sa fermeture en 529.

49
Q

Hiéroclès d’Alexandrie

A

Hiéroclès d’Alexandrie est un philosophe néoplatonicien ou néopythagoricien du Ve siècle, parfois surnommé Hiéroclès le Pythagoricien ou Hierocles Platonicus.

Il est disciple de Plutarque d’Athènes à l’école néoplatonicienne d’Athènes, fondée vers 400, et il fait le lien entre les traditions athéniennes et la future école d’Alexandrie.

Il est persécuté à Constantinople pour son attachement au paganisme, probablement à cause de l’intensification des mesures contre les païens à l’époque.

Il se réfugie à Alexandrie, où il devient probablement le premier scolarque de l’école néoplatonicienne d’Alexandrie vers 430.

Il est le maître d’Énée de Gaza, philosophe néoplatonicien devenu chrétien, qui fut aussi condisciple de Proclus.

Son œuvre principale est un commentaire sur les Vers d’or des pythagoriciens, un texte de sagesse éthique anciennement attribué à Pythagore. Ce commentaire est intégralement conservé.

Ce commentaire n’est pas un exposé doctrinal du pythagorisme, mais un manuel de purification morale et de préparation à la connaissance, profondément religieux.

Il y développe une éthique de l’ascèse et de la purification, avec des références aux pratiques pythagoriciennes : règles de vie, discipline intérieure, divinisation progressive.

Il exprime une vision modérée du néoplatonisme, marquée par l’élévation morale et une ferveur religieuse accessible, avec une langue simple et claire.

Il insiste sur la déification de l’âme par la vertu, le retour à Dieu, et la possibilité de salut individuel par la connaissance et la pratique philosophique.

Il est considéré comme l’un des esprits les plus équilibrés du néoplatonisme, et son œuvre reste une source précieuse sur la sagesse néopythagoricienne et la transmission d’un néoplatonisme alexandrin plus éthique que métaphysique.

50
Q

Hermias d’Alexandrie

A

Hermias d’Alexandrie est un philosophe néoplatonicien né et mort à Alexandrie, actif au Ve siècle après Jésus-Christ.

Il est disciple de Syrianos et condisciple de Proclos, ce qui le situe vers 435 dans le contexte de l’école néoplatonicienne d’Athènes.

Hermias est surtout connu pour son Commentaire sur le Phèdre de Platon, qui repose en grande partie sur des notes prises par Syrianos.

Ce commentaire s’inscrit dans la tradition néoplatonicienne d’exégèse des dialogues de Platon, visant à en dégager les dimensions métaphysiques et spirituelles.

Son œuvre connue, Hermiae in Platonis Phaedrum scholia, a été éditée en 1901 par P. Couvreur, puis rééditée avec index et postface par C. Zintzen en 1971, et traduite en allemand par Hildegund Bernard en 1997.

Il est parfois confondu avec d’autres personnages nommés Hermias, ce qui complique les attributions biographiques et textuelles.

Il est marié à Aedesia, et père de deux fils : Ammonios et Héliodoros d’Alexandrie, eux aussi philosophes néoplatoniciens.

Sa famille illustre la transmission familiale du néoplatonisme à Alexandrie, en lien avec la tradition philosophique antique tardive.

Hermias participe ainsi à la continuité de la pensée platonicienne dans une période de transition culturelle entre paganisme tardif et christianisme.

51
Q

Asclépios de Tralles

A

Asclépios de Tralles est un philosophe et mathématicien du VIe siècle après Jésus-Christ, originaire de la ville de Tralles.

Il est disciple d’Ammonios fils d’Hermias et condisciple de Simplicios, tous deux figures majeures de l’école néoplatonicienne d’Alexandrie.

Il appartient à cette même école néoplatonicienne d’Alexandrie, dans laquelle il se distingue par une démarche philosophique éclectique.

Sa pensée vise à concilier la doctrine de Platon avec celle d’Aristote, selon une tradition de synthèse propre au néoplatonisme tardif.

Il meurt vers 560-570, dans un contexte où le néoplatonisme continue de transmettre la philosophie antique dans un monde de plus en plus dominé par le christianisme.

Il est l’auteur de Commentaires sur la Métaphysique d’Aristote, dont une large part provient des leçons de son maître Ammonios.

Son commentaire sur l’Introduction à l’arithmétique de Nicomaque prolonge l’intérêt néoplatonicien pour les mathématiques comme voie d’élévation intellectuelle.

L’édition critique de son Commentaire sur la Métaphysique a été publiée en 1888 par M. Hayduck dans la collection Commentaria in Aristotelem Graeca, sous le titre In Aristotelis Metaphysicorum libros.

Son Commentary to Nicomachus’ Introduction to Arithmetic a été traduit en anglais par L. Taran en 1969.

Asclépios illustre ainsi la continuité pédagogique entre les maîtres néoplatoniciens d’Alexandrie et leurs élèves, et leur effort pour sauvegarder, transmettre et articuler les corpus philosophiques antiques.

52
Q

Jean Philopon

A

Jean Philopon (né vers 490 à Alexandrie, mort après 568) est un philosophe, théologien chrétien, astronome, physicien, mathématicien et grammairien grec. Il est aussi connu sous le nom de Jean le Grammairien.

Il fut disciple d’Ammonios, fils d’Hermias, et a noté et publié plusieurs cours de son maître, notamment sur les Catégories, Physique, De l’âme, De la génération et de la corruption, Météorologiques d’Aristote et l’Arithmétique de Nicomaque.

Bien qu’il ait été grammairien de profession, il n’a jamais occupé de chaire officielle de philosophie, ce qui fut souligné de manière critique par Simplicius.

En 529, il publie Contre Proclus. Sur l’éternité du monde, une réfutation philosophique du néoplatonisme, parallèlement à l’édit impérial de Justinien qui ferme les écoles d’Athènes. Il vise à démontrer que le monde a été créé dans le temps, contre l’idée néoplatonicienne d’un monde éternel.

Il rédige ensuite Contre Aristote sur l’éternité du monde, où il conteste l’éther et l’éternité du mouvement et du temps, adoptant une critique radicale de la physique aristotélicienne.

Il propose des idées originales sur la dynamique : le vide existe, le mouvement dans le vide est possible, les projectiles continuent par une force motrice transmise, ce qui anticipe la notion d’impetus.

Il rédige Le traité de l’astrolabe, premier texte conservé sur l’astrolabe planisphérique, se référant aux travaux de son maître Ammonios.

À partir des années 540, il se consacre à la théologie monophysite, cherchant à synthétiser la pensée chrétienne avec la philosophie grecque, notamment avec Aristote.

Son traité De la création du monde oppose une vision chrétienne allégorique et sphérique de l’univers à celle du monde étagé de Cosmas Indicopleustès. Il y intègre Platon, Aristote, et Ptolémée pour défendre la compatibilité entre foi et science.

Dans ses traités Tmêmata et L’Arbitre, il attaque le concile de Chalcédoine et le nestorianisme, utilisant des concepts aristotéliciens pour défendre la position monophysite.

Il adhère plus tard au trithéisme, rédige un traité devenu central pour ce courant, puis Sur la résurrection, où il affirme que les morts ressusciteront dans des corps subtils, provoquant des divisions internes.

Il est condamné par les orthodoxes et même par d’autres monophysites. Son œuvre théologique sera souvent combattue mais elle aura une influence durable.

Il est l’un des premiers à proposer une véritable synthèse entre la pensée chrétienne et la philosophie aristotélicienne, héritée du néoplatonisme et du stoïcisme.

Ses œuvres ont été abondamment lues et traduites dans le monde arabe, notamment ses commentaires d’Aristote, et il influencera profondément la pensée médiévale islamique et chrétienne.

Il est parfois confondu avec d’autres figures nommées Jean le Grammairien, dont un médecin et un auteur chrétien d’Alexandrie.

Il est souvent cité comme un précurseur dans l’élaboration d’une cosmologie chrétienne rationnelle et comme un maillon essentiel entre l’Antiquité tardive et le monde médiéval.

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Q

Olympiodore le Jeune

A

Olympiodore le Jeune (né vers 495, mort après 565 à Alexandrie) est un philosophe néoplatonicien, astrologue et écrivain grec de l’Antiquité tardive, souvent considéré comme le dernier grand représentant de l’école néoplatonicienne d’Alexandrie.

Il fut probablement disciple de Damascios à Athènes, avant la fermeture de l’école néoplatonicienne en 529, puis élève à Alexandrie d’Ammonios, fils d’Hermias. Il obtint une chaire de philosophie à Alexandrie en 541.

Il admire Proclos et se situe dans une tradition néoplatonicienne, tout en développant un style pédagogique innovant : ses commentaires sont structurés en praxeis (leçons), divisées en theôria (analyse générale) et lexis (commentaire mot à mot).

Il oppose au sein du néoplatonisme les philosophes contemplatifs (Plotin, Porphyre) aux théurgistes (Jamblique, Syrianos, Proclos), revendiquant une posture plutôt théurgique.

Son œuvre, conservée surtout à travers les notes de ses élèves, comprend des commentaires sur Platon (Phédon, Gorgias, Philèbe, Premier Alcibiade), sur Aristote (Catégories, Météorologiques), ainsi qu’un commentaire sur le manuel d’astrologie de Paul d’Alexandrie (378), ce dernier étant daté de 564.

Il rédige aussi une biographie de Platon, intégrée dans ses commentaires sur le Premier Alcibiade.

Il est l’un des rares auteurs à défendre philosophiquement le suicide, ce qui marque son éloignement du christianisme, au point que sa position est parfois qualifiée d’anti-chrétienne.

Il est parfois identifié (à tort ou à raison) à Olympiodore l’Alchimiste, auteur d’un commentaire sur un traité de Zosime de Panopolis. Cette attribution est discutée : si des ressemblances existent avec ses autres textes, certains chercheurs y voient une pseudépigraphie.

Dans ses commentaires sur les Météorologiques, il s’intéresse à l’interprétation du livre IV et aux doctrines physiques héritées d’Aristote, intégrant à la fois une exégèse philosophique et une attention aux données naturelles.

Il eut pour disciples David l’Arménien et Hélias, ce qui atteste d’une postérité au sein de l’école alexandrine, même après sa disparition officielle.

Olympiodore le Jeune représente une synthèse tardive entre tradition néoplatonicienne, pédagogie scolaire et sciences anciennes (comme l’astrologie), au seuil de la transition entre l’Antiquité païenne et le Moyen Âge chrétien.

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Q

Davit Anhaght

A

Davit Anhaght, aussi connu sous le nom de David l’Invincible ou David de Nerken, est un philosophe arménien des Ve-VIe siècles, profondément influencé par Platon, Aristote, Pythagore et son maître Olympiodore le Jeune.

Il est né dans les années 470 à Nergin (dans le Taron, région de Grande-Arménie), et serait mort dans les années 550 ou 560 au monastère de Haghpat, où il s’était retiré après avoir rencontré l’opposition du clergé local à son enseignement.

Formé à l’école néoplatonicienne d’Alexandrie, il y devient lui-même enseignant et chercheur, avant de séjourner à Athènes et Constantinople où son éloquence lui vaut le surnom d’« Invincible ».

Il a transmis en Arménie la philosophie grecque, particulièrement le néoplatonisme, à travers des commentaires et traductions d’œuvres de Platon, d’Aristote, et de Porphyre.

Son œuvre a été traduite en arménien dès le VIIe siècle et a exercé une influence majeure sur l’histoire intellectuelle de l’Arménie, jusqu’au XVIIIe siècle. Il fut canonisé par l’Église arménienne et élevé au rang de héros national.

Ses quatre œuvres majeures sont :

Prolégomènes à la Philosophie, où il examine six définitions de la philosophie et conclut qu’elle est « la science qui permet à l’homme de comprendre les lois de la nature » ;

Commentaire sur l’Isagogè de Porphyre ;

Commentaire sur les Analytiques d’Aristote ;

Commentaire sur les Catégories d’Aristote.

Il traite aussi de musique dans ses écrits, en abordant ses fondements théoriques et philosophiques.

Bien que des traditions anciennes le disent disciple de Mesrop Machtots et Moïse de Khorène, les chercheurs modernes estiment qu’il est né trop tard pour cela ; son œuvre fut toutefois confondue avec celle d’autres érudits arméniens portant le nom de David.

Ses textes traduits en arménien ont constitué un socle fondamental de l’enseignement dans les écoles médiévales arméniennes.

L’édition critique de ses œuvres, notamment en grec et arménien, a été entreprise dès le début du XXe siècle, avec des traductions et commentaires récents publiés dans les collections Commentaria in Aristotelem Armeniaca et Philosophia Antiqua.

55
Q

Boèce

A

Boèce, né vers 480 à Rome et mort exécuté en 524 à Pavie, est un philosophe latin de la fin de l’Antiquité, formé dans la tradition néoplatonicienne et aristotélicienne. Issu de la prestigieuse famille des Anicii, il reçoit une éducation classique, maîtrisant notamment le grec.

Haut fonctionnaire du royaume ostrogoth, il devient consul en 510 et maître des offices en 522. Il est accusé de trahison par le roi Théodoric, emprisonné à Pavie, puis exécuté après confiscation de ses biens. En captivité, il rédige La Consolation de Philosophie.

Il est considéré comme un saint et un martyr chrétien, bien qu’il n’ait jamais été formellement canonisé. Sa dépouille repose dans la basilique San Pietro in Ciel d’Oro à Pavie, transférée là par Othon III en 996.

Boèce se donne pour ambition de transmettre la culture grecque à l’Occident latin. Il traduit l’Organon d’Aristote, l’Isagogè de Porphyre, et compose des commentaires fondés sur la tradition alexandrine. Ces traductions sont fondamentales pour la transmission du savoir antique au Moyen Âge.

Il rédige plusieurs traités de logique, parmi lesquels De la division, Des syllogismes catégoriques, ou encore Sur les différences topiques, ainsi qu’un commentaire sur les Topiques de Cicéron, distinguant les logiques cicéronienne et aristotélicienne.

Il applique la logique à la théologie dans cinq traités traitant de la Trinité, de la nature du Christ, et contre Nestorius et Eutychès, utilisant le vocabulaire aristotélicien pour exposer l’orthodoxie chrétienne en termes de substance, nature et relation.

Il initie aussi une vaste entreprise encyclopédique sur le quadrivium (arithmétique, musique, géométrie, astronomie), dont seuls deux ouvrages nous sont parvenus : Institution arithmétique (inspirée de Nicomaque de Gérase) et Institution musicale, où il introduit une classification tripartite : musica mundana, musica humana, musica instrumentalis.

Il est également à l’origine du système des Apices, qui prépare l’introduction de la numération de position en Occident.

La Consolation de Philosophie, œuvre philosophique écrite en prison, est une méditation sur le bonheur, la providence et le destin. Écrite en prose et vers (prosimètre), elle est influencée par Platon et Cicéron, et totalement dénuée de référence chrétienne explicite, bien qu’il soit chrétien.

Cette œuvre devient le texte le plus lu au Moyen Âge après la Bible. Elle est traduite en plusieurs langues vernaculaires (vieil anglais, ancien français, moyen anglais) et lue par des penseurs majeurs (Jean de Meung, Chaucer, Dante).

Boèce influence toute la philosophie médiévale. Il est perçu comme le dernier Romain et le premier des scolastiques. Sa logique devient la base de l’enseignement dans les cloîtres et les universités.

Il forge le terme quadrivium, complémentaire du trivium (grammaire, rhétorique, dialectique), structurant ainsi l’enseignement des arts libéraux.

Il inspire Alcuin, Jean Scot Érigène, Thomas d’Aquin, Guillaume d’Ockham, Pierre Abélard, et l’école de Chartres. Il est central dans les débats médiévaux sur les universaux, à partir de son commentaire sur l’Isagogè de Porphyre.

Alain de Libera souligne son importance dans la formation de la théologie catholique médiévale, notamment par son opposition aux hérésies christologiques. Ses traités sont mentionnés dans les actes des conciles et dans les écrits patristiques ultérieurs.

Boèce fonde un langage philosophique latin précis et technique, et grâce à lui, les scolastiques disposent d’une doctrine aristotélicienne complète en latin dès le haut Moyen Âge.

56
Q

Benoit de Nursie

A

Né vers 480 à Nursie (Ombrie, Italie), dans une famille aristocratique chrétienne ; son père est consul. Il a une sœur, Scholastique, également vénérée comme sainte.

Il étudie à Rome où il est choqué par la déchéance morale de ses pairs. Il abandonne ses études pour mener une vie religieuse et solitaire.

Après un miracle accompli à Enfide (Affile), il s’installe dans une grotte à Subiaco pour vivre en ermite pendant trois ans, aidé par le moine Romain.

Il devient abbé d’une communauté à Vicovaro, mais les moines tentent de l’empoisonner. Il retourne à la solitude, puis fonde douze monastères autour de Subiaco.

Fait l’objet d’hostilité de la part d’un prêtre nommé Florentius, qui tente de le discréditer (tentatives d’empoisonnement, danses impudiques) ; Benoît quitte alors Subiaco.

Il s’installe au mont Cassin vers 529, où il détruit un ancien temple païen et fonde une nouvelle communauté monastique, qui devient le centre du monachisme bénédictin.

Rédige sa Règle monastique vers 540, influencée par Pacôme et Basile, mais originale par sa modération, son équilibre entre prière, lecture et travail. Elle insiste sur l’humilité, l’obéissance, la stabilité et la vie communautaire sous l’autorité d’un abbé.

Prône une vie monastique centrée sur Dieu, régulée par des offices quotidiens, du travail manuel, de la lecture spirituelle, dans une atmosphère de silence et de charité fraternelle.

Il réforme la prière des psaumes : au lieu de les réciter tous les jours comme dans l’Orient, il les répartit sur la semaine, préparant ainsi la liturgie des Heures.

La Règle se répand dans tout l’Occident, notamment grâce à Benoît d’Aniane au IXe siècle, et devient la base du monachisme occidental (Cluny, Cîteaux, Saint-Maur).

Son hagiographie est transmise par le Livre II des Dialogues de Grégoire le Grand, rédigé vers 593, qui mêle faits historiques, récits de miracles et portée édifiante.

Grégoire insiste sur les dons prophétiques et miraculeux de Benoît : il voit à distance des fautes, ressuscite un enfant, lit dans les cœurs, repousse les démons, etc.

L’un de ses miracles les plus célèbres est celui de Maur qui court sur l’eau pour sauver Placide, renvoyant à Pierre marchant sur le lac de Galilée.

Benoît aurait prédit sa mort. Six jours avant, il fait ouvrir sa tombe, meurt debout dans l’oratoire, soutenu par ses frères, après avoir communié.

Il est enterré au Mont-Cassin, à l’endroit où se trouvait l’ancien temple païen.

Canonisé par Honorius III, il devient l’un des saints les plus importants du Moyen Âge.

Paul VI le proclame patron de l’Europe en 1964, en raison de son rôle dans l’unification culturelle et religieuse de l’Occident chrétien.

Il est traditionnellement invoqué contre les tentations, les poisons, les maladies inflammatoires et la pierre. Il est le protecteur des moines, agriculteurs, architectes, spéléologues et scouts d’Europe.

Il est souvent représenté en habit bénédictin, avec une crosse d’abbé, un livre (la Règle) et un corbeau tenant un pain (référence à l’épisode du pain empoisonné).

La médaille de saint Benoît, apparue au Moyen Âge, est porteuse d’inscriptions latines contre Satan. Elle est toujours utilisée comme objet de piété protectrice.

Son influence intellectuelle, spirituelle et culturelle a été déterminante dans la structuration de la vie religieuse, de l’éducation, et de l’organisation monastique médiévale.

57
Q

Servius

A

Maurus Servius Honoratus, dit Servius, est un grammairien et philologue latin actif à la fin du IVe siècle après Jésus-Christ, considéré par ses contemporains comme l’un des plus érudits d’Italie.

Païen, il est mentionné comme interlocuteur dans les Saturnales de Macrobe, et une lettre de Symmaque adressée à lui confirme ses convictions religieuses non chrétiennes.

Son œuvre majeure est un commentaire sur les trois œuvres de Virgile (Bucoliques, Géorgiques, Énéide), intitulé In tria Virgilii Opera Expositio. Ce commentaire est la seule édition complète d’un auteur classique écrite avant la chute de l’Empire romain d’Occident.

Le texte de son commentaire survit sous deux formes principales : une version courte, sobre, clairement attribuée à Servius ; et une version augmentée, dite Servius Danielis ou Servius Auctus, enrichie d’ajouts anonymes, probablement chrétiens, d’une époque proche mais postérieure.

Ces ajouts, bien que souvent stylistiquement différents, conservent des matériaux précieux provenant d’œuvres perdues (notamment de Varron, Caton l’Ancien, etc.) sur l’histoire, la religion, les institutions et la langue romaines.

Servius se distingue par son refus de l’interprétation allégorique alors dominante, privilégiant une approche philologique et historique directe, ce qui rend son œuvre précieuse pour les historiens de la culture antique.

Son commentaire conserve des informations cruciales sur les anciennes recensions de Virgile, les traditions grammaticales latines, et les écoles tardo-antiques.

Malgré la valeur de ses commentaires, ses explications grammaticales reposent souvent sur des jeux étymologiques douteux et des raisonnements linguistiques caractéristiques de son temps, sans rigueur phonétique moderne.

Outre son commentaire virgilien, il est aussi l’auteur de traités grammaticaux : un commentaire sur l’Ars grammatica de Donat, un De finalibus (sur la métrique des fins de vers), un De centum metris (sur différents mètres poétiques), et un De metris Horatii.

Son œuvre servit de fondement à l’enseignement grammatical et littéraire dans les écoles médiévales et carolingiennes, et resta une référence majeure jusqu’à la Renaissance.

L’édition complète moderne de ses œuvres est celle de Georg Thilo et Hermann Hagen (Leipzig, 1878–1902), encore incontournable.

Les études contemporaines, comme celles de Daniel Vallat, s’attachent à retracer la transmission complexe du texte, les manipulations éditoriales et les enjeux historiques et philologiques qui ont modifié l’image de Servius au fil des siècles.

58
Q

Priscien de Césarée

A

Priscien de Césarée, grammairien latin du VIe siècle, est né à Cherchell (Césarée de Maurétanie, actuelle Algérie) vers 470. Il s’exile ou se réfugie à Constantinople, où il dirige à partir de 525 une école latine publique réputée.

Il est l’auteur des Institutiones grammaticae, une vaste grammaire latine en 18 livres, qui devient la base de l’enseignement grammatical dès la Renaissance carolingienne sous Alcuin, et reste influente durant tout le Moyen Âge.

L’œuvre suit un plan novateur : le livre I et le début du II portent sur le son, la lettre et la syllabe ; les livres II à XVI traitent des parties du discours ; les livres XVII et XVIII sont consacrés à la syntaxe — une innovation majeure à son époque.

Cette grammaire devient un pilier du trivium (grammaire, rhétorique, dialectique) dans l’enseignement des arts libéraux, avec une diffusion massive : plus de 60 manuscrits connus entre 790 et 900, et des centaines d’autres ultérieurs.

Priscien développe une méthode rigoureuse, systématique et pédagogique, ancrée dans la tradition gréco-latine, tout en introduisant de nouvelles catégories grammaticales.

En plus des Institutiones, Priscien est l’auteur de plusieurs opuscules sur les accents, les mètres, les déclinaisons, ainsi que d’un poème didactique en vers sur les poids et mesures (De ponderibus et mensuris), d’une traduction latine en vers de la Périégèse de Denys le Périégète, et d’un Éloge de l’empereur Anastase.

L’attribution du De ponderibus et mensuris à Priscien est débattue, certains chercheurs préférant y voir l’œuvre d’un auteur distinct.

Son œuvre est abondamment glosée et commentée dans les manuscrits médiévaux, en particulier pendant la période carolingienne, où elle est utilisée comme support pour la formation des clercs et lettrés.

Il exerce une influence majeure dans la transmission du savoir linguistique antique vers le monde médiéval, et sa terminologie devient normative dans l’analyse grammaticale.

Sa notoriété reste vivace : il est cité par Dante dans La Divine Comédie et représente, aux côtés de Donat et Servius, une figure fondatrice de la grammaire latine classique et médiévale.

59
Q

Alcuin

A

Alcuin naît vers 735 dans le Yorkshire, en Northumbrie, dans une famille noble. Il est formé à l’école cathédrale d’York, célèbre à l’époque, sous la direction d’Ecgberht puis Æthelberht, disciple de Bède le Vénérable. Il en devient le maître en 778.

En 781, lors d’un voyage à Rome, il rencontre Charlemagne à Parme et accepte de rejoindre l’école palatine d’Aix-la-Chapelle, qu’il dirigera, devenant l’un des principaux conseillers du roi et un acteur majeur de la Renaissance carolingienne.

Il introduit les méthodes d’enseignement anglo-saxonnes dans les écoles franques, systématise le trivium et le quadrivium, et restructure l’enseignement des arts libéraux. Il forme les futurs cadres ecclésiastiques et politiques de l’Empire.

En tant qu’ami proche de Charlemagne, il participe aux débats intellectuels de la cour, qui prend la forme d’une académie lettrée où chacun adopte un pseudonyme antique (Alcuin devient « Flaccus »).

Il joue un rôle central dans la lutte contre l’adoptianisme (hérésie espagnole), qu’il réfute au concile de Francfort (794) et d’Aix (799), affirmant la pleine divinité du Christ en sa nature humaine comme divine.

En 796, il devient abbé de Saint-Martin de Tours, où il réforme la vie monastique et fait de l’abbaye un centre intellectuel et scripturaire majeur de l’Empire. Il y fonde un puissant scriptorium et une école réputée, où étudie notamment Raban Maur.

Il encourage la copie minutieuse de textes anciens, améliore la calligraphie (développement de la minuscule caroline), réforme la ponctuation et participe à la révision liturgique de la Bible Vulgate et du sacramentaire grégorien.

Il rédige de nombreux manuels, lettres, traités de grammaire, poèmes, commentaires bibliques et textes éducatifs. Son œuvre témoigne d’un souci constant d’éducation, de transmission du savoir et de rigueur doctrinale.

Il meurt le 19 mai 804 à Tours. Il laisse une épitaphe en latin qu’il rédige lui-même, méditation poétique sur la vanité du monde et la sagesse chrétienne, dans un style évocateur des consolationes antiques.

Alcuin est considéré comme le cœur intellectuel de la Renaissance carolingienne, alliant piété, pédagogie et culture antique. Il contribue à la structuration de l’éducation médiévale et à la transmission du savoir classique en Occident.

60
Q

Donatus Magnus, Donat

A

Donatus Magnus (vers 273–355), évêque de Casae Nigrae en Numidie, est à l’origine du schisme donatiste, qui secoua l’Église d’Afrique du Nord au IVe siècle.

Il refuse d’admettre à la communion les traditores (chrétiens ayant livré les Écritures ou les objets sacrés lors des persécutions de Dioclétien), accusant leurs partisans de trahison spirituelle.

En 307, il conteste la légitimité de Caecilianus comme évêque de Carthage, l’accusant d’avoir été ordonné par un évêque compromis avec les traditores, ce qui rendait l’ordination invalide selon lui.

Il est excommunié en 313 par le pape Miltiade, le concile de Rome, puis confirmé par le concile d’Arles en 314. Malgré cela, il conserve une large base populaire en Afrique, notamment dans les zones rurales et parmi les populations peu romanisées.

Le donatisme revendique une Église pure, réservée aux justes, où l’efficacité des sacrements dépend de la sainteté du clergé. Cette position s’oppose radicalement à l’Église catholique, qui affirme que les sacrements sont valides indépendamment de la moralité du prêtre.

Le schisme prend une tournure violente avec les circoncellions, groupes radicaux donatistes, qui mènent des actions armées contre les catholiques.

Les empereurs romains (Constantin et ses successeurs) interviennent pour réprimer le mouvement, ce qui conduit à une forme de guerre civile religieuse en Afrique.

Les enjeux du conflit sont aussi ethniques (populations berbères contre romanisés), sociaux (paysans contre élites urbaines), et théologiques (pureté de l’Église, rôle du martyre, mémoire locale des persécutions).

L’opposition au donatisme marque fortement l’œuvre de saint Augustin, qui s’efforce de convaincre les donatistes par la controverse théologique, l’appel à l’unité, et la justification de l’usage mesuré de la contrainte.

Malgré la répression, le donatisme survit jusqu’à l’invasion vandale au Ve siècle, mais les Vandales, eux-mêmes ariens, persécutent à la fois catholiques et donatistes. Le mouvement finit par s’éteindre progressivement.

61
Q

Sozomène

A

Sozomène (Salaminios Hermias Sozomenos), né vers 400 à Beit Lahia en Palestine, est un avocat et historien chrétien de langue grecque, formé à la rhétorique et au droit, probablement à l’école de Beyrouth, et actif à Constantinople.

Il compose entre 440 et 450 une Histoire ecclésiastique en neuf livres, couvrant la période de 323 à 425, dans la continuité d’Eusèbe de Césarée, et aux côtés d’auteurs comme Socrate le Scolastique, Théodoret de Cyr ou Évagre le Scholastique.

Les livres I et II sont consacrés à Constantin : sa conversion, le concile de Nicée, la découverte de la Croix, son rôle de chef d’État et l’émergence de l’arianisme.

Les livres III et IV couvrent la période de 337 à 360 (règne de Constance II), une époque marquée par une intense activité synodale et doctrinale, où les divisions autour de l’arianisme structurent l’histoire religieuse.

Les livres V et VI retracent les règnes de Julien (361–363), Jovien (363–364), Valentinien Ier (Occident) et Valens (Orient) jusqu’en 378. Julien est présenté négativement comme un apostat, mais avec nuance ; Valens, arien, est montré comme persécuteur, en contraste avec Valentinien, favorable au concile de Nicée.

Les livres VII à IX couvrent la période 379–425, avec Théodose Ier, Arcadius, Honorius et Théodose II. Sozomène y souligne le rôle majeur de Pulchérie, sœur de Théodose II, et le développement d’une chrétienté impériale rayonnante.

Sozomène n’écrit pas une apologie mais une version orthodoxe de l’histoire de l’Église, affirmant que malgré les hérésies et les oppositions, l’Église universelle triomphe et attire à elle les foules.

L’un de ses thèmes majeurs est le monachisme oriental, qu’il considère comme le fait spirituel le plus marquant du IVe siècle. Il décrit de nombreux ermites du désert et insiste sur leur exemplarité.

Il s’intéresse aussi à la christianisation des peuples barbares, à la crise arienne et à l’unité doctrinale en construction autour du concile de Nicée.

L’œuvre est celle d’un laïc orthodoxe, lettré, juriste, qui offre une vision chrétienne du IVe siècle, nourrie par ses lectures, ses voyages et son observation directe des pratiques contemporaines.

Ses sources incluent Eusèbe de Césarée, Rufin, Socrate le Scolastique, mais aussi ses propres enquêtes. Il est probable qu’il ait voyagé jusqu’à Rome pour sa documentation.

Bien que précieuse, sa fiabilité historique est critiquée pour des exagérations et des imprécisions ; ses récits nécessitent des recoupements avec d’autres sources.

Son style reste celui d’un rhéteur classique, mais il est influencé par les enjeux religieux et politiques de son époque ; son œuvre illustre la vision d’un christianisme triomphant et organisé, face aux conflits doctrinaux du IVe siècle.

Les éditions modernes annotées et traduites en français sont parues dans la collection Sources chrétiennes (Éditions du Cerf), entre 1983 et 2008, sous la direction de J. Bidez, A.-J. Festugière et Guy Sabbah.

Sozomène est ainsi un témoin précieux du regard chrétien orthodoxe sur les transformations de l’Empire romain tardif, dans une perspective à la fois historique, théologique et politique.

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Q

Pantène d’Alexandrie

A

Pantène d’Alexandrie, également connu sous le nom latin de Pantaenus, est un théologien chrétien d’origine sicilienne, mort vers 216 à Alexandrie. Il est reconnu comme saint par l’Église catholique et fêté le 7 juillet.

Avant sa conversion au christianisme, il aurait été adepte du stoïcisme, ce qui marque sa formation philosophique hellénistique et son attrait pour la rationalité morale et l’éthique rigoureuse.

Il est considéré comme le fondateur de la Didascalée d’Alexandrie, première école théologique chrétienne d’importance, qui joua un rôle central dans la formation des penseurs chrétiens de l’époque. Cette institution constitue un jalon fondamental dans la structuration intellectuelle du christianisme primitif.

Pantène fut le maître de Clément d’Alexandrie, figure majeure de la pensée chrétienne des IIe–IIIe siècles. Son enseignement a donc influencé directement la synthèse entre philosophie grecque et foi chrétienne.

Eusèbe de Césarée, dans son Histoire ecclésiastique, rapporte que Pantène aurait voyagé jusqu’aux Indes, où il aurait trouvé une communauté chrétienne déjà évangélisée par l’apôtre Barthélemy, laquelle possédait l’Évangile de Matthieu en caractères hébreux.

Il aurait diffusé oralement et par écrit les doctrines chrétiennes, contribuant ainsi à l’enracinement intellectuel et missionnaire du christianisme dans le bassin méditerranéen.

Il aurait disparu après 216, peut-être victime des massacres ordonnés par l’empereur Caracalla à Alexandrie, ce qui rend plausible sa mort dans le contexte des persécutions impériales.

Pantène incarne une figure charnière entre le christianisme naissant et l’héritage philosophique antique, par son engagement à articuler foi, enseignement et rationalité dans un contexte multiculturel et religieux complexe.

63
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Didyme l’Aveugle

A

Didyme l’Aveugle (vers 313–398), théologien chrétien de l’École d’Alexandrie, perdit la vue dans sa petite enfance mais devint un érudit renommé en philosophie, théologie et sciences, enseignant notamment l’astronomie, la logique, la géométrie et les mathématiques.

Protégé par Athanase d’Alexandrie, il devint professeur à l’école catéchétique d’Alexandrie. Il fut profondément influencé par Origène, et eut pour disciples Rufin d’Aquilée, saint Jérôme et Palladius. Antoine le Grand lui rendit visite et le consola de sa cécité.

Il s’opposa fermement à l’arianisme, notamment sous l’empereur Valens, et fut perçu comme un défenseur de la foi trinitaire orthodoxe. Son œuvre fut condamnée postérieurement au concile de Constantinople en 553 en même temps que celle d’Origène.

Sa production théologique fut massive, mais en grande partie perdue ou détruite à cause de sa condamnation. Elle comportait des traités dogmatiques, exégétiques et polémiques, dont un De Trinitate, un traité du Saint-Esprit, et une réfutation des Manichéens.

En 1941, des manuscrits de Didyme furent retrouvés à Tourah, au sud du Caire, dans d’anciennes carrières transformées en dépotoirs. Ces manuscrits, souvent mutilés ou recyclés, contiennent des commentaires bibliques sur la Genèse, Job, les Psaumes, l’Ecclésiaste et Zacharie.

Les manuscrits de Tourah sont des palimpsestes difficilement exploitables, révélant une volonté volontaire d’effacement. Leur mise au jour a permis une redécouverte partielle de l’œuvre de Didyme et d’Origène.

Il est célébré comme saint dans l’Église orthodoxe orientale le 18 octobre. Sa pensée se distingue par une fidélité aux intuitions d’Origène, une conception rationnelle de la foi, et un intérêt soutenu pour la spéculation théologique.

Il figure dans le Clavis Patrum Græcorum sous les numéros 2544 à 2572, et ses œuvres sont partiellement publiées dans la Patrologie Grecque (PG 39) et dans la collection Sources Chrétiennes (Éditions du Cerf).

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Q

Basile de Césarée

A

Né en 329 à Césarée de Cappadoce dans une famille chrétienne aisée et cultivée, Basile est formé à la rhétorique et à la littérature grecque classique ; ses frères Grégoire de Nysse et Pierre de Sébaste deviennent également évêques.

Étudie à Constantinople puis à Athènes où il se lie d’amitié avec Grégoire de Nazianze. Tous deux développent un goût pour la vie contemplative et monastique. Basile reçoit le baptême vers 356.

Parcourt la Syrie, la Palestine et l’Égypte pour observer la vie monastique. De retour en Cappadoce, il fonde une communauté près de l’Iris, en face de celle de sa mère et de sa sœur Macrine. Il y écrit une règle monastique devenue la base du cénobitisme oriental.

Ordonné prêtre en 362 par Eusèbe de Césarée, il l’assiste dans la gestion de l’Église et rédige des traités théologiques, notamment Contre Eunome en 364 pour défendre la consubstantialité du Fils avec le Père.

Élu évêque de Césarée en 370 après une élection disputée. Il devient métropolite de Cappadoce et éparque du diocèse du Pont, exerçant une influence importante sur plus de 50 évêchés.

Résiste aux pressions de l’empereur arien Valens. Refuse de souscrire à l’hérésie anoméenne malgré les menaces du préfet Modeste. Sa fermeté impressionne Valens qui renonce à l’exiler.

Défend la foi de Nicée avec vigueur. Il affronte les divisions ecclésiales et tente de restaurer l’unité, en particulier lors du schisme d’Antioche. Il écrit à Athanase d’Alexandrie, au pape Damase et aux évêques occidentaux pour soutenir Mélèce d’Antioche.

Fondateur d’une œuvre sociale innovante : la Basiliade, véritable complexe hospitalier à Césarée, avec église, hôpital, hospice, école et hôtellerie pour les pèlerins, financé par l’Église. Il donne son héritage aux pauvres pendant la famine de 368.

Développe une théologie de la Trinité et du Saint-Esprit. Dans le traité Sur le Saint-Esprit (375), il affirme la pleine divinité de l’Esprit saint et son égalité d’honneur avec le Père et le Fils, contre les pneumatomaques.

Sa théodicée (homélie Dieu n’est pas l’auteur des maux) affirme que le mal moral vient du libre arbitre des créatures et que les souffrances peuvent être comprises comme pédagogiques dans l’économie divine du salut.

Dans le Contre Eunome, il critique la prétention de connaître Dieu par la seule raison et insiste sur l’inaccessibilité de l’essence divine. Il préfère les termes bibliques comme « Père » à des concepts philosophiques comme « inengendré ».

Rédige des Règles monastiques structurées sous forme de questions-réponses (Grandes et Petites règles) pour encadrer la vie cénobitique. Il défend un monachisme proche des villes, modéré dans ses privations, avec prêtres et vie communautaire.

S’oppose à l’idéal érémitique extrême. Il insiste sur la charité, la vie commune et l’utilité sociale des moines. Ses règles influencent durablement le monachisme oriental et inspirent aussi Benoît de Nursie en Occident.

Réforme la liturgie. La Liturgie de saint Basile est toujours utilisée dans les Églises orthodoxes et de rite byzantin, notamment les dimanches du Grand Carême et certaines fêtes majeures.

Défend la compatibilité entre culture classique et foi chrétienne dans le Discours aux jeunes gens sur la manière de tirer profit des lettres helléniques. Il valorise les auteurs antiques comme préparation à la lecture des Écritures.

Opposé à l’interdiction faite aux chrétiens d’enseigner les lettres classiques, il affirme que la sagesse grecque peut ennoblir l’âme si elle est lue avec discernement. Il cite Homère, Platon, Euripide, Hésiode, etc.

Mort probablement en août 377 (traditionnellement 1er janvier 379), à l’âge de 50 ans. Souvent malade, il a poursuivi ses efforts pour l’unité de l’Église jusqu’à la fin.

La postérité de Basile est immense : il est proclamé Docteur de l’Église en 1568 par Pie V, fêté le 2 janvier en Occident, et le 1er janvier en Orient. Il est aussi célébré lors de la fête des Trois Hiérarques avec Grégoire de Nazianze et Jean Chrysostome.

Son œuvre comprend des homélies (dont l’Hexaéméron), des traités (sur la Trinité, le Saint-Esprit, le baptême), des lettres (plus de 300), des règles monastiques et des textes spirituels et exégétiques. Elle est fondamentale pour la théologie et le monachisme byzantins.

65
Q

Eustathe d’Antioche

A

Eustathe d’Antioche naît vers 270 à Sidé, en Pamphylie, dans l’Empire romain. Il est formé à la théologie par Lucien d’Antioche, un maître réputé de l’époque.

Devient évêque de Bérée (Alep), puis patriarche d’Antioche entre 323 et 331. Il joue un rôle actif dans les controverses doctrinales du IVe siècle.

Participe au premier concile de Nicée en 325, où il s’oppose vigoureusement à la doctrine d’Arius, qu’il juge incompatible avec la foi trinitaire.

Malgré son orthodoxie trinitaire, il est déposé en 331 sous la pression des évêques ariens, qui l’accusent de sabellianisme (confusion entre les personnes de la Trinité) et d’immoralité (une femme aurait affirmé qu’il était le père de son enfant, probablement un montage diffamatoire).

Exilé à Trajanopolis en Thrace, il y meurt en 337 ou 338. Ses reliques sont transférées à Antioche en 482, provoquant une grande ferveur populaire.

Après sa déposition, un schisme durable naît : les eustathiens refusent de reconnaître les nouveaux évêques favorables à l’arianisme. Deux évêques eustathiens se succèdent : Paulin II (362–après 382) et Évagre (jusqu’en 394).

Le schisme se prolonge jusqu’à la fin du Ve siècle. La majorité des eustathiens sont réintégrés dans l’Église officielle en 414, mais un petit groupe subsiste jusqu’en 482.

Eustathe est vénéré comme saint dans les Églises catholique et orthodoxe, sa fête est célébrée le 21 février.

Il est l’auteur de plusieurs œuvres patristiques, dont la seule complète conservée est Sur la pythonisse d’Endor (vers 335), un commentaire sur le passage biblique de 1 Samuel 28,7-25.

Une édition critique de ses œuvres a été publiée en 2002 dans la Corpus Christianorum Series Graeca. Il figure dans la Clavis Patrum Græcorum sous les numéros 3350 à 3398.

Il est considéré comme l’un des défenseurs précoces de la foi nicéenne, injustement frappé par les intrigues ariennes à Antioche, et reste une figure de l’intégrité épiscopale face à la pression politique et doctrinale.

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Q

Diodore de Tarse

A

Diodore de Tarse naît en 330 à Antioche et meurt en 393 ou 394, probablement à Antioche ou à Tarse.

Il est l’un des fondateurs de la « seconde » école d’Antioche, après celle de Lucien d’Antioche, en opposition à l’école d’Alexandrie, privilégiant une lecture plus littérale et historique des Écritures.

Élève de Sylvain de Tarse et d’Eusèbe d’Emèse, il complète ses études à Athènes, avant de revenir à Antioche.

Il soutient activement Mélèce d’Antioche, évêque anti-arien, et fonde une école catéchétique près d’Antioche dans les années 360.

En 372, l’empereur Valens, partisan de l’arianisme, l’exile en Arménie. Il y devient proche de Basile de Césarée.

À la mort de Valens en 378, il est nommé évêque de Tarse, en Cilicie.

Il participe au premier concile de Constantinople en 381, qui marque la victoire du camp nicéen contre l’arianisme.

Il s’oppose fortement à la christologie d’Apollinaire de Laodicée, notamment à l’idée qu’il n’y ait qu’une seule nature (ousia) dans le Christ. Il écrit à ce sujet un traité intitulé Contre les synousiates.

Il défend la doctrine de l’apocatastase, selon laquelle toutes les créatures seraient restaurées en Dieu à la fin des temps.

Cent ans après sa mort, en 499, il est condamné comme précurseur du nestorianisme par un synode à Constantinople. Son œuvre est en grande partie détruite.

Ses écrits ne nous sont parvenus que sous forme de fragments.

Il eut pour disciples Jean Chrysostome et Théodore de Mopsueste, figures majeures de l’école d’Antioche.

L’empereur Théodose Ier le surnomme « le boulevard de l’orthodoxie », en reconnaissance de sa défense de la foi contre l’arianisme et l’apollinarisme.

Il est répertorié dans le Clavis Patrum Græcorum sous les numéros 3815-3822, et mentionné dans la Bibliothèque de Photios (codex 223).

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Q

Origène

A

Né à Alexandrie vers 185 dans une famille chrétienne ; son père Léonide est martyrisé en 202, ce qui le marque profondément et l’amène à envisager le martyre dès son jeune âge.

Devient chef de l’école catéchétique d’Alexandrie (Didascalée) en 215, succédant à Clément d’Alexandrie ; enseigne à des hommes comme à des femmes et mène une vie d’extrême austérité.

Selon Eusèbe de Césarée, se fait castrer jeune à cause d’une interprétation littérale de Matthieu 19:12 ; cette information est contestée par les chercheurs modernes, Origène ayant critiqué plus tard ce genre d’interprétation.

Étudie auprès d’Ammonius Saccas (fondateur du néoplatonisme) ; influencé par le platonisme, le stoïcisme et le christianisme alexandrin.

Se heurte à son évêque Démétrius d’Alexandrie, qui lui reproche sa castration et son ordination irrégulière à Césarée ; est excommunié et s’installe à Césarée de Palestine où il fonde une nouvelle école.

Subit la persécution de Dèce en 250, est emprisonné et torturé ; meurt vers 253, probablement des suites de ses blessures.

Auteur d’une œuvre immense, estimée par Jérôme à plus de 2 000 volumes ; beaucoup ont été perdus, d’autres traduits et transmis par Rufin d’Aquilée et Jérôme de Stridon.

Son œuvre la plus connue est les Hexaples, une édition savante de la Bible en six colonnes (texte hébreu + traductions grecques), fondement de la critique textuelle biblique.

Le Traité des Principes (De principiis) est sa somme théologique majeure : première tentative de systématisation des dogmes chrétiens, mêlant philosophie grecque et théologie.

Défend la lecture non littérale des Écritures : distingue trois niveaux d’interprétation (littéral, moral, spirituel) en lien avec les trois parties de l’homme (corps, âme, esprit).

Rejette une lecture historique et littérale de la Genèse : voit dans les récits bibliques des vérités symboliques et spirituelles destinées à l’âme.

Soutient la préexistence des âmes : Dieu crée des esprits purs (logikoi), qui chutent et deviennent des âmes, incarnées selon la gravité de leur faute (anges, humains, démons).

Conçoit le monde matériel comme un lieu de purification où les âmes, par leur libre arbitre, peuvent revenir à Dieu : vision pédagogique du salut.

Défend la doctrine de l’apocatastase : tous les êtres, y compris les démons, seront réintégrés à Dieu à la fin des temps ; cette position sera condamnée comme hérétique en 553.

Défend le salut universel : les peines infernales ne sont pas éternelles mais éducatives ; Dieu éduque par étapes à travers le Logos (philosophes, Moïse, Jésus…).

S’oppose à une christologie rigide : voit dans le Christ le Logos incarné, engendré éternellement par le Père, mais distinct de Lui ; accusé de subordinatianisme (le Fils inférieur au Père).

N’a jamais été canonisé en raison de ces thèses hétérodoxes, bien qu’il ait influencé de nombreux Pères de l’Église (Grégoire de Nysse, Basile, Jérôme, Didyme l’Aveugle).

Sa méthode exégétique inspire la Lectio Divina et les quatre sens de l’Écriture (littéral, allégorique, tropologique, anagogique), pratiqués dans la tradition monastique.

Apporte une contribution majeure à la mariologie : interprète le glaive du cantique de Siméon comme symbole du doute de Marie pendant la Passion, repris jusqu’au XIIe siècle.

Son influence s’étend jusqu’au Moyen Âge (Bernard de Clairvaux, Thomas d’Aquin) et à la Renaissance (Érasme, qui le considère comme le plus grand théologien après les Écritures).

Condamné localement dès 400, puis de manière impériale en 543 par Justinien, et solennellement par le deuxième concile de Constantinople en 553.

Une grande partie de ses œuvres a été détruite, mais de nombreux fragments ont été redécouverts, notamment des homélies en grec au XXIe siècle.

Selon Jean Daniélou, il est « le plus grand génie du christianisme antique avec saint Augustin », malgré sa condamnation posthume.

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Q

Théodore de Mopsueste

A

Théodore de Mopsueste naît à Antioche vers 352/355 dans une famille chrétienne aisée, et meurt en 428 alors qu’il est évêque de Mopsueste en Cilicie.

Il est d’abord élève du rhéteur païen Libanios, puis entre à l’askètèrion (maison d’étude chrétienne) de Diodore de Tarse, où il étudie aux côtés de Jean Chrysostome.

Vers 20 ans, il quitte brièvement la vie religieuse pour envisager un mariage et des études de droit, mais revient sur cette décision grâce aux lettres de Jean Chrysostome (Ad Theodorum lapsum).

Il commence jeune son œuvre exégétique par un commentaire des Psaumes, et défend Basile de Césarée contre Eunome et les eustathiens.

Il est ordonné prêtre en 383 à Antioche par l’évêque Flavien Ier, puis devient évêque de Mopsueste en 392. Il exerce cette fonction pendant 36 ans.

Il assiste à un concile à Constantinople en 394, prêche devant l’empereur Théodose Ier, et soutient Jean Chrysostome lors de ses épreuves (403-407).

Il accueille les pélagiens Julien d’Éclane et ses compagnons en 421-422, mais participe ensuite à un concile provincial qui condamne le pélagianisme.

Théodore est une figure majeure de l’école théologique d’Antioche, où il développe une christologie fondée sur la distinction claire entre deux natures dans le Christ.

Il est maître de Nestorius, Ibas d’Édesse, et Théodoret de Cyr, et exerce une grande influence sur la théologie antiochienne.

Sa christologie est indirectement condamnée en 431 lors du concile d’Éphèse à travers le nestorianisme, puis explicitement au concile de Constantinople II (553), dans les Trois Chapitres.

En Occident, cette condamnation suscite des résistances, car Théodore était considéré comme orthodoxe de son vivant ; en Orient, l’Église de Perse le considère comme l’Interprète par excellence dès 484.

Son œuvre, d’une immense ampleur (41 tomes recensés dans les catalogues syriaques), est largement perdue à cause des condamnations successives et des malheurs de l’Église de Perse.

Des fragments importants sont conservés : Homélies catéchétiques (redécouvertes en 1932), commentaires sur l’évangile de Jean (en syriaque), sur les Prophètes mineurs (en grec), sur des épîtres de Paul (en latin), ainsi que des extraits sur la Genèse, les Psaumes et un traité sur l’Incarnation.

Il écrit aussi un traité Contre ceux qui disent que l’homme pèche par nature et non par intention, en opposition à saint Augustin et saint Jérôme, niant notamment le péché originel.

Pour Théodore, Adam a été créé mortel ; le baptême n’efface pas un péché originel mais adopte l’homme comme fils de Dieu ; les enfants ne naissent pas pécheurs.

Il défend également l’apocatastase universelle, comme d’autres théologiens de son époque.

La liturgie de l’Église d’Orient lui attribue une messe utilisée du début de l’Avent jusqu’au dimanche des Rameaux.

La redécouverte des Homélies catéchétiques a conduit certains chercheurs (Richard, Devreesse) à estimer que la condamnation de Théodore reposait sur des extraits falsifiés.

La huitième homélie affirme clairement la doctrine orthodoxe d’une seule personne en deux natures, unies sans confusion ni séparation, anticipant la formulation dyophysite du concile de Chalcédoine.

68
Q

Eunome

A

Eunome (ou Eunomius) naît vers 335 à Dacora en Cappadoce et meurt en 394, probablement dans sa ville natale.

Il devient un acteur majeur de la dernière phase de la crise arienne au IVe siècle, en défendant l’anoméisme, une forme radicale d’arianisme affirmant que le Fils est inégal au Père dans l’essence même.

Disciple d’Aèce d’Antioche, il suit son maître à Alexandrie, puis à Antioche où il est ordonné diacre.

Grâce à Eudoxe, patriarche arien de Constantinople, il devient évêque de Cyzique en 360 lors du concile de Constantinople, mais il est déposé dès l’année suivante par l’empereur Constance II à cause de ses positions jugées extrêmes.

Il continue à propager l’anoméisme à Constantinople, notamment sous les règnes de Julien et Jovien, où il forme un clergé parallèle et nomme plusieurs évêques.

Il est brièvement exilé en 367 pour avoir soutenu l’usurpateur Procope, mais rapidement rappelé.

En 383, il présente une profession de foi lors d’un synode organisé par l’empereur Théodose. Elle est rejetée au profit des symboles de Nicée (325) et de Constantinople (381).

Eunome est ensuite exilé à Halmyris en Moésie, puis s’installe à Chalcédoine, puis à Césarée de Cappadoce où il est chassé par la population pour ses écrits contre Basile de Césarée.

Il termine sa vie retiré dans sa ville natale.

Sa doctrine repose sur l’idée que l’essence de Dieu est d’être inengendré, donc incommunicable ; ce que Dieu transmet au Fils, c’est uniquement sa puissance d’action (énergie), pas son essence.

Il affirme que le Saint-Esprit procède uniquement du Fils, et qu’il n’a pas de nature divine.

Il rejette les miracles des martyrs, le culte des reliques et toute théologie de médiation incarnée.

Eunome rédige un Livre apologétique (vers 360), réfuté par Contre Eunome de Basile de Césarée. Il y répond par une Apologie de l’Apologie.

Ses principaux adversaires sont les trois grands Cappadociens : Basile de Césarée, Grégoire de Nysse (auteur d’une Réfutation de la profession de foi d’Eunome) et Grégoire de Nazianze.

Il est considéré comme l’archétype du rationalisme extrême dans la théologie chrétienne antique, défendant la possibilité de connaître pleinement Dieu par des définitions logiques de son essence.

Sa doctrine sera rapidement marginalisée, condamnée par les conciles, et rejetée dans l’hérésie. Ses disciples sont appelés « eunomiens » et forment un courant arien dissident jusqu’à leur extinction progressive.

69
Q

Flavien d’Antioche

A

Flavien d’Antioche naît vers 320 à Antioche et meurt en 404 dans la même ville.

Il devient patriarche d’Antioche en 381, succédant à Mélèce Ier, mais son élection alors que Mélèce est encore vivant provoque un schisme durable dans l’Église de Syrie. Ce schisme ne sera pleinement résolu que sous le pontificat du pape Innocent Ier.

Il est connu pour son intervention auprès de l’empereur Théodose Ier, lorsque la population d’Antioche renverse les statues impériales lors d’une sédition. Flavien plaide pour leur pardon et obtient leur grâce. Ce geste politique et pastoral renforce sa réputation.

Jean Chrysostome, son élève et ami, transmet le discours que Flavien prononça à cette occasion.

Il meurt en 404 après avoir dirigé l’Église d’Antioche pendant 23 ans, dans une période marquée par les luttes doctrinales post-nicéennes et les divisions internes de l’Église.

Il est reconnu comme saint par l’Église orthodoxe, qui le fête le 27 septembre.

Ses écrits sont référencés dans la Clavis Patrum Græcorum sous les numéros 3430 à 3436.

70
Q

Julien d’Éclane

A

Julien d’Éclane naît en Apulie vers 386 dans une famille chrétienne lettrée : son père Memorius est évêque et sa mère s’appelle Juliana.

Il devient lecteur en 404, puis diacre, et est consacré évêque d’Éclane en Campanie par le pape Innocent Ier vers 416/417.

Il se marie à Ia, issue de la prestigieuse famille romaine des Æmilia, ce qui témoigne de son enracinement aristocratique. Paulin de Nole compose un poème de mariage à cette occasion.

Julien refuse de souscrire à la lettre d’excommunication de Zosime contre Pélage et Célestius. Il est donc déposé et exilé en 418 par édit impérial.

Il accuse les adversaires du pélagianisme de manichéisme et adresse plusieurs lettres polémiques, notamment à Rufus de Thessalonique. Saint Augustin y répond dans Contra duas epistulas Pelagianorum.

Il rédige une réfutation en quatre livres du De nuptiis et concupiscentia d’Augustin, intitulée Contra eos qui nuptias damnant…, où il dénonce une confusion entre nature et péché.

Saint Augustin lui répond dans Contra Julianum Pelagianum, puis Julien réplique dans une réponse en huit livres. Augustin commence une contre-réponse (Opus imperfectum), qu’il n’achève pas.

En 421, Julien est chassé d’Italie et trouve refuge chez Théodore de Mopsueste en Cilicie. Ce dernier défend lui aussi l’idée que le péché vient de l’intention, et non de la nature.

Il tente ensuite un retour en Italie sous le pontificat de Célestin Ier (422), mais ce dernier le rejette. De même, il est mal reçu à Constantinople par le patriarche Attique.

Nestorius, devenu patriarche en 428, soutient temporairement Julien et les pélagiens, mais doit se rétracter. En 429, Julien est à nouveau exilé après l’intervention de Marius Mercator auprès de l’empereur.

Il est nommément condamné au concile d’Éphèse en 431.

Il tente une dernière réhabilitation sous le pape Sixte III en 432, mais Léon (le futur pape Léon Ier) contribue à son rejet. Il meurt en Sicile avant 455.

Julien est le plus cultivé des pélagiens. Il rejette la doctrine du péché originel, l’hérédité du péché, la prédestination et l’idée que la sexualité est liée au péché.

Il affirme la liberté totale du libre-arbitre humain : la grâce et le baptême sont utiles mais ne remplacent pas la responsabilité morale.

Il soutient que la volonté divine ne saurait contredire la justice humaine : la théologie doit être rationnelle, cohérente avec la moralité.

Il incarne une forme de christianisme humaniste, croyant au perfectionnement moral de l’humanité et à une société plus juste.

Il est l’auteur de nombreux traités, dont une partie est conservée par citations indirectes (Marius Mercator, Augustin, Bède le Vénérable), et on lui attribue aussi des écrits exégétiques comme un Libellus de amore et un De bono constantiae.

71
Q

Pélage

A

Pélage, né vers 350 en Bretagne romaine (probablement sous le nom de Morgan), est un moine ascète et théologien chrétien actif principalement à Rome, Carthage et Jérusalem.

Il s’installe à Rome entre 380 et 390, où il prêche une vie vertueuse fondée sur la volonté humaine et le libre arbitre, séduisant l’aristocratie romaine par son ascétisme et sa rigueur morale.

Il est rejoint par Célestius dans les années 390, et vers 400 ils rencontrent Rufin le Syrien, disciple de Théodore de Mopsueste, renforçant leur doctrine.

En 410, après le sac de Rome, Pélage part pour l’Afrique, espérant rencontrer Augustin, mais celui-ci est absent. Il se rend ensuite à Jérusalem, puis est expulsé et finit sa vie en Égypte vers 420.

Sa doctrine nie le péché originel, affirmant que l’homme, par nature, peut choisir le bien sans l’aide nécessaire de la grâce divine : le baptême est utile mais pas indispensable pour la rédemption.

Il rejette la prédestination, la corruption naturelle de l’homme et la nécessité d’une grâce irrésistible : la volonté humaine demeure libre et responsable, et chaque être peut atteindre la perfection morale.

Son enseignement est condamné comme hérétique au concile de Carthage de 418, avec l’approbation du pape Zosime.

Le schisme pélagien se forme autour de Célestius et de dix-huit évêques italiens, dont Julien d’Éclane, qui refusent de se soumettre à la condamnation pontificale.

Pélage est critiqué par Augustin, qui voit dans sa doctrine un refus de la dépendance de l’homme envers Dieu et une forme de spiritualisme moral indépendant.

Il est aussi à l’origine indirecte du semi-pélagianisme, tentative de conciliation selon laquelle la foi naît du libre arbitre humain, mais la grâce accompagne ensuite la croissance spirituelle.

Sa pensée met l’accent sur la dignité humaine, la rationalité morale, et la compatibilité entre foi chrétienne et exigence éthique universelle : la loi divine n’est pas arbitraire mais juste.

Parmi ses œuvres (souvent connues par fragments ou citations), on trouve Pro libero arbitrio, De induratione cordis Pharaonis, Lettre à Démétriade, De Natura, et un Commentaire sur les Épîtres de Paul.

Il reste une figure emblématique d’un christianisme humaniste et moral, en opposition frontale avec l’anthropologie pessimiste d’Augustin.

72
Q

Celsestius

A

Célestius, né vers 380 en Campanie, est un aristocrate devenu avocat, puis théologien chrétien, connu comme disciple de Pélage et figure centrale du pélagianisme.

Il rencontre Pélage à Rome, puis Rufin le Syrien vers 399, ce qui renforce son engagement théologique. En 410, il accompagne Pélage à Hippone pour rencontrer Augustin (absent), avant de continuer sa mission en Afrique et en Orient.

En 411, il tente de devenir prêtre. Il est actif à Éphèse vers 415, où il est ordonné et prêche.

Célestius est condamné pour hérésie par deux synodes africains en 416 (Carthage et Milève), puis excommunié dans des lettres du pape Innocent Ier. Toutefois, le pape Zosime le reconnaît brièvement orthodoxe après réception d’un Libellus fidei.

En 418, l’empereur Honorius publie un édit condamnant officiellement les thèses pélagiennes et ordonnant l’exil de Célestius, confirmé par la Tractoria du pape. Il est banni à 100 milles de Rome, puis rejoint Pélage en Orient.

En 423-424, il tente en vain d’obtenir sa réhabilitation auprès du pape Célestin Ier. On le retrouve à Constantinople en 428-429 avec Julien d’Éclane. Il est de nouveau exilé par l’empereur Théodose II, mais reçoit une lettre de consolation de Nestorius.

Il est finalement condamné avec l’ensemble du pélagianisme par le concile œcuménique d’Éphèse en 431.

Théologien radical, Célestius pousse à l’extrême les idées de Pélage : négation du péché originel pour les croyants, rejet du baptême des enfants (car déjà en Christ), insistance sur la possibilité d’une vie sans péché par l’exercice du libre arbitre et de la charité.

Pour Célestius, la grâce ne se conçoit pas comme un don extérieur ou miraculeux, mais comme immanente à la nature humaine libre : faire le bien de manière consciente, par la foi, manifeste la grâce.

Il incarne la branche la plus militante du pélagianisme, critiquant les doctrines augustiniennes de la prédestination, de la corruption de la nature humaine, et de la dépendance à la grâce pour le salut.

Il est souvent accusé de minimiser ou de nier la nécessité même de la grâce divine, ce qui a motivé les condamnations successives des conciles et de l’autorité impériale.

73
Q

Rufin le Syrien

A

Rufin le Syrien est un prêtre chrétien du début du Ve siècle, originaire de Syrie, identifié comme un disciple de Théodore de Mopsueste.

D’après Marius Mercator, il aurait résidé à Rome sous le pontificat du pape Anastase Ier (399–401) et aurait enseigné la doctrine pélagienne à Pélage, contribuant ainsi à la formation du pélagianisme.

On l’identifie souvent avec l’auteur du Libellus de fide, un texte attribué au « prêtre Rufin de la province de Palestine », connu à travers un manuscrit du VIe siècle conservé à Saint-Pétersbourg, provenant du monastère de Vivarium.

Le Libellus de fide a été édité en 1650 par Jacques Sirmond. Ses chapitres centraux (§ 28–41) expriment clairement la doctrine pélagienne (refus du péché originel, insistance sur le libre arbitre, minimisation de la grâce), au point qu’une note marginale ancienne met en garde contre ses « blasphèmes ».

Le colophon indique que le texte a été traduit du grec en latin (translatus de Græco in Latinum sermonem). Selon le jésuite Jean Garnier (1673), le traducteur serait Julien d’Éclane.

Le Libellus a vraisemblablement été connu de saint Augustin, qui le réfute dans son De peccatorum meritis (411–412), ce qui confirme sa circulation et son influence dans les controverses doctrinales.

Rufin le Syrien est parfois confondu avec Rufin d’Aquilée, confusion encore défendue par certains chercheurs comme Eduard Schwarz et Walter Dunphy, bien que contestée par d’autres.

Il joue un rôle central dans l’introduction en Occident d’éléments de la théologie de l’école d’Antioche (par Théodore de Mopsueste), contribuant à la formulation du pélagianisme dans sa version doctrinale initiale.

74
Q

Marius Mercator

A

Marius Mercator est un auteur chrétien latin né vers 390, probablement en Afrique du Nord, et mort après 451. Il est associé à l’augustinisme et actif durant les grandes controverses doctrinales du Ve siècle.

Il séjourne à Rome en 417–418, où il rédige deux traités anti-pélagiens qu’il adresse à Augustin d’Hippone. Ces textes visent notamment Julien d’Éclane et Célestius, figures majeures du pélagianisme.

À partir de 429, il réside à Constantinople. C’est dans ce contexte qu’il écrit le Commonitorium super nomine Cælestii et le Commonitorium adversus hæresim Pelagii et Cælestii vel etiam scripta Juliani, deux traités qui auront une influence directe sur l’expulsion de Julien et Célestius de Constantinople, puis leur condamnation par le concile d’Éphèse en 431.

Il s’attaque également au nestorianisme dans des écrits comme l’Epistola de discrimine inter hæresim Nestorii et dogmata Pauli Samosateni, Ebionis, Photini atque Marcelli, où il compare Nestorius à plusieurs hérésiarques anciens, et les Nestorii blasphemiarum capitula XII, qui recensent douze blasphèmes attribués à Nestorius.

Marius Mercator est aussi un traducteur et compilateur. Il recueille et transmet de nombreux extraits d’auteurs grecs, qu’ils soient orthodoxes (comme Cyrille d’Alexandrie) ou hérétiques (comme Théodore de Mopsueste ou Nestorius), jouant ainsi un rôle important dans la circulation des textes théologiques.

Ses œuvres ont été publiées pour la première fois par Jean Garnier à Paris en 1673, puis reprises dans la Patrologia Latina (tome XLVIII) de Migne en 1846. Elles ont également été rééditées par Étienne Baluze (1684), et corrigées par Andrea Gallandi dans la Bibliotheca veterum Patrum (1772).

Son activité contribue activement à la défense de l’orthodoxie augustinienne et à la condamnation des hérésies de son temps (pélagianisme, nestorianisme), notamment à travers l’usage stratégique des citations, traductions et dénonciations formelles auprès des autorités ecclésiastiques.

75
Q

Jean Chrysostome

A

Né entre 344 et 349 à Antioche dans une famille chrétienne bourgeoise ; son père Secondus meurt tôt, il est élevé par sa mère Anthusa.

Formé à la rhétorique, peut-être auprès de Libanios ; il étudie la culture grecque classique et entre au barreau avant de se tourner vers l’Écriture.

Baptisé vers 369-372 sous l’influence de l’évêque Mélèce ; il devient lecteur, puis moine aux portes d’Antioche, avant de se retirer dans le désert.

Ordonné diacre par Mélèce en 380-381, puis prêtre par Flavien en 386 ; il devient célèbre pour sa prédication à Antioche, en particulier après l’émeute fiscale de 387 (Homélies sur les statues).

Devient archevêque de Constantinople en 397, nommé par l’empereur Arcadius ; il impose un mode de vie austère et réformateur, critiquant la corruption du clergé et des élites.

S’attaque aux pratiques licencieuses des moines, aux hérétiques, aux juifs et aux païens ; prêche la supériorité chrétienne dans la cité et condamne les judaïsants.

Entre en conflit avec l’impératrice Eudoxie pour ses critiques morales et sociales, ce qui mène à sa déposition au Concile du Chêne en 403.

Exilé une première fois, puis rappelé ; une fausse couche de l’impératrice est interprétée comme un signe divin. Mais le conflit reprend, et Jean est exilé de nouveau.

En 404, il est envoyé à Cucusus en Arménie, puis condamné à une relégation plus lointaine à Pithyos. Il meurt en 407 au cours du transfert.

Le pape Innocent Ier condamne sa déposition et soutient Jean comme patriarche légitime de Constantinople.

Ses dernières paroles furent : « Gloire à Dieu pour tout. Amen. »

Ses reliques sont transférées à Constantinople en 438, puis à Rome (après 1204), puis restituées au patriarche orthodoxe en 2004.

Figure majeure de l’Église orthodoxe ; célébré le 13 novembre, 27 janvier (translation des reliques), et 30 janvier (fête des Trois Hiérarques).

Considéré comme le plus grand prédicateur patristique ; environ 900 homélies conservées, style limpide, usage de l’exemplum et de la συγκάταβασις (adaptation divine).

Prône l’union de l’orthodoxie (foi droite) et de l’orthopraxie (vie droite) ; vertu définie comme exactitude doctrinale et droiture morale.

Sa théologie morale articule gloire de Dieu et amour du prochain ; insiste sur la charité comme critère du salut, condamne l’ostentation et les plaisirs.

Insiste sur la disposition intérieure (προαίρεσις) comme critère moral supérieur aux actes visibles ; l’intention détermine la valeur spirituelle.

Voit la colère comme passion dangereuse, mais utile si maîtrisée ; distingue entre colère juste (comme Paul ou Pierre) et emportement injuste.

Défend la chasteté (παρθενία), mais aussi la sainteté du mariage vécu comme « monastère laïc » ; la vraie chasteté est intérieure et évangélique.

Dans son Dialogue sur le sacerdoce, affirme la grandeur du prêtre : pasteur, célébrant de l’Eucharistie, enseignant ; reçoit une grâce céleste.

Rejette toute idée de prêtrise féminine ; l’ordination repose sur l’imposition des mains, selon la tradition apostolique.

Dans ses homélies pascales et catéchèses baptismales, insiste sur la dignité du baptisé comme temple de l’Esprit et ami de Dieu.

Développe une liturgie eucharistique (portant son nom dans l’orthodoxie), marquée par son anaphore et son sens de la pédagogie divine.

Hostile aux spectacles païens : théâtre, pantomime, cirque ; les accuse de déchristianisation, d’impudicité et de perte d’âme.

Homélies Adversus Judaeos dénoncent la participation des chrétiens aux rites juifs ; associe la synagogue au théâtre et à la prostitution spirituelle.

Lutte contre la vaine gloire (Sur la vaine gloire et l’éducation des enfants) ; valorise l’humilité et le repentir, surtout celui de saint Pierre.

Son exil donne lieu à une correspondance abondante : 238 lettres conservées, dont 17 à la diaconesse Olympias, témoignages humains et spirituels.

Son œuvre immense comprend des traités (Sur la virginité, Sur la providence), homélies sur les Écritures, catéchèses, lettres et commentaires.

Modèle d’évêque idéal, Jean Chrysostome allie zèle pastoral, rigueur morale, talent oratoire et profondeur théologique.

76
Q

Nestorius

A

Né vers 381 à Germanicie (aujourd’hui Kahramanmaraş, Turquie), Nestorius reçoit une éducation grecque à Germanicie, puis à Antioche, où il devient l’élève de Théodore de Mopsueste. Bien que son instruction reste superficielle, il compense par des talents oratoires reconnus.

Moine au monastère d’Euprépios près d’Antioche, puis ordonné prêtre, il est nommé archevêque de Constantinople en 428 par l’empereur Théodose II, en contournant le droit canonique. Il obtient un grand soutien à la cour mais est mal perçu par le clergé local.

Ferme les lieux de culte des hérétiques (ariens, macédoniens) et provoque des tensions avec Pulchérie, sœur de l’empereur. Il ambitionne aussi de juger les conflits d’évêques, en particulier ceux liés à Cyrille d’Alexandrie.

Propose de remplacer le titre marial Theotokos (« mère de Dieu ») par Christotokos (« mère du Christ »), considérant que Marie ne pouvait être la mère d’un être éternel et incréé. Cette position suscite un vif rejet à Constantinople.

Cyrille d’Alexandrie s’oppose vivement à lui, l’accusant d’hérésie adoptianiste (Dieu aurait adopté l’homme Jésus). Il lance une campagne théologique contre Nestorius dès 429, envoyant des lettres et anathèmes, relayés jusqu’à Rome.

En 430, un synode à Rome condamne Nestorius. Cyrille réunit un synode local à Alexandrie qui réitère cette condamnation et envoie une troisième lettre avec douze anathèmes, jugés inacceptables par les Orientaux.

En 431, le concile d’Éphèse est convoqué par Théodose II. Il s’ouvre le 22 juin, avant l’arrivée de Jean d’Antioche et de la délégation romaine, et sans Nestorius, menacé par l’évêque local Memnon. Présidé par Cyrille, le concile condamne Nestorius dès la première session.

L’empereur Théodose II, embarrassé, emprisonne les protagonistes (Cyrille, Nestorius, Memnon) mais n’obtient pas de réconciliation. Cyrille gagne la faveur impériale par des cadeaux généreux et le soutien d’une majorité d’évêques.

En octobre 431, Nestorius est officiellement remplacé par Maximien. Il retourne brièvement dans son monastère d’Antioche avant d’être exilé à Pétra, puis en 435 à Al-Kharga dans le désert égyptien, où il meurt en 451.

Dans son exil, Nestorius reçoit des nouvelles de Constantinople, rédige des lettres, et notamment le Livre d’Héraclide de Damas, une apologie dans laquelle il se défend d’avoir été nestorien. Il affirme y être en accord avec Flavien de Constantinople et Léon de Rome.

Le concile de Chalcédoine est convoqué peu après sa mort, mais Nestorius y avait été convoqué. Il n’a pu y assister à cause de son décès en 451.

Son nom reste associé à l’hérésie du nestorianisme, bien que des études modernes, notamment après la redécouverte du Livre d’Héraclide, tendent à nuancer cette vision, certains auteurs affirmant même qu’il n’était pas nestorien au sens doctrinal.

La théologie de Nestorius insiste sur la distinction entre la nature divine et la nature humaine dans le Christ, refusant toute confusion ou fusion, ce qui a conduit à des malentendus sur son orthodoxie.

Le consensus ultérieur dans l’Église orientale affirme que la querelle portait davantage sur les termes de l’union que sur une différence théologique de fond, comme le note Bar-Hebraeus au XIIIe siècle.

Le renouveau des études au XXe siècle, notamment grâce à Paul Bedjan, François Nau, J.-F. Bethune-Baker et Sebastian Brock, a permis une réévaluation critique de la pensée nestorienne et du contexte de sa condamnation.

77
Q

Julien

A

Né en 331 ou 332 à Constantinople, Julien est un membre de la dynastie constantinienne, fils de Jules Constance, demi-frère de Constantin. Sa mère, Basilina, meurt peu après sa naissance. Il est élevé dans le christianisme arien mais sous surveillance stricte après le massacre de sa famille en 337, probablement ordonné par Constance II.

Son éducation, confiée à des évêques ariens (Eusèbe de Nicomédie, puis Georges de Cappadoce), est aussi marquée par l’influence de Mardonios, son pédagogue païen, qui l’initie aux classiques grecs. À partir de 350, il se tourne vers le néoplatonisme et le culte solaire (inspiré de Jamblique) et rejoint les mystères païens, notamment ceux de Mithra et d’Éleusis.

Julien est tenu à l’écart du pouvoir jusqu’en 355, lorsqu’il est nommé César par Constance II et envoyé en Gaule pour rétablir l’ordre. Malgré son inexpérience militaire, il s’impose rapidement comme un stratège compétent, remporte plusieurs victoires (notamment à Strasbourg en 357) et restaure les frontières du Rhin.

Il administre la Gaule avec rigueur et équité, réduisant les impôts tout en augmentant les recettes fiscales. Il s’installe à Lutèce (Paris), qu’il apprécie pour sa position stratégique, et y passe ses hivers entre 357 et 360.

En 360, ses troupes le proclament Auguste contre la volonté de Constance II, ce qui provoque un conflit. Mais la mort de Constance en 361 permet à Julien de devenir seul empereur sans combat, assurant ainsi la continuité de la dynastie.

Une fois empereur, il proclame une politique religieuse de tolérance mais tente de restaurer le paganisme. Il interdit aux chrétiens d’enseigner les lettres classiques, qu’il considère comme incompatibles avec leur foi, et réforme le paganisme sur le modèle chrétien (charité, hiérarchie cléricale, morale des prêtres).

Son projet religieux s’appuie sur une religion solaire centrée sur Hélios, fusionnant plusieurs cultes païens dans un polythéisme rénové. Il se positionne contre le christianisme dans son ouvrage Contre les Galiléens, le considérant comme une superstition récente sans légitimité ni enracinement.

Son attitude envers les chrétiens oscille entre mépris, satire et volonté de marginalisation. Il refuse les persécutions sanglantes, préférant les exclure des postes publics et les priver d’influence intellectuelle. Il tolère les Juifs, admire leur piété, et ordonne même la reconstruction du Temple de Jérusalem, probablement pour concurrencer le christianisme.

Julien entreprend en 363 une campagne contre les Perses sassanides. Après une victoire à Ctésiphon, il est mortellement blessé à Samarra lors d’un affrontement indécis. Il meurt dans la nuit du 26 juin 363, à l’âge d’environ 31 ans, sans héritier, ce qui entraîne l’élection de Jovien par l’armée.

Plusieurs versions entourent sa mort : blessure accidentelle au combat selon Ammien Marcellin, assassinat chrétien selon Libanios, et légende chrétienne où il prononce les mots « Tu as vaincu, Galiléen ! ».

Julien est aussi un auteur important du IVe siècle : lettres, éloges, satires (Misopogon, Les Césars), traités philosophiques et religieux (Sur Hélios-Roi, Sur la Mère des dieux), pamphlets contre le christianisme. Il défend une vision unifiée de la philosophie, inspirée du néoplatonisme.

Son œuvre littéraire vise à démontrer l’unité du vrai savoir et à rétablir la philosophie païenne face au christianisme. Il se présente comme un prince-philosophe, héritier de la tradition gréco-romaine, à la fois mystique et réformateur.

Sa mémoire reste très divisée : rejeté comme « l’Apostat » dans la tradition chrétienne, il est réhabilité à la Renaissance (Montaigne, La Boétie), exalté par les Lumières (Voltaire, Gibbon) comme défenseur de la liberté et de la culture classique, et admiré au XIXe siècle par les romantiques (Vigny, Ibsen) comme figure tragique et lucide.

Julien incarne une tentative unique de restauration du paganisme dans un Empire déjà largement christianisé. Son échec rapide, lié à sa mort prématurée, marque symboliquement la fin du polythéisme impérial.

78
Q

Narsaï

A

Narsaï naît en 410 à Ain Dulba, dans le district de Maalta (actuel gouvernorat de Dahuk, en Irak), sur le territoire du royaume sassanide. Orphelin très jeune, il est élevé par un oncle au monastère de Kfar Mari, près de Beth Zabdaï. Il porte un nom pehlevi, ce qui reflète son ancrage culturel en milieu perse.

Il rejoint ensuite l’Empire romain pour étudier à l’école théologique d’Édesse, dirigée par Qioré. Cette école, surnommée « école des Perses », forme les cadres ecclésiastiques des chrétiens vivant en territoire perse. Après la mort de Qioré en 437, Narsaï lui succède comme Mpachqana, « Interprète » des Écritures.

Son enseignement s’inspire de Théodore de Mopsueste, maître de l’école d’Antioche, dont la pensée est traduite en syriaque par Qioré. Cette orientation doctrinale le met en opposition avec les partisans de Cyrille d’Alexandrie, triomphants au concile d’Éphèse (431). L’évêque Ibas d’Édesse, disciple de Théodore, est remplacé après sa mort en 457 par des cyrilliens hostiles (Nonnus puis Qura/Cyrus).

En 471, contraint par l’évolution doctrinale de l’Église romaine, Narsaï quitte Édesse pour Nisibe (en territoire sassanide). Il commence par se retirer dans un monastère mais l’évêque Barsauma l’invite à fonder une nouvelle école théologique à Nisibe.

Cette école devient le principal centre théologique de l’Église de l’Orient, surtout après la fermeture de l’école d’Édesse en 489. Barsauma, au concile de Beth Lapat en 484, fait adopter la christologie de Théodore de Mopsueste comme doctrine officielle, assurant à Narsaï un cadre favorable.

Narsaï connaît des tensions avec Barsauma, en particulier à cause de la femme de l’évêque. Il quitte temporairement l’école pour retourner à Kfar Mari, mais revient à Nisibe après six ans. Il rédige le règlement de l’école, entré en vigueur en 496.

Il meurt vers 502, presque centenaire. Son influence perdure avec ses petits-neveux Abraham et Jean qui dirigent à leur tour l’école de Nisibe. Abraham sera Mpachqana de 509 ou 510 jusqu’à sa mort en 569.

Son œuvre, largement perdue, comprenait environ 360 memré (homélies en vers), des commentaires bibliques en prose, et un traité La Corruption de la morale — ce dernier, comme les textes en prose, n’est pas conservé.

Il reste environ 80 memré, qui sont des homélies pédagogiques en vers heptasyllabiques ou dodécasyllabiques, à mémoriser ou à chanter. Cette méthode s’inspire d’Éphrem le Syrien et servait à enseigner l’exégèse biblique.

Il est considéré dans l’Église de l’Orient comme l’un des plus grands maîtres : on le surnomme « la harpe du Saint-Esprit », « la langue de l’Orient », « le docteur admirable ».

Au XIIIe siècle, l’évêque Ébedjésus de Nisibe affirme que Narsaï a laissé un corpus immense de memré, renforçant son statut de pilier intellectuel et spirituel de l’Église de l’Orient.

Ses textes reflètent l’orientation christologique propre à la tradition dite « nestorienne », mettant l’accent sur la distinction entre les natures humaine et divine du Christ, en continuité avec Théodore de Mopsueste.

L’école de Nisibe qu’il a structurée devient pendant des siècles un foyer central de la théologie syriaque orientale, participant à l’expansion du christianisme jusqu’en Perse, en Asie centrale et en Inde.

79
Q

Barsauma

A

Barsauma (ou Bar Sauma, « le Jeûneur ») fut un évêque nestorien influent du Ve siècle, métropolitain de Nisibe à partir de 460 jusqu’à sa mort en 491. Il avait été élève puis professeur à l’école théologique d’Édesse sous Ibas, partisan de Théodore de Mopsueste.

Après le concile d’Éphèse (431) et la montée de l’orthodoxie cyrillienne en Syrie, l’école d’Édesse fut isolée. Après la mort d’Ibas en 457, Barsauma quitta Édesse pour se réfugier dans l’Empire perse, à Nisibe.

Il devint proche du roi sassanide Péroz Ier (règne 459–484), peut-être même marzban (gouverneur militaire) de la frontière de Nisibe. Il joua un rôle politique et militaire, étant autorisé à diriger des troupes dans des campagnes religieuses.

Barsauma épousa une femme nommée Mamoï, provoquant un conflit ouvert avec le catholicos Babowaï, hostile au mariage des évêques. Le catholicos, ancien mazdéen converti, fut mal vu par Péroz et plusieurs fois persécuté.

En 471, Barsauma accueillit Narsaï, chassé d’Édesse par l’évêque cyrillien Qura, et lui demanda de fonder l’école théologique de Nisibe, continuant l’enseignement de Théodore de Mopsueste.

En avril 484, Barsauma convoqua le concile de Beth Lapat. Ce concile, hostile à Babowaï, décida de :

déposer le catholicos Babowaï,

autoriser le mariage de tous les clercs, y compris les évêques et les prêtres,

faire de la doctrine de Théodore de Mopsueste la théologie officielle de l’Église de l’Orient.

Peu après, une persécution générale fut lancée par Péroz contre les chrétiens, dans un contexte de durcissement mazdéen. Péroz aurait massacré plusieurs centaines de chrétiens dans différentes régions de Perse.

Barsauma obtint tout de même du roi un corps armé pour imposer les décisions du concile de Beth Lapat. Il mena une expédition sanglante dans le Beit Garmaï (Kirkouk), où il aurait fait des milliers de morts (chiffres probablement exagérés).

Le catholicos Babowaï fut exécuté sur ordre du roi. Une tradition affirme que Barsauma fit intercepter une lettre où Babowaï comparait Péroz à Nabuchodonosor, ce qui aurait scellé son sort.

Après la mort de Péroz, son successeur Valash nomma un nouveau catholicos, Acace de Séleucie, un ancien condisciple de Barsauma mais non aligné avec lui. Ils se réconcilièrent au concile de Beth Edraï (485), mais le concile suivant de Ctésiphon (486) marqua une nouvelle rupture.

Ce concile, sans la présence de Barsauma, valida toutefois deux de ses idées majeures :

l’officialisation de la doctrine de Théodore de Mopsueste,

le mariage autorisé pour tous les clercs, y compris moines et nonnes.

Le mariage des clercs fut mal accueilli par une partie du clergé et du peuple. Il provoqua des dérives (épiscopats héréditaires, affaiblissement du monachisme). Cette règle fut abolie pour les évêques en 544 par le catholicos Mar Aba Ier.

Vers 487, sous la pression des monophysites de sa province, Barsauma négocia avec le catholicos pour conserver son siège, alors même que le patriarche de Constantinople exigeait son excommunication.

Après la fermeture de l’école d’Édesse (489), Barsauma accueillit les exilés à Nisibe et renforça l’école, devenue le centre intellectuel de l’Église de l’Orient.

Le roi Kavadh Ier (règne 488–531), successeur de Valash, interdit toute autre forme de christianisme que le nestorianisme et persécuta les évêques et abbés monophysites, consolidant l’influence de Barsauma.

Barsauma mourut en 491, tué selon la tradition par une religieuse à coups de clef, dans une église du Tur-Abdin.

Il fut l’un des artisans de l’autonomisation doctrinale de l’Église de l’Orient, qui adopta le nestorianisme comme doctrine officielle, rompant avec les Églises de l’Empire romain.

Il ne fut jamais catholicos, mais son influence sur la structure, la doctrine et la politique de l’Église de l’Orient fut déterminante. Son héritage fut toutefois controversé, notamment à cause de sa défense du mariage clérical et de son usage de la violence.

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Q

Sévérien de Gabala

A

Né vers 370 à Gabala (actuelle Jablé, en Syrie), Sévérien devient évêque de sa ville natale, mais quitte son siège épiscopal vers 400 pour se rendre à Constantinople, capitale de l’Empire, emportant avec lui de nombreuses homélies prêtes à prononcer.

Accueilli favorablement par Jean Chrysostome, archevêque de Constantinople, il gagne rapidement l’estime de la cour impériale grâce à ses prêches, malgré un accent syrien jugé rustique. Son érudition scripturaire compense son éloquence imparfaite.

Alors que Jean Chrysostome doit s’absenter pour une mission à Éphèse, il lui confie temporairement sa chaire à la Grande Église. Un incident éclate : Sévérien, se sentant offensé par le diacre Sérapion qui ne se lève pas à son passage, prononce une formule violente d’excommunication.

Jean Chrysostome, mis au courant, renvoie Sévérien, provoquant le scandale. L’impératrice Eudoxie, intervenant personnellement, obtient son retour, mais la relation avec Chrysostome est définitivement rompue.

Sévérien devient l’un des principaux accusateurs de Jean Chrysostome au synode du Chêne en 403, convoqué par Théophile d’Alexandrie, et contribue à sa destitution. Il participe également au second synode qui confirme son exil.

Figure controversée, Sévérien est perçu comme un ambitieux courtisan, manipulateur et rancunier, mais aussi comme un prédicateur populaire, fin connaisseur de la Bible et défenseur de la foi de Nicée.

Son œuvre exégétique, rattachée à l’école antiochienne, privilégie une lecture littérale et historique des Écritures. Il développe notamment une théologie de la Trinité, un intérêt pour la Genèse et les épîtres de Paul, et des positions orthodoxes face aux hérésies manichéennes et apollinaristes.

Certaines de ses homélies ont été transmises sous le nom de Jean Chrysostome, en raison d’un problème d’attribution dans la tradition manuscrite grecque. Ce transfert de paternité a toutefois permis leur préservation.

Ses écrits ont été également conservés dans des traductions anciennes (latin, arménien, arabe, géorgien), parfois même sous leur nom propre, notamment en arménien où plusieurs homélies perdues en grec sont encore disponibles.

Environ soixante homélies lui sont aujourd’hui attribuées de manière authentifiée, dont plusieurs ont été éditées et traduites en français, notamment sur la Création (Hexaéméron), le lavement des pieds, la Trinité, la Pentecôte, la Passion et la Résurrection.

Sévérien meurt entre 408 et 431, selon les sources. Il ne fut pas considéré comme hérétique, mais sa mémoire resta entachée par son rôle dans la chute de Jean Chrysostome et par sa réputation d’opportuniste dans les cercles impériaux.

81
Q

Arius

A

Arius, né vers 256 en Cyrénaïque (Libye actuelle), est un prêtre, ascète et théologien chrétien dont le ministère s’exerce à Alexandrie au début du IVe siècle. Il est à l’origine de la doctrine de l’arianisme, qui remet en cause la consubstantialité du Fils avec le Père dans la Trinité.

Il aurait été influencé par Lucien d’Antioche, théologien subordinationiste, ainsi que par des penseurs comme Anatole de Laodicée ou Jamblique, bien que ces filiations restent incertaines. Il apparaît à Alexandrie durant la persécution de Dioclétien (303–313), où il se fait remarquer par sa fidélité à la communauté chrétienne.

Ordonné diacre par l’évêque Pierre d’Alexandrie, il est excommunié pour avoir soutenu Melitios de Lycopolis, puis réintégré et ordonné prêtre par son successeur Achilas. Il acquiert une influence importante en dirigeant la communauté chrétienne de Baucalis grâce à son ascèse, sa rigueur, ses talents de prédicateur et sa capacité à vulgariser ses idées par des cantiques rimés.

Vers 318–319, une controverse théologique éclate avec l’évêque Alexandre d’Alexandrie sur la nature du Fils : Arius soutient que le Fils n’est pas éternel, qu’il est une créature engendrée par Dieu, et donc inférieur au Père. Il rejette l’idée d’une consubstantialité entre les deux.

Arius affirme qu’il fut un temps où le Fils n’était pas, que le Logos est créé ex nihilo, qu’il est faillible par nature (mais moralement parfait), et que son engendrement par Dieu n’est pas substantiel mais adoptif. Ces vues suscitent un profond rejet de la part d’Alexandre et de ses partisans, notamment Athanase d’Alexandrie.

Alexandre réunit un concile local à Alexandrie en 318 qui condamne Arius et l’excommunie. Ce dernier se réfugie à Nicomédie où il reçoit le soutien d’Eusèbe de Nicomédie et d’autres prélats, qui organisent un concile acceptant sa doctrine et annulant son excommunication.

L’empereur Constantin, soucieux de l’unité religieuse dans l’Empire, mandate Ossius de Cordoue pour enquêter. Un concile est convoqué à Antioche, puis déplacé stratégiquement à Nicée en 325, où se tient le premier concile œcuménique.

Le concile de Nicée condamne Arius, affirme que le Fils est « consubstantiel » (homoousios) au Père, et formule le Credo de Nicée. Arius est exilé en Illyrie et ses écrits sont brûlés.

Malgré sa condamnation, Arius garde de nombreux soutiens, notamment Eusèbe de Nicomédie et Eusèbe de Césarée. Il fait une profession de foi ambiguë acceptée par Constantin, qui le réintègre formellement dans l’Église en 335.

Un synode à Jérusalem confirme sa réhabilitation, mais il est mal reçu à Alexandrie, provoquant des émeutes. Il se rend alors à Constantinople en 336 pour y être officiellement réadmis en communion. Il meurt subitement à la veille de sa réintégration, dans des circonstances jugées mystérieuses.

L’arianisme perdure malgré sa condamnation : il est adopté par plusieurs empereurs (dont Constance II et Valens) et se diffuse largement, notamment chez les peuples germaniques convertis par le missionnaire arien Wulfila. Il devient ainsi une des principales hérésies du christianisme antique.

Arius reste une figure doctrinale majeure de la période : il incarne la première grande crise théologique de l’Église autour de la question trinitaire et contribue, par son opposition, à la formulation dogmatique du christianisme nicéen.

82
Q

Hésychios de Milet

A

Hésychios de Milet est un historien grec du VIe siècle, actif sous le règne de Justinien, connu également sous le nom honorifique d’Illustrius, titre de haut fonctionnaire de l’Empire byzantin.

Il est né vers 505 à Milet, dans une famille cultivée (son père était avocat), et a terminé sa vie à Constantinople. Il est mentionné dans la Souda, une encyclopédie byzantine du Xe siècle, qui préserve la mémoire de son œuvre.

Il est l’auteur d’une Histoire romaine et générale en six livres, qui retrace l’histoire du monde depuis les origines mythiques (Bélus, roi d’Assyrie) jusqu’à la mort de l’empereur Anastase Ier en 518. Cette œuvre propose une structure chronologique précise :

Livre I : jusqu’à la guerre de Troie.

Livre II : jusqu’à la fondation de Rome.

Livre III : jusqu’à l’expulsion des rois.

Livre IV : jusqu’à Jules César.

Livre V : jusqu’à la fondation de Constantinople.

Livre VI : jusqu’à 518. Seul un long fragment de ce dernier livre subsiste, décrivant notamment l’histoire de Byzance avant Constantin.

Il a aussi composé une suite de cette histoire couvrant le règne de Justin Ier et le début de celui de Justinien, mais ce texte est perdu ; selon Photius, il aurait abandonné le projet après la mort de son fils.

Il est également l’auteur d’un important dictionnaire biographique intitulé Onomatologos (« Nomenclateur »), catalogue des hommes illustres dans les domaines littéraire et artistique. Ce dictionnaire, aujourd’hui perdu sous sa forme originale, fut abrégé au IXe siècle en un lexique alphabétique enrichi de notices chrétiennes. Cet abrégé a servi de source majeure à la Souda.

Ce dictionnaire comprenait une Vie d’Aristote, connue sous le nom de Vita Menagiana, éditée en 1663 par Gilles Ménage. Elle inclut une liste des œuvres d’Aristote proche de celle de Diogène Laërce.

Photius, patriarche et bibliographe, loue son style élégant, sa clarté d’expression et sa fidélité aux faits historiques.

Il ne faut pas le confondre avec Hésychius d’Alexandrie, lexicographe du Ve siècle, auteur d’un glossaire grec célèbre.

Hésychios de Milet est une figure centrale de l’historiographie byzantine ancienne, à la croisée des genres : histoire universelle, biographie et dictionnaire savant. Son œuvre témoigne d’un effort de synthèse entre culture païenne classique et christianisme impérial.

83
Q

Jean le Lydien

A

Jean le Lydien, né en 491 à Philadelphie en Lydie, est un haut fonctionnaire byzantin et écrivain du VIe siècle, actif sous les règnes d’Anastase Ier et de Justinien.

Il s’installe à Constantinople vers l’âge de 20 ans dans l’espoir de devenir secrétaire du consistoire impérial, mais se tourne vers les études philosophiques, notamment auprès d’Agapios, un néoplatonicien disciple de Proclos.

Son œuvre montre une grande érudition nourrie de lectures de Platon, Aristote, Proclos, Jamblique, Hermès Trismégiste et autres auteurs antiques. Il fait également usage de sources aujourd’hui perdues, ce qui fait de ses textes des réservoirs uniques d’information.

Il fait carrière dans l’administration impériale, notamment à la préfecture du prétoire d’Orient, où il gravit les échelons jusqu’à devenir cornicularius (fonction élevée), avant de prendre sa retraite entre 551 et 552.

Il meurt après 557, probablement entre 557 et 561, si l’on se base sur les événements évoqués dans ses œuvres (comme la guerre lazique).

Durant sa retraite, il écrit trois œuvres majeures conservées :

De Ostentis (Sur les prodiges), traité sur l’art de la divination et les signes célestes.

De Magistratibus reipublicae Romanae (Des magistratures de l’État romain), rédigé vers 550, ouvrage essentiel sur l’organisation administrative et les transformations de l’État romain sous Justinien.

De Mensibus (Des mois), qui présente une histoire savante du calendrier, des mois et des fêtes, avec des réflexions sur les coutumes et croyances associées.

Il est aussi l’auteur d’un panégyrique impérial et d’une histoire de la campagne de Justinien contre les Sassanides, aujourd’hui perdus, ainsi que de poèmes disparus.

Sa pensée exprime à la fois une profonde nostalgie de la tradition romaine et une adaptation aux réalités administratives de l’Empire byzantin chrétien.

Sa transmission repose principalement sur un manuscrit majeur, le Caseolinus, découvert à Constantinople en 1785 par d’Ansse de Villoison, contenant les trois œuvres majeures de Jean le Lydien. Ce manuscrit proviendrait probablement de la collection du Phanariote Nicolas Mavrocordato et est conservé à la BnF.

Ce manuscrit est endommagé (notamment taché de vin), mais reste la source principale de l’édition moderne de ses textes. Une autre copie, faite à Athènes en 1765, a été perdue dans un incendie en 1917.

Sa réception postérieure est attestée dans la Souda, chez Photios et dans les recueils byzantins du Xe siècle (encyclopédie de Constantin VII, glossaire de Cyrille).

Jean le Lydien est aujourd’hui reconnu comme l’un des grands témoins de l’administration byzantine et de la culture savante de transition entre antiquité tardive et monde médiéval.

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Q

Philostorge

A

Philostorge, né vers 364 ou 368 à Borissos en Cappadoce, est un historien ecclésiastique grec du Ve siècle, mort vers 433, et principal témoin du point de vue arien sur les événements religieux du IVe siècle.

À l’âge de vingt ans, il s’installe à Constantinople, où il devient le disciple de l’arien Eunome, figure majeure du courant anoméen, branche radicale de l’arianisme.

Il rédige une Histoire ecclésiastique en douze livres, couvrant la période de 324 à 425, qui se veut une continuation de l’œuvre d’Eusèbe de Césarée, mais du point de vue arien.

Son œuvre complète est perdue, mais a été partiellement conservée grâce à un abrégé rédigé par Photius (patriarche de Constantinople), ainsi que par des extraits présents dans la Souda, la Passio Artemii, une Vie de Constantin anonyme et le Trésor de l’orthodoxie de Nicétas Choniatès.

Sa Histoire ecclésiastique constitue une source précieuse car elle offre le seul témoignage substantiel connu de l’historiographie arienne dans l’Antiquité tardive, face à l’historiographie nicéenne dominante.

Philostorge est également mentionné comme auteur d’un Éloge d’Eunome et d’une Réfutation de Porphyre, mais ces deux textes sont aujourd’hui perdus.

Son œuvre témoigne d’une érudition doctrinale marquée par une fidélité doctrinale à l’arianisme, et présente un intérêt majeur pour l’étude des dissidences théologiques et politiques de l’époque constantinienne et post-nicéenne.

L’édition moderne de référence est celle préparée par Joseph Bidez, avec traduction française par Édouard des Places (Éditions du Cerf, 2014).

Philostorge est une figure marginale du point de vue orthodoxe mais capitale pour saisir la diversité des courants chrétiens dans l’Antiquité tardive, et l’impact théologique et politique de l’arianisme jusqu’au Ve siècle.

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Saint Loup

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Lupus de Troyes (né vers 383 à Toul, mort vers 479 à Troyes) est un évêque gallo-romain du Ve siècle, connu pour son rôle dans la lutte contre le pélagianisme et pour la tradition selon laquelle il aurait sauvé sa ville des Huns d’Attila en 451.

Issu d’une famille noble (fils d’Epirocus de Toul), il perd ses parents très jeune et est élevé par son oncle Alistocus. Il est marié à Pimeniola, sœur de l’évêque Hilaire d’Arles, avant de se séparer d’elle d’un commun accord après six ans de mariage.

Lupus vend ses biens, distribue l’argent aux pauvres et rejoint l’abbaye de Lérins, dirigée par Honoratus, où il reste environ un an. Après le départ d’Honoratus pour devenir évêque d’Arles, Lupus se retire à Mâcon.

Repéré par Germain d’Auxerre, il est nommé évêque de Troyes en 427 malgré ses réticences. Il occupera cette fonction pendant 52 ans, jusqu’à sa mort en 479.

En 429, il est envoyé avec Germain en mission en Grande-Bretagne par le concile d’Arles pour combattre l’hérésie pélagienne. Cette mission a un fort retentissement dans les traditions galloises, où Lupus est connu sous le nom de Bleiddian.

Il est vénéré dans l’Église catholique et l’Église orthodoxe, et fêté le 29 juillet. Il est notamment honoré à Llanblethian (Pays de Galles) et représenté avec une pierre précieuse tombée du ciel ou dans un calice.

Selon une tradition hagiographique, Lupus aurait protégé Troyes lors du passage d’Attila en 451 : vêtu de ses ornements épiscopaux, il serait sorti à la tête du clergé pour rencontrer le chef hun. Attila, impressionné, aurait épargné la ville. Cette version est cependant sujette à caution selon les historiens modernes.

Après la défaite d’Attila à la bataille des Champs Catalauniques, ce dernier aurait voulu que Lupus l’accompagne pour protéger son armée. Mais le prélat est accusé par les Romains de complicité avec les Huns et contraint à l’exil. Il devient alors ermite dans les montagnes.

L’épisode d’Attila pourrait refléter un noyau historique : la ville de Troyes aurait été épargnée, événement perçu comme miraculeux par ses habitants. Le récit a probablement été construit dans une optique hagiographique et s’apparente à d’autres traditions similaires, comme celle de sainte Geneviève à Paris.

Lupus est décrit par Sidoine Apollinaire comme une figure majeure de l’épiscopat gallo-romain, un modèle de vertu et de charité, « le père des pères, l’évêque des évêques, la colonne de vérité ».

Il entretient des liens d’amitié et de collaboration avec d’autres prélats de son temps, notamment l’évêque Euphronius d’Autun.

Sa longévité épiscopale exceptionnelle, son engagement contre l’hérésie, et son image de protecteur spirituel face aux périls terrestres en ont fait une figure importante du christianisme tardo-antique et médiéval.

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Saint Aignan d’Arles

A

Aignan d’Orléans, né vers 358 à Vienne (Dauphiné) et mort vers 453 à Orléans, fut évêque d’Orléans à une époque charnière de la fin de l’Empire romain d’Occident. Il est reconnu saint par l’Église catholique, avec une fête célébrée le 17 novembre.

Originaire d’une famille noble probablement hongroise, il est repéré pour ses qualités et mérites par l’évêque saint Euverte d’Orléans, qui le fait venir à Orléans. Il lui succède comme évêque.

Il est resté dans la mémoire collective pour son rôle décisif dans la défense d’Orléans face à l’invasion d’Attila en 451. Sidoine Apollinaire, dès 478-479, et la Vita Aniani, en font un des principaux artisans du salut de la ville.

Devant l’imminence de l’attaque des Huns, Aignan organise la résistance, invite la population à la prière, puis entreprend un voyage à Arles pour convaincre Ætius, général romain, d’intervenir militairement.

L’hagiographie rapporte une version légendaire : alors que les secours tardent à venir, Aignan jette une poignée de sable de Loire du haut des remparts ; chaque grain se transforme en guêpe, mettant en fuite les Huns. Cette légende, non retenue par les historiens, a pourtant marqué l’imaginaire local.

Une version historique évoque une trahison ayant permis aux Huns de pénétrer dans la ville, juste avant l’arrivée des troupes romaines qui mirent les assiégeants en déroute, précipitant leur défaite aux Champs Catalauniques.

Après la délivrance de la ville, Aignan est élevé au rang de protecteur d’Orléans et de son diocèse. Il devient une figure tutélaire dont la mémoire est célébrée par de nombreuses églises, toponymes et traditions populaires, notamment la Foire de la Saint-Aignan.

Son rôle de protecteur spirituel est renforcé par l’expression légendaire attribuée au peuple : « Aignan, ne vois-tu rien venir ? », réemployée plus tard dans le conte de Perrault Barbe-Bleue sous la forme « Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ? ».

Sous le règne de Robert II le Pieux (XIe siècle), une abbaye et une crypte lui sont dédiées à Orléans. Cette crypte, remaniée au XIVe siècle, est l’une des plus vastes de France et conserve des éléments sculptés du XIe siècle.

Son culte est diffusé bien au-delà d’Orléans : on trouve des églises Saint-Aignan dans plusieurs régions françaises (Jura, Cher, Pyrénées-Atlantiques, Moselle, Landes, Loir-et-Cher, etc.), ainsi qu’à Paris, où Étienne de Garlande fait édifier une chapelle en 1116 sur l’île de la Cité.

Le rôle d’Aignan dans la défense de la ville s’inscrit dans une tradition d’évêques prenant la tête de la cité en temps de crise, un phénomène fréquent à la fin de l’Empire romain, bien que les historiens (comme Émile Chenon) contestent l’emploi trop systématique du terme de « défenseur civique ».

À partir du XVe siècle, Aignan est peu à peu supplanté dans la mémoire collective orléanaise par Jeanne d’Arc, autre figure salvatrice liée à une invasion et à une libération miraculeuse de la ville.

Il reste néanmoins une figure majeure de la chrétienté tardo-antique, alliant piété personnelle, charisme politique et réputation de thaumaturge, dans une période troublée de transition entre Empire romain et royaumes barbares.

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Alpin de Châlons

A

Alpin de Châlons, aussi connu sous le nom latin Alpinus, est né à Baye (Marne) et mort en 480 dans la même localité. Il fut le huitième évêque de Châlons-en-Champagne, de 433 à 480, et est reconnu comme saint par l’Église catholique, célébré le 7 septembre (fête déplacée temporairement au 2 mai au Moyen Âge).

Il étudia à l’abbaye de Lérins, centre intellectuel majeur du christianisme en Gaule au Ve siècle, et participa vers 429 à une mission contre le pélagianisme en Bretagne (Grande-Bretagne) aux côtés de Germain d’Auxerre et Loup de Troyes.

Lors de l’invasion d’Attila en 451, alors que les Huns approchent de Châlons pendant les fêtes de la Pentecôte, Alpin se rend personnellement à leur rencontre et les convainc d’épargner la ville, ce qui fut considéré comme un acte miraculeux ou diplomatique exceptionnel.

Après le passage des Huns, il parcourt son diocèse pour en réparer les ravages. À Perthes, il rencontre le comte Sigmarus et convertit ses sept filles, qui entrent toutes dans les ordres, dont sainte Ménehould.

Il restaure l’église de la Vierge fondée par Memmie de Châlons, fonde la paroisse Saint-Vincent (future cathédrale Saint-Étienne), et transforme l’église Notre-Dame-en-Vaux, qui abritait le reliquaire du Saint-Nombril.

Il fonde également le collège Saint-Lazare (futur couvent des Filles de Dieu), expulse les juifs de la ville, utilise leurs maisons pour fonder deux hospices (Saint-Liénard pour les hommes et Sainte-Pôme pour les femmes), et introduit des moines de Lérins pour établir l’abbaye Saint-Pierre-au-Mont de Châlons avec l’accord du pape.

À sa mort en 480, son corps est d’abord inhumé à Baye. En 860, l’évêque Erchanraus le fait transférer à l’église Saint-André de Châlons, renommée en son honneur Saint-Alpin. Son corps est ensuite divisé en trois parties, exposées dans différents lieux de culte à Châlons. Deux de ces parties furent perdues à la Révolution, la troisième repose encore dans la cathédrale de Châlons.

Son culte est attesté par la construction de plusieurs églises en son nom, notamment à Villevenard, Écury-sur-Coole, et à Châlons-en-Champagne, où son tombeau est conservé dans l’église qui porte son nom.

Sa figure est associée à la résistance spirituelle et pastorale face aux périls barbares du Ve siècle, et son action contre les Huns, bien que souvent mythifiée, reflète l’importance croissante des évêques dans la protection des cités en période de crise politique et militaire.

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Gildas le Sage

A

Gildas le Sage, né probablement en 494 dans le royaume de Strathclyde (près de Glasgow) et mort le 29 janvier 565, est une figure centrale du christianisme celtique, connu pour son influence religieuse et littéraire dans la Grande-Bretagne post-romaine et en Bretagne continentale.

Son œuvre principale, De Excidio et Conquestu Britanniae, est un sermon en trois parties dénonçant la corruption morale et politique de la société britannique de son temps. Ce texte constitue l’une des seules sources contemporaines sur la fin de la présence romaine et les premières incursions saxonnes.

Gildas s’oppose dans ce texte à cinq rois bretons qu’il décrit comme tyranniques : Constantin de Domnonée, Aurelius Caninus, Vortiporius, Cuneglasus et Maglocunus. Il y dénonce aussi le clergé corrompu sans nommer ses cibles, avec un ton prophétique et moral.

La datation du De Excidio est estimée autour de 545–547, car Gildas y mentionne la mort future de Maglocunus, roi du Gwynedd, décédé en 547. Il situe aussi sa propre naissance l’année de la bataille du Mont Badon (autour de 493–494), ce qui fixe un repère chronologique précieux.

Son œuvre De Paenitentia, brève règle monastique, reflète une modération par rapport à l’austérité de saint David. Un autre texte attribué à Gildas est la Lorica, prière de protection, conservée dans des manuscrits irlandais.

Gildas est représenté comme abbé et missionnaire. Il aurait étudié au monastère de Lérins ou auprès de saint Ildut au Pays de Galles, où il côtoie d’autres figures fondatrices comme Samson de Dol, Paul Aurélien et Pol de Léon. Il aurait aussi effectué plusieurs séjours en Irlande, d’abord pour étudier, ensuite à l’invitation du roi Ainmere.

D’après la tradition armoricaine, Gildas s’installe sur l’île d’Houat puis fonde l’abbaye de Saint-Gildas-de-Rhuys. Il aurait également été actif à Bieuzy et dans d’autres lieux de Bretagne, avec une forte empreinte toponymique (Locqueltas, etc.).

Sa confrontation légendaire avec le tyran Conomor, qui aurait tué son épouse Trifine, illustre la dimension hagiographique de sa mémoire. Il y est présenté comme ressuscitant Trifine, avant de la renvoyer dans le monde des morts.

La tradition galloise, quant à elle, le lie à l’île de Flat Holm, au monastère de Llancarfan, à la cour du roi Arthur, et à un épisode avec Melwas, ravisseur de Guenièvre, ce qui peut indiquer une confusion avec un autre Gildas (Gildas l’Albanais).

Il fut une référence spirituelle pour les générations suivantes. Bède le Vénérable et Alcuin s’appuient sur ses écrits, et son autorité morale sert de modèle pour des prédications contre les invasions vikings (comme chez Wulfstan d’York).

Gildas est également l’auteur probable d’une dizaine de fragments sur la vie monastique conservés dans les Monumenta Germaniae Historica. Sa pensée valorise le retrait du monde, la réforme des mœurs et le rôle prophétique du clergé.

La Vita Gildae, hagiographie armoricaine écrite au XIe siècle par Vital de Fleury, mêle éléments historiques et légendaires, avec des anachronismes mais aussi des références à des personnages réels (Conomor, Ainmere).

D’autres vies hagiographiques (galloise, berrichonne) offrent des variantes importantes, notamment sur ses voyages, sa formation et ses relations avec Arthur. Ces contradictions rendent difficile la reconstitution historique de sa biographie.

À sa mort, survenue probablement sur l’île d’Houat, son corps est disputé par les Bretons de Cornouaille. Il échoue à Crouesty avant d’être inhumé à Saint-Gildas-de-Rhuys, où un culte local se développe.

Son influence religieuse est durable. Une abbaye éponyme est fondée à Déols après les invasions normandes, puis déplacée, et devient au XVIIe siècle l’une des plus riches du Berry, avant sa destruction après 1622.

Gildas est fêté le 29 janvier, vénéré comme saint par les Églises catholique et orthodoxe. Il est le saint patron des historiens gallois et des fondeurs de cloches, souvent représenté avec une cloche comme attribut.

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Jacques de Tarentaise

A

“Jacques de Tarentaise, également appelé Jacques d’Assyrie ou Jacques de Lérins, est un saint légendaire de l’Église catholique romaine, mort en 429. Il est considéré comme l’évangélisateur de la vallée de Tarentaise en Savoie et son premier évêque selon la tradition. Sa fête est célébrée le 16 janvier.

D’après les récits hagiographiques tardifs (XIIe–XIIIe siècles), Jacques serait né en Assyrie, aurait été officier dans l’armée perse, et se serait converti au christianisme en Grèce grâce à saint Honorat, fondateur de Lérins. Il aurait rejoint la communauté monastique de Lérins.

Vers 420, il accompagne Honorat et Maxime de Riez pour évangéliser la Tarentaise, une région des Alpes alors habitée par les Ceutrons, peuple alpin, et menacée par les Burgondes. Honorat l’aurait consacré évêque vers 426.

La tradition le désigne comme l’« apôtre des Ceutrons » et son premier évêque. Il serait mort en 429, le même jour que son maître Honorat. Il aurait désigné son successeur Marcel avant de mourir.

Historiquement, la présence de Jacques de Tarentaise est incertaine : aucun document du Ve siècle ne le mentionne, pas même la Vita de Saint Honorat écrite par Hilaire d’Arles. Le premier évêque attesté de Tarentaise est Sanctius, présent au concile d’Épaone en 517.

Le récit selon lequel un roi burgonde aurait cédé un lieu à Jacques pour y construire une église (le futur château Saint-Jacques) est considéré comme anachronique, car les Burgondes n’entrent en Tarentaise qu’après 443, soit plus de dix ans après la mort supposée de Jacques.

Les Vitae rapportent plusieurs miracles et légendes : il aurait guéri les îles de Lérins d’un « dragon pestifère » par la prière, sauvé un fils de roi burgonde, et ordonné à un ours de remplacer un bœuf mort sur un chantier.

D’autres récits racontent qu’il aurait allongé miraculeusement une poutre trop courte avec de l’eau bénite, récupéré un œil d’âne arraché par un aigle, et offert de la neige intacte en été à un roi.

Ces légendes partagent des similitudes symboliques avec celles de Jacques le Majeur (apôtre de Compostelle), notamment l’analogie entre le domptage de l’ours (en Tarentaise) et des taureaux (à Compostelle), ou le pouvoir de guérison. Cela a conduit certains chercheurs à envisager une influence ou un mimétisme dans la construction du culte.

Son culte reste vivant en Tarentaise. Plusieurs églises et chapelles lui sont dédiées, notamment à Arêches, Hauteluce, Saint-Marcel et Tignes. Le mont Saint-Jacques (2 407 m) lui est aussi consacré, avec des processions locales.

Les reliques et traditions liées à Jacques de Tarentaise ont également servi à légitimer l’autorité temporelle des archevêques de Tarentaise face à l’expansion des comtes de Savoie, comme en témoigne la rédaction tardive de sa Vita pour affirmer la continuité apostolique du siège épiscopal.

Malgré l’incertitude historique sur son existence réelle, Jacques reste une figure majeure de l’imaginaire religieux savoyard et de la mémoire chrétienne alpine.”

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Vincent de Lérins

A

Vincent de Lérins, né à Toul (ou dans ses environs), est un moine, prêtre et écrivain ecclésiastique gallo-romain du Ve siècle, mort vers 445 ou 450 sur les îles de Lérins. Il est reconnu saint par les Églises catholique et orthodoxe, fêté le 24 mai.

Il est issu d’une famille illustre de la Civitas Leucorum (actuel diocèse de Toul), fils d’un certain Épiroque, et frère de Loup de Troyes, futur évêque. Après une carrière militaire, il entre au monastère de Lérins fondé par Honorat, au large de Cannes.

Il est surtout connu pour son traité théologique Commonitorium, rédigé vers 434 sous le pseudonyme de Peregrinus (“le pèlerin”). Ce texte a eu une large influence sur la théologie occidentale, notamment pour sa définition de l’orthodoxie.

Dans le Commonitorium, Vincent énonce trois critères pour distinguer la foi authentique de l’hérésie :

Universalité : croire ce qui a été cru partout, toujours et par tous — quod ubique, quod semper, quod ab omnibus ;

Développement homogène : permettre un progrès dans l’intelligence de la foi, mais uniquement dans la continuité du dogme, selon une croissance organique ;

Interprétation scripturaire : lire l’Écriture selon la Tradition universelle et le dogme catholique.

Son approche théologique a influencé durablement l’idée d’un développement homogène de la doctrine chrétienne. Il inspire des auteurs comme Bède le Vénérable ou Alcuin, et son critère d’universalité est resté célèbre dans la tradition catholique.

Il meurt peu après la rédaction de son œuvre principale, probablement entre 445 et 450, dans le monastère de Lérins, où il avait passé la fin de sa vie comme moine.

Il est l’un des rares écrivains latins de l’Antiquité tardive à avoir combiné une grande clarté doctrinale avec un style rhétorique accessible et percutant, ce qui a assuré à son œuvre une postérité durable dans la théologie chrétienne.

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Salvien de Marseille

A

Salvien de Marseille est un auteur chrétien latin né vers 400 à Trèves ou Cologne, et mort vers 470 à Marseille. Il appartient à l’élite gallo-romaine cultivée, formé à la rhétorique, avant de se tourner vers l’ascétisme chrétien.

Marié à une femme nommée Palladia, avec laquelle il a un enfant, il rompt avec ses beaux-parents lors de sa conversion à la vie ascétique. Il est proche des milieux monastiques de Lérins et devient prêtre en 430.

Il séjourne auprès de saint Honorat en 427 et est décrit par Hilaire d’Arles comme un compagnon très estimé. Il joue un rôle dans la formation intellectuelle du jeune Salonius, fils d’Eucher de Lyon.

Son œuvre la plus connue est le De gubernatione Dei (« Le Gouvernement de Dieu »), traité apologétique et moral écrit en pleine crise impériale. Il y interprète les invasions barbares comme un châtiment divin contre les péchés des Romains, et une récompense pour les vertus (chasteté, justice) des Barbares.

Il y critique l’ensemble des classes sociales romaines : les esclaves sont paresseux et dissolus, les riches sont cruels, cupides, égoïstes ; ils provoquent les révoltes sociales et le ralliement des pauvres aux envahisseurs barbares, jugés moralement supérieurs.

Salvien s’oppose à la vision augustinienne de l’histoire (notamment à La Cité de Dieu) et incarne une tradition provençale chrétienne plus indépendante, influencée par le christianisme oriental et les traditions monastiques grecques liées à Constantinople.

Cette perspective théologique affirme la permanence de la Providence divine même dans la chute de Rome, Dieu gouvernant toujours l’histoire humaine pour en faire émerger la justice.

Il est également l’auteur du Ad Ecclesiam (ou Livre de Timothée à l’Église), traité où il fustige la cupidité des chrétiens et les injustices économiques. Il exhorte les fidèles à léguer leurs biens à l’Église, plutôt qu’à leurs enfants, afin d’assurer leur salut.

L’ouvrage valorise l’abnégation absolue des prêtres, moines et religieuses comme seul vrai modèle de vie chrétienne. L’héritage terrestre est vu comme un danger spirituel.

Neuf lettres authentiques nous sont parvenues, apportant des éléments biographiques, notamment sur ses amitiés et son insertion dans les réseaux ecclésiastiques de son temps.

Salvien représente un témoin capital de la désagrégation de l’Empire romain occidental, dont il donne une lecture morale et théologique à travers une critique sociale virulente, ancrée dans une théologie de la punition divine.

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Fauste de Riez

A

Fauste de Riez (c. 400–495) est un moine, abbé de Lérins, puis évêque de Riez. Il est considéré comme saint et fêté le 28 septembre. Il joue un rôle majeur dans la vie religieuse et intellectuelle de la Gaule du Ve siècle.

Né en Bretagne insulaire selon Sidoine Apollinaire et Avit de Vienne, il est dit fils du roi Vortigern dans l’Historia Brittonum, bien que cette origine soit peut-être légendaire ou polémique. Il aurait été baptisé et formé par Germain d’Auxerre, qui l’aurait ramené en Gaule en 429.

Il devient moine à l’abbaye de Lérins vers 429, puis abbé en 439. À la mort de l’évêque Maxime, il est élu évêque de Riez vers 459-466. Il contribue fortement à l’influence spirituelle de Lérins.

Sidoine Apollinaire, admirateur et ami proche, lui rend visite à Riez, lui confie l’éducation de son frère et fait l’éloge de ses vertus. Fauste aurait aussi baptisé Sidoine.

À cause de son opposition à l’arianisme, il est exilé par le roi wisigoth Euric en 476. Il ne retrouve son siège qu’en 484, après la mort de ce dernier.

Son traité De Spiritu Sancto (c. 470) défend la consubstantialité du Saint-Esprit avec le Père et le Fils contre les ariens, confirmant son attachement au dogme trinitaire de Nicée-Constantinople.

Dans De gratia Dei et libero arbitrio, il condamne le pélagianisme mais soutient une position surévaluant le libre arbitre humain, ce qui le place dans le courant dit du « semi-pélagianisme ». Cette position sera condamnée au concile d’Orange (529) aux côtés de Jean Cassien et Vincent de Lérins.

Fulgence de Ruspe lui répond dans son Contra Faustum Reiensem libri septem, tandis que Claudien Mamert critique implicitement sa vision de l’âme comme matérielle, conception héritée de Jean Cassien.

Fauste a laissé dix lettres, dont cinq adressées à Rurice de Limoges, et huit sermons formellement attribués. Une grande partie de la Collection gallicane (Eusèbe gallican, 76 sermons) lui est désormais attribuée par des chercheurs modernes.

Il représente un penseur emblématique du christianisme provençal post-augustinien, attaché à l’ascétisme, à la liberté humaine dans le salut, et à une tradition théologique encore marquée par le monachisme oriental.

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Léon 1er

A

Léon Ier, dit « le Grand », est pape de 440 à 461. Il naît à Rome entre 390 et 400 et meurt dans cette même ville le 10 novembre 461. Il est proclamé saint et Docteur de l’Église, fêté le 10 novembre dans le rite romain.

Avant son pontificat, Léon est archidiacre de Rome. Il est élu pape en son absence, alors qu’il arbitrait un conflit entre Aetius et le préfet du prétoire en Gaule. Il est sacré à son retour, le 29 septembre 440.

Il affirme avec vigueur la primauté de l’évêque de Rome, non en vertu de la dignité impériale de la ville, mais en tant que successeur de l’apôtre Pierre. Cette conception sera centrale pour l’ecclésiologie romaine ultérieure.

Il exerce son autorité sur plusieurs régions : l’Italie (lutte contre le manichéisme et le pélagianisme), la Gaule, l’Espagne, l’Afrique du Nord (lutte contre le priscillianisme), et l’Orient (Illyrie). Il impose l’obligation aux évêques de participer chaque année à un synode à Rome.

Dans le domaine théologique, il est célèbre pour le Tome à Flavien, une lettre envoyée en 449 au patriarche de Constantinople, qui développe une christologie fondée sur l’unicité de la personne du Christ en deux natures distinctes. Ce texte devient central au concile de Chalcédoine en 451.

Le Tome à Flavien est acclamé au concile par la formule « Pierre a parlé par la bouche de Léon ». Ce triomphe doctrinal s’accompagne toutefois d’une tension avec Constantinople, qui souhaite être considérée comme égale à Rome (canon 28), ce que Léon refuse catégoriquement.

Léon rédige 173 lettres et 97 sermons. Ses écrits, d’un style sobre et pédagogique, défendent l’incarnation, la morale chrétienne, la dignité humaine, la justice sociale, la vie liturgique et la nécessité d’unité doctrinale.

Dans sa théologie morale, chaque sermon se conclut par une exhortation à imiter le Christ, modèle de douceur et de patience. La liturgie y est vue comme actualisation du mystère célébré, en lien avec les sacrements.

Il intervient dans la politique romaine en persuadant Attila en 452 de ne pas envahir Rome (a Mantoue) et en négociant avec Genséric en 455 pour que Rome soit épargnée de destructions et de violences excessives.

Léon défend la doctrine contre de nombreuses hérésies : manichéisme, pélagianisme, priscillianisme, nestorianisme, et surtout le monophysisme d’Eutychès. Il impose la doctrine catholique de Chalcédoine comme norme.

Il est à l’origine du premier sacramentaire romain, compilé après sa mort et connu sous le nom de Sacramentaire léonien, recueil liturgique du Ve au VIIe siècle.

Il est proclamé Docteur de l’Église en 1754 par Benoît XIV sous le titre de Doctor unitatis Ecclesiae (docteur de l’unité de l’Église).

Il incarne un tournant dans l’histoire de la papauté : par son autorité doctrinale, son rayonnement diplomatique et sa centralité ecclésiologique, il jette les bases du rôle futur de la papauté dans l’Église latine.

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Pierre Chrysologue

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Pierre Chrysologue, né entre 380 et 406 à Imola et mort en 450 dans la même ville, est un évêque de Ravenne, théologien latin du Ve siècle, et Docteur de l’Église. Il est nommé archevêque de Ravenne en 433 par le pape Sixte III, influencé selon la tradition par une vision des apôtres Pierre et Apollinaire.

Il reçoit une solide formation rhétorique et littéraire, ce qui transparaît dans ses sermons, connus pour leur clarté et leur concision. Il est surnommé « Chrysologue » (à la parole d’or) pour la qualité de sa prédication, à l’image de Jean Chrysostome.

Il est conseiller du pape Léon Ier et joue un rôle actif dans les débats doctrinaux de son temps, notamment contre l’arianisme et le monophysisme. Il envoie une lettre à Eutychès en 448, dans laquelle il lui recommande l’obéissance au pape Léon plutôt que de s’en remettre à lui.

Ses sermons (176 au total) ont été réunis au VIIIe siècle par l’archevêque Félix de Ravenne. Ils traitent de l’Incarnation, du rôle de Marie et de Jean-Baptiste, de la parabole du fils prodigue, de l’eucharistie, du jeûne, du pardon et de la pénitence.

Pierre Chrysologue prône une théologie pastorale et accessible, préférant la brièveté pour maintenir l’attention de ses fidèles. Il voit la peur de la mort comme moteur de la condition humaine et exhorte à s’appuyer sur les Écritures, l’eucharistie et la charité pour y faire face.

Il soutient la communion fréquente comme nourriture de l’âme et anticipe la doctrine de la réelle présence du Christ dans les espèces consacrées. Le « pain quotidien » de l’Eucharistie est pour lui un avant-goût du banquet céleste.

Il insiste sur la virginité perpétuelle de Marie, qu’il conçoit comme modèle de l’Église, Épouse et Mère, et sur le rôle rédempteur de l’Incarnation : le Christ descend dans la condition humaine pour libérer l’homme.

Dans sa vision du Carême, il associe prière, miséricorde et jeûne : comme le printemps chasse l’hiver, l’abstinence purifie l’homme. Il affirme que « l’abstinence est la première médecine de l’homme », mais que pour guérir vraiment, elle doit être accompagnée d’actes de charité.

Il est un fervent défenseur de la primauté du siège de Pierre, qu’il lie à l’unité de la foi et de l’Église. Dans sa lettre à Eutychès, il en appelle explicitement à l’autorité du pape Léon Ier.

Il meurt à Imola en 450. Sa fête est célébrée le 30 juillet. Il est proclamé Docteur de l’Église en 1729 par le pape Benoît XIII, en reconnaissance de son œuvre théologique et pastorale.

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Avit de Vienne

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Avit de Vienne, né vers 450 et mort autour de 518, est issu d’une noble famille sénatoriale gallo-romaine. Il est le fils d’Isice, évêque de Vienne, et le frère d’Apollinaire, futur évêque de Valence. Il est peut-être apparenté à Sidoine Apollinaire et à l’empereur Avitus.

Marié, puis veuf vers 40 ans, Avit distribue ses biens aux pauvres et se retire dans un monastère avant d’être consacré évêque de Vienne en 490, succédant à son père. Il élargit l’influence de son siège, notamment en obtenant du pape l’extension de son autorité sur plusieurs diocèses (Valence, Tarentaise, Genève, Grenoble), malgré les protestations de l’archevêque d’Arles.

Avit joue un rôle politique important dans le royaume burgonde dominé par l’arianisme. Il tente de convertir les rois burgondes et leur entourage. Il influe sur la conversion de Sigismond et de la princesse Clotilde, future épouse de Clovis. Il célèbre aussi la conversion de Lanthilde, sœur de Clovis, et commente celle de Clovis dans une lettre célèbre.

Son interprétation du baptême de Clovis souligne l’événement comme une victoire spirituelle du catholicisme sur l’arianisme. Pour lui, ce sacrement est un signe providentiel et un tournant majeur dans l’histoire religieuse de son temps.

Il lutte contre le nestorianisme, le semi-pélagianisme, et l’arianisme. Dans le contexte du schisme laurentin à Rome, il défend l’unité de l’Église catholique.

Il préside, avec Viventiole de Lyon, le concile d’Épaone en 517, qui marque un tournant disciplinaire dans l’Église en Gaule. Il y fait adopter des canons sur la moralité des clercs et introduit l’un des premiers textes hostiles aux Juifs, notamment l’interdiction de partager un repas avec eux.

Avit est également un homme de lettres : il compose des homélies, des traités de théologie, des poèmes, et environ cent lettres. Ces lettres reflètent une intense activité politique et pastorale et documentent de nombreuses tensions religieuses et diplomatiques du royaume burgonde.

Sa correspondance témoigne d’un monde instable, marqué par des conflits, des conversions, des rivalités ecclésiastiques, et un rôle renforcé des évêques comme médiateurs et diplomates.

Il meurt un 5 février entre 518 et 526, probablement en 518 selon la majorité des historiens, dont Duchesne et Descombes. Il est inhumé dans l’église Saint-Pierre de Vienne.

Avit est reconnu comme saint par les Églises catholique et orthodoxe. Il est fêté le 5 février (ou le 4 février selon certains calendriers diocésains), et son culte est particulièrement vivant en Dauphiné et en Savoie.

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Ennode de Pavie

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Ennode de Pavie (Magnus Felix Ennodius), né à Arles en 473/474 dans la famille aristocratique des Anicii, devient orphelin très jeune. Il est recueilli en Ligurie par une tante paternelle et fiancé à une fille d’une famille riche et pieuse.

Entré dans le clergé à la suite de sa rencontre avec Épiphane de Pavie, il participe dès 494 à des missions diplomatiques auprès du roi burgonde Gondebaud. Il est ordonné diacre vers 502 et devient évêque de Pavie en 514.

Il soutient activement le pape Symmaque pendant le schisme laurentien et rédige en 501 le Libellus pro Synodo, plaidoyer justifiant que seul Dieu peut juger un pape. Il participe aux conciles romains de 501 et 502.

Envoyé comme légat à Constantinople en 515 et 517 par le pape Hormisdas, il défend les positions de Rome dans le cadre du schisme d’Acace, et représente un point de contact actif entre Occident et Orient à un moment de fracture ecclésiale.

Ennode meurt le 17 juillet 521 à Pavie, où il est enterré. Il est reconnu saint par les Églises catholique et orthodoxe, et fêté le 17 juillet.

Son œuvre, d’une grande richesse littéraire, est marquée par une culture classique vivante, avec des références assumées à la mythologie, malgré les réticences chrétiennes. Elle comprend des lettres, des poèmes, des discours, des traités et des hagiographies.

Il laisse une correspondance importante qui éclaire les réseaux ecclésiastiques et aristocratiques de son temps, et révèle son engagement politique et doctrinal, notamment dans le renforcement de la primauté pontificale.

Dans ses Opuscula miscella, il rédige entre autres un panégyrique de Théodoric, une Vita Epiphanii, un traité autobiographique (Eucharisticon de vita sua), un manuel d’exhortation à l’étude (Paraenesis didascalica) et des critiques satiriques dans le style de la satire ménippée.

Ses Discours se répartissent entre allocutions religieuses, discours scolaires, exercices de rhétorique judiciaire (controversiae), et discours éthiques sous forme de prosopopées littéraires.

Ses Poèmes (carmina) comprennent des hymnes religieux, des itinéraires de voyage, des épigrammes funéraires, des textes liturgiques et des compositions d’inspiration classique, constituant un témoignage précieux de la culture poétique et spirituelle du haut Moyen Âge.

Ennode incarne la transition culturelle de l’Antiquité tardive au christianisme médiéval, unifiant formation rhétorique classique, engagement ecclésial et activité politique dans un contexte de recomposition religieuse et impériale.

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Fulgence de Ruspe

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Fulgence de Ruspe, né vers 462-467 à Thélepte en Byzacène (Afrique romaine), issu d’une famille noble de Carthage, reçoit une éducation bilingue (grec et latin) et devient procureur de la province avant de renoncer à la vie publique pour devenir moine à 22 ans, influencé par un sermon d’Augustin.

Il entre au monastère fondé par l’évêque exilé Faustus, puis rejoint celui de Félix. Persécuté par les autorités vandales ariens, il fuit avec ses compagnons, est brièvement emprisonné, puis libéré.

Il refuse plusieurs épiscopats avant d’accepter, en 508, celui de Ruspe, malgré les restrictions du roi vandale Thrasamund. Il est sacré par Victor de Vita, avec l’assentiment du pape Symmaque.

Peu après son élection, il est exilé en Sardaigne avec une soixantaine d’autres évêques catholiques africains. À Cagliari, il fonde un monastère et rédige des traités théologiques destinés à conforter les chrétiens orthodoxes africains.

En 515, il est convoqué à Carthage par Thrasamund pour débattre publiquement contre des théologiens ariens. Son traité Réponse à dix griefs synthétise ses arguments, tandis que les Trois livres au roi Thrasamund réfutent directement la position arienne.

Bien que respecté par Thrasamund, il est de nouveau exilé en Sardaigne en 520 à la demande du clergé arien. Ce n’est qu’en 523, sous le règne du catholique Hildéric, qu’il retourne à Ruspe.

Il réforme son diocèse, combat les abus, et déploie un ministère de prédication si puissant que l’évêque de Carthage, Boniface, loue publiquement son action.

À la fin de sa vie, il se retire dans un monastère de l’île de Circinia, mais revient à Ruspe où il meurt le 1er janvier 527 ou 533.

Son œuvre s’inscrit dans la lignée d’Augustin, dont il est l’un des continuateurs directs. Il combat vigoureusement l’arianisme, le pélagianisme et le semi-pélagianisme, en insistant sur la grâce divine et la prédestination.

Son traité De fide ad Petrum développe une christologie trinitaire solide et affirme avec clarté la procession du Saint-Esprit ex Patre Filioque, citant Jean 15,26 dans une perspective augustinienne.

Il est aussi l’auteur de sermons, d’épîtres, de controverses contre les ariens (Contra sermonem Fastidiosi Ariani), d’un De Trinitate ad Felicem notarium, d’un De incarnatione Filii Dei, et d’une Vita écrite par un témoin direct, peut-être Ferrand de Carthage.

Il rédige également une réfutation posthume du De gratia Dei et libero arbitrio de Fauste de Riez dans Contra Faustum Reiensem libri VII.

Sa fête est célébrée le 1er janvier (dies natalis), et la translation de ses reliques est commémorée le 6 mai. Ses écrits ont connu une postérité durable, notamment dans les controverses carolingiennes et scolastiques sur la grâce et la Trinité.

Canonisé et reconnu comme Docteur de la grâce en Afrique, il incarne la résistance intellectuelle et spirituelle du catholicisme africain sous domination vandale.

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Jean d’Ephèse

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Né vers 507 dans le district d’Ingila, au nord d’Amida, dans une famille syriaque.

Confié dès l’enfance à un moine stylite nommé Maron, puis entre à 15 ans dans le monastère de Jean l’Ourtéen près d’Amida, une communauté monophysite souvent persécutée.

Ordonné diacre en 529 par Jean de Tella, évêque monophysite actif dans l’ordination clandestine d’une hiérarchie dissidente face au pouvoir impérial.

Voyage entre 532 et 541 : se rend à Antioche, en Palestine, en Égypte, puis à Constantinople où il rencontre Jacques Baradée, futur fondateur de l’Église syriaque jacobite.

Subit avec sa communauté des persécutions répétées de la part des autorités chalcédoniennes (notamment Éphrem, patriarche d’Antioche), les contraignant à errer et à fonder de nouveaux monastères.

Reçoit en 542 de l’empereur Justinien une mission officielle de conversion des païens d’Asie Mineure à la foi chalcédonienne, malgré son orientation monophysite.

Affirme avoir converti 70 000 personnes, fondé 41 églises avec les convertis et 55 autres financées par l’État. Fonde un grand monastère près de Tralles, en Phrygie.

Détruit des sanctuaires païens, notamment celui des montanistes à Pépouza, où il fait exhumer et brûler les fondateurs de la secte, et incendie le site.

En 546, chargé d’enquêter sur les pratiques païennes parmi les élites de Constantinople. Recourt à la torture, provoque notamment le suicide de Phocas, ancien préfet du prétoire.

Se donne les titres de « Briseur des idoles » et « Instructeur des païens », illustrant son zèle religieux et son action violente contre le paganisme.

En 558, Jacques Baradée le consacre archevêque monophysite d’Éphèse. Il ne réside pas à Éphèse mais reste à Constantinople, où il devient chef de fait de la communauté monophysite après 566.

Participe à l’organisation d’une hiérarchie monophysite parallèle : consacre six autres évêques pour l’Asie Mineure, notamment Deutérius pour la Carie.

Subit les persécutions de l’empereur Justin II à partir de 571, est emprisonné sur ordre du patriarche Jean III le Scholastique, puis relâché.

En 576, désaccord ouvert avec Jacques Baradée autour de la stratégie d’union avec les chalcédoniens. Jean refuse tout compromis.

À partir de 580, vit caché, consacre clandestinement des évêques pour préserver l’organisation ecclésiastique monophysite.

Emprisonné de nouveau à Chalcédoine pendant un an. Meurt peu après 585, probablement à Constantinople.

Auteur des Vies des saints orientaux (58 hagiographies d’ascètes et moines de Syrie et de Mésopotamie, écrites vers 566-568) et d’une Histoire ecclésiastique en 3 parties (dont seule la troisième est conservée intégralement).

Son œuvre constitue une source précieuse pour l’histoire religieuse, les conflits doctrinaux et les persécutions dans l’Empire byzantin au VIe siècle.

Son Histoire ecclésiastique mêle narration historique et justification idéologique de la cause monophysite, marquée par une forte hostilité envers les chalcédoniens et les païens.

Figure essentielle du monophysisme syriaque et dernier grand historien de langue syriaque de l’Antiquité tardiv

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Martianus Capella

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Martianus Capella est un écrivain et théoricien du Ve siècle, probablement né à Carthage et actif dans la province romaine d’Afrique, autour de 360 à 428.

Son œuvre majeure, De nuptiis Philologiae et Mercurii (Les Noces de Philologie et de Mercure), est une encyclopédie allégorique divisée en neuf livres, mêlant prose et vers, écrite dans un style inspiré de la Satire Ménippée.

Ce texte met en scène l’union de Mercure, dieu des sciences, et de Philologie, une mortelle passionnée de savoir, élevée au rang divin. À cette occasion, sept jeunes filles représentant les arts libéraux sont offertes à Philologie comme demoiselles d’honneur.

Les sept arts libéraux sont divisés en deux groupes : le trivium (grammaire, dialectique, rhétorique) et le quadrivium (géométrie, arithmétique, astronomie, musique), chacun traité dans un livre spécifique par une allégorie féminine.

Le livre III, sur la Grammaire, présente une vieille femme égyptienne enseignant lettres, syllabes, mots, accords, verbes, avec une attention aux exceptions et à l’usage, tout en soulignant l’ennui provoqué chez les dieux par l’exposé.

Le livre IV, sur la Dialectique, combine deux approches : une figure allégorique inquiétante maniant des pièges logiques, et un contenu académique reprenant les catégories aristotéliciennes, les voix de Porphyre, les syllogismes et les sophismes.

Le livre V, sur la Rhétorique, met en scène une figure noble et charismatique, inspirée par Cicéron et Démosthène, et développe les cinq parties du discours, les figures de style et les erreurs oratoires, faisant du trivium un pilier de l’éducation médiévale.

Les livres VI à IX traitent du quadrivium, désigné comme science grecque, abordé en latin.

Le livre VI (Géométrie) est en réalité une géographie tirée de Pline et Solin, présentant les climats, reliefs, fleuves, dimensions et zones du monde connu.

Le livre VII (Arithmétique) propose un traité très développé : il mêle numérologie pythagoricienne, calculs numériques, classification des nombres (pairs, impairs, premiers), arithmétique élémentaire et considérations mystiques.

Le livre VIII (Astronomie) rend hommage aux Grecs (Ératosthène, Ptolémée), transmet une conception géo-héliocentrique d’Héraclide du Pont, et traite des orbites planétaires, saisons, éclipses, harmonie céleste. Copernic citera Martianus Capella.

Le livre IX (Harmonie) présente la musique comme art mystique, expose les tons et rythmes, et articule sons et mathématiques selon la tradition pythagoricienne et aristoxénienne.

Martianus adopte un style littéraire volontairement complexe, rempli de néologismes, d’hapax, d’images allégoriques et de vers variés. Ce style, qualifié d’obscur, vise une érudition qui rappelle Apulée, Lucien ou Varron.

Il revendique une inspiration par Satura, divinité de la satire ménippée, genre mêlant sérieux et grotesque (spoudogéloion), ce qui explique les changements de ton et les écarts dans l’unité doctrinale de l’ouvrage.

Philosophico-religieusement, Martianus s’inscrit dans une forme de réaction païenne face au christianisme, avec des références néoplatoniciennes, pythagoriciennes, théurgiques, et un intérêt pour l’etrusca disciplina.

L’ouvrage a eu une importance décisive au Moyen Âge : largement diffusé (plus de 240 manuscrits), corrigé en 534, il devient un manuel de référence dans les centres carolingiens (Saint-Gall, Laon, Auxerre).

Commenté par Jean Scot Érigène et d’autres, il influence les représentations allégoriques médiévales (arts libéraux), inspire Dante et les encyclopédistes (Alfonso de la Torre), et est traduit en vieux haut allemand.

Il fut une source majeure de transmission des savoirs antiques vers le Moyen Âge occidental, avant la redécouverte des textes grecs par le monde byzantin et arabe.

Aujourd’hui oublié du grand public, Martianus Capella reste essentiel pour comprendre la transition culturelle et intellectuelle entre Antiquité tardive et Haut Moyen Âge.

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Macrobe

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Macrobe (Flavius Macrobius Ambrosius Theodosius), né vers 370 à Sicca en Afrique romaine et mort après 430, est un haut fonctionnaire de l’Empire, probablement préfet du prétoire en 430, et membre de l’ordre sénatorial (vir clarissimus et illustris).

Il appartient à la mouvance aristocratique païenne cultivée du Bas-Empire et semble proche du cercle des Symmaques. Il est l’un des grands représentants de la « renaissance païenne » de la fin du IVe siècle.

Il est connu comme l’un des « passeurs » de la culture classique et de la philosophie antique vers le Moyen Âge, notamment sur les thèmes de l’âme, de l’ordre cosmique et de l’immortalité.

Ses deux œuvres majeures sont le Commentaire au Songe de Scipion et les Saturnales, deux textes qui ont eu une influence considérable sur la pensée médiévale.

Le Commentaire au Songe de Scipion commente un passage du De re publica de Cicéron. Il y développe une cosmologie néoplatonicienne, avec des réflexions sur l’âme, les sphères célestes, la musique des sphères, la géométrie du cosmos, la destinée posthume et la vie politique idéale.

Ce texte est l’un des piliers de la transmission de la philosophie platonicienne et néoplatonicienne en Occident latin, notamment via le concept d’harmonie céleste et d’immortalité de l’âme. Il influencera profondément les conceptions cosmologiques médiévales.

Les Saturnales sont un dialogue symposiaque dans la tradition du Banquet de Platon et des Deipnosophistes d’Athénée. Divers érudits y discutent des rites religieux romains, de la philologie, de la gastronomie, des bons mots, et surtout de la poésie de Virgile.

Le texte offre un vaste panorama de la culture littéraire et religieuse antique, ainsi qu’une défense du polythéisme lettré.

Il reflète un regard érudit sur la tradition romaine païenne au moment où celle-ci est contestée par la montée du christianisme.

La figure de Virgile y est magnifiée comme un poète prophétique, ce qui préfigure son rôle de guide spirituel chez Dante.

Macrobe s’inscrit dans la tradition néoplatonicienne (Plotin, Porphyre), qu’il adapte à un cadre latin. Il est souvent considéré comme l’un des penseurs qui ont permis au néoplatonisme de traverser l’Antiquité tardive pour rejoindre l’époque médiévale.

Son style, sobre et clair, contraste avec d’autres auteurs païens de la même époque (Claudien, Martianus Capella) et favorise sa réception durable dans les écoles et monastères.

Macrobe est un maillon essentiel dans la chaîne de transmission de la philosophie grecque antique, en particulier platonicienne, à l’Occident latin médiéval.

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Claudien

A

Claudien (Claudius Claudianus) est un poète latin d’origine grecque, né vers 370 à Alexandrie et mort vers 404 à Rome.

Il commence à écrire en grec avant d’apprendre le latin par la lecture des auteurs classiques.

Il devient poète officiel de la cour impériale à Milan, sous les règnes de l’empereur Honorius et de son général Stilicon, qu’il célèbre abondamment.

Il est païen convaincu dans un empire désormais largement christianisé : Augustin le qualifie d’« adversaire du nom du Christ », Orose de « païen très obstiné ».

Son style, influencé par la rhétorique grecque et le goût alexandrin pour l’ornementation, est caractérisé par sa vigueur, ses effets sonores et son utilisation raffinée de la langue latine.

Il compose plusieurs panégyriques politiques (ex. De Tertio Consulatu Honorii, De Consulatu Stilichonis, De Sexto Consulatu Honorii) célébrant les figures impériales et militaires.

Il rédige des poèmes historiques ou politiques : De Bello Gildonico (contre la révolte de Gildon en Afrique), De Bello Gothico (contre Alaric), ainsi que des libelles violents contre ses adversaires (In Rufinum, In Eutropium).

Il compose aussi des poèmes nuptiaux ou épithalames, notamment Fescennina pour le mariage d’Honorius, où il déploie un style cérémoniel classique.

Claudien se distingue également par ses poèmes didactiques comme De magnete ou De crystallo cui aqua inerat, qui témoignent d’un intérêt pour les phénomènes naturels, selon une tradition poétique antique.

Il est l’auteur de poèmes mythologiques comme De raptu Proserpinae (inachevé) et Gigantomachia, qui participent d’un effort pour renouveler la mythologie païenne dans une époque dominée par le christianisme.

Il appartient à une génération de lettrés païens qui, à travers la poésie, tentent de maintenir la culture classique vivante dans un monde où le christianisme prend l’ascendant.

Son œuvre, à la fois hommage au passé romain et tentative de s’insérer dans la politique impériale, constitue une source majeure sur les idéologies et tensions religieuses du tournant IVe–Ve siècle.

Claudien est l’un des derniers grands poètes latins de l’Antiquité, contemporain de Prudence (chrétien), et son œuvre illustre l’affrontement culturel entre le monde classique païen et l’Empire chrétien triomphant.