Les Personnages Du Drame Flashcards
Les personnages du drame
Les personnages d’On ne badine pas avec l’amour sont séparés en plusieurs
univers qui peinent à communiquer entre eux: les fantoches, grotesques
pantins qui incarnent le pouvoir, la religion, ‘argent; les jeunes amoureux,
Camille et Perdican; enfin le peuple, entité collective représentée par le
chœur, d’où se dégage la figure individuelle de Rosette.
Qu’appelle t on les fantoches ?
> Les « fantoches »
Les « fantoches », de fantoccio en italien, qui signifie « pantin » ou
« marionnette », constituent un quatuor de personnages.
maître Blazius neu titre Bridaine et dame Pluche - qu’un vice mora
un travers singulier et ridicule, détermine de façon caricaturale.
On appelle fantoches les personnages inconsistants et grotesques qui,
dans le théâtre de Musset, incarnent le monde des adultes. Ce sont des person-
nages types, des pantins réduits à une caractéristique physique et/ou
morale. Ils se comportent de manière mécanique, répétant souvent les
mêmes paroles et les mêmes actions, sans jamais évoluer. Leur rôle dans
l’intrigue est négligeable, ils servent surtout à mettre en valeur par contraste
la jeunesse, la liberté et le tempérament passionné des autres personnages.
Pourquoi le baron est il une figure d’autorité ridiculisée ?
LE BARON
Le Baron, qu’une seule lettre sépare du
« barbon» de la comédie
moliéresque
- cet homme âgé et aveugle
aux change-
ments de son temps - est un personnage
conscient de son importance et fier de sa
charge de financier. Préoccupé jusqu’à la
monomanie de l’établissement de sa descendance, il voit tous les
détails qu’il a arrêtés pour garantir le mariage de son fils et de sa
nièce être déjoués, dès l’instant de leurs retrouvailles. Mais le plus
drôle consiste sans doute dans les démêlés qui l’opposent à ses
subalternes. Dame Pluche cautionne les accès pudibonds de sa
nièce. Les informations que lui fournissent Blazius et Bridaine, loin
d’expliquer la déroute de son projet matrimonial, le plongent dans
perplexité croissante. Chaque nouvelle fâcheuse le conduit,
avec un savoureux comique de répétition, à se réfugier, déconfit,
dans son cabinet! De paterfamilias (nom latin donné au père de
amille qui exerçait une puissante autorité sur les membres de so
foyer) déterminé et confiant qu’il était au début, il se mue en un
bonhomme velléitaire et impuissant.
• Le baron est d’abord une figure de père. Mais, contrairement aux comédies traditionnelles, il n’est
en rien un obstacle au mariage
des deux héros, Camille et Per-
dican. Il y a dans ce personnage
des éléments du barbon ridicule
issu de la commedia dell’arte.
• Dans sa façon de s’exprimer, le baron a souvent des accents tragiques totalement inadaptés à la situation, qui créent une discordance comique.
Lors de sa dernière tirade, il part ainsi en annonçant:
«Je vais m’enfermer pour m’abandonner à ma douleur. Dites-lui, s’il me demande, que je suis enfermé, et que je m’abandonne à ma
douleur de le voir épouser une fille sans nom.» (II, 7)
Nommé « receveur » par le roi (I, 2), obsédé par les questions d argent, notamment par le fait que l’éducation des enfants lui a coûté six mille écus(1, 2), affectant la gravité et le sérieux, le baron incarne la société
les années 1830, que Musset le romantique reprouve de tout son être.
La comedia dell Arte
Comment Dame peluche incarne t elle une figure grotesque mais inquiétante
de la religion ?
DAME PLUCHE
Aux antipodes de cette truculence qui
évoque
Rabelais
et
Shakespeare,
dame Pluche incarne, quant à elle, une
vieille fille confite en dévotion et quelque
peu malmenée par l’indépendance de
caractère de sa pupille. Toujours en mou-
vement, qu’elle soit dépêchée en commission ou sur le point de
partir, elle
oppose sa nervosité acariâtre et instable à l’immobilisme
rassis des fantoches masculins. Mais son physique, tout en séche-
resse
et en maigreur anguleuse, rappelle par la déperdition vitale
dont il témoigne qu’elle est aussi une possible allégorie de la mort.
Dame Pluche, gouvernante de Camille, forme d’abord un duo avec Blazius, précepteur de Perdican: leurs fonctions sont similaires, ils font leur entrée en même temps. Ils sont opposés, donc complémentaires, d’un point de vue physique: elle est d’emblée présentée comme
osseuse et lui comme bedonnant.
• Dame Pluche forme aussi un duo avec Bridaine. Ce sont deux figures de
la satire traditionnelle du clergé. Mais si Bridaine, le curé goinfre et ivrogne,
incarne comiquement l’excès de nourriture et de vin, Pluche est plus in-
quiétante dans son incarnation de la privation, de la restriction et dans
sa ressemblance avec un squelette sur lequel plane l’ombre de la mort.
• Pluche est en effet l’une des cibles de la véhémence anticléricale de
Musset, qui oppose à cette vision morbide de la religion l’éloge du contact
avec la nature et l’amour de la vie.
En quoi Blazius et Bridaine sont deux figures parodiques du savoir ?
MAîTRE BLAZIUS
ET MAÎTRE BRIDAINE
Respectivement
gouverneur de Perdican
et curé de la paroisse, ils partagent, outre
leur dignité religieuse, une tendance mar-
quée à la goinfrerie, à l’ivrognerie et à la
cuistrerie.
Censés protéger les âmes de
leurs ouailles, ils sont également inca-
pables de démêler les sentiments des
jeunes gens qui s’ébattent sous leurs yeux.
Obsédés par la rivalité qui les oppose
quant aux faveurs du Baron, c’est à peine
s’ils discernent l’existence
d’un triangle
amoureux, qu’ils résument à un burlesque
quiproquo. D’un bout à l’autre de la pièce, ils évoluent dans une
espèce de royaume absurde, à mille lieues des subtilités psycholo-
giques et du ballet amoureux de leurs cadets.
• Blazius et Bridaine fonctionnent eux aussi en duo: c’est parce qu’ils
se ressemblent qu’ils sont si souvent en conflit. Chacun de ces deux
• Ce sont deux figures du savoir, mais d un savoir pédant: ils parlent tous
deux latin, et Blazius d’ailleurs critique les « solécismes» de Bridaine (I, 5).
Mais Ils incarnent surtout la bassesse morale: ils s empressent en effet
continuellement aupres du baron pour s accuser mutuellement ou pour
rapporter le moindre fait suspect, comme la correspondance de Lamille.
abbés a cependant sa particularité.
• Bridaine est un curé de village, il s’entend bien avec le baron qui lui
garde la place d’honneur à sa table (jusqu’à la scène 2 de l’acte Il).
• Blazius, nom dont la sonorité finale évoque le latin, est précepteur et
a un statut plus élevé que
versité de Paris
Bridaine. Il incarne pédantisme, la prétention, en se réclamant de la « sainte
Université de Paris» (III, 2).
L’université de Paris
L’université de Paris, créée au Moyen Âge,
avait vocation à former les futurs religieux.
en se réclamant de la
On y enseignait la philosophie et la théologie.
Elle fut abolie après la Révolution française.
Rapport de Perdican et Camille aux fantoches
• Le contraste entre les deux jeunes héros se manifeste, dès le début de la
pièce, dans leur rapport aux fantoches. Camille suit docilement Pluche sur
la voie de la religion et de la vertu et admire le portrait de sa grand-tante
Isabelle dans son costume religieux; tandis que Perdican, admirant un hélio-
trope, refuse de se livrer à l’exposé pédant que réclame Bridaine (I, 2).
• D’emblée, l’opposition est posée entre celui qui est resté, malgré le savoir
acquis, proche de la nature et de l’enfance et celle qui, sous l’influence de
la religion, s’est enfermée dans un monde sans vie et sans joie.
Perdican, l’éloge de la nature et la célébration de l’amour
PERDICAN
Récemment couronné du titre de docteur,
Perdican est un jeune noble de 21 ans qui
retrouve avec bonheur le havre de son
enfance. Son retour au château est célébré
par tous, y compris par les humbles pay-
sans du chœur dont il a su rester proche,
malgré son érudition. Contrairement à Camille, il n’accorde aucun
prix à la religion: sa philosophie de vie se résume à un épicurisme
raisonnable, qui le dispose à jouir des bonheurs de la nature et du
moment présent. Insouciant et libertin, il reconnaît avoir eu plu-
sieurs maîtresses mais n’en voue pas moins un culte sincère à
l’amour, cette « chose sainte et sublime » (II, 5, p. 87, I. 492-493).
Son expérience ne le préserve, toutefois, ni des erreurs de la jeu-
nesse ni des pièges que lui tend Camille. Croyant mener le manège
de la séduction, il se laisse prendre aux manœuvres de sa cousine
et confond les ressorts de l’amour-propre et la mécanique du dépit
amoureux avec les élans du cœur. Avec Rosette, il s’entête dans
l’aventure galante, jusqu’à promettre le mariage, et confond la fran-
chise d’une attirance avec la profondeur d’un engagement.
À l’instar d’un vrai héros romantique, il semble déchiré entre son
aspiration à un idéal et la réalité des circonstances. S’il finit par
découvrir la vérité de ses sentiments, ce n’est qu’à la faveur d’un
examen de conscience tardif, et après avoir commis d’irréparables
faux pas.
• Perdican est un jeune aristocrate qui vient tout juste d’avoir vingt et un ans
revient dans son village, empli de nostalgie, désireux de retrouver le monde
d’autrefois, comme si le temps ne s’était pas écoulé.
• Au fil de la pièce, un trait de caractère l’emporte, l’orgueil, qui le conduit
à agir de manière insensible pour se venger de ce qu’il imagine être un
affront de Camille: il utilise Rosette en lui promettant le mariage et l’amour
éternel. Son rôle de séducteur, qui le rapproche d’un personnage comme
Dom Juan, le rend plus ambivalent sur le plan moral, moins idéalisé, plus
complexe.
Camille, l’oubli de la nature et la mise à distance
de l’amour
CAMILLE
Âgée de 18 ans, Camille présente les
caractéristiques d’un type féminin bien
connu : la jeune première, douée de tous
les agréments - la naissance, la beauté et
l’éducation - au moment critique de son
entrée dans le monde. Son intelligence et
délicatesse lui font sentir l’hypocrisie de certains usages entre
hommes et femmes.
Pétrie d’idéalisme, elle rêve d’un amour sans
tache et répugne à toute compromission. Mais sa coquetterie la
rend vulnérable aux pièges de la galanterie. Une preuve d’indiffé
rence, la préférence marquée pour une autre, stratagème dont elle
soupçonne pourtant le calcul, ont bien vite raison de ses prudes
résolutions et de son projet de retraite spirituelle. Trop occupée à
mettre à l’épreuve la sincérité de son prétendant, elle ne se défie
pas assez des mouvements de son amour-propre et se laisse aller à
une surenchère de défis et de provocations. Son originalité foncière
réside moins dans les traits, mélangés, de ce caractère, que dans la
force avec laquelle elle l’exprime. Deux moments incarnent parti-
culièrement l’aisance verbale et l’habileté raisonneuse du person-
age : interrogatoire qu’elle fait subir à Perdican suivi du récit
édifiant de soeur Louise, à l’acte II, scène 5, et le stratagème qu’elle
met en place pour démasquer l’inconséquence amoureuse de
Perdican (III, 6).
• Camille, âgée de dix-huit ans, est, au contraire de Perdican, dépourvue
de nostalgie, en apparence du moins: elle veut quitter le village pour
retourner au couvent. Elle semble avoir oublié leur enfance commune
et n’apprécie plus les joies simples et naturelles.
176 • On ne badine pas avec l’amour
qu’elle sache que Perdican fait semblant, par dépit, d’aimer Rosette, elle
le presse au debut d’epouser la jeune paysanne. Sous linfluence des
l’amour qu’elle ressent.
sœurs du couvent, elle a perdu toute capacité à accepter et exprimer
Le chœur témoin du drame
• Le chœur représente le peuple, raison pour laquelle il est résolument du
côté de Perdican, un garçon du pays demeuré proche de la nature et des
joies simples. Au début de la pièce, le chœur reste à l’écart de l’action dont
il est le simple témoin. Se moquant des fantoches dans les scènes 1 et 3
de l’acte l, il se réjouit du retour de l’enfant du pays dans la scène 4.
• En introduisant un chœur dans la pièce, Musset reprend une tradition
du théâtre antique. Cela est flagrant dans la scène 4 de l’acte Ill où cette
présence ajoute une tonalité tragique à l’action: le chœur antique a bien
souvent pour fonction d’annoncer l’issue fatale de l’histoire.
Rosette, de paysanne de comédie à héroïne de tragédie
• Sœur de lait de Camille, Rosette est une paysanne naïve. Elle incarne,
dans l’acte l, une version positive de Camille, restée dans le monde de l’en-
fance, hors de l’emprise de la religion. Dans l’acte Ill, elle est victime des
manœuvres de séduction de Perdican, suscitées par l’orgueil et la jalousie.
• Mais Rosette n’est pas un simple personnage secondaire. L’enjeu essentiel
de la pièce vient progressivement reposer sur elle. Sa mort, à la fin de la
dernière scène, fait d’elle le véritable obstacle à l’amour de Camille et de
Perdican et la transforme en héroine tragique. L’amour avec lequel il ne faut
pas badiner n’est pas l’amour de Camille et de Perdican mais celui de Rosette.
• Une critique sociale vient teinter ce dénouement pour le rendre encore
plus poignant: Camille et Perdican sont deux aristocrates qui s’amusent à
jouer avec leurs sentiments, mais Rosette est une fille du peuple pour qui le
badinage amoureux implique le déshonneur et la mort. Pour elle, bien plus
que pour Camille et Perdican, l’amour est une question de vie ou de mort.
ROSETTE
À mi-chemin entre la bergère de la pasto-
rale - genre littéraire qui dépeint
sous un
jour idéal les mœurs et les amours des ber-
gers - et la paysanne de comédie, la can-
dide Rosette est un personnage discret
mais
essentiel sur le plan dramatique.
Instrument de la fatalité autant qu’elle en est la victime, elle scelle
le sort des deux héros en perdant la vie au dénouement. Manipulée
tour à tour par Perdican, pour rendre Camille jalouse, puis par
Camille, pour confondre Perdican dans son mensonge, elle semble
répondre aux seules nécessités de l’intrigue. Mais son honnête
caractère
et ses
paroles parcimonieuses suscitent néanmoins
l’empathie du lecteur. Si son infériorité sociale la fait douter de son
bonheur au début de sa relation avec Perdican, elle finit par se lais-
ser prendre aux serments d’amour du jeune homme. Elle incarne la
pureté première des sentiments et l’innocence des élans du cœur, par contraste avec les calculs de l’orgueil et les manœuvres
galanterie.
• Sans cette ise›blesse naturelle du personnage, l’émotio
tragique causée par sa mort à la fin de la pièce aurait pu être
contreusement éclipsée par un sentiment d’invraisemblance.