Cours 1 - Évaluation : acte professionnel et approche scientifique

Question 1

Qu’est-ce que l’évaluation?

Answer 1

Évaluation : C’est l’action d’évaluer, de déterminer la valeur ou l’importance (d’une chose). (Petit Robert)

Évaluer : Porter un jugement sur la valeur (d’une chose). (Petit Robert)

Question 2

Pourquoi, en psychoéducation, l’acte d’évaluation est lourd de conséquences?

Answer 2

C’est lourd de conséquences, puisque vous portez un jugement sur une personne, ses limites et ses forces, son potentiel adaptatif, son avenir, sa famille, etc.

Question 3

Quelle place occupe l’évaluation en psychoéducation, et en sciences sociales plus généralement?

Answer 3

L’évaluation occupe (ou devrait occuper) une place centrale.

Pour plusieurs experts, l’évaluation est indissociable de l’intervention.

Question 4

Ne pas évaluer avant d’intervenir constitue quel type de problème?

Answer 4

C’est un problème éthique.

Question 5

Dans la réalité, quelle est la place accordée à l’évaluation? Quels sont les problèmes observés?

Answer 5

-Peu de temps est dévoué à l’évaluation
-Très peu de cliniciens évaluent les effets de leurs thérapies/interventions
(sondages auprès de psychologues)

Les psychologues basent beaucoup leurs pratiques sur leur «sens clinique».

En psychoéducation : trop peu d’évaluation et elle est trop souvent effectuée de façon négligée (instruments non validés au Québec, non respect du protocole d’administration, etc.)

Question 6

Pourquoi le rapport d’évaluation clinique est l’exemple parfait de l’importance de l’évaluation?

Answer 6

-Il reste associé à vous pour la postérité :
Un rapport d’évaluation daté et signé est un acte professionnel qui vous sera attribué pour toute votre carrière.

-Peut avoir des implications légales :
Maintenant qu’il y a un ordre professionnel, vous pourriez même être poursuivi pour le contenu d’un rapport d’évaluation.

Question 7

Quel acte est au coeur même du travail de psychoéducation?

Answer 7

L’évaluation.

“L’exercice de la psychoéducation consiste à évaluer les difficultés d’adaptation et les capacités adaptatives, à déterminer un plan d’intervention, à en assurer la mise en œuvre, à rétablir, à développer les capacités adaptatives de la personne et à contribuer au développement des conditions du milieu dans le but de favoriser l’adaptation optimale de l’être humain en interaction avec son environnement.” (gvt du qc)

Question 8

Quelle est la définition de l’évaluation selon l’OPPQ?

Answer 8

L’évaluation consiste en la description, l’analyse et l’interprétation d’une situation ou d’un phénomène en vue de fournir des données utiles à la prise de décision dans la poursuite d’un objectif ou d’un but.

Question 9

L’évaluation amène le psychoéducateur à poser … sur la situation d’une personne?

Answer 9

L’évaluation exige que le professionnel pose un jugement sur la situation d’une personne à partir des informations dont il dispose.

Question 10

Quelles sont les 3 étapes de l’évaluation selon l’OPPQ?

Answer 10

1) une étape de collecte de données visant à décrire et à comprendre la situation problématique.
2) une étape d’analyse des données dans le but de dresser un bilan clinique.
3) une étape de communication qui inclut généralement la rédaction d’un rapport et/ou un exposé dans une équipe multidisciplinaire.

Question 11

Les professionnels de l’intervention psychosociale sont de plus en plus poussés vers l’adoption d’une pratique basée sur quoi?

Answer 11

Basée sur l’évidence empirique («evidence-based practice», «empirically-supported treatment», «blueprint», etc.), sur les données probantes ou sur les preuves.

Question 12

L’utilisation de données probantes a été surtout recommandée pour quel acte professionnel?

Answer 12

L’intervention

Question 13

L’utilisation de données probantes devrait aussi être utilisé pour quel autre acte professionnel?

Answer 13

Le processus d’évaluation

Question 14

Pour être pris au sérieux comme discipline, la psychoéducation doit adopter une approche basée sur l’évidence empirique pour tenter de résoudre quels (3) problèmes?

Answer 14

1) Problèmes dans la valeur scientifique des méthodes et instruments d’évaluation employés (i.e., propriétés psychométriques)
2) Problèmes dans la sélection des instruments (ex. encore utilisation des mesures projectives pour déterminer garde légale d’un enfant ?)
3) Problèmes dans l’interprétation des données cliniques tirées d’un instrument

Question 15

L’évaluation basée sur l’évidence empirique sous-tend 3 principes importants. Quel est le 1er?

Answer 15

1) Les théories du développement normal et de psychopathologie développementale ainsi que les recherches scientifiques doivent guider la sélection des construits à être évalués ainsi que les méthodes d’évaluation à utiliser.

Question 16

L’évaluation basée sur l’évidence empirique sous-tend 3 principes importants. Quel est le 2e?

Answer 16

2) Des mesures avec de bonnes propriétés psychométriques doivent être utilisées.

Question 17

L’évaluation basée sur l’évidence empirique sous-tend 3 principes importants. Quel est le 3e?

Answer 17

3) Tout le processus d’évaluation clinique (i.e., (a) sélection des instruments, (b) utilisation des instruments, (c) interprétation des données tirées des instruments, (d) communication des résultats) devrait être explicitement justifié afin que les pairs professionnels (ou la population) puissent porter un jugement critique sur la démarche d’évaluation.

Question 18

Comment la théorie guide l’intervention?

Answer 18

Elle propose les facteurs qui devraient être changés ou modifiés, les médiateurs de l’intervention, etc.

Question 19

Comment la théorie devrait aussi guider l’évaluation?

Answer 19

Elle propose les facteurs qui devraient être évalués.

Question 20

Comme professionnels, nous devons connaître des instruments pour l’évaluation de… ?

Answer 20

1) Individus (il en existe plusieurs, même probablement trop)
2) Groupes (il en existe quelques uns, mais somme toute peu)
3) Nature et qualité de l’intervention (il en existe très peu)

Question 21

Selon Gendreau (2001) et Renou (2005), l’évaluation est une opération professionnelle qui accompagne le processus d’intervention à quel moment?

Answer 21

Tout au long de sa séquence.

Question 22

Une évaluation doit se situer quand par rapport à l’intervention?

Answer 22

Une évaluation doit toujours précéder une intervention.

Question 23

Quelles sont les conséquences de ne pas évaluer avant d’intervenir?

Answer 23

• Comment savoir sur quoi intervenir?
• Comment savoir si les choses ont réellement changées, donc si notre intervention est efficace?
• Si elle a des effets iatrogènes?

Question 24

Au Québec, quels instruments étaient traditionnellement utilisés en psychoéducation?

Answer 24

• Consultation des rapports existants et des observations directes dans le milieu
• Grilles d’observation «maison» (e.g., cahier de bord, etc.)
• Discussions de cas entre intervenants, informelles ou en équipe

Question 25

Est-ce que les choses ont beaucoup changé en matière d’évaluation au Québec?

Answer 25

Elles n’ont pas beaucoup changé au Québec pendant 25-30 ans, mais on constate une amélioration, particulièrement avec le PL 21.

Question 26

Nommez des améliorations à la profession/l’évaluation depuis les 10 ou 15 dernières années?

Answer 26

• Instruments développés dans le cadre de recherches évaluatives (e.g., évaluation de Boscoville) ou longitudinales (e.g., GRIP)
• Exigences éthiques/déontologiques plus strictes (OCCOPPQ, maintenant OPPQ)
• Développements législatifs (ex. PL 21)
• Reconnaissance accrue de l’importance d’évaluer la nature et l’efficacité de nos interventions
• Efforts de traduction et d’adaptation d’instruments en français

Question 27

Qu’est-ce les commissions gouvernementales rappellent constamment, depuis au moins 35 ans?

Answer 27

La nécessité de faire de l’évaluation.

(Rapports Batshaw (1975), Charbonneau (1982), Harvey (1988), Jasmin (1992), Gendreau-Tardif (1999) et Cliche (1998) formulent tous des recommandations plus ou moins spécifiques concernant l’évaluation des enfants et des adolescents en difficulté)

Question 28

Est-ce que les 2 lois relatives à la jeunesse en difficulté (LPJ, LSJPA) détaillent bien la place de l’évaluation dans le processus d’intervention?

Answer 28

Non, les 2 lois sont très évasives concernant l’évaluation

Question 29

Quel est le mode de fonctionnement des Centres jeunesse au Québec quant à l’évaluation?

Answer 29

Les Centres jeunesse au Québec ne proposent généralement pas aux intervenants des protocoles d’entrevues ou des instruments standardisés à utiliser de façon systématique.

Les intervenants disposent donc seulement de leur «protocole d’évaluation personnel», qu’ils appliquent plus ou moins systématiquement.

Question 30

Pourquoi est-ce que certains milieux, comme les Centres jeunesse, ne donnent pas de protocoles d’entrevue?

Answer 30

Une des raisons est qu’on manque d’instruments d’évaluation en français développés et validés selon des critères scientifiques rigoureux.

Question 31

Les questionnements reliés à l’évaluation des individus et la prédiction des comportements remontent à quelle époque?

Answer 31

• Fonctionnaires de l’empire chinois (1er Empire Chin) évaluaient les individus pour sélectionner les dirigeants militaires et ceux qui travailleraient pour l’empereur
• Philosophes de l’Antiquité et de la Renaissance tentaient d’évaluer le tempérament

Question 32

À quelle époque débute l’évaluation dite «standardisée»?

Answer 32

À la fin du 19e et au début du 20e siècle par l’évaluation de l’intelligence (capacités cognitives).

Question 33

L’évaluation faite à la fin du 19e et au début du 20e siècle (évaluation de l’intelligence/capacités cognitives) a été réalisée par qui et pour qui?

Answer 33

• Travaux de Binet pour identifier les enfants déficients mentaux
• Travaux de Galton et Cattell pour les capacités cognitives (intelligence)

Question 34

Au 20e siècle, l’évaluation de la personnalité a servi surtout dans quels contextes?

Answer 34

Pour les recrues et les hauts gradés des forces armées et pour les organisations de travail

Question 35

Les méthodes d’intervention, pour avoir une certaine rigueur scientifique, doivent respecter quels critères?

Answer 35

• Leur efficacité démontrée empiriquement

- L’absence d’effet délétères (ou iatrogènes) doit être démontrée («primum non nocere»)

Question 36

Pour qu’un phénomène ou un construit soit dit «scientifique», il doit pouvoir être mis à l’épreuve par la méthode scientifique. Quelles sont les 3 conditions à remplir pour que ce soit possible?

Answer 36

Le phénomène ou le construit doit être :

• mesurable
• vérifiable
• reproductible

Question 37

Qu’est-ce qu’un “construit”?

Answer 37

Les construits sont des entités dont on croit à l’existence dans la nature (i.e., on croit que ça existe vraiment), mais qu’on ne peut mesurer directement.

C’est une «entité abstraite, hypothétique, qui est inférée à partir d’un ensemble de choses directement observées (e.g., pensées, émotions, comportements)» (Raykov & Marcoulides, 2011).

Question 38

Par quelle autre expression appelons-nous les “construits”?

Answer 38

«Construit latent» ou «trait latent».

Ex.: On croit à l’existence de la dépression, mais on ne peut pas mesurer «ça» directement (c’est latent), il faut poser des questions sur l’humeur, le sommeil, l’alimentation, les pensées suicidaires, etc. (observés)

Question 39

Les construits, qu’ils soient dans les sciences physiques ou psychologiques, sont souvent basés sur quoi?

Answer 39

Ils sont souvent basés sur une théorie de ce qu’on pense de l’univers dans lequel on vit ou sur des faits qui ont été observés.

Ex.: en astrophysique (où les chercheurs font des prédictions largement plus fiables qu’en psychologie ou même en médecine) on étudie les supernovas, les trous noirs, etc.

Question 40

Si on veut que les construits soient dits «scientifiques», il faut respecter quels critères?

Answer 40

• pouvoir les mesurer adéquatement (validité) et de façon fiable (fidélité)
• pouvoir les mettre à l’épreuve empiriquement de façon répétée – implique donc une grande rigueur